M. Jean-Claude FRECON, rapporteur spécial

III. LES AUTRES COMPTES SPÉCIAUX

A. LE COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS « AVANCES À DIVERS SERVICES DE L'ETAT OU ORGANISMES GÉRANT DES SERVICES PUBLICS »

En application de l'article 24 de la LOLF 32 ( * ) , le compte « Avances à divers services de l'Etat ou organismes gérant des services publics » retrace les avances accordées par le Trésor aux organismes susceptibles d'en recevoir. Ces avances, qui constituent les dépenses du compte 33 ( * ) , sont de deux ordres :

1) les avances consenties à des services de l'Etat (budgets annexes, services autonomes de l'Etat, services nationalisés) ou à des organismes distincts de l'Etat gérant des services publics (établissements publics nationaux, services concédés, sociétés d'économie mixte, organismes divers de caractère social). Ces avances visent à répondre à des situations d'urgence , pour assurer la continuité de l'action publique ou mettre en oeuvre une mesure de façon accélérée, ou à couvrir provisoirement un besoin de trésorerie imprévu. Elles sont retracées sur les programmes 823 « Avances à des organismes distincts de l'Etat et gérant des services publics » et 824 « Avances à des services de l'Etat » ;

2) les avances octroyées à l'Agence de services et de paiement (ASP), au titre du préfinancement des aides communautaires de la politique agricole commune (PAC). Ces avances répondent au mode de financement propre aux aides de la PAC, que les Etats membres doivent préfinancer et qui sont ensuite remboursées par la Commission européenne. Pour la France, ce préfinancement est assuré par les versements de l'ASP. Ces avances sont imputées sur le programme 821 « avances à l'Agence de services et de paiement, au titre du préfinancement des aides communautaires de la politique agricole commune » 34 ( * ) .

Les recettes du compte sont constituées des remboursements en capital des avances consenties.

Evolution des recettes et des dépenses entre 2011 et 2012

(en euros)

LFI 2011

PLF 2012

Variation

%

Recettes

7 724 218 937

7 687 371 109

-36 847 828

-0,5%

01 - Remboursement des avances octroyées au titre du préfinancement des aides de la PAC

7 500 000 000

7 500 000 000

0

0,0%

03 - Remboursement des avances octroyées à des organismes gérant des services publics

137 500 000

65 000 000

-72 500 000

-52,7%

04 - Remboursement des avances octroyées à des services de l'Etat

86 718 937

122 371 109

35 652 172

41,1%

Dépenses

7 744 382 536

7 812 891 607

68 509 071

0,9%

821 - Avances à l'ASP

7 500 000 000

7 500 000 000

0

0,0%

823 - Avances à des organismes distincts de l'Etat

50 000 000

62 600 000

12 600 000

25,2%

824 - Avances à des services de l'Etat

194 382 536

250 291 607

55 909 071

28,8%

Solde

-20 163 599

-125 520 498

-105 356 899

522,5%

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

1. Les recettes

7,69 milliards d'euros de recettes sont attendues en 2012 , contre 7,72 milliards d'euros en 2011, soit une légère diminution de 0,5 % (37 millions d'euros). Le remboursement par le budget communautaire des avances octroyées au titre de la PAC est stable, à 7,5 milliards d'euros, et la baisse des recettes résulte de deux mouvements contraires :

1) 65 millions d'euros d'euros sont attendus au titre du remboursement des avances aux organismes gérant des services publics (72,5 millions d'euros de moins qu'en 2011 35 ( * ) ), dont 15 millions d'euros par l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) au titre de l'avance de 143 millions d'euros consentie en 2009 et 50 millions d'euros par le remboursement des avances imprévues ;

2) 122,4 millions d'euros de recettes sont attendues des remboursements d'avances à des services de l'Etat (35,6 millions d'euros de plus qu'en 2011). Ces recettes proviendront exclusivement du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » (BACEA) au titre des avances consenties depuis 2005 36 ( * ) .

2. Les dépenses et le solde

Les dépenses du compte augmentent de 0,9 % entre 2011 et 2012 (+68,5 millions d'euros) pour s'établir à 7,81 milliards d'euros .

Les crédits du programme 821 « Avances à l'Agence de services et de paiement au titre du préfinancement des aides communautaires de la politique agricole commune » sont évalués, de manière relativement conventionnelle , à 7,5 milliards d'euros. Les documents budgétaires indiquent que « malgré un niveau relativement stable des aides directes agricoles versées par l'Union européenne, des incertitudes subsistent sur les modalités de versement et sur les autres ressources mobilisables pour le préfinancement des aides agricoles. Pour faire face à ces incertitudes, les crédits ouverts sur l'exercice 2012 pour préfinancer les aides agricoles sont reconduits au niveau retenu depuis la LFI pour 2008 » .

Le programme 823 « Avances à des organismes distincts de l'Etat et gérant des services publics » mobilisera 62,6 millions d'euros (+12,6 millions d'euros par rapport à 2011), qui comprennent :

1) comme en 2011, 50 millions d'euros de « provision » destinés à répondre par des avances de court terme à des besoins de trésorerie imprévus ou liés à des situations d'urgence.

2) 12,6 millions d'euros d'avances de moyen ou long terme en faveur de l' Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE) afin de financer les projets d'investissements votés par le conseil d'administration dans les établissements scolaires français à l'étranger. Ces avances feront l'objet de remboursements financés par ces établissements. Votre rapporteur spécial relève que cette inscription de crédits est la conséquence directe de l'adoption par le Parlement, dans le cadre de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 37 ( * ) , d'une règle d'interdiction aux organismes divers d'administration centrale (ODAC) de recourir à l'emprunt bancaire à plus d'un an.

Le programme 824 « Avances à des services de l'Etat » est enfin doté de 250,3 millions d'euros (+55,9 millions d'euros par rapport à 2011). Sur l'exercice 2012, le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » (BACEA) s'établit, à périmètre courant, à 2 044,8 millions d'euros (total net des dotations aux amortissements). Il est construit sur une hypothèse d'investissements de 197,1 millions d'euros. Le BACEA perçoit essentiellement en recettes des redevances de navigation aérienne ainsi qu'une quote-part de la taxe d'aviation civile. Il recourait également à l'emprunt auprès d'établissements bancaires auquel s'est substitué, à partir de 2005, un financement par des avances du Trésor à quoi correspond la présente inscription de crédits 38 ( * ) .

Le solde du compte est donc estimé à 125,52 millions d'euros fin 2012 , contre -20,16 millions d'euros fin 2011 (-105,36 millions d'euros). Ce déficit est exclusivement imputable au déséquilibre du BACEA.

B. LE COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS « ACCORDS MONÉTAIRES INTERNATIONAUX »

1. La traduction budgétaire de la coopération monétaire avec la zone franc

Le compte de concours financiers « Accords monétaires internationaux » est dédié à la coopération monétaire avec la zone franc . Il est destiné à garantir, en tant que de besoin, l'ancrage de la parité du taux de change sur l'euro et la garantie de convertibilité illimitée ( cf. encadré ci-après ). A cet effet, il retrace, en recettes et en dépenses, les opérations d'octroi et de remboursement des appels en garantie de convertibilité effectuées par le Trésor au profit des banques centrales liées à la France par un accord monétaire international. Le compte comporte trois programmes constitués d'une action unique visant la coopération monétaire avec les trois unions monétaires régionales de la zone franc, situées en Afrique subsaharienne :

1) l' Union monétaire ouest-africaine (UMOA), qui regroupe huit pays (Bénin, Burkina-Faso, Côte d'Ivoire, Guinée-Bissau, Mali, Niger, Sénégal et Togo) ;

2) l' Union monétaire de l'Afrique centrale (UMAC) 39 ( * ) qui concerne six pays (Cameroun, République centrafricaine, Congo, Gabon, Guinée équatoriale et Tchad) ;

3) l' Union des Comores (UC).

La coopération monétaire avec les pays de la zone franc est gérée par la direction générale du Trésor (DGT), en liaison avec l'agence comptable centrale du Trésor (ACCT), l'agence France Trésor (AFT) et la Banque de France. Aucun objectif ni indicateur de performance n'est associé aux programmes de la mission, dans la mesure où les mécanismes de la zone franc, prévus par les traités internationaux, s'imposent aux gestionnaires.

2. Une mission non dotée

Conformément à l'article 24 de la LOLF, la mission « Accords monétaires internationaux » a vocation à être dotée de crédits évaluatifs . Toutefois, eu égard aux niveaux importants de réserves détenues par les banques centrales de la zone franc et à la très faible probabilité d'appel en garantie de l'Etat qui en résulte, cette mission n'est dotée d'aucun crédit pour 2012, comme les années précédentes . En conséquence, elle ne fait pas l'objet d'un PAP annexé au présent PLF, de même qu'elle n'a pas fait celui, notamment, d'un RAP joint au projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion pour 2010.

La coopération monétaire avec les Etats membres de la zone franc

La coopération monétaire avec les quinze Etats membres de la zone franc, sans équivalent au plan international, est fondée sur quatre principes :

- la garantie illimitée du Trésor français à la convertibilité en euros des monnaies émises par les trois instituts d'émission de la zone (Banque centrale des Etats de l'Afrique de l'Ouest [BCEAO], Banque des Etats de l'Afrique centrale [BEAC] et Banque centrale des Comores). La parité des francs CFA (pour « communauté financière africaine ») d'Afrique de l'ouest et d'Afrique centrale est fixée à hauteur de 655,957 FCFA pour un euro, celle du franc comorien à hauteur de 491,96775 FC pour un euro ;

- la fixité des parités de convertibilité entre l'euro et les francs CFA ou le franc comorien, facteur de stabilité monétaire des pays de la zone franc ;

- la liberté des transferts au sein de chaque sous-ensemble ;

- la centralisation des réserves de change des Etats membres par les trois banques centrales de la zone et l'obligation, pour celles-ci, de déposer un pourcentage de leurs réserves auprès du Trésor français en contrepartie de la garantie apportée par la France. Ces réserves de change bénéficient également d'une garantie de non-dépréciation.

Cette coopération monétaire suppose des engagements budgétaires de la part de l'Etat français qui, depuis l'entrée en vigueur de la LOLF en 2006, se trouvent retracés par trois instruments budgétaires distincts :

- la garantie de convertibilité est appelée à s'exercer à travers le compte de concours financiers « Accords monétaires internationaux », qui n'est doté de crédits que si la dégradation de la situation financière de tout ou partie de la zone franc l'exige ;

- la rémunération des dépôts des banques centrales sur les comptes ouverts à l'Agence comptable centrale du Trésor (ACCT) est retracée par le programme « Charge de la dette et trésorerie de l'Etat » (action « Trésorerie de l'Etat ») de la mission « Engagements financiers de l'Etat » ;

- les crédits requis pour la garantie de non-dépréciation des avoirs extérieurs des banques centrales de la zone franc sont inscrits, le cas échéant, dans le compte d'opérations monétaires « Pertes et bénéfices de change ». Cette garantie de non-dépréciation, au titre de laquelle aucun versement n'a eu lieu depuis 2002, s'exerce à l'égard des droits de tirage spéciaux (DTS), unité de compte du FMI. Elle permet aux banques centrales d'accumuler des réserves en cas de taux de change favorable ; inversement, la garantie est mise en oeuvre lorsque le cours de l'euro (celui du franc avant 2002) est inférieur à celui du DTS.

À la suite de l'introduction de l'euro, la coopération monétaire dans les zones UMOA et UMAC a fait l'objet de réformes, respectivement en 2005 et en 2007, donnant une plus grande autonomie aux deux banques centrales, la BCEAO et la BEAC, dans la gestion de leurs avoirs et de leurs réserves de change. En outre, en limitant les avantages consentis sur le solde créditeur en compte d'opérations (une rémunération avantageuse et la garantie de change) à la seule quotité obligatoirement déposée, ces réformes ont permis une économie budgétaire sensible pour les finances publiques, particulièrement dans le contexte actuel de forte hausse des réserves de change des pays de la zone franc. En contrepartie, la France s'est engagée à soutenir l'intégration régionale de cette zone.

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie


* 32 « Art. 24. - Les comptes de concours financiers retracent les prêts et avances consentis par l'Etat. Un compte distinct doit être ouvert pour chaque débiteur ou catégorie de débiteurs. Les comptes de concours financiers sont dotés de crédits limitatifs, à l'exception des comptes ouverts au profit des Etats étrangers et des banques centrales liées à la France par un accord monétaire international, qui sont dotés de crédits évaluatifs.

« Les prêts et avances sont accordés pour une durée déterminée. Ils sont assortis d'un taux d'intérêt qui ne peut être inférieur à celui des obligations ou bons du Trésor de même échéance ou, à défaut, d'échéance la plus proche. Il ne peut être dérogé à cette disposition que par décret en Conseil d'Etat.

« Le montant de l'amortissement en capital des prêts et avances est pris en recettes au compte intéressé.

« Toute échéance qui n'est pas honorée à la date prévue doit faire l'objet, selon la situation du débiteur :

« - soit d'une décision de recouvrement immédiat, ou, à défaut de recouvrement, de poursuites effectives engagées dans un délai de six mois ;

« - soit d'une décision de rééchelonnement faisant l'objet d'une publication au Journal officiel ;

« - soit de la constatation d'une perte probable faisant l'objet d'une disposition particulière de loi de finances et imputée au résultat de l'exercice dans les conditions prévues à l'article 37. Les remboursements ultérieurement constatés sont portés en recettes au budget général. »

* 33 Qui sont des dépenses de titre 7 « Dépenses d'opérations financières ».

* 34 Chacun de ces programmes se trouve sous la responsabilité du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et, au plan administratif, de celle du directeur général du Trésor. La mise en oeuvre en est assurée par l'AFT.

* 35 Les 137 millions d'euros budgétés en 2011 correspondaient aux remboursements suivants : 15 millions d'euros par l'AFITF, 70 millions d'euros par France AgriMer, 2,5 millions par l'Autorité de régulation des activités ferroviaires (ARAF) et 49,5 millions d'euros résultant des remboursements dès 2011 d'avances inscrites à titre de provision.

* 36 19 453 627 euros au titre de l'avance 2005, 11 113 534 euros au titre l'avance consentie au BACEA dans le cadre de l'apurement des relations financières entre l'État et Aéroports de Paris, 11 444 444 euros au titre de l'avance 2007, 12 961 500 euros au titre de l'avance 2008, 26 125 000 euros au titre des avances octroyées en 2009, 25 074 459 euros au titre de l'avance 2010 et 16 198 545 euros au titre de l'avance 2011.

* 37 L'article 12 de la loi dispose que : « Nonobstant toute disposition contraire des textes qui leur sont applicables, ne peuvent contracter auprès d'un établissement de crédit un emprunt dont le terme est supérieur à douze mois, ni émettre un titre de créance dont le terme excède cette durée les organismes français relevant de la catégorie des administrations publiques centrales, au sens du règlement (CE) n° 2223/96 du Conseil, du 25 juin 1996, relatif au système européen des comptes nationaux et régionaux dans la Communauté, autres que l'Etat, la Caisse d'amortissement de la dette sociale, la Caisse de la dette publique et la Société de prises de participation de l'Etat. »

* 38 L'analyse de l'équilibre du BACEA est retracée dans l'annexe au présent rapport consacrée à la mission « Ecologie, développement et aménagement durables » de nos collègues Gérard Miquel, François Fortassin, Marie-Hélène des Esgaulx et Vincent Delahaye.

* 39 L'UMOA et l'UMAC ont été complétées par deux unions économiques, créées au premier trimestre 1994 : l'Union économique de l'Afrique de l'Ouest (UEOA), et l'Union économique de l'Afrique centrale (UEAC), chargées d'élaborer des politiques sectorielles communes et de veiller au respect des programmes de convergence économique arrêtés par leurs membres.