V. RAPPORT SÉNAT N° 107 (2011-2012) TOME III ANNEXE 23

Commentaire : le présent article vise à redéfinir les objectifs et les modalités de fonctionnement du Fonds de solidarité des communes de la région d'Ile-de-France (FSRIF).

I. LE DROIT EXISTANT

Le Fonds de solidarité des communes de la région d'Ile-de-France (FSRIF) a été créé par la loi n° 91-429 du 13 mai 1991 avec pour objectif de contribuer à l'amélioration des conditions de vie dans les communes urbaines d'Ile-de-France supportant des charges particulières au regard des besoins sociaux de leur population sans disposer de ressources fiscales suffisantes.

Le fonds est alimenté par un double prélèvement pesant sur les communes et EPCI de la région Ile-de-France.

Le premier prélèvement, sur les seules communes, est fonction du potentiel financier . Sont ainsi contributrices les communes dont le potentiel financier est supérieur d'au moins 25% au potentiel financier moyen de l'ensemble des communes de la région Ile-de-France. Ce prélèvement est plafonné à 5 % des dépenses réelles de fonctionnement de la commune constatées dans le compte administratif afférent au pénultième exercice.

Le second prélèvement est appliqué aux communes aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) dont les bases totales d'imposition à la taxe professionnelle par habitant sont supérieures à la moyenne nationale des bases de taxe professionnelle par habitant.

Le total des deux prélèvements s'est élevé à 190 047 559 euros (mis en répartition) en 2011 dont seulement 30 089 786 euros à la charge des EPCI en raison des multiples plafonnements applicables.

Les bénéficiaires du fonds sont les communes de la région Ile-de-France classées en fonction d'un indice synthétique de ressources et de charges composé du potentiel financier (55 %), des logements sociaux (15 %), des aides personnelles au logement -APL (20 %) et du revenu par habitant (10 %). La moitié des communes de 10 000 habitants et plus et 18 % des communes de 5 000 à 10 000 habitants bénéficient des attributions au titre du fonds.

Les communes perdant leur éligibilité perçoivent une garantie de sortie de 50 %.

Les ressources réparties en 2011 se sont élevées à 188 997 536 euros , dont 182 256 647 euros pour les communes de plus de 10 000 habitants.

La suppression de la taxe professionnelle en 2010 imposait une réforme du FSRIF ou conduisait à sa disparition.

La loi de finances pour 2011 a permis d'apporter les ajustements nécessaires à la répartition du fonds pour l'année 2011 , année transitoire dans le cadre de la réforme de la taxe professionnelle. En attendant la redéfinition du potentiel financier en 2012, le choix a été fait de reprendre les bases et les taux de taxe professionnelle 2009 pour le calcul des contributions et des attributions du fonds.

Par ailleurs, à l'initiative du Sénat, la loi de finances pour 2011 prévoit une montée en puissance progressive du fonds, qui doit atteindre en 2015, 1,5 fois le montant atteint en 2009 (soit environ 280 millions d'euros).

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article propose plusieurs modifications au mécanisme du FSRIF en vue d'adapter sa répartition à la recomposition de la fiscalité directe locale, de conforter son caractère péréquateur et d'assurer la montée en puissance du fonds à horizon 2015. Il procède à une réécriture totale des articles L. 2531-13 et L. 2531-14 du CGCT qui régissent respectivement les ressources et les attributions du FSRIF.

A. LA MONTÉE EN PUISSANCE DU FSRIF ET LE RÉGIME DES PRÉLÈVEMENTS

Le paragraphe I du présent article propose une nouvelle rédaction de l'article L. 2131-13 du CGCT.

Il précise tout d'abord les montants des ressources annuelles du FSRIF dans sa phase de montée en puissance. Celles-ci sont fixées à 210 millions d'euros en 2012, 230 millions en 2013 et 250 millions en 2014. A compter de 2015, les ressources du fonds sont fixées à 270 millions d'euros.

Il prévoit un prélèvement unique , acquitté exclusivement par les communes dont le potentiel financier par habitant est supérieur au potentiel financier moyen par habitant des communes de la région d'Île-de-France.

Il exclut toutefois d'office du prélèvement les communes dont l'indice synthétique tel que défini à l'article L. 2531-14 est supérieur à 1,2.

Selon les informations fournies à l'Assemblée nationale, ces règles auraient pour conséquence un élargissement notable du nombre des contributeurs, qui passerait de 76 à 110, et de celui des bénéficiaires, qui augmenterait de 145 à 176.

Le montant total du prélèvement annuel est réparti entre les communes contributrices en fonction de leur écart relatif au carré entre le potentiel financier par habitant de la commune et le potentiel financier moyen par habitant des communes de la région d'Île-de-France.

L'effet de cette règle est atténué par un triple plafonnement :

- le prélèvement ne peut excéder 10 % du montant des dépenses réelles de fonctionnement de la commune (telles que constatées dans son compte administratif) ;

- il ne peut excéder 150 % du montant du prélèvement opéré en 2009 ;

- les communes qui deviennent contributrices beneficient d'un abattement de 50 % du montant de leur contribution la première année.

B. LE MÉCANISME DE REVERSEMENT

Le paragraphe II du présent article propose une nouvelle rédaction de l'article L. 2131-14 du CGCT relatif aux attributions du FSRIF.

Il prévoit que les ressources du FSRIF seront réparties entre les communes de plus de 5 000 habitants dont la valeur de l'indice synthétique de ressources et de charges est supérieure à 1,2.

L'indice synthétique de ressources et de charges est modifié par rapport à la situation antérieure.

Il serait calculé à partir du rapport de chaque commune à la moyenne régionale :

- du potentiel financier par habitant, pondéré à hauteur de 50 % ;

- du revenu moyen par habitant, pondéré à hauteur de 25 % ;

- du nombre de logements sociaux , pondéré à hauteur de 25 %.

On observera que cet indice diffère de celui qui était applicable à l'ancien FSRIF mais également de celui qui est retenu pour la dotation de solidarité urbaine.

Les indices synthétiques (en pondération des critères)

Potentiel financier

Revenu par habitant

Nombre de logements sociaux

Nombre d'APL

Effort fiscal

DSU

45 %

10 %

15 %

30 %

Ancien FSRIF

55 %

10 %

15 %

20 %

Nouveau FSRIF

50 %

25 %

25 %

0 %

FPIC (projet initial PLF)

50 %

50 %

0 %

0 %

FPIC (texte voté AN)

40 %

40 %

0 %

0 %

20 %

Source : commission des finances

L'attribution revenant à chaque commune éligible est calculée en fonction du produit de sa population par son indice synthétique ; ce produit est ensuite pondéré par un coefficient variant uniformément de 2 à 0,5 dans l'ordre croissant du rang de classement des communes éligibles afin d'accentuer l'effet redistributif.

Le texte proposé prévoit, en outre, deux mécanismes de garantie :

- une commune restant éligible ne peut recevoir moins de 50 % de son attribution au titre de l'année précédente ;

- une commune perdant son éligibilité reçoit, l'année suivante uniquement, 50 % du montant perçu avant la perte de l'éligibilité.

Enfin, les paragraphes III et IV du présent article prévoient de supprimer les deux rapports sur l'utilisation des versements du FSRIF que les articles L. 2531-15 et L.2531-16 du CGCT ont institués :

- le rapport annuel présenté par le Gouvernement au comité des élus du FSRIF sur les actions de développement social urbain entreprises au cours de l'exercice précédent par les communes bénéficiaires d'attributions au titre du fonds ;

- le rapport annuel que le maire d'une commune ayant bénéficié de versements du FSRIF doit présenter au conseil municipal.

III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté, sur le présent article plusieurs amendements de nature et d'importance diverses.

Deux amendements présentés par notre collègue Bernard Carayon, rapporteur spécial de la commission des finances, ont apporté des précisions :

- la population retenue pour calculer le revenu moyen par habitant est la population issue du recensement et non la population DGF ;

- le taux de logements sociaux de référence à prendre en compte dans l'indice synthétique est celui des communes de 5 000 habitants et plus (et non de 10 000 habitants et plus, comme le prévoyait l'ancien indice du FSRIF).

L'Assemblée nationale a adopté avec l'avis favorable du Gouvernement, un amendement, présenté par nos collègues députés Bernard Carayon et Gilles Carrez, visant à supprimer la mention selon laquelle les communes dont l'indice synthétique tel que défini à l'article L. 2531-14 est supérieur à 1,2 ne peuvent pas être contributrices . L'amendement de suppression a été justifié par l'argument selon lequel rendre possible le cumul de la contribution et du bénéfice du FSRIF permettrait de lisser les effets de seuil , sans défavoriser les communes les moins riches.

Elle a adopté avec l'avis favorable du Gouvernement un amendement présenté par les mêmes auteurs, visant à lisser dans le temps l'augmentation des prélèvements au FSRIF pour les communes contributrices. Le dispositif, qui précise que le prélèvement ne peut excéder 120 % en 2012, 130 % en 2013 et 140 % en 2014 du prélèvement effectué en 2009, permet d'éviter que « d'anciens contributeurs au FSRIF puissent voir, dès 2012, leur contribution atteindre le plafond de 150 % de leur contribution de 2009 » du fait de la montée en charge du fonds.

A l'initiative de plusieurs de nos collègues députés des groupes socialiste, UMP et communiste, mais contre l'avis défavorable de la commission et du Gouvernement, elle a adopté un amendement précisant que le prélèvement au titre du FSRIF est réalisé en amont du prélèvement du FPIC, et que les prélèvements cumulés ne peuvent excéder 10 % des dépenses réelles de fonctionnement de la commune.

A l'initiative des mêmes auteurs et avec l'avis favorable de la commission des finances, le Gouvernement s'en remettant à la sagesse, l'Assemblée nationale a rétabli l'obligation pour les communes et pour le Gouvernement de présenter une information sur l'utilisation du FSRIF en application des articles L. 2531-15 et L. 2531-16 du CGCT.

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Vos rapporteurs spéciaux prennent acte du fait que nombre des recommandations formulées par le groupe de travail de votre commission des finances concernant le FSRIF, qui rejoignaient en large part les préconisations du syndicat mixte Paris-Métropole, ont été intégrées dans la réforme proposée par le présent projet de loi de finances.

Sur plusieurs points toutefois, concernant notamment l'objectif chiffré des ressources du Fonds 1 ( * ) ou la composition de l'indice synthétique de ressources et de charges 2 ( * ) , certaines divergences subsistent et feront l'objet de débats en séance publique.

A ce stade, vos rapporteurs spéciaux vous soumettent trois amendements . Le premier fixe, pour le FSRIF, un objectif chiffré de réduction des écarts de ressources intra régionaux. Le second prévoit, en 2015 , une clause de « revoyure » qui permettra de réévaluer le rythme de la montée en puissance du FSRIF. Le troisième est rédactionnel.

Décision de la commission : votre commission des finances vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.


* 1 Le groupe de travail de la commission des finances souhaitait porter ce montant en 2015 de 250 à 300 millions d'euros, soit très exactement 2 % du potentiel financier de la région.

* 2 Le groupe de travail de la commission de finances avait opté pour un indice synthétique à deux critères, le revenu moyen et l'indicateur de ressources élargi.