AFFAIRES ÉTRANGÈRES, DÉFENSE ET FORCES ARMÉES

Table des matières

  • Mercredi 14 avril 1999
    • Affaires étrangères - Crise au Kosovo - Audition de M. Alain Richard, ministre de la défense
  • Mardi 20 avril 1999
    • Audition de M. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie - Kosovo
  • Mercredi 28 avril 1999
    • Nomination de rapporteurs
    • Missions d'information à l'étranger - Communication
    • Traités et conventions - Accords France-Guatemala, France-Honduras, France-Nicaragua - Encouragement et protection réciproques des investissements - Examen des rapports
    • Traités et conventions - Ratification des amendements à la convention portant création de l'Organisation internationale de télécommunications maritimes par satellites (INMARSAT) relatifs à la création de l'Organisation internationale de télécommunications mobiles par satellites - Examen du rapport
    • Affaires étrangères - Situation en Irak - Communication
  • Jeudi 29 avril 1999
    • Affaires étrangères - Audition de M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères, sur le Sommet de Washington et l'évolution de la crise au Kosovo

Mercredi 14 avril 1999

- Présidence de M. Xavier de Villepin, président -

Affaires étrangères - Crise au Kosovo - Audition de M. Alain Richard, ministre de la défense

La commission a entendu M. Alain Richard, ministre de la défense, sur l'évolution de la crise au Kosovo.

Le ministre a d'abord indiqué que l'action militaire en cours portait sur la globalité de l'appareil militaire yougoslave pour priver ses forces de leur capacité d'action sur le territoire du Kosovo. Les bombardements avaient eu des effets significatifs sur l'armature et le caractère opérationnel des forces armées yougoslaves, en réduisant notamment leur capacité de mobilité ; la chaîne de commandement avait subi des perturbations graves et les coups portés aux infrastructures fixes réduisaient les capacités de manoeuvre de l'armée yougoslave. Au total, a précisé le ministre, l'état du rapport de forces avait déjà évolué de manière substantielle.

La phase " 2 + " des opérations en cours consistait à ajouter aux cibles militaires initiales des cibles à caractère économique et politique. Dans ce contexte, le choix des objectifs conduisait à un niveau d'échanges intenses entre les partenaires de l'Alliance. En tout état de cause, la mise en oeuvre des phases successives relevait, a souligné M. Alain Richard, de la décision politique des gouvernements.

Parmi les Européens, la France -a relevé le ministre- était le premier contributeur en moyens opérationnels, ce qui lui donnait un rôle important dans les échanges relatifs au choix des options militaires.

Le ministre a relevé que le niveau d'activité des forces yougoslaves au Kosovo même était désormais très réduit. Il apparaissait que l'UCK, en tant que force militaire, demeurait présente sur le territoire kosovar et avait démontré sa capacité à regrouper ses forces en dépit de la perte d'un peu moins du quart de ses effectifs. Les forces de l'UCK ne faisaient d'ailleurs pas l'objet d'assauts importants de la part des forces yougoslaves.

Dépourvues désormais de couverture aérienne, les forces yougoslaves -a indiqué M. Alain Richard- se trouvaient sous la menace aérienne permanente des forces alliées. Le ministre a relevé toutefois que les forces terrestres serbes avaient subi peu de destructions : elles étaient camouflées, attaquaient peu et se regroupaient auprès de sites peuplés de civils et de réfugiés.

Le ministre de la défense a alors indiqué que le renforcement en cours des moyens aériens de l'Alliance avait pour objet de permettre une surveillance aérienne permanente du territoire kosovar, impliquant le survol continu du Kosovo par une centaine d'aéronefs de toutes natures, de façon à être en mesure d'identifier puis de détruire d'éventuelles cibles blindées.

M. Alain Richard a précisé que le total des moyens opérationnels des forces de l'Alliance pourrait atteindre prochainement le millier d'aéronefs. A l'heure actuelle, sur un total de 556 aéronefs, la contribution des Etats-Unis s'élevait à 339 appareils, celle de la France à 58, de la Grande-Bretagne à 28 et de l'Allemagne à 18. Le renforcement de cette flotte d'aéronefs conduirait à une augmentation plus que proportionnelle du nombre d'appareils ravitailleurs, compte tenu de la nécessité de faire décoller les avions à partir de bases plus éloignées du théâtre d'opérations. L'objectif de ce renforcement était l'immobilisation complète des forces yougoslaves et leur destruction progressive.

Abordant ensuite les actions humanitaires en cours, le ministre de la défense a souligné que la création d'une force logistique destinée à sécuriser une partie du territoire du nord de l'Albanie s'était avérée absolument indispensable. Cette zone était, depuis longtemps, le théâtre d'une certaine violence endémique ; il était donc impossible de laisser quelque 150.000 réfugiés sans aucun soutien dans cette région. Se référant aux critiques de certaines organisations humanitaires relatives à l'implication de l'OTAN dans la mise en place de cette force, le ministre a fait observer que la réalité des capacités multinationales existant en Europe faisait de l'OTAN le seul outil crédible pour constituer et encadrer une telle force.

M. Alain Richard a alors souligné, malgré la faiblesse des informations disponibles sur la réalité des mouvements et des effectifs de réfugiés restés au Kosovo, l'importance qu'il y avait à trouver des moyens adaptés permettant de leur porter secours.

Evoquant enfin la préparation d'une future force de sécurisation destinée à assurer la mise en oeuvre d'un arrangement politique à venir, le ministre de la défense a indiqué que l'essentiel de ses capacités opérationnelles proviendrait probablement en majorité des grands pays européens. Cette force devrait pouvoir être déployée dans des délais très brefs, aussitôt après la conclusion d'un accord politique. M. Alain Richard a précisé que cette force devrait disposer des capacités opérationnelles comprenant des matériels lourds ainsi que de règles d'engagement cohérentes de nature à assurer la crédibilité de sa mission, notamment dans l'hypothèse où une certaine violence réapparaîtrait, même après l'adoption d'un règlement politique.

A l'issue de l'exposé du ministre, un débat s'est engagé avec les commissaires.

M. André Dulait s'est interrogé sur la possibilité d'utiliser le territoire de la Hongrie, nouveau membre de l'Alliance atlantique, comme base de départ des forces de l'OTAN.

M. Robert Del Picchia, après avoir relevé que les forces françaises occupaient le premier rang parmi les alliés européens au sein des forces de l'OTAN actuellement engagées, a demandé au ministre des précisions sur les effectifs que la France pourrait mettre au service d'une force de sécurisation.

Mme Paulette Brisepierre, évoquant le prochain sommet de l'Alliance atlantique à Washington, s'est demandé si cette réunion pourrait être l'occasion d'inflexions politiques ou de décisions nouvelles.

M. Pierre Mauroy a interrogé le ministre de la défense sur la situation actuelle des forces de l'UCK et sur la position du Gouvernement français et de ses alliés à l'égard de ce mouvement de résistance. Il a par ailleurs souhaité connaître la nature des aides qui pouvaient être apportées pour porter secours aux populations déplacées à l'intérieur du Kosovo.

M. Aymeri de Montesquiou, après s'être interrogé sur l'ampleur des moyens aériens mis en oeuvre en regard de la modeste superficie du Kosovo, a déploré l'insuffisance des moyens militaires européens malgré l'importance des efforts budgétaires consentis. Il a par ailleurs demandé au ministre de la défense si les accords de Rambouillet pourraient demeurer, après les frappes aériennes actuelles, la base d'un éventuel accord politique et a évoqué l'éventualité d'une partition du territoire kosovar. Il a enfin souligné le rôle de médiation important qui pourrait revenir à la Russie afin de parvenir à un règlement politique.

M. Emmanuel Hamel a questionné le ministre sur le coût financier des opérations actuellement engagées et sur leur imputation budgétaire à venir. Il s'est par ailleurs demandé si la Russie était prête à participer à une future force de sécurisation destinée à garantir un accord politique.

M. Michel Barnier, abordant les leçons qui devront être tirées, le moment venu, de la crise du Kosovo, a réitéré sa proposition d'une force permanente d'intervention humanitaire de l'Union européenne qui donnerait à l'action communautaire plus de rapidité, d'efficacité et de lisibilité. Il a par ailleurs demandé au ministre son sentiment quant au projet de fusion des fonctions de secrétaire général de l'UEO avec celles du futur Haut représentant pour la politique étrangère et de sécurité commune.

M. Claude Estier s'est demandé quelle était, dans les circonstances actuelles, la position du Gouvernement français au regard d'un éventuel report du sommet de Washington devant commémorer le cinquantième anniversaire de l'Alliance atlantique.

M. Jean-Guy Branger, après avoir réaffirmé son soutien aux positions adoptées par le Président de la République et le Gouvernement, a souligné que les Alliés et l'OTAN devaient nécessairement sortir vainqueurs de la confrontation actuelle. Il s'est demandé quel était l'état actuel des réflexions à l'égard d'un éventuel engagement au sol si les opérations aériennes en cours ne permettaient pas d'atteindre l'objectif recherché.

M. Xavier de Villepin, président, a demandé au ministre de la défense les indications dont il disposait en ce qui concerne le moral des forces armées yougoslaves et la situation actuelle des opposants au président Milosevic. Evoquant ensuite le prochain sommet de Washington, il a estimé que la révision prévue du concept stratégique de l'OTAN devrait également tirer les enseignements de l'actuelle crise au Kosovo.

M. Bertrand Delanoë, après avoir exprimé son accord avec l'action conduite par la France avec ses alliés au Kosovo, a également estimé qu'il y aurait lieu de tirer les leçons du conflit actuel sur le concept stratégique de l'OTAN et sur le positionnement de la France au sein de l'Alliance atlantique.

M. Jean-Luc Mélenchon a rappelé le trouble que lui inspiraient les opérations actuelles de l'OTAN, conduites sans mandat international, sous commandement américain, et sans autorisation du Parlement. Il s'est déclaré sensible à tout ce qui pouvait être fait pour ramener les actions entreprises dans le cadre des Nations unies. Il s'est enfin demandé en quoi consisterait pour les Alliés le fait de sortir vainqueurs de l'actuelle confrontation : s'agissait-il de ramener les dirigeants serbes à la table des négociations et jusqu'où pouvaient aller les destructions effectuées sur le territoire serbe ?

Répondant aux intervenants, le ministre a alors apporté les précisions suivantes :

- très peu d'informations étaient disponibles sur l'évolution interne du pouvoir yougoslave. On ne pouvait discerner, pour l'heure, un quelconque fléchissement de la loyauté des forces yougoslaves à l'égard du régime serbe ;

- les pays qui, comme la Hongrie, venaient d'intégrer l'Alliance atlantique, ont encore beaucoup à faire pour disposer d'infrastructures interopérables. Par ailleurs, l'une des lignes de conduite de l'Alliance consistait à ne pas placer en première ligne les pays de la zone ;

- la force de sécurité qui viendrait conforter un accord politique futur devrait comporter un effectif de quelque 4.500 soldats français, soit le double de l'effectif de nos forces actuellement stationnées à la frontière macédonienne ;

- la France était le seul pays européen où le débat concernant le rôle de l'OTAN atteignait une telle intensité. Même si l'Alliance se voyait reprocher certains de ses choix, ceux-ci n'auraient-ils pas été les mêmes dans l'hypothèse où l'action aurait été menée par les seuls pays européens, sachant qu'il était impossible d'obtenir, sans veto russe, un mandat exprès du Conseil de sécurité des Nations unies ?

- le sommet de Washington ne conduira pas à une inflexion de l'action de la communauté internationale. Cette action évolue au demeurant quotidiennement dans le cadre de discussions régulières entre chefs d'Etat et de gouvernement. En tout état de cause, il convenait de ne pas surestimer l'importance du processus de révision du concept stratégique de l'OTAN, qui n'aboutira ni à une modification du traité de Washington, ni à une évolution de la relation entre l'ONU et l'OTAN. Le concept stratégique devrait faire figurer dans son dispositif une reconnaissance du principe d'une identité européenne de sécurité et de défense. Toutefois, la capacité des Européens à s'organiser militairement ne dépendait pas des conclusions du concept stratégique ;

- il n'y avait pas d'alternative aux frappes aériennes actuellement en cours. L'autre option, consistant à entrer en force sur le territoire yougoslave, avait été écartée par tous les partenaires. Les objectifs recherchés à travers l'opération actuelle étaient clairs depuis le début : obtenir que tous les Kosovars puissent vivre en sécurité sur leur territoire, conformément aux normes et aux valeurs européennes. La réaction favorable de l'opinion démontrait d'ailleurs que ce but était clair et légitime. Il n'était dans l'intention de personne d'obtenir le démantèlement de la Yougoslavie et la communauté internationale s'accordait pour que le Kosovo demeure à l'intérieur des frontières actuelles de ce pays. L'objectif était donc de détruire les moyens de force dont dispose la Yougoslavie pour mettre en oeuvre sa stratégie d'apartheid par la terreur ;

- les propositions initiales du commandement suprême des forces alliées en Europe ne sont pas systématiquement retenues par le Conseil atlantique. Il n'existe pas par ailleurs de divergences entre les Etats-Unis, d'une part, et la France, d'autre part. Quant aux choix politiques opérés, ils ne démontrent pas de glissement sur la nature des objectifs poursuivis ;

- les attaques contre les ponts et voies de communication avaient pour objectif de réduire les capacités de renforcement de l'armée serbe au Kosovo ; les 15 à 20.000 soldats yougoslaves stationnés au Kosovo et les 15.000 membres des forces spéciales ne pourront ainsi recevoir de renforts ;

- l'UCK était représentative d'un stade de l'évolution de la communauté albanophone à la suite de l'échec de la stratégie pacifique conduite par M. Rugova. C'était également une composante politique importante et le choix du groupe de contact de l'associer aux négociations de Rambouillet s'était avéré juste. Elle ne constituait cependant pas le seul interlocuteur de la communauté internationale. Aucun allié n'entendait par ailleurs procéder à l'armement de l'UCK qui compliquerait encore davantage toute perspective de solution politique ;

- l'ONU ne pouvait pas se trouver au centre du dispositif international actuellement en oeuvre, compte tenu du risque de veto russe. Le retour de l'ONU impliquait donc un soutien de la part des Russes, sachant que ceux-ci ne disposaient pas d'autorité directe sur M. Milosevic. Le motif fondamental d'un veto russe au Conseil de sécurité était toujours d'actualité et concernait le déploiement d'une force de sécurité en Yougoslavie ;

- en l'absence d'une solution politique rapide, les secours à apporter aux réfugiés kosovars demeurés dans la province ne pouvaient être obtenus que par des stratégies indirectes : l'efficacité de parachutage de vivres était aléatoire compte tenu de la difficulté à localiser les réfugiés ; l'implication d'organisations humanitaires non gouvernementales pouvait être envisagée compte tenu des propos de M. Milosevic lui-même, qui avait proposé la semaine dernière le libre accès aux ONG ;

- le coût des opérations en cours pourrait s'élever, pour la France, à ce jour, à quelques centaines de millions de francs. Les choix de réorganisation de nos armées effectués ces dernières années ne devraient pas se trouver fragilisés par les analyses qu'il conviendra de porter, le moment venu, sur la crise actuelle ;

- la proposition d'une force européenne humanitaire méritait en effet d'être examinée, mais sa mise en oeuvre devrait surmonter la difficulté de concilier, en cas de conflit, des impératifs militaires avec une chaîne logistique humanitaire ;

- une fusion des postes de secrétaire général de l'UEO et de Haut représentant pour la PESC pouvait être envisagée, mais il importait surtout d'améliorer les procédures de travail et de faire de l'Union européenne un outil politico-militaire efficace ;

- enfin, la question d'un éventuel engagement de forces au sol pourrait se poser dans des conditions différentes lorsque les opérations en cours auront permis d'aboutir à une paralysie réelle des forces yougoslaves.

Mardi 20 avril 1999

- Présidence de M. Xavier de Villepin, président -

Audition de M. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie - Kosovo

La commission, élargie aux membres de la conférence des présidents, a entendu M. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie, sur la situation humanitaire liée à la crise au Kosovo.

Le ministre délégué a d'abord indiqué que, depuis le début de la crise du Kosovo, 600.000 kosovars avaient trouvé refuge dans les pays voisins et qu'il était difficile par ailleurs d'évaluer la part de la population déplacée sur le territoire même du Kosovo. Il a relevé que si l'Albanie avait manifesté dès le début de la crise sa disponibilité pour accueillir des réfugiés et reçu 365.000 Kosovars alors même que la population albanaise s'élève à quelque 3,3 millions d'habitants, la Macédoine se trouvait confrontée, devant l'afflux des réfugiés, au risque d'une crise économique et politique, compte tenu du fragile équilibre ethnique de ce pays. M. Charles Josselin a ajouté que le Monténégro, qui avait accueilli 75.000 réfugiés, présentait un problème spécifique dans la mesure où il faisait partie de la fédération yougoslave, ce qui rendait difficile l'intervention des organisations humanitaires.

Après avoir rappelé que le départ des réfugiés du Kosovo ne concernait pas des individus isolés mais des familles entières, M. Charles Josselin a observé que le Haut-commissariat pour les réfugiés (HCR) et les organisations non gouvernementales (ONG) avaient d'abord été débordés et que l'aide aux réfugiés avait pris du temps pour se mettre en place. Il a souligné à cet égard que la France avait été l'un des premiers pays à mobiliser sur place les secours nécessaires. Le ministre délégué a alors évoqué l'organisation de l'aide humanitaire et noté que si les besoins en nourriture étaient dans l'ensemble satisfaits, la fourniture de tentes supplémentaires s'avérait indispensable.

M. Charles Josselin a attiré l'attention sur la nécessité d'apporter une aide adéquate aux familles albanaises qui accueillaient les réfugiés kosovars et qui se trouvaient elles-mêmes souvent dans une situation matérielle difficile. Il a évoqué à cet égard le principe d'une compensation financière à ces familles en soulignant toutefois la difficulté de mettre en place une telle formule compte tenu de la fragilité des structures administratives albanaises.

M. Charles Josselin a ensuite estimé que l'une des priorités visait aujourd'hui à donner une protection juridique à des réfugiés qui avaient été dépouillés, par les autorités serbes, de tout signe identitaire. Il a noté que cette responsabilité incombait au Haut-commissariat aux réfugiés qui avait besoin à cette fin de moyens supplémentaires. Il a relevé par ailleurs que les instructions avaient été données aux postes diplomatiques français dans la région pour faire preuve de souplesse à l'égard des demandes exprimées par les réfugiés pour se rendre dans notre pays, sachant qu'une vigilance s'imposait à l'égard de possibles tentatives d'infiltration des réfugiés par des non-Kosovars. M. Charles Josselin a observé cependant qu'une grande partie des réfugiés du Kosovo avaient exprimé leur désir d'émigrer en Allemagne où se trouvait déjà une communauté kosovare importante.

M. Charles Josselin a indiqué que les nombreuses familles françaises, qui avaient manifesté leur disponibilité pour accueillir des Kosovars, devaient être prêtes à recevoir un nombre de personnes parfois important, 10 à 15 personnes par famille, et ce pour une période d'au moins trois mois. Le ministre délégué a souligné que les Kosovars bénéficieraient sur notre territoire d'une autorisation provisoire de séjour et que le statut de réfugié pourrait leur être donné, des consignes de souplesse ayant été données à cet égard aux préfets. Il a ajouté que la France avait accueilli le week-end dernier, à titre officiel, 348 réfugiés qui seraient hébergés dans des structures collectives avant d'être reçus le cas échéant par des familles françaises dans des conditions qui seraient évaluées par les services des Directions départementales à l'action sanitaire et sociale. M. Charles Josselin a indiqué qu'une centaine de réfugiés avaient par ailleurs rejoint notre pays selon des procédures non officielles. La France, a-t-il précisé, accueillera de nouveaux réfugiés dans les jours à venir, et se trouvait actuellement au cinquième rang des pays d'accueil, 15.929 réfugiés ayant été évacués à ce jour de la zone de conflit, dont 9.000 vers l'Allemagne.

M. Charles Josselin a ensuite insisté sur la nécessité de rapidement prolonger l'aide humanitaire d'urgence par une aide au développement des pays accueillant des réfugiés, qu'il s'agisse de répondre aux besoins des populations réfugiées elles-mêmes, par exemple en matière scolaire ou sanitaire, ou à ceux des populations locales.

Il a annoncé que le Gouvernement français commençait à réfléchir sur un programme de coopération-développement en direction des pays de la zone, en liaison avec les postes diplomatiques concernés, mais aussi les collectivités locales. Il s'est en effet déclaré convaincu que la coopération décentralisée, dans des domaines tels que l'eau et l'assainissement, pouvait se révéler extrêmement utile.

Evoquant le rôle de l'Otan dans le domaine humanitaire, il a précisé que c'est à la demande du Haut-commissariat aux réfugiés que les moyens de l'Alliance avaient été sollicités, notamment pour le transport de l'aide et la sécurisation des camps de réfugiés. A ce titre, 8.000 soldats, dont 800 Français, stationnaient actuellement en Albanie.

Le ministre délégué a enfin rappelé les conclusions du Conseil des ministres des affaires étrangères des Quinze, tenu à Luxembourg le 8 avril dernier, qui s'était prononcé, conformément aux vues françaises, en faveur d'une priorité à l'accueil sur place des réfugiés et qui avait proposé un pacte de stabilité pour les Balkans. Il a indiqué que les aspects humanitaires de la crise seraient prochainement évoqués lors de deux réunions importantes :

- le sommet de l'Otan à Washington, au cours duquel pourrait être précisé le rôle de l'Alliance dans l'action humanitaire et l'aide au développement ;

- une réunion, en marge de celle du Fonds monétaire international, du Comité " Balkans ", la semaine prochaine, destinée à évoquer l'appui susceptible d'être apporté à l'Albanie et à la Macédoine.

A la suite de l'exposé du ministre délégué à la coopération et à la francophonie, un débat s'est engagé avec les membres de la commission.

M. Hubert Durand-Chastel a demandé des précisions sur les conséquences de la rupture des relations diplomatiques entre Belgrade et Tirana et sur la notion de corridor humanitaire.

M. Aymeri de Montesquiou, tout en se félicitant de l'attention désormais portée à l'aide au développement des pays voisins du Kosovo, a déploré que l'Alliance n'ait pas anticipé les difficultés provoquées par l'exode de réfugiés kosovars. Il s'est demandé s'il n'aurait pas fallu décréter un embargo à l'encontre de la Serbie avant d'envisager des frappes aériennes.

Mme Danielle Bidard-Reydet a interrogé le ministre sur les conditions dans lesquelles pourraient être envisagés des parachutages de vivres au Kosovo. Elle l'a également questionné sur l'évolution de la situation diplomatique et la recherche d'une issue politique au conflit.

M. Xavier de Villepin, président, s'est lui aussi interrogé sur la possibilité d'effectuer des parachutages de vivres pour venir en aide aux populations restées au Kosovo. Il a demandé si la présence au sol d'une force de protection des réfugiés était envisageable sans accord de paix préalable et en dehors d'un mandat du Conseil de sécurité des Nations unies.

En réponse à ces interventions, M. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie, a apporté les précisions suivantes :

- la rupture des relations diplomatiques entre la République fédérale de Yougoslavie et l'Albanie avait entraîné la fermeture de la frontière entre les deux pays ;

- la notion de corridor ou de zone humanitaire impliquait une présence au sol pour protéger les réfugiés, qui n'était possible que dans deux hypothèses : l'acceptation, à l'issue d'une négociation politique, d'une force d'interposition, ou une intervention terrestre, celle-ci ne devant pas être nécessairement écartée dans la mesure où l'Otan avait une obligation de résultat, mais n'étant pas actuellement à l'ordre du jour ;

- l'accélération de l'épuration ethnique, selon un plan méthodiquement préparé, a provoqué un exode dont l'ampleur avait effectivement surpris ; la mise en place d'une infrastructure d'accueil des réfugiés avant l'engagement des frappes aériennes n'était pas envisageable car elle aurait semblé légitimer par avance l'entreprise des autorités serbes ;

- la France est traditionnellement réservée sur les embargos qui atteignent essentiellement les populations civiles ;

- le parachutage de vivres au Kosovo posait de difficiles problèmes techniques en raison des difficultés d'un guidage précis vers les populations concernées ;

- la France continuait de privilégier la recherche d'une solution diplomatique en coopération étroite avec ses Alliés ainsi qu'avec les Russes sur la base des conditions déjà posées incluant notamment la mise en place d'une force d'interposition.

Mercredi 28 avril 1999

- Présidence de M. Xavier de Villepin, président -

Nomination de rapporteurs

La commission a d'abord procédé à la nomination de rapporteurs. Elle a désigné :

- M. André Boyer comme rapporteur sur les projets de loi n° 307 (1998-1999) autorisant la ratification de la convention relative à l'adhésion de la République d'Autriche, de la République de Finlande et du Royaume de Suède à la convention concernant la compétence judiciaire et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale, ainsi qu'au protocole concernant son interprétation par la Cour de justice, avec les adaptations y apportées par la convention relative à l'adhésion du Royaume de Danemark, de l'Irlande et du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord, par la convention relative à l'adhésion de la République hellénique et par la convention relative à l'adhésion du Royaume d'Espagne et de la République portugaise, et n° 308 (1998-1999) autorisant la ratification de la convention relative à l'adhésion de la République d'Autriche, de la République de Finlande et du Royaume de Suède à la convention sur la loi applicable aux obligations contractuelles, ouverte à la signature à Rome le 19 juin 1980, ainsi qu'aux premier et deuxième protocoles concernant son interprétation par la Cour de justice ;

- M. Hubert Durand-Chastel sur le projet de loi n° 314 (1998-1999) autorisant l'approbation de l'avenant n° 5 à la convention du 28 février 1952 entre la France et la Principauté de Monaco sur la sécurité sociale ;

- M. Paul Masson sur le projet de loi n° 315 (1998-1999) autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse relatif à la réadmission des personnes en situation irrégulière, signé à Berne le 28 octobre 1998.

Missions d'information à l'étranger - Communication

La commission a ensuite eu un échange de vues sur les prochaines missions ponctuelles d'information de la commission :

- sur la suggestion de MM. André Boyer et André Rouvière, elle a retenu le principe d'une mission ponctuelle en Moldavie afin de s'informer sur la situation économique et politique dans ce pays et sur les relations bilatérales franco-moldaves ;

- sur la suggestion de Mme Paulette Brisepierre et de M. Xavier de Villepin, président, elle a retenu le principe d'une mission ponctuelle au Maroc afin de contribuer à la qualité des relations franco-marocaines et de s'informer sur l'évolution de la situation politique et économique au Maroc ;

- la commission a enfin, sur la suggestion de M. Xavier de Villepin, président, décidé de prendre contact avec le ministère de la défense afin d'examiner la possibilité, pour une délégation de la commission, de rendre visite aux forces françaises engagées dans le cadre de la crise au Kosovo, et d'avoir des entretiens politiques en Albanie et en Macédoine.

Traités et conventions - Accords France-Guatemala, France-Honduras, France-Nicaragua - Encouragement et protection réciproques des investissements - Examen des rapports

La commission a ensuite procédé à l'examen des rapports de M. Hubert Durand-Chastel sur les projets de loi  n° 211 (1998-1999) autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de la République française et leGouvernement de laRépublique du Guatemala sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements, n° 212 (1998-1999) autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de laRépublique du Honduras sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements, et n° 213 (1998-1999) autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de laRépublique du Nicaragua sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements.

Après avoir souligné l'importance des accords bilatéraux destinés à garantir les investissements français, de plus en plus nombreux, réalisés à l'étranger, M. Hubert Durand-Chastel, rapporteur, a indiqué que les trois accords d'encouragement et de protection réciproques des investissements signés avec le Guatemala, le Honduras et le Nicaragua étaient rédigés en des termes quasiment identiques, analogues à ceux des textes similaires déjà conclus entre la France et plus de 80 pays.

Ces accords stipulent, a-t-il précisé, une garantie de traitement juste et équitable des investissements étrangers, la protection de ces investissements, la liberté des transferts, une indemnisation prompte et adéquate en cas de nationalisation et, enfin, un mécanisme d'arbitrage international pour le règlement des différends.

Le rapporteur a ensuite effectué une rapide présentation des trois pays d'Amérique centrale avec lesquels la France a conclu ces accords.

S'agissant du Guatemala, M. Hubert Durand-Chastel, rapporteur, a évoqué la mise en oeuvre des accords de paix de 1996 qui ont mis fin à 35 années de guerre civile, et particulièrement les réformes tendant à redéfinir le rôle des forces armées, à moderniser l'Etat et à lutter contre la corruption. Il a toutefois relevé les limites de cette oeuvre de pacification, compte tenu des séquelles de la guerre civile, notamment l'importance du nombre des personnes déplacées ou réfugiées, et compte tenu de l'extrême pauvreté de la population.

Le rapporteur a ensuite abordé l'évolution récente du Honduras, engagé dans un programme de " démilitarisation " et de réorganisation de l'Etat.

En ce qui concerne enfin le Nicaragua, il a souligné la consolidation de la démocratie depuis l'élection en 1990 de Mme Chamorro, dont le successeur à la Présidence de la République depuis 1996, M. Aleman, poursuit une politique de reconstruction de l'Etat et de réconciliation nationale, à laquelle le Front sandiniste, transformé en parti politique, continue toutefois de s'opposer.

M. Hubert Durand-Chastel, rapporteur, a alors évoqué le contexte politique régional, marqué par une réduction des tensions et les progrès de l'intégration régionale, avec la zone de libre échange formée par le Guatemala, le Honduras, le Salvador et le Nicaragua, et le projet d'union politique centraméricaine.

Le rapporteur a ensuite donné quelques indications sur la situation économique du Guatemala, du Honduras et du Nicaragua, subordonnée aux cours mondiaux des produits agricoles exportés, tels que le café et la banane, et très dépendante de l'aide extérieure, alors qu'une large majorité de la population demeure en dessous du seuil de pauvreté. Il a également rappelé l'ampleur des dégâts provoqués par l'ouragan Mitch, à l'automne dernier.

M. Hubert Durand-Chastel, rapporteur, a alors abordé les relations bilatérales entre la France et le Guatemala, le Honduras et le Nicaragua.

Il a d'abord rappelé l'impact politique de la visite d'Etat du Président de la République en Amérique centrale en novembre dernier. Il a détaillé les divers aspects de la coopération culturelle bilatérale, concentrée sur le soutien et la protection de la langue française, peu enseignée dans les trois pays. Il a relevé qu'en matière économique, l'essentiel des relations de ces pays s'était établi avec les Etats-Unis, le Mexique et les autres pays d'Amérique centrale, la France ne détenant que moins de 1 % des parts de marché, soit beaucoup moins que d'autres pays européens comme l'Allemagne et l'Espagne. De même, a-t-il indiqué, peu d'entreprises françaises se trouvent implantées dans ces pays.

Le rapporteur a ensuite précisé que le Guatemala, le Honduras et le Nicaragua avaient engagé des programmes de privatisation et qu'avec le soutien de bailleurs de fonds, ils mettaient en oeuvre des projets de développement des infrastructures. Il a considéré que, sans surestimer les perspectives d'affaires, ce contexte devait conduire les entreprises françaises à s'intéresser aux appels d'offres qui ne manqueraient pas d'être lancés dans cette région.

Dans cette perspective, il a proposé à la commission d'émettre un avis favorable à l'adoption des trois projets de loi autorisant l'approbation des accords d'encouragement et de protection réciproques des investissements signés entre la France et le Guatemala, le Honduras et le Nicaragua.

A la suite de l'exposé du rapporteur, M. Xavier de Villepin, président, a évoqué les conditions dans lesquelles se présentait le sommet Union européenne-Amérique latine du mois de juin prochain. Il a notamment signalé les difficultés liées aux discussions relatives à l'accès du marché européen pour les produits agricoles latino-américains. S'agissant du Guatemala, il a observé que le dialogue entre les autorités politiques et les communautés indigènes devenait difficile. Il a enfin interrogé le rapporteur sur la récente évolution du contentieux de la banane, opposant l'Union européenne aux Etats-Unis, ainsi qu'aux pays latino-américains.

M. Christian de La Malène s'est interrogé sur les risques de résurgence des conflits internes dans les pays d'Amérique centrale.

M. Charles-Henri de Cossé-Brissac a demandé des précisions sur le nombre des réfugiés guatémaltèques au Mexique.

A la suite de ces interventions, M. Hubert Durand-Chastel, rapporteur, a apporté les précisions suivantes :

- la récente décision de l'organisation mondiale du commerce (OMC) relative au contentieux de la banane a renforcé les demandes américaines et contraindra l'Union européenne à ouvrir son marché ; en revanche, l'OMC a très nettement réduit l'évaluation du préjudice subi par les producteurs américains par rapport aux estimations que ceux-ci avaient avancées ;

- environ 40.000 Guatémaltèques qui s'étaient réfugiés au Mexique durant la guerre civile sont désormais de retour au Guatemala.

La commission a alors approuvé les trois projets de loi qui lui étaient soumis.

Traités et conventions - Ratification des amendements à la convention portant création de l'Organisation internationale de télécommunications maritimes par satellites (INMARSAT) relatifs à la création de l'Organisation internationale de télécommunications mobiles par satellites - Examen du rapport

Puis la commission a examiné le rapport de M. André Rouvière sur leprojet de loi n° 239 (1998-1999) autorisant la ratification des amendements à la convention portant création de l'Organisation internationale de télécommunications maritimes par satellites (INMARSAT) relatifs à la création de l'Organisation internationale de télécommunications mobiles par satellites (ensemble une annexe).

M. André Rouvière, rapporteur, a d'abord rappelé l'origine et la mission de l'Organisation internationale de télécommunications maritimes par satellites (INMARSAT) créée en 1979 : son objectif était alors de mettre en place le secteur spatial nécessaire à l'amélioration des communications maritimes. Progressivement, a rappelé le rapporteur, INMARSAT a élargi ses activités pour devenir l'unique fournisseur de télécommunications universelles mobiles par satellites, à la fois pour des applications commerciales et des applications de détresse et de sécurité.

INMARSAT, a poursuivi le rapporteur, repose sur deux instruments juridiques : la convention de 1979 elle-même, tout d'abord, qui réunit aujourd'hui 86 Etats ; l'accord d'exploitation ensuite, signé par l'opérateur de télécommunications désigné par chaque Etat et dénommé le signataire. France Telecom est ainsi le signataire pour la France et participe à hauteur de 5,1 % en tant qu'investisseur et utilisateur du système satellitaire proposé par INMARSAT. En effet, chaque signataire finance l'Organisation au prorata de son utilisation du système INMARSAT.

Après avoir décrit les principaux services de communication proposés par l'Organisation, M. André Rouvière, rapporteur, a fait observer que depuis novembre 1998, INMARSAT a perdu son monopole dans la fourniture de services de télécommunications mobiles par satellites. Une concurrence est apparue, notamment par le lancement des projets Iridium et Globalstar, ICO, la filiale d'INMARSAT -à hauteur de 10 %- tendant également à développer ses propres matériels et services.

La modification proposée de la structure d'INMARSAT constituait donc -a précisé le rapporteur- une réponse adaptée à la nouvelle configuration du marché. Les amendements à la convention -dont l'approbation fait l'objet du projet de loi- ont ainsi pour objet de modifier la structure actuelle de coopérative internationale de l'Organisation. En effet, les contraintes financières et la recherche d'alliances avec des partenaires nécessitaient une forme de privatisation. La réforme conduit ainsi à la juxtaposition d'une société par actions, entièrement nouvelle, d'une part, et de l'organisation intergouvernementale, dont le statut est modernisé mais la mission maintenue dans son rôle d'utilité publique, d'autre part :

- la future société privée " INMARSAT PLC ", correspondant à une société anonyme, sera basée à Londres et recevra les actifs correspondants par transformation en actionnaires des actuels signataires. Dans les deux ans qui suivront la création de la société, une ouverture à des investisseurs extérieurs sera possible ;

- l'organisation internationale voit, d'autre part, son statut rénové -à travers les amendements apportés en 1998 à la convention originelle-, pour tenir compte de la création de la nouvelle société. Les Etats parties veilleront au respect de principes de base de fourniture de services de détresse et de sécurité en mer.

Le rapporteur a ensuite répondu aux questions des commissaires.

M. Robert del Picchia a relevé que, grâce à INMARSAT, le téléphone mobile par satellite était une réalité depuis plusieurs années. Il a estimé qu'il était de l'intérêt de France Telecom, grâce à la modification du statut d'INMARSAT, de se positionner favorablement sur ce marché désormais très concurrentiel.

En réponse à M. Xavier de Villepin, président, M. André Rouvière, rapporteur, a précisé que la part d'investissement des opérateurs de télécommunications au sein d'INMARSAT était calculée au prorata de leur utilisation des services proposés par l'Organisation.

Puis la commission a approuvé le projet de loi qui lui était soumis.

Affaires étrangères - Situation en Irak - Communication

La commission a enfin entendu une communication de M. André Dulait sur la situation en Irak.

M. André Dulait
a tout d'abord rappelé les contraintes qui avaient caractérisé l'évolution historique de l'Irak depuis 1930, en particulier une instabilité politique chronique.

Il a précisé que l'Irak comprenait trois zones territoriales principales : la zone kurde, dont la population était divisée en courants pro-iranien, pro-turc et pro-irakien et où fleurissaient divers trafics ; la zone sunnite autour de Bagdad ; et la zone chiite du sud, théâtre de conflits récurrents attisés par des pays voisins. La politique irakienne, traditionnellement expansionniste, constituait -a ajouté M. André Dulait- une autre caractéristique de l'histoire du pays, comme l'avait illustré son action contre le Koweit.

Abordant la situation actuelle de l'Irak, M. André Dulait l'a qualifiée de désespérante, évoquant une situation économique dramatique, une industrie détruite, des classes moyennes démobilisées, et une population éprouvée par tant d'années de conflits. Le parti gouvernemental Baas, a précisé M. André Dulait, contrôle très bien le pays, ce qui rendait, à son avis, très aléatoire la perspective d'une déstabilisation de M. Saddam Hussein, souhaitée notamment par les Etats-Unis et la Grande-Bretagne. La diaspora irakienne à l'étranger est, par ailleurs, très divisée, et victime de querelles internes.

M. André Dulait a alors fait observer que les bombardements britanniques et américains étaient dirigés sur des terminaux pétroliers, les infrastructures militaires étant désormais inexistantes.

Si le discours des responsables irakiens témoignait d'une certaine compréhension pour l'action conduite par notre pays lors de la guerre du Golfe, il insistait surtout, a précisé M. André Dulait, sur le rôle aujourd'hui joué par la France dans la dénonciation d'un embargo injuste qui affecte même le bon fonctionnement de l'échange " pétrole contre nourriture ". Pour M. André Dulait, la perpétuation de la situation actuelle risquait de conduire le pays à sombrer dans un sous-développement dramatique.

En concluant, M. André Dulait a fait observer que si les risques d'un éclatement du pays en une zone kurde, d'une part, et une partie chiite au sud du pays, d'autre part, n'étaient pas complètement exclus, la préoccupation fondamentale pour l'avenir de la région dans son ensemble pouvait provenir de la délicate question de l'eau, compte tenu notamment des ouvrages construits en amont de l'Euphrate en territoire turc et qui contribuent à réduire le débit du fleuve.

M. André Dulait a ensuite répondu aux interrogations des commissaires.

A M. Christian de La Malène qui s'étonnait de l'oubli dans lequel était apparemment tombée l'idée d'un équilibre nécessaire entre les deux puissances régionales que sont l'Iran et l'Irak, M. André Dulait a indiqué que l'objectif semblait aujourd'hui être la déstabilisation de l'Irak, la raréfaction de sa production pétrolière constituant un atout pour des pays producteurs comme l'Arabie saoudite et le Koweït.

En réponse à M. Emmanuel Hamel, M. André Dulait a précisé que la France s'efforçait d'être présente dans des secteurs comme la purification de l'eau, visant à alléger les difficultés de la population. Il a fait observer que les conditions de l'embargo et les décisions prises par l'UNSCOM (commission spéciale des Nations Unies) pesaient lourdement sur la fourniture de certains équipements destinés à améliorer la vie quotidienne des Irakiens.

M. André Dulait est convenu avec M. Aymeri de Montesquiou que l'animosité ancienne entre l'Irak et l'Iran n'était plus aussi vive qu'auparavant. Il a également relevé, avec M. Aymeri de Montesquiou, le rôle de la Syrie, qui constituait la deuxième voie de sortie de l'Irak vers l'extérieur.

En réponse à M. Claude Estier, M. André Dulait a estimé que l'apparente adhésion populaire à la personne de Saddam Hussein était acquise sous une certaine contrainte, les préoccupations des Irakiens étant essentiellement tournées vers leurs besoins en nourriture et vers leur souci de trouver un travail.

M. André Dulait a précisé à M. Robert del Picchia que les réserves prouvées de gaz en Irak plaçaient ce pays au premier ou deuxième rang dans le monde en la matière.

M. Xavier de Villepin, président, a indiqué que la situation en Irak donnait le sentiment d'un problème qui s'enlisait, sans aucune perspective pour l'avenir, et déploré l'absence politique de l'Europe sur cette importante question.

Enfin, avec MM. Hubert Durand-Chastel et Aymeri de Montesquiou, M. Xavier de Villepin, président, a évoqué les problèmes protocolaires qui ont été à l'origine de l'annulation de la visite d'Etat en France du Président de la République iranienne.

Jeudi 29 avril 1999

- Présidence de M. Xavier de Villepin, président -

Affaires étrangères - Audition de M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères, sur le Sommet de Washington et l'évolution de la crise au Kosovo

La commission, élargie aux membres de la Conférence des Présidents du Sénat et en présence de M. Christian Poncelet, Président du Sénat, a entendu M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères.

M. Hubert Védrine a d'abord souligné que le dernier sommet de l'Alliance Atlantique à Washington avait fait l'objet de longues négociations préalables. Il a rappelé que les Etats-Unis proposaient, d'une part, d'élargir les missions confiées à l'OTAN, d'autre part d'étendre la zone de compétence géographique de cette organisation, et enfin de reconnaître en faveur de l'Alliance une capacité d'intervention indépendante des décisions des Nations Unies. Il a observé que ces positions reposaient sur la volonté américaine de prendre en compte des menaces d'un type nouveau et d'assurer la pérennité de l'OTAN après l'effondrement de l'Union soviétique.

Revenant alors sur l'articulation entre les responsabilités respectives du Conseil de sécurité et de l'Alliance atlantique, le ministre des affaires étrangères a souligné que l'accord donné par la France à l'automne dernier pour permettre à l'OTAN d'agir, y compris par des moyens militaires, dans le cadre de la crise du Kosovo -alors même que les trois résolutions des Nations Unies, malgré leur caractère très circonstancié, n'avaient pas prévu de manière explicite le recours à la force- revêtait un caractère exceptionnel lié à la violation systématique des obligations de ces résolutions et au blocage qui en résulte. Les Etats-Unis au contraire, a ajouté le ministre, souhaitaient ériger l'autosaisine de l'OTAN comme un principe valable de manière générale.

M. Hubert Védrine a indiqué que la négociation s'était poursuivie sur ce point jusqu'à la veille du sommet de Washington : la France, qui s'appuyait notamment sur la référence que l'article 7 du traité de l'Atlantique-nord fait à la Charte des Nations Unies, a fermement défendu la primauté qui doit revenir au Conseil de sécurité ; les Etats-Unis ont alors, a ajouté le ministre des affaires étrangères, retiré leurs propositions visant à donner à l'Alliance atlantique une capacité d'autosaisine et accepté d'inscrire dans les textes adoptés plusieurs mentions au rôle des Nations-Unies et, en particulier, du Conseil de sécurité.

Le ministre des affaires étrangères a ensuite évoqué la volonté partagée par la France et le Royaume-Uni de mieux faire reconnaître l'objectif d'une identité européenne de sécurité et de défense au sein de l'Alliance. Il a rappelé à cet égard les réticences que soulevait cette question auprès des membres de l'OTAN qui n'appartiennent pas à l'Union européenne. M. Hubert Védrine a toutefois souligné que le communiqué adopté à l'issue du sommet ainsi que la déclaration relative au concept stratégique saluaient de manière satisfaisante l'identité européenne de défense et de sécurité.

Le ministre des affaires étrangères a relevé que le sommet de Washington avait illustré le rayonnement de l'OTAN, notamment vis-à-vis des pays qui ne sont pas encore membres de l'Alliance mais souhaiteraient le devenir. Il a cité à cet égard la réunion des sept pays de la zone balkanique, ainsi que les rencontres avec les Etats membres du Conseil de partenariat euroatlantique et ceux du " groupe de Minsk ".

M. Hubert Védrine a souligné que les représentants des 19 Etats membres de l'Alliance atlantique avaient à l'unanimité rappelé les objectifs de l'action conduite au Kosovo et leur détermination à renforcer la pression sur les forces serbes, tout en poursuivant la même stratégie.

Evoquant l'évolution de la situation au Kosovo, M. Hubert Védrine a observé que les Alliés poursuivaient leur réflexion sur le contenu du règlement politique qui devra nécessairement suivre la fin du conflit. Il a souligné à cet égard leur commun accord sur la nécessité d'une résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies, la reconnaissance d'une autonomie substantielle du Kosovo et la nécessité, pour la communauté internationale, de garantir une protection du Kosovo dans des conditions qui restaient à déterminer. Le ministre des affaires étrangères a également relevé que les discussions continuaient sur la composition et sur le mode de fonctionnement et de commandement de la future force internationale qui devra être mise en place. Il a rappelé l'attention accordée au dialogue avec les autorités russes afin de favoriser une issue à la crise actuelle. Il a enfin constaté, à la suite du limogeage du vice-premier ministre yougoslave, M. Draskovic, que les positions adoptées par cette personnalité traduisaient une opposition à M. Milosevic et non pas une évolution des positions des autorités serbes.

A l'issue de cet exposé, un débat s'est engagé entre les sénateurs et le ministre.

M. Christian de La Malène s'est interrogé sur la nature des buts de guerre aujourd'hui poursuivis par l'Alliance. Il s'est demandé si, au stade actuel, les objectifs qui avaient motivé l'engagement des frappes aériennes n'étaient pas passés au second plan derrière la question du prestige des Etats-Unis et celle de la crédibilité de l'OTAN. Il s'est fortement inquiété du manque de perspectives résultant, à ses yeux, de la poursuite de la stratégie politique et militaire de l'Alliance. Citant l'exemple de l'Irak, dont le régime politique n'a pas évolué malgré l'embargo et les frappes aériennes, il a émis la crainte que la situation ne demeure figée si M. Milosevic ne cédait pas.

M. Robert del Picchia s'est demandé quels moyens de pression resteraient à la disposition de l'Alliance lorsque tous les objectifs stratégiques auront été atteints à l'issue de la campagne aérienne. Faisant allusion aux positions prises par M. Draskovic, il a souhaité savoir si l'on pouvait envisager une évolution de l'opinion publique serbe à l'égard de ses dirigeants.

Mme Danielle Bidard-Reydet a indiqué que le Parlement japonais venait d'accepter de modifier la teneur du traité de sécurité entre le Japon et les Etats-Unis dans le sens d'un élargissement de sa zone d'application et de son extension à des actions qui n'étaient plus exclusivement défensives. Rapprochant cet événement des positions américaines lors de l'élaboration du nouveau concept stratégique de l'OTAN, elle s'est demandé si ce dernier, malgré les inflexions obtenues par la France, demeurait compatible avec le respect des principes du droit international et de la Charte des Nations Unies. S'agissant de la crise du Kosovo, elle a souhaité que les pays de l'Alliance accentuent la recherche d'une solution négociée et elle a jugé intéressantes les propositions françaises d'un règlement qui impliquerait l'Organisation sur la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).

Appuyée par le Président Christian Poncelet, qui a estimé indispensable que les deux assemblées bénéficient des mêmes informations gouvernementales, Mme Danielle Bidard-Reydet a demandé que les sénateurs disposent du texte du projet d'accord élaboré dans le cadre des discussions de Rambouillet, ainsi que des documents adoptés lors du sommet de Washington.

M. Xavier de Villepin, président, a approuvé l'action de la diplomatie française en vue de mieux articuler les compétences de l'OTAN et les principes de la Charte des Nations Unies. Il s'est demandé si une bonne part des difficultés actuelles pour préciser le rôle de l'OTAN ne provenait pas de son élargissement qui a pu être ressenti par la Russie comme une humiliation.

M. André Dulait s'est demandé s'il ne fallait pas craindre que l'opposition des Etats-Unis à l'instauration de la Cour pénale internationale ne conduise à faire obstacle à l'entrée en vigueur du traité adopté à Rome en juin dernier.

M. Michel Caldaguès s'est félicité de l'efficacité de l'action du président de la République et de la diplomatie française pour renforcer dans le nouveau concept stratégique de l'OTAN les références au Conseil de sécurité des Nations Unies. Il a toutefois souhaité savoir si le texte définitivement adopté ne préservait pas la possibilité d'intervention de l'OTAN sans l'accord du Conseil de sécurité. En ce qui concerne la gestion de la crise du Kosovo, il s'est interrogé sur les raisons qui faisaient qu'à aucun moment le recours à des capacités militaires européennes propres -telles que le Corps européen, Eurofor ou Euromarfor- n'avait été envisagé.

M. Philippe de Gaulle a souhaité obtenir des précisions sur la nature des populations quittant le Kosovo et a en particulier demandé si elles comptaient des Albanais qui se seraient installés récemment dans la province.

M. Aymeri de Montesquiou s'est demandé si l'action diplomatique vis-à-vis de la Russie et de la Chine, en vue de les dissuader d'utiliser leur droit de veto au Conseil de sécurité, avait été suffisante. Il a interrogé le ministre sur les conséquences du retrait des observateurs de l'OSCE au Kosovo et sur l'intention prêtée à la diplomatie américaine d'exclure une éventuelle force internationale des contingents de pays orthodoxes. Il s'est également demandé s'il n'aurait pas été plus opportun de décréter l'embargo pétrolier à l'encontre de la Serbie avant d'engager des frappes aériennes et si la menace d'une inculpation devant le Tribunal pénal international ne dissuadait pas le président Milosevic de s'engager dans une négociation.

M. Alain Peyrefitte a souhaité obtenir des précisions sur la nature exacte de la situation actuelle de la France au sein de l'OTAN, en ce qui concerne notamment la préservation de sa liberté d'action. Il s'est demandé si la France n'aurait pas eu intérêt à rester en retrait des opérations militaires afin de conserver, pour la recherche d'une solution politique, une capacité de médiation -voire d'interposition- qui semble aujourd'hui être l'apanage de la Russie. Enfin, il a demandé si l'affirmation par les pays de l'Alliance d'un refus extrêmement clair de négocier à l'avenir avec M. Milosevic ne serait pas de nature à renforcer la contestation de son autorité et à faire évoluer la situation politique à Belgrade.

M. Emmanuel Hamel s'est interrogé sur les formes que pourrait prendre une intensification de l'action en faveur des réfugiés kosovars, de nature à préserver l'adhésion de l'opinion publique à la politique menée par les autorités françaises.

Le Président Christian Poncelet a enfin souhaité savoir si, au sein de l'Alliance, d'autres pays que la France agissaient auprès de la Russie en vue de la conduire à favoriser une issue politique. Il a demandé au ministre des affaires étrangères s'il était envisageable de s'appuyer sur des opposants à M. Milosevic, et par exemple sur M. Draskovic, pour relayer les propositions des pays de l'Alliance afin de faire évoluer l'opinion publique serbe.

A la suite de ces interventions, M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères, a apporté les précisions suivantes :

- la France écarte naturellement l'idée que le souci de préserver le prestige ou la crédibilité de l'OTAN puisse conduire à une fuite en avant dans la poursuite du conflit ; ce souci est partagé par les Etats-Unis, ainsi qu'en témoigne la prudence du Président Clinton face à la question d'une éventuelle opération terrestre ; la France accorde par ailleurs une importance toute particulière au maintien du contrôle politique sur le commandement militaire des opérations ;

- les objectifs de l'opération militaire n'ont pas varié et demeurent toujours la mise hors d'état de nuire de l'appareil militaire et répressif serbe ;

- si certains aspects du cadre politique définis à Rambouillet demeurent valables, à commencer par l'autonomie du Kosovo, ce cadre devra être adapté pour prendre en compte l'évolution de la situation en traitant notamment la question des réfugiés et en précisant l'étendue exacte de la souveraineté yougoslave ;

- la décision d'intensifier les frappes aériennes, qui seront désormais conduites 24 heures sur 24, vise à empêcher le regroupement et la réorganisation des forces serbes ;

- la phase actuelle des opérations militaires, dite phase 2, se caractérise par le contrôle des autorités politiques sur la désignation des cibles ; le passage à la phase 3 n'est pas envisagé actuellement ;

- le limogeage de M. Draskovic peut être considéré comme un signe annonciateur d'un changement du climat politique à Belgrade, qui semble également confirmé par l'évolution de l'état d'esprit de la population ;

- si nous progressons vers nos objectifs militaires, à savoir la paralysie de la machine de répression serbe, il reste à trouver une issue politique, que doit favoriser une plus large implication de la Russie ;

- le ministère des affaires étrangères a élaboré un résumé des dispositions prévues à Rambouillet au dernier stade des négociations, ce document pouvant bien entendu être communiqué aux sénateurs ;

- la France continue à oeuvrer activement pour la recherche d'une solution négociée, même si elle a dû se résoudre à participer à l'emploi de moyens militaires pour réagir à une situation devenue intolérable ;

- si les Etats-Unis, avec le plus souvent la compréhension de leurs partenaires, cherchent effectivement à pouvoir mener des opérations de gestion des crises sans mandat automatique du Conseil de sécurité des Nations Unies, la France s'efforce pour sa part de faire prévaloir le droit international et la Charte des Nations Unies ; ses efforts se sont traduits par plusieurs références, dans le nouveau concept stratégique de l'OTAN, à la Charte et au Conseil de sécurité des Nations Unies ;

- l'élargissement de l'OTAN répond aux demandes insistantes des pays d'Europe centrale et orientale qui ont souhaité adhérer à l'Organisation ; pour autant, les pays de l'Alliance n'ont pas sous-estimé les réactions russes à cet élargissement et ont recherché un point d'équilibre avec l'élaboration de " l'acte fondateur " OTAN-Russie ;

- l'opposition des Etats-Unis au traité relatif à la Cour pénale internationale risque effectivement de ralentir le processus de ratification de ce dernier et la réunion des 60 ratifications nécessaires à son entrée en vigueur ;

- l'absence de recensement récent au Kosovo conduit à considérer avec beaucoup de prudence les chiffres relatifs à la composition ethnique de la population de la province ; celle-ci serait composée, à hauteur de 85 à 90 %, par des Albanais implantés de longue date au Kosovo ; en dehors des Serbes, la population du Kosovo comporte également des minorités turque et bulgare ;

- la recherche d'un consensus sur un règlement politique au sein du Conseil de sécurité implique préalablement un accord avec la Russie, et ensuite des discussions avec la Chine ;

- les observateurs de l'OSCE n'étaient plus en mesure d'accomplir leur mission au Kosovo et leur retrait était donc devenu inévitable ;

- les Etats-Unis n'ont prononcé aucune exclusive quant à la composition de l'éventuelle force internationale qui serait envoyée au Kosovo en cas de règlement du conflit ; ils sont en revanche attachés à la présence dans cette force de troupes américaines et au maintien de la chaîne de commandement de l'OTAN ;

- aucun des dirigeants de l'Alliance n'a formellement exclu l'hypothèse d'une négociation avec M. Milosevic ; le Tribunal pénal international agit, pour sa part, en totale indépendance vis-à-vis des pays de l'Alliance ;

- la position française vis-à-vis de l'OTAN consiste toujours à rester en dehors des structures militaires intégrées afin qu'en aucune manière des forces françaises ne puissent être engagées sans l'accord des autorités politiques nationales ;

- il est illusoire de penser que la France aurait pu invoquer la recherche d'une solution diplomatique pour refuser de s'associer à l'opération militaire en cours, dans la mesure où, comme tous ses partenaires, elle avait fait le constat de l'obstination des autorités serbes après plus d'un an de négociations et d'efforts diplomatiques ;

- la France constitue aujourd'hui le troisième pays d'accueil pour les réfugiés kosovars et elle développe son aide à l'Albanie et à la Macédoine ;

- les autorités françaises sont disposées à discuter, s'il le souhaitait et s'il le pouvait, avec M. Draskovic ; par ailleurs, M. Rugova a été invité à s'exprimer devant le prochain Conseil des affaires générales de l'Union européenne, ce qui permettra de juger si les autorités de Belgrade le laissent effectivement disposer de sa liberté de mouvement et de parole.