Mme Nicole Bricq, rapporteure spéciale


En application de l'article 49 de la LOLF, pour le retour des réponses du Gouvernement aux questionnaires budgétaires concernant le présent PLF, la date limite était fixée au 10 octobre 2009.

À cette date, votre rapporteure spéciale avait reçu 92 % des réponses attendues.

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEURE SPÉCIALE


• L'organisation du compte d'affectation spéciale
« Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat » doit faire l'objet, pour 2011, de modifications substantielles.

En premier lieu, l'article 30 du présent PLF propose deux aménagements du régime de la contribution au désendettement de l'Etat des recettes de cessions immobilières : d'une part, l' affectation des produits de la vente d'immeubles occupés par la direction générale de l'aviation civile au désendettement du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » ; d'autre part, une exonération de cette contribution en faveur du produit des cessions d'immeubles domaniaux dont disposent les établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel ayant demandé la dévolution de leur patrimoine et les établissements publics exerçant des missions d'enseignement supérieur ou de recherche implantés dans le périmètre de l'opération d'intérêt national du plateau de Saclay .

En second lieu, le ministre chargé du budget a fait part de son souhait d' intensifier la contribution au désendettement des produits de cessions immobilières de l'Etat, ce que devrait traduire un amendement gouvernemental au présent PLF. Dans cette attente, votre rapporteure spéciale préconise de doubler le taux minimum actuel (15 %, qui serait ainsi porté à 30 %) et de planifier la disparition des régimes d'exemption de contribution au désendettement qui bénéficient aux produits des cessions du ministère de la défense et d'immeubles situés à l'étranger.


La prévision de cessions immobilières de l'Etat inscrite dans le présent PLF s'élève à 400 millions d'euros de produits , soit 0,7 % de la valeur du parc immobilier de l'Etat au 31 décembre 2009 (60,4 milliards d'euros). Cette prévision s'avère plus modeste que celle des précédents exercices (1,4 milliard d'euros pour 2009, 900 millions pour 2010), adaptée au nouveau plan de cessions des implantations parisiennes du ministère de la défense . Vu les réalisations récentes (375 millions d'euros de recettes en 2008, 475 en 2009), et compte tenu du rétablissement du marché immobilier, elle apparaît aussi comme plus sincère , tout en conservant un caractère ambitieux si l'on considère la raréfaction des biens de prestige disponibles à la vente.

La contribution de ces produits au désendettement de l'Etat se trouve fixée par le présent PLF à 60 millions d'euros, soit 15 % du total , mais ce montant est quelque peu incertain eu égard aux projets de réforme ci-dessus indiqués. Les 340 millions d'euros restant seront affectés à des dépenses immobilières ; leur emploi concret demeure toutefois à justifier , faute de précision suffisante des éléments fournis par la documentation budgétaire.


La politique immobilière de l'Etat , rénovée en 2004-2005 et qui ne saurait se limiter aux cessions, est encore en chantier .

D'une part, la « refondation » de cette politique doit être menée à bien : l' amélioration de l'inventaire et de la valorisation du patrimoine immobilier constitue toujours une tâche importante pour assurer la sincérité du bilan de l'Etat ; la substitution de « conventions d'utilisation » au régime de l'affectation des immeubles domaniaux connaît une mise en application difficile ; la mutualisation interministérielle du produit des cessions est à généraliser, dans la perspective de consacrer l'unité de « l'Etat propriétaire ».

D'autre part, l'extension du champ d'application de cette politique est à poursuivre : d'abord, sur le plan institutionnel, au bénéfice de l'ensemble des services déconcentrés , désormais réorganisés dans le cadre de la réforme territoriale de l'Etat, et des opérateurs de ce dernier, qui commencent seulement à être intégrés à sa stratégie immobilière ; ensuite, sur un plan opérationnel, l' entretien des bâtiments et la gestion des baux se trouvant encore à l'orée d'un meilleur suivi.

Le présent rapport dresse un état des lieux des avancées récentes et des perspectives à court terme sur ces divers points, en mesurant les progrès significatifs réalisés ces dernières années et ceux, non moins considérables, qui restent à accomplir . Dans cette perspective, votre rapporteure spéciale présente un amendement , portant article additionnel au présent PLF, qui vise à améliorer l'information donnée au Parlement sur la performance immobilière (ratios et coût d'occupation des bâtiments) des différents ministères.

Sous le bénéfice de ces observations, votre rapporteure spéciale vous propose l' adoption sans modification des crédits de la mission « Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat ».

I. LA RÉORGANISATION PRÉVUE POUR LE COMPTE ET LA MISSION CORRESPONDANTE

A. UN COMPTE À NOUVEAU RÉFORMÉ

1. L'organisation actuelle
a) Un outil de pilotage pour la politique immobilière de l'Etat mis en place sous l'impulsion du Parlement

Le compte « Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat » n'avait pas d'équivalent sous l'empire de l'ordonnance du 2 janvier 1959 et la LOLF n'avait pas prévu son existence . Il constitue une innovation de l'article 8 de la LFR pour 2005, qui l'a institué a posteriori pour l'exercice 2005, et de l'article 47 de la LFI pour 2006 .

Le législateur, par cette création, a doté d'un outil de pilotage et de suivi, en ce qui concerne les cessions, la politique de rationalisation du patrimoine immobilier de l'Etat conduite par le Gouvernement depuis 2004 et prenant part à la réforme de l'Etat lui-même, d'ailleurs en partie intégrée, aujourd'hui, dans les mesures prises au titre de la révision générale des politiques publiques (RGPP). On doit rappeler que c'est sous l'impulsion des travaux du Parlement que cet outil a été introduit dans l'organisation budgétaire 1 ( * ) .

b) Un compte d'affectation spéciale retraçant les recettes de cession des immeubles de l'Etat et leur emploi

Le compte « Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat » constitue un compte d'affectation spéciale (CAS) au sens de l'article 21 de la LOLF. Organisé par l'article 47 précité de la LFI pour 2006, tel que modifié par l'article 32 de la LFI pour 2007 et par l'article 60 de la LFI pour 2010 qui ont étendu son périmètre, ce compte fait actuellement apparaître :

- en recettes , les produits de cession des immeubles de l'Etat 2 ( * ) et des droits à caractère immobilier attachés à de tels immeubles (sont visés ici les loyers, redevances, produits de droits réels cédés à un tiers pour la gestion ou la valorisation d'immeubles domaniaux, etc.), ainsi que les fonds de concours . Ces fonds de concours retracent les versements sur le compte d'autres acteurs que l'Etat, parties prenantes d'opérations immobilières concernant celui-ci, en particulier les collectivités territoriales et notamment celles dont les services se trouvent logés dans des « cités administratives ». En outre, des versements en provenance du budget général sont possibles, dans la limite de 10 % des recettes du compte conformément à l'article 21, précité, de la LOLF ; ils permettent en particulier d'effectuer des avances , dans le cadre d'opérations immobilières de l'Etat ;

- en dépenses , celles, « directement liées à des opérations concourant à une gestion performante du parc immobilier de l'Etat » (précision expresse ajoutée par la LFI pour 2010), qui couvrent des besoins d'investissement immobilier et de fonctionnement : soit liés à des opérations immobilières réalisées par l'Etat , sur les immeubles dont il est propriétaire ou qui figurent à l'actif de son bilan ; soit liés à des opérations de cession, d'acquisition ou de construction (principalement pour le relogement de services) par des établissements publics et autres opérateurs de l'Etat sur des immeubles domaniaux . En outre, sont retracés les versements du compte au profit du budget général, en pratique la contribution des produits de cessions immobilières de l'Etat à son désendettement .

Le montant de cette contribution, jusqu'alors déterminé par le Gouvernement, a été fixé à hauteur d'un minimum de 15 % par l'article 195 de la LFI pour 2009, adopté sur la proposition de votre rapporteure spéciale au nom de la commission des finances. Toutefois, à l'initiative du Gouvernement pour maintenir la situation alors existante, ont été expressément exemptés de cette contribution les produits de cession de trois catégories d'immeubles de l'Etat :

- d'une part, les immeubles mis à la disposition des services qui relevaient de l'ancien ministère chargé de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, jusqu'au 31 décembre 2009 , disposition aujourd'hui obsolète qui visait les services de l'équipement ;

- d'autre part, les immeubles occupés par le ministère de la défense , jusqu'au 31 décembre 2014 , terme d'application de la loi de programmation militaire en vigueur ;

- enfin, les immeubles situés à l'étranger , sans limite temporelle.

2. La réforme prévue par le présent PLF

Comme la LFI pour 2010, dernière révision en date 3 ( * ) , l'article 30 du présent PLF tend à réformer cette organisation 4 ( * ) . Il modifie l'article 47, précité, de la LFI pour 2006, afin de mettre en place deux séries d' aménagements du régime de la contribution au désendettement de l'Etat des recettes de cessions immobilières de celui-ci. À cette occasion, par ailleurs, il procède au « toilettage » de la loi en supprimant la disposition précitée, devenue obsolète, qui exemptait de contribution au désendettement de l'Etat les produits des ventes immobilières réalisées par les services de l'équipement.

a) L'affectation du produit des cessions d'immeubles de la DGAC au désendettement du BACEA

En premier lieu, il est proposé d' affecter les produits de la vente d'immeubles occupés par la direction générale de l'aviation civile (DGAC) au désendettement du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » (BACEA) - lequel, retraçant aujourd'hui la quasi-totalité des activités régaliennes et de prestations de services assurées par cette direction générale, connaît en effet un niveau d'endettement préoccupant (plus d'un milliard d'euros fin 2009 5 ( * ) ).

Cette catégorie spécifique de recettes de cessions immobilières de l'Etat se trouvera ainsi soustraite au régime de droit commun, ci-dessus rappelé (la contribution au désendettement de l'Etat par le retour, au budget général, d'un minimum de 15 % selon les dispositions en vigueur) : les produits en cause seront intégralement versés au désendettement du budget annexe. La nomenclature des dépenses du compte « Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat » est modifiée en conséquence.

Selon l'annexe « Evaluations préalables » jointe au présent PLF, les versements du compte en faveur du BACEA seraient de 7 millions d'euros par an en moyenne sur la période 2011-2013 , et de 8 millions d'euros dès 2011 . Ces recettes, modestes au regard du besoin de désendettement, ne dispenseront donc pas des nécessaires réformes internes par ailleurs entreprises par la DGAC.

b) Une exemption de contribution au désendettement pour le produit des cessions d'immeubles domaniaux réalisées par certains établissements publics

L'article 30 du présent PLF, en second lieu, vise à exonérer de contribution au désendettement de l'Etat les produits de cession des immeubles appartenant à celui-ci dont disposent deux catégories d'établissements publics . L'annexe « Evaluations préalables » précitée indique que l'enjeu financier de cette mesure d'exonération « devrait être moins important que celui de l'augmentation de la contribution de la DGAC, mais est difficilement chiffrable à ce stade ».

(1) Les établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel ayant demandé la dévolution de leur patrimoine immobilier

La mesure concerne d'abord les établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel, en particulier les universités , qui ont formulé, par une délibération de leur conseil d'administration, une demande de transfert en propriété du patrimoine immobilier de l'Etat dont ils ont la jouissance (procédure dite de « dévolution »), sur le fondement de l'article L. 719-14 du code de l'éducation, créé par la loi du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités 6 ( * ) .

Il s'agit là d'anticiper sur le régime qui sera applicable aux produits des cessions immobilières que réaliseraient ces établissements, une fois le transfert effectué. En effet, ces produits, recettes patrimoniales des établissements et non pas de l'Etat, ne seraient pas imputables en recettes du compte « Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat » ni, dès lors, soumis à l'obligation de contribuer au désendettement de ce dernier. Pendant la période « transitoire » qui s'étend de la demande de dévolution à sa réalisation juridique, l'Etat entend reverser l'intégralité aux établissements cédants .

L'annexe « Evaluations préalables » précitée indique que l'impact financier de cette dérogation en faveur des universités ayant opté pour la dévolution se révèle « difficile à évaluer », le potentiel de cessions afférent n'étant « pas connu avec précision à ce jour ». Votre rapporteure spéciale s'interroge sur cette gestion « à l'aveugle » 7 ( * ) .

Suivant les informations qu'elle a recueillies, aucune dévolution n'a encore été effectuée mais une dizaine d'universités se sont déclarées candidates au transfert . Le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche a proposé à neuf d'entre elles d'entamer une démarche de réflexion préalable à cette opération : les universités d'Avignon, Cergy-Pontoise, Clermont I, Marne-la-Vallée, Paris II, Poitiers, Toulouse I, Paris VI et, dans un cadre juridique différent, Corte. Les modalités de la dévolution doivent être précisées par une circulaire conjointe du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche et du ministère du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, en cours de finalisation, qui sera adressée aux recteurs et trésoriers-payeurs généraux.

(2) Les établissements publics exerçant des missions d'enseignement supérieur ou de recherche implantés dans le périmètre de l'OIN du plateau de Saclay

La même mesure d'exonération vise les établissements publics exerçant des missions d'enseignement supérieur ou de recherche implantés dans le périmètre de l'opération d'intérêt national (OIN) du plateau de Saclay , tel que défini par le décret n° 2009-248 du 3 mars 2009 (environ 7 000 hectares répartis sur 27 communes, entre le département de l'Essonne et celui des Yvelines), pour ce qui concerne la part de produits de cession d'immeubles de l'Etat destinée au financement de leurs projets immobiliers dans ce périmètre.

Ces ressources viendront compléter les produits de la dotation non consomptible de 850 millions d'euros qui a été attribuée à Saclay dans le cadre du plan « Campus », porté par le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche, destiné à moderniser le patrimoine immobilier des universités. Il s'agit de permettre à ces projets de bénéficier de la totalité des fonds mobilisables, alors que la loi du 3 juin 2010 relative au Grand Paris a organisé le développement du plateau de Saclay en « pôle scientifique et technologique » 8 ( * ) .

3. Vers une intensification de la contribution des produits de cession de l'Etat à son désendettement ?
a) Une annonce du ministre chargé du budget

Lors de la réunion tenue le 6 octobre dernier par le Conseil de l'immobilier de l'Etat (CIE), dont votre rapporteure spéciale est membre, François Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, a fait part de son souhait d'accroître la contribution au désendettement de l'Etat des produits de cessions immobilières de ce dernier. Il a annoncé que ses propositions en la matière se traduiraient par le dépôt d'un amendement gouvernemental au présent PLF . Dans cette perspective, il a chargé le président du CIE, notre collègue député Yves Deniaud, de mener une concertation avec les membres du Conseil et avec les ministères.

Votre rapporteure spéciale, dans ses précédents rapports, a régulièrement souligné la faiblesse de la contribution au désendettement de l'Etat des recettes de cessions immobilières de celui-ci (à hauteur de 14 % en moyenne entre 2005 et 2009, du fait de l'existence de régimes d'exemption 9 ( * ) ). Elle approuve donc, dans son principe, l'orientation prise sur ce plan par le Gouvernement, mais reste dans l'expectative de sa traduction concrète.

b) Les propositions de votre rapporteure spéciale

Pour sa part, votre rapporteure spéciale estime que le doublement du taux minimum actuel de cette contribution , qui serait ainsi porté de 15 % à 30 % des produits, dès 2011, serait significatif d'une volonté politique de mieux lier les ventes d'immeubles de l'Etat à la résorption de sa dette . Surtout, elle préconise de planifier la disparition des régimes d'exemption de contribution au désendettement de l'Etat existant, comme rappelé ci-dessus, pour certains produits de cessions immobilières.

La remise en cause dès 2011 de ces régimes pourrait s'avérer délicate, mais leur pérennité risquerait en effet d'entretenir les administrations dans un statut de « quasi-propriétaire » , situation qui n'est pas souhaitable et qui, du reste, irait à rebours de la volonté affichée par le Gouvernement d'affermir l'unité de « l'Etat propriétaire ». Votre rapporteure spéciale recommande donc :

- en ce qui concerne les cessions du ministère de la défense , de ne pas renouveler la dispense de contribuer au désendettement au-delà du 31 décembre 2014 , échéance actuellement inscrite dans la loi, ou, au plus tard, au-delà de la fin d'exécution de la loi de programmation militaire en vigueur, dans l'hypothèse où celle-ci devrait être prorogée ;

- en ce qui concerne les biens situés à l'étranger , de borner la dispense dans le temps, à la même date que pour les biens militaires dans un souci d'égalité entre ministères.

De la même manière, il conviendrait de limiter, à la date d'achèvement de l'OIN, le dispositif précité que propose l'article 30 du présent PLF pour exonérer de contribution au désendettement la part des produits de cessions d'immeubles de l'Etat, réalisées par des établissements d'enseignement supérieur ou de recherche, destinée au financement de projets immobiliers sur le plateau de Saclay.

En attendant de connaître la teneur de l'initiative gouvernementale annoncée par le ministre chargé du budget et celle des éventuelles modifications que nos collègues députés sont susceptibles d'introduire lors de leur examen de la première partie du présent PLF, votre rapporteure spéciale se réserve de prendre l'attache de notre collègue Philippe Marini, rapporteur général, pour traduire certaines de ces préconisations sous la forme d'amendements.

B. LE RETOUR À DEUX PROGRAMMES DE LA MISSION CORRESPONDANTE

1. Les trois programmes existants

La mission correspondant aux dépenses du compte « Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat » 10 ( * ) est composée, en 2010 , de trois programmes , placés sous la responsabilité du ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat en tant que ministre chargé du domaine et, au plan administratif, celle du chef du service France Domaine 11 ( * ) , rattaché à la direction générale des finances publiques (DGFiP). Chacun de ces programmes consiste en une action unique :

- le programme 721, « Contribution au désendettement de l'Etat », retrace les versements au budget général, en faveur du désendettement de l'Etat, réalisés à partir des produits de cessions immobilières de ce dernier ;

- le programme 722, « Contribution aux dépenses immobilières », regroupe les crédits issus des recettes de cessions immobilières de l'Etat qui sont affectés aux dépenses immobilières de celui-ci et, éventuellement, de ses établissements publics ou autres opérateurs sur les immeubles lui appartenant, conformément à la nomenclature citée plus haut (investissements immobiliers ou besoins de fonctionnement consécutifs à des opérations de cession, d'acquisition ou de construction d'immeubles) ;

- le programme 723, « Contribution aux dépenses immobilières : expérimentation CHORUS », créé par la LFI pour 2010 pour des raisons techniques, vise à retracer de façon distincte la contribution apportée par les produits de cessions immobilières de l'Etat aux dépenses immobilières des trois ministères gérés dans le système d'information « CHORUS » depuis le 1 er janvier 2010 (défense, éducation nationale, enseignement supérieur et recherche).

2. Le retour prévu à deux programmes

À compter de 2011 , comme le prévoit le présent PLF, un seul programme retracera à nouveau l'ensemble des dépenses immobilières financées à partir des produits des ventes d'immeubles de l'Etat , dans la mesure où elles seront désormais toutes suivies dans CHORUS. Ce programme, « Contribution aux dépenses immobilières », conservera le numéro 723 .

La mission « Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat » retrouvera donc l'architecture en deux programmes - l'un pour la contribution des produits de cessions immobilières de l'Etat au désendettement de celui-ci (programme 721), l'autre pour la part de ces produits affectée à des dépenses immobilières (programme 723 nouveau) - qui était la sienne avant 2010. Votre rapporteure spéciale observe que ces changements, motivés par des considérations d'ordre technique, ne contribuent pas à améliorer la lisibilité budgétaire .

C. UNE MESURE DE LA PERFORMANCE INSUFFISANTE

1. L'absence de mesure de la performance de la contribution au désendettement

Des trois programmes actuels de la mission « Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat », seuls les deux programmes dédiés aux dépenses immobilières (les programmes 722 et 723) font l'objet d'une mesure de la performance : depuis sa création, le programme 721, relatif à la contribution des recettes de cessions immobilières au désendettement de l'Etat, se trouve dépourvu d'objectif formel .

Certes, la performance, en termes de désendettement, se mesure au montant même des produits affectés. Néanmoins, l'absence de dispositif de mesure de cette performance est contraire à l'article 7 de la LOLF.

En vue de remédier à cette situation, votre rapporteure spéciale a proposé 12 ( * ) l'introduction d'un objectif « intensifier la contribution des recettes de cessions immobilières au désendettement de l'Etat », dont l'indicateur serait la part des produits de cession réalisés durant l'exercice affectée au désendettement, mesurée en pourcentage du total des produits. Constatant l' inertie de l'administration depuis lors, votre rapporteure spéciale ne peut que formuler à nouveau cette préconisation.

2. L'insuffisance de la mesure des performances de la contribution aux dépenses immobilières
a) Le dispositif du PAP de la mission

La performance des programmes relatifs aux dépenses immobilières - pour 2011, celle du programme 723 dans sa nouvelle configuration - se trouve quant à elle déclinée en deux objectifs dont l'atteinte est aujourd'hui mesurée, de manière formelle, par un indicateur seulement pour chacun :

- d'une part, à l'objectif n° 1, consistant à « optimiser le parc immobilier de l'Etat », est associé l'indicateur du « pourcentage du nombre d'immeubles vendus par rapport au nombre d'immeubles recensés sur le programme national des cessions de l'année » ;

- d'autre part, à l'objectif n° 2, visant à « améliorer la qualité des évaluations domaniales », est lié un indicateur relatif à l'« écart moyen entre valeur vénale et prix réalisé à la vente, au titre des ventes d'un montant supérieur à 2 millions d'euros ».

En effet, le PAP pour 2010 de la mission « Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat » a fait disparaître le second indicateur qui, auparavant, contribuait à mesurer l'atteinte de l'objectif (n° 1) d'« optimisation » du parc immobilier de l'Etat, en rendant compte du « rendement moyen d'occupation des locaux (sur les opérations ayant fait l'objet d'une demande de remploi) ». Le PAP pour 2011 n'a pas rétabli, ni remplacé, cet indicateur. Votre rapporteure spéciale regrette cet appauvrissement d'un dispositif de mesure des performances dont elle a déjà relevé, dans ses précédents rapports, les importantes limites.

Elle souligne à nouveau que les indicateurs mis en place, outre qu'ils ne mesurent pas tant l'efficacité de la gestion budgétaire, en matière de patrimoine immobilier de l'Etat, que celle de l'action du service France Domaine, s'avèrent très lacunaires par rapport aux enjeux de la rationalisation du parc immobilier en cause. En particulier, l'évolution des coûts n'est pas retracée, et celle des ratios d'occupation n'a été présentée dans les PAP, jusqu'en 2010, qu'en ce qui concernait les opérations ayant fait l'objet d'une demande de remploi. Votre rapporteure spéciale appelle donc, à nouveau, au renforcement de ce dispositif 13 ( * ) .

Performances du programme « Contribution aux dépenses immobilières »*

Indicateurs

2006 (réalisation)

2007 (réalisation)

2008 (réalisation)

2009 (réalisation)

2010 (prévision actualisée)

2011

(prévision)

1.1. Pourcentage du nombre d'immeubles vendus par rapport au nombre d'immeubles recensés sur le programme national des cessions de l'année

50 %

44 %

30 %

37 %

42 %

50 %

1.2. Rendement moyen d'occupation des locaux (sur les opérations ayant fait l'objet d'une demande de remploi) [par poste de travail]**

nd

nd

Nd

12,3 m 2

12 m 2

12 m 2

2.1. Ecart moyen entre valeur vénale et prix réalisé à la vente, au titre des ventes d'un montant supérieur à 2 millions d'euros

1,14 %

1,216 %

1,045 %

1,08 %

1,1 %

1,1 %

* Pour 2010, les performances du programme « Contribution aux dépenses immobilières : expérimentation CHORUS » sont intégrées aux résultats présentés.

** L'indicateur 1.2 a été supprimé des PAP de la mission « Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat » pour 2010 et 2011.

Sources : PAP de la mission « Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat » annexé au PLF pour 2011 et réponse au questionnaire adressé au Gouvernement par votre rapporteure spéciale en application de l'article 49 de la LOLF

b) Une information complémentaire limitée

Depuis 2007, France Domaine procède à une étude de l' évolution des surfaces de bureaux utilisés par les ministères et autorités administratives indépendantes sur le territoire métropolitain. Les résultats de cette étude, depuis 2009, sont publiés dans le PAP de la mission « Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat » : entre 2007 et 2009, la surface de bureaux totale occupée par l'Etat a diminué de 183 800 m² en valeur nette, soit 1,4 % du parc 14 ( * ) . Mais cette information n'est pas assortie de la mention des ratios d'occupation moyens, par poste de travail, pour chaque administration - élément que met en avant, pourtant, la communication du Gouvernement.

D'après les indications fournies à votre rapporteure spéciale, les ministères ont été invités par la direction du budget à présenter des indicateurs d'efficience de leur gestion immobilière , au sein du volet « performance » des PAP pour 2011 de leurs programmes « support », en distinguant administration centrale et services déconcentrés. L'exercice a été limité, à ce stade, aux immeubles de bureaux ou majoritairement affectés à l'usage de bureaux. Cette mesure, de nature à participer à la constitution d'un « tableau de bord » effectif de « l'Etat propriétaire » , va évidemment dans le bon sens.

Toutefois, le service France Domaine estime que la synthèse de ces données ne serait pas pertinente, pour le moment , en considération des trois raisons suivantes :

- 1° la mise en place d'un outil informatique commun de gestion immobilière est considérée par certains ministères comme une condition préalable à l'exploitation pertinente d'indicateurs transversaux ;

- 2° certaines administrations (le ministère de la défense, celui de la justice, et la DGFiP du ministère du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat) se trouvent actuellement en train de redéfinir leurs réseaux territoriaux ;

- 3° les modalités de programmation et de pilotage des crédits afférents aux dépenses immobilières de l'Etat connaissent des modifications importantes du fait, notamment, de la mise en oeuvre, depuis 2009, du programme 309 « Entretien des bâtiments de l'Etat », créé au sein de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » 15 ( * ) , et l'introduction à compter de 2011, comme le prévoit le présent PLF, d'un programme 333 « Moyens mutualisés des administrations déconcentrées », rattaché à la mission « Direction de l'action du Gouvernement » 16 ( * ) .

Evolution des surfaces de bureaux occupées par l'Etat sur le territoire métropolitain

(en m 2 )

Administrations

Années

Augmentation de surface occupée par rapport à l'année antérieure

Diminution de la surface occupée par rapport à l'année antérieure

Différence de surface occupée par rapport à l'année antérieure

Evolution entre 2007 et 2009

Affaires étrangères et européennes

2007

29 409

15 653

+ 13 756

2008

0

0

0

- 19 976

2009

368

34 100

- 33 732

2007

5 446

14 559

- 9 113

Agriculture et pêche

2008

1 156

2 721

- 1 565

- 13 011

2009

2 228

4 561

- 2 333

2007

73 108

95 014

- 21 906

Budget, économie

2008

40 785

99 434

- 58 649

- 110 388

2009

21 571

51 404

- 29 833

2007

1 280

2 338

- 1 058

Culture et communication

2008

3 412

9 909

- 6 497

- 8 631

2009

4 627

5 703

- 1 076

2007

16 001

12 651

+ 3 350

Défense

2008

19 251

17 704

+ 1 547

+ 749

2009

1 428

5 576

- 4 148

2007

22 124

72 180

- 50 056

Ecologie, équipement

2008

34 904

34 283

+ 621

- 38 663

2009

31 141

20 369

+ 10 772

Education nationale, enseignement supérieur et recherche

2007

15 057

17 476

- 2 419

2008

12 927

28 754

- 15 827

- 19 419

2009

6 626

7 799

- 1 173

Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales

2007

20 484

24 776

- 4 292

2008

17 138

17 415

- 277

+ 3 979

2009

27 398

18 850

+ 8 548

2007

15 470

6 577

+ 8 893

Justice

2008

14 848

10 338

+ 4 510

+ 14 467

2009

33 817

32 753

+ 1 064

2007

13 031

5 990

+ 7 041

Santé, jeunesse et sport

2008

8 924

11 346

- 2 422

+ 4 263

2009

3 509

3 865

- 356

2007

0

852

- 852

Services du Premier Ministre

2008

169

731

- 562

- 943

2009

5 198

4 727

+ 471

Travail, relations sociales et solidarité

2007

1 668

6 939

- 5 271

2008

2 292

2 390

- 98

- 6 944

2009

1 988

3 563

- 1 575

Organismes administratifs indépendants

2007

2 047

0

+ 2 047

2008

1 799

110

+ 1 689

+ 10 714

2009

6 978

0

+ 6 978

2007

215 125

275 005

- 59 880

Totaux

2008

157 605

235 135

- 77 530

- 183 803

2009

146 877

193 270

- 46 393

Source : PAP de la mission « Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat » annexé au PLF pour 2011.

Votre rapporteure spéciale comprend en partie ces réserves, mais y voit avant tout la justification d'une rétention d'informations.... Elle estime que l'établissement d'une synthèse des indicateurs de la performance immobilière des différents ministères représente, désormais, une urgence : il en va de la crédibilité de « l'Etat propriétaire » que le Gouvernement entend constituer. Elle souhaite donc que ce bilan puisse être présenté au Parlement, pour l'exercice 2010, au plus tard lors du dépôt du prochain projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion, et propose un amendement à cet effet 17 ( * ) .

II. UN OBJECTIF DE CESSIONS RAISONNABLE POUR UN EMPLOI DES PRODUITS QUI RESTE À PRÉCISER

A. 400 MILLIONS D'EUROS ESCOMPTÉS DES CESSIONS IMMOBILIÈRES DE L'ETAT EN 2011

1. Une prévision plus modeste que celle des précédents exercices, adaptée au nouveau plan de cessions du ministère de la défense

Les crédits de la mission « Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat » sont prévus par le présent PLF à hauteur de 400 millions d'euros au total, en AE comme en CP. Ils correspondent au niveau du produit global attendu, en 2011, des cessions immobilières de l'Etat . Ce montant représente environ 0 ,7 % de la valeur du parc immobilier inscrite au bilan de l'Etat au 31 décembre 2009 (60,4 milliards d'euros) 18 ( * ) .

La prévision contraste avec celles des deux dernières LFI, qui ont respectivement fixé un niveau de cessions de 1,4 milliard d'euros pour 2009 et de 900 millions d'euros pour 2010. Plus largement, elle s'avère comme l'objectif de produits de cessions le moins élevé depuis qu'un tel objectif est inscrit dans la loi de finances , soit la LFR pour 2005.

Prévision des cessions immobilières de l'Etat

(en millions d'euros)

LFR 2005

LFI 2006

LFI 2007

LFI 2008

LFI 2009

LFI 2010

PLF 2011

600

439

500

600

1 400

900

400

Source : documentation budgétaire

L'écart avec les prévisions arrêtées pour les années immédiatement précédentes résulte de l' adaptation de cette prévision pour 2011 au nouveau plan de cession retenu pour les immeubles du ministère de la défense situés dans Paris .

En effet, l'importance de l'objectif de cessions fixé en LFI pour 2009 puis pour 2010 tenait essentiellement à l'ampleur des produits escomptés, pour ces deux exercices, de la vente de biens militaires - à hauteur d'un milliard d'euros pour 2009 et encore de 700 millions d'euros pour 2010. En particulier, ces prévisions intégraient la cession des emprises parisiennes hébergeant les états-majors des armées et les services centraux du ministère de la défense destinés à se trouver regroupés, à la fin de l'année 2014, sur le site dit « Balard », dans le XV e arrondissement de la capitale 19 ( * ) .

Le projet « Balard » du ministère de la défense

Le ministère de la défense prépare le regroupement, pour la fin de l'année 2014, de l'ensemble de ses états-majors et services centraux sur le site « Balard », dans le XV e arrondissement de Paris. Il s'agit d'une emprise de l'Etat déjà utilisée par le ministère, qui abritait jusqu'à présent, pour l'essentiel, des installations techniques de la direction générale de l'armement et des bureaux de l'armée de l'air. Le site est composé de deux parcelles, de 16,5 hectares au total : la parcelle « Est » (8,5 ha), sur laquelle se trouve l'actuelle « Cité de l'Air », et la parcelle « Ouest » (8 ha), séparées par l'avenue de la Porte de Sèvres. Il devrait à terme accueillir environ 10 000 agents, répartis sur 320 000 m² de bureaux. On a évoqué un « Pentagone à la française ».

La rénovation des deux tours de la Cité de l'Air est d'ores et déjà engagée, sous maîtrise d'ouvrage publique ; la livraison des travaux est prévue en mars 2012 pour le premier bâtiment et en juin 2012 pour le second. Le reste du projet doit être réalisé sur la base d'un contrat de partenariat public-privé (PPP), dont l'investissement de la tranche ferme est évalué à 600 millions d'euros et la charge globale annuelle à une centaine de millions d'euros. La maintenance immobilière et certains services aux bâtiments et à l'occupant seront couverts par ce contrat, d'une durée fixée a priori à 30 ans. Le loyer annuel devrait être supérieur à 100 millions d'euros, sur une période 27 années et six mois (30 ans moins la durée de la construction).

L'opération est pilotée par le ministère de la défense, qui associe à ses travaux le ministère du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat (la direction du budget et le service France domaine) et le ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi (la mission d'appui aux PPP). Elle a également fait l'objet de plusieurs réunions avec la Ville de Paris et les premiers éléments en ont été présentés au CIE. Sur le plan financier, afin d'assurer un contrôle sur l'opérateur, un protocole a été passé avec la Caisse des dépôts et consignations pour que celle-ci dispose d'une minorité de blocage (à hauteur de 34 %) dans le capital de la société de projet, qui sera l'interlocuteur du ministère de la défense pendant la durée d'exécution du contrat.

L'appel à candidatures a été lancé en juin 2009, le dossier de consultation remis aux candidats au mois de septembre suivant. Les propositions initiales ont été reçues le 1 er février 2010 et les propositions intermédiaires le 1 er juillet. Le dossier de consultation final sera remis le 12 novembre 2010 ; les offres finales sont attendues pour janvier 2011. La signature du contrat est prévue au mois d'avril 2011, pour un début de chantier en janvier 2012. La fin du chantier principal est fixée à juillet 2014 et le transfert des agents doit être achevé au 31 décembre 2014. Cependant, la rénovation des bâtiments de la parcelle « Est » devrait se poursuivre jusqu'en avril 2016.

Source : ministère du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat

Dans cette perspective, et afin de pouvoir bénéficier le plus tôt possible des produits malgré la situation alors défavorable du marché immobilier, une cession exceptionnelle de gré à gré, « en bloc », à un consortium unissant la Caisse des dépôts et consignations et la Société de valorisation foncière et immobilière (SOVAFIM) , avait été envisagée ; la LFI pour 2009 tenait compte de ce scénario, comme la LFI pour 2010, l'opération n'ayant finalement pas été réalisée en 2009. Or, faute d'un accord sur le prix entre l'Etat d'une part et la Caisse des dépôts et la SOVAFIM d'autre part, cette opération a été abandonnée au début de l'année 2010 .

En conséquence, les immeubles en cause ont désormais vocation à être vendus selon une procédure d'appel d'offres . Toutefois, dans les réponses transmises à votre rapporteure spéciale sur le fondement de l'article 49 de la LOLF, le Gouvernement précise que certains de ces biens pourraient être cédés à une société de valorisation foncière 20 ( * ) . Votre rapporteure spéciale entend suivre de très près l'évolution de ce dossier .

2. Une prévision plus sincère que celle des deux dernières LFI
a) Un objectif de cessions cohérent avec les réalisations récentes

L'objectif d'encaisser sur le compte « Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat », en 2011, des recettes de cessions à hauteur de 400 millions d'euros paraît relativement raisonnable si l'on considère les résultats enregistrés, en la matière, ces dernières années .

En effet, après les niveaux de cessions « records » atteints en 2006 et en 2007 - respectivement 798 millions d'euros et 820 millions, montants qui excédaient de beaucoup, dans chaque cas, les prévisions de la LFI -, les produits réalisés en 2008 ont été de 375 millions d'euros seulement et ceux réalisés en 2009 de 475 millions d'euros , dont 221 millions, soit 45 %, résultant d'un versement exceptionnel de la Société nationale immobilière (SNI) 21 ( * ) . Ces montants apparaissent très inférieurs, cette fois, aux prévisions de la LFI mais, pour 2009, la « contre-performance » s'explique principalement par la non réalisation du montage alors envisagé pour les opérations du ministère de la défense.

La même cause empêchera que l'objectif de cessions fixé en LFI pour 2010 soit atteint à l'issue de cette année. En revanche, la prévision de recettes afférente, pour l'exercice, aux cessions des ministères autres que celui de la défense (soit 200 millions d'euros) devrait être dépassée d'après les informations données à votre rapporteure spéciale : au 31 août dernier , déjà 288 millions d'euros avaient été encaissés sur le compte « Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat », et le service France Domaine anticipe, pour la fin de l'année, un niveau de produits sensiblement supérieur à 400 millions d'euros .

Produits des cessions immobilières de l'Etat

(en millions d'euros)

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

Prévisions

600

439

500

600

1 400

900

400

Réalisations

90

110

90

107

173

634

798

820

395

475

288

(au 31 août)

-

Rapport réalisations/

prévisions

+ 6 %

+ 82 %

+ 64 %

34 %

66 %

-

Source : documentation budgétaire

L'exercice en cours aura notamment enregistré, au mois de mars, la vente du bâtiment qui abritait les services de Météo-France , situé à l'angle de l'avenue Rapp et du quai Branly à Paris, pour un prix de 73 millions d'euros (montant enfin officiel : il n'a été porté à la connaissance de votre rapporteure spéciale que très tardivement). À l'aune de cette réalisation, et compte tenu du rétablissement du marché immobilier, on peut estimer l'objectif de cessions inscrit dans le présent PLF comme empreint d'une certaine prudence. Les ventes seront d'ailleurs fondées sur le plan pluriannuel de cessions, visant quelque 17 000 biens immobiliers, rendu public en juin dernier par le ministère du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat 22 ( * ) .

À cet égard, on doit souligner que la prévision en ce domaine tend à s'éloigner du simple « affichage » politique , souvent observé jusqu'à présent, pour se rapprocher d'une planification gestionnaire plus rigoureuse. Certes, la réalisation des objectifs de cessions immobilières de l'Etat, chaque année, et tout particulièrement dans un contexte de crise économique, reste aléatoire, étant fonction du dynamisme du marché notamment. Toutefois, votre rapporteure spéciale, comme elle a déjà eu l'occasion de l'exprimer à l'occasion de l'examen du projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion pour 2009 23 ( * ) , estime que les récentes surestimations de ces recettes en LFI auraient pu être évitées : par leur ampleur, elles ont mis en cause la sincérité de la prévision budgétaire .

Ainsi, en ce qui concerne l'exercice 2008, il convient de remarquer que le marché immobilier ne s'est significativement dégradé que dans la dernière partie de l'année ; cet élément ne suffit donc pas à justifier que l'objectif de cessions fixé en LFI n'ait pas été atteint. Pour 2009, les prévisions ont été arrêtées par le Gouvernement alors que la crise était identifiée, rendant incertaines les perspectives de marché, mais les objectifs de cessions relatifs au ministère de la défense ont été définis à partir des arbitrages associés à la loi de programmation militaire, sans prendre en considération ce nouveau contexte économique 24 ( * ) .

b) Un objectif qui reste ambitieux eu égard à la raréfaction des biens de prestige disponibles à la vente

Malgré le caractère raisonnable qui peut lui être reconnu, la prévision de cessions immobilières de l'Etat associée au présent PLF reste ambitieuse si l'on considère, au-delà des aléas inhérents à l'évolution du marché, les biens même qui seront mis en vente : les immeubles de prestige susceptibles d'être cédés par l'Etat, désormais, sont rares .

En 2006 et 2007, le haut niveau précité des produits de cessions immobilières de l'Etat a résulté, pour une large part, de ventes d'ordre exceptionnel. En 2007, la cession du centre de conférences internationales situé avenue Kléber à Paris, conclue pour 404 millions d'euros, a contribué à elle seule pour près de la moitié aux produits enregistrés sur l'exercice. Mais de semblables opérations n'ont pu être réalisées en 2008 et en 2009. Lors de ce dernier exercice, d'après les indications fournies à votre rapporteure spéciale, sur les 1 223 ventes conclues, le montant unitaire n'a excédé 5 millions d'euros que pour sept d'entre elles, ces sept ventes totalisant 44 % des produits ; la très grande majorité (92 % du nombre, représentant moins de 17 % des produits) a été conclue pour un prix inférieur à 0,5 million. De même, au 31 août 2010, dans des conditions de marché plus favorables, seules neuf cessions avaient engendré un produit supérieur à 5 millions d'euros.

Dans ce contexte, la conclusion de prix de vente comme celle à laquelle a encore pu donner lieu la cession de l'ancien immeuble de Météo-France se trouve appelée à devenir de plus en plus exceptionnelle. L'atteinte de l'objectif de cessions pour 2011 est donc conditionnée à des réalisations nombreuses , qui supposent la pleine mobilisation du service France Domaine.

B. UNE AFFECTATION DES RECETTES À PRÉCISER

1. Une contribution au désendettement de l'Etat a priori intensifiée mais dont le niveau demeure incertain à ce stade

Sur les 400 millions d'euros de produits qu'il fixe pour objectif de cessions immobilières de l'Etat l'année prochaine, le présent PLF affecte 60 millions, soit 15 % du total des recettes escomptées, au désendettement de l'Etat . Ce montant se trouve inscrit, en effet, en dotation du programme 721 de la mission « Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat ».

À la date de rédaction du présent rapport, cependant, une incertitude pèse sur la fiabilité de cette prévision de crédits, dès lors que le Gouvernement a manifesté l'intention de réviser le taux de contribution au désendettement des recettes de cessions immobilières , pour le hausser à un niveau qui reste à déterminer 25 ( * ) . La « visibilité », en la matière, devrait être meilleure à l'issue de l'examen de la première partie du présent PLF par l'Assemblée nationale.

Du moins, l'orientation est bien à l'intensification de cette contribution, puisque c'est 15 % de l'ensemble des recettes des cessions immobilières de l'année qu'il est ainsi prévu d'affecter à la réduction de la dette de l'Etat, nonobstant les régimes d'exemption qui, en l'état du droit tel que rappelé ci-dessus, bénéficient aux cessions du ministère de la défense et à celles d'immeubles situés à l'étranger. Du reste, l'ampleur des cessions militaires et de biens à l'étranger attendues pour 2011 n'est pas précisée par la documentation budgétaire , et votre rapporteure spéciale entend interroger le Gouvernement, sur ce point, en séance.

Quoiqu'il en soit, la perspective, si elle doit bien se traduire en acte, marque une rupture avec les résultats, sur ce plan, de l'exécution en 2009 : l'année dernière, sur le produit global de 475 millions d'euros de cessions immobilières, seuls 22,8 millions, soit 4,8 %, ont été affectés au désendettement de l'Etat . Cette faible contribution s'explique par l'importance relative des cessions réalisées par le ministère des affaires étrangères et européennes, le ministère de la défense et le ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer : ces ventes ont représentés 79 % des encaissements de l'exercice sur le compte « Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat », alors que les trois ministères précités étaient exonérés de contribuer au désendettement à partir du produit de leurs cessions (pour les seuls biens situés à l'étranger en ce qui concerne le ministère chargé des affaires étrangères, et pour la dernière année en ce qui concerne le ministère chargé de l'écologie).

Néanmoins, sur la période 2005-2008, le taux global de contribution au désendettement de l'Etat des recettes de cessions de celui-ci s'est établi, chaque année, à plus de 15 % et, de 2005 à 2009 , ce sont 437,1 millions d'euros de recettes de cessions qui ont été consacrés à ce désendettement, soit un taux moyen de 14 % sur cinq ans.

Contribution au désendettement de l'Etat des produits de cessions immobilières

(en millions d'euros)

2005

2006

2007

2008

2009

2005-2009

Produits de cessions

634,6

798,9

820,8

395,2

475,0

3.124,5

Part de ces produits affectée au désendettement

100,0

soit 15,7 %

120,8

soit 15,1 %

131,7

soit 16,0 %

61,8

soit 15,6 %

22,8

soit 4,8 %

437,1

soit 14 %

Source : RAP de la mission « Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat » annexé au projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion pour 2009

2. Une contribution à des dépenses immobilières qui reste à justifier concrètement

La dotation du programme 723 de la mission « Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat », qui retrace la part des produits de cessions immobilières de l'Etat affectée à des dépenses immobilières (pour des opérations réalisées soit directement par l'Etat soit par ses opérateurs sur ses immeubles 26 ( * ) ), est prévue par le présent PLF à hauteur de 340 millions d'euros . Ce montant correspond aux recettes de cessions fixées pour objectif de l'année, diminuées de la part prévue en faveur du désendettement de l'Etat. La répartition devrait être effectuée, notamment, selon les règles d'intéressement qui bénéficient aux ministères cédants, du moins sous la forme révisée qu'imposera nécessairement la hausse annoncée, ainsi qu'il a été indiqué ci-dessus, du taux de contribution au désendettement 27 ( * ) .

Cependant, comme les années précédentes, votre rapporteure spéciale est conduite à relever le caractère sommaire de la « justification au premier euro » présentée, pour ces crédits, dans le PAP de la mission « Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat ».

Certes, en comparaison du PAP pour 2010, le document annexé au présent PLF marque un progrès : l'année dernière, en fait de « justification », on ne disposait que d'une brève description technique du calcul des plafonds de crédits, laquelle n'apportait aucune information concrète quant aux projets immobiliers que devaient contribuer à financer les produits enregistrés sur l'exercice ; votre rapporteure spéciale avait critiqué cette situation, anormale au regard des exigences posées par la LOLF en faveur d'une information claire et précise en direction du Parlement 28 ( * ) . L'observation semble avoir été prise en considération : cette année, le PAP fait état de certaines des opérations immobilières que les ministères auront à financer en 2011 . Sont cités, ainsi :

- le regroupement des services centraux du ministère de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche , au sein d'un bâtiment domanial à construire à Paris, rue de Picpus, qui se traduit par un besoin de crédits, pour 2011, à hauteur de 26 millions d'euros ;

- le relogement à Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne) de services centraux du ministère du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat et de celui de l'économie, de l'industrie et de l'emploi , dans un immeuble en construction 29 ( * ) , qui nécessitera en 2011 56 millions d'euros en AE. Par ailleurs, pour la « relocalisation » de l' Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), il est prévu que le ministère chargé de l'économie finance à partir du compte « Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat » l'acquisition d'un bâtiment situé à Metz, pour un montant non précisé dans le PAP 30 ( * ) ;

- le relogement à Saint-Mandé des services de l' Institut géographique national (IGN) et de Météo-France , opération portée par le ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer pour un montant de 36 millions d'euros en 2011 ;

- enfin, le relogement à Lille du rectorat et de l'inspection académique du Nord, programmé par le ministère de l'éducation nationale à hauteur de 49,5 millions d'euros en AE.

Toutefois, ces indications sont expressément données « à titre d'illustration », et il est précisé que les projets susmentionnés ne constituent que « quelques opérations [...] parmi les plus importantes et les plus significatives que les ministères auront à financer en 2011 sur le CAS ». En outre, la part de financement de ces opérations transitant par le compte, c'est-à-dire couverte par des produits de cession, n'est pas indiquée.

Ce caractère approximatif de l'information au stade du PLF, regrettable, renforce l'exigence d'un compte rendu exhaustif et précis de l'emploi des crédits du programme « Contribution aux dépenses immobilières », dans le RAP de la mission « Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat » qui sera annexé au projet de la loi de règlement des comptes et rapport de gestion pour l'année 2011.

III. UNE POLITIQUE ENCORE EN CHANTIER

Comme l'a souligné avec constance votre rapporteure spéciale au gré de ses précédents rapports, une politique immobilière digne de ce nom ne peut se borner à la réalisation de ventes patrimoniales , serait-ce dans les meilleures conditions possibles pour les intérêts financiers de l'Etat. Les cessions ne doivent pas constituer un objectif « final », mais seulement l'un des vecteurs d'une gestion cohérente ; le but véritable est la rationalisation des coûts et des implantations . L'état récent du marché immobilier, qui a empêché la réalisation de certaines ventes en 2008 et en 2009, a opportunément mis en relief cette exigence.

Par rapport aux observations portées à l'occasion de l'examen du PLF pour 2010 31 ( * ) , la situation globale n'a que peu changé. Des progrès ont été réalisés, depuis la rénovation de la politique immobilière de l'Etat lancée en 2004-2005, mais les chantiers qui demeurent sont encore majeurs . La doctrine de la gestion immobilière de l'Etat reste en cours de constitution, ses instruments sont élaborés au « fil de l'eau ». Il faut souligner le caractère essentiel que revêt ici la volonté politique , réitérée sur le moyen voire le long terme, tant peuvent se révéler prégnantes les réticences au changement.

Votre rapporteure spéciale, ci-après, dresse en synthèse un état des lieux actualisé des avancées récentes et des perspectives à court terme, en ce qui concerne d'abord les mesures qui participent de la « refondation » de cette gestion, celles qui tendent à élargir son périmètre d'application ensuite.

A. UNE « REFONDATION » DE LA GESTION IMMOBILIÈRE DE L'ETAT À MENER À BIEN

Trois mesures sont constitutives d'une véritable « refondation » - une consolidation à partir de bases plus solides - de la gestion, par l'Etat, de son patrimoine immobilier. Chacune, actuellement, attend encore de produire son plein effet.

1. L'amélioration de l'inventaire et de la valorisation du patrimoine immobilier de l'Etat : un travail toujours actif

Pour assurer une gestion efficace, la connaissance exhaustive du patrimoine en cause est primordiale. Or, dans son rapport de certification des comptes de l'Etat pour 2009, la Cour des comptes a maintenu la réserve substantielle qu'elle avait déjà formulée pour les exercices précédents - 2006, 2007 et 2008 - quant à la qualité de l'inventaire et de la valorisation du parc immobilier .

Comme indiqué plus haut, le patrimoine immobilier a été inscrit dans le bilan de l'Etat, au 31 décembre 2009, pour une valeur de 60,4 milliards d'euros, contre 62,4 milliards d'euro fin 2008 . Sur ce montant, le parc valorisé par France Domaine - qui exclut certains biens spécifiques, les routes et les bâtiments pénitentiaires notamment - représente 48,76 milliards d'euros, contre 53,92 milliards fin 2008. Cette révision à la baisse répercute celle des prix du marché immobilier constatée en 2009, prise en compte lors des évaluations réalisées par les services locaux du Domaine ou, à défaut, lors de l'actualisation. Il convient de noter que cette dernière procédure est actuellement appliquée à 60 % environ du parc immobilier contrôlé par l'Etat et réalisée par l'application de coefficients d'évolution des prix pour chaque département (un pour le bâti et un autre pour le non bâti).

Patrimoine immobilier de l'Etat au 31 décembre 2009

(en millions d'euros)

Administrations

Valeur du parc immobilier

Part du total

Affaires étrangères

5 262,18

8,71 %

Agriculture

529,04

0,88 %

Budget - Economie

5 501,28

9,11 %

Culture

1 741,72

2,88 %

Défense

16 580,24

27,45 %

Ecologie - Equipement (dont BACEA)

3 516,88

5,82 %

Education nationale - Enseignement supérieur

1 579,36

2,61 %

Intérieur - Immigration (dont Gendarmerie)

10 384,66

17,19 %

Justice

11 956,96

19,7 %

Logement

2,50

0,01 %

Premier ministre

927,54

1,54 %

Santé - Sport

62,15

0,10 %

Travail

873,95

1,45 %

Assemblée nationale

560,84

0,93 %

Sénat

207,58

0,34 %

Autres

723,81

1,20 %

Total

60 410,76

100,00 %

Source : ministère du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat

En la matière, le service France Domaine a travaillé en 2010 dans deux directions : d'une part, l'amélioration et la sécurisation des modalités de valorisation du parc immobilier de l'Etat ; d'autre part, la stabilisation du module immobilier du système d'information « CHORUS » , déployé depuis avril 2009 sur l'ensemble du territoire national, pour l'ensemble des ministères, et reprenant les anciennes applications du Tableau général des propriétés de l'Etat (TGPE). Plusieurs actions ont été entreprises à ce titre :

- la refonte de la liste des pièces justificatives devant être produites dans les différents cas de mise à jour de l'inventaire ;

- la création d'un groupe de travail sur les modalités de détermination des coefficients départementaux d'évolution des prix de l'immobilier ;

- la modélisation dans l'application immobilière de CHORUS des routes et établissements pénitentiaires.

Il a également été tenu compte des difficultés d'appropriation de cette application par les agents. En vue de prévenir le risque d'une mise en oeuvre hétérogène des procédures, la note de campagne d'évaluation pour l'année 2010, diffusée en juillet dernier, revient largement sur la nouvelle organisation, et les dispositifs d'accompagnement (dont la formation du personnel encadrant) et de contrôle (avec la mise en place d'une cellule ad hoc par France Domaine) ont été renforcés.

Enfin, dans le but de fiabiliser les données, France Domaine entend lancer un marché d'assistance pour analyser la situation, identifier les anomalies et les actions à mener par chaque acteur, déterminer une stratégie en fonction des priorités qui seront définies, et suivre les corrections dont la mise en oeuvre est prévue pour s'étaler sur plusieurs années.

L'efficacité de l'ensemble de ces efforts devra être appréciée à l'aune des observations de la Cour de comptes dans son rapport de certification des comptes de l'Etat pour 2010.

2. La substitution de « conventions d'utilisation » au régime de l'affectation : une mise en place difficile

Un des principaux obstacles à la mise en oeuvre d'une gestion efficace du patrimoine immobilier de l'Etat semble résider dans la persistance de l' habitude des administrations à se comporter en « quasi-propriétaires » , bien qu'elles ne soient qu'affectataires des immeubles qu'elles occupent. Pour porter remède à cette situation, conformément aux orientations du conseil de modernisation des politiques publiques (CMPP) du 12 décembre 2007, le décret n° 2008-1248 du 1 er décembre 2008 relatif à l'utilisation des immeubles domaniaux par l'Etat et ses établissements publics, précisé par deux circulaires du Premier ministre en date du 16 janvier 2009 (l'une adressée aux ministre, l'autre aux préfets), a procédé à l' abrogation des régimes de l'affectation aux services de l'Etat et de l'attribution à titre de dotation au profit des établissements publics, pour leur substituer un régime, nouveau, de « conventions d'utilisation » .

Par ces conventions, l'Etat, en tant que propriétaire, peut mettre à la disposition des administrations des immeubles domaniaux. Conclue pour une durée déterminée, conçue sur le modèle des baux privés mais prenant en compte les contraintes inhérentes aux missions de service public, chaque convention doit formaliser les engagements pris de part et d'autre . Elle fixe des objectifs de performance immobilière, sert de support aux loyers budgétaires et à la mise en oeuvre de la politique d'entretien des bâtiments de l'Etat, et doit permettre de s'assurer, à échéances régulières, de l'utilisation rationnelle des surfaces de bureaux.

Juridiquement, le service France Domaine est tenu d'avoir conclu l'ensemble des conventions d'ici la fin 2013 , la priorité étant donnée aux immeubles de bureaux ; les arrêtés d'affectation et de remise en dotation continuent de produire leurs effets dans l'intervalle. Le nombre de biens soumis à convention est estimé à 60 000 . Pour atteindre l'objectif fixé pour 2013, des sous-objectifs ont été arrêtés, comme suit :

- fin 2010 : 3 000 conventions signées ;

- fin 2011 : 15 000 (soit 25 % de la cible) ;

- fin 2012 : 40 000 (soit 67 % de la cible) ;

- fin 2013 : 60 000 (100 %).

D'après les informations transmises à votre rapporteure spéciale, au 30 juin 2010 seules 225 conventions d'occupation avaient été signées, sur 1 201 projets envoyés aux administrations occupantes , dont, en ce qui concerne les services centraux, deux conventions avec le ministère de la culture et deux avec celui de la justice. En effet, après que le déploiement du dispositif eut été retardé, en 2009, du fait du délai de publication du modèle de convention et de l'engagement d'autres chantiers en parallèle, la mise en place rencontre à présent des difficultés liées à la collecte auprès des occupants des renseignements nécessaires à l'établissement des conventions (quelque 2 652 demandes ont été formulées par les services locaux du Domaine), et se heurte à la réticence des services ministériels, qui souhaiteraient bénéficier d'adaptations.

De toute évidence, face à certaines situations d'inertie, le ministère du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat devra rappeler les administrations à leur devoir d'appliquer le décret du 1 er décembre 2008.

3. La mutualisation de l'emploi des produits de cessions immobilières : une règle à généraliser

Un facteur important du maintien de réflexes de « quasi-propriétaire » dont peuvent témoigner les ministères réside dans le régime d'intéressement aux cessions immobilières qui a été aménagé, par le Gouvernement, afin de les inciter à la réalisation de ces ventes. Les ministères, en effet, bénéficient d'un droit de « retour » , sur le produit des cessions dont ils ont l'initiative, en vue de financer les opérations de relogement de leurs services ou des dépenses immobilières d'investissement.

Fixé en 2004, en principe, à hauteur de 85 % des recettes constatées, le taux de ce « retour » a été abaissé, par les circulaires précitées du Premier ministre du 16 janvier 2009, à 65 % afin de dégager, à compter de 2009, une réserve interministérielle de crédits à hauteur de 20 % . Cette mutualisation est destinée à fournir la capacité de financer des projets, cohérents avec la stratégie de gestion performante du patrimoine immobilier de l'Etat, que les ministères, individuellement, ne trouveraient pas les moyens de soutenir - notamment les ministères qui, ne disposant pas d'un vaste parc immobilier, ne peuvent procéder à un niveau de cessions suffisant pour dégager les crédits nécessaires à ces opérations. Cependant, en ce qui concerne les services déconcentrés compris dans le champ d'application de la réforme de l'administration territoriale de l'Etat (RéATE , qui a donné lieu à la mise en place de directions régionales et départementales interministérielles 32 ( * ) ), 85 % des produits sont mutualisés 33 ( * ) .

Il convient de rappeler ici que les 15 % de produits restant sont affectés au désendettement de l'Etat , conformément aux dispositions législatives en vigueur 34 ( * ) . Par dérogation, les produits de cession du ministère de la défense et des biens situés à l'étranger, exonérés de contribution au désendettement, ne sont pas non plus assujettis à la règle de mutualisation : ces produits sont intégralement reversés aux ministères cédants.

La mutualisation partielle des ressources issues des cessions immobilières de l'Etat a constitué un « premier pas » dans la bonne direction, qui est celle de la reconnaissance d'un « Etat propriétaire » unique. La mesure reste encore très limitée, puisqu'elle ne concerne ni les cessions du ministère de la défense ni celles d'immeubles situés à l'étranger et que, lorsqu'elle s'exerce, ce n'est, sauf le cas de la RéATE, qu'à hauteur de 20 % des produits. Cependant, l'intensification de la contribution au désendettement de l'Etat des recettes de cessions immobilières, annoncée par le Gouvernement ainsi qu'il a été indiqué ci-dessus, imposera nécessairement, du moins en ce qui concerne le régime de droit commun, la révision du dispositif.

Pour votre rapporteure spéciale, c'est l'occasion de mettre fin à des mécanismes d'intéressement aux cessions qui ne se justifiaient, à titre d'incitation des ministères à vendre, que dans les premiers temps de la rationalisation du patrimoine immobilier de l'Etat. En effet, la consécration de « l'Etat propriétaire » passe par la mutualisation interministérielle complète des recettes patrimoniales de celui-ci . Cette mesure permettra seule au service France Domaine de piloter les opérations immobilières de ministères qui, aujourd'hui, au-delà des contrôles de conformité aux critères de performance auxquels ils sont assujettis, se révèlent pratiquement souverains sur des budgets d'investissement établis à partir des produits de « leurs » cessions. Votre rapporteure spéciale souligne que la mutualisation intégrale qu'elle préconise ainsi ne doit pas être exploitée aux fins d'économies qui mettraient en cause le bon fonctionnement des services, mais bien dans le but de mener convenablement les opérations immobilières qui s'imposent.

Le cas échéant, l'intéressement des ministères à la rationalisation des moyens immobiliers mis à leur disposition doit désormais changer de niveau, et ne plus s'opérer sur le plan des cessions mais sur celui des conditions de leur occupation , par des mesures incitatives à une gestion optimale 35 ( * ) .

B. L'ÉLARGISSEMENT À POURSUIVRE DU CHAMP D'APPLICATION DE CETTE GESTION RÉNOVÉE

La politique immobilière de l'Etat, en cours de rénovation depuis une demi-dizaine d'années, s'est constituée à partir d'un champ d'application restreint, du point de vue institutionnel, aux administrations centrales et, du point de vue opérationnel, à la rationalisation du patrimoine. Le dépassement de cette double limite est en cours, depuis environ deux ans : l'élargissement se fait, d'un côté, au bénéfice de l'ensemble des services déconcentrés et des opérateurs de l'Etat et, de l'autre côté, en faveur de l'entretien des bâtiments et de la gestion des baux.

1. L'extension institutionnelle
a) Les services déconcentrés

Le dispositif des schémas pluriannuels de stratégie immobilière (SPSI) , documents qui décrivent les diagnostics et orientations stratégiques de chaque ministère, effectif pour les administrations centrales, a été mis en oeuvre pour les services déconcentrés , en 2008 dans 25 départements « pilotes », comprenant dix des plus grandes agglomérations (soit un parc de plus de 3 300 bâtiments) et en 2009 pour l'ensemble du territoire .

La réalisation de ces SPSI se fait en deux étapes : d'abord une phase de diagnostic, qui vise à établir un état des lieux complet des bâtiments et des conditions de leur occupation, puis une phase d'élaboration de la stratégie d'évolution du parc immobilier, souvent à partir de plusieurs scénarios. D'après les informations transmises à votre rapporteure spéciale, la généralisation devrait être achevée avant la fin de l'année 2010 : au 25 juillet 2010, France Domaine avait déjà recensé un projet de SPSI pour 96 départements et, à ce jour, près de la moitié de ces documents a été présentée et en partie validée par les comités administratifs régionaux, placés sous l'autorité des préfets (représentants locaux de « l'Etat propriétaire »).

Dans le cadre de la RéATE, les schémas ont commencé à traduire sur le plan immobilier la création des nouvelles directions régionales et départementales interministérielles. Ils doivent en outre faire apparaître les axes de rationalisation de l'occupation des surfaces, l'optimisation économique et l'amélioration environnementale.

L'impact immobilier de la réforme de l'administration territoriale de l'Etat

Fin août 2010, les projets immobiliers inscrits dans le cadre de la RéATE des administrations déconcentrées de 90 départements avaient fait l'objet d'une validation par le Secrétariat général du Gouvernement. Un premier bilan laisse attendre des opérations ainsi prévues :

- la diminution d'un tiers du nombre de sites occupés, qui serait à terme de 1 394 immeubles contre 2 146 aujourd'hui ;

- la diminution d'environ 297 000 m2 de surface utile nette (SUN) occupée par l'Etat, soit environ 500 000 m² de surface utile brute ;

- la baisse du ratio moyen d'occupation par poste de travail, passant de 18,1 m² à 15,3 m² de SUN ;

- une économie de loyers de près de 10 millions d'euros.

Ces chiffres devront être actualisés après la validation, programmée entre la fin de l'année 2010 et le début de 2011, des projets encore en cours d'examen pour les administrations de six départements (Alpes-de-Haute-Provence, Gard, Landes, Loir-et-Cher, Paris et Pyrénées-Orientales).

Source : ministère du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat

De la même manière, les loyers budgétaires , après une expérimentation en 2006 pour trois ministères (économie et finances, affaires étrangères, justice) et leur application en 2007 à toutes les administrations centrales, ont été étendus en 2008 aux services déconcentrés présents dans 29 départements incluant les dix agglomérations principales puis, en 2009, à l'ensemble du territoire métropolitain, enfin en 2010 à la totalité des immeubles domaniaux de bureaux, y compris les immeubles situés outre-mer et à l'étranger . Cette généralisation tend notamment à introduire un raisonnement économique pour les administrations, en les amenant à prendre en compte le coût de leur occupation immobilière et, le cas échéant, à envisager les arbitrages d'implantation opportuns.

En outre, au terme de l'évolution organisée en ce sens ces dernières années 36 ( * ) , les loyers budgétaires sont désormais indexés sur les prix du marché locatif des activités tertiaires . Ainsi, la LFI pour 2010 a prévu près de 1,13 milliard d'euros de crédits pour ces loyers, contre 675 millions en 2009 : cette dotation a constitué la dernière mesure d'accroissement du périmètre des crédits de fonctionnement des administrations au titre des loyers budgétaires, compte tenu des nouveaux immeubles soumis au dispositif cette année. Pour 2011 , le présent PLF maintient le même montant, assorti d'une indexation de 2,7 % .

Le cas particulier des immeubles de l'Etat situés à l'étranger :
la lente avancée vers une agence de gestion ad hoc

Le comité de modernisation des politiques publiques (CMPP) du 4 avril 2008 a décidé la mise en place d'une « agence de gestion des immeubles publics à l'étranger » (AGIME), établissement destiné à améliorer et rationaliser la gestion du parc immobilier de l'Etat situé à l'étranger, pour l'ensemble des ministères utilisateurs. Ce parc a été évalué à environ 4 milliards d'euros et représente le dixième des biens immobiliers utilisés par l'Etat.

Au cours de l'année 2009, un groupe de travail « préfigurateur », associant le ministère des affaires étrangères et européennes et le ministère du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, a proposé une expérimentation sur quelques pays. Il a également proposé de retenir le principe d'une mise à disposition des biens de l'Etat à la future agence sur le fondement d'un bail emphytéotique.

L'AGIME relèvera de la catégorie des établissements publics concourant à l'action extérieure de l'Etat, créée par la loi du 27 juillet 2010 relative à l'action extérieure de l'Etat. Elle doit être créée par un décret en Conseil d'Etat qui en précisera les missions et les modalités d'organisation et de fonctionnement. L'élaboration de ce décret est en cours.

Source : ministère du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat

b) Les opérateurs

Les opérateurs de l'Etat ont été intégrés à sa politique immobilière à partir de 2009 et d'une manière encore « balbutiante ». Les conditions dans lesquelles l'ancien immeuble de l'Imprimerie nationale a été cédé, en 2003, avant d'être racheté par l'Etat, dans des conditions peu profitables, en 2007 37 ( * ) , avaient en effet montré la nécessité de cette prise en compte, sur le modèle du plafonnement annuel en LFI, à compter de 2009, des autorisations d'emplois des opérateurs 38 ( * ) . Votre rapporteure spéciale appuie les mesures prises en la matière, qui tendent à mettre en oeuvre une politique immobilière globale de l'Etat .

Lancé dès 2006, ce chantier n'avait pas rencontré la mobilisation souhaitable. De fait, fin décembre 2008, le ministre chargé du budget a rappelé les quelque 643 opérateurs de l'Etat au sens de la LOLF 39 ( * ) à leur devoir de procéder au recensement du parc immobilier qu'ils occupaient, en vue de produire un inventaire physique de ce parc au 31 mars 2009 et un SPSI pour la fin du premier semestre 2010.

En ce qui concerne l'inventaire, un premier bilan a conduit au décompte d' environ 4 millions de mètres carrés de bureaux et 11 millions d'hectares de terrains . L'analyse révèle que ce parc, du point de vue du nombre d'actifs, appartient majoritairement à l'Etat. Le recensement se poursuit actuellement , tant pour les organismes qui ont reçu la qualification d'opérateur de l'Etat en 2010 que pour ceux dont l'inventaire requiert des précisions et un travail de fiabilisation technique et juridique. En février 2010, le parc immobilier de 543 opérateurs métropolitains a été évalué, pour un montant de 42 milliards d'euros . Une nouvelle campagne d'évaluation visera, fin 2010, les opérateurs situés outre-mer et à l'étranger , ainsi que ceux qui ont été nouvellement identifiés comme tels en 2010 ; les résultats sont attendus pour la fin du premier semestre 2011.

En ce qui concerne les SPSI, seuls 45 % des projets escomptés des opérateurs pour le 30 juin 2010 sont parvenus, à ce jour, au service France Domaine . Des relances ont été engagées auprès des organismes retardataires. Chaque projet doit faire l'objet d'un avis de France Domaine et du ministère de tutelle avant d'être soumis, pour approbation, au conseil d'administration de l'opérateur.

Par ailleurs, le Gouvernement a décidé d'introduire des loyers, à compter du 1 er janvier 2012, pour les biens immobiliers appartenant à l'Etat qui sont occupés par ses opérateurs , selon des modalités à définir.

2. L'extension opérationnelle
a) L'entretien des bâtiments

La LFI pour 2009 a créé un programme « Entretien des bâtiments de l'Etat » (n° 309), dont l'objet est de retracer les dépenses d'entretien « lourd » : celles qui, dans le droit civil, seraient à la charge du propriétaire, par opposition au locataire (électricité, chauffage, ventilation, réseau d'eau, appareils élévateurs, sécurité incendie... - y compris la remise en état et en conformité, notamment dans le cadre des objectifs du « Grenelle de l'environnement » en son volet « Etat exemplaire 40 ( * ) »). Rattaché à la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » et placé sous la responsabilité du chef du service France Domaine, ce programme constitue le premier support budgétaire de suivi centralisé d'un autre aspect de la gestion immobilière de l'Etat que les cessions, dont l'affectation des produits est retracée par la mission « Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat ».

Pour mémoire, un tel outil constituait une demande récurrente de la part de votre commission des finances, afin de retracer sur une seule ligne budgétaire, plus clairement que dans les divers programmes ministériels, la charge d'entretien incombant à l'Etat en tant que propriétaire . Il tend d'ailleurs utilement à « sanctuariser » des crédits pour l'entretien nécessaire, parfois urgent, que les ministères, sans cette contrainte, auraient pu être tentés de différer.

Le programme se trouve en principe alimenté par des crédits soustraits aux programmes supportant une charge de loyers budgétaires, pour chaque ministère en proportion du montant de loyers dont il est redevable. La contribution a ainsi été fixée à 12 % des loyers dans la LFI pour 2009 , soit au total 76,9 millions d'euros en AE et CP, mais ces crédits ont été abondés par la LFR du 4 février 2009, dans le cadre du plan de relance de l'économie , à hauteur de 245,4 millions d'euros en AE et de 193,7 millions en CP. Cependant, sur le total de ces crédits, seuls 233,7 millions d'euros en AE et 109,2 millions en CP ont été consommés par l'exécution , soit 72 % des AE et 56 % des CP. La mise en oeuvre déconcentrée du programme explique sans doute l'essentiel de cette sous-consommation , les services ayant dû se familiariser avec le nouveau dispositif et, sur le fond, lancer la réalisation des audits énergétiques requis au titre du « Grenelle de l'environnement », ainsi que d'audits « bâtimentaires » et relatifs à l'accessibilité.

La dotation du programme a été portée à 16 % des loyers budgétaires en LFI pour 2010, soit 169 millions d'euros en AE et CP ; elle est fixée par le présent PLF à hauteur de 20 % de ces loyers prévus pour 2011, soit 215 millions d'euros en AE et CP. Il convient toutefois de souligner que ces crédits demeurent très insuffisants pour couvrir les besoins réels en travaux d'entretien lourd que l'Etat devra assumer dans les prochaines années , compte tenu notamment des besoins identifiés à l'occasion des audits précités (dont l'achèvement est prévu début 2011). L'enjeu pour les finances publiques est d'optimiser les coûts en orientant la dépense vers l'entretien préventif , alors que les administrations limitent aujourd'hui leurs dépenses, pour l'essentiel, à l'entretien « curatif ».

Par ailleurs, la mesure des performances du programme, déclinée en trois objectifs, se borne à trois indicateurs d'activité . En outre, les modalités de calcul de ces derniers, pour 2009, a rendu incertaines les réalisations du programme lors de sa première année d'existence 41 ( * ) . C'est sous cette réserve qu'ils sont présentés dans le tableau ci-après ; votre rapporteure spéciale espère que la fiabilisation nécessaire aura été assurée pour l'exercice en cours.

Performances du programme « Entretien des bâtiments de l'Etat »

(en %)

Indicateurs

2009 (réalisation)

2010 (prévision actualisée)

2011

(prévision)

1.1. Pourcentage des dépenses affectées à des opérations préventives

22

25

30

2.1. Pourcentage de réalisation des contrôles réglementaires

30

40

60

3.1. Pourcentage des bâtiments de bureaux de l'Etat ayant fait l'objet d'un audit énergétique

47

100

100

Source : PAP de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » annexé au PLF pour 2011

b) La gestion des baux

Votre rapporteure spéciale, au premier semestre 2009, a mené un contrôle sur pièces et sur place, en application de l'article 57 de la LOLF, sur la gestion par l'Etat des baux qu'il supporte, en Ile-de-France et en particulièrement dans Paris, pour des immeubles de bureaux. Ce contrôle a donné lieu à un rapport d'information 42 ( * ) , établissant notamment la méconnaissance par l'Etat de son parc locatif et le caractère coûteux de celui-ci (près de 190 millions d'euros par an en Ile-de-France), ainsi que la nécessité de mettre en place une gestion active en la matière.

Les dix recommandations principales de votre rapporteure spéciale
pour une meilleure gestion de « l'Etat locataire »

1 .- Mettre en place, au sein du service France Domaine, un véritable « tableau de bord » des baux supportés par l'Etat, rendant possible le réel pilotage d'une gestion fondée sur une doctrine de principe.

2 .- Renégocier de façon systématique les baux de l'Etat les plus coûteux, en mettant à profit les opportunités de marché actuelles selon un calendrier à définir précisément.

3 .- Développer le rôle d'appui et d'accompagnateur de France Domaine auprès des administrations occupant des immeubles pris à bail par l'Etat, en banalisant le recours à ses services et en systématisant ses impulsions en la matière.

4 .- Encadrer les décisions de prise à bail de l'Etat en exigeant une justification de ce choix au regard de la situation, pérenne ou provisoire, des administrations à loger et d'un arbitrage coûts/besoins suffisamment pesé, fondé sur des critères d'implantation et des conditions d'utilisation des immeubles.

5 .- Prévoir, le cas échéant, dans les baux souscrits par l'Etat, une clause de plafonnement de la réévaluation du loyer organisée selon une règle d'indexation.

6 .- Anticiper les fins de bail au moins 18 mois avant l'échéance, afin que l'Etat soit en mesure de choisir entre plusieurs options (renouvellement, modification des clauses, résiliation...).

7 .- Accentuer la prévision relative aux locations dans le cadre du schéma pluriannuel de stratégie immobilière (SPSI) de chaque ministère ou opérateur de l'Etat.

8 .- Intégrer les locations dans les compétences de la future agence foncière chargée de la gestion des biens de l'Etat situés à l'étranger.

9 .- Objectiver, par la voie règlementaire, les critères de saisine pour avis du Conseil de l'immobilier de l'Etat, afin d'éviter le soupçon d'instrumentalisation de l'institution.

10 .- Introduire une annexe « immobilière » aux projets de loi de finances initiale, destinée à informer le Parlement sur les acquisitions et les cessions immobilières, mais aussi les prises à bail de l'Etat les plus importantes.

Source : rapport d'information n° 510 (2008-2009)

Pour faire suite à ces observations, dès l'année dernière, le Gouvernement a fait valoir deux séries d'initiatives.


• D'une part, il s'agissait de mesures ponctuelles de réorganisation des conditions d'implantation locatives de certains services.

C'est ainsi notamment que, comme le notait déjà le rapport d'information de votre rapporteure spéciale, le bail pris pour la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et la toxicomanie (MILDT), le Conseil national consultatif d'éthique et le Haut Conseil à l'intégration a été abandonné au 31 décembre 2009, les deux premiers de ces services étant désormais logés dans des immeubles domaniaux occupés par les services du Premier ministre. De même, le bail du secrétariat d'Etat aux sports et celui des services du Médiateur de la République ont été renégociés dans le sens d'une économie pour l'Etat, par rapport à ce qui était initialement prévu pour l'année 2009, de 7,7 millions d'euros et 580 000 euros respectivement.

Il a également été précisé à votre rapporteure spéciale que le ministère de la Justice a proposé un regroupement de ses services centraux, vers un site unique à rechercher, en vue de résilier les baux actuellement supportés pour l'hébergement de ces services. En outre, une lettre du ministre chargé du budget a été adressée au président de la Cour de justice de la République , en vue de trouver une solution au coût excessif du bail de cette institution ; cette recommandation, toutefois, semble être restée sans suite à ce jour.


• D'autre part, des mesures « structurantes » ont été prises pour la gestion du parc locatif de l'Etat.

En premier lieu, il a été décidé de lancer une expérimentation dans une trentaine de départements , les plus significatifs en termes de prises à bail d'immeubles à usage de bureaux (les départements de la région Ile-de-France et les départements chefs lieux de région). Cette expérimentation tend à la confection d'un « tableau de bord » des baux en cause et à la définition d' orientations générales pour le suivi de ces derniers et leur négociation en tant que de besoin.

En deuxième lieu, un marché de renégociation des baux de l'Etat en Ile-de-France a été lancé, dont les cinq lots ont été attribués à cinq prestataires différents fin septembre 2009. L'opération doit permettre de réduire le montant des loyers acquittés par les administrations auprès du secteur privé. Toutes opérations confondues, aujourd'hui, le ministère du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat met en avant une économie globale de 36,5 millions d'euros par an .

En dernier lieu, des normes commencent à être fixées pour encadrer les baux qui seront contractés, dans l'avenir, par les services de l'Etat . Ainsi, en Ile-de-France, les loyers supportés par ce dernier ne pourront plus dépasser 400 euros/m² (hors taxes, hors charges). En ce qui concerne les autres agglomérations, il reviendra au CIE de donner son avis sur les propositions que devrait lui transmettre, d'ici la fin de l'année, le ministère chargé du budget.

Votre rapporteure spéciale approuve ces orientations. Cependant, elle se réserve de demander au Gouvernement, en 2011, un compte rendu de l'ensemble des mesures de suivi qu'il aura données à ses recommandations en faveur d'une meilleure gestion de « l'Etat locataire », et déplore que la réponse à la question qu'elle a formulée, sur ce sujet, en vue de l'examen du présent PLF, sur le fondement de l'article 49 de la LOLF, ne lui ait pas été communiquée à la date de la rédaction du présent rapport.

AMENDEMENT PROPOSÉ
PAR VOTRE RAPPORTEURE SPÉCIALE

PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2011

N° 1

ARTICLES DE DEUXIÈME PARTIE

MISSION « GESTION DES FINANCES PUBLIQUES ET DES RESSOURCES HUMAINES »

A M E N D E M E N T

présenté par

Mme Nicole BRICQ, rapporteure spéciale

_________________

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 100

I.- Après l'article 100, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement joint au projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion une annexe récapitulant pour l'année, par ministère, la surface utile nette, les ratios d'occupation par poste de travail et le coût global d'occupation des bâtiments de l'Etat à usage principal de bureaux, ainsi que tous autres indicateurs permettant d'apprécier la performance immobilière, en distinguant, pour chaque ministère, l'administration centrale et les services déconcentrés.

II.- En conséquence, faire précéder cet article de l'intitulé :

Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat .

OBJET

Cet amendement prévoit que la surface utile nette, les ratios d'occupation par poste de travail et le coût global d'occupation des bâtiments de l'Etat à usage principal de bureaux, ainsi que tous autres indicateurs permettant d'apprécier la performance immobilière, se trouvent retracés, par ministère et en distinguant l'administration centrale et les services déconcentrés, en annexe aux projets de loi de règlement des comptes .

En effet, bien que les ministères aient été invités par la direction du budget à fournir des indicateurs d'efficience de leur gestion immobilière, pour les immeubles de bureaux ou majoritairement affectés à l'usage de bureaux, au sein du volet « performance » des PAP pour 2011 de leurs programmes « support », la synthèse de ces données n'a pas été établie.

Votre rapporteure spéciale comprend en partie les réserves mises en avant pour justifier ce choix (absence d'un outil informatique commun de gestion immobilière, redéfinition en cours des réseaux territoriaux de certaines administrations, importantes modifications des modalités de programmation et de pilotage des crédits afférents aux dépenses immobilières de l'Etat). Toutefois, l'établissement d'une synthèse des indicateurs de la performance immobilière des différents ministères représente, désormais, une urgence : il en va de la crédibilité de « l'Etat propriétaire » que le Gouvernement présente au Parlement ce qui devrait être le coeur même du « tableau de bord » de sa gestion .

Le présent amendement permettra que ce bilan puisse être présenté, la première fois, pour l'exercice 2010, puis pour chaque année.


* 1 Le détail de ces travaux a été retracé dans le rapport de notre ancien collègue Paul Girod n° 78 (2006-2007), tome III, annexe 12 (PLF pour 2007). Il s'agit notamment du rapport d'information publié en juillet 2005 par notre ancien collègue député Georges Tron, en conclusion d'une mission d'évaluation et de contrôle sur la gestion et la cession du patrimoine immobilier de l'Etat et des établissements publics (n° 2457, A.N., XII e législature).

* 2 Ces produits figurent au titre de recettes non fiscales dans l'annexe « Evaluation des voies et moyens » jointe aux projets de loi de finances, ligne 2211.

* 3 Cf . le rapport de votre rapporteure spéciale n° 101 (2009-2010), tome III, annexe 14 (PLF pour 2010).

* 4 Cf. le rapport de notre collègue Philippe Marini, rapporteur général, sur le présent PLF (tome II : examen des articles de la première partie).

* 5 Cf. la contribution de nos collègues François Fortassin, Fabienne Keller, Alain Lambert et Gérard Miquel, rapporteurs spéciaux, au rapport n° 587 (2009-2010), tome II, sur le projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion pour l'année 2009.

* 6 Cf. le rapport d'information de nos collègues Philippe Adnot et Jean-Léonce Dupont n° 578 (2009-2010) sur la dévolution du patrimoine immobilier aux universités.

* 7 Le rapport d'information précité de nos collègues Philippe Adnot et Jean-Léonce Dupont relève qu'au 31 décembre 2009, la surface hors oeuvre nette (SHON, hors parkings couverts) de l'ensemble des établissements universitaires s'élevait à près de 18,6 millions de mètres carrés, dont 15,2 millions étaient la propriété de l'Etat, répartis sur plus de 6 350 bâtiments, et le foncier non bâti à 5 945 hectares. Les 35 % de ce patrimoine sont estimés comme vétustes.

* 8 Sous l'impulsion et la coordination d'un nouvel établissement public à caractère industriel et commercial (l'Etablissement public de Paris-Saclay) ; cf. le rapport n° 366 (2009-2010) de notre collègue Jean-Pierre Fourcade, au nom de la commission spéciale, sur le projet de loi relatif au Grand Paris. Par ailleurs, votre rapporteure spéciale note que la convention relative à l'emploi des fonds levés, par l'emprunt national prévu par la LFR du 9 mars 2010, en faveur du pôle du plateau de Saclay n'a pas été transmise, à ce jour, au Parlement.

* 9 Le détail par année est donné infra , II.

* 10 Suivant l'article 20 de la LOLF, un compte spécial doté de crédits constitue une mission au sens de la loi organique.

* 11 Actuellement Daniel Dubost, que votre rapporteure spéciale a auditionné, dans le cadre de l'examen du présent PLF, le 11 octobre 2010. Il convient de noter que les moyens de fonctionnement de France Domaine sont inscrits dans la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines ».

* 12 Cf. le rapport n° 99 (2008-2009), tome III, annexe 12 (PLF pour 2009).

* 13 Pour mémoire, les résultats enregistrés pour 2009 ont été analysés par votre rapporteure spéciale dans sa contribution au rapport précité n° 587 (2009-2010), tome II.

* 14 Actuellement, les surfaces de bureaux des immeubles de l'Etat pris en compte dans le système d'information « CHORUS », au total, représentent 13,15 millions de mètres carrés. Un travail de fiabilisation de ces données est en cours, mené par le service France Domaine.

* 15 Cf. infra , III.

* 16 Ce programme traduit, dans l'architecture budgétaire, l'instauration, en 2010, des directions départementales interministérielles. Cf. le rapport de notre collègue Yves Krattinger, rapporteur spécial, sur le présent PLF.

* 17 L'amendement proposé est joint en annexe au présent rapport.

* 18 Sur ce bilan patrimonial, cf. infra , III.

* 19 En ce qui concerne l'exercice 2009, la prévision de recettes associée aux opérations du ministère de la défense couvrait aussi, notamment, d'importants paiements de la Société nationale immobilière ; cf. infra , 2.

* 20 Sur les opérations immobilières du ministère de la défense dans leur ensemble, voir le rapport d'information n° 503 (2009-2010) de nos collègues François Trucy et Didier Boulaud, sur la politique immobilière du ministère de la défense, et celui, n° 2623 (A.N., XIIIe législature), de nos collègues députés Jean-François Mancel, André Schneider et Hervé Féron, en conclusion d'une mission d'évaluation et de contrôle sur les recettes exceptionnelles de la Défense en 2009 et 2010.

* 21 Il s'agissait du paiement de la soulte prévue par un contrat de bail (de dix ans) portant sur le parc de logements domaniaux occupés par les agents du ministère de la défense, soit 215 millions d'euros, complété par le remboursement d'une avance sur travaux de 6 millions d'euros accordée, dans ce cadre, par le ministère.

* 22 Suivant les informations recueillies par votre rapporteure spéciale, les immeubles relevant du ministère de la défense constituent près du quart (23 %) du parc immobilier ainsi mis en vente et représentent près de la moitié (47 %) de sa valeur globale estimée mais, pour des raisons tenant à la préservation des intérêts patrimoniaux de l'Etat, cette valeur n'a pas été divulguée.

* 23 Cf. la contribution précitée au rapport n° 587 (2009-2010).

* 24 Cf. le rapport précité n° 101 (2009-2010), tome III, annexe 14.

* 25 Cf. supra , I.

* 26 Cf. supra , I.

* 27 Ces règles d'intéressement et les perspectives de leur évolution font l'objet de développements au sein du III du présent rapport.

* 28 Cf. le rapport précité n° 101 (2009-2010), tome III, annexe 14.

* 29 D'une surface de 32 000 m 2 (SHON), cet immeuble a été acquis en 2009 par vente en l'état futur d'achèvement (VEFA) et est livrable à l'automne 2011. Il devrait accueillir plus de 1 400 agents au début de l'année 2012.

* 30 Cf. les incertitudes sur le projet dont fait état le rapport d'information n° 7 (2010-2011) de notre collègue François Rebsamen, sur le financement et l'organisation de la délocalisation de l'INSEE à Metz.

* 31 Cf . le rapport précité n° 101 (2009-2010), tome III, annexe 14.

* 32 Pour mémoire, les ministères de la défense et de la justice, ainsi que la DGFiP du ministère du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, engagés dans leurs propres réformes d'implantation territoriale (respectivement le nouveau plan de stationnement des forces militaires, la révision de la carte judiciaire et l'unification des réseaux des anciennes direction générale des impôts [DGI] et direction générale de la comptabilité publique [DGCP]), ne sont pas inclus dans le champ d'application de la RéATE. Sur l'impact immobilier attendu de celle-ci, voir l'encadré infra .

* 33 Par ailleurs, en 2009, la différence de taux de retour des produits qui existait, jusqu'alors, en fonction du caractère occupé ou inoccupé des immeubles vendus a été abandonnée.

* 34 Cf. supra , I.

* 35 Un récent projet de circulaire aux préfets du ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, présenté au CIE, va dans ce sens en détaillant les mesures d'ajustement financier prévues, dès janvier 2009, par les circulaires précitées du Premier ministre en cas de carence des administrations dans l'optimisation de leur occupation domaniale. Ces mesures prendraient la forme d'une majoration de loyer budgétaire sans attribution de crédits de fonctionnement supplémentaires.

* 36 Voir les rappels du rapport précité n° 99 (2008-2009), tome III, annexe 12.

* 37 Cf . le rapport d'information n° 37 (2007-2008) de notre ancien collègue Paul Girod et de nos collègues Bernard Angels, Marie-France Beaufils et Adrien Gouteyron. On rappelle que l'Imprimerie nationale a cédé son immeuble au prix total de 93 millions d'euros (complément de prix inclus), alors que l'Etat l'a racheté au prix de 325 millions d'euros.

* 38 Article 64 de la LFI pour 2008.

* 39 Nombre retenu par l'annexe « Opérateurs de l'Etat » jointe au PLF pour 2010 ; ils étaient 655 dans la LFI pour 2009.

* 40 Réduction de 40 % de la consommation d'énergie des bâtiments de l'Etat à l'horizon de huit ans et réduction des émissions de gaz à effet de serre de 50 %.

* 41 Pour mémoire, les résultats enregistrés pour 2009 ont été analysés par votre rapporteure spéciale dans sa contribution au rapport précité n° 587 (2009-2010), tome II.

* 42 Rapport d'information n° 510 (2008-2009) : « "l'Etat locataire" : une gestion à bâtir ».