M. Dominique De Legge, rapporteur spécial

DEUXIÈME PARTIE :
LES POINTS DE VIGILANCE POUR 2015

I. LE NÉCESSAIRE RESPECT DU CALENDRIER DE LIVRAISON DES ÉQUIPEMENTS

De graves lacunes capacitaires pénalisent nos forces armées (voir infra ), alors même que les opérations extérieures se multiplient et s'intensifient. La loi de programmation militaire fixe un calendrier de livraison de nouveaux équipements destiné à combler ces lacunes. Les commandes, comme les livraisons attendues visent en premier lieu au remplacement de matériels qu'il n'est plus possible de prolonger davantage.

Les avions ravitailleurs actuels, les KC135, ont près de 50 ans. Les véhicules blindés actuellement déployés en RCA ont 40 ans, tout comme les hélicoptères Puma ont eux-aussi presque 40 ans.

Tout retard dans le remplacement de ces appareils se paiera doublement.

Sur le plan opérationnel , les capacités d'intervention des forces armées seront limitées ou les opérations se dérouleront dans des conditions de sécurité dégradées, lorsque les appuis nécessaires manqueront du fait d'un matériel défaillant. La question du ravitaillement en vol est sur ce point particulièrement aiguë.

Sur le plan financier , le coût du retard résulte de la nécessité de prolonger la vie de matériels vétustes. On observe de plus un coût de régénération des matériels anciens de retour d'OPEX (véhicules d'avant blindés par exemple) très supérieur aux prévisions.

Au total, ce sont près de 450 millions d'euros sur la période 2014-2019 , non prévus par la programmation, qui pourraient peser sur le budget de la défense, et en particulier celui de l'armée de terre.

II. LES RISQUES DU DÉPYRAMIDAGE

Le volume de déflation des officiers est porté pour 2015 à 1 000 ETP. En 2014, la même cible était prévue, mais seules 853 suppressions devraient finalement être réalisées.

Comme l'explique le secrétaire général pour l'administration du ministère de la défense : « Nous essaierons de faire mieux en 2015 et nous nous sommes organisés pour cela, mais je rappelle que nous n'avons pas les moyens d'obliger les officiers à partir : nous ne pouvons que les y inciter et, dans le cas où ils ne le font pas en nombre suffisant, compenser en recrutant moins. » 2 ( * )

Le fait est que, s'il est sans doute avantageux financièrement de procéder à un dépyramidage des effectifs en ciblant, plus que lors de la période précédente, les officiers, rien ne sert de fixer des objectifs irréalistes que le ministère ne pourra pas atteindre faute de moyens contraignants ou de dispositifs de départ volontaire suffisamment incitatifs.

Il faut en outre prendre garde aux effets pervers d'une politique de dépyramidage excessive et appliquée de manière trop rigide.

Le ralentissement des promotions et les baisses d'effectifs pèsent nécessairement et parfois lourdement sur le moral des personnels, dans une période où les forces armées, en perpétuelle réorganisation depuis une quinzaine d'année, sont en outre confrontées à des défis opérationnels d'une ampleur particulière et doivent répondre à un volume d'opérations extérieures très élevé.

Cet effet sur le moral renforce le risque, que comporte tout plan de départ volontaire, de voir partir en majorité les personnels les plus employables à l'extérieur, de par leurs compétences ou leur âge.

De manière plus générale, une armée de métier, pour attirer puis retenir des personnels aux compétences précieuses qu'elle a d'ailleurs contribué, au prix d'un coût certain, à développer, doit leur offrir des perspectives.

Sans que cela soit contradictoire, il faut également souligner qu'une armée qui, comme l'armée française, est destinée à s'engager effectivement dans des opérations de combat, ne peut se permettre de simplement geler ou drastiquement réduire ses recrutements en comptant sur les départs en retraite pour atteindre ses cibles d'effectif. Elle a un besoin constant de jeunes soldats, y compris de jeunes officiers.

On signalera que la « modération salariale » appliquée aux personnels du ministère de la défense, pour être nécessaire, ne contribue toutefois pas à améliorer l'attractivité de la condition militaire.

Les mesures statutaires et catégorielles

Le plan catégoriel de l'année 2015 s'établit à seulement 42 millions d'euros dont 32,1 millions d'euros pour le personnel militaire et 9,9 millions d'euros pour le personnel civil. Ces crédits sont en diminution depuis 2010 et stables entre 2014 et 2015.

En outre, 45 % de la programmation catégorielle 2015 est constituée de l'effet-report, nécessaire au financement en année pleine des mesures engagées en 2014.

Les principales nouvelles mesures statutaires prévues pour 2015, à hauteur de 22,7 millions d'euros, concernent principalement :

- la transposition de la revalorisation de la catégorie C mise en oeuvre au sein de la fonction publique au profit du personnel militaire assimilée (militaires du rang) pour 13,8 millions d'euros ;

- la mise en oeuvre de la quatrième annuité de la transposition du nouvel espace statutaire des catégories B (NES B) aux sous-officiers au 1er décembre 2015 (0,85 million d'euros) ;

- la transposition de mesures de la fonction publique hospitalière, issues du protocole Bachelot, aux cadres de santé paramédicaux et aides-soignants (0,65 million d'euros) ;

- la seconde annuité de la revalorisation de la catégorie C de la fonction publique et des premiers échelons du premier grade des B (SA et TSEF) conformément aux orientations gouvernementales (5,9 millions d'euros) ;

- la réforme de la grille indiciaire des agents des catégories B et C de la DGSE (0,77 million d'euros).

Conformément aux arbitrages interministériels, aucune mesure indemnitaire n'est inscrite dans le plan catégoriel 2015 en dehors du financement complémentaire des mesures engagées en 2014.

Source : ministère de la défense


* 2 Compte-rendu de la réunion de la commission de la défense et des forces armées du 8 octobre 2014.