IX. DÉBATS ASSEMBLÉE NATIONALE EN NOUVELLE LECTURE DU JEUDI 15 DÉCEMBRE 2011

Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article 58.

La parole est à M. Guy Malherbe.

M. Guy Malherbe. Nous abordons l'étude d'un article d'une importance historique pour les finances locales et la péréquation fiscale tant attendue.

Nous sommes un certain nombre à avoir beaucoup travaillé sur ce sujet, et nous avons bénéficié d'une écoute attentive de la part du Gouvernement. Le résultat de ce travail est l'amendement gouvernemental n° 354, déposé à l'instant, et qui réalise la synthèse des observations et des remarques faites par plusieurs d'entre nous.

Cet amendement apporte beaucoup d'améliorations au texte qui nous avait été présenté initialement.

L'économie générale du dispositif a été adaptée afin de faciliter sa montée en charge. La marche qui était prévue initialement a été adoucie, et elle sera certainement plus facile à franchir. Les collectivités dont l'effort fiscal était inférieur à un certain seuil sont exclues du dispositif, ce qui nous paraît normal.

Les effets de seuil sont fortement diminués du fait du remplacement des strates de population par l'application d'un coefficient logarithmique. C'est ce qui était souhaité par un grand nombre d'entre nous, car les effets de seuil posaient quelques difficultés pour certaines communes et EPCI.

La définition des bénéficiaires du fonds tient compte de l'objectif d'achèvement de la carte et des mouvements de périmètre.

Dans l'amendement qui nous est présenté, la situation des communes les plus en difficulté est mieux prise en compte.

La situation des collectivités qui disposent d'un haut niveau de ressources mais également d'un niveau de charges particulièrement élevé est également prise en compte, puisqu'une pondération des critères de l'indice synthétique est proposée.

Les communes éligibles à la DSU-cible ont également été prises en compte dans ce dispositif, ce qui permet de régler de nombreuses difficultés pour un certain nombre de communes.

Par ailleurs, des possibilités d'ajustement sont introduites au niveau local. Des majorités adaptées ont été prévues au sein des organes délibérants afin d'assurer une répartition des prélèvements qui seront effectués sur les EPCI au sein de ces établissements.

De même, pour les EPCI situés dans la région Île-de-France, il existait un problème de répartition des prélèvements prévus. Là encore, un dispositif a été imaginé dans l'amendement présenté par le Gouvernement, de façon à faciliter la répartition des prélèvements de péréquation, en tenant compte des cotisations déjà versées dans le cadre de la péréquation régionale propre à l'Île-de-France.

L'ensemble du dispositif proposé par le Gouvernement est extrêmement intéressant, et il va dans le bon sens : celui d'une péréquation tant attendue par chacun d'entre nous.

M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau.

M. Roland Muzeau. Si notre collègue Guy Malherbe fait référence à l'amendement du Gouvernement qui nous a été distribué à l'instant, nous ne sommes pas tous traités à égalité, puisque nous ne le connaissons pas, et que je viens juste d'y jeter un oeil. Mais peut-être son intervention était-elle commandée ?

Concernant l'article 58, qui porte sur la réforme du fonds de péréquation, le président de l'association des maires Ville et banlieue, Claude Dilain, qui a l'expérience de maire d'une commune en grande difficulté, et qui est aujourd'hui sénateur, a dénoncé « une solidarité en trompe l'oeil, qui non seulement ne profitera pas aux territoires les plus en difficulté, mais qui, comble du cynisme, sera finalement en partie assurée par les communes les plus défavorisées. »

Mes chers collègues, au moment où nous parlons, les 250 communes DSU-cible sont sanctionnées. Telle est la réalité, et nous verrons comment, au cours de nos débats, ce fait évolue ou pas.

Rappelons que le budget de la politique de la ville a diminué de moitié en quatre ans, passant de 1,02 milliard d'euros à 548 millions.

M. Éric Raoult. Et la DRU !

M. Roland Muzeau. J'y viens, cher collègue. L'État s'est totalement désengagé de la rénovation urbaine, avec une baisse de 93 % des crédits. Le financement du PNRU représente aujourd'hui moins de 3 % de l'action de l'État en faveur des quartiers défavorisés.

L'État a supprimé les deux tiers des crédits au développement économique dans ces quartiers, soit une baisse de 62 %.

Le volet social n'est pas épargné. Depuis 2010, les moyens ont diminué de 21 % pour les associations de quartier ; de 35 % pour la culture ; de 18 % pour la prévention et la justice et de 23 % pour le volet santé.

Si la dotation de solidarité urbaine progresse en 2012 pour les 250 communes de plus de 10 000 habitants les plus défavorisées, ces communes sont par ailleurs sanctionnées, comme je viens de l'indiquer.

La création en 2012 du Fonds national de péréquation, qui devrait être doté d'un milliard d'euros en 2016, écarte de son bénéfice 130 communes. Certaines d'entre elles, et la majorité de celles qui appartiennent à des groupements intercommunaux, seront contributrices.

C'est par exemple le cas de ma ville de Gennevilliers, qui va contribuer à hauteur de 1,9 million d'euros en 2012. La contribution de ma commune sera plus forte que celle de Neuilly-sur-Seine. Rapportée à la population, chaque habitant de Gennevilliers paiera 45 euros, tandis que chaque habitant de Neuilly paiera 32 euros.

Où est l'équité ? Où est l'égalité ? Où est la justice ?

Sachez qu'à Neuilly on compte 3 % de logements sociaux. Il y en a 68 % dans ma commune. Le taux de chômage est de moins de 5 % à Neuilly, il est de 21 % dans ma commune. Et des statistiques aussi dures, s'agissant d'une commune populaire, mon collègue Éric Raoult les connaît également, bien que nous ne soyons pas toujours d'accord. Lorsqu'il était ministre de la ville, il est venu dans notre commune et a travaillé sur la question de la politique de la ville. Il sait que les chiffres que je donne et que la réalité que je décris sont incontestables, et ne constituent pas le prétexte à une joute politique. C'est une réalité que vous connaissez dans d'autres départements, et l'Île-de-France est malheureusement assez symbolique de cette situation.

M. Éric Raoult. Mon grand-père était dans votre fichier ! (Sourires.)

M. Roland Muzeau. Gennevilliers paiera donc plus que Neuilly, c'est la réalité de ce fonds de péréquation tel qu'il est aujourd'hui décidé. Nous devrons reparler de cela dans les minutes qui viennent.

Face à une telle aberration, nous vous demandons d'exclure explicitement des communes contributrices toutes celles qui sont éligibles à la DSU-cible, c'est-à-dire les 250 premières.

À défaut, nous vous demanderons de reporter d'un an la mise en oeuvre de ce dispositif, afin qu'une discussion sérieuse puisse être engagée sur le critère de charges assumées par les communes dans le calcul de la contribution à verser. Nous sommes aujourd'hui loin du compte, et nous sommes à quelques minutes de bâcler un dossier qui va amoindrir les finances communales de villes dont les populations sont déjà en très grande difficulté. Ce qui risque de se produire est extrêmement grave et ne peut pas être accepté sans être dénoncé.

Bien évidemment, c'est aussi le résultat d'un désengagement de l'État de son devoir régalien d'assurer l'égalité républicaine sur l'ensemble du territoire. Effectivement, quand on demande à des collectivités d'en soutenir d'autres au motif d'une péréquation qui viserait à plus d'égalité territoriale, cela revient à exonérer l'État de sa responsabilité première. Ce sont quelques-uns des effets désastreux de politiques de décentralisation qui ont été poussées, pour certaines d'entre elles et dans certains domaines, à l'extrême.

M. Jean-Louis Borloo, lorsqu'il était ministre, a participé à la modification des critères et des indices synthétiques pour la DSU, qui était un programme pluriannuel. Il serait bien que certains d'entre vous qui ont participé à ces débats se rappellent les engagements qui avaient été pris alors par le Gouvernement, et qui avaient été votés à la quasi-unanimité sur cette question.

M. le président. La parole est à M. François Pupponi.

M. François Pupponi. Nous vivons un moment historique pour tous les grands défenseurs de la péréquation depuis des années, et particulièrement de la péréquation horizontale. La péréquation verticale a fait l'objet d'évolutions importantes avec la DDSU, puis la DDU, puis un certain nombre d'autres fonds de péréquation qui ont permis aux communes les plus en difficulté de faire face à des problèmes sociaux sans cesse croissants.

Mais le grand débat qui a animé notre hémicycle ainsi que l'ensemble des associations d'élus depuis quelques années était de savoir comment nous pourrions mettre en oeuvre une péréquation horizontale, c'est-à-dire faire en sorte que les collectivités les plus aisées puissent aider les collectivités en grande difficulté.

L'Île-de-France a joué un rôle précurseur dans ce débat puisque, depuis de nombreuses années, il existe un fonds régional de péréquation pour l'Île-de-France dont nous parlerons à l'article 59.

L'article 58 qui nous est proposé, et en particulier l'amendement présenté par le Gouvernement tel que nous le découvrons à l'instant, a fait l'objet de discussions après le débat au Sénat, ainsi qu'avec l'ensemble des associations d'élus. Il est le fruit d'un travail collectif de l'Association des maires de France, de l'Association des maires des grandes villes et de l'Association des maires Ville et banlieue, et il va dans le bon sens.

Claude Dilain a critiqué le premier texte issu des débats de l'Assemblée nationale, en soulignant qu'il serait paradoxal qu'un certain nombre de communes en difficulté éligibles à la DDSU soient contributrices de ce fonds.

Le débat au Sénat a permis de faire en sorte que les communes éligibles à la DSU en soient exonérées et que l'on puisse intégrer des critères de charges. L'amendement du Gouvernement, que j'ai parcouru rapidement, semble le prendre en compte.

Le débat, comme notre collègue l'a fait remarquer à juste titre, consiste à savoir s'il faut exonérer les 150 premières éligibles ou aller jusqu'aux 250 premières. Le sous-amendement du rapporteur général permettra peut-être de trouver une porte de sortie.

Il serait paradoxal que des communes en difficulté, éligibles à la péréquation nationale, deviennent contributrices de la péréquation horizontale. Je pense que les amendements proposés permettent d'éviter cela. Malgré toutes les imperfections que l'on peut trouver, cela fera l'objet, j'en suis convaincu, d'une clause de revoyure en 2013 ; il me paraît impensable de reporter ce grand moment de la péréquation.

En effet, compte tenu du contexte politique de 2012, le report du texte sur l'article 58 -imaginé un moment au Sénat et abandonné ensuite - serait, nous en sommes persuadés, pour les villes de banlieue, un enterrement pur et simple de la péréquation, ce qui serait dramatique.

Nous présenterons des amendements pour améliorer le texte et faire en sorte que l'article 58 puisse voir le jour.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Christophe Baguet.

M. Pierre-Christophe Baguet. Je voudrais à mon tour remercier Mme la ministre et M. le rapporteur général pour leur écoute.

J'avais cité, lors de la première lecture, le cas de notre communauté d'agglomérations Grand Paris Seine-Ouest, où les prélèvements additionnés passaient de 11 millions d'euros à 37,5 millions d'euros. J'avais déposé des amendements, d'abord pour réduire le volume du SPIC d'un milliard d'euros, et ensuite pour l'étaler dans le temps.

Madame la ministre, vous aviez alors accepté d'ajouter une année à la montée en puissance du SPIC et refusé la répartition du volume par tranches de 200 millions d'euros sur le milliard.

Je le répète, même si nos communes sont dynamiques, nous ne sommes pas contre le fait de payer, soyons clairs. Mais nous souhaitons que ce soit étalé dans le temps et que cela se fasse de manière raisonnable. Vous aviez alors accepté une partie de nos amendements.

L'amendement que vous venez de proposer, madame la ministre, répond en très grande partie à nos revendications. Mais je voudrais vous demander encore un petit effort. Premièrement, ne pourrait-on pas ajouter une année supplémentaire à l'étalement, et passer de cinq à six ans ?

Deuxièmement, je voudrais appeler votre attention, sur un point. Vous l'avez abordé lorsque vous avez évoqué une possibilité de répartition à l'intérieur du bloc communal des sommes à payer. Vous avez parlé de majorité qualifiée. Je pense que nous sommes suffisamment responsables, au sein de nos communautés d'agglomérations, pour nous débrouiller entre nous. On pourrait peut-être nous donner un peu plus de souplesse, pour que, dans le cadre du bloc communal, entre certaines communes, des solutions moins contraignantes que la majorité qualifiée puissent être trouvées. Si l'on prend l'exemple de deux communes plutôt aisées, qui s'associeraient à une troisième plus modeste, ce serait cette dernière qui supporterait la totalité du SPIC dans le cas où les deux premières seraient assujetties au SDRIF. Je pense que l'on peut compter sur l'esprit de responsabilité des élus locaux que nous sommes pour s'organiser.

Je voudrais insister sur le fait que nous aurons vraiment besoin d'un rapport en 2012. Je n'ai pas eu le temps de parcourir l'amendement, j'espère que la précision y figure, je sais que cela a été demandé par le Sénat. Le rapporteur général, dans sa grande sagesse l'a revendiqué aussi. Il serait essentiel que l'on puisse faire le point avant le projet de loi de finances pour 2013.

Votre amendement, madame la ministre, tient à nos yeux parfaitement la route, même s'il est contraignant. Pour notre communauté d'agglomération, le coût de l'amendement sera de 5,2 millions d'euros. Nous sommes prêts à verser cette somme en une année supplémentaire, mais on ne peut aller au-delà. Ne touchons pas à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Éric Raoult.

M. Éric Raoult. Monsieur le président, il y a des moments où l'on est fier d'être parlementaire. Il y a des moments aussi où l'on est gêné d'avoir accordé toute sa confiance à ses collègues, à un gouvernement, et de se retrouver dans une situation où l'on a un peu l'impression d'être trompé.

Sur le dossier de la péréquation financière, il y a ceux qui disent : « Pourquoi tu la ramènes, cela fait trois ans qu'on en parle ? », et d'autres qui font allusion aux structures d'élus. Je suis dans le seul département qui n'a pas d'association de maires. Étant membre de la commission des affaires étrangères, je ne siège plus à la commission des finances, mais je ne croyais pas que ce que nous vivons aujourd'hui nous arriverait.

Nous allons nous prononcer sur une nécessité, une impression, mais non sur une réalité.

Ceux en qui nous mettions notre confiance nous ont laissés tomber. Or ils connaissent le climat qui pouvait exister ici en 2000. Madame la ministre, je suis parlementaire depuis vingt-cinq ans, j'ai connu un accident du travail durant cinq ans, dû à une triangulaire, mais j'ai aussi la particularité d'avoir été présent lors du débat sur la loi Gayssot. Je crois me retrouver, chers collègues communistes, dans le débat sur cette loi. Certains pouvaient s'exprimer, d'autres ne le pouvaient pas, parce qu'ils étaient traités d'égoïstes.

Je voudrais dire à l'un de nos collègues, en le regardant droit dans les yeux : « Nous avons partagé tous les combats. Mais on aurait pu mener celui-là autrement. » Nous allons nous prononcer aujourd'hui sur des chiffres que nous n'avons pas. Nous allons nous prononcer - pour un certain nombre de communes, après avoir subi le texte Gayssot, la critérisation, madame la ministre -, hommes de droite, sur des logiques de gauche.

C'est la raison pour laquelle, aujourd'hui, on ne peut pas vraiment être fier de ce que nous allons faire tout à l'heure. On aurait pu s'y prendre autrement, procéder à un peu de concertation.

Madame la ministre, même Jean- Claude Gayssot m'avait téléphoné pour me dire : « Je suis désolé, tu vas être inclus dans la liste. » Aujourd'hui, nous n'avons même pas la liste. C'est la raison pour laquelle je voudrais vous dire que, dans ce débat, un certain nombre d'entre nous sont des sarkozystes blessés. Lorsque nous aurons l'occasion de voir le chef de l'État, nous lui dirons qu'on lui fait faire une bêtise en essayant de persuader nos collègues de province que faire maigrir les gros permet aux minces d'être mieux portants.

Mes chers collègues de la majorité, je ne voterai pas ce budget et je m'interroge sur mon maintien dans mon groupe parlementaire.

M. le président. La parole est à M. Serge Grouard.

M. Serge Grouard. Madame la ministre, M. Raoult a modifié l'apparence de consensus qui semblait se dégager sur nos bancs quant à cette péréquation.

M. Gérard Bapt. Il faut changer de lunettes !

M. Serge Grouard. Je vais en rajouter, parce que je ne veux pas laisser croire, en tout cas je le perçois ainsi, qu'il y aurait un consensus, voire une unanimité de l'ensemble des collectivités territoriales et des maires. Certains d'entre vous le perçoivent ainsi mais ce n'est pas mon cas. La vérité se situe peut-être quelque part entre les deux.

On est en train de brouiller le message. Péréquation, oui ! Mais qui ? J'ai une logique simple : la péréquation financière au plan national relève naturellement, logiquement de l'État. Il existe un certain nombre de mécanismes, comme cela a été rappelé tout à l'heure, qui le permettent. L'exemple de la DSU a été cité, on peut prendre celui de la DGF, tous les mécanismes de financement de l'État vers les collectivités territoriales, et notamment vers les communes. C'est clair, simple et net.

Dans la loi de finances, vous venez d'ajouter une autre logique, qui se nomme toujours péréquation. On a donc l'impression qu'il s'agit de la même chose et que c'est bien. Mais ce n'est plus la même. Des communes seront ponctionnées au profit d'autres qui vont recevoir. On prend à certains endroits, avec un certain nombre de critères, pour reverser à d'autres.

Je considère, et je brise le consensus apparent, que ce n'est pas logique. C'est à l'État d'assumer cette fonction-là. Il dispose des outils pour cela. Pourquoi complexifier ce système alors que tous nos concitoyens et les élus locaux que nous sommes demandent des choses simples, claires et pérennes, qui permettent de fonder nos budgets, nos investissements, nos programmations ? Là, le message est brouillé.

Je ne comprends pas cette péréquation horizontale, alors qu'il existe une péréquation verticale qui fonctionne. Si l'on veut renforcer la péréquation verticale, faisons-le. Mais pourquoi avoir proposé un truc encore plus compliqué que les autres ? Alors que nous passons notre temps à réclamer des simplifications, nous complexifions à souhait.

Quels sont les effets pervers de ce dispositif. 75 % des investissements publics, hors défense, sont réalisés par les collectivités territoriales, et la majorité de ceux-ci par les communes. Mes chers collègues, dans vos budgets communaux, vous dégagez un autofinancement qui se traduit par la différence entre vos recettes et vos dépenses de fonctionnement. L'autofinancement nourrit l'investissement sans accroître la dette. Dès lors qu'il est suffisant, c'est parfait. Ces investissements permettent la modernisation de notre pays. La part du gâteau France est variable, elle grandit, diminue. Nous voulons tous qu'elle augmente. Il faut bien que ceux qui font le gâteau en cuisine disposent des ingrédients. À partir de quoi obtiennent-ils ces éléments ? De l'autofinancement ! Je ne suis pas d'accord avec la mécanique qui consiste à ponctionner les communes qui contribuent largement à l'investissement de notre pays au profit éventuellement d'autres, dont les recettes versées par cette péréquation - vous me direz que je verse peut-être dans le procès d'intention, mais ce n'est pas mon genre, vous le savez - vont alimenter un peu plus des dépenses de fonctionnement.

Je prends le pari devant vous et j'espère me tromper, qu'au total l'investissement diminuera. Dès lors que le montant de cette péréquation grandira, l'investissement diminuera sans doute, mais pas de manière proportionnelle. Or, aujourd'hui notre pays a besoin d'investir pour se moderniser. J'ai entendu, ici ou là, dire que cette péréquation suivait quelques grands axes. Je vais schématiser, pour raisonner en tendance : un peu de Paris Île-de-France vers la province et de villes vers la campagne. Au sein de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire, que j'ai l'honneur de présider, nous constatons les plus grandes difficultés - c'est un élu de province qui parle, je ne suis donc pas partisan - pour financer les transports dans la région parisienne.

Je veux bien, mais on va prendre, notamment à Paris - vous voyez, chers collègues, je défends Paris -, pour mettre ailleurs, alors que Paris, la région Île-de-France et l'État ne parviennent pas à financer le schéma des infrastructures de transport. Qui peut dire le contraire ? Personne !

Et pour ce qui est des villes, je ne suis pas opposé à une péréquation sur les charges de centralité. Je peux même mettre tous les critères possibles à votre disposition.

J'en termine, monsieur le président, mais il s'agit d'un dossier de fond que nous abordons pour la première fois.

M. le président. C'est la raison pour laquelle vous avez pu amplement vous exprimer.

M. Serge Grouard. Merci, monsieur le président. Ne voulant pas abuser de votre bienveillance, je vais conclure.

Même si l'on entrevoyait des critères de calcul objectifs permettant d'aboutir à une cohérence, il n'en demeure pas moins que ces critères frôlent l'absurde. Comment se fait-il que des villes éligibles à la DSU - qui sont aidées parce qu'elles ont des charges particulières - se voient appeler au financement de la péréquation ?

M. François Pupponi. Ce n'est plus le cas.

M. Serge Grouard. Si j'ai bien compris, ce sont les premières villes éligibles à la DSU qui en seraient écartées.

Je remercie le rapporteur général pour ses efforts qui ont permis de parvenir à une meilleure solution. Mais un tel sujet mériterait une très large concertation, un tour de France avec les représentants des associations des élus locaux, voire l'ensemble des élus locaux. Je trouverais du reste logique que les préfets puissent être mandatés sur ce sujet et réunissent tous les élus concernés, présentent les chiffres, organisent la discussion afin d'aboutir à un dispositif beaucoup plus satisfaisant que celui qui nous est, hélas, proposé.

M. Éric Raoult. Très bien !

M. le président. La parole est à M. François Loncle.

M. François Loncle. Après cette intéressante intervention, je rejoindrai - et j'espère que cela ne le surprendra pas - mon collègue Éric Raoult sur un point,...

M. Éric Raoult. Tu me mouilles ! (Sourires.)

M. François Loncle. ...à savoir le manque d'information des élus locaux et des députés des circonscriptions concernées.

M. Éric Raoult. C'est le moins qu'on puisse dire !

M. François Loncle. Voilà un mois que j'essaie de savoir quel est le sort qui va être réservé à la ville nouvelle de Val-de-Reuil, dans ma circonscription, par rapport à ce projet ! Et voilà un mois que ni les services de M. Richert, ni ceux de M. Maurice Leroy, d'habitude beaucoup plus communicant, n'ont daigné m'informer de quoi que ce soit. Ce qui m'amène à penser qu'il y a anguille sous roche, qu'il y a quelque chose qu'on ne veut pas dire !

M. Éric Raoult. Si c'est flou, il y a un loup ! (Sourires.)

M. François Loncle. Par exemple !

Il y a donc quelque chose qui ne va pas dans le fonctionnement du Parlement, et un manque de respect du Gouvernement à l'égard des élus de circonscriptions, de villes qui ont des problèmes. Je voulais ajouter ma voix à celles qui viennent de s'exprimer.

M. le président. La parole est à M. Michel Piron.

M. Michel Piron. D'où partons-nous ? D'un paysage des collectivités locales qui, compte tenu de l'émiettement considérable des collectivités dans notre pays, est caractérisé par des inégalités territoriales considérables. Je citerai deux chiffres.

L'écart entre les dix communes qui ont le potentiel financier le plus élevé et les dix communes qui ont le potentiel le plus faible est de 1 à 122. Si je prends un périmètre un peu plus large, celui des EPCI, et que je procède à la même comparaison, l'écart se réduit heureusement grâce au périmètre, mais il est encore de 1 à 52. Tel est le constat de départ : une inégalité territoriale considérable dans le pays dit de l'égalité, et où l'on me dit que la péréquation verticale qui existe depuis toujours suffirait à corriger ces inégalités.

M. Roland Muzeau. Personne ne dit cela ! Il faut l'améliorer !

M. Michel Piron. J'ai dit « suffirait », monsieur Muzeau. Mais, de toute évidence, elle n'y parvient pas.

Première observation découlant de ce constat : j'entends dire que le dossier aurait été précipité, voire bâclé. Il y a des années, chers collègues, que nous parlons de ce sujet, à telle enseigne qu'en 2003 le mot de péréquation a été inscrit dans la loi pour la première fois, en distinguant péréquation verticale et horizontale.

Deuxième observation : quand on parle de la péréquation horizontale que l'on essaie, enfin, de promouvoir, de quoi s'agit-il par rapport à l'ensemble des dotations de l'État aux collectivités ? De 2 %, l'objectif étant de parvenir à un milliard d'euros en cinq ans, en partant de 250 millions.

Vous noterez qu'un « effort de moindre solidarité » a déjà été consenti dans un premier temps pour passer de 250 à 200 et maintenant à 150 millions, c'est-à-dire beaucoup moins. Nous en sommes à 1,2 ou 1,3 %. Voilà la dose de solidarité horizontale que l'on propose !

Observation complémentaire : je n'opposerai pas complètement péréquation horizontale et verticale. J'ai bien écouté Serge Grouard, mais comment fonctionne la péréquation horizontale ? Par le biais d'une mutualisation nationale, c'est-à-dire une certaine verticalité qui retombera ensuite sur les collectivités dont je viens de signaler les écarts entre celles qui sont le plus et le moins dotées. Je tiens évidemment compte de ce qui a été dit pour partie concernant les collectivités touchées par la DSU. À cet égard, il est tout à fait normal que des amendements complémentaires apportent des corrections.

Troisième observation : les critères retenus ont été plus que discutés par les associations d'élus locaux - AMF, ADCF. Nous avons travaillé, à de multiples reprises, au sein de commissions, au demeurant avec M. Pupponi.

Les critères retenus tiennent compte de la situation des communes relativement riches qui ont des populations pauvres. Cela existe et c'est la raison pour laquelle le critère de revenus des populations à 60 % a été retenu. Ces critères ont été très largement pensés et discutés. On a même pensé au cas des communes riches dans des communautés pauvres, ou des communes pauvres dans des communautés riches. Ces cas font également l'objet de quelques amendements complémentaires, que le Gouvernement a bien voulu retenir, ce dont je le remercie.

Qui parmi nous, par rapport aux difficultés économiques et financières considérables qui sont encore devant nous, oserait refuser la solidarité entre nos collectivités pour un si faible pourcentage, la solidarité que, par ailleurs, nous demandons à l'État, lui-même extraordinairement contraint ?

M. Roland Muzeau. Incroyable !

M. Michel Piron. Le débat n'est pas entre l'Île-de-France et la province, et c'est tant mieux. Mais l'Île-de-France, c'est 20 % de la population française et 33 % de la valeur ajoutée. Tant mieux pour l'Île-de-France. Je ne confonds pas tout : je sais aussi qu'il y a des solidarités à l'intérieur de l'Île-de-France et entre l'Île-de-France et le reste de l'hexagone. Cela ne me choque pas.

Pour ma part, je salue la péréquation horizontale et je rappelle que nous avons été touchés au minimum de ce qu'il faut maintenir si l'on veut avoir un message cohérent : solidarité verticale, certes, mais solidarité entre nous aussi !

M. Jean-Pierre Schosteck. Très bien !

M. le président. L'amendement n° 354 présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

« I. - A. - Au titre III du livre III de la deuxième partie du code général des collectivités territoriales, le chapitre VI devient le chapitre VII et comprend les articles L. 2336-1, L. 2336-2 et L. 2336-3, qui deviennent, respectivement, les articles L. 2337-1, L. 2337-2 et L. 2337-3.

« B. - Au même titre III, il est rétabli un chapitre VI ainsi rédigé :

« Chapitre VI

« Péréquation des ressources

« Art. L. 2336-1. - I. - À compter de 2012, il est créé, à destination des communes et établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, un Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales.

« II. - 1. Les ressources de ce fonds national de péréquation en 2012, 2013, 2014 et 2015 sont fixées, respectivement, à 150, 360, 570 et 780 millions d'euros. À compter de 2016, les ressources du fonds sont fixées à 2 % des recettes fiscales des communes et de leurs groupements dotés d'une fiscalité propre.

« 2. Les ressources fiscales mentionnées au 1 correspondent pour les communes à celles mentionnées au 1° du a de l'article L. 2331-3 et, pour les établissements publics de coopération intercommunale dotés d'une fiscalité propre, à celles définies au premier alinéa du 1° de l'article L. 5214-23 s'agissant des communautés de communes, au 1° de l'article L. 5215-32 s'agissant des communautés urbaines et des métropoles et au premier alinéa du 1° de l'article L. 5216-8 s'agissant des communautés d'agglomération.

« Les ressources retenues sont les ressources brutes de la dernière année dont les résultats sont connus.

« III. - Pour la mise en oeuvre de ce fonds national de péréquation, un ensemble intercommunal est constitué d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre et de ses communes membres au 1er janvier de l'année de répartition des ressources dudit fonds.

« Art. L. 2336-2 . - I. - À compter de 2012, le potentiel fiscal agrégé d'un ensemble intercommunal est déterminé en additionnant les montants suivants :

« 1° Le produit déterminé par l'application aux bases d'imposition communales de la taxe d'habitation, de la taxe foncière sur les propriétés bâties et de la taxe foncière sur les propriétés non bâties du taux moyen national d'imposition à chacune de ces taxes ;

« 2° La somme :

« a) Du produit déterminé par l'application aux bases d'imposition communales de cotisation foncière des entreprises du taux moyen national d'imposition à cette taxe ;

« b) Et des produits de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, des impositions forfaitaires sur les entreprises de réseaux, de la taxe additionnelle à la taxe foncière sur les propriétés non bâties prévus aux articles 1379 et 1379-0 bis du code général des impôts, ainsi que de la taxe sur les surfaces commerciales prévue au 6° de l'article L. 2331-3 du présent code perçus par le groupement et ses communes membres ;

« 3° La somme des montants positifs ou négatifs résultant de l'application des 1.1 et 2.1 de l'article 78 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010 perçus ou supportés par le groupement et ses communes membres l'année précédente ;

« 4° La somme des produits perçus par le groupement et ses communes membres au titre du prélèvement sur le produit des jeux prévu aux articles L. 2333-54 à L. 2333-57, de la surtaxe sur les eaux minérales prévue à l'article 1582 du code général des impôts et de la redevance communale des mines prévue à l'article 1519 du même code ;

« 5° Les montants perçus l'année précédente par les communes appartenant au groupement au titre de leur part de la dotation forfaitaire définie au 3° de l'article L. 2334-7 du présent code, hors le montant correspondant à la compensation prévue au 2° bis du II de l'article 1648 B du code général des impôts, dans sa rédaction antérieure à la loi de finances pour 2004 (n° 2003-1311 du 30 décembre 2003), et par le groupement au titre de la dotation de compensation prévue à l'article L. 5211-28-1 du présent code, hors le montant correspondant à la compensation prévue au 2° bis du II de l'article 1648 B du code général des impôts, dans sa rédaction antérieure à la loi de finances pour 2004 précitée.

« Les bases retenues sont les bases brutes de la dernière année dont les résultats sont connus servant à l'assiette des impositions communales. Les produits retenus sont les produits bruts de la dernière année dont les résultats sont connus. Les taux moyens nationaux retenus sont ceux constatés lors de la dernière année dont les résultats sont connus.

« Le potentiel financier agrégé d'un ensemble intercommunal est égal à son potentiel fiscal agrégé, majoré de la somme des dotations forfaitaires définies à l'article L. 2334-7 du présent code perçues par les communes membres l'année précédente, hors la part mentionnée au 3° du même article. Il est minoré, le cas échéant, des prélèvements sur le produit des impôts directs locaux mentionnés au dernier alinéa du même article L. 2334-7 et au III de l'article L. 2334-7-2 et réalisés l'année précédente sur le groupement et ses communes membres.

« Le potentiel fiscal et le potentiel financier des communes n'appartenant à aucun établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre sont calculés selon les modalités définies à l'article L. 2334-4.

« II. - Pour les ensembles intercommunaux et les communes n'appartenant à aucun groupement à fiscalité propre de la région d'Île-de-France, le potentiel financier agrégé ou le potentiel financier est minoré ou majoré, respectivement, de la somme des montants prélevés ou perçus l'année précédente par les communes en application des articles L. 2531-13 et L. 2531-14.

« III. - Le potentiel financier agrégé par habitant d'un ensemble intercommunal et le potentiel financier par habitant d'une commune n'appartenant à aucun groupement à fiscalité propre sont égaux, respectivement, au potentiel financier agrégé de l'ensemble intercommunal et au potentiel financier de la commune calculé selon les modalités de l'article L. 2334-4, divisés par le nombre d'habitants constituant la population de cet ensemble ou de la commune, corrigé par un coefficient logarithmique dont la valeur varie de 1 à 2 en fonction de la population de l'ensemble ou de la commune dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État.

« IV. - Le potentiel financier agrégé moyen par habitant est égal à la somme des potentiels financiers agrégés des ensembles intercommunaux et des potentiels financiers des communes n'appartenant à aucun groupement à fiscalité propre rapportée à la somme des populations des ensembles intercommunaux et des communes n'appartenant à aucun groupement à fiscalité propre, corrigées par les coefficients définis au III.

« V. - L'effort fiscal d'un ensemble intercommunal est déterminé par le rapport entre :

« 1° D'une part, la somme des produits des impôts, taxes et redevances, tels que définis à l'article L. 2334-6, perçus par l'établissement public de coopération intercommunale et ses communes membres au titre de la dernière année dont les résultats sont connus servant à l'assiette des impositions communales ;

« 2° D'autre part, la part du potentiel fiscal agrégé visée au 1° du I du présent article.

« L'effort fiscal d'une commune n'appartenant à aucun établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre est calculé dans les conditions prévues aux trois premiers alinéas de l'article L. 2334-5.

« VI. - L'effort fiscal moyen est égal à la somme des produits des impôts, taxes et redevances, tels que définis à l'article L. 2334-6, perçus par les ensembles intercommunaux et les communes n'appartenant à aucun établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre rapportée à la somme des montants pris en compte au dénominateur du calcul de leur effort fiscal.

« Art. L. 2336-3 . - I. - Le Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales est alimenté par un prélèvement sur les ressources fiscales des ensembles intercommunaux et des communes n'appartenant à aucun groupement à fiscalité propre de métropole et des départements d'outre-mer à l'exception du Département de Mayotte, selon les modalités suivantes :

« 1° Sont contributeurs au fonds :

« a) Les ensembles intercommunaux dont le potentiel financier agrégé par habitant, tel que défini à l'article L. 2336-2, est supérieur à 90 % du potentiel financier agrégé moyen par habitant ;

« b) Les communes n'appartenant à aucun groupement à fiscalité propre dont le potentiel financier par habitant, tel que défini au même article L. 2336-2, est supérieur à 90 % du potentiel financier agrégé moyen par habitant ;

« 2° Le prélèvement calculé afin d'atteindre chaque année le montant prévu au II de l'article L. 2336-1 est réparti entre les ensembles intercommunaux et les communes n'appartenant à aucun groupement à fiscalité propre mentionnés au 1° du présent I en fonction de l'écart relatif entre le potentiel financier agrégé par habitant de l'ensemble intercommunal ou le potentiel financier par habitant de la commune, d'une part, et 90 % du potentiel financier agrégé moyen par habitant, d'autre part, multiplié par la population de l'ensemble intercommunal ou de la commune ;

« 3° La somme des prélèvements opérés en application du 2° du présent article et de ceux supportés par les communes en application de l'article L. 2531-13 au titre de l'année précédente ne peut excéder, pour chaque ensemble intercommunal ou chaque commune mentionnés au 1° du présent I, 10 % du produit qu'ils ont perçu au titre des ressources mentionnées aux 1° à 5° du I de l'article L. 2336-2.

« 4° Le prélèvement calculé pour chaque ensemble intercommunal conformément au 2° du présent I est réparti entre l'établissement public de coopération intercommunale et ses communes membres au prorata de leur contribution au potentiel fiscal agrégé majorée ou minorée des attributions de compensation reçues ou versées par l'établissement public de coopération i

La parole est à Mme la ministre pour présenter l'amendement n° 354, qui fait l'objet de plusieurs sous-amendements, n os 357, 358 et 356.

Mme Valérie Pécresse, ministre . Permettez-moi d'abord de revenir à l'origine de ce dispositif. Tout remonte à la réforme de la taxe professionnelle, ne l'oublions pas.

La réforme de la taxe professionnelle en 2010 répondait à une absolue nécessité pour les territoires. Cette taxe, qui pesait sur les investissements et les salaires, désormais surtout sur les investissements, était extraordinairement préjudiciable à nos entreprises industrielles, voire au développement de nos PME.

M. Daniel Paul. Faux !

Mme Valérie Pécresse, ministre . Le Gouvernement a décidé de réformer la taxe professionnelle, acte courageux s'il en est, car cela faisait vingt-cinq ans qu'on en parlait, mais que personne ne voulait le faire. Acte décisif aussi pour la compétitivité à terme de l'industrie et des PME françaises, pour accroître leurs capacités d'investissement. Mais la nouvelle contribution sur la valeur ajoutée des entreprises - la CVAE - a une concentration plus forte, il faut le reconnaître, en Île-de-France que dans les territoires, et dans les grandes agglomérations que dans les territoires ruraux.

On permet au tissu économique des territoires ruraux de demeurer et, on l'espère, de prospérer. Néanmoins, on concentre une ressource extrêmement dynamique sur des communes qui sont très largement franciliennes.

Voyant cela, les parlementaires s'en sont émus et ont demandé au Gouvernement - souvenons-nous qu'il s'agit d'une demande parlementaire - de prendre dans la loi de finances pour 2011 l'engagement de présenter un rapport pour examiner les conséquences de la réforme de la taxe professionnelle et pour élaborer un mécanisme de péréquation qui permettrait de protéger les communes les plus pauvres et celles qui auront le moins de ressources. D'où l'idée de la péréquation intercommunale. Il ne s'agissait pas d'un projet du Gouvernement, mais de corriger des inégalités qui sont apparues à cause d'une bonne réforme, celle de la taxe professionnelle.

Engagement du Gouvernement à déposer un rapport. Travail important - je parle sous le contrôle du rapporteur général - au Comité des finances locales pour essayer de réfléchir au principe de la péréquation. Pour ma part, j'accepterai toutes les critiques sur la péréquation, et vous savez que je suis une ministre qui a été élue en Île-de-France, mais je n'accepterai pas celle du manque d'information.

M. François Loncle. Oh !

Mme Valérie Pécresse, ministre . Claude Guéant et Philippe Richert ont donné les informations avant même la première lecture. La preuve en est que M. Baguet, ici présent, est arrivé, en première lecture, avec l'intégralité des chiffres, commune par commune, de son intercommunalité, et bien décidé à batailler ligne à ligne sur chaque chiffre. De la même façon que les élus de Paris sont arrivés, eux aussi, avec tous les chiffres.

M. Guy Malherbe. Absolument !

Mme Valérie Pécresse, ministre . On ne peut pas dire qu'on n'a pas eu l'information...

M. François Loncle. C'est mon cas !

Mme Valérie Pécresse, ministre . ...alors que des parlementaires ont, pendant des heures, détaillé les conséquences de ces nouveaux mécanismes pour leurs communes. En réalité, le Gouvernement a communiqué les informations.

M. François Loncle. De manière sélective, alors !

Mme Valérie Pécresse, ministre . Le mécanisme comportait des défauts. La montée en charge du dispositif était certainement trop brutale, j'en suis persuadée. Il était également indispensable de prévoir une clause de revoyure pour faire le bilan, compte tenu de la complexité du dispositif, je le reconnais volontiers, monsieur Grouard.

M. Serge Grouard. Dans votre grande sagesse !

Mme Valérie Pécresse, ministre . S'il ne tenait qu'à moi, je serais pour une réforme beaucoup plus radicale de l'organisation des collectivités territoriales dans notre pays. Je l'ai dit et répété à de nombreuses reprises.

M. Roland Muzeau. Vous le ferez quand vous serez au Gouvernement !

Mme Valérie Pécresse, ministre . La solidarité gouvernementale prévaut et nous sommes dans une démocratie parlementaire. (Sourires.)

Reste que, s'il ne tenait qu'à moi, il y aurait une simplification bien plus grande.

M. Serge Grouard. Je le note.

Mme Valérie Pécresse, ministre . Malheureusement, nous sommes dans un système où il faut faire preuve de pragmatisme.

Par son amendement, le Gouvernement propose d'améliorer le dispositif tel qu'il vous a été présenté en première lecture.

D'abord, nous avons accepté de reporter d'un an l'objectif cible du fonds qui représentera 2 % de la fiscalité locale, soit 1 milliard d'euros, quand il sera mis en place.

En ligne avec la proposition du rapporteur général, l'amendement abaisse cet objectif à 150 millions d'euros en 2012, au lieu des 250 millions prévus, afin d'atténuer l'impact du prélèvement des collectivités contributrices pour sa première année de mise en oeuvre.

Ensuite, nous introduisons une clause de revoyure en raison du caractère inédit de ce dispositif : il est indispensable que nous puissions, si nécessaire, en revoir le fonctionnement à l'issue d'une première année de répartition. En vertu de cette clause, nous rediscuterons fin 2012, puis un rapport sera déposé le 1 er octobre 2012, date compatible avec le délai de dépôt de la loi de finances pour 2013.

Troisième amélioration : un nouveau calcul des conditions d'application du potentiel financier de référence. Pour appliquer le seuil à partir duquel une collectivité se voit appliquer un prélèvement sur ses ressources, le Gouvernement avait proposé de regrouper les collectivités par strates de population, au risque d'engendrer des effets de seuil entre collectivités de populations voisines.

Afin de lever cette difficulté qui a été immédiatement identifiée, le présent amendement propose d'utiliser une formule de progression croissante - c'est-à-dire logarithmique - comme l'ont suggéré les sénateurs : il n'y a plus d'effets de seuil, mais une évolution en fonction de la population.

Quatrième amélioration : nous excluons du mécanisme de péréquation les 150 premières communes éligibles à la DSU cible. Il était quand même un peu paradoxal et contradictoire que des communes éligibles à la DSU, donc particulièrement fragiles, se retrouvent contributrices du fonds de péréquation pour la simple raison qu'elles font partie d'une intercommunalité elle-même contributrice.

M. Serge Grouard. On voit bien que c'est complètement aberrant !

M. Roland Muzeau. C'est le seuil qui n'est pas bon !

Mme Valérie Pécresse, ministre . Pour corriger cet effet, l'amendement propose l'exclusion des 150 premières communes éligibles à la DSU de tout prélèvement, celui-ci étant pris en charge par le niveau intercommunal. Une commune éligible à la DSU peut être dans une intercommunalité extrêmement riche, monsieur Grouard, et j'ai des exemples en tête.

M. Serge Grouard. Pourquoi les 150 et pas les 200 ou 250 premières ?

Mme Valérie Pécresse, ministre . Cinquième amélioration : le nombre de collectivités éligibles. Le texte prévoyait jusqu'à présent que la moitié des ensembles intercommunaux et des communes isolées bénéficieraient du FPIC, c'est-à-dire qu'il y aurait 2 000 bénéficiaires sur 4 000 blocs territoriaux.

Or, la réforme intercommunale pourrait entraîner une forte baisse de ce nombre, et donc la sortie du dispositif d'établissements intercommunaux et de communes dont la situation n'aurait pas foncièrement changé.

Pour résoudre cette difficulté, l'amendement propose de comptabiliser séparément les ensembles intercommunaux et les communes isolées. Il propose de retenir 60 % des ensembles intercommunaux ainsi que les communes isolées dont l'indice synthétique de ressources et de charges est supérieur à l'indice médian. Bien entendu, l'analyse de l'impact de l'évolution de l'intercommunalité sur le fonds de péréquation fera partie des principaux points de la clause de rendez-vous.

Sixième amélioration : la répartition locale des prélèvements et des reversements. Le présent amendement prévoit une mesure cruciale demandée par M. Baguet : la possibilité pour une intercommunalité de revoir la répartition des prélèvements et des reversements entre l'intercommunalité et les communes, afin de mieux tenir compte des spécificités locales. Dans un souci de simplicité et de cohérence, il est proposé que cette révision se fasse à la majorité des deux tiers de l'organe délibérant de l'établissement public...

M. Pierre-Christophe Baguet. La majorité qualifiée !

Mme Valérie Pécresse, ministre . ...de façon à ce qu'il n'y ait pas de blocage.

M. Pierre-Christophe Baguet. Alors il faut une majorité simple !

Mme Valérie Pécresse, ministre . Les critères retenus sont les mêmes que ceux utilisés pour la dotation de solidarité communautaire.

Enfin, dernière amélioration : afin de mieux prendre en compte les critères de charges dans la redistribution, l'amendement retient une meilleure pondération du critère du revenu moyen par habitant déjà adopté au Sénat, qui passe à 60 %.

Dans l'indice synthétique, le revenu moyen par habitant compterait donc pour 60 %, le potentiel financier pour 20 % et l'effort fiscal pour 20 %.

M. le président. Le sous-amendement n° 357 présenté par M. Raoult, est ainsi libellé :

À la première phrase de l'alinéa 6, substituer aux mots :

« 150, 360, 570 et 780 »,

les mots :

« 100, 250, 500 et 750 ».

La parole est à M. Éric Raoult, pour présenter le sous-amendement n° 357.

M. Éric Raoult. Madame la ministre, j'ai cru comprendre que nous étions quasiment tous pour la péréquation, certains étant des « durs » de la péréquation et d'autres simplement désireux de l'essayer.

Sans vouloir être désagréable, ce texte a été basé sur une très large concertation, mais en pleine élection sénatoriale...

M. Michel Piron. C'est reparti !

M. Éric Raoult. Monsieur Piron, je vous ai écouté même si vos propos ne m'intéressaient pas, alors essayez de faire la même chose. (Protestations sur plusieurs bancs.)

M. le président. Monsieur Raoult, la correction entre collègues est de mise, et je suis sûr que vous êtes un parlementaire suffisamment expérimenté pour respecter cette règle, malgré la gravité du sujet.

M. Éric Raoult. Alors, monsieur le président, rappelez à l'ordre les collègues qui interrompent les autres !

M. le président. Sans doute, mais je vais essayer d'exercer la présidence comme vous l'avez fait par le passé. Je vous invite à reprendre votre propos qui, lui, est intéressant.

M. Éric Raoult. Merci monsieur le président.

M. Michel Piron. C'est affligeant !

M. Éric Raoult. Madame la ministre, j'ai pensé que le mot « expérimentation » - que nous avons souvent entendu au cours des derniers jours - pourrait s'appliquer à un exemple précis. Nous sommes utiles ici parce que nous représentons un morceau du territoire.

À l'intention du rapporteur général notamment, je voudrais présenter un cas pratique : comment fait-on pour voter son budget le 18 décembre si l'on ne dispose pas encore des données chiffrées de l'année 2012 ?

Ce texte qu'on vous fait défendre est tout de même assez inédit, madame la ministre. Dans ce texte sur les collectivités locales, les communes contributrices ne sont pas informées du sort qui va leur être réservé. Je siège ici depuis vingt-cinq ans, à peu près le même nombre d'années que le rapporteur général, mais c'est la première fois que nous vivons cela.

Dans une collectivité locale, on peut trouver 100 000 euros ; on peut difficilement trouver 200 000 euros. J'invite les différents collaborateurs de la ministre qui ont préparé ce texte à passer une journée avec les membres de ma commission des finances, que je dois réunir avant le 18 décembre, car, en l'occurrence, je ne sais pas faire.

C'est la raison pour laquelle mon sous-amendement de repli propose que les ressources du Fonds national de péréquation soient ramenées à 100 millions d'euros, alors que l'amendement gouvernemental tend à les faire passer de 250 à 150 millions d'euros.

Vous connaissez, madame la ministre, la formule qu'utilise volontiers le chef de l'État : « Il ne faut jamais pousser un chat dans un coin. » Eh bien, il ne faut pas non plus pousser les parlementaires de la majorité dans un coin, à la veille de l'élection présidentielle.

M. le président. Le sous-amendement n° 358 présenté par M. Muzeau, est ainsi libellé :

À la seconde phrase de l'alinéa 6, substituer au nombre :

« 150 »

le nombre :

« 250 ».

La parole est à M. Roland Muzeau, pour présenter le sous-amendement n° 358.

M. Roland Muzeau. Nous voyons bien que cet article nécessite un débat poussé, pour des raisons déjà évoquées et d'autres que je vais essayer d'exposer.

L'application de ce texte rendrait la politique de l'État - je ne parle pas du Gouvernement actuel, mais de l'exercice même d'une responsabilité nationale - totalement absurde.

Prenons l'exemple de ma ville, que j'ai décrite sommairement tout à l'heure. D'un côté, en application de la loi de cohésion sociale, elle perçoit 1,6 million d'euros au titre de la DSU, qui exprime une solidarité verticale. Ladite loi Borloo n'a pas été approuvée par tout le monde, mais les modalités de calcul de la DSU l'ont été, notamment son augmentation de 25 % sur plusieurs années - augmentation qui a d'ailleurs été appliquée. De l'autre côté, en vertu d'une péréquation horizontale, ma ville est ponctionnée de 2 millions d'euros. C'est complètement stupide.

Dites-moi si vous trouvez à cela la moindre cohérence, justification ou intelligence. Je suis prêt à faire un effort, je vous assure, et je ne suis pas complètement débile. Mais reconnaissez qu'il y a là une injustice profonde.

D'ailleurs, notre collègue Piron a frôlé l'aveu de cette incohérence, et la nouvelle rédaction de `article fait l'objet d'une série de sous-amendements. Pour des raisons que nous ne sommes pas obligés de partager, M. Raoult propose ainsi de ramener le montant du Fonds à 100 millions d'euros la première année, et d'aviser ensuite, après cette première expérience, en corrigeant au besoin.

Laissez-moi vous dire qu'une fois la mesure en place, on ne la corrigera pas ! Quand il y a moyen de pomper dans le porte-monnaie du voisin, la méthode est trop facile pour qu'on en change, quel que soit le gouvernement en place. Mieux vaut ne pas commettre l'erreur que prétendre qu'on la rectifiera plus tard.

Pour résumer, la DSU produit un résultat inverse du FPIC. Expliquez-moi ce qui me paraît inexplicable, incompréhensible pour nos concitoyens, et totalement injuste, comme le montre l'exemple de ma commune qui supporterait 45 euros de charges par habitant contre 32 euros pour Neuilly. Certes, il faut que tout le monde vive, mais nous ne vivons pas dans le même monde : il ne faut tout de même pas exagérer !

Alors que quelques amendements tentent de se faufiler dans ce dispositif totalement injuste, nous arrive un amendement de dix pages du Gouvernement, que vient de nous résumer Mme la ministre. Je vais demander une suspension de séance de dix minutes car, franchement, j'ai besoin de regarder ce que cela donne.

J'ai déposé un sous-amendement à cet amendement du Gouvernement, proposant de revenir à l'un des principes de la loi de cohésion sociale que nous avons tous approuvé : la DSU cible est constituée des 250 premières communes.

Quand vous le jugerez utile, monsieur le président, je souhaiterais que vous nous accordiez une suspension de séance de dix minutes, non pas pour rallonger le débat mais pour étudier cet amendement de dix pages.

M. le président. J'allais vous proposer, monsieur Muzeau, de terminer la présentation des sous-amendements puis de suspendre la séance quelques instants avant les votes.

Le sous-amendement n° 356 présenté par M. Carrez, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi la dernière phrase de l'alinéa 36 :

« Le prélèvement dû par les cent cinquante premières communes classées l'année précédente en application du 1° de l'article L. 2334-18-4 est annulé et celui dû par les cent communes suivantes est minoré de 50 %. ».

La parole est à M. le rapporteur général pour présenter le sous-amendement n° 356 et nous donner l'avis de la commission sur l'amendement et sur les sous-amendements n os 357 et 358.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Mes chers collègues, nous abordons un sujet d'une importance extrême.

Notre majorité peut s'honorer d'avoir réformé la Constitution en 2003. S'agissant des collectivités locales, nous sommes allés à Versailles pour introduire deux notions dans la Constitution : autonomie financière et péréquation.

Pourquoi l'avons-nous fait ? Au fur et à mesure que la décentralisation s'est développée et que se sont opérés des transferts de compétences aux communes, aux départements et aux régions, les disparités colossales de ressources entres collectivités locales sont devenues de moins en moins supportables.

Comment imaginer, par exemple, alors que l'on donne de fait des missions de sécurité à des communes, aux côtés de l'État, que telle commune soit trop pauvre pour créer une police municipale, tandis que sa voisine pourra recruter autant qu'elle le veut ?

Comment imaginer que des familles modestes doivent payer des tarifs de cantine élevés pour leurs enfants parce qu'elles vivent dans une commune très pauvre qui ne peut pas apporter sa contribution, alors que des familles beaucoup plus aisées de la commune voisine, très riche, bénéficient de tarifs réduits ?

Je pourrais multiplier les exemples.

La décentralisation, c'est bien, à condition qu'il y ait un minimum d'équité entre les territoires. Comment accepter que, entre les 10 % de communes les plus pauvres de notre pays, autrement dit les 3 600 plus pauvres, et les 10 % de communes les plus riches, autrement dit les 3 600 plus riches, il y ait un écart du simple au triple ? Comment arriver à instaurer un minimum d'égalité dans l'accès aux services publics, qui font la solidarité républicaine ? C'est le coeur de la République qui est en jeu, si ces services publics dont la responsabilité échoit de plus en plus, du fait de la décentralisation, aux collectivités territoriales, ne peuvent être assurés dans des conditions de solidarité et d'égalité minimales.

C'est pourquoi, allant plus loin qu'aucune majorité auparavant, nous avons révisé la Constitution en 2003.

La péréquation, c'est vrai, c'est très difficile. Que de fois, cher Serge Grouard, j'ai tenu, moi qui préside depuis quelques années le Comité des finances locales, le même raisonnement que vous ! Que de fois j'ai dit qu'il appartient d'abord à l'État d'assurer la péréquation verticale, à travers ses dotations ! Le montant de la dotation globale de fonctionnement s'élève à 41 milliards d'euros. Pourquoi n'utiliserait-on pas cette somme ? Il y a des rigidités...

M. Serge Grouard. Vous ne pouvez pas dire ça !

M. Gilles Carrez, rapporteur général . ...et, surtout, l'État est désormais nu.

Nous avons voté, il y a quelques heures, la reconduction à l'euro près de la dotation globale de fonctionnement en 2012. La loi de programmation que nous avons adoptée dispose effectivement que la DGF n'augmentera pas d'un seul euro d'ici à 2014.

Regardons ce qui s'est passé ces dix dernières années. Chaque année, nous avons augmenté la DSU et la DSR grâce à l'augmentation du montant de l'enveloppe de la DGF. En effet, quelles que soient nos sensibilités respectives, nous avons décidé, année après année, d'affecter la totalité de l'augmentation, au niveau national, du montant de la DGF à la DSU et à la DSR.

Las, ce n'est plus possible aujourd'hui, et nous sentons bien qu'il faut aller plus loin dans la déclinaison de la péréquation constitutionnelle que nous avons instaurée, qu'il faut passer à ce que vous appelez la péréquation horizontale.

Mme la ministre a eu raison de le dire : la réforme de la taxe professionnelle, faite au profit des entreprises et non des collectivités locales, va aggraver les disparités.

M. Pierre-Alain Muet. Ça, c'est vrai !

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Je suis, certes, un élu d'Île-de-France, mais je suis aussi, d'abord, un élu de la nation, et je dois le reconnaître : c'est avant tout en Île-de-France et dans les grandes villes que se concentre la valeur ajoutée, et si nous n'acceptons pas, mes chers collègues, de prendre en considération ces réalités fiscales, nous irons au-devant de très graves difficultés. La péréquation, c'est la solidarité nationale.

Je me rends très régulièrement, un peu partout en France, aux assemblées générales départementales des associations de maires, à l'invitation des présidents de ces dernières. J'y entends, chaque fois, le même message : nous avons besoin de plus de solidarité, nous avons besoin de plus d'homogénéité dans les ressources dont nous disposons. Le mot de péréquation suscite un formidable espoir dans notre pays.

Globalement, c'est vrai, monsieur Grouard : il y a un transfert de ressources de l'Île-de-France à la province ; on peut le dire, même si c'est en fait un peu plus compliqué. C'est vrai, monsieur Muzeau, je le constate, dans mon département du Val-de-Marne, qui n'est pourtant pas considéré comme particulièrement riche et dont toutes les villes sont contributrices car leurs ressources sont supérieures à la moyenne nationale. Cela dit, je ne veux pas opposer l'Île-de-France à la province.

Autre phénomène tout aussi important, chers collègues qui êtes plutôt - je parle des députés présents cet après-midi - des élus urbains, on constate également un transfert des villes vers les milieux ruraux. Ces derniers disposent de ressources fiscales moindres alors que l'exigence de nos concitoyens en termes de qualité de service public s'y accroît. Aujourd'hui, dans une petite commune rurale, les deux conjoints travaillent, si bien que l'on a besoin de crèches dans des campagnes qui n'en avaient pas jusqu'à présent. Voilà des réalités dont il faut accepter de tenir compte !

Beaucoup d'entre vous, chers collègues, ont parlé de simulations. La totalité des simulations ont été transmises aux présidents de groupe le 15 octobre dernier pour qu'ils les diffusent, et nous avons eu un débat tout à fait intéressant. Nous avons alors suivi les préconisations de notre collègue Baguet, qui a demandé un allongement de la durée de la période de mise en place du Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales. J'ai suivi nos collègues de Paris ; Paris est certes riche, mais il y a des limites à tout, et le montant de ses contributions au titre de la péréquation est extrêmement élevé. Je me suis donc rallié au point de vue exprimé par Christophe Caresche et Sandrine Mazetier, et nous avons essayé de faire au mieux sur la base de ces simulations, qui existent bel et bien.

Je comprends bien qu'il y a une difficulté. Je comprends la préoccupation exprimée par Éric Raoult, d'autant que nos communes respectives, à quelques encablures l'une de l'autre, se ressemblent énormément : elles comptent à peu près le même nombre d'habitants, elles ont à peu près les mêmes caractéristiques. Je comprends donc parfaitement ce qu'il veut dire.

Lorsque nous avons examiné le texte en première lecture, nous nous sommes ralliés au point de vue de Pierre-Christophe Baguet, et nous avons allongé la période la durée de la période de mise en place du Fonds. Cela dit, je pense que la première marche, celle de 2012, est trop importante. C'est pourquoi nous avons adopté hier, en commission des finances, un amendement qui réduit son montant à 150 millions d'euros.

Or qui est le rapporteur spécial de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » ? C'est Bernard Carayon, élu d'une petite commune rurale du Tarn, qui a accepté cet amendement en tant que rapporteur, mais en précisant que ce montant de 150 millions n'était pas conforme aux espérances nourries dans les territoires ruraux. Chacun doit donc accepter de faire des concessions.

Notre assemblée s'honorera en décidant que cette péréquation sera mise en oeuvre dès l'année 2012, nonobstant les problèmes qu'elle pose. Je n'en suis pas moins le premier à penser que le montant de 250 millions d'euros était manifestement trop élevé. En commission des finances, nous l'avons donc ramené à 150 millions. Éric Raoult, si je comprends bien, vient de déposer un sous-amendement pour le ramener encore à 100 millions.

L'amendement du Gouvernement, dont Mme la ministre a très bien exposé les aspects techniques, me paraît vraiment très équilibré. Il reprend des éléments intéressants et constructifs de la discussion du texte au Sénat. Je tiens à le dire : l'examen du texte au Sénat a été l'occasion d'apports importants. D'ailleurs, sur le sujet des collectivités territoriales, lorsque nos deux assemblées travaillent ensemble, s'écoutent et parviennent à des propositions conjointes, nous ne faisons pas d'erreurs. L'amendement du Gouvernement reprend donc une grande partie du travail mené au Sénat et également une part de celui que nous avons fait à l'Assemblée.

Je n'insisterai donc pas, sinon pour préciser que je propose un sous-amendement de nature à permettre d'aller un peu plus loin sur la question des communes-cibles à DSU.

La rédaction de l'article 58 proposée par le Gouvernement prévoit d'exonérer de prélèvement au FPIC les 150 premières communes dans le classement de la DSU-cible. Le sous-amendement que je propose comporte en outre un abattement de 50 % du prélèvement sur les 100 suivantes, ce qui est parfaitement conforme à la philosophie de la réforme de la DSU menée il y a maintenant trois ans. Je crois, madame la ministre, que nous pouvons parvenir à une solution tout à fait équilibrée.

Cela étant, quand j'entends Éric Raoult - je le lui dis en toute amitié - ou notre collègue de l'Eure François Loncle prétendre qu'il n'y a pas eu de simulations, cela me fait un peu mal. Demandez-les donc, monsieur Loncle, car les premières simulations - sur la base, évidemment, du projet déposé par le Gouvernement, avant qu'il ne soit amendé par nous-mêmes et par nos collègues sénateurs - ont toutes été envoyées dès le 15 octobre. Je suis attentif à tous les arguments, je souscris à une large part de vos propos, je me retrouve dans nombre de vos interventions, mais être critiqué au motif qu'il n'y aurait pas eu de simulations n'est pas juste.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre . Gilles Carrez a dit quelque chose de très important : les habitants du monde rural sont une richesse pour de nombreuses grandes villes. Nous le savons tous, ici, très bien, et cela vaut pour les régions de province mais aussi pour l'Île-de-France. Ce sont de très nombreuses personnes vivant à la campagne qui viennent travailler dans les grandes villes, que ce soit dans les services publics ou dans le secteur privé. Pourquoi habitent-elles à la campagne ? Parce que la pression immobilière est extrêmement forte dans les grandes ville, parce qu'elles veulent élever leurs enfants dans un cadre de vie différent, quelque peu préservé, parce qu'elles veulent se loger dans des conditions décentes. Cela étant, elles ont aussi le droit - c'est le sujet qui nous occupe - d'avoir des services publics de qualité, car elles participent elles aussi à la prospérité de la grande ville.

Vous nous parlez, monsieur Grouard, d'Orléans.

M. Serge Grouard. Non, je parlais de Paris ! Je ne mélange pas les genres !

Mme Valérie Pécresse, ministre . Je ne vous donnerai donc pas les chiffres d'Orléans, et nous échapperons à une fastidieuse litanie.

Nous devons prendre en compte cette réalité qu'est la nécessité de la péréquation.

Deuxième chose, je pense, d'un point de vue plus global, qu'il faut que cela commence dès 2012. Nous sommes aujourd'hui parvenus à un texte d'équilibre, dont le mécanisme me paraît bon. Ce serait prendre un risque que de ne pas commencer en 2012. Commençons dès 2012, expérimentons - le terme a été employé par Éric Raoult, je ne le récuse pas - et faisons au mois d'octobre un premier bilan.

Quant au sous-amendement de M. Muzeau, il est en partie satisfait par celui de Gilles Carrez.

S'agissant du sous-amendement de M. Raoult, je suis favorable au maintien du seuil à 150 millions.

M. le président. M. Muzeau a demandé une suspension de séance pour examiner de plus près l'amendement n° 354 du Gouvernement et le sous-amendement n° 356, troisième rectification, du rapporteur général. Cette suspension est de droit et interviendra sitôt que M. Raoult, auquel je donne maintenant la parole, se sera exprimé.

M. Éric Raoult. Mon sous-amendement vise à ramener à 100 millions d'euros le montant des ressources du Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales pour l'année 2012.

Les dispositions que nous avons prises à propos des communes « DSU-cible » auront une répercussion immédiate sur les communes contributrices.

Si ce n'est pas le cas, il faut le préciser.

La diminution prévue pour certaines communes entraînera une augmentation considérable pour les autres. Ne serait-il pas plus raisonnable de fixer les ressources du Fonds à 100 millions d'euros ? Cela n'aurait pas un effet induit immédiat et important sur les autres communes, monsieur le rapporteur général.

Je ne suis pas membre du Comité des finances locales, c'est vrai et je le regrette. Mais je gère une collectivité locale qui, comme la vôtre, n'est pas facile à gérer.

Ici, on défend les thèses de « Ville et Banlieue » ; au niveau local, le combat des élus ne se justifie pas par le changement des méthodes mais par l'adaptation au langage de l'adversaire.

Cela me rappelle ce que l'on me disait quand j'étais jeune : « Quand tes adversaires t'applaudissent, c'est que tu n'es pas dans la bonne voie. »

M. le président. La parole est à M. François Pupponi.

M. François Pupponi. J'ajouterai plusieurs précisions sur la forme.

Monsieur Loncle, tout ce débat a été conduit dans la plus parfaite transparence et depuis plusieurs mois, avec un groupe de travail de la commission des finances du Sénat,...

M. Éric Raoult. Ils étaient combien ?

M. François Pupponi. ...un groupe de travail de la commission des finances de l'Assemblée, un groupe de travail réunissant l'Association des maires de France, l'Association des maires des grandes villes de France et l'Association des maires ruraux de France, sous l'égide de Jacques Pélissard, et l'élaboration d'un projet de proposition repris par le Gouvernement.

Les simulations ont été diffusées et Gilles Carrez a d'ailleurs indiqué que cette transparence était nécessaire pour éviter que les chiffres ne soient découverts après coup. Et c'est justement parce que les chiffres ont été diffusés que nous avons assisté à une telle levée de boucliers de ceux qui paient. Si certains protestent aujourd'hui, c'est qu'ils savent combien ils doivent payer.

Un député du groupe de l'UMP. Mais tout le monde ne le sait pas !

M. François Pupponi. Tout le monde ne le sait pas, mais tous ceux qui voulaient ont pu le savoir. Certaines associations ont ainsi publié des communiqués pour contester.

Le Sénat a pris en compte un certain nombre d'observations et ses simulations ont été diffusées, avec le même souci de transparence.

Les villes de banlieue ne se réjouissent pas de la baisse de 250 à 150 millions d'euros et ne sont pas forcément satisfaites que toutes les communes éligibles à la DSU ne soient pas contributrices.

Certes, chacun doit faire un pas pour trouver un consensus.

Je prends l'exemple de Paris Métropole où l'on a réussi à mettre d'accord le département des Hauts-de-Seine et la ville de Paris, qui sont les plus gros contributeurs du fonds régional et du fonds national. Ces deux collectivités, qui n'appartiennent pourtant pas à la même majorité, sont tombées d'accord pour établir la somme qu'elles acceptaient de redistribuer aux villes les plus pauvres de l'Île-de-France comme du territoire national.

Elles ont trouvé un consensus parfait, avec un vote à l'unanimité du bureau de Paris Métropole, toutes tendances confondues.

M. Pierre-Christophe Baguet. Paris Métropole n'est pas représentatif du reste du territoire !

M. François Pupponi. Il est important que sur un tel sujet, après un travail en collaboration, nous parvenions à un consensus.

Certes, il reste des points à revoir. D'ailleurs, la ministre et Gilles Carrez ont proposé et inscrit dans le texte une clause de rendez-vous en 2012 pour observer l'évolution de la situation. Cela va dans le bon sens.

M. Pierre-Christophe Baguet. C'est nécessaire !

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Cette proposition est inscrite dans l'amendement.

M. François Pupponi. Je le répète, nous sommes à un moment historique. Je ne sais pas si nous devons nous réjouir qu'il y ait un consensus sur tous les bancs.

M. Éric Raoult. Il y a une majorité, mais pas de consensus !

M. François Pupponi. Disons : un consensus sur certains bancs... (Rires)

M. Éric Raoult. C'est typiquement socialiste !

M. François Pupponi. Nous savons parfois faire des synthèses !

M. le président. Chers collègues, je vous rappelle que l'on ne doit pas interrompre les orateurs.

M. François Pupponi. Nous vivons un moment fondamental pour l'avenir de nos territoires.

Il ne s'agit pas de financer des dépenses de fonctionnement. Les principales ressources qui seront ainsi attribuées aux villes les plus pauvres leur permettront d'entretenir ce qui aura été financé par l'ANRU. En effet, si nous n'avons pas les moyens d'entretenir les rénovations engagées par l'ANRU, elles seront détruites dans cinq ans. Ce serait absurde !

M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau.

M. Roland Muzeau. Je ne suis pas d'accord avec la conclusion de M. Pupponi.

Je ne me bats pas pour ma circonscription, je donne un exemple : l'État a engagé des milliards d'euros dans les trois villes de ma circonscription, avec, comme partenaires, le conseil général des Hauts-de-Seine et le conseil régional.

M. Pierre-Christophe Baguet. L'État de droite !

M. Roland Muzeau. Ce n'est pas l'État qui est de droite ou de gauche, ce sont les gouvernements ! L'État est français et républicain, cher collègue !

L'État a donc engagé des milliards d'euros pour les projets de l'ANRU dans ces trois communes, avec, à ses côtés, le conseil général, le conseil régional et les communes elles-mêmes.

Par ailleurs, ces trois communes sont en difficulté financière, avec une population très modeste, et bénéficient d'une solidarité verticale, notamment la DSU et la loi de cohésion sociale. Et il faudra effectivement entretenir ces programmes de l'ANRU, monsieur Pupponi.

Or, ce sont 2 millions d'euros que l'on va prendre à l'une, près de 700 000 euros à la ville de Colombes et 400 000 euros à Villeneuve-la-Garenne : trois villes que vous connaissez, monsieur Raoult.

Est-ce juste et cohérent ? Non, ce n'est ni cohérent, ni juste, ni équitable ! C'est une profonde injustice et je la refuse !

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures trente-cinq, est reprise à dix-sept heures cinquante. )

M. le président. La séance est reprise.

La parole est à M. Christian Eckert.

M. Christian Eckert. Le groupe SRC votera l'amendement du Gouvernement et le sous-amendement du rapporteur général. Aux arguments qu'a exposés M. Carrez, je voudrais ajouter celui-ci : certes, la CMP a échoué, mais, parmi les questions que nous avons évoquées avec nos collègues sénateurs, figurait la péréquation. Les présidents de commission et les deux rapporteurs généraux ont instamment souhaité que cet amendement, certes un peu rectifié, soit adopté. Ce n'est bien sûr pas un argument de fond, mais il montre dans quel état d'esprit se sont déroulés nos travaux.

Je me demande toutefois si les simulations sont bien indispensables. Au risque de paraître provocateur, je dirai même que, en lisant l'amendement, nous avons tous tendance à considérer notre propre situation, nous avons tous envie de savoir ce que cela donnera chez nous en fonction des critères de répartition : il n'est pas dit que ce réflexe débouche sur une vision et sur un vote très objectifs. À la limite, il faudrait que l'on nous fournisse des simulations anonymisées.

M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau.

M. Roland Muzeau. Monsieur le président, dans quel ordre soumettrez-vous les sous-amendements au vote de l'Assemblée ?

M. le président. Je mettrai d'abord aux voix le sous-amendement n° 357 de M. Raoult, puis le n° 356 rectifié de M. le rapporteur général, puis le vôtre, n° 358 rectifié.

M. Roland Muzeau. Si le sous-amendement de M. Carrez est adopté, le mien tombera. C'est dommage !

M. le président. Ce sont des choses qui arrivent, mon cher collègue : vous connaissez parfaitement les règles d'examen des amendements.

M. Roland Muzeau. Oui, mais je vis d'espoir ! (Sourires.)

(Le sous-amendement n° 357 n'est pas adopté.)

M. le président. Le sous-amendement n° 356 rectifié présenté par M. Carrez, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi la dernière phrase de l'alinéa 36 :

« Le prélèvement dû par les cent cinquante premières communes classées l'année précédente en application du 1° de l'article L. 2334-18-4 est annulé et celui dû par les cent communes suivantes est minoré de 50 %. Le prélèvement dû par le premier tiers des communes classées l'année précédente en application du 2° du même article est annulé ».

La parole est à M. Roland Muzeau.

M. Roland Muzeau. Après lecture attentive de l'amendement du Gouvernement et du sous-amendement de notre collègue Carrez, je suis bien obligé de dire que l'injustice que j'ai dénoncée à plusieurs reprises avant la suspension de séance subsiste. Détruisant d'une main ce qu'elle a bâti de l'autre, notre assemblée, de manière totalement inconséquente, continue de prendre des décisions contradictoires, au gré des vicissitudes que traverse notre pays.

Je serai toutefois obligé de voter le sous-amendement de M. Carrez - mais ce sera la corde au cou, et si le noeud n'est pas trop serré ! Il corrige en effet une immense injustice, mais, pour autant, il ne rétablit ni la justice ni l'équité. Simplement, comme disent les enfants, c'est « moins pire ».

Mon sous-amendement n° 358 rectifié, qui tombera si est adopté le sous-amendement de M. Carrez, propose que le prélèvement soit dû non par les 150 premières communes classées, mais par les 250 premières. Il s'agissait d'être cohérent par rapport à des votes que notre assemblée avait émis antérieurement sur d'autres textes. Le sous-amendement de M. Carrez présente cependant un avantage, puisqu'il comporte une seconde disposition, l'abattement de 50 %, qui rend, sinon acceptable, du moins un peu moins injuste et révoltante la disposition générale soumise à notre vote.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Après avoir exonéré les 150 premières communes de la DSU cible, le sous-amendement n° 356 rectifié a fait de même, en limitant l'exonération à 50 %, pour les cent communes suivantes, afin d'atteindre un total de 250 communes. Cela nous conduit toutefois à évoquer le cas des communes de 5 000 à 10 000 habitants, qui sont également concernées par la DSU - celles de moins de 5 000 habitants l'étant par la dotation de solidarité rurale. Certaines de ces communes, qui ont le même indice synthétique, sont extrêmement pauvres. Je propose donc de compléter le sous-amendement en prenant en compte également le premier tiers de ces communes de 5 000 à 10 000 habitants, qui sont éligibles à la DSU et ont l'indice synthétique le plus élevé. Par parallélisme, il convient d'ajouter les 100 communes suivantes, qui, elles, bénéficieront d'un abattement de 50 %. Nous aurons ainsi un dispositif symétrique pour les communes DSU de 5000 à 10 000 habitants et pour les communes de plus de 10 000 habitants.

M. Serge Grouard. Et comment arrive-t-on à 150 millions avec toutes ces modifications ? Il n'y a plus de vases communicants !

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Le dispositif - qu'il s'agisse de contribution ou de reversement - est apprécié par territoire. Si un territoire plutôt aisé est soumis au prélèvement, mais qu'il comprend en son sein une commune classée dans les 150 premières éligibles à la DSU-cible, celle-ci est exonérée et le prélèvement est pris en charge par l'intercommunalité.

S'il n'y a pas d'intercommunalité, le prélèvement est opéré dans la masse. Mais à l'exception de quelques communes en Île-de-France, la quasi-totalité est en intercommunalité. Par conséquent, l'incidence sur le montant de 150 millions d'euros est faible.

Monsieur le président, il faudrait toutefois ajouter, à la fin du sous-amendement, le membre de phrase suivant : « et le prélèvement dû par les 100 communes suivantes est minoré de 50 % ». Il s'agit des communes éligibles à la DSU, et dont la population est comprise entre 5 000 et 10 000 habitants.

M. le président. Pour rédiger le sous-amendement n°356, deuxième rectification, il faudra donc ajouter, à la fin du sous-amendement n°356 rectifié, le membre de phrase suivant : « et le prélèvement dû par les 100 communes suivantes est minoré de 50 %. »

La parole est à M. Pierre-Christophe Baguet.

M. Pierre-Christophe Baguet. Je voudrais revenir un instant sur ce qu'a dit notre collègue Grouard, car c'est un point très important.

Si j'ai bien compris, monsieur le rapporteur général, nous partons de la contribution de 150 millions d'euros pour la répartir entre les communes bénéficiaires. Il ne s'agit pas de faire le chemin inverse, c'est-à-dire de commencer par redistribuer certaines sommes pour se retrouver ensuite à 150, 160 ou 170 millions d'euros. Sommes-nous bien d'accord, monsieur le rapporteur général ? La répartition se fait en partant de 150 millions d'euros.

Monsieur le rapporteur général, vous ne semblez pas très convaincu...

M. Serge Grouard. Elle sera tout de même légèrement modifiée ! Forcément !

M. Pierre-Christophe Baguet. Justement, c'est ce qui m'inquiète ! C'est le principe des vases communicants.

Monsieur le rapporteur général, je vous sens perplexe et, je le répète, cela m'inquiète !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général, pour rassurer notre collègue Baguet... (Sourires.)

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Le montant faisant l'objet d'un prélèvement est de 150 millions et il ne bouge pas.

Il y a deux cas de figure. Soit la commune DSU-cible est à l'intérieur d'un territoire qui fait l'objet d'un prélèvement et c'est ce territoire qui assume. Soit elle n'appartient pas à une intercommunalité - le cas existe, comme peut en témoigner Roland Muzeau, mais c'est assez rare - et le prélèvement est fait dans la masse. De ce fait, il peut y avoir une répercussion à la hausse, laquelle sera à mon avis très limitée - à ce stade, nous ne sommes pas en état de faire une simulation - sur l'ensemble des territoires qui feront l'objet d'un prélèvement.

Quoi qu'il en soit, cela n'aura pas d'effet sur le montant de 150 millions d'euros.

M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau.

M. Roland Muzeau. Je pense avoir compris une grande partie des explications du rapporteur général, mais ce que je sais, c'est que nous allons voter dans quelques instants une disposition dont aucun d'entre nous ne sait quelle sera sa répercussion dans son secteur d'intérêt géographique. Nous n'aurons qu'une appréciation par rapport aux chiffres figurant dans les tableaux initiaux.

C'est pourquoi, madame la ministre, je souhaiterais que soit lancée une simulation à la suite du vote qui va intervenir, sans attendre le travail de nos collègues du Sénat. Ces derniers en auront également besoin, pour savoir précisément ce qui ressortira de l'amendement du Gouvernement et du sous-amendement de M. Carrez.

Cette simulation nous semble nécessaire dans les délais les plus brefs, même si ce n'est pas forcément ses données que nous inscrirons dans notre budget d'agglomération ou de commune dans les jours qui viennent. Mais cela fournira une indication plus précise à chacun d'entre nous.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Valérie Pécresse, ministre . La réponse est oui, monsieur Muzeau, et vous aurez cette simulation lundi matin.

M. le président. Chers collègues, nous allons en fait voter sur le sous-amendement n° 356, troisième rectification, dont la fin est ainsi rédigée : « et le prélèvement dû par les communes suivantes est minoré de 50 % ».

Je le mets aux voix, avant que l'on ne me propose une nouvelle rectification ! (Sourires.)

(Le sous-amendement n° 356, troisième rectification, est adopté.)

M. le président. En conséquence, le sous-amendement n° 358 rectifié de M. Muzeau tombe.

(L'amendement n° 354, sous-amendé, est adopté.)