Table des matières




Mercredi 2 octobre 2002

- Présidence de M. André Dulait, président -

Déplacement à l'étranger (25 au 29 septembre 2002) - Argentine et Brésil - Compte rendu

Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, M. Xavier de Villepin a rendu compte d'un déplacement effectué en Argentine et au Brésil du 25 au 29 septembre 2002. Rappelant la récession globale que connaît actuellement l'Amérique latine et qui touche tout particulièrement l'Argentine et le Venezuela, il a exposé les principaux indicateurs économiques et sociaux de l'Argentine et du Brésil, ainsi que leur poids économique et démographique respectif.

Décrivant la crise argentine et l'aggravation dramatique de la pauvreté, M. Xavier de Villepin a évoqué la perspective des élections présidentielles qui se tiendront le 30 mars 2003 à la faveur desquelles l'ancien président péroniste Carlos Menem pourrait venir au pouvoir.

Il a signalé que la crise argentine s'étendait désormais à l'Uruguay et que la confusion de la situation rendait difficile l'aboutissement d'un accord avec le FMI alors que l'abandon, au début de l'année 2002, de la parité peso-dollar a conduit à une dévaluation très importante de la monnaie argentine. Dans ce contexte, la situation des entreprises françaises ayant participé aux privatisations est particulièrement difficile.

M. Xavier de Villepin a ensuite décrit le contexte économique et social qui entoure les élections présidentielles et parlementaires brésiliennes des 6 et 27 octobre, alors même que le Brésil connaît une situation sociale marquée par de profondes inégalités et que sa population manifeste ses aspirations au changement.

M. Xavier de Villepin a ensuite évoqué la personnalité du candidat Ignacio da Silva, dit « Lula », qui fait figure de favori. Battu à trois reprises dans le passé, il a opéré un recentrage politique qui devrait lui permettre de l'emporter et de disposer d'une coalition de gouvernement dans un paysage politique particulièrement morcelé. En dépit des préventions des milieux d'affaires à l'encontre du candidat Lula et des incertitudes qui entourent ses choix économiques, la politique brésilienne ne devrait pas subir de bouleversements majeurs.

En conclusion, M. Xavier de Villepin a insisté sur la nécessité d'apporter un règlement rapide à la crise argentine qui entraîne des turbulences financières de grande ampleur. Il a évoqué l'enjeu considérable que représente l'extension au sud de l'accord de libre échange nord-américain, à l'échéance de 2005, pour lequel le président américain a reçu du Congrès les pleins pouvoirs de négociation. Il a enfin relevé la nécessité, pour l'Union européenne, de veiller à la préservation du Mercosur.

Traités et conventions - conventions relatives à l'extradition et à la procédure d'extradition simplifiée entre États membres de l'Union européenne - Examen du rapport

Puis la commission a examiné le rapport de M. Serge Vinçon sur les projets de loi n° 84 (2001-2002) autorisant la ratification de la convention établie sur la base de l'article K.3 du traité sur l'Union européenne, relative à l'extradition entre les États membres de l'Union européenne, et n° 85 (2001-2002) autorisant la ratification de la convention établie sur la base de l'article K.3 du traité sur l'Union européenne, relative à la procédure simplifiée d'extradition entre les États membres de l'Union européenne.

M. Serge Vinçon, rapporteur, a tout d'abord rappelé que les procédures d'extradition en Europe étaient régies par la convention du 13 décembre 1957 du Conseil de l'Europe, et en matière de terrorisme, par la convention du 27 janvier 1977. Ces conventions qui, à l'époque, étaient novatrices, ne correspondent plus aujourd'hui au niveau de coopération élevé qui existe entre les États membres de l'Union européenne. Aussi bien ces pays ont-ils souhaité conclure des accords spécifiques visant à simplifier entre eux les procédures d'extradition. Le rapporteur a d'ailleurs estimé que cette évolution était devenue une exigence forte de sécurité publique et qu'elle était fortement souhaitée par les opinions publiques.

Abordant ensuite la convention du 10 mars 1995, M. Serge Vinçon a indiqué qu'elle avait pour but de réduire au minimum les procédures d'extradition lorsque la personne demandée et l'Etat requis sont d'accord, situation qui se présente dans près d'un tiers des cas ; l'impact pratique de la convention sera donc sensible. Actuellement, les délais nécessaires en France à une procédure d'extradition ne posant pas de problèmes particuliers sont d'environ six mois. L'application de la convention du 10 mars 1995 devrait conduire à les diviser par trois, les principales étapes de la procédure étant désormais soumises à des délais-limite. Le consentement de la personne dont l'extradition est demandée est protégé car il est indispensable à la mise en oeuvre de cette procédure simplifiée d'extradition. Il doit être éclairé, volontaire et recueilli par une autorité judiciaire après le conseil d'un avocat. Enfin, la convention permettra d'assouplir les procédures connexes à l'extradition en autorisant, sous certaines conditions, qu'une personne puisse être réextradée vers un Etat tiers, ou jugée pour d'autres faits que ceux pour lesquels l'extradition a été accordée. Elle permet donc l'assouplissement de la règle dite « de spécialité ». Son transit est également facilité.

Le rapporteur a ensuite présenté les stipulations de la convention du 27 septembre 1996 qui permet de déroger, entre les États membres de l'Union européenne, à certaines stipulations de la convention de 1957. Elle permettra des avancées significatives en matière d'extradition.

Tout d'abord, la convention pose le principe qu'aucune infraction ne pourra être considérée comme « politique » par nature et l'extradition ne pourra donc plus être refusée pour un tel motif. En outre, quelles que soient les éventuelles déclarations interprétatives, les États s'engagent au minimum à « dépolitiser » l'acte de terrorisme et l'infraction d'association de malfaiteurs terroristes. La convention ouvre par ailleurs la possibilité d'extrader les nationaux, même si la plupart des États ne l'appliqueront que sous réserve de réciprocité et que cinq d'entre eux l'ont rejetée pour des raisons constitutionnelles. Des progrès sensibles seront également possibles en matière d'infraction fiscale, même si le Luxembourg et la Grèce en ont limité le champ d'application aux infractions relatives aux accises, à la T.V.A. ou aux droits de douane.

Le rapporteur a en outre indiqué que la convention contenait des stipulations techniques visant à aplanir les divergences juridiques entre les États membres qui jusqu'à présent constituaient des obstacles au bon déroulement des procédures d'extradition, comme la reconnaissance des différents types de mesures de sûreté ou des différents actes ayant la force d'un mandat d'arrêt. La convention permettra enfin de simplifier les procédures de transmission de pièces et d'informations, de réextradition, de transit, et d'assouplir la « règle de spécialité ».

M. Serge Vinçon, rapporteur, a, en dernier lieu, abordé la question de l'entrée en vigueur de ces deux conventions et de leur articulation avec le projet de mandat d'arrêt européen. Les deux conventions sont actuellement appliquées de manière anticipée par la majorité des États membres de l'Union européenne. La France devrait faire une déclaration en ce sens lorsqu'elle aura adopté un projet de loi interne visant à adapter la loi de 1927 régissant les règles de l'extradition aux nouvelles stipulations prévues par ces conventions.

En outre, ces conventions s'appliqueront jusqu'à la mise en oeuvre du mandat d'arrêt européen, prévue le 1er janvier 2004. Ces deux conventions continueront toutefois de s'appliquer, après cette date, pour les faits antérieurs au 7 août 2002 pour l'Italie et l'Autriche et antérieurs au 1er novembre 1993 pour la France. L'application du mandat d'arrêt européen permettra de remplacer les procédures d'extradition par une procédure judiciaire automatique de remise des personnes réclamées. Elle devra aboutir dans un délai maximum de 90 jours. Les mesures de contrôle et les possibilités de recours étant réduites au strict minimum.

M. Serge Vinçon a en conclusion invité la commission à approuver ces conventions qui permettront une plus grande coopération judiciaire en Europe, les frontières ne devant pas permettre de protéger les criminels d'un procès ou d'une condamnation.

A la suite de l'exposé du rapporteur, un débat s'est engagé entre les commissaires.

M. Xavier de Villepin a souhaité savoir si ces nouvelles stipulations permettront ou auraient permis de résoudre le cas de M. Rachid Ramda,  impliqué dans les attentats de 1995 sur le territoire français, emprisonné au Royaume-Uni depuis de nombreuses années mais dont l'extradition a jusqu'à présent été empêchée par la multiplication des recours.

M. André Dulait, président, a demandé si le Royaume-Uni avait ratifié les deux conventions.

M. Serge Vinçon, rapporteur, a alors indiqué que le Royaume-Uni avait procédé aux ratifications et que la France était le dernier pays de l'Union européenne, avec l'Italie, à ne pas l'avoir fait. Il a précisé que ces conventions ne s'appliquent qu'aux nouvelles demandes d'extradition, même si celles-ci peuvent porter sur des faits antérieurs. Il a ajouté que les stipulations de ces deux conventions n'auraient pas permis de résoudre la situation présentée par le cas de M. Rachid Ramda, car elles ne prévoient pas, contrairement au mandat d'arrêt européen, de délai-limite aux procédures, en dehors du cas du consentement de la personne réclamée.

M. Claude Estier s'est inquiété de la nouvelle attitude du gouvernement vis-à-vis d'un ancien membre des Brigades rouges italien qui avait trouvé refuge en France et que celle-ci avait, jusqu'à présent, refusé d'extrader.

M. Serge Vinçon, rapporteur, a indiqué que ces conventions visaient à réduire les délais et simplifier les procédures d'extradition et que dans le cadre du mandat européen, l'objectif était de rendre la procédure automatique, même si la France ne l'appliquerait pas pour les actes antérieurs au 1er novembre 1993.

Mme Hélène Luc a marqué sa forte préoccupation sur l'évolution de l'attitude de la France vis-à-vis des réfugiés italiens et a indiqué que si une législation forte était nécessaire pour lutter contre le terrorisme, elle ne devait pas conduire à remettre en cause le droit d'asile.

MM. Xavier de Villepin et Serge Vinçon, rapporteurs ont souligné que ces conventions permettaient de préserver le droit d'asile tout en progressant dans la coopération judiciaire en Europe pour lutter contre le terrorisme. Le rapporteur a en outre estimé, en accord avec M. Robert Del Picchia, que le maintien en détention de M. Rachid Ramda pendant plus de sept ans, sans jugement, était contraire au respect des droits de l'homme qui servent pourtant de justification à sa non-extradition et à la multiplication des recours au Royaume-Uni, la justice française offrant toutes les garanties en la matière. Vis-à-vis de l'Italie, le rapporteur a expliqué que l'évolution de la position française s'expliquait par la volonté de rendre plus efficace et plus automatique la coopération judiciaire entre les membres de l'Union européenne, conformément au principe du mandat d'arrêt européen.

M. André Dulait, président, ayant rappelé que ces conventions permettraient une réduction significative des délais, M. Serge Vinçon, rapporteur, a expliqué que les nouvelles procédures respecteraient les droits de la défense et s'appliqueraient sous le contrôle des autorités judiciaires.

M. Jean-Pierre Plancade a indiqué qu'il voterait les deux projets de loi dans la mesure où ils constituaient un progrès dans la coopération judiciaire au sein de l'Union européenne. Si le droit d'asile devait évidemment être protégé, il ne devait pas, à son avis, faire obstacle à la lutte contre le terrorisme.

La commission a alors approuvé les deux projets de loi.

Traités et conventions - Statut de l'Eurofor - Examen du rapport

La commission a ensuite examiné le rapport de M. Serge Vinçon sur le projet de loi n° 268 (2001-2002) autorisant la ratification du traité entre la République française, le Royaume d'Espagne, la République d'Italie et la République portugaise portant statut de l'Eurofor.

M. Serge Vinçon
a rappelé les conditions dans lesquelles la France, l'Italie et l'Espagne, rejointes par le Portugal quelques mois plus tard, avaient créé en 1995 la force terrestre Eurofor et la force navale Eurofor, dans le cadre de l'Union de l'Europe occidentale et en vue de fournir à cette dernière, ou le cas échéant à d'autres organisations, notamment l'OTAN, des capacités militaires de gestion de crises, telles que définies dans la « déclaration de Petersberg ».

L'Eurofor obéit au double principe du « réservoir de forces » et de la modularité. Aucune unité ne lui est affectée en permanence, hormis un Etat-major installé à Florence et composé de près d'une centaine de militaires. Le format de la force, lorsqu'elle se constitue, peut varier d'un millier à plus de 10.000 hommes.

M. Serge Vinçon a rappelé les conclusions du rapport d'information sur les Euroforces qu'avaient présentées devant la commission, en 1997, MM. Michel Caldaguès et André Boyer, et qui soulignaient les multiples obstacles politiques ou techniques limitant leur capacités concrètes à s'affirmer comme de véritables outils opérationnels. Il a estimé que les craintes alors exprimées s'étaient hélas vérifiées, l'Eurofor n'ayant jamais été engagée en opérations depuis 1998, date à laquelle elle a été déclarée opérationnelle, en dehors d'une participation très limitée de la moitié de son Etat-major à une mission de soutien logistique de la KFOR en Albanie, au 1er trimestre 2001.

Le rapporteur a considéré que le traité du 5 juillet 2000 portant statut de l'Eurofor permettrait de lever certaines difficultés pratiques dans le fonctionnement de la force. Il donne à l'Eurofor un véritable statut juridique, inspiré des accords qui régissent le stationnement des forces alliées dans les pays de l'OTAN. Ces améliorations porteront sur le statut des personnels, le cadre fiscal ou douanier des activités de la force et l'usage, par cette dernière, de communications protégées.

Indépendamment du traité, le rapporteur a estimé que la dotation de l'Eurofor en systèmes d'information et de communication dédiés, déjà jugée indispensable par la commission voici 5 ans, était désormais en bonne voie.

Tout en se félicitant de ces avancées, M. Serge Vinçon, rapporteur, a considéré que de multiples interrogations subsistaient sur l'avenir de l'Eurofor, notamment quant à son engagement en opérations à un rythme comparable à celui appliqué aux Etats-majors nationaux.

Il a souligné que la place de l'Eurofor n'était en rien clarifiée dans l'architecture des forces de réaction rapide ou de relève qui se mettent actuellement en place, tant dans le cadre de l'OTAN que de la politique européenne de sécurité et de défense.

Il a rappelé l'intérêt que présentaient des états-majors multinationaux pré-constitués et permanents, rôdés par des entraînements réguliers, et immédiatement opérationnels, et il a souhaité que l'Eurofor, qui a suscité jusqu'à présent un grand scepticisme, puisse trouver à l'avenir une traduction utile et concrète.

Le rapporteur a alors invité la commission à émettre un avis favorable à l'adoption du projet de loi.

A la suite de l'exposé du rapporteur, M. Xavier de Villepin s'est demandé si une structure comme l'Eurofor pourrait être engagée dans des crises comme celle que connaît actuellement la Côte d'Ivoire. Il a par ailleurs observé que le développement de structures multinationales répondait souvent à un souci d'affichage politique sans perspective concrète sur le plan opérationnel.

M. Robert Del Picchia a interrogé le rapporteur sur le budget de l'Eurofor et sur la participation italienne.

M. André Boyer a rappelé que la commission avait constaté, en 1997, le sérieux de la mise en place de l'État-major de l'Eurofor à Florence, mais que depuis lors, cet instrument n'avait pas été valorisé. Il a jugé en revanche plus tangibles les résultats obtenus par Euromarfor.

En réponse à ces interventions, M. Serge Vinçon, rapporteur, a apporté les précisions suivantes :

- l'engagement de l'Eurofor exige l'accord des quatre États membres ;

- s'agissant des crises africaines, la France privilégie le recours à des forces prépositionnées pour la protection de ses ressortissants et à des forces multinationales africaines pour la gestion proprement dite de ces crises ;

- l'Eurofor pourrait avoir vocation à mener une opération comme celle conduite par l'OTAN en Macédoine ;

- l'Union européenne et l'OTAN constituent actuellement des forces de réaction rapide et de relève en vue d'améliorer leurs capacités opérationnelles de gestion de crise ; il importe de clarifier, dans cette architecture, la place d'Eurofor, qui avait été initiée avant les développements de la politique européenne de sécurité et de défense ;

- le budget de l'Eurofor s'élevait, en 2001, à plus de 3 milliards de lires, soit entre 2 et 2,5 millions d'euros ;

- l'Italie, outre sa contribution financière, met à la disposition d'Eurofor un bataillon de quartier général pour le soutien de l'Eurofor.

La commission a ensuite émis un avis favorable à l'adoption du projet de loi.

Traités et conventions - Accord France-Fédération de Russie relatif à la responsabilité civile au titre de dommages nucléaires - Examen du rapport

Puis la commission a examiné le rapport de M. Xavier Pintat sur le projet de loi n° 323 (2001-2002) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Fédération de Russie relatif à la responsabilité civile au titre de dommages nucléaires du fait de fournitures en provenance de la République française destinées à des installations nucléaires en Fédération de Russie.

M. Xavier Pintat, rapporteur,
a résumé le contexte dans lequel s'inscrivait l'accord franco-russe en rappelant trois éléments :

- l'existence de principes fondamentaux régissant la responsabilité civile en cas d'accidents nucléaires, en particulier la responsabilité objective et exclusive de l'exploitant, la limitation de cette responsabilité et l'obligation d'assurance, ces principes étant formalisés dans les conventions établies sous l'égide de l'OCDE et de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) ;

- l'absence, en Russie, de législation conforme à ces principes généraux, la Russie ayant signé la convention de Vienne de l'AIEA en 1996 mais ne l'ayant pas ratifiée à ce jour ;

- le développement entre les pays occidentaux et la Russie, depuis les années 1990, d'une coopération dans le domaine nucléaire portant en particulier sur l'amélioration de la sûreté des installations, le démantèlement de l'arsenal nucléaire militaire et la dépollution.

M. Xavier Pintat, rapporteur, a précisé que pour pallier l'absence de législation russe en la matière, la plupart des intervenants occidentaux en Russie avaient négocié des accords bilatéraux assurant l'application du régime international de responsabilité dans le domaine nucléaire à leurs actions de coopération. Après les Etats-Unis, la communauté européenne, l'Allemagne et la Norvège, la France a donc conclu avec la Russie, le 20 juin 2000, un accord canalisant sur les exploitants russes la mise en jeu de la responsabilité des dommages nucléaires dans les domaines où interviennent des opérateurs français.

Les actions conduites par la France en matière de sûreté nucléaire transitent essentiellement par des programmes européens comme TACIS et sont couvertes par l'accord russo-européen. L'accord du 20 juin 2000 couvrira pour sa part les opérations plus spécifiquement bilatérales parmi lesquelles on peut citer l'aide au recyclage du plutonium militaire (projet Aida) et les projets de dépollution nucléaire (projet Lepse).

M. Xavier Pintat, rapporteur, a estimé que cet accord apportait une solution satisfaisante aux questions de responsabilité civile en cas de dommages, dans le cadre des activités d'opérateurs français sur des installations nucléaires en Russie. Il a en conséquence demandé à la commission d'émettre un avis favorable à l'adoption du projet de loi.

A la suite de l'exposé du rapporteur, M. Xavier de Villepin a demandé des précisions sur l'application de l'accord au domaine nucléaire militaire. Il a également demandé si des déchets nucléaires étrangers étaient recyclés en Russie.

M. Jean-Guy Branger a jugé positive l'amélioration du cadre juridique des relations franco-russes dans le domaine nucléaire, mais il a souligné le caractère très limité des mesures engagées face à l'ampleur des problèmes soulevés par le démantèlement de l'arsenal nucléaire russe et la sûreté des dépôts de matières fissiles.

M. André Dulait, président, a mentionné la volonté de la Russie d'accroître la coopération avec les pays occidentaux en matière nucléaire.

Mme Maryse Bergé-Lavigne a demandé si la France retraitait des déchets nucléaires russes.

En réponse à ces différentes interventions, M. Xavier Pintat, rapporteur, a apporté les précisions suivantes :

- dans le domaine nucléaire militaire, la coopération franco-russe porte sur l'élimination du plutonium militaire russe excédentaire et son recyclage dans des installations civiles en Russie ;

- l'engagement pris au Canada, au mois de juin 2002, par les pays du G8, de financer à hauteur de 20 milliards de dollars une aide au démantèlement et à la sécurisation des programmes nucléaire, chimique et biologique russes démontre l'ampleur du problème et la réelle prise de conscience, par la communauté internationale, de la nécessité de développer la coopération, en particulier en matière nucléaire, avec la Russie ;

- s'agissant des déchets nucléaires, il faut distinguer le retraitement, qui peut s'effectuer dans des installations comme celles de La Hague, du stockage définitif qui s'effectuera quant à lui en Russie.

La commission a ensuite émis un avis favorable à l'adoption du projet de loi.

Traités et conventions - Convention de sécurité sociale entre la République française et la Principauté d'Andorre - Examen du rapport

La commission a ensuite examiné le rapport de M. Robert Del Picchia sur le projet de loi n° 363 (2001-2002) autorisant la ratification de la convention de sécurité sociale entre la République française et la Principauté d'Andorre.

Le rapporteur a souligné la nécessité juridique de cette convention qui se substitue à des arrangements conclus en 1970 entre les caisses de sécurité sociale andorranes et françaises ; en effet, l'accession de la Principauté à la souveraineté internationale en 1993 entache ces arrangements de caducité. De surcroît, la convention présente l'avantage d'englober l'ensemble des risques sociaux, à l'exception du chômage qui n'est pas couvert par les assurances d'Andorre.

Le rapporteur a mis en valeur l'apport de cette convention, qui constituera un instrument juridique indiscutable et complet. Il a rappelé que nos compatriotes établis en Andorre souhaitaient la ratification de ce texte par la France, et que la Principauté l'avait déjà effectuée.

M. Robert Del Picchia, rapporteur, a indiqué que, dans toutes les négociations avec les États non-membres de l'Union européenne, la France s'efforçait de reprendre les principales dispositions du règlement communautaire qui régit la coordination des systèmes de sécurité sociale. Le présent texte s'inspire donc très étroitement de ce règlement et n'y déroge que sur des points spécifiques, favorables à la main-d'oeuvre française : ainsi les salariés français pourront rester affiliés pendant deux ans à leur régime de sécurité sociale d'origine lorsqu'ils travailleront en Andorre. De même, le personnel salarié des postes diplomatiques et consulaires en fonction dans la Principauté restera également affilié au régime français.

En conclusion, le rapporteur a rappelé l'opportunité de ce texte, ainsi que sa cohérence avec les prescriptions européennes, et a donc demandé à la commission de l'adopter.

Au terme de l'exposé du rapporteur, le président André Dulait a souligné l'intérêt de cette convention pour nos compatriotes entrepreneurs en Andorre.

Puis la commission a adopté le projet de loi.

Nomination de rapporteurs

La commission a ensuite procédé à la désignation de rapporteurs. Elle a désigné :

- M. Serge Vinçon sur le projet de loi, en cours d'examen à l'Assemblée nationale, relatif à la programmation militaire pour les années 2003-2008 ;

- M. Robert Del Picchia sur les projets de loi n°s 9 et 10 (2002-2003), adoptés par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'avenant à l'accord du 17 mars 1988, tel que modifié par l'avenant du 19 décembre 1991, entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République tunisienne en matière de séjour et de travail et autorisant l'approbation du troisième avenant à l'accord du 27 décembre 1968 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France de ressortissants algériens et de leurs familles et à son protocole annexe (ensemble un échange de lettres) ;

- M. Michel Pelchat sur les projets de loi n° 395 (2001-2002) autorisant l'approbation de la convention sur les polluants organiques persistants (ensemble six annexes) et n° 396 (2001-2002) autorisant l'approbation de la convention sur la procédure de consentement préalable en connaissance de cause applicable à certains produits chimiques et pesticides dangereux qui font l'objet d'un commerce international (ensemble cinq annexes).

Audition de M. Dominique de Villepin, ministre des affaires étrangères

Au cours d'une seconde séance tenue dans l'après-midi, la commission a entendu M. Dominique de Villepin, ministre des affaires étrangères.

M. Dominique de Villepin
a tout d'abord évoqué la complexité de la crise ivoirienne et l'évolution de ses différentes composantes. D'une mutinerie de soldats devenue le révélateur de dissensions internes, la situation a évolué de telle sorte que des interrogations se sont fait jour sur d'éventuelles complicités ou soutiens extérieurs, au vu notamment du caractère organisé des mutins, compte tenu du départ pour les pays voisins de nombreux opposants.

La crise en cours repose sur des éléments traditionnels. La mosaïque ethnique et religieuse que constitue la Côte d'Ivoire, marquée notamment par un clivage Nord/Sud, est en crise depuis la disparition d'Houphouët-Boigny ; à une crise politique s'ajoutent des conditions économiques difficiles, liées à la détérioration du cours des matières premières, café, coton et cacao, qui sont les principales ressources du pays.

De nouveaux éléments d'explication sont également à prendre en compte. La pression démographique, née des migrations de populations musulmanes a exacerbé les réactions nationalistes reflétées par le concept « d'ivoirité ». La nouvelle loi sur la propriété foncière a nourri les tensions, notamment dans le nord où cette question se pose avec une acuité particulière. Sur fond de luttes d'influences régionales, cristallisées notamment dans le conflit des pays de la rivière Mano, la circulation incontrôlée d'hommes, d'armes et de capitaux est un facteur supplémentaire de déstabilisation.

Dans ce contexte, M. Dominique de Villepin, ministre des affaires étrangères a précisé les priorités françaises : la sécurité des ressortissants français, pour laquelle notre dispositif militaire a été renforcé à hauteur de 900 hommes, le maintien de l'unité du pays et de la stabilité régionale, allié à un souci permanent de non-ingérence dans les affaires intérieures de ces pays, et l'appui à la médiation africaine et au dialogue, qui doit demeurer prioritaire.

Sur ce dernier point, M. Dominique de Villepin, ministre des affaires étrangères, a précisé que la France avait apporté son soutien au sommet de la CEDEAO à Accra, qui a permis la mise en place d'un comité de chefs d'Etat chargé de nouer le dialogue en Côte d'Ivoire et a abouti à la décision, en marge du sommet, de mettre en place, le cas échéant, une force d'interposition de l'ECOMOG. Une première troïka composée du Togo, du Ghana et du Nigeria s'est d'ores et déjà rendue sur place.

M. Dominique de Villepin a précisé que la France avait souhaité élargir sa démarche au-delà du dialogue bilatéral franco-ivoirien en évoquant la question au niveau européen dès le Conseil des Affaires générales du 30 septembre. Cette évocation rejoint les efforts de la France, confirmés lors des récents sommets internationaux, de placer l'Afrique au premier rang des préoccupations de la communauté internationale.

M. Dominique de Villepin a ensuite répondu aux questions des commissaires.

A Mme Paulette Brisepierre qui souhaitait connaître le sort des ivoiriens réfugiés à la résidence de France ainsi que l'état d'avancement des contacts avec les mutins, le ministre des affaires étrangères a répondu que la France avait accueilli M. Outtara et la famille du ministre de la défense à la demande des autorités ivoiriennes et qu'elle veillait à ce que cette présence ne constitue pas une source de menaces pour les ressortissants français. Il a en outre annoncé qu'un premier contact téléphonique avait eu lieu ce jour entre la médiation africaine et les mutins, mais que l'absence de structures clairement identifiées chez ces derniers pouvait rendre le dialogue difficile.

Le ministre a rejoint M. Pierre Mauroy sur le constat de l'inutilité d'une solution purement militaire. Il lui a précisé que des messages continuaient d'être adressés aux autorités ivoiriennes quant à la nécessité d'user de toute la marge de manoeuvre politique disponible pour apaiser les tensions et nouer le dialogue.

A Mme Danielle Bidard-Reydet qui l'interrogeait sur la nature de l'intervention française, M. Dominique de Villepin a précisé que la non-immixtion dans les affaires intérieures de la Côte d'Ivoire constituait un principe. Le renforcement de la présence militaire était justifié par le souci de sécuriser nos compatriotes présents en Côte d'Ivoire. Ce souci conduisait la France à assumer ses responsabilités, et non à prendre position. S'agissant de l'aspect politique, la France apportait son soutien au gouvernement démocratiquement élu de la Côte d'Ivoire.

M. André Ferrand a souhaité obtenir des précisions sur l'origine des financements du mouvement de mutinerie. Le ministre des affaires étrangères a indiqué que les schémas d'approvisionnement étaient particulièrement difficiles à identifier du fait du faible coût des armes et de leur présence en nombre dans la région, sans doute alimentée par différents trafics comme d'ailleurs dans de nombreuses régions du globe. Il a souligné l'importance croissante de ce facteur de déstabilisation.

A M. André Dulait, président, qui l'interrogeait sur la réponse apportée aux demandes ivoiriennes d'équipements militaires auprès de notre pays, M. Dominique de Villepin, ministre des affaires étrangères, a précisé que, seul, l'accord de coopération militaire était mis en oeuvre ce qui limitait l'apport de la France à un soutien logistique.

Mme Monique Cerisier ben Guiga a fait part de ses interrogations sur une implication du Burkina Faso dans le conflit. Le ministre a confirmé que ces deux États entretenaient des relations parfois tendues, empreintes de susceptibilités et de suspicion réciproques. C'est notamment ce qui avait justifié son déplacement dans ces deux pays le 21 juillet dernier. Il a toutefois souligné que le Burkina-Faso n'avait aucun intérêt stratégique à la déstabilisation de la Côte d'Ivoire, compte tenu notamment de la présence dans ce pays de trois millions de Burkinabés.

S'agissant de l'état de l'armée ivoirienne, M. Dominique de Villepin a confirmé à M. Robert Del Picchia les difficultés rencontrait de longue date.

M. Dominique de Villepin, ministre des affaires étrangères s'est accordé avec M. Jean-Guy Branger sur le caractère sans doute inévitable de la crise dans une région fragilisée par de nombreux facteurs d'instabilité.

M. Guy Penne s'est inquiété de ce que la crise s'inscrivait dans un mouvement global de décomposition des états africains, phénomène susceptible d'affecter de nombreux états, tant sont nombreux les germes de déstabilisation. Le ministre a partagé cette analyse, considérant la remise en cause de l'Etat-nation comme un mouvement qui dépasse le seul cadre africain pour se retrouver au Moyen-Orient ou encore dans les Balkans. Dans ce contexte d'instabilité, il a souligné l'importance de la défense des principes d'intangibilité des frontières et de souveraineté des États, et de soutien des gouvernements légitimes. Il a exprimé sa conviction que les risques liés à toute remise en cause constituaient précisément le critère majeur de mobilisation de la communauté internationale pour préserver l'ordre mondial.

M. Dominique de Villepin a ensuite abordé le dossier de l'Irak. Ce pays, a-t-il rappelé, est un pays central au Moyen-Orient par son histoire, sa position stratégique et ses ressources naturelles. Il est également une puissance continentale quasiment privée de débouché maritime, frontalier de la Turquie, de l'Iran et en contact direct avec le Proche-Orient et le Golfe Persique. Cette situation géographique a été l'un des éléments majeurs des précédents conflits avec l'Iran, de 1980 à 1988, et avec le Koweït en 1990 et 1991. L'Irak dispose par ailleurs d'importantes ressources naturelles, avec près de 10 % des réserves mondiales de pétrole et des capacités agricoles et hydrauliques considérables. L'Irak se distingue également par sa diversité ethnique et religieuse. L'Irak est enfin un Etat laïc soumis à une dictature dirigée par Sadam Hussein qui dispose de l'ensemble des pouvoirs civils et militaires.

L'Irak est un pays affaibli du fait de l'embargo et des limitations apportées à sa souveraineté. L'embargo, décidé par le Conseil de sécurité des Nations unies en 1991, a des conséquences considérables sur le plan économique et humanitaire. Face à cette situation, les autorités irakiennes ont mis en place une stratégie de reconquête économique et politique qui a permis de rompre partiellement l'isolement du pays. Sur le plan économique, l'Irak s'est lancé dans une contrebande à grande échelle de produits pétroliers qui engendrerait un revenu d'environ 2 milliards d'euros par an. Au plan diplomatique, l'Irak a renoué des liens avec de nombreux pays.

Depuis 1991, certains éléments du dossier irakien n'ont pas été résolus. Les inspections portant sur le désarmement sont interrompues depuis 1998 et il est vraisemblable que l'Irak a développé des programmes d'armes de destruction massive biologiques et chimiques. Les Nations unies ont néanmoins aménagé l'embargo en 1995, puis en 2002 (résolution 1409). En outre, la leçon tirée de l'échec de la commission spéciale a conduit à son remplacement par la Commission de contrôle de vérification et d'inspection des Nations unies (CCVINU). Enfin, même si elle a été rejetée par l'Irak, la résolution 1284 de 1999 a mis en place un dispositif de suspension conditionnelle des sanctions.

Après le 11 septembre 2001, les États-Unis ont désigné l'Irak comme un soutien des terroristes et un producteur d'armes de destruction massive. Le Président des États-Unis entend disposer d'une marge de manoeuvre politique en obtenant du Congrès, avant l'ajournement de la session, une résolution de soutien à sa stratégie.

Le discours du président américain, prononcé devant l'Assemblée générale des Nations unies le 12 septembre dernier, a constitué un ultimatum adressé à l'Irak en laissant transparaître la volonté américaine de mettre un terme au régime de Sadam Hussein. Dans le même temps, il mettait en demeure les Nations unies de prendre leurs responsabilités.

La France préconise une approche multilatérale fondée sur la mise en oeuvre des résolutions des Nations unies. Un mécanisme en deux étapes a été envisagé : une première résolution porterait sur le retour des inspecteurs et en cas de blocage une seconde résolution définirait les mesures appropriées que pourrait prendre le Conseil de sécurité. Les pays de la région, à l'exception d'Israël, ont adhéré à la démarche française. De leur côté, la Russie et la Chine ont participé aux pressions sur l'Irak malgré leurs intérêts économiques.

M. Dominique de Villepin a estimé que la décision irakienne du 16 septembre dernier autorisant la reprise des inspections était le fruit de l'action conjointe de tous les acteurs. Le ministre a estimé à quelque huit mois le délai nécessaire à la CCVINU entre le début de ses travaux et un premier bilan de ses inspections.

Le ministre a indiqué que Britanniques et Américains avaient présenté à la France un avant-projet de résolution. La France était très vigilante sur deux points : une clause de recours automatique à la force ne serait pas acceptable en cas de manquement par l'Irak à ses obligations ; d'autre part, il fallait éviter un durcissement extrême du régime des inspections. Les dispositions de la résolution 1284 étaient suffisantes sous réserve d'adaptations éventuelles. La France était soucieuse d'aboutir à des dispositions très fermes pour conduire l'Irak à coopérer. Mais il convenait également de préserver l'unité du Conseil de sécurité afin d'exercer la pression nécessaire sur Bagdad. Un vote divisé du Conseil donnerait à l'Irak la tentation d'exploiter ses divisions pour échapper à ses obligations.

L'enjeu essentiel restait aussi la stabilité de la région dans son ensemble. A cet égard, il y avait urgence à agir sur le Proche-Orient et il convenait de se féliciter de l'initiative récente du Quartet à New York réaffirmant le nécessaire règlement d'ensemble du conflit, notamment au moyen d'une conférence internationale.

A la suite de l'exposé du ministre des affaires étrangères, un débat s'est engagé au sein de la commission.

M. Jean-Pierre Plancade a exprimé sa préoccupation face à l'attitude des États-Unis vis-à-vis de l'ONU et du droit international en général. Il s'est en outre interrogé sur la possibilité de faire appel à une opposition irakienne en exil en cas de changement de régime. Il a demandé des précisions sur la composition de la future mission d'inspection et s'est enfin enquis de la possibilité d'initiatives européennes sur ce dossier.

M. Robert Del Picchia a souhaité savoir si les inspecteurs sélectionnés par l'AIEA pourraient être récusés par l'Irak comme cela s'était produit dans le passé.

M. Pierre Mauroy a affirmé que le droit international ne devait en aucun cas être mis en cause et qu'il était inacceptable que les États-Unis tiennent un tel discours de provocation à l'encontre de la Communauté internationale. Il a estimé que la France avait une responsabilité forte à assumer et qu'elle devait s'appuyer autant que faire se peut sur un rassemblement européen.

M. Claude Estier a déclaré partager la position exprimée par le ministre des affaires étrangères et s'est interrogé sur la réalité du soutien de la Chine et de la Russie à la position française.

Mme Hélène Luc a estimé inquiétant et inacceptable que les États-Unis envisagent d'outrepasser les décisions de l'ONU et remettent en cause les règles de sécurité collective ce qui pourrait avoir des conséquences dramatiques. Elle s'est déclarée en accord avec les positions défendues par le président de la République et le gouvernement.

M. Michel Pelchat a estimé qu'aucune relève politique n'existait en Irak et qu'une intervention provoquerait une déstabilisation de la région. Il s'est inquiété de l'avancement des préparatifs militaires américains et des réactions de la Communauté internationale à une telle opération qu'il estimait certaine.

Mme Danielle Bidard-Reydet s'est interrogée sur les buts réels des États-Unis dans la crise qui les oppose à l'Irak.

M. Jean-Guy Branger a souhaité avoir des précisions sur la position de l'Arabie saoudite.

M. Dominique de Villepin a alors apporté les précisions suivantes :

- la stratégie américaine prend son origine dans les événements du 11 septembre, qui ont provoqué une émotion considérable, qui perdure aujourd'hui. Ils sont déterminés à mener la guerre contre le terrorisme et à lutter contre la nouvelle menace que constitue la prolifération des armes de destruction massive ;

- le concept d'action préventive va à l'encontre des règles établies par le droit international. Soucieuse de préserver le rôle central des Nations unies, la France entend chercher l'appui d'autres membres permanents du Conseil de sécurité et plus généralement de la communauté internationale. L'enjeu dépasse la seule question irakienne et met en cause l'ordre international futur. Il s'agit d'éviter une fracture non seulement entre les États-Unis et leurs alliés occidentaux mais également entre l'Occident et le reste du monde. L'effet produit par une action unilatérale des États-Unis contre l'Irak aurait par ailleurs un impact durable sur les opinions arabes qu'il serait difficile d'effacer ;

- la commission d'inspection, dont la composition a été renouvelée, est composée de 63 inspecteurs permanents (huit de nos compatriotes y participent), s'y ajoutent 20 inspecteurs de l'AIEA ;

- le délai moyen envisagé par M. Blix est d'environ huit mois. Le Conseil de sécurité garde par ailleurs la possibilité, une fois le régime d'inspection en place, de réexaminer tous les 120 jours les sanctions contre l'Irak, et éventuellement de les suspendre ;

- dans ce dossier, les États-Unis ont essentiellement des motivations de sécurité, celles-ci intégrant également l'enjeu énergétique. Leur attitude relève d'une vision d'un nouvel ordre mondial où ils assumeraient seuls la responsabilité de leur sécurité élargie aux dimensions du monde ;

- la France cherche le soutien des pays de l'Union européenne. Un accord existe sur la nécessité de passer, avant toute action, par le Conseil de sécurité et sur le refus de faire du changement de régime politique en Irak un objectif de la communauté internationale.