AFFAIRES ÉTRANGÈRES, DÉFENSE ET FORCES ARMÉES

Table des matières


Mercredi 17 novembre 1999

- Présidence de M. Xavier de Villepin, président -

Nomination d'un rapporteur

La commission a d'abord procédé à la nomination d'un rapporteur. Elle a désigné M. Robert Del Picchia comme rapporteur sur les projets de loi n° 48 (1999-2000), autorisant la ratification du protocole établi sur la base de l'article K. 3 du traité sur l'Union européenne, relatif au champ d'application du blanchiment de revenus dans la convention sur l'emploi de l'informatique dans le domaine des douanes et à l'inclusion du numéro d'immatriculation du moyen de transport dans la convention, n° 49 (1999-2000), autorisant la ratification de la convention établie sur la base de l'article K. 3 du traité sur l'Union européenne, sur l'emploi de l'informatique dans le domaine des douanes, n° 50 (1999-2000), autorisant la ratification du protocole, établi sur la base de l'article K. 3 du traité sur l'Union européenne, concernant l'interprétation, à titre préjudiciel, par la Cour de justice des Communautés européennes de la convention sur l'emploi de l'informatique dans le domaine des douanes et n° 51 (1999-2000), autorisant la ratification de l'accord relatif à l'application provisoire entre certains Etats membres de l'Union européenne de la convention établie sur la base de l'article K. 3 du traité sur l'Union européenne sur l'emploi de l'informatique dans le domaine des douanes.

Organisme extraparlementaire - Conseil d'administration de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger. Désignation d'un candidat

La commission a ensuite désigné M. Paul d'Ornano comme candidat proposé à la nomination du Sénat pour siéger au sein du conseil d'administration de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger.

Projet de loi de finances pour 2000 - Affaires étrangères - Aide au développement - Examen du rapport

La commission a ensuite poursuivi l'examen de ses rapports pour avis sur le projet de loi de finances pour 2000. M. Xavier de Villepin, président, a rappelé que le vote de la commission sur l'ensemble des budgets de la défense d'une part, et des affaires étrangères d'autre part, n'aurait lieu qu'à l'issue de l'audition de tous ses rapporteurs pour avis.

La commission a alors examiné le rapport pour avis de Mme Paulette Brisepierre sur les crédits du ministère des affaires étrangères inscrits dans le projet de loi de finances pour 2000 (aide au développement).

Mme Paulette Brisepierre, rapporteur pour avis, a d'abord observé que la progression du budget des affaires étrangères, en 2000, avait été obtenue au prix d'une nouvelle compression des crédits destinés à l'aide au développement, dont le montant reviendrait à 4,7 milliards de francs, soit une réduction de 6,2 % par rapport à 1999. Elle a relevé en conséquence que les pays africains, principaux destinataires de l'aide au développement, ne bénéficiaient plus d'un effort financier prioritaire. Elle a souligné, à cet égard, trois évolutions préoccupantes.

En premier lieu, elle a noté que la mise en place de la réforme de la coopération avait entraîné beaucoup de retard au cours de l'année 1999 dans le financement des projets d'aide au développement. Elle a ajouté que la nouvelle organisation de la direction générale de la coopération internationale et du développement (DGCID) qui superposerait l'intervention d'au moins deux services (un service sectoriel et un service coordonnateur) ne permettrait pas de raccourcir les délais, déjà trop longs, d'instruction des dossiers.

Le rapporteur pour avis a indiqué, en second lieu, que la création d'une zone de solidarité prioritaire (ZSP) n'avait pas eu véritablement de traduction budgétaire : au contraire, alors même que la zone des pays bénéficiaires de notre aide s'était étendue à 23 nouveaux pays, le total des crédits baissait, contrairement à toute logique. Elle a ainsi souligné que les concours financiers se réduisaient de 40 % et que les crédits du fonds de solidarité prioritaire demeuraient la cible privilégiée des annulations de crédits : 7,3 % des crédits de paiement ouverts par le budget de l'année 1999 avaient été ainsi annulés afin de financer l'aide au Kosovo.

Le rapporteur pour avis a enfin relevé que les crédits réservés à l'assistance technique se réduiraient encore de 9,2 % en 2000 et que 40 postes seraient supprimés. Mme Paulette Brisepierre s'est demandé si cette évolution n'augurait pas une fin programmée de notre assistance technique et un alignement de la coopération française sur les modes d'intervention des autres bailleurs de fonds, alors même que l'action des assistants techniques répondait aux attentes de nos partenaires africains, ouvrait la voie à l'implantation d'entrepreneurs français et constituait l'un des meilleurs vecteurs de la francophonie.

Mme Paulette Brisepierre, rapporteur pour avis, s'est alors interrogée sur la signification de l'évolution de l'aide au développement au regard des priorités de notre action diplomatique : elle a estimé qu'une " banalisation " de la place de l'Afrique serait une erreur dans la mesure où la France ne pouvait disperser ses moyens sur un trop grand nombre de pays sans diluer son influence. Elle a d'abord justifié la priorité qui, à ses yeux, doit encore s'attacher à l'Afrique, par les progrès économiques accomplis par les pays de la zone franc. Elle a relevé, en effet, que la zone franc avait connu, en 1998, un taux de croissance estimé à 5,5 % par le FMI, alors même que les pays en développement avaient enregistré l'an passé le plus faible taux de croissance depuis la crise de la dette des années 80. Elle a ajouté que ces résultats, au-delà des évolutions conjoncturelles, reposaient sur d'importantes réformes structurelles et a estimé qu'il serait, dès lors, particulièrement regrettable de se désengager au moment où les efforts de la France commençaient à porter leurs fruits.

Mme Paulette Brisepierre, rapporteur pour avis, a indiqué, en outre, que l'influence de la France constituait un élément essentiel de notre rayonnement international et un atout indéniable pour notre diplomatie. Elle a par ailleurs souligné que nos liens avec l'Afrique reposaient également sur la présence d'une communauté française forte de quelque 150.000 personnes dont les intérêts n'avaient pas toujours été pris en compte par les pouvoirs publics. Elle a cité, à cet égard, le cas des pensions des retraités français ou de l'indemnisation de nos compatriotes victimes d'événements politiques où ils n'avaient aucune part. Elle a estimé que, de manière générale, l'aide apportée par la France souffrait de trop de lenteurs et de retards et que cette inertie pouvait produire des effets irréversibles.

Mme Paulette Brisepierre, rapporteur pour avis, a jugé que la place de l'Afrique dans notre politique étrangère devait s'apprécier sur le moyen et long terme. Elle a rappelé que le continent africain compterait 1,25 milliard d'habitants en 2025, soit 18 % de la population mondiale.

Le rapporteur pour avis a conclu en soulignant que le budget pour 2000 confirmait certaines des appréhensions suscitées l'an passé par la réforme de la coopération : la fusion des administrations pouvait ouvrir la voie à une marginalisation de l'aide au développement. Indiquant toutefois qu'il conviendrait de se prononcer sur l'ensemble des crédits des affaires étrangères, Mme Paulette Brisepierre, rapporteur pour avis, s'en est remise à l'avis de la commission sur le vote de l'ensemble de ce budget.

A la suite de l'exposé du rapporteur pour avis, M. Christian de La Malène s'est étonné que la création de la zone de solidarité prioritaire et l'élargissement du nombre de pays bénéficiaires de notre aide ne soient pas accompagnés d'une augmentation concomitante des crédits consacrés à l'aide au développement. Mme Paulette Brisepierre, rapporteur pour avis, a confirmé que l'extension de la zone de solidarité prioritaire risquait, en effet, d'entraîner une dilution de notre influence.

M. Xavier de Villepin, président, a déploré la difficulté de comparer les dotations consacrées à la coopération d'une année sur l'autre en raison des modifications de nomenclature budgétaire introduites par la réforme. Il s'est par ailleurs demandé si la baisse des crédits dévolus à l'Afrique subsaharienne n'avait pas eu pour contrepartie une réévaluation de l'aide apportée aux pays du Maghreb. Enfin, il s'est étonné de l'absence du Bangladesh sur la liste des pays de la zone de solidarité prioritaire et a regretté la suppression de protocoles financiers destinés à ce pays.

M. Guy Penne a observé que la fusion des administrations n'avait pas favorisé la lisibilité du budget consacré à l'aide au développement. Il a également estimé que l'introduction de nouveaux pays, tels que le Bangladesh, dans la zone de solidarité prioritaire, pourrait entraîner une certaine dispersion des moyens. Il a par ailleurs remarqué que la baisse de la dotation affectée à l'aide au développement avait en partie bénéficié à la coopération culturelle au sein du budget des affaires étrangères.

M. Michel Caldaguès a estimé que la commission devait obtenir du Gouvernement une évaluation comparative précise des crédits consacrés à la coopération sur la période 1998-2000.

M. Hubert Durand-Chastel s'est inquiété des risques de " saupoudrage " de l'aide au développement et a jugé le budget des affaires étrangères insuffisant à l'heure de la mondialisation.

M. Xavier de Villepin, président, a fait observer une certaine corrélation entre l'absence de clarté des crédits dévolus à l'aide au développement et la réduction des moyens dans ce domaine en 2000.

M. Daniel Goulet a regretté que l'insuffisance des moyens consacrés à la formation entraîne un certain effacement de la France dans les pays traditionnellement bénéficiaires de notre aide.

Mme Paulette Brisepierre, rapporteur pour avis, s'est également inquiétée d'un affaiblissement progressif de l'influence française. Elle a regretté l'opacité de la présentation retenue pour le budget de la coopération et cité, à cet égard, les crédits réservés à l'assistance technique, qui comptabilisaient désormais les seules rémunérations, sans prendre en compte le nombre de coopérants. Elle s'est félicitée, en revanche, de l'effort accompli par l'agence française de développement (AFD) et par sa filiale la PROPARCO, en particulier dans les pays du Maghreb.

M. Guy Penne s'est inquiété des conditions de l'exercice du contrôle parlementaire, s'agissant des crédits de l'aide au développement délégués à l'AFD. Avec M. Xavier de Villepin, président, il a suggéré que le directeur de l'AFD puisse être entendu par la commission.

Mme Paulette Brisepierre, rapporteur pour avis, a enfin regretté qu'une politique restrictive de visas et l'insuffisance des bourses conduisent beaucoup d'élèves étrangers, qui avaient bénéficié d'une aide de la France au cours de leur scolarité, à se tourner vers d'autres pays pour poursuivre des études supérieures. La France, a-t-elle ajouté, perdait ainsi le bénéfice de l'investissement non négligeable accompli en matière de formation.

Mission d'information - Situation en Moldavie - Compte rendu

Puis la commission a entendu le compte rendu d'une mission effectuée par une délégation de la commission, composée de MM. André Dulait, André Boyer et André Rouvière, en Moldavie du 4 au 8 octobre 1999.

Evoquant d'abord la chute du Gouvernement moldave intervenue le mardi 9 novembre dernier, M. André Dulait a observé que cette nouvelle crise politique traduisait l'instabilité politique à laquelle la Moldavie, comme beaucoup d'anciennes républiques de l'URSS, se trouvait désormais confrontée. Il a estimé que la situation dans ce pays constituait ainsi un indicateur précieux de l'évolution d'une zone dont la stabilité importait beaucoup à la sécurité européenne.

Après avoir rappelé que la délégation de la commission avait pu rencontrer les principales personnalités politiques du pays, au premier chef, le Président de la République, M. Lucinschi et le Premier ministre aujourd'hui démissionnaire, M. Sturza, il a relevé que les entretiens avaient porté principalement sur trois thèmes : la situation de la province sécessionniste de Transnistrie, la crise économique, et la volonté d'ouverture vers l'Europe.

M. André Dulait a alors rappelé les caractéristiques générales de la Moldavie, pays agricole, enclavé entre l'Ukraine et la Roumanie, dont la population comptait quelque 4,3 millions d'habitants, en majorité roumanophones mais avec une forte minorité de russophones concentrés surtout dans les villes. Il a également relevé que la Moldavie avait perdu la maîtrise de son destin au XVIème siècle et que, de la fin de la deuxième guerre mondiale jusqu'en 1990, date à laquelle il avait proclamé son indépendance, le pays était resté sous la coupe de l'Union soviétique.

M. André Dulait a alors abordé la question de la Transnistrie : après l'indépendance de la Moldavie, cette province, qui représente 12 % du territoire moldave et compte 750.000 habitants à majorité russophone, avait, avec le soutien de Moscou, proclamé son indépendance. Cette crise, a-t-il estimé, emportait de lourdes conséquences pour la Moldavie, dans la mesure où la province sécessionniste concentrait 36 % de la production industrielle du pays, et où elle apparaissait comme le foyer de nombreux trafics, notamment en raison de la grande quantité d'armes stockées sur son territoire. Il a observé que, si la Transnistrie ne bénéficiait d'aucune sorte de reconnaissance internationale, elle possédait cependant son gouvernement et ses lois. Il a ajouté que, d'après les témoignages recueillis par la délégation, ce territoire constituait une véritable survivance du système soviétique, tant par le mode de gouvernement que par le système de régulation économique. Un règlement du conflit, a précisé M. André Dulait, supposait que soient remplies deux conditions : d'une part, le retrait des forces russes encore présentes sur le territoire (soit 2.800 soldats et quelque 40.000 tonnes de matériel), d'autre part, un accord avec les autorités de Tiraspol sur le statut de la province. Il a estimé que la solution au conflit transnistrien prendrait nécessairement du temps et pourrait passer par le développement de projets économiques communs aux deux territoires afin de créer une solidarité d'intérêt aujourd'hui récusée par la Transnistrie.

Evoquant ensuite la situation économique de la Moldavie, M. André Dulait a relevé que la crise financière russe d'août 1998 avait mis à jour de graves faiblesses structurelles. Il a noté que l'économie moldave souffrait d'une part, d'une complète dépendance énergétique, aggravée encore par le fait que la Russie est son fournisseur quasi exclusif de gaz et de pétrole et d'autre part, d'une concentration excessive des débouchés extérieurs, sur la CEI en 1998. Il a relevé qu'avec un PIB par habitant inférieur à 500 dollars, la Moldavie figurait parmi les pays les plus pauvres d'Europe. L'assainissement nécessaire, a estimé M. André Dulait, rencontrait trois contraintes majeures : le poids du contexte régional, celui des mentalités et des habitudes héritées de l'époque soviétique, enfin, les incertitudes du climat politique.

Abordant alors le contexte politique intérieur en Moldavie, M. André Dulait a noté un certain consensus sur la nécessité de trouver un équilibre entre les deux principaux pôles d'attraction antagonistes que sont la Russie, d'une part, et la Roumanie, d'autre part. Il a noté que le Front populaire, partisan de la réunification de la Roumanie, et les communistes, proches des positions de Moscou, avaient conjugué leurs forces dans une alliance contre nature pour renverser un gouvernement à majorité fragile. M. André Dulait, après s'être interrogé sur la possibilité d'une fragile majorité de rechange durable, a relevé que cette instabilité chronique constituait un facteur de faiblesse pour la Moldavie et donnait des arguments au chef de l'Etat actuel, M. Lucinschi, pour un renforcement du régime présidentiel. Il a estimé que la volonté d'ancrage à l'Europe ne serait sans doute pas remise en cause, dans la mesure où la Moldavie souhaitait bénéficier des avantages économiques et politiques procurés par l'adhésion à l'Union européenne.

M. André Dulait a conclu sur le concours que la France pourrait apporter à la Moldavie. Il a relevé de véritables affinités entre nos deux pays : 70 % des élèves scolarisés dans les établissements roumanophones de Moldavie apprennent le français et la Moldavie a d'ailleurs adhéré à la francophonie en novembre 1997. La France se rangeait, en outre, au deuxième rang des investisseurs étrangers, juste derrière la Russie. Enfin, la visite du Président de la République à Chisinau, en septembre 1998, avait donné un élan incontestable aux relations bilatérales. M. André Dulait a par ailleurs jugé souhaitable un renforcement de notre politique de coopération avec ce pays ; l'aide française en Moldavie ne dépassait pas 2,5 millions de francs, alors même que les besoins étaient considérables. Il a cité de nouveaux domaines possibles de coopération : une aide au déminage de la rive gauche du Dniestr et l'intensification de la coopération institutionnelle.

A la suite de l'exposé de M. André Dulait, M. André Boyer a observé que la Moldavie n'avait pas été touchée de manière uniforme par la crise économique et que les zones rurales, autosuffisantes pour leurs besoins alimentaires, bénéficiaient d'une situation plus favorable. Comparant alors la Moldavie à l'Estonie, il a estimé que ces deux pays occupaient une place charnière entre l'ancienne Union soviétique et les pays européens et avaient pour point commun la présence d'une importante minorité russophone et un héritage économique parfois difficile à assumer. Il a ajouté que les difficultés économiques pour la Moldavie se trouvaient aggravées par le fait que le potentiel industriel de ce pays se concentrait dans la province sécessionniste de Transnistrie. Il a en outre jugé que, si l'Estonie pourrait éventuellement trouver dans le tourisme un ressort pour le développement de son économie, la Moldavie ne pourrait pas, à horizon rapproché, compter sur cette source de revenus.

M. André Rouvière a fait part de ses inquiétudes sur la situation moldave. Il a constaté notamment que l'énergie déployée dans les luttes à caractère politique ne permettait pas de consacrer le temps nécessaire au relèvement économique du pays. Il a ajouté que le poids des habitudes et des mentalités s'opposait encore au développement du pays. Il a enfin évoqué le problème d'identité de la Moldavie, partagée entre l'influence concurrente de la Roumanie et de la Russie.

Mme Josette Durrieu a alors fait part des observations que lui inspiraient les nombreux déplacements qu'elle avait effectués en Moldavie comme membre du Conseil de l'Europe. Elle a souligné que la Moldavie avait été confrontée à la sécession de la Transnistrie, à la revendication, aujourd'hui satisfaite, d'un statut d'autonomie à la Gagaouzie, mais aussi, désormais, à la tentation irrédentiste de la minorité bulgare. Elle a estimé que les relations avec la Roumanie s'étaient aujourd'hui stabilisées. Elle est revenue sur la situation de crise politique de la Moldavie et la fragilité économique de ce pays. Elle a relevé en outre que la Transnistrie disposait d'un stock d'armes considérable, alimenté notamment par l'ancienne 14e armée soviétique, en partie démobilisée sur place, ainsi que par des dépôts provenant de plusieurs pays placés autrefois sous la sphère soviétique. Elle a jugé indispensable une évaluation précise de ce stock d'armements. Mme Josette Durrieu s'est inquiétée de l'extension de la corruption en Moldavie et constaté que la situation dans ce pays s'était dégradée dans la période récente. Elle a estimé que si la majorité de la classe politique était attachée à un rapprochement avec l'Union européenne, la position des plus hautes autorités de l'Etat sur ce chapitre n'était pas sans ambiguïté. Elle a ajouté que l'instabilité politique donnait un argument à la volonté du Président Lucinschi de renforcer les pouvoirs du chef de l'Etat. Elle a souligné qu'il fallait se défier de toute dérive vers un pouvoir autoritaire et observé d'une part, qu'une partie des députés pourrait soutenir le renforcement des prérogatives du Gouvernement et, d'autre part, que la cour constitutionnelle s'était opposée aux initiatives constitutionnelles du Président de la République. Elle a jugé que la France ne devait pas donner de caution à un pouvoir qui cherchait volontiers à se prévaloir du modèle de la Ve République.

M. André Dulait a précisé à l'intention de M. Xavier de Villepin, président, et de M. Guy Penne, que la France avait tout intérêt à maintenir sa présence dans un pays attaché à une certaine tradition de francophonie et estimé par ailleurs que la crise politique actuelle pourrait conduire à un retour en arrière qui retarderait encore le relèvement indispensable du pays.

M. Michel Caldaguès a constaté que la carte de la corruption ne s'était pas beaucoup modifiée depuis l'époque où l'Europe se trouvait partagée par le rideau de fer. Il a par ailleurs relevé que des pays de l'est du continent pouvaient percevoir l'administration de l'Union européenne comme une bureaucratie peu efficace.

M. André Rouvière a estimé à cet égard qu'il convenait de ne pas confondre bureaucratie et réglementation.

M. Xavier de Villepin, président, a pour sa part estimé que l'Union européenne devait s'efforcer de définir sa position à l'égard des pays issus de l'éclatement de l'URSS, dans un esprit de dialogue avec la Russie.

Mme Josette Durrieu a alors observé que la Moldavie, par son histoire et sa culture, se rattachait à l'Europe. Elle a estimé souhaitable la participation de la Moldavie au pacte de stabilité dans les Balkans.

Projet de loi de finances pour 2000 - Défense - Air - Examen du rapport

Puis la commission a procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Jean-Claude Gaudin sur les crédits du ministère de la défense inscrits dans le projet de loi de finances pour 2000 (armée de l'air).

M. Jean-Claude Gaudin, rapporteur pour avis,
a formulé en préambule deux appréciations principales sur les données budgétaires du projet de loi de finances pour 2000 en ce qui concerne l'armée de l'air :

- en premier lieu, les crédits de fonctionnement du titre III sont cohérents avec la quatrième annuité de la loi de programmation, et permettent de répondre positivement à certains des besoins formulés, depuis longtemps, par l'armée de l'air ;

- en second lieu, les crédits d'équipement du titre V préparent des échéances financières tendues pour l'avenir qui conditionnent pourtant la modernisation de l'armée de l'air.

Globalement, a précisé le rapporteur pour avis, les crédits de l'armée de l'air, avec 34,5 milliards de francs, accusent une baisse de 3,6 % par rapport à 1999, sa part dans l'ensemble du budget défense étant en baisse d'un demi-point à 18,4 %.

En ce qui concerne les dépenses ordinaires figurant au titre III, elles totalisent -a-t-il précisé- 15,6 milliards de francs, marquant une progression de 0,77 %.

M. Jean-Claude Gaudin, rapporteur pour avis, a formulé une observation principale sur cette partie des crédits de l'armée de l'air : le fonctionnement courant bénéficie d'une dotation supplémentaire de 183 millions de francs, soit une hausse de 1,16 %. Il s'agit là -a-t-il estimé- d'une bonne nouvelle pour l'armée de l'air qui, depuis plusieurs années, était confrontée à une très forte contrainte dans ce domaine. C'est en effet à partir de ces crédits que l'armée de l'air est en mesure -ou non- de faire participer ses pilotes aux campagnes de tir, entraînements et exercices interalliés qui conditionnent leur efficacité opérationnelle. C'est également à partir du fonctionnement courant que l'armée de l'air peut financer des activités de sous-traitance permettant d'effectuer sur les bases certaines opérations courantes, auparavant réalisées par des personnels appelés.

Les dépenses ordinaires servent, a poursuivi M. Jean-Claude Gaudin, rapporteur pour avis, à plus de 80 %, au financement des rémunérations et charges sociales ; cette dotation, a-t-il précisé, était quasiment stable par rapport à 1999 (+ 0,36).

Abordant la professionnalisation de l'armée de l'air, M. Jean-Claude Gaudin a indiqué que, globalement, à 1 % des effectifs près, cette professionnalisation était terminée pour l'armée de l'air. Son bilan était positif et le recrutement des militaires techniciens de l'air (MTA) se déroulait dans de bonnes conditions. En 2000, l'armée de l'air perdra 71 postes d'officiers, 1.300 postes de sous-officiers, ainsi que 5.359 postes d'appelés. En contrepartie, 299 postes de volontaires seront créés ainsi que 2.104 postes de militaires techniciens de l'air.

Les départs volontaires liés à l'octroi des pécules se déroulaient, a précisé le rapporteur pour avis, conformément aux objectifs. Toutefois, en ce qui concerne les sous-officiers, la déflation prévue pour 2000 (1.300 postes, alors qu'elle n'était que de 725 postes en 1999) nécessitera une gestion serrée des crédits de pécules.

M. Jean-Claude Gaudin, rapporteur pour avis, a ensuite abordé les crédits d'équipement de l'armée de l'air dans le projet de budget du ministère de la défense pour 2000.

Avec une dotation fixée à 18,8 milliards de francs, les crédits de paiement du titre V de l'armée de l'air diminuent de 6,9 % (- 1,4 milliard) et les autorisations de programme, fixées à 18,2 milliards  de francs, sont réduites de 10,3 % (- 2 milliards) par rapport à 1999.

Cette " encoche " opérée sur les autorisations de programme, due à un " prêt " de 2 milliards concédé à la marine pour le programme de frégate " Horizon ", entraîne le report à 2001 de la deuxième tranche de commande globale des 12 Rafale Air, ainsi que le décalage, de 6 mois à un an, de certaines opérations du Mirage 2000-D, notamment la mise au point des capacités de tir de nos futurs armements de précision Scalp, Apache et AASM.

Le rapporteur pour avis a fait valoir que la cohérence globale des programmes et les calendriers initiaux n'étaient pas remis en cause. Il restait qu'après l'encoche de 1998, la revue des programmes de 1999 et les réductions prévues dans le présent projet de budget 2000, c'étaient les engagements de la loi initiale qui étaient régulièrement remis en cause. M. Jean-Claude Gaudin, rapporteur pour avis, a estimé que, si les deux derniers exercices de cette programmation ne voyaient pas le rattrapage des prélèvements effectués en 2000, alors même que les autorisations de programme pour le Rafale et l'ATF devraient atteindre, à eux seuls, dès 2001, quelque 25 milliards, c'est à de nouveaux reculs de programmes que l'armée de l'air serait alors confrontée.

Après avoir détaillé les matériels nouveaux livrés à l'armée de l'air en 2000, M. Jean-Claude Gaudin, rapporteur pour avis, a rappelé que le budget 2000 de l'armée de l'air ne prévoyait encore aucun financement pour l'avion de transport futur (ATF). Le rapporteur pour avis a alors fait le point sur ce programme, qu'il a jugé essentiel pour les capacités françaises, mais aussi européennes, de projection de forces. Le débat longtemps polarisé sur le projet européen d'Airbus Military, était aujourd'hui plus complexe puisque, pour répondre au besoin opérationnel exprimé par les armées de sept pays européens, trois offres concurrentes étaient aujourd'hui à l'étude pour une décision qui devrait être prise au mois de janvier prochain : la proposition Airbus du A 400 M, une proposition américaine émanant de Lockheed et Boeing reposant sur une flotte combinée de C 130 J et de gros-porteurs C 17, et une proposition russo-ukrainienne, celle d'Antonov, pour le projet dénommé AN7 X.

Le projet d'avion de transport futur, a rappelé M. Jean-Claude Gaudin, rapporteur pour avis, ne concernait pas seulement l'armée de l'air. Destiné à transporter des personnels et des matériels de l'armée de terre, il conditionnait notre capacité de projection au niveau européen. Cette donnée était, a précisé le rapporteur pour avis, au coeur des réflexions et des ambitions européennes en matière de capacités de défense autonomes. L'aboutissement ou non du programme Airbus constituerait un test particulièrement important de la réelle détermination de nos partenaires à créer une flotte européenne homogène, destinée à projeter des unités multinationales européennes dans des opérations de gestion de crise.

Concluant, M. Jean-Claude Gaudin, rapporteur pour avis, a fait référence au contexte dans lequel ce budget s'inscrivait : pendant 78 jours, 98 aéronefs de l'armée de l'air, appuyés par plus de 900 personnels, avaient participé à toutes les missions engagées dans l'opération " Force alliée ". Ce fut l'occasion d'apprécier tant la qualité de nos pilotes que celle des équipements qui leur étaient alloués, en particulier des Mirage 2000. Des ajustements techniques avaient certes été nécessaires au cours de l'opération, et les " programmes d'urgence " mis en oeuvre avaient permis de compenser certaines insuffisances. Il restait toutefois que d'autres, plus lourdes, avaient été identifiées : les capacités de ravitaillement en vol, la transmission de données en temps réel, on encore les quantités de munitions guidées laser. Le conflit avait aussi permis de démontrer l'utilité opérationnelle des drones, qu'ils concourent au renseignement ou au traitement d'objectifs.

Le projet de budget pour 2000 aurait donc pu être l'occasion, pour M. Jean-Claude Gaudin, rapporteur pour avis, de tirer rapidement les conséquences de ces analyses, ce qui ne semblait pas être le cas.

Enfin, ce projet de budget n'était pas, pour le rapporteur pour avis, un bon signal politique à l'adresse de nos partenaires européens, à l'heure où notre pays se voulait, à juste titre, le promoteur actif et ambitieux d'une défense européenne dotée de capacités militaires crédibles, démarche qui supposait sinon l'augmentation, à tout le moins le maintien d'un effort financier soutenu.

Le rapporteur pour avis a conclu en estimant qu'il ne pouvait donc formuler, en l'état, qu'une appréciation négative sur le projet de budget de l'armée de l'air pour 2000.

Un débat s'est ensuite instauré au sein de la commission.

M. Jean-Claude Gaudin, rapporteur pour avis, a précisé à M. Philippe de Gaulle que le " prêt " de deux milliards de francs consenti à la marine par l'armée de l'air s'analysait comme un redéploiement provisoire de ressources destinées au financement du programme de frégate " Horizon ", et que l'armée de l'air devrait impérativement retrouver cette dotation l'an prochain.

A l'attention de M. Xavier de Villepin, président, M. Jean-Claude Gaudin, rapporteur pour avis, a précisé que la dotation en carburant opérationnel avait été calculée sur la base d'un baril à 14,6 dollars et d'un dollar à 6 francs, ce qui ne correspondait pas aux tarifs actuels. Cependant, a précisé le rapporteur pour avis, l'armée de l'air avait toujours obtenu, dans de telles hypothèses, les dotations complémentaires indispensables au bon déroulement de son activité aérienne.

Enfin, M. Jean-Claude Gaudin, rapporteur pour avis, est convenu avec M. Xavier de Villepin, président, de l'importance, tant politique que stratégique, de la décision concernant l'ATF, qui devrait intervenir dans les prochains mois, et approuvé sa suggestion d'entendre le ministre de la défense sur cette question.

Projet de loi de finances pour 2000 - Marine - Examen du rapport

La commission a enfin examiné le rapport pour avis de M. André Boyer sur les crédits du ministère de la défense inscrits dans le projet de loi de finances pour 2000 (marine).

M. André Boyer, rapporteur pour avis, a d'abord indiqué que le budget de la marine s'élèverait à 33 milliards de francs en 2000, soit une diminution de 2,65 % par rapport à 1999. Par ailleurs, a-t-il précisé, sa part dans l'ensemble du budget de la défense diminuera et reviendra de 17,9 % à 16,6 %.

M. André Boyer, rapporteur pour avis, a ensuite décrit les grandes lignes du projet de budget pour 2000. Les crédits du titre III s'élèveront à 12,89 milliards de francs, soit une diminution de 0,1 %. Au sein du titre III, les dépenses de rémunération diminueront un peu plus vite, mais continueront de représenter 10,1 milliards de francs, soit plus de 78 % du titre III. M. André Boyer a expliqué que les dépenses de personnel reflétaient l'évolution des effectifs en 2000 : 23 postes d'officiers et 1.042 postes d'officiers mariniers seront supprimés, ainsi que 3.579 postes budgétaires d'appelés. En revanche, 212 postes d'hommes du rang, 299 postes de volontaires et 1.125 postes civils seront créés.

Les autres dépenses de fonctionnement comprises dans le titre III subissent -a indiqué le rapporteur pour avis- des évolutions différentes. Les crédits d'alimentation diminuent de 6 % et atteignent 440 millions de francs. Les crédits de carburant baissent de 5,58 % et passent de 394 à 372 millions de francs. Ces deux évolutions s'expliquent principalement par la réduction du format de la marine. Toutefois, il a souligné qu'en matière de carburant, la diminution des crédits était allée de pair avec la hausse du prix du pétrole. Il s'est inquiété que le prix du pétrole ait été sous-estimé dans le projet de budget en l'évaluant à 14,6 dollars le baril en moyenne, alors que son cours actuel est d'environ 24 dollars. Il s'est donc interrogé sur les moyens qui pourraient permettre de soustraire l'activité de la marine aux aléas des marchés internationaux du pétrole et des changes. Il lui a semblé que cet ajustement ne pourrait se faire qu'en ayant recours à des crédits supplémentaires en cas de besoin.

M. André Boyer, rapporteur pour avis, a ensuite fait remarquer que les crédits de fonctionnement courant connaîtraient une hausse substantielle de plus 5,5 % à structures constantes. Cette hausse lui est apparue particulièrement bienvenue car, les années précédentes, la gestion des moyens de fonctionnement avait été particulièrement tendue. Il a estimé que c'était là le principal point positif du budget pour l'année 2000.

M. André Boyer, rapporteur pour avis, a ensuite examiné les dépenses en capital. Elles s'élèveront en 2000, à 20,1 milliards de francs de crédits de paiement et de 18,8 milliards d'autorisations de programmes, soit une baisse respective de 4,4 et plus de 20 % par rapport à 1999. Il a estimé que l'annuité 2000 était particulièrement inquiétante pour la marine car, pour pouvoir lancer le programme Horizon, elle avait bénéficié d'un " prêt " de l'armée de l'air d'un montant de 2 milliards de francs d'autorisations de programmes. Il a ensuite rappelé que, comme prévu, serait retiré du service actif un sous-marin d'attaque classique, trois avisos et le porte-avions Foch, tandis que seul le porte-avions nucléaire Charles-de-Gaulle entrerait effectivement en service en 2000. En outre, l'aéronautique navale verra le retrait d'une vingtaine d'avions du type Crusader et Alizé, tandis que trois avions Rafale seront livrés et que la modernisation des Super-Etendard se poursuivra.

Le rapporteur pour avis a également souligné que les commandes de bâtiments seront peu nombreuses mais importantes : le quatrième sous-marin nucléaire lanceur d'engins (SNLE) de nouvelle génération, la première frégate Horizon et un bâtiment hydrographique. En revanche, la commande du premier nouveau transport de chalands de débarquement (NTCD) et celles d'une deuxième frégate Horizon et de Rafale supplémentaires ont été décalées dans le temps.

M. André Boyer, rapporteur pour avis, a ensuite formulé trois observations portant sur le déroulement de la professionnalisation, sur les conditions d'entretien programmé des matériels, et sur le déroulement des programmes d'armement.

Sur le premier point, il a estimé que la professionnalisation dans la marine se déroulait de manière satisfaisante. L'évolution des effectifs est en effet globalement conforme à la loi de programmation. Seul un léger ajustement ou " repyramidage " sera nécessaire en 2000. Ainsi, 323 postes d'officiers mariniers seront transformés en postes d'hommes d'équipage. En outre, le rapporteur pour avis a remarqué que la marine devait faire face à une baisse plus rapide que prévu du nombre des appelés. Le déficit fin 1999 devrait représenter 18 % des effectifs attendus. Il a indiqué que la marine analysait ce phénomène comme une anticipation sur les évolutions à venir. Parallèlement au départ progressif des appelés, la marine engage des volontaires : 299 volontaires seront recrutés cette année, soit deux fois plus qu'en 1999. A terme, ce sont 1.775 volontaires qui travailleront dans la marine. Parmi ceux-ci, en 2002, la marine proposera 150 postes à des aspirants qui correspondront aux postes précédemment occupés par les officiers du service national.

M. André Boyer, rapporteur pour avis, a également indiqué que les difficultés rencontrées dans le recrutement de jeunes sans qualification dans le cadre des " contrats courts marine " s'estompaient progressivement. Il a mis l'accent sur le fait que 135 d'entre eux avaient été employés sur le Foch durant les opérations au Kosovo et qu'ils avaient donné toute satisfaction. Enfin, il a fait remarquer que les difficultés en matière de recrutement de personnel civil étaient en voie de résorption : le déficit, qui était de l'ordre de 12 % en 1998, devrait se limiter à 6,4 % en 2000. Cette évolution était due à deux mesures : de nouveaux recrutements et le développement de la sous-traitance. Ainsi, en 1999, la marine a fait appel à 225 vacataires et 658 postes ont été ouverts au concours. Pour la sous-traitance, la marine disposera en 2000 de 95 millions supplémentaires. Il a fait remarquer que cette dotation avait été gagée par la transformation réversible de 523 postes civils.

M. André Boyer, rapporteur pour avis, a ensuite souligné que les crédits d'entretien programmé des matériels conditionnaient la capacité de la marine à maintenir à la mer ses bâtiments. Globalement, sur les titres III et V, les crédits progresseront de 2,4 %, soit plus 2,1 % pour la flotte, moins 5,8 % pour l'aéronautique navale et plus 9,1 pour la force océanique stratégique. Il a souligné que plus que l'évolution des crédits, il fallait noter qu'en 2000 les structures de gestion de ces crédits seraient réorganisées. Un service spécialisé sera créé, sous l'autorité du chef d'état-major de la marine, au sein duquel serviront des personnels de la marine et de la DGA. Les compétences de la DGA et de l'état-major seront ainsi mieux délimitées et la marine pourra mieux maîtriser les coûts des opérations d'entretien. De plus, mais à plus longue échéance, un organisme interarmées devrait organiser la mise en commun des moyens de maintien en condition opérationnelle des unités ; coordonné par l'armée de l'air, cet organisme s'intéressera d'abord aux moyens de maintenance aéronautique entre l'armée de l'air, l'aéronavale et l'aviation légère de l'armée de terre. Cette réforme devrait permettre d'importantes économies et une plus grande disponibilité des matériels.

Enfin, M. André Boyer, rapporteur pour avis, a tenu à souligner que le glissement des programmes d'armement observé en 1998 et 1999 se poursuivrait en 2000. Il a insisté sur le fait que la France, ne disposant plus que d'un seul porte-avions, ne pourra plus maintenir en permanence un groupe aéronaval à la mer. Il a donc estimé que la question de la construction d'un second porte-avions devait être à nouveau posée. Il lui a semblé que, pour conserver la cohérence de notre dispositif, il était indispensable de disposer d'une seconde plate-forme aéronavale. Ceci étant, il a affirmé que lors de la prochaine programmation, il serait nécessaire de faire des choix, car la marine doit mener à bien de nombreux programmes avec un budget limité. Il lui a donc semblé indispensable d'approfondir la réflexion afin de maintenir la cohérence entre les moyens accordés à la marine et les missions qui lui sont confiées, telles qu'elles sont définies aujourd'hui. Le rapporteur pour avis a indiqué que la marine avait pratiquement rallié quantitativement le modèle 2015 et qu'il fallait désormais garantir un renouvellement suffisant des unités. Dans les prochaines années, un effort budgétaire sera indéniablement nécessaire, a-t-il estimé.

En conclusion, M. André Boyer, rapporteur pour avis, a estimé que le budget de la marine était en demi-teinte. En positif, il a relevé un meilleur budget de fonctionnement, une professionnalisation qui se déroulait de manière satisfaisante, des réformes tendant à une meilleure gestion des crédits d'entretien. En négatif, en revanche, la baisse des crédits destinés à l'équipement des forces, et plus particulièrement au renouvellement de la flotte, semble avoir atteint sa limite. Le rapporteur pour avis a considéré que la vigilance de la commission devrait désormais s'exercer sur deux points : la poursuite de l'application, dans les meilleures conditions possibles de la loi de programmation actuelle, et les choix qui seront faits dans la prochaine loi de programmation.

A l'issue de l'exposé du rapporteur pour avis, M. Charles-Henri de Cossé-Brissac a souhaité obtenir des précisions sur trois points : le type de propulsion qui pourrait être retenu pour le second porte-avions, l'évolution des moyens consacrés au sauvetage et à la surveillance en mer, et la reconversion à des usages civils du porte-avions Foch.

M. Christian de La Malène a souligné qu'il serait effectivement nécessaire de faire des choix dans la prochaine loi de programmation militaire, mais que les retards actuels limiteraient les marges de manoeuvre dans le futur.

M. Xavier de Villepin, président, s'est demandé si la réforme de la DCN n'avait pas été trop timide. Il a ensuite souhaité obtenir des précisions sur les avantages de la propulsion nucléaire sur le porte-avions Charles de Gaulle.

M. André Boyer, rapporteur pour avis, a alors apporté les précisions suivantes :

- la propulsion nucléaire est un choix de fond. La France a choisi de disposer de bâtiments à la pointe du progrès technique, avec le coût important qui en résulte. Pour le second porte-avions, le choix de la propulsion nucléaire permet une plus grande autonomie. La grande quantité de carburant embarquée par le porte-avions lui permet en outre de ravitailler son escorte et son aviation embarquée. Cette propulsion permet également de remplir des missions bien au-delà de la Méditerranée. Si la question ne peut être éludée, construire un deuxième porte-avions suppose soit un effort financier supplémentaire, soit de choisir entre les différents programmes. De toute façon, a rappelé le rapporteur pour avis, un second porte-avions ne serait opérationnel que pour 2012. La solution d'une coopération au niveau européen paraît séduisante, mais le Royaume-Uni n'a pas encore décidé du type d'avion, à décollage court ou catapulté, qui équiperait ses futurs porte-avions ;

- les missions de sauvetage et de service public représentent 15 % des activités de la marine. Un programme de modernisation des patrouilleurs est en cours. En outre, le programme d'hélicoptère NH 90 devrait permettre de remplacer en temps voulu les appareils consacrés à cette mission ;

- la réforme de la DCN est très importante. Celle-ci doit faire face à plusieurs difficultés : l'inadaptation du code des marchés publics, la non-recapitalisation de la DCN internationale ou encore les difficultés pour le personnel de s'adapter à une activité commerciale. D'importants efforts ont été faits. Une nouvelle organisation des services a été décidée, qui conduira à la séparation avec la DGA. Un projet d'entreprise, permettant de doter la DCN d'outils comptables et financiers efficaces, a été mis en place. Enfin, la DCN sera transformée en " service à compétence nationale ".

M. Guy Penne a alors observé que les relations diplomatiques avec l'Australie et la Nouvelle-Zélande s'étaient beaucoup améliorées et que ces deux pays montraient leur volonté de se rapprocher de la France. Ils sont particulièrement satisfaits de la présence de la marine française dans le Pacifique, qui prend en charge une partie de la surveillance des activités maritimes dans cette zone. Il lui a donc semblé que la France devait prêter toute l'attention nécessaire à ces missions.

M. Xavier de Villepin, président, a confirmé l'amélioration des rapports franco-australiens à la suite d'un récent entretien qu'il avait eu avec le ministre de la défense de ce pays. Cette amélioration s'illustre particulièrement au Timor oriental, où les armées françaises travaillent en commun avec les armées australiennes.

Affaires étrangères - Questions diverses - Guinée

M. Guy Penne a enfin souhaité aborder deux points en questions diverses. Il a d'abord attiré l'attention de la commission sur le sort réservé à l'opposant guinéen Alpha Condé, qui demeure emprisonné malgré de nombreuse interventions, à commencer par celle du Président de la République française, en sa faveur. Il a souhaité que de nouvelles pressions puissent être exercées sur les autorités guinéennes à l'occasion de la participation de M. Charles Josselin, ministre délégué à le coopération et à la francophonie, à la prochaine commission mixte franco-guinéenne. M. Xavier de Villepin, président, a indiqué qu'il effectuerait auprès de M. Charles Josselin la démarche souhaitée par M. Guy Penne.

Affaires étrangères - Questions diverses - Situation des recrutés locaux

M. Guy Penne a ensuite attiré l'attention de la commission sur le caractère très préoccupant de la situation des recrutés locaux, une nouvelle fois mise en lumière à l'occasion d'un amendement à un projet de loi, actuellement en cours d'examen devant la commission des lois de l'Assemblée nationale. M. André Dulait a alors rappelé qu'il avait consacré d'importants développements dans son avis budgétaire sur les crédits des affaires étrangères à cette question des recrutés locaux, tant au regard de leurs rémunérations que pour ce qui concerne les missions qui leur sont confiées. M. Guy Penne a souhaité qu'une démarche soit entreprise, au nom de la commission, auprès du ministre des affaires étrangères pour attirer son attention sur cette situation très préoccupante des recrutés locaux, et pour lui demander de faire connaître, dans les meilleurs délais, à la commission les dispositions qu'il compte prendre pour répondre à une telle dérive. M. Xavier de Villepin, président, a demandé à MM. André Dulait et Guy Penne d'entreprendre en commun cette démarche auprès du ministre des affaires étrangères, en leur qualité de rapporteurs budgétaires.