II. RAPPORT ASSEMBLÉE NATIONALE N° 2857 TOME II (2010-2011)

Observations et décision de la Commission :

Les entreprises d'assurance sont tenues de constituer des provisions, dites provisions techniques, leur permettant de régler leurs engagements vis-à-vis de leurs assurés. Ces provisions techniques comprennent notamment une réserve de capitalisation, destinée à parer à la dépréciation des valeurs comprises dans l'actif de l'entreprise et à la diminution de leur revenu.

Cette réserve est alimentée par les plus-values constatées lors de la cession d'obligations et diminuée à hauteur des moins-values. Elle impose donc aux entreprises d'assurance de mettre en réserve les plus-values constatées en cas de baisse des taux pour leur permettre ensuite de les reprendre dans les périodes de hausse des taux.

Les mouvements opérés sur cette réserve (dotations en cas de plus-values à la cession des titres soumis à la réserve de capitalisation, reprises en cas de moins-values) neutralisent sur le plan comptable les plus-values ou moins-values correspondantes. Il en est de même sur le plan fiscal dans la mesure où, par décision ministérielle du 21 septembre 1973, ces dotations sont déductibles (effaçant la plus-value) tandis que les reprises sont taxables (effaçant la moins-value).

Le présent article propose :

- de ne plus tenir compte, pour l'avenir, des dotations et reprises sur la réserve de capitalisation pour la détermination du résultat fiscal (donc de ne plus autoriser la déduction des dotations et de ne plus imposer les reprises),

- de soumettre le montant actuel de la réserve de capitalisation (donc le stock des dotations net des reprises) à une taxe exceptionnelle au taux de 10 %, non déductible de l'impôt sur les sociétés car représentative de celui-ci et venant, en quelque sorte, se substituer à l'IS qui aurait été payé (en l'état du droit) à l'occasion des reprises, lesquelles ne seront désormais plus taxables.

Le Gouvernement estime que la modification pour l'avenir de l'assiette de l'IS produira, à compter de 2011, un supplément annuel de recettes pour l'État de 200 millions d'euros. La taxation exceptionnelle du « stock » devrait, elle, dégager un produit de 1 700 millions d'euros, pour moitié en 2011 et pour moitié en 2012, qu'il est proposé d'affecter à la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES).

I.- LE FONCTIONNEMENT DE LA RÉSERVE DE CAPITALISATION

La réserve de capitalisation est une provision réglementée (en application des articles R. 331-3 et R. 331-6 du code des assurances ( 47 ) ) qui fait partie des fonds propres des entreprises d'assurance (compte 10645 du plan comptable particulier à l'assurance annexé à l'article A. 343-1 du même code) et entre dans leur marge de solvabilité.

Les titres soumis à la réserve de capitalisation sont les obligations et les titres assimilables (titres de créance négociables rémunérés à taux fixe ou indexé, bons à moyen terme négociables), à l'exception des obligations à taux variable, figurant à l'actif des entreprises d'assurance et admis en représentation de leurs engagements réglementés. Il s'agit donc des valeurs assurant un rendement à taux fixe ou indexé.

Les dotations et reprises à la réserve doivent intervenir en application de l'article R. 333-1 du code des assurances. Celui-ci dispose qu'en cas de vente de valeurs soumises à la réserve de capitalisation, des versements ou des prélèvements sont effectués sur cette réserve. Ces versements ou prélèvements sont obligatoires et seuls les versements ou prélèvements prévus par la réglementation sont possibles (il ne s'agit pas d'une réserve libre).

Le montant des versements correspond, en principe, à l'écart entre le prix d'achat et le prix de vente des titres 1 ( * ) . L'idée générale est qu'un assureur ayant acquis un portefeuille dans une période où les taux sont élevés et qui ferait une plus-value en le cédant après une baisse des taux dégagerait, à cette occasion, un bénéfice assez virtuel dans la mesure où il devrait, dans l'hypothèse d'un assureur-vie ayant garanti des rendements à ces assurés (hypothèse dominante à l'époque de la création du mécanisme, qui date des années 1930), acheter davantage de titres dont le rendement nominal sera plus faible pour servir, en valeur absolue, le même montant. La réserve de capitalisation lui interdit, en conséquence, de distribuer ce supplément de résultat.

Il convient de noter que la réglementation comptable et prudentielle relative à la réserve de capitalisation n'est évidemment nullement modifiée par le présent article.

Par construction, les mouvements opérés sur la réserve de capitalisation neutralisent donc, au plan comptable, les plus-values ou moins-values qui les déclenchent.

Sur le plan fiscal, les dotations sont déductibles et les reprises, taxables. Cet état du droit résulte d'une lettre du 21 décembre 1973 du ministre de l'économie et des finances au président de la fédération française des sociétés d'assurance.

Conséquemment, les régimes comptable et fiscal sont alignés : une plus-value sur un titre soumis à la réserve de capitalisation ne majore pas le résultat et n'est pas imposée, une moins-value ne minore pas le résultat et ne réduit pas l'assiette imposable.

La cession de titres soumis à la réserve de capitalisation sur lesquels des moins-values latentes sont constatées 2 ( * ) , c'est-à-dire la réalisation de ces moins-values, est, selon les informations apportées au Rapporteur général par le Gouvernement, rare. Les titres concernés sont, en effet, des obligations dont le remboursement du nominal est, sauf défaut de l'emprunteur, assuré à l'échéance. En outre, ces moins-values, neutralisées fiscalement par les reprises sur la réserve qui sont imposables, ne viennent pas minorer la base imposable.

En revanche, la réalisation de plus-values n'est pas totalement dépourvue d'intérêt puisqu'elle renforce (en normes françaises 3 ( * ) les fonds propres, dans lesquels est comprise la réserve de capitalisation (dotée à l'occasion d'une plus-value du montant de celle-ci par une dotation déductible effaçant le résultat imposable).

Selon les informations apportées au Rapporteur général par le Gouvernement qu'aucun élément chiffré n'est toutefois venu étayer, il en aurait résulté une croissance régulière du montant de la réserve de capitalisation.

II.- LA TAXE EXCEPTIONNELLE, UNE MESURE PONCTUELLE SUR LE STOCK

Le I du présent article institue la taxe exceptionnelle sur la réserve de capitalisation, dont le II règle les frais d'assiette et de recouvrement. Ces dispositions ne sont pas codifiées compte tenu du caractère exceptionnel de la taxe.

A.- LES REDEVABLES

Le premier alinéa du I ( alinéa 1 ) dispose que seront redevables de la taxe toutes les personnes exerçant une activité en France au jour de la publication de la loi et relevant de la compétence de l'Autorité de contrôle prudentiel dans le secteur de l'assurance à l'exception, d'une part, du fonds de garantie universelle des risques et, d'autre part, des véhicules de titrisation (catégorie juridique qui, selon les informations apportées au Rapporteur général, ne comprend pas d'entreprise à ce stade et qui correspond, de toute manière, à des activités de portage qui ne seraient pas soumises à la réserve de capitalisation).

Les redevables sont donc :

- les entreprises exerçant une activité d'assurance ou de réassurance,

- les mutuelles et unions de mutuelles et

- les institutions de prévoyance.

Certains des redevables sont donc exonérés, sur tout ou partie de leur activité, de l'impôt sur les sociétés. Le choix de soumettre la réserve de capitalisation qu'ils ont accumulée à un prélèvement présenté comme se substituant à l'IS (qui aurait été payé, par ceux des redevables assujettis à cet impôt, en l'absence de neutralisation fiscale des mouvements sur la réserve de capitalisation) ne répond donc pas à une logique fiscale mais peut s'expliquer par la volonté de traiter de manière identique des acteurs exerçant concurremment certaines activités.

B.- L'ASSIETTE

Le deuxième alinéa du I ( alinéa 2 ) dispose que la taxe est assise sur le montant de la réserve de capitalisation à l'ouverture de l'exercice en cours au jour de la publication de la présente loi de finances.

L'assiette correspond donc à un poste de bilan, apprécié à une date passée. Elle ne peut donc être optimisée, d'autant que les mouvements sur la réserve de capitalisation sont, de toute façon, imposés, dans les conditions rappelées supra, par la réglementation prudentielle. Les estimations de l'assiette et du produit sont donc, a priori , fiables.

C.- LE TAUX, LE PLAFONNEMENT EN FONCTION DES FONDS PROPRES ET LA NON DÉDUCTIBILITÉ

Le troisième alinéa du I ( alinéa 3 ) fixe à 10 % le taux de la taxe.

Ce taux est donc inférieur au taux normal de l'IS. Il convient de noter qu'il en résulte, au plan comptable, un résultat exceptionnel pour les entreprises d'assurance dont la comptabilité est établie sur la base des normes IFRS.

Ces normes ne connaissant pas la réserve de capitalisation, qui est un mécanisme spécifique à la France, la comptabilité des entreprises concernées est retraitée et le retraitement s'accompagne de l'enregistrement d'une charge d'impôt différé calculé sur la base du taux normal, qui est le taux d'imposition des reprises en l'état du droit. Compte tenu du taux de la taxation exceptionnelle proposée et de l'exonération des reprises futures, la charge d'impôt différé était donc surévaluée ce qui génère un produit exceptionnel.

Le même alinéa prévoit un plafonnement du montant de la taxe à 5 % des fonds propres, y compris la réserve elle-même. Par construction, ce plafonnement jouerait donc lorsque la réserve représente au moins la moitié des fonds propres des contribuables 4 ( * ) . Selon les informations apportées au Rapporteur général par le Gouvernement, ce plafonnement ne jouerait donc que dans des cas marginaux pour un coût de l'ordre d'une soixantaine de millions d'euros.

L' alinéa 4 dispose que la taxe n'est pas admise en déduction du résultat imposable à l'impôt sur les sociétés. L'évaluation préalable justifie ce choix par le fait que la taxe exceptionnelle constitue un « substitut à l'impôt sur les sociétés ».

D.- LA LIQUIDATION, LE PAIEMENT, LE RECOUVREMENT ET LE CONTRÔLE

L' alinéa 5 prévoit que la taxe sera exigible à la clôture de l'exercice en cour au jour de la publication de la présente loi de finances et qu'elle est déclarée et liquidée, par les contribuables, dans les quatre mois de son exigibilité.

Le paiement de la taxe est prévu, pour moitié, lors du dépôt de la déclaration (donc en 2011) et, pour moitié, « dans les seize mois de son exigibilité » (donc, en règle générale, en avril 2012).

L'étalement du paiement vise à traiter le cas éventuel de petits redevables dont la réserve de capitalisation représente une part importante des fonds propres. Il ne semble, en revanche, pas présenter d'intérêt pour les redevables les plus importants.

Le recouvrement, le contrôle et le contentieux suivent, en application de l' alinéa 6 , le régime applicable à la taxe sur la valeur ajoutée.

E.- LE PRODUIT ATTENDU ET SON AFFECTATION

L'évaluation préalable du présent article estime le produit de la taxe exceptionnelle à 1 700 millions d'euros.

L'alinéa 1 prévoit l'affectation de ce produit à la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES).

Cette affectation se fera sous déduction de frais d'assiette et de recouvrement (prélevés « en dedans ») prévus par le II du présent article ( alinéa 7 ) par renvoi à l'ordonnance du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale.

En application de celle-ci, le montant du prélèvement correspondant est fixé par arrêté du ministre chargé de l'économie et des finances et du ministre chargé de la sécurité sociale. Pour la CRDS, il est actuellement prévu le prélèvement de FAR au taux de 0,5 %. Le Gouvernement n'a pas été en mesure de préciser au Rapporteur général le taux susceptible d'être appliqué au titre de la réserve exceptionnelle qui ne sera pas nécessairement le même.

III.- LA MODIFICATION PÉRENNE DE L'ASSIETTE DE L'IMPÔT
SUR LES SOCIÉTÉS

Le III du présent article propose la création, au sein du code général des impôts, d'un nouvel article 39 quinquies GE disposant que les dotations et les reprises sur la réserve de capitalisation opérées par les redevables de la taxe exceptionnelle ne sont pas prises en compte pour la détermination de leur bénéfice imposable.

Les dotations ne minorant plus le résultat imposable, les plus-values correspondantes seront donc effectivement taxées tandis que les moins-values, qui ne seront plus effacées fiscalement par les reprises, minoreront le résultat imposable.

Le IV précise que ces dispositions s'appliquent aux exercices clos à compter de la publication de la loi, et donc à des dotations et reprises opérées antérieurement à celle-ci.

Le Gouvernement estime que ces dispositions dégageront un produit annuel supplémentaire d'IS de 200 millions d'euros. Cette estimation est fondée sur les mouvements constatés par le passé sur la réserve de capitalisation.

Outre que le Gouvernement n'a pas été en mesure d'apporter au Rapporteur général des évaluations chiffrées de ces mouvements, cette estimation repose sur une hypothèse extrêmement forte qui est l'absence de modification du comportement des redevables.

Or, la disposition proposée a justement pour effet d'inciter à une modification de ces comportements : si peu de moins-values étaient jusqu'à présent réalisées, c'est aussi parce qu'elles n'avaient, pour les raisons précédemment indiquées, aucun intérêt fiscal. Dans l'état du droit proposé résultant du présent article, au contraire, un contribuable dont le résultat fiscal est, par ailleurs, positif minorera désormais son impôt du tiers de ces moins-values. On ne peut donc pas exclure qu'il décide de les réaliser davantage que par le passé, d'autant que, sur le plan économique, des moins-values importantes sur les portefeuilles obligataires ne sont pas à exclure compte tenu du niveau actuellement très faible des taux. L'enjeu est, en outre, majeur puisque la somme totale des réserves de capitalisation est de l'ordre de 17 milliards d'euros.

*

* *

La Commission adopte l'amendement de coordination I-CF 309 du rapporteur général ( amendement n° I-39 ) ainsi rédigé .

Après le mot :

« Caisse »,

rédiger ainsi la fin de la dernière phrase de l'alinéa 1 :

« nationale des allocations familiales ».

La Commission examine les amendements I-CF 120 et I-CF 121 de M. Charles de Courson et I-CF 310 du rapporteur général.

Amendement I-CF 120

Amendement I-CF 121

Amendement I-CF 310

I. - Après le mot :

« régissent »,

rédiger ainsi la fin de l'alinéa 9 :

« sont prises en compte pour la détermination de leur résultat imposable. ».

II. - Après l'alinéa 9, insérer les trois alinéas suivants :

« Par dérogation au premier alinéa, celles de ces reprises dont le montant, cumulé à celui de l'ensemble des reprises sur la réserve de capitalisation effectuées au titre des exercices successifs clos depuis la promulgation de la loi n°          du            de finances pour 2011, est inférieur au montant de la réserve de capitalisation à l'ouverture de l'exercice en cours au jour de la promulgation de la loi n°         du          de finances pour 2011 sont prises en compte pour la détermination du résultat imposable pour 70 % de leur montant.

« En cas de fusion ou d'opération assimilée ou de transmission universelle de patrimoine, le montant de la réserve de capitalisation de la société absorbante ou bénéficiaire de la transmission retenu pour l'application de l'alinéa précédent est majoré du montant de la réserve de capitalisation de la société absorbée ou transmise et minoré du montant cumulé des reprises effectuées par la société absorbée ou transmise et prises en compte pour la détermination du résultat imposable dans les conditions définies à l'alinéa précédent.

« En cas de scission ou d'apport partiel d'actif, le montant de la réserve de capitalisation de la ou des sociétés bénéficiaires des apports retenu pour l'application du deuxième alinéa est majoré du montant de la réserve de capitalisation apportée et minoré d'une fraction, déterminée en proportion de la part de la réserve de capitalisation apportée dans la réserve de capitalisation de la société apporteuse, du montant cumulé des reprises effectuées par la société apporteuse et prise en compte pour la détermination du résultat imposable dans les conditions définies au deuxième alinéa. »

M. Charles de Courson. L'amendement I-CF 120 a pour but de supprimer la rétroactivité des dispositions de l'article 9. En effet, dans la rédaction actuelle, le changement de régime fiscal, et donc la non-déductibilité des dotations à la réserve de capitalisation, interviendrait pour toutes les opérations effectuées depuis le 1 er janvier 2010. Cela reviendrait à modifier ex post l'environnement fiscal dans lequel les arbitrages sur obligations ont été effectués, ce qui peut remettre totalement en cause l'intérêt économique des décisions prises à l'époque.

La réserve de capitalisation étant une provision technique dont les dotations ou reprises interviennent au fil des cessions d'obligations, et non pas à l'inventaire, son montant au 1 er septembre peut être déterminé avec précision. Dans ces conditions, et conformément à la position retenue lors de précédentes remises en cause de régimes fiscaux, il est proposé que le nouveau traitement fiscal de la réserve s'applique aux mouvements effectués depuis l'annonce de la mesure, c'est-à-dire le 1 er septembre 2010. Symétriquement, l' exit tax doit alors être assise sur le montant de la réserve à cette même date

M. le rapporteur général. Avis défavorable à l'amendement I-CF 120. Quant au I-CF 121, il sera satisfait si mon amendement I-CF 310 est adopté.

Le mécanisme de la réserve de capitalisation est spécifique aux sociétés d'assurance. À cette réserve, qui leur tient lieu de fonds propres, sont directement affectées les plus-values de cessions d'obligations. Le Gouvernement nous propose de fiscaliser ces plus-values et de soumettre à une exit tax de 10 % les sommes déjà mises en réserve par les entreprises d'assurance. Cette fiscalisation du « stock » ne manque pas d'intérêt : ces réserves étant évaluées à 17 milliards d'euros, le produit de cette taxe devrait rapporter 1,7 milliard d'euros sur deux exercices, 850 millions cette année et autant l'an prochain.

La fiscalisation des « flux » me semble en revanche plus discutable, voire dangereuse dans le contexte actuel de la directive solvabilité II. De plus, dans l'hypothèse d'une hausse des taux obligataires, nos sociétés d'assurance risqueraient de subir une dévalorisation de leurs actifs. Même si elles ne réalisent pas les moins-values, préférant attendre l'échéance qui leur assure le remboursement du nominal, elles risquent de souffrir d'un manque de fonds propres.

Afin de préserver l'incitation au renforcement des fonds propres des sociétés d'assurance, je vous propose de ne pas fiscaliser les flux. Dans cette hypothèse, la date du 1 er janvier 2010 ne pose plus problème.

Mon amendement permet en outre de résoudre le problème des moins-values des titres soumis à la réserve de capitalisation. En effet, le stock des plus-values étant soumis à une exit tax de 10 %, la non-prise en compte fiscale des reprises correspondantes, proposée par le Gouvernement, constitue un avantage excessif pour les sociétés d'assurance puisqu'elle aboutirait à déduire 33 % de moins values quand la plus value a été taxée à 10 %. Je propose donc de « rattraper » le taux normal en taxant les reprises à 23 % lorsqu'elles sont issues du « stock » taxé à 10 %.

M. le président Jérôme Cahuzac. Cette disposition vise-t-elle à sécuriser la recette ?

M. le rapporteur général. Le produit de l' exit tax , qui devrait être d'1,7, voire 1,9 milliard, est complètement sécurisé. Cet amendement présente surtout l'avantage de sécuriser les fonds propres des entreprises d'assurance. En revanche, en ne taxant pas le flux, on abandonne une recette théorique évaluée par le Gouvernement à 200 millions d'euros chaque année, sachant que le contexte actuel rend ce montant très hypothétique.

M. Jérôme Chartier. J'approuve l'amendement du rapporteur général en ce qui concerne la fiscalisation du stock. Je m'interroge en revanche sur l'utilité de maintenir une réserve de capitalisation. Il ne faut pas oublier qu'avant la directive solvabilité II et la mise en oeuvre de ratios prudentiels par les compagnies d'assurance, leurs fonds propres n'étaient pas seulement constitués d'obligations, mais aussi d'actions. La réserve de capitalisation avait d'abord pour fonction de les garantir contre les risques inhérents aux actions. Aujourd'hui le problème ne se pose plus.

M. Marc Goua. Je soutiens également l'amendement du rapporteur général. Nous connaissons actuellement des taux obligataires exceptionnellement bas et une hausse des taux semble inévitable. Elle générera des moins-values conséquentes.

M. le rapporteur général. Seule l' exit tax devait être affectée à la Caisse d'amortissement de la dette sociale, non le produit de la fiscalisation du flux - environ 200 millions -, qui reste dans les caisses de l'État. Notre amendement n'enlève donc rien au financement de la réforme des retraites.

M. Olivier Carré. Je comprends qu'on s'inquiète des moins-values potentielles, mais elles sont souvent défiscalisées. S'agissant des obligations, les assureurs peuvent toujours attendre l'échéance de leurs créances, ce qui leur permet de ne pas provisionner leurs titres. Ils ont donc toute latitude pour s'adapter au contexte économique. Il est d'autant plus dommage de se priver d'une recette disponible que la diversité de leurs portefeuilles leur permet largement de compenser l'effet d'une remontée des taux obligataires. En tout état de cause, je me fie à la sagesse du rapporteur général.

M. Jérôme Chartier. Ce que vient de dire M. Carré est parfaitement exact. La réserve de capitalisation était un mécanisme exceptionnel, lié à l'intervention des assurances sur les marchés d'actions. Il me semble donc préférable de ne pas toucher au dispositif du Gouvernement, qui a l'avantage de rapporter 200 millions d'euros, quitte à approfondir la réflexion par la suite. Pour l'instant, il n'y a pas de raison objective de se priver de cette ressource. Il ne faut pas oublier, monsieur Goua, que la stratégie extrêmement prudente des compagnies d'assurance, fait que les moins-values sont systématiquement compensées par les plus-values générées par d'autres placements.

M. le rapporteur général. Dans un contexte d'augmentation des taux d'intérêt, une fiscalisation peut inciter à la réalisation de moins-values qui viendraient s'imputer sur le résultat imposable et donc diminuer la recette fiscale. Par ailleurs, rien ne nous interdit d'instaurer dans quelques années une seconde exit tax . Dans le contexte actuel, la solution que je vous propose me paraît la plus prudente.

L'amendement I-CF 120 est retiré.

La Commission adopte l'amendement I-CF 310 ( amendement n° I-40 ).

En conséquence, l'amendement I-CF 121 tombe .

La Commission adopte l'article 9 ainsi modifié.


* 1 Cette règle est, en pratique, adaptée s'agissant des titres achetés sur le marché secondaire à un prix différent de leur valeur de remboursement pour lesquels un prix théorique est reconstitué en fonction de leur rendement réel (dit actuariel) qui ne correspond, par construction, plus à leur taux de coupon (rendement nominal).

* 2 Au titre de l'évolution des taux ; l'éventuelle dépréciation à raison du risque de défaut (qui n'est pas prise en compte par la réserve de capitalisation) relevant d'une problématique comptable et fiscale différente

* 3 Les normes IFRS ne connaissent pas la réserve de capitalisation qui est un mécanisme purement français.

* 4 Par résolution de 5 % x (autres fonds propres+réserve de capitalisation) < 10 % x réserve de capitalisation.