IV. DÉBATS SÉNAT PREMIÈRE LECTURE DU 19 NOVEMBRE 2010

Débats Sénat première lecture

Séance du vendredi 19 novembre 2010

Article 6 quinquies

Mme la présidente. « Art. 6 quinquies . -.L'article 39 ter du même code est abrogé.

L'amendement n° I-49 rectifié, présenté par Mme Des Esgaulx, M. Biwer, Mme B. Dupont, M. César et Mme Mélot, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Colette Mélot.

Mme Colette Mélot. Le dispositif de la provision pour reconstitution des gisements permet aux sociétés pétrolières de déduire de leurs bénéfices des sommes qui devront être réemployées dans un délai de deux ans pour rechercher de nouveaux gisements, acquérir des participations, ou valoriser des gisements déjà été mis à jour.

Le dispositif ne constitue en rien une niche fiscale exonérant d'impôt les sociétés de façon définitive. Cet outil est essentiel au regard de la nature des nouveaux acteurs de l'exploration production nationale, sociétés de petite taille qui se sont substituées à la plupart des grandes sociétés internationales qui opéraient sur le sol français.

La suppression de la provision pour reconstitution des gisements enverrait un signal négatif à l'activité de recherche et de production pétrolières assurée, pour la plus large part, par des entreprises de petite taille, qui seraient ainsi pénalisées pour réaliser de nouvelles découvertes d'hydrocarbures en France. Elle serait de nature à affecter les ressources fiscales de l'État et des collectivités territoriales, ainsi que l'emploi dans les zones concernées.

Il est donc proposé, afin de maintenir l'attractivité du domaine minier français, de conserver le régime de la provision pour reconstitution des gisements, qui ne constitue qu'un différé d'intégration dans le résultat imposable des sociétés, et donc de supprimer cet article.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Quand elle examine cette question, la commission est un peu partagée.

En effet, d'un côté, la provision pour reconstitution des gisements, la PRG, est un régime qui fut assez exceptionnel, autrefois, du fait de son importance économique. Aujourd'hui, son coût est de l'ordre de 20 millions d'euros, ce qui n'est pas rien, mais elle ne profite plus qu'à une seule entreprise, québécoise, qui prospecte sur le territoire métropolitain, en particulier en Gironde ; c'est sans doute ce qui a attiré l'attention de notre excellente collègue Marie-Hélène Des Esgaulx.

Il nous serait utile, monsieur le secrétaire d'État, de connaître votre analyse. En effet, si le régime de la PRG est définitivement supprimé, comment la transition sera-t-elle assurée pour cette société ? En effet, la reprise de la provision qui doit être effectuée dans les deux ans ne pourra pas être compensée par de nouveaux passages de provision.

J'avoue ne pas très comprendre comment, sur le plan technique, une entreprise encore active en matière de prospection peut sortir du régime de la PRG. Ce doute nous ferait plutôt pencher en faveur de l'amendement...

La commission a décidé de s'en remettre à l'avis du Gouvernement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Georges Tron, secrétaire d'État. Le Gouvernement avait décidé de s'en remettre à la sagesse de la Haute Assemblée. (Rires.) Nous ne sommes donc guère avancés...

Madame la sénatrice, vous proposez de restaurer le régime de la PRG, supprimé en première lecture à l'Assemblée nationale.

Ce dispositif, qui constitue un mécanisme de provision spécial, dérogatoire du droit commun, a un coût budgétaire, selon mes informations, non pas de 20 millions d'euros, monsieur le rapporteur général, mais de 11 millions d'euros. Il faut donc relativiser les choses.

Cette provision était destinée, à l'origine, à favoriser l'exploration pétrolière et gazière sur le territoire français. Il nous faut reconnaître qu'elle n'a aujourd'hui qu'un intérêt assez limité, car la production française d'hydrocarbures ne représente qu'une part très faible de la consommation nationale : environ 1 % pour le pétrole et 3 % pour le gaz.

Des raisons d'ordre économique, liées au très faible taux de succès de l'exploration sur le territoire national et à la dégradation de la rentabilité due à la petite taille des gisements, expliquent cette situation.

Il est vrai que le Gouvernement ne souhaite pas que la suppression de ce dispositif aboutisse à fragiliser les quelques entreprises - peut-être suis-je un peu optimiste ? -, de taille relativement modeste, qui oeuvrent dans ce secteur d'activité.

Le Gouvernement émet plutôt un avis favorable, à moins que cela ne heurte le président de la commission des finances et le rapporteur général.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. J'ai bien entendu les arguments qui ont été avancés aussi bien par notre collègue Colette Mélot, M. le rapporteur général que par M. le secrétaire d'État. Toutefois, il ne me semble pas indécent d'avoir pour objectif de faire disparaître du code général des impôts cette disposition tout à fait dérogatoire.

Peut-être pourrions-nous convenir de trouver, d'ici à la réunion de la commission mixte paritaire, un mécanisme de transition - je ne sais pas du tout lequel ! - susceptible de ne pas pénaliser les entreprises concernées.

Certes, la provision pour reconstitution des gisements doit être activée deux ans après sa constitution et ce qui a été mis en provision doit être affecté à son objet. Mais il serait convenable de dire dès maintenant que la constitution de telles provisions ne sera plus déductible de l'assiette de l'impôt sur les sociétés à partir de 2011.

Aussi serai-je tenté de voter cet amendement, à charge pour nous d'élaborer un texte adéquat d'ici à la réunion de la commission mixte paritaire.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° I-49 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l'article 6 quinquies est supprimé.