ARTICLE 55 : MAJORATION DES PLAFONDS DE REPORTS DE CRÉDITS DE PAIEMENT

I. TEXTE DU PROJET DE LOI

Les reports de 2010 sur 2011 susceptibles d'être effectués à partir des programmes mentionnés dans le tableau figurant ci-dessous ne pourront excéder le montant des crédits de paiement ouverts sur ces mêmes programmes par la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010 et par les lois n° 2010-237 du 9 mars 2010, n° 2010-463 du 7 mai 2010 et n° 2010-606 du 7 juin 2010 de finances rectificatives pour 2010. Ces reports seront inscrits sur les programmes correspondants de la présente loi figurant dans le tableau ci-dessous.

intitulé du programme 2010

intitulé de la mission
de rattachement 2010

intitulé du programme 2011

intitulé de la mission
de rattachement 2011

Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur

Administration générale et territoriale de l'État

Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur

Administration générale et territoriale de l'État

Gestion fiscale et financière de l'État et du secteur public local

Gestion des finances publiques et des ressources humaines

Gestion fiscale et financière de l'État et du secteur public local

Gestion des finances publiques et des ressources humaines

Stratégie des finances publiques et modernisation de l'État

Gestion des finances publiques et des ressources humaines

Stratégie des finances publiques et modernisation de l'État

Gestion des finances publiques et des ressources humaines

Entretien des bâtiments de l'État

Gestion des finances publiques et des ressources humaines

Entretien des bâtiments de l'État

Gestion des finances publiques et des ressources humaines

Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire

Politique des territoires

Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire

Politique des territoires

Concours spécifiques et administration

Relations avec les collectivités territoriales

Concours spécifiques et administration

Relations avec les collectivités territoriales

Intervention des services opérationnels

Sécurité civile

Intervention des services opérationnels

Sécurité civile

II. RAPPORT ASSEMBLÉE NATIONALE N° 2857 (2010-2011)

Observations et décision de la Commission :

Le présent article tend à introduire, en faveur de sept programmes du budget général, des dérogations au plafond de reports de crédits de paiement prévu à l'article 15 de la LOLF.

Les reports de crédits d'un exercice sur l'autre sont un élément nécessaire à la souplesse de la gestion budgétaire. Toutefois, lorsqu'ils atteignent un montant trop important, ils nuisent à la bonne exécution de la loi de finances de l'année et contribuent à dissimuler la réalité des charges publiques. Sauf cas particulier, les reports doivent donc demeurer exceptionnels. Sous la législature précédente, le « stock » de reports, qui avait atteint 14 milliards d'euros à la fin 2001, a été spectaculairement réduit. Le graphique ci-après rend compte des efforts très substantiels de réduction des reports réalisés depuis 2002.

CRÉDITS DE PAIEMENT OUVERTS PAR REPORT SUR LE BUDGET GÉNÉRAL

Depuis cinq ans 1 ( * ) , l'application de l'article 15 de la LOLF conforte cette politique, en limitant les reports de crédits de paiement d'un programme - vers le même programme ou vers un programme poursuivant les mêmes objectifs - à 3 % des crédits initiaux inscrits sur le programme à partir duquel les crédits sont reportés. La LOLF traite distinctement les dépenses de personnel du titre 2 et les dépenses des autres titres, afin d'éviter que ne soit contourné le principe d'asymétrie régissant la fongibilité des crédits.

Toutefois, puisque des assouplissements sont parfois nécessaires, l'article 15 prévoit qu'une disposition de loi de finances peut ponctuellement, pour les crédits hors titre 2, majorer le plafond de 3 %.

L'année dernière, l'article 75 de la loi de finances initiale pour 2010 a ainsi autorisé plusieurs dérogations : seize programmes ont été exonérés du respect du plafond de 3 %, entraînant des reports effectifs de 2009 vers 2010 de près de 1,7 milliard d'euros, là où l'application du plafond les aurait limités à moins de 455 millions d'euros (voir le tableau ci-après).

Sont cependant comptabilisés les reports de crédits entre 2009 et 2010 portant sur la mission temporaire Plan de relance de l'économie , créée à l'occasion de la première loi de finances rectificative du 4 février 2009. Cette mission génère à elle seule des reports de crédits de paiement de 975 millions d'euros (dont 573 millions d'euros sur le programme Soutien exceptionnel à l'activité économique et à l'emploi ), qui ont vocation à être intégralement consommés en 2010.

Hors mission Plan de relance de l'économie , les reports effectifs de crédits de 2009 vers 2010 des 13 autres programmes exonérés du respect du plafond de 3 % s'établissent à 715,7 millions d'euros à la fin 2009. Il faut tout spécialement souligner la forte baisse des reports de crédits militaires qui ont longtemps occupé une place déterminante au sein du « stock » de reports (voir le graphique ci-avant). Sous l'effet notamment de l'autorisation exceptionnelle de consommation de 500 millions d'euros de crédits reportés, accordée dans le cadre de la relance 2 ( * ) , les reports du ministère de la Défense ont diminué de 983 millions d'euros. En particulier, le montant des reports de crédits de paiement sur le programme Équipement des forces , qui atteignait encore 969 millions d'euros fin 2008, est tombé à 127 millions fin 2009.

REPORTS DE 2009 VERS 2010 PAR DÉROGATION AU PLAFOND DE 3 %

(Crédits de paiement, en millions d'euros)

Mission

Programme

LFI 2009 Hors titre 2 (A)

Plafond de 3 %

(pour mémoire)

Reports effectifs 2009-2010

Reports de fonds de concours

(exonérés du plafond de 3 %)

Reports hors FDC (B)

% des crédits initiaux (B/A)

Relations avec les collectivités territoriales

Concours spécifiques et administration

456,04

13,68

-

46,20

10,1 %

Solidarité, insertion, égalité des chances

Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales

253,54

7,61

1,38

17,88

7,1%

Sécurité civile

Coordination des moyens de secours

154,97

4,65

0,015

97,02

62,6%

Intervention des services opérationnels

113,62

3,41

0,16

23,46

20,7%

Ville et Logement

Développement et amélioration de l'offre de logement

614,46

18,43

0

95,33

15,5%

Défense

Équipement des forces

10 348

310,44

-

127,3

1,2 %

Soutien de la politique de la défense

766,27

22,99

-

52,51

6,9 %

Gestion des finances publiques et des ressources humaines

Gestion fiscale et financière de l'État et du secteur public local

1 433,30

43,00

3,5

67,97

4,7%

Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur

276,37

8,29

0,38

43,80

15,8%

Stratégie des finances publiques et modernisation de l'État

202,53

6,08

-

53,31

26,3 %

Entretien des bâtiments de l'Etat

76,98

2,31

-

76,98

100,0 %

Médias

Presse

277,69

8,33

-

13,67

4,9 %

Administration générale et territoriale de l'Etat

Vie politique, cultuelle et associative

205,91

6,18

-

0,19

0,1 %

Plan de relance de l'économie

Programme exceptionnel d'investissement public

-

-

245,04

Soutien exceptionnel à l'activité économique et à l'emploi

-

-

572,86

Effort exceptionnel en faveur du logement et de la solidarité

-

-

160,00

Total (hors plan de relance de l'économie)

15 180

455,39

715,70

Total (y.c. plan de relance de l'économie)

1 693,6

Pour 2011, le présent article tend à renouveler la dérogation au profit de six programmes ( Conduite et pilotage de la politique de l'intérieur ; Gestion fiscale et financière de l'État et du secteur public local ; Stratégie des finances publiques et modernisation de l'État ; Entretien des bâtiments de l'État ; Concours spécifiques et administration ; et Intervention des services opérationnels ) et à en accorder une nouvelle (au profit du programme Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire ).

Les crédits en question concernent :

- l'indemnisation des communes au titre de la délivrance des cartes d'identité et des passeports de 1999 à 2008 sur le programme Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur . Une ouverture de crédits de paiement sera également proposée dans le projet de loi de finances rectificative de fin d'année (32,5 millions d'euros) ;

- des investissements informatiques du ministère du Budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État . Sur le programme Gestion fiscale et financière de l'État et du secteur public local de la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines , il s'agit de permettre - à nouveau - des reports en faveur du projet Copernic. Il en va de même de la dérogation demandée en faveur du programme Stratégie des finances publiques et modernisation de l'État , qui retrace notamment les crédits nécessaires au projet informatique Chorus ;

- le programme Entretien des bâtiments de l'État , pour lequel l'exercice 2010 est marqué par la fin du plan de relance, le doublement de la dotation prévue en loi de finances initiale par rapport à l'année précédente et la mise en place de nouvelles modalités de gestion : en 2010, les crédits d'entretien du propriétaire de certains services déconcentrés ont été gérés par les préfets de région, représentants locaux de l'État propriétaire, afin d'obtenir une meilleure mutualisation des crédits, une professionnalisation des équipes locales et un recours accru aux marchés interministériels. Cette régionalisation a vocation à s'étendre au périmètre des schémas pluriannuels de stratégie immobilière (SPSI) en 2012 ;

- des mesures d'accompagnement territorial des restructurations des implantations du ministère de la défense dans le cadre du programme Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire dont le calendrier initial a été décalé ;

- des investissements locaux financés par l'État , figurant sur le programme Concours spécifiques et administration de la mission Relations avec les collectivités territoriales (notamment dans des collectivités locales ayant subi des catastrophes naturelles) ;

- du remplacement d'hélicoptères de la sécurité civile nécessaires à la reprise des forces de souveraineté outre-mer compte tenu du décalage de l'acquisition initialement prévue en 2010 dans le cadre du programme Intervention des services opérationnels.

Pour ces sept programmes, la dérogation consiste à permettre des reports de crédits jusqu'au « montant des crédits de paiement ouverts sur ces mêmes programmes » par les quatre lois de finances afférentes à l'année 2010. Outre les crédits ouverts par la loi de finances initiale, sont donc également visés les crédits supplémentaires accordés par les lois de finances rectificatives des 9 mars, 7 mai et 7 juin 2010. Il convient manifestement de comprendre le « montant des crédits de paiement ouverts » comme un montant net des annulations de crédits effectuées par les lois de finances rectificatives déjà intervenues - en l'occurrence celles du 9 mars et du 7 mai 2010. En effet, parmi les sept programmes visés au présent article, seul le programme Concours spécifiques et administration a bénéficié d'ouvertures de crédits supplémentaires.

En permettant des reports jusqu'au montant des crédits résultant des lois de finances afférentes à 2010, sans apporter davantage de précision, le présent article tend à passer d'un plafond de 3 % des crédits initiaux prévu par la LOLF à un plafond qui, en pratique, est proche de 100 % des crédits initiaux - voire bien davantage si le programme a bénéficié d'ouvertures nettes en cours d'année. Ainsi, pour le programme Concours spécifiques et administration précité, la dérogation demandée au présent article autorise un report de 101,04 % des crédits initiaux au lieu de 3 %.

Globalement, l'autorisation de report porte donc sur 3,06 milliards d'euros de crédits hors titre 2, alors que le plafonnement organique à 3 % limiterait les reports à 93,3  millions d'euros pour l'ensemble de ces sept programmes (voir le tableau ci-après). Le décalage est tel qu' il conviendrait que, dans les prochaines lois de finances, le Gouvernement s'engage plus précisément sur le pourcentage de crédits « reportables ». La majoration du plafond permise par l'article 15 de LOLF doit en effet s'interpréter comme une souplesse dans l'application de la règle, non comme son exonération pure et simple .

Un tel progrès dans la maîtrise des reports paraît d'autant plus indispensable que l'an passé, le Gouvernement avait accepté de ne faire référence qu'aux crédits initiaux votés en loi de finances initiale pour 2009 ( 24 ) alors que l'article 42 du projet de loi de finances pour 2010 faisait également référence aux crédits ouverts par les trois lois de finances rectificatives pour 2009. Une telle exigence paraît cette année encore nécessaire, le ministère du Budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État n'ayant, en outre, communiqué aucune estimation du montant des reports susceptibles d'être effectués vers l'exercice 2011 en application du présent article.

REPORTS DE 2010 VERS 2011 PAR DÉROGATION AU PLAFOND DE 3 %

(crédits de paiement, en millions d'euros)

Mission

Programme

LFI 2010 (hors titre 2)

Plafond
de 3 %

Reports 2010-2011 autorisés par le présent article

Base (a)

% des crédits LFI

Administration générale et territoriale de l'État

Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur

275,80

8,27

270,40

98,04 %

Gestion des finances publiques et des ressources humaines

Gestion fiscale et financière de l'État et du secteur public local

1 534,20

46,03

1 501,50

97,87 %

Stratégie des finances publiques et modernisation de l'État

223,40

6,70

222,90

99,78 %

Entretien des bâtiments de l'Etat

169,00

5,07

166,50

98,52 %

Politique des territoires

Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire

330,10

9,90

323,30

97,94 %

Relations avec les collectivités territoriales

Concours spécifiques et administration

468,90

14,07

473,80

101,04 %

Sécurité civile

Intervention des services opérationnels

110,20

3,31

107,96

97,97 %

Total

3 111,60

93,348

3 066,36

(a) Le présent article 55 précise que les reports ne peuvent excéder le montant des crédits de paiement ouverts par les quatre lois de finances afférentes à 2010 (LFI du 30 décembre 2009 ; LFR du 9 mars 2010 ; LFR du 7 mai 2010 et LFR du 7 juin 2010), hors titre 2, c'est-à-dire les crédits ouverts nets des annulations intervenues au terme de ces différentes lois.

*

* *

La Commission adopte l'article 55 sans modification .


* 1 Le plafonnement des reports de crédits de paiement était applicable dès la transition 2005-2006, en application de l'article 62 de la LOLF.

* 2 Afin d'accélérer le règlement des dettes du ministère de la Défense vis-à-vis de ses fournisseurs. Voir, Gilles Carrez, Rapport sur le règlement des comptes et rapport de gestion pour 2009, n° 2651, tome 1, p 9.