Table des matières




Mercredi 27 mars 2002

- Présidence de M. Xavier de Villepin, président -

Mission d'information en Israël et dans les territoires palestiniens - Compte rendu

La commission a tout d'abord entendu un compte rendu, par M. Xavier de Villepin, président, de la mission effectuée par une délégation de la commission en Israël et dans les Territoires palestiniens, du 17 au 21 mars 2002.

M. Xavier de Villepin, président, a rappelé qu'une délégation de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, qu'il conduisait, également composée de M. Michel Pelchat, Mme Danièle Bidard-Reydet, M. Daniel Goulet, Mme Monique Cerisier-ben Guiga et M. Jean-Guy Branger, s'est rendue, du 17 au 21 mars dernier, en Israël et dans les Territoires palestiniens. Décidée il y a plusieurs mois, cette mission intervenaità un moment-clé entre deux tendances fortes : d'une part, un niveau de violence jamais atteint auparavant, mais, d'autre part, des initiatives internationales inédites en faveur d'une perspective politique.

Après avoir décrit le programme de la délégation, M. Xavier de Villepin, président, a fait part de l'appréciation générale retirée de cedéplacement, articulée autour de trois éléments : les facteurs d'espoir, les risques de blocage, enfin les ambiguïtés persistantes empêchant toute perspective claire.

Le premier élément d'espoir était l'initiative saoudienne proposant une paix globale avec Israël contre le retrait de ce pays aux frontières de 1967. Le réengagement américain dans la région, en second lieu, pouvait appuyer celui de la communauté internationale dans son ensemble : ainsi, il convenait de se féliciter de l'initiative américaine de la résolution 1397 du Conseil de sécurité de l'ONU, ou du retour sur place du général Zinni pour relancer d'abord le plan Tenet pour un cessez-le-feu, permettant éventuellement les avancées plus politiques prévues par les propositions Mitchell en vue de la reprise des négociations entre les parties.

Enfin, le thème d'une reconnaissance de l'Etat palestinien, considérée comme un préalable à un nouveau processus de négociation au lieu d'en être l'aboutissement, évoqué dans la proposition française comme dans le plan Pères-Abou Ala, pouvait, avec l'initiative saoudienne et la résolution 1397, provoquer un progrès significatif.

M. Xavier de Villepin, président, a ensuite abordé lesrisques de blocage : d'abord la violence, qui a atteint un niveau jamais vu, affectant, des deux côtés, la population civile. L'armée israélienne elle-même apparaissait plus vulnérable. Par ailleurs, dans ses actions de ripostes, celle-ci en venait souvent à s'en prendre à des membres des services de santé ou de secours, comme l'avaient signalé à la délégation des responsables du CICR (Comité international de la Croix-Rouge) ou de l'UNRWA (United Nations Relief and Works Agency).

La situation, a poursuivi M. Xavier de Villepin, président, était ensuite compliquée par la persistance de dossiers vitaux pour chacune des parties et auxquels nul ne semblait vouloir renoncer.

Ainsi du « droit au retour » des réfugiés, réclamé par les Palestiniens, et dont le principe, pour une très grande majorité d'Israéliens, signifierait, à terme, la fin de l'Etat juif. La « décolonisation » ensuite : un retour aux frontières de 1967 entraînerait le démantèlement, en tout ou partie, des implantations actuelles.

Le pessimisme israélien devant les risques régionaux peut aussi constituer un élément de blocage. Israël n'exclut ainsi pas le risque d'une escalade provoquée à sa frontière nord, compte tenu du rôle du Hezbollah, soutenu par l'Iran. Ce serait, après l'Intifada, l'ouverture d'un second front, très dangereux pour toute la région. Les Israéliens relèvent par ailleurs la fragilité potentielle des régimes égyptien et jordanien face à une opinion publique radicalisée. Qu'en serait-il ensuite des risques, pour Israël, d'une action américaine en Irak ? Il s'y ajoute enfin les inquiétudes face aux menaces liées aux futures capacités balistiques de l'Iran.

Pour M. Xavier de Villepin, président, les situations politiques respectives sont également à prendre en compte :

- côté palestinien, Yasser Arafat n'est plus, pour Israël, un interlocuteur fiable, et personne n'est en mesure d'identifier un successeur potentiel. Il est par ailleurs très difficile de mesurer la réalité de son autorité sur certains groupes activistes comme le Hamas et le Djihad. Le pouvoir de Yasser Arafat s'exerce par ailleurs dans un cadre institutionnel très particulier, sa contrepartie législative, le Conseil national palestinien n'étant plus en mesure, du fait des blocages, de se réunir et donc de travailler ;

- côté israélien, M. Ariel Sharon apparaît comme ayant échoué dans sa politique sécuritaire : les élections sont, certes, prévues en octobre 2003, mais rien n'exclut que des élections anticipées n'auront pas lieu qui empêcheraient, avant leur échéance, tout processus de négociation, tout en pesant sur ses enjeux.

M. Xavier de Villepin, président, a ensuite souligné la persistance d'ambiguïtés sur des questions essentielles : tout d'abord, l'ambiguïté de l'opposition actuelle entre, d'une part, l'exigence prioritaire du Premier ministre israélien sur la sécurité et, d'autre part, les perspectives politiques exigées, en parallèle, par les Palestiniens. Ce différend est au coeur des négociations sur la mise en oeuvre de la séquence Tenet-Mitchell, patronnées par le général Zinni : quel calendrier ? Quel lien entre chacune des étapes ?

Les ambiguïtés des accords d'Oslo, ensuite, et notamment la « fragmentation » des territoires en trois zones, correspondant chacune, à des degrés spécifiques de souveraineté palestinienne (zone A), israélo-palestinienne (zone B) ou exclusivement israélienne (zone C). La pérennisation de fait de ce système, initialement prévu comme transitoire (bouclages, difficultés de circulation, check-points), s'avère particulièrement pénible pour la population palestinienne.

Oslo avait également, a poursuivi M. Xavier de Villepin, président, différé les négociations sur un certain nombre de dossiers-clés : les réfugiés, Jérusalem, les colonies, les frontières, etc..., ce qui, par exemple, autorisait, aux yeux des Israéliens, pendant la période intérimaire, la poursuite et le développement d'une politique d'implantations qui, de fait, n'a jamais été interrompue depuis 1994.

Une ambiguïté plus ancienne revient également sur le devant de la scène, dans le cadre de la résolution 242, qui constitue, avec la résolution 338, la référence de base des négociations de paix : Israël doit-il évacuer « les» territoires occupés en 1967 (traduction française) ou «des » territoires, selon la traduction anglaise ?

Ambiguïté enfin sur la réalité du nécessaire engagement américain. Celui-ci n'est-il que tactique et provisoire, dans le cadre d'une préparation à des frappes contre l'Irak, ou relève-t-il, plus largement, d'une volonté d'instaurer, une fois pour toutes, la paix et la stabilité dans la région ?

M. Xavier de Villepin, président, a conclu son exposé sur deux observations : tout d'abord, il a estimé que, pour combler l'abîme de défiance qui sépare responsables israéliens et palestiniens, une intervention de la Communauté internationale, et principalement des Etats-Unis, est plus nécessaire que jamais. Certains des interlocuteurs de la délégation ont ainsi appelé à l'imposition d'un accord par la Communauté internationale, tant leur semblait illusoire la reprise rapide de négociations bilatérales fructueuses. Dans ce contexte, l'idée d'une interposition d'observateurs internationaux est apparue nécessaire.

M. Xavier de Villepin, président, a estimé que seuls les Etats-Unis peuvent réellement peser sur les acteurs locaux et que l'Union européenne devait s'efforcer, sans renoncer à son propre message, de soutenir et d'accompagner toute initiative américaine prise dans le sens de la paix.

Pour M. Xavier de Villepin, président, la fin de la politique des implantations apparaissait urgente. Cette politique, sur les plans financier et militaire, est, d'ailleurs, pour Israël, difficilement supportable. Pour certains des interlocuteurs israéliens rencontrés par la délégation, ces implantations ne présentent, au surplus, aucune utilité, même stratégique.

La question des réfugiés reste, pour M. Xavier de Villepin, président, un sujet central. Le document international de référence en la matière, la résolution 194 de l'Assemblée générale des Nations unies de 1949, prévoit la possibilité d'un retour, pour les réfugiés qui le souhaitent, ou, à défaut, une indemnisation financière pour ceux qui n'opteraient pas pour ce retour effectif. Le principe d'un droit au retour indiscriminé de réfugiés palestiniens sur le territoire d'Israël est catégoriquement rejeté par tous les partis en Israël.

En concluant, M. Xavier de Villepin, président, a estimé que la situation avait atteint un triple palier : palier de violence, de haine et d'intolérance réciproque ; palier aussi, plus positif, dans les propositions de paix discutées au sein de la Ligue arabe et dans l'apparent revirement de la position américaine dans la région, palier enfin dans la lassitude et l'épuisement moral de la majorité des populations, israélienne ou palestinienne, face à la violence.

A l'issue de l'exposé du président, un débat s'est ouvert entre les commissaires.

Mme Monique Cerisier-ben Guiga s'est dite en plein accord avec l'analyse de M. Xavier de Villepin, président. Elle a indiqué qu'aujourd'hui, se trouvaient face à face, d'un côté la réalisation d'un Etat-nation sur le modèle européen, et de l'autre, un peuple privé d'Etat depuis la domination ottomane, à laquelle avait succédé le mandat britannique, alors même que des pays voisins, notamment la Jordanie et l'Egypte, accédaient à l'indépendance. Reprenant l'analyse formulée par M. Dominique Moïsi lors d'une récente audition devant la commission, elle a estimé que les Palestiniens ne pouvaient que ressentir un sentiment profond d'injustice, ne s'estimant pas responsables des massacres de juifs commis sur le sol européen durant la deuxième guerre mondiale, qui avaient conduit, peu après, à la création de l'Etat d'Israël.

Elle a relevé, par ailleurs, que l'idéal sioniste avait été de permettre au peuple juif de jouir enfin de la sécurité dans le nouvel Etat. Or, aujourd'hui, la peur et l'insécurité sont omniprésentes. Il importait donc désormais d'ouvrir un nouvel horizon politique aux Palestiniens, souci que quelques Israéliens reconnaissaient comme indispensable.

Le désespoir palestinien nourrissait, a poursuivi Mme Monique Cerisier-ben Guiga, une révolte de plus en plus meurtrière, à laquelle les responsables israéliens entendaient répondre de la même manière.

Mme Monique Cerisier-ben Guiga a estimé que la dépossession engendrée par la politique de colonisation, les destructions d'habitations, les bouclages, venaient accroître l'humiliation d'une population palestinienne prisonnière. Elle s'est déclarée pessimiste pour l'avenir, d'autant que l'engagement des Etats-Unis semblait essentiellement dicté par le souci de préparer le champ à une éventuelle intervention en Irak.

Pour autant, Mme Monique Cerisier-ben Guiga a estimé que les deux peuples étaient aujourd'hui fatigués de cette violence et voulaient y mettre un terme. Dans ce contexte, elle a émis le voeu que l'initiative saoudienne puisse favoriser une évolution pacifique.

M. Michel Pelchat a estimé que les Etats-Unis devaient s'impliquer davantage dans le conflit actuel. Ils ne semblaient pas percevoir la réalité de la situation et il n'était pas exclu que les échéances intérieures pèsent sur leur analyse. Il a estimé que l'on pouvait fonder de grands espoirs sur l'initiative du prince Abdallah dont l'on pouvait espérer qu'elle soit approuvée par tous les Etats arabes. A cet égard, il a estimé que les conditions imposées par M. Ariel Sharon au Président de l'Autorité palestinienne pour qu'il puisse se rendre à la réunion de la Ligne arabe à Beyrouth étaient difficilement acceptables. Il était cependant à craindre que l'absence à ce sommet de plusieurs représentants arabes importants n'affaiblisse finalement l'intérêt de la proposition saoudienne.

M. Michel Pelchat a par ailleurs fait observer que les destructions, que la délégation avait constatées à Gaza, étaient moins le résultat de combats que celui d'actions punitives conduites par l'armée israélienne sans véritable raison militaire : arrachages d'oliviers, destructions de maisons, de commissariats de police, du port de Gaza etc.

Pour M. Michel Pelchat, la politique de sécurité conduite par le Premier ministre israélien ne pouvait pas fonctionner. Il convenait donc d'en avoir une approche plus globale, fondée en particulier sur une interposition internationale.

Mme Danielle Bidard-Reydet a relevé que jamais on n'a atteint le niveau de violence actuel. A la source des violences, il faut parler de l'occupation israélienne et de la politique d'implantations, qui n'avait, selon certains Israéliens, aucune justification, ni stratégique, ni économique. Cette politique pesait, au demeurant, lourdement sur le budget israélien. Cette politique répondait en fait, en partie, d'après elle, à des préoccupations idéologiques.

Mme Danielle Bidard-Reydet a estimé que le procédé du bouclage des Territoires palestiniens était également l'une des causes des violences. Ainsi, à Bethlehem, a-t-elle rappelé, 40 chars israéliens avaient récemment investi la ville, et durant 12 jours, les habitants n'avaient pu quitter leur habitation. Du fait de ces bouclages, les hôpitaux sont fréquemment privés d'eau et d'électricité, l'économie est sinistrée et le taux de chômage atteint désormais les 70 %.

Pour Mme Danielle Bidard-Reydet, l'armée israélienne ne se contente pas d'actions de riposte : elle conduit des initiatives répressives dans le cadre d'une politique de punition préventive.

Il importait, par ailleurs, pour Mme Danielle Bidard-Reydet, de préciser que le clivage ne se situait pas entre Israéliens et Palestiniens. Si certains Palestiniens, comme certains Israéliens, entendent poursuivre l'action militaire, la majorité de la population israélienne et de la population palestinienne est favorable à une solution politique. Parmi les personnalités politiques, comme Yasser Rabbo, chez les Palestiniens, et Yossi Beilin, chez les Israéliens, des responsables s'attachent à promouvoir une voie politique.

La proposition du prince Abdallah d'Arabie Saoudite, a poursuivi Mme Danielle Bidard-Reydet, en offrant à tous les Etats arabes de reconnaître Israël en échange du retrait des territoires occupés en 1967, est d'une haute tenue politique. A cet égard, a-t-elle estimé, les conditions posées au déplacement au Sommet de Beyrouth de M. Yasser Arafat par le Premier ministre israélien, ne grandissaient pas ce dernier. Il était par ailleurs regrettable que la Jordanie et l'Egypte soient absentes de cette réunion essentielle de la Ligue arabe.

Pour Mme Danielle Bidard-Reydet, une présence internationale est nécessaire, même si sa mise en oeuvre comporte des difficultés, comme en atteste l'assassinat de deux observateurs (suisse et turc) de la Présence internationale temporaire à Hebron (PITH), survenue près de cette ville de Cisjordanie.

En concluant, Mme Danielle Bidard-Reydet a estimé que la présence de la délégation sénatoriale sur le terrain avait constitué un acte politique positif. Il importait en effet, dans le climat de violence actuel, de tout faire pour soutenir ceux qui, dans chaque camp, s'efforcent de promouvoir la solution politique.

M. Daniel Goulet s'est également félicité de la présence, sur le terrain, d'une délégation de la commission, démontrant l'implication de cette dernière sur le dossier essentiel du conflit du Proche-Orient. Il a souligné l'inégalité du rapport de forces entre les parties en présence, estimant que les violences commises étaient inacceptables. La mission avait été l'occasion de percevoir à quel point les populations étaient désemparées. Tout devait donc être fait pour soutenir l'initiative de paix proposée par le prince Abdallah d'Arabie saoudite. Il convenait enfin, a conclu M. Daniel Goulet, que la commission suive attentivement les développements futurs de la situation au Proche-Orient.

M. Jean-Guy Branger s'est interrogé sur le processus qui avait permis une telle dégradation de la situation. Il a estimé que la reconnaissance de l'Etat palestinien était indissociable d'un accord sur les frontières de ce dernier, or cette question était sans cesse reportée. M. Jean-Guy Branger s'est dit frappé de la disproportion des moyens mis en oeuvre par chacune des parties, du fait de la supériorité militaire très nette de l'armée israélienne. Au surplus, le « mitage » des territoires lié à l'implantation des colonies, la multiplication des points de contrôle, entraînaient une situation économique et humaine catastrophique.

M. Jean-Guy Branger a souligné la qualité du travail conduit par l'UNRWA permettant notamment, dans les camps de réfugiés, le taux de scolarisation le plus élevé des pays arabes. Après avoir déploré que le président de l'autorité palestinienne n'ait pu se rendre au sommet de Beyrouth, M. Jean-Guy Branger a formulé l'espoir que les Etats-Unis, du fait de leur grande influence sur Israël, s'engagent de plus en plus.

M. Christian de La Malène a estimé que toute paix, ou début de paix, ne pourrait être qu'imposé ou « interposé ». Seuls, les Etats-Unis étaient en mesure d'agir à cette fin, à condition qu'ils décident de devenir enfin de véritables arbitres entre les deux parties en présence.

M. Robert Del Picchia s'est interrogé sur la disponibilité des pays à engager des contingents dans une force internationale d'interposition, dont l'action ne serait pas sans danger.

M. Michel Caldaguès a relevé qu'il était regrettable que les avertissements lancés par la France, il y a près de quarante ans, sur la situation au Proche-Orient, n'aient pas été alors mieux entendus. Il a estimé qu'une interposition internationale n'avait de vertus que si elle avait des objectifs ambitieux. Le fond de la question tenait aux garanties d'une paix future. C'est à bon droit que le Gouvernement israélien faisait de la sécurité sa première priorité pour laquelle Israël, instruit par l'histoire, ne comptait d'ailleurs que sur lui-même.

Par ailleurs, les Etats-Unis, invités à s'impliquer davantage, se voient parfois reprocher, ici et là, de le faire de façon excessive. Enfin, sans méconnaître les abus dont on pouvait constater les effets sur la population palestinienne, M. Michel Caldaguès a estimé qu'aucune paix ne serait possible sans qu'Israël soit sûr de bénéficier des garanties indispensables de sécurité.

M. Xavier de Villepin, président, a craint qu'on n'assiste, dans les semaines à venir, à une escalade de la violence. Il a par ailleurs estimé probable une détérioration, à plus ou moins longue échéance, des relations entre les Etats-Unis et le Premier ministre israélien.

Le déploiement d'une force internationale dans la région ne serait certes pas sans risque. Il convenait toutefois, a souligné M. Xavier de Villepin, président, d'avoir également présent à l'esprit les risques qu'entraînerait une aggravation de la situation au Proche-Orient, compte tenu certes de l'enjeu pétrolier, mais aussi des risques de déstabilisation de certains pays arabes qui pouvaient conduire à un éclatement régional.

M. Xavier de Villepin, président, s'est enfin déclaré fier de la position constante exprimée par la diplomatie française sur le dossier proche-oriental, position qui, en reconnaissant le droit inaliénable d'Israël à exister dans des frontières sûres et reconnues, faisait aussi valoir la nécessité d'un Etat palestinien viable dans des frontières définitives.

La commission a donné acte à son président de sa communication et en a autorisé la publication sous la forme d'un rapport d'information.

Traités et conventions - Traité France-RFA portant délimitation de la frontière dans les zones aménagées du Rhin - Examen du rapport

Puis la commission a procédé à l'examen du rapport de M. André Boyer sur le projet de loi n° 288 (2000-2001) autorisant la ratification du Traité entre la République française et la République fédérale d'Allemagne portant délimitation de la frontière dans les zones aménagées du Rhin.

M. André Boyer, rapporteur
, a indiqué que ce traité, signé le 13 avril 2000, venait compléter les deux traités précédents, de 1925 et de 1956, relatifs à la frontière sur le Rhin. En effet, le texte général, encore aujourd'hui en vigueur, est le traité de 1925 qui fixe la frontière entre la France et l'Allemagne sur le Rhin, sur la ligne du Thalweg, selon la coutume internationale. En 1956, une première exception a été apportée à cette règle. Par cette convention, dans certaines zones d'aménagement concerté, la frontière devenait une ligne fixe, la ligne médiane entre les deux rives. La situation actuelle présente quelques inconvénients, a indiqué M. André Boyer, rapporteur, la ligne du thalweg conduit en effet à certaines imprécisions en matière de souveraineté et de responsabilité, bien qu'elle ne soit presque plus mobile, en raison des aménagements successifs du cours du Rhin empêchant toute modification importante de son lit.

Ainsi, le traité du 13 avril 2000 vise à fixer la frontière, sur la ligne médiane, sur la quasi-totalité du Rhin entre la France et l'Allemagne (du kilomètre 222,9 du fleuve au kilomètre 335,7). Au nord et au sud, la frontière reste déterminée selon le droit antérieur. Le traité s'accompagne d'un travail de bornage très précis des rives du fleuve. Il entraînera une actualisation du cadastre, mais aucun propriétaire privé n'est concerné. Il aura pour seule conséquence territoriale l'échange ou le partage entre les deux pays de quelques bancs de sable ou îles temporaires. Enfin, M.  André Boyer, rapporteur, a précisé que si un différend venait à survenir entre la France et l'Allemagne, les deux pays recourraient à un tribunal arbitral.

Enfin, M. André Boyer, rapporteur, a relevé que si ce texte avait une portée plus technique que politique, il n'en relevait pas moins pleinement de la compétence du Parlement, puisqu'il s'agissait du territoire national. Tout en se félicitant des précisions apportées à la délimitation de la frontière, il a cependant regretté que ce texte n'ait pas été l'occasion de fixer définitivement la totalité de la frontière entre la France et l'Allemagne sur le Rhin, sur la ligne médiane.

A la suite de l'exposé du rapporteur, M. Philippe de Gaulle a souhaité savoir si ce traité emporterait une perte de territoire pour la France comme cela avait pu être le cas, pour d'autres traités, par le passé.

M. André Boyer, rapporteur, a précisé que ce traité n'entraînait aucune perte de territoire, mais provoquerait quelques échanges. Puis, répondant à M. Xavier de Villepin, président, qui s'interrogeait sur le champ d'application du traité, il a indiqué que celui-ci ne s'appliquait que dans une zone géographique déterminée. En amont et en aval, le droit antérieur continue de s'appliquer.

La commission a alors approuvé le projet de loi.

Traités et conventions - Accord portant création de la Commission générale des pêches pour la Méditerranée - Examen du rapport

Puis la commission a procédé à l'examen du rapport de M. André Boyer sur le projet de loi n° 134 (2001-2002), adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification des amendements à l'accord portant création de la Commission générale des pêches pour la Méditerranée (CGPM).

M. André Boyer, rapporteur, a tout d'abord rappelé l'importance économique de la pêche en Méditerranée. L'ensemble des prises en Méditerranée représente 900.000 tonnes par an, soit une faible part des prises mondiales, qui s'élèvent à 92 millions de tonnes. Cependant, la pêche en Méditerranée étant essentiellement destinée à une consommation en frais, sa valeur est beaucoup plus importante. Ainsi, au niveau européen, en volume les prises représentent 20 % de l'ensemble mais 35 % en valeur. La Méditerranée représente moins de 10 % de l'activité de pêche française. En valeur, elle s'élève cependant à plus de 76 millions d'euros.

Abordant ensuite le rôle de la CGPM, M. André Boyer, rapporteur, a rappelé que sa mission était, à l'origine, essentiellement scientifique, visant à étudier la ressource halieutique, et a indiqué que c'était dans le courant des années 1990 que les 23 Etats riverains et pêcheurs membres de la CGPM avaient pris conscience du danger que représentait la surexploitation des fonds pour le maintien, dans le long terme, de la pêche, et qu'un consensus avait émergé pour transformer cet organisme en une véritable organisation internationale de gestion dotée d'un pouvoir de décision.

Décidée en 1997, la transformation de la CGPM, a indiqué M. André Boyer, entraîne une modification de son mode de financement. Celui-ci n'est plus assuré par son ancien organisme de tutelle, l'Organisation mondiale pour l'alimentation et l'agriculture, mais par ses membres. Le texte soumis à l'approbation du Sénat fixe les règles générales de prises de décision en matière budgétaire, mais le mode de calcul des contributions des Etats membres a été décidé à Malte en 2000. Ce décalage dans le temps explique, pour l'essentiel, le délai de ratification, les pays membres n'ayant pas voulu se prononcer définitivement avant que les règles de contribution n'aient été établies. La France, comme les autres pays méditerranéens de l'Union européenne, restera membre de la CGPM, bien que la pêche soit une compétence gérée en commun au niveau européen et que l'Union européenne soit également membre à part entière de cette organisation. Les règles de calcul des contributions conduiront à ce que l'Union européenne et ses membres assurent plus de 55 % du financement de la CGPM, la Turquie plus de 11 % et le Japon 10 % environ. La contribution de la France devrait être inférieure à 45.000 euros si, comme cela est prévu, le budget de la CGPM est fixé à 750.000 euros.

M. André Boyer, tout en regrettant que le Parlement ne fût saisi qu'incidemment de la création de cette nouvelle organisation, en raison de son impact budgétaire, a estimé qu'il convenait de l'approuver. La France avait en effet intérêt à promouvoir une gestion concertée des ressources halieutiques, permettant de préserver l'activité de pêche du littoral.

La commission a alors approuvé le présent projet de loi à l'unanimité.

Traités et conventions - Accord de siège entre la France et la Commission internationale de l'état civil - Examen du rapport

Puis la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Hubert Durand-Chastel sur le projet de loi n° 43 (2001-2002) autorisant l'approbation de l'accord de siège entre le Gouvernement de la République française et la Commission internationale de l'état civil.

M. Hubert Durand-Chastel, rapporteur,
a tout d'abord présenté la Commission internationale de l'état civil (CIEC), fondée en 1950 et qui regroupe aujourd'hui 16 Etats membres ainsi que 6 Etats observateurs. Sous son impulsion ont été adoptées 30 conventions internationales visant à perfectionner et harmoniser les règles relatives à l'état civil. Son unique langue de travail est le français et les juristes de notre pays y ont toujours joué un rôle actif.

Le rapporteur a précisé que la CIEC, du fait de sa structure légère, avait pu fonctionner durant une quarantaine d'années sans siège permanent, mais que l'accroissement du nombre de pays membres ou observateurs et l'augmentation des tâches de coordination et de secrétariat avaient rendu nécessaire un renforcement de l'organisation. La CIEC a ainsi décidé, il y a une dizaine d'années, de se doter d'un siège permanent à Strasbourg.

M. Hubert Durand-Chastel, rapporteur, a ensuite détaillé l'accord de siège conclu entre le CIEC et le gouvernement français, qui s'inspire des règles traditionnelles en la matière en les adaptant à la dimension réduite de l'organisation. Cet accord reconnaît la personnalité juridique de la CIEC, encadre le principe de l'immunité de juridiction pour elle-même et son personnel et prévoit un statut diplomatique pour son secrétaire général et un éventuel secrétaire général adjoint. En revanche, tous les personnels relèvent du régime fiscal français de droit commun.

Se félicitant de l'installation durable en France de cette organisation internationale, le rapporteur a invité la commission à émettre un avis favorable à l'adoption du projet de loi.

A la suite de l'exposé du rapporteur, M. Xavier de Villepin, président, a demandé des précisions sur la nature des activités de la Commission internationale de l'état civil.

M. Hubert Durand-Chastel, rapporteur, a répondu que la CIEC avait pour objet de favoriser l'échange d'informations entre les officiers de l'état civil et qu'elle avait notamment oeuvré à l'élaboration de 30 conventions multilatérales et de 8 recommandations tendant à harmoniser les dispositions en vigueur dans les différents Etats membres en matière d'état et de capacité des personnes ou de droit de la famille et de la nationalité, et visant également à améliorer les techniques des services chargés de l'état civil dans ces Etats.

La commission a alors adopté le présent projet de loi.

Nomination d'un rapporteur

Enfin, la commission a désigné M. Serge Vinçon comme rapporteur sur le projet de loi n° 268 (2001-2002) autorisant la ratification du traité entre la République française, le Royaume d'Espagne, la république d'Italie et la République portugaise portant statut de l'EUROFOR.