ARTICLE 47 SEPTDECIES (DEVENU ARTICLE 109 DE LA LOI DE FINANCES POUR 2012)
RAPPORT DU GOUVERNEMENT SUR LA CRÉATION D'UNE AGENCE PUBLIQUE DE FINANCEMENT DES INVESTISSEMENTS DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

I. DÉBATS ASSEMBLÉE NATIONALE EN PREMIÈRE LECTURE (3ÈME SÉANCE DU MARDI 15 NOVEMBRE 2011)

Article additionnel après l'article 47

Mme la présidente. Les amendements n os 430 et 661 sont identiques.

L'amendement n° 430 est présenté par M. Pélissard, M. Estrosi, M. Saddier, M. Proriol, Mme Dalloz, M. Binetruy, M. Roubeaud et M. de Courson et l'amendement n° 661 est présenté par M. Destot, M. Baert et les membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Ces amendements sont ainsi libellés :

Après l'article 47, insérer l'article suivant :

Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 15 janvier 2012, un rapport sur les conséquences pour le budget de l'État et des collectivités locales de la création d'une Agence publique de financement des investissements des collectivités locales.

L'amendement n° 430 fait l'objet d'un sous-amendement n° 805, présenté par M. Carrez, ainsi libellé :

Substituer aux deux occurrences du mot :

« locales »,

le mot :

« territoriales ».

La parole est à M. Jacques Pélissard, pour soutenir l'amendement n° 430.

M. Jacques Pélissard. Le bloc local, au niveau départemental et régional, assume 71 % de l'investissement public. Pour ce faire, il a besoin de financements. Or, actuellement, ces derniers connaissent une tension en raison du retrait des banques - Caisses d'épargne ou Crédit agricole, par exemple - du secteur des prêts aux collectivités locales, conséquence des règles de Bâle 2 et Bâle 3.

Il s'agit donc aujourd'hui de trouver des financements pour ces prêts. Le Gouvernement en est d'ailleurs bien conscient, puisqu'il a fléché trois milliards d'euros en provenance du fonds d'épargne de la Caisse des dépôts et consignations pour financer précisément les investissements des collectivités locales et permettre l'établissement de nos comptes administratifs pour la fin de l'année 2011.

En 2012, il est prévu la création d'une nouvelle banque publique, avec la Caisse des dépôts et consignations et la Banque postale, mais cela ne suffira pas.

C'est la raison pour laquelle les collectivités se sont réunies, avec l'Association des maires de France, l'Association des départements de France, l'Association des régions de France et l'Association des communautés urbaines de France, afin de mener une étude portant sur la création d'une agence publique de financement des collectivités locales. Cette étude a été rendue, et nous souhaitons aujourd'hui qu'un rapport soit remis par le Gouvernement sur les conséquences pour le budget de l'État et des collectivités territoriales de la création d'une Agence publique de financement des investissements des collectivités locales.

C'est une démarche d'exploration qui paraît intéressante, afin de permettre des financements au profit des collectivités locales, par un établissement financier contrôlé par elles, sans garanties de l'État. Je crois que cette démarche exploratoire mérite d'être menée.

Mme la présidente. Le sous-amendement n° 805 de la commission des finances est rédactionnel.

Quel est l'avis de la commission sur les deux amendements identiques ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je partage totalement l'analyse de Jacques Pélissard. Il faut absolument faire ce rapport.

Aujourd'hui, le contexte devient difficile pour le financement des collectivités locales, pour des raisons objectives. En effet, les banques vont, si ce n'est se désengager, du moins restreindre leurs engagements auprès des collectivités locales. Il est aisé de comprendre pourquoi : d'une part de nouvelles exigences en termes de fonds propres liées aux critères de Bâle III s'imposent à elles, or les prêts aux collectivités territoriales ont pour caractéristique d'être longs, et sont donc particulièrement consommateurs de fonds propres. D'autre part, les collectivités locales sont obligées de déposer leur trésorerie dans les comptes du Trésor. Les banques n'ont donc pas la contrepartie qu'elles peuvent avoir vis-à-vis d'autres emprunteurs.

Par ailleurs, une structure publique va être mise en place en relais de Dexia, à partir de la Banque postale, et c'est une très bonne chose. Mais tous les éléments d'information que nous avons pour l'heure sur cette future structure publique associant d'une part la Caisse des dépôts d'autre part la Banque postale montrent que celle-ci ne prendra qu'une part limitée du marché. Nous risquons donc d'être confrontés à un besoin de financement difficilement couvert.

Bien sûr, la Caisse des dépôts vient à la rescousse, à l'exemple de ce qui vient de se passer : trois milliards d'euros ont été mis à disposition à partir des fonds du Livret A. Mais je pense que l'environnement, qui devient tendu, exige que nous explorions sous tous ses aspects la piste de cette agence publique de financement des collectivités locales qui est proposée de façon unanime par nos trois associations : communes, départements et régions. Je plaide donc pour que ce travail d'analyse soit mené.

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Baert pour présenter l'amendement n° 661.

M. Dominique Baert. Il est plus aisé de parler lorsque le rapporteur général a déjà dit ce qu'il pensait de mon amendement, puisqu'il est identique à celui de Jacques Pélissard.

S'agissant des collectivités territoriales, nous devons avoir deux données structurelles à l'esprit. Tout d'abord, les collectivités locales représentent les trois quarts de l'investissement public dans ce pays. Elles constituent donc un des moteurs de la croissance, qui ne doit pas s'enrayer.

Par ailleurs, les collectivités locales connaissent actuellement des difficultés pour se financer. Ce n'est pas simplement pour des raisons conjoncturelles liées aux crises bancaires et financières, mais aussi pour des raisons structurelles : la crise de liquidités des banques, la modification de leurs ratios prudentiels qui ne les incite plus à s'engager sur des crédits longs, un désintérêt croissant des banques pour la clientèle des collectivités locales qui ne peuvent pas déposer leurs avoirs auprès des banques.

Voilà pourquoi nombre d'associations d'élus et de représentants des diverses collectivités territoriales se sont mobilisés en vue de travailler à la préparation et à l'étude de faisabilité d'une agence de financement des collectivités locales, dont la mise en place nous semble utile. Nous aurions préféré que l'établissement public puisse être mis en place dans cette loi de finances, ce n'est pas possible pour des raisons techniques. Cette proposition que le Gouvernement remette un rapport avant le 15 janvier nous paraît donc tout à fait fondamental, car sans ressources financières pour les investissements des collectivités locales, c'est le service public de proximité qui souffrira, mais aussi la croissance économique. Voilà pourquoi nous défendons cette idée.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Avis favorable, pourvu que les auteurs des amendements acceptent un sous-amendement fixant la date de remise au 15 février, car d'ici le 15 janvier, vu la charge de travail qui pèse sur le ministère d'ici le 31 décembre, les délais ne pourront pas être tenus.

M. Jacques Pélissard. Je suis d'accord.

M. Dominique Baert. Je suis également d'accord, en espérant que ce ne sera pas un voeu pieu.

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard. Il est légitime de réaliser une étude pour connaître clairement la situation financière en ce qui concerne la mise en place des prêts pour les collectivités territoriales.

Passer à une étape ultérieure est un autre sujet, car s'il doit y avoir une agence qui émet, cela supposera qu'elle bénéficie d'une garantie de l'État, qui devra ainsi se charger à nouveau en garanties, avec une disposition en ce sens en loi de finances.

Il faut également avoir présent à l'esprit que la solution de succession de Dexia avec la coentreprise constituée entre la Banque postale et la Caisse des dépôts va coûter de l'argent dans un premier temps. Compte tenu de la nécessité de récupérer le stock des prêts effectués par DMA, il faudra du temps avant de dégager à nouveau des marges et des ressources.

Il ne faut donc pas que l'on perturbe de manière intempestive la montée en puissance de ce nouvel outil public de prêts aux collectivités locales, porté par la Caisse des dépôts et la Banque postale, et que l'on dégrade ainsi les conditions de rentabilité déjà extrêmement fragiles de cette affaire. Le comité d'investissement de la Caisse des dépôts, au sein duquel toutes les sensibilités politiques sont représentées, s'est unanimement prononcé sur ces points.

Il est légitime de mener une réflexion sur l'agence de prêts et indispensable de prendre une photographie des futurs besoins de prêts des collectivités territoriales. Mais il ne faut pas en tirer des conclusions sans prendre en considération les décisions que nous avons prises il y a quelques jours dans le collectif budgétaire consacré à Dexia.

(Le sous-amendement n° 805 est adopté.)

Mme la présidente. Je rappelle que les amendements identiques ont été modifiés afin de fixer au 15 février la date de remise du rapport.

(Les amendements identiques n os 430 et 661, tels qu'ils viennent d'être modifiés, sont adoptés.)