MM. Philippe ADNOT et Michel BERSON, rapporteurs spéciaux

DEUXIÈME PARTIE :
L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR
(RAPPORTEUR SPÉCIAL : PHILIPPE ADNOT)

Relevant du ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, les programmes 150 « Formations supérieures et recherche universitaire » et 231 « Vie étudiante » bénéficient globalement d'un budget plus que préservé en 2016.

Le projet de loi de finances retient, en effet, une prévision de 15,4 milliards d'euros en autorisations d'engagement, soit une hausse de 1,6 % par rapport à 2015, et des crédits de paiement qui restent stables, avec 15,3 milliards d'euros (- 0,04 % par rapport à 2015).

En outre, en première lecture à l'Assemblée nationale, le Gouvernement a augmenté de 100 millions d'euros les crédits du programme 150 « Formations supérieures et recherche universitaire », tant en autorisations d'engagement qu'en crédits de paiement. Cette augmentation de 2,24 % en AE et 0,61 % en CP est présentée comme permettant de tenir compte de la dynamique du nombre d'étudiants inscrits à la rentrée 2015 (+ 1,4 %). Votre rapporteur spécial note surtout qu'elle correspond au montant du prélèvement opéré en 2015 sur les fonds de roulement de plusieurs établissements d'enseignement supérieur. Elle constitue donc plutôt un « rattrapage » .

Évolution des crédits consacrés à l'enseignement supérieur (programmes 150 et 231)

(en millions d'euros)

Consommés en 2014

Ouverts en 2015

Demandés en 2016

Évolution 2016/2015

Demandés en 2016 après la première lecture à l'AN

Évolution 2016/2015 après la première lecture à l'AN

150 - Formations supérieures et recherche universitaire

AE

12 664,36

12 702,02

12 906,75

1,61%

13 006,75

2,40%

CP

12 743,46

12 787,90

12 792,72

0,04%

12 892,72

0,82%

231 - Vie étudiante

AE

2 463,43

2 505,67

2 541,64

1,44%

2 541, 64

1,44%

CP

2 450,99

2 498,10

2 486,52

- 0,46%

2 486, 52

- 0,46%

Total enseignement supérieur

AE

15 127,79

15 207,69

15 448,40

1,58%

15 548,40

2,24%

CP

15 194,45

15 285,99

15 279,24

- 0,04%

15 379,24

0,61%

Nb : hors fonds de concours, avant seconde délibération.

Source : commission des finances d'après le rapport annuel de performances pour 2014 et le projet annuel de performances pour 2016

3,8 milliards d'euros sont consacrés à la recherche universitaire (action 17 « Recherche » du programme 150).

En tenant compte des crédits inscrits dans les autres programmes de la mission, l'enveloppe globale attribuée à l'enseignement supérieur, après la première lecture de l'Assemblée nationale, est en hausse de 2,25 % pour les AE (16,2 milliards d'euros) et de 0,62 % pour les CP (16 milliards d'euros) , avec :

- 298,4 millions d'euros en AE et 297,6 millions d'euros en CP attribués à l'enseignement supérieur agricole au sein du programme 142 ;

- 321,8 millions d'euros en AE et 310 millions d'euros en CP pour les organismes de formation supérieure et de recherche en matière économique et industrielle.

Malgré ces efforts financiers, le rapporteur spécial s'interroge de la place de l'enseignement supérieur et la recherche dans les ambitions du Gouvernement . Il regrette tout particulièrement que les efforts ne soient pas davantage tournés vers la valorisation de la recherche universitaire . Il considère également symbolique que ces domaines ne soient plus représentés qu'au niveau d'un secrétariat d'État depuis le dernier renouvellement gouvernemental.

I. LE PROGRAMME 150 « FORMATIONS SUPÉRIEURES ET RECHERCHE UNIVERSITAIRE »

A. UN PROGRAMME QUI CONCENTRE L'ESSENTIEL DES EFFORTS FINANCIERS DU GOUVERNEMENT DANS LE CADRE DE LA MISSION

1. Un programme aux crédits initialement maintenus au niveau de 2015...

Avec respectivement 12,9 milliards d'euros en AE et 12,8 milliards d'euros en CP, le programme 150 « Formations supérieures et recherche universitaire » voit ses crédits stabilisés (+ 0,04 % pour les crédits de paiement), voire en hausse de 1,6 % pour les autorisations d'engagement par rapport à 2015.

Parmi les principales évolutions, 49,8 millions d'euros supplémentaires (AE=CP) bénéficient à l'action 01 « Formation initiale et continue du baccalauréat à la licence », poursuivant ainsi la tendance enregistrée depuis plusieurs années.

Parallèlement, l'action 14 « Immobilier » connaît une forte augmentation de 138,2 millions d'euros de ses autorisations d'engagement par rapport à 2015, compte tenu essentiellement de la signature attendue de trois contrats de partenariat public-privé (+ 163,35 millions d'euros) et des contrats de plan État-régions - CPER - (+ 31 millions d'euros). Les crédits de paiement sont parallèlement réduits de 68 millions d'euros, l'essentiel portant sur les CPER.

Les subventions pour charges de service public versées aux opérateurs augmentent globalement de 138 millions d'euros, pour atteindre 11,933 milliards d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement.

Par ailleurs, le programme contribue à l'effort de redressement des comptes publics à hauteur de 20 millions d'euros sur les subventions pour charges de service public.

Présentation par action de l'évolution des crédits demandés entre 2015 et 2016

(en euros)

LFI 2015

PLF 2016

Évolution 2015/2014

Action 01 - Formation initiale et continue du baccalauréat à la licence

AE

2 882 344 011

2 932 137 874

1,73 %

CP

2 882 344 011

2 932 137 874

1,73 %

Action 02 - formation initialement continue au niveau master

AE

2 381 159 391

2 389 312 420

0,34 %

CP

2 381 159 391

2 389 312 420

0,34

%

Action 03 - formation initiale et continue de niveau doctorat

AE

351 647 169

350 633 996

- 0,29 %

CP

351 647 169

350 633 996

- 0,29 %

Action 04 - établissements d'enseignement privés

AE

78 920 852

78 895 852

- 0,03 %

CP

78 920 852

78 895 852

- 0,03 %

Action 05 - bibliothèque et documentation

AE

431 591 536

431 322 171

- 0,06 %

CP

431 591 536

431 322 171

- 0,06 %

Action 13 - diffusion des savoirs et musées

AE

106 373 731

102 629 699

- 3,52 %

CP

106 373 731

102 629 699

- 3,52 %

Action 14 - immobilier

AE

1 159 007 003

1 297 278 034

11,93 %

CP

1 244 881 167

1 183 244 296

- 4,95 %

Action 15 - pilotage et support du programme

AE

1 512 781 627

1 509 856 782

- 0,19 %

CP

1 512 781 627

1 509 856 782

- 0,19 %

Action 17 - recherche (nouveau)

AE

3 798 196 392

3 814 686 201

0,43 %

CP

3 798 196 392

3 814 686 201

0,43 %

Total du programme 150

AE

12 702 021 712

12 906 753 029

1,61 %

CP

12 787 895 876

12 792 719 291

0,04 %

Source : commission des finances du Sénat, d'après les données du projet annuel de performances (PAP) pour 2016

2. ... et bénéficiant d'un abondement supplémentaire de 100 millions d'euros à l'Assemblée nationale qui équivaut au prélèvement sur fonds de roulement réalisé l'an dernier sur certains établissements

En maintenant les crédits de paiement au montant de 2015, le projet de loi de finances pour 2016 tel que déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale ne tenait pas compte du prélèvement sur fonds de roulement de 100 millions d'euros opéré par le Gouvernement cette année.

Pour mémoire, ce prélèvement s'est concrétisé par une dotation moins élevée pour les 47 établissements concernés en 2015, parmi lesquels onze universités et vingt-deux écoles d'ingénieurs.

Toutefois, un amendement du Gouvernement a été adopté par l'Assemblée nationale en première lecture, afin d' abonder le programme 150 de 100 millions d'euros supplémentaires , portant ainsi les crédits initiaux à 13 milliards d'euros en AE et 12,9 milliards d'euros en CP pour 2016.

Évolution des crédits du programme 150 « Formations supérieures et recherche universitaire » à l'issue de la première lecture à l'Assemblée nationale

(en euros)

LFI 2015

PLF2016

Évolution 2015/2014

Total du programme 150 (PLF 2016 déposé à l'Assemblée nationale)

AE

12 702 021 712

12 906 753 029

1,61 %

CP

12 787 895 876

12 792 719 291

0,04 %

Total du programme 150 (PLF 2016 tel qu'adopté par l'Assemblée nationale)

AE

12 702 021 712

13 006 753 029

2,40 %

CP

12 787 895 876

12 892 719 291

0,82 %

Nb : avant seconde délibération.

Source : commission des finances

En outre, 350 000 euros ont été ajoutés en seconde délibération afin de mettre en oeuvre les mesures prévues par le protocole relatif à l'avenir de la fonction publique et à la modernisation des parcours professionnels, des carrières et des rémunérations (PPCR).

Interrogé sur la répartition de ces 100 millions d'euros supplémentaires entre les différentes actions du programme, Thierry Mandon, secrétaire d'État chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche, a indiqué que ses modalités restaient encore à définir précisément mais qu'elle aurait vocation à redistribuer ces montants parmi les établissements connaissant les plus fortes tensions en termes de progression du nombre d'étudiants.

Il est donc fort probable que les formations universitaires initiales du niveau de la licence soient prioritaires, l'objet même de l'amendement faisant état d'une « démographie étudiante dynamique » et du fait que le Gouvernement a « entendu la demande provenant de la communauté universitaire ».

En tout état de cause, ces crédits ne devraient pas être spécifiquement alloués aux établissements (universités, écoles d'ingénieurs et autres) ayant été prélevés l'an dernier pour participer à l'effort de redressement des comptes publics.

Les établissements de l'enseignement supérieur privé sous contrat avec l'État devraient, quant à eux, en être exclus.

3. Des crédits très majoritairement consacrés aux subventions pour charges de service public des opérateurs du programme, en hausse de 1,2 %

Les crédits de fonctionnement représentent 93 % des crédits du programme.

Répartition des crédits de paiement du programme par type de dépenses

(en %)

Source : commission des finances d'après le projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2016

D'un montant de 11,95 milliards d'euros, avant abondement de 100 millions d'euros du programme 150 par l'Assemblée nationale en première lecture, ces dépenses de fonctionnement correspondent principalement aux subventions pour charges de service public servies aux opérateurs du programme.

Ainsi, avec 11,932 milliards d'euros en autorisations de programmes et en crédits de paiement, ces subventions sont globalement en hausse de 138 millions d'euros , soit + 1,2 % par rapport au projet de loi de finances pour 2015 5 ( * ) .

Elles représentent 10,622 milliards d'euros pour les crédits de masse salariale et 1,226 milliard d'euros pour les crédits de fonctionnement (hors dépenses immobilières et financement de l'enseignement supérieur privé).

Il convient de noter qu'un changement de périmètre a été opéré dans le projet annuel de performances, au sein de la justification au premier euro du programme, afin de « clarifier la budgétisation et la programmation des crédits ». Une partie des crédits jusqu'à présent prise en compte dans le fonctionnement a ainsi été requalifiée en crédits de masse salariale.

Les universités et les établissements assimilés représentent 10,79 milliards d'euros en AE et 10,65 milliards d'euros en CP.

Hors différents transferts tenant compte de mesures prises en gestion au cours de l'année 2015, la hausse des crédits consacrés aux subventions pour charges de service public s'explique, tout d'abord, par la création de 1 000 emplois, pour la quatrième année consécutive, pour atteindre le nombre de 5 000 nouveaux emplois d'ici 2017, conformément à l'engagement du Président de la République (+ 59,7 millions d'euros, dont 21,9 millions d'euros au titre du compte d'affectation spéciale « Pensions »).

Consolidation de différents transferts prévus par le projet de loi de finances pour 2016 au titre des subventions pour charges de service public

Mesures de transferts

Montant
(en millions d'euros)

Transfert de 20 équivalents temps-plein travaillés (ETPT) vers le ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt (programme 142 « Enseignement supérieur et recherche agricole »)

- 1,2

+ 1 511 ETPT dans les établissements ayant accédé aux responsabilités et compétences élargies (RCE) au 1 er janvier 2015*

89,4

- 185 ETPT au titre du schéma d'emplois pour 2015, compte tenu des établissements n'ayant pas accédé aux RCE

- 11,05

Consolidation de la mesure indemnitaire prise en fin d'année 2015 au bénéfice des personnels de catégories B et C

3,3

Transfert au programme 172 du financement de la Cité nationale de l'histoire de l'immigration

- 0,46

Total

79,99

* Il s'agit de l'école nationale supérieure d'arts et métiers (Ensam), l'école nationale supérieure de chimie de Rennes, l'école nationale supérieure d'informatique pour l'industrie et l'entreprise et l'institut national des sciences appliquées de Rennes.

Source : commission des finances d'après le projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2016

Les 1 000 emplois seraient ainsi répartis en 2016 :

- 552 emplois pour « améliorer le taux d'encadrement des étudiants et participer au rééquilibrage des dotations entre les universités » ;

- 348 emplois pour accompagner le dialogue contractuel, à partir des regroupements d'établissements ou d'autres actions communes réalisées dans le cadre des contrats de site ;

- 80 emplois pour soutenir des dispositifs spécifiques (nationaux ou de site) ;

- 20 emplois pour l'enseignement supérieur agricole.

Selon les chiffres du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche, les 3 000 emplois créés depuis 2013 se répartissent ainsi :

- 2 450 emplois pour les universités ;

- 127 emplois pour les écoles d'ingénieurs ;

- 37 emplois pour les IEP ;

- 230 emplois pour une dizaine d'établissements spécifiques ;

- 156 emplois attribués directement aux communautés d'universités et d'établissements (Comue).

S'agissant des Comue, votre rapporteur spécial suit attentivement la création de ces regroupements d'établissements qui, en tant que nouvelles structures, ne doivent pas conduire à créer des doublons et donc des surcoûts pour l'enseignement supérieur.

Ensuite, comme chaque année, une enveloppe, fixée à 24,9 millions d'euros pour 2016, correspond aux crédits nécessaires pour mettre en oeuvre la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emplois des agents contractuels.

Compte tenu de la création des 1 000 emplois supplémentaires, des différents transferts présentés ci-dessus ainsi que d'un transfert interne de 299 ETPT en raison de la fusion de deux écoles (Centrale Paris et Supelec), le plafond d'emplois des opérateurs du programme est en hausse de 1,6 % (+ 2 605 ETPT) par rapport à la loi de finances initiale pour 2015, pour atteindre 163 833 ETPT .

Les emplois hors plafonds représentent quant à eux 25 277 ETPT, en progression de 2,6 % (+ 638 ETPT). Selon le projet annuel de performances, cette « hausse prévisionnelle résulte pour une part d'un meilleur décompte des emplois par les établissements eux-mêmes, mais aussi des fluctuations inhérentes aux contrats de recherche ou de formation continue passés par les établissements ».

4. La baisse continue des dépenses de personnel, au gré du passage aux RCE des établissements d'enseignement supérieur

Pour 2016, le projet de loi de finances prévoit 494,4 millions d'euros de dépenses de personnel (en AE et en CP), correspondant à une baisse de 13,7 % par rapport à la loi de finances pour 2015. Environ 155 millions d'euros correspondent au compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions ».

Évolution du plafond d'emplois entre 2008 et 2016 -
titre 2 du programme 150

(en ETPT)

Source : commission des finances d'après les lois de finances initiales pour 2008 à 2015 et le projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2016

Comme pour les années précédentes, l'essentiel de cette diminution des crédits s'explique par le passage aux RCE des établissements d'enseignement supérieur, correspondant au transfert du titre 2 au titre 3 de 1 511 ETPT 6 ( * ) .

Il convient également de noter que 185 ETPT sont transférés du titre 3 au titre 2 et correspondent aux emplois créés, parmi les 1 000 prévus en 2015, chez des opérateurs dont les personnels restent encore rémunérés par l'État.

Au total, le plafond d'emplois de l'État est réduit de 1 327 ETPT par rapport à 2015, pour atteindre un total de 7 945 ETPT .

Compte tenu des 163 833 ETPT prévus pour les opérateurs du programme, les emplois sous plafonds s'élèvent à 171 778 ETPT.

5. Les dépenses relatives à l'immobilier : un budget à la hauteur des attentes ?

Regroupés au sein de l'action 14 « Immobilier », les crédits relatifs à la dépense immobilière s'élèvent à 1,3 milliard d'euros en autorisations d'engagement et 1,18 milliard d'euros en crédits de paiement, soit respectivement une augmentation de près de 12 % et une baisse de près de 5 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2015. Le projet de loi de finances pour 2016 prévoit également 15 millions d'euros en AE et 39,2 millions d'euros en CP au titre de fonds de concours.

La hausse des autorisations d'engagement s'explique principalement par la signature de trois nouveaux contrats de partenariat public-privé et par les contrats de plan État-régions 2015-2020.

Parallèlement, les crédits de paiement consacrés aux CPER se réduisent de 57 millions d'euros (- 30 %), avec une enveloppe allouée aux CPER 2007-2014 plus modeste qu'en 2015 (108,8 millions d'euros contre 184 millions d'euros) et un montant encore modeste pour les CPER 2015-2020.

Hors titre 2, la dépense immobilière s'élève à 1,26 milliard d'euros en AE et 1,14 milliard d'euros en CP, ainsi répartis :

Ventilation de la dépense immobilière

(en millions d'euros)

PLF 2015

PLF 2016

Évolution PLF 2016/PLF 2015 (en pourcentage)

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Opérations CPER

119,93

195,99

150,92

138,83

25,84%

- 29,16%

Opérations hors CPER hors PPP

19,72

29,82

3,62

8,25

- 81,64%

- 72,33 %

Partenariat public privé (PPP)

72,55

56,17

208,57

84,82

187,48%

51,01 %

Constructions-restructuration

212,20

281,98

363,12

231,89

71,12 %

- 17,76 %

Masse salariale RCE

393,28

393,28

399,78

399,78

1,65 %

1,65 %

Maintenance et logistique

433,97

433,97

433,73

433,73

- 0,06 %

- 0,06 %

Travaux de mise en sécurité

71,13

87,22

59,33

76,52

- 16,59 %

- 12,27 %

Total

1 110,58

1 196,45

1 255,96

1 141,92

13,09 %

- 4,56 %

Source : d'après les données du PAP 2014 et du PAP 2015 relatifs à la présente mission

Il convient de noter que, parmi ces crédits, figurent des dépenses de fonctionnement, qui prennent notamment la forme de subventions pour charges de service public versées aux opérateurs du programme 7 ( * ) .

Les dépenses d'investissement et les dépenses d'opérations financières figurent, quant à elles, uniquement sur l'action 14 « Immobilier ».

Les dépenses d'investissement s'élèvent ainsi à 45,3 millions d'euros en AE et 65,4 millions d'euros en CP et sont quasi intégralement destinées aux contrats de plan État-régions 8 ( * ) , de même que les dépenses d'opérations financières, qui représentent 317,21 millions d'euros en AE et 180,41 millions d'euros en CP 9 ( * ) .

Votre rapporteur spécial se félicite de ces nouveaux contrats de plan mais constate qu'ils s'avèrent d'une ampleur plus modeste que les précédents.

En effet, à ce stade, l'enveloppe contractualisée par l'État s'élèverait à 990,25 millions d'euros, dont 898,6 millions d'euros pour le programme 150 « Formations supérieures et recherche universitaire » et 91,65 millions d'euros pour le programme 231 « Vie étudiante », tandis que, pour les CPER 2007-2014, 2,12 milliards d'euros étaient contractualisés, dont 1,95 milliard pour le programme 150 et 168,67 millions d'euros pour le programme 231. Il convient toutefois de rappeler qu'à sa clôture le 31 décembre 2014, le taux d'exécution des autorisations d'engagement s'élevait à 78 % (soit 1,6 milliard d'euros qui devrait être couvert à plus de 94 % par des crédits de paiement d'ici à la fin 2016).

En outre, votre rapporteur spécial espère que les collectivités territoriales parviendront à apporter l'indispensable soutien financier à ces contrats de plan, dans un contexte de réduction des dotations.

Il est, enfin, de bon sens que les CPER 2015-2020 ne reposent plus essentiellement sur la création de nouveaux bâtiments mais, au contraire, tendent à rénover « un parc vieillissant, pour l'adapter aux évolutions des usages et assurer sa mise aux normes notamment en matière d'accessibilité et de performance énergétique » (selon le projet annuel de performances).

État du financement des CPER 2015-2020

Outre l'enveloppe de l'État actuellement fixée à 990,25 millions d'euros, le volet « immobilier universitaire » des CPER 2015-2020 devrait bénéficier des participations :

- des régions , à hauteur d'environ 900 millions d'euros ;

- d'autres collectivités territoriales , pour environ 350 millions d'euros ;

- des établissements , notamment du Centre national des oeuvres universitaires et scolaires (Cnous) et des centres régionaux des oeuvres universitaires et scolaires (Crous), de l'ordre de 100 millions d'euros.

Pour 2015 , avec 119,9 millions d'euros sur le programme 150 et 20,5 millions d'euros sur le programme 231 inscrits en loi de finances initiale pour 2015, les autorisations d'engagement devraient permettre d'atteindre un taux d'exécution en fin d'année d'un peu moins de 13 % (au lieu des 16 % que représente une annuité théorique). Leur couverture en crédits de paiement sera, conformément à la clé arbitrée pour cette génération de CPER, de 10 % sur le programme 151 et de 25 % sur le programme 231.

S'agissant du projet de loi de finances pour 2016 , l'enveloppe en autorisations d'engagement s'élèvera à 171,4 millions d'euros (dont 150,9 millions d'euros sur le programme 150 et 20,5 millions d'euros sur le programme 231), conforme à une annuité théorique (un sixième de l'enveloppe contractualisée) à laquelle s'ajoute une somme égale à un cinquième du rattrapage de la dotation 2015. L'enveloppe de crédits de paiement sera de 30 millions d'euros sur le programme 150 et de 15,4 millions d'euros sur le programme 231.

Source : commission des finances d'après les réponses au questionnaire budgétaire

Concernant les partenariats public-privé, dix d'entre eux font actuellement l'objet d'un financement par le programme 150 « Formations supérieures et recherche universitaire », avec une dotation pour 2016 de 208,6 millions d'euros en AE et 84,8 millions d'euros en CP.

Par ailleurs, financé par une dotation non consomptible de 6 milliards d'euros issue de crédits extrabudgétaires, dont 1 milliard d'euros spécifiquement attribués à l'opération du plateau de Saclay par le premier programme d'investissement d'avenir (PIA1), le « Plan Campus » contribue également à la dépense immobilière en faveur des établissements d'enseignement supérieur.

Confiée à l'Agence nationale pour la recherche, cette dotation est rémunérée à hauteur de 4 %. Certaines opérations ont également obtenu des crédits budgétaires.

Financement par l'État du plan « Campus »

SITE

DOTATION

INTERETS DE LA DOTATION EN DEPOT À L'AGENCE NATIONALE DE LA RECHERCHE

PROGRAMME 150
Autorisations d'engagement

Allouée

Transférée

Alloués (conventions)

Versés

Prévues

Déléguées au 31/07/2015

Aix-Marseille

500

500

42

33,7

Bordeaux

475

70,1

64,3

Grenoble

400

400

34,2

32,8

Lyon

575

212

51,8

33,2

Montpellier

325

32,8

31,5

Strasbourg

375

43,2

22,8

Toulouse*

350

35,7

19,2

175

202

Paris-Condorcet

450

69,5

64,1

Paris-Centre

700

155,8

104,7

Saclay

850

40

76,5

44,0

Saclay **

1 000

1 000

Lille

7,5

2,2

110

52

Lorraine

90

36,8

Auvergne

30

31

Bourgogne

20

24

Bretagne

30

41

Cergy-Pontoise

20

-

Nantes

30

25,8

Nice

30

1

Paris-Est

55

-

Valenciennes

20

18,4

Source : réponse au questionnaire budgétaire

Les collectivités territoriales se sont engagées, pour leur part, à participer à hauteur de 1,333 milliard d'euros dans les opérations du plan « Campus ».

6. Les dépenses d'intervention : la stabilisation de la dotation allouée à l'enseignement supérieur privé après trois années de baisse consécutives

Les dépenses d'intervention s'élèvent à 104,07 millions d'euros en 2016, contre 97,74 millions d'euros en 2015, soit une augmentation de 6,5 %.

Cette progression s'explique surtout par la hausse de 6 millions d'euros des crédits d'intervention inscrits sur l'action 15 « Pilotage et support du programme » et qui concernent :

- le renforcement des capacités de gouvernance, de pilotage et de gestion de l'activité universitaire, pour 3 millions d'euros, et le fonctionnement de l'Institut de France, avec 2,8 millions d'euros, soit un total de 5,8 millions d'euros (contre 4,7 millions d'euros en 2015) ;

- le développement de la dimension internationale de l'enseignement supérieur, pour 4,6 millions d'euros (contre 3,2 millions d'euros en 2015) ;

- le dispositif géré par l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss) pour le développement des jeunes entreprises universitaires, pour 5,1 millions d'euros (contre 4,3 millions d'euros en 2015) ;

- le développement des technologies de l'information et de la communication, pour lequel 2,8 millions d'euros sont prévus alors qu'aucun crédit n'était inscrit à ce titre dans le projet de loi de finances pour 2015.

L'essentiel des crédits d'intervention (75 %) concerne toutefois la dotation allouée aux établissements de l'enseignement supérieur privés sous contrat avec l'État. Celle-ci, prévue à l'action 04 « Établissements d'enseignement privés », s'établit à 78,9 millions d'euros en AE et CP . Après trois années successives de baisse, cette dotation est stabilisée pour 2016 (- 0,03 % par rapport à 2015).

Votre rapporteur spécial reviendra sur ce point dans la suite de son rapport, considérant que l'État doit aider ces établissements qui, avec une modeste subvention publique, parviennent à développer une offre de qualité et pour un nombre toujours plus important d'étudiants .

B. LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. Le maintien indispensable d'autres ressources en dépit des indéniables efforts budgétaires de l'État

Comme pour 2015, le rapporteur spécial ne peut que constater les efforts consentis par le Gouvernement pour sanctuariser les crédits de l'enseignement supérieur alors que la contrainte budgétaire pesant sur notre pays est particulièrement forte . Les 100 millions d'euros de crédits supplémentaires permettent ainsi de remettre à niveau le montant des subventions pour charges de service public après les prélèvements opérés en 2015 sur les fonds de roulement de certaines universités et écoles.

Pour autant, à l'occasion de ses auditions mais aussi de la restitution de l'enquête de la Cour des comptes commandée par votre commission des finances sur le bilan de l'autonomie financière des universités 10 ( * ) , votre rapporteur spécial a pu constater que les autres ressources des établissements de l'enseignement supérieur restaient très insuffisamment développées . Or, cette situation est particulièrement dommageable car ce sont notamment ces ressources propres qui octroient généralement aux responsables une légère marge de manoeuvre par-delà la gestion courante de l'établissement.

La question du financement des universités et, plus généralement, des établissements publics de l'enseignement supérieur est d'autant plus cruciale que le nombre d'étudiants ne cesse d'augmenter .

Ainsi, le nombre d'étudiants est estimé à 2,507 millions d'étudiants à la rentrée 2015, correspondant à une hausse de 1,3 % par rapport à 2014. Thierry Mandon, secrétaire d'État chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche, a indiqué à votre rapporteur spécial qu'au 20 octobre, la hausse du nombre d'étudiants constatée s'établissait entre 38 500 à 40 000 étudiants, hors double-compte, c'est-à-dire sans tenir compte des étudiants qui seraient déjà inscrits (notamment en classe préparatoire aux grandes écoles ou en double-cursus). Cette tendance devrait se poursuivre, d'autant plus avec les intentions affichés par le Président de la République de reprendre l'objectif fixé par le comité pour la stratégie nationale de l'enseignement supérieur (StraNES) d'obtenir 60 % de diplômés de l'enseignement supérieur dans une classe d'âge.

Votre rapporteur spécial considère que les ressources , et en particulier la dotation de l'État, doivent permettre de couvrir les besoins nécessaires pour garantir la réussite de tous . Toutefois, il convient également de s'assurer de la qualité de l'orientation des étudiants, sans quoi l'accès à l'enseignement supérieur ne saurait leur assurer un réel avenir professionnel .

Concernant les ressources, autres que la dotation de l'État, il convient notamment de signaler le développement, encore trop faible comparé au potentiel attendu, de la formation continue ou encore de la mise en place de fondations .

Comme votre rapporteur spécial le laissait craindre dans son rapport relatif à la loi de finances pour 2015, cette année est également marquée par une dramatique baisse de recettes issues de la taxe d'apprentissage pour l'ensemble des établissements de l'enseignement supérieur.

Certes, l'impact de la réforme ayant conduit à cette situation est encore à mesurer précisément et varie en fonction du montant que représentait initialement cette ressource dans le budget de chaque établissement.

Pour autant, selon une enquête menée par la Conférence des grandes écoles (CGE) et la Conférence des directeurs des écoles françaises d'ingénieurs (CDEFI) sur un panel représentatif de 120 écoles, les recettes issues de la part « barème » de la taxe d'apprentissage auraient connu une baisse moyenne de 37 % , correspondant à 60 millions d'euros , toutes spécialités confondues. Plus spécifiquement, les écoles d'ingénieurs concernées par l'étude enregistreraient une perte globale de 17 millions d'euros représentant une perte de 193 euros par étudiant. Pour les écoles de management de la CGE, la baisse du barème engendrerait une diminution de 30 millions d'euros, soit environ 300 euros par étudiant 11 ( * ) .

Thierry Mandon, secrétaire d'État chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche, aurait lui-même reconnu devant la CDEFI qu'il avait été « surpris par la violence de l'impact de la réforme », selon la presse, et il a confirmé à votre rapporteur spécial qu'un groupe de travail avait été constitué afin d'examiner concrètement la situation des écoles d'ingénieurs.

Concernant les universités, une enquête devrait être réalisée par l'inspection générale de l'éducation nationale et de la recherche (IGAENR). La Conférence des présidents d'universités estime que la baisse pourrait atteindre 20 % à 25 % des recettes entre 2014 et 2015, alors que 80 000 apprentis sont accueillis dans les universités et que la taxe d'apprentissage représente une ressource estimée à 100 millions d'euros par an.

Une réflexion devra être menée et des solutions trouvées lorsque ces chiffres seront confirmés . Au-delà des conséquences financières qu'elle entraîne pour certaines écoles particulièrement touchées, cette réforme risque de remettre en cause le développement de l'apprentissage dans les établissements de l'enseignement supérieur.

Votre rapporteur spécial souhaite également rappeler, une nouvelle fois, sa conviction selon laquelle les frais d'inscription demandés aux étudiants restent insuffisamment élevés à l'université . 184 euros pour une année d'études de niveau licence restent très largement insuffisants et les droits pourraient être sensiblement relevés 12 ( * ) . Le renforcement du système de bourses permettrait d'éviter de dissuader les étudiants issus de milieux les plus modestes de poursuivre leurs études.

Le gel du montant des droits d'inscription pour les diplômes nationaux décidé par le Gouvernement à la rentrée 2015 constitue par là même une erreur et ne repose sur aucune justification tangible, si ce n'est faire plaisir aux représentants des étudiants.

Votre rapporteur spécial réitère également sa suggestion d'augmenter au moins les frais de scolarité des étudiants étrangers, souvent étonnés du faible coût de l'enseignement proposé. Il lui a notamment été rapporté que certains étudiants hésitaient à venir étudier en France, doutant de la qualité des cours proposés compte tenu de la faiblesse des droits d'inscription.

Enfin, la diversification des ressources des universités passe également par le développement de leurs contrats de recherche . À cet effet, votre rapporteur spécial proposera un amendement sur le crédit impôt recherche, dans le cadre de l'examen des articles non rattachés de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2016. Afin que les universités de recherche disposent de ressources plus importantes, il proposera ainsi que, pour les entreprises les plus importantes (autres que les petites et moyennes entreprises au sens du droit communautaire), au moins 10 % des dépenses de recherche ouvrant droit au bénéfice du CIR soient réalisées dans le cadre de laboratoires universitaires.

Cette condition permettrait de s'assurer qu'un montant significatif des dépenses ouvrant droit au crédit impôt recherche bénéficie à la recherche universitaire , alors qu'actuellement, moins de 5 % de l'assiette du CIR relève de la recherche par des organismes publics.

2. La confirmation d'une situation financière plutôt satisfaisante des universités, parfois au prix de choix de court terme et susceptibles d'engager l'avenir

Comme indiqué précédemment, la Cour des comptes a réalisé une enquête sur le bilan de l'autonomie financière des universités 13 ( * ) , à la suite de la loi du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités (LRU) 14 ( * ) .

La Cour des comptes confirme la situation « globalement satisfaisante » des universités à l'issue de ce passage à l'autonomie, au regard notamment de l'importance de leur fonds de roulement, qui s'élève à 1,5 milliard d'euros en 2014, et de leur trésorerie, avec 2,2 milliards d'euros. Elle met également en évidence une capacité d'autofinancement reconstituée, avec 438 millions d'euros.

Pour autant, il convient de préciser que, s'agissant des fonds de roulement, seule une faible part s'avère réellement mobilisable pour les universités, comme l'a démontré le rapport inter-inspections sur la situation financière des universités 15 ( * ) , qui l'établit à seulement 25 % à 35 % du total.

En outre, la situation des universités s'avère variable puisque quatre d'entre elles disposaient d'un fonds de roulement couvrant moins de 15 jours de fonctionnement (16 ont moins de 30 jours) tandis que 11 d'entre elles pouvaient couvrir jusqu'à 100 jours. Selon les informations recueillies auprès du ministère, 17 universités ont approuvé un budget en déficit en 2015, ce qui est plus élevé qu'en 2014 (avec seulement dix universités). Toutefois, le nombre d'universités constatant réellement un déficit en fin d'année est resté stable d'une année à l'autre, avec sept universités concernées en 2014, dont trois en double-déficit.

L'équilibre des comptes des universités peut également parfois s'opérer au prix d'arbitrages lourds et engageants pour l'avenir.

Comme votre rapporteur spécial a déjà pu le mettre en évidence lors de l'examen des précédentes lois de finances, les universités sont notamment susceptibles de geler des emplois afin de maîtriser leurs dépenses de personnel . Pour mémoire, celles-ci représentaient 10,4 milliards d'euros en 2014, soit près de 84 % des charges des universités. Ainsi, malgré la création de 1 000 emplois par an assurée par le budget de l'État, rien ne garantit que l'encadrement des étudiants ne se soit, en réalité, amélioré .

De même, les travaux de la Cour des comptes ont mis en évidence le fait que les dépenses de maintenance et de gros entretien-renouvellement (GER) pouvaient constituer des variables d'ajustement pour les universités . Ainsi, la Cour des comptes considère que « la baisse globale de 18,89 % constatée entre 2010 et 2012 dans le bilan réalisé par le ministère (avec toutefois une prévision de dépense plus élevée en 2013) peut être corrélée avec la diminution constatée des résultats comptables sur la période 2009-2012 . »

Les économies réalisées sur les postes de maintenance et d'entretien, voire sur les projets d'investissement, sont susceptibles de peser pour l'avenir , avec ensuite le risque d'un engagement de frais encore plus important compte tenu de la détérioration des bâtiments . La qualité de l'accueil des étudiants et des personnels pourrait également s'avérer dégradée .

3. Poursuivre l'autonomie des universités : une nécessité

À l'occasion de la remise de l'enquête précitée de la Cour des comptes sur le bilan de l'autonomie financière des universités, votre rapporteur spécial n'a pu que constater les importants progrès réalisés en termes de gestion par les établissements d'enseignement supérieur lors de leur passage aux responsabilités et compétences élargies. L'autonomie des universités doit se poursuivre, et principalement dans deux domaines : les ressources humaines et la gestion du patrimoine immobilier .

S'agissant de la gestion des ressources humaines , les universités sont encore très largement contraintes par les décisions de l'État, tant en termes de recrutement que de gestion des carrières. Il appartient de laisser à chacune d'entre elles la possibilité de définir plus librement leur propre politique de ressources humaines, dans le respect d'un cadre qui resterait national.

Ensuite, l'autonomie des universités ne pourra être véritablement aboutie que si celles-ci sont également propriétaires de leur patrimoine immobilier .

Le dispositif expérimental de dévolution actuellement applicable à trois universités, avec une dotation annuelle de plus de 20 millions d'euros inscrits au programme 150 « Formations supérieures et recherche universitaire », ne peut, en l'état, être généralisé puisqu'il aboutirait à un coût de 850 millions d'euros par an selon l'estimation de la Cour des comptes.

Pour autant, votre rapporteur spécial pense que le processus de dévolution du patrimoine ne doit pas s'arrêter et que d'autres universités pourraient en bénéficier, y compris en faisant évoluer les conditions du transfert de propriété.

Thierry Mandon, secrétaire d'État chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche, a affirmé pour sa part, à votre rapporteur spécial, que la dévolution du patrimoine constituait une des priorités de son ministère et qu'il cherchait une solution « innovante, juste et gérable pour les universités » .

Lors de l'audition pour suite à donner à l'enquête de la Cour des comptes, Simone Bonnafous, directrice générale de l'enseignement supérieur et de l'insertion professionnelle, a indiqué qu'une des pistes à l'étude consistait à utiliser le véhicule du troisième programme d'investissement d'avenir annoncé par le Président de la République (PIA 3).

4. Une réforme du modèle de répartition des crédits pour les universités de nouveau au point mort

Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2015, votre rapporteur spécial avait indiqué que le Gouvernement travaillait sur un projet de réforme du modèle de répartition des universités, soutenant lui-même depuis de nombreuses années maintenant la nécessaire évolution du modèle actuel « Sympa » (Système de répartition des moyens à la performance et à l'activité) 16 ( * ) . Un comité de pilotage réunissant le ministère, la Conférence des présidents d'université (CPU) et la Conférence des directeurs des écoles françaises d'ingénieurs (CDEFI) a été mis en place en avril 2013.

Alors que la nouvelle version du modèle « Sympa » était prévue pour fonctionner d'ici à la fin de l'année 2014, il s'avère qu'elle n'a finalement abouti que pour les écoles d'ingénieur, sous la forme du système « Modal ». Celles-ci semblent satisfaites de son application pour 2015.

En revanche, le processus de réforme du modèle d'allocation des moyens n'a pas abouti pour les universités . La CPU a notamment indiqué à votre rapporteur spécial qu'elle était opposée à l'intégration de la masse salariale et refuse tout rééquilibrage sans dotation financière supplémentaire dans le modèle, considérant qu'il n'existe pas d'universités « surdotées ». La CPU affirme également que « la multiplicité des indicateurs, l'absence de robustesse du modèle proposé, l'introduction de la masse salariale rendent illisibles les éventuelles indications des tutelles » et qu'il n'est pas possible de connaître les modalités de prise en compte des regroupements universitaires.

Interrogé par votre rapporteur spécial, Thierry Mandon, secrétaire d'État chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche, a confirmé que le système Modal ne serait pas appliqué pour la répartition des moyens aux universités. Il a indiqué réfléchir à un nouveau modèle pour l'avenir, en cherchant notamment l'inspiration à l'étranger, qui serait plus simple et resserré sur deux à trois indicateurs.

Votre rapporteur spécial prend acte du report de cette réforme qu'il appelle de ses voeux depuis plusieurs années . Pour sa part, il considère que le nouveau modèle doit intégrer l'essentiel des ressources, et en particulier davantage la masse salariale que ne le fait actuellement le modèle « Sympa ». Il note que celui-ci doit d'ailleurs servir à répartir 65 % des 5 000 emplois créés entre 2013 et 2017, afin de rééquilibrer les dotations entre établissements. En outre, le nouveau modèle devra laisser une bonne place à la mesure de la performance des universités, en retenant des critères objectifs .

Il a également jugé intéressante la préconisation de la Cour des comptes, dans son enquête précitée sur le bilan de l'autonomie financière des universités, d'étudier la mise en place d'une allocation des moyens formalisée dans un cadre contractuel unique qui serait le contrat pluriannuel 17 ( * ) . Si cela offrirait opportunément une vision de plus long terme aux établissements, il serait également indispensable que chacun d'entre eux puisse être pris en compte dans sa spécificité et que les dotations restent déterminées au plus près des besoins réels.

5. Ne pas sacrifier l'enseignement supérieur privé

Les relations des établissements d'enseignement supérieur privés avec l'État se sont développées et sont désormais encadrées avec la mise en place de la qualification d'établissement d'enseignement supérieur privé d'intérêt général (EESPIG). Prévu à l'article L. 732-1 du code de l'éducation, issue de l'article 70 de la loi n° 2013-660 du 22 juillet 2013 relative à l'enseignement supérieur et la recherche, ces EESPIG, sous contrat avec l'État, concourent « aux missions de service public de l'enseignement supérieur ».

Pourtant, comme indiqué précédemment, la dotation consacrée à l'enseignement supérieur privé a eu tendance à se réduire au cours des dernières années et, même si elle est stabilisée dans le projet de loi de finances pour 2016, elle est d'un niveau très faible rapporté au nombre toujours croissant d'étudiants inscrits.

Comparaison de l'évolution de la dotation allouée aux établissements d'enseignement privés par rapport au nombre d'étudiants inscrits

Source : commission des finances d'après les données des rapports annuels de performances pour 2010 à 2014

Parallèlement, le rapport rendu en juin 2015 par l'inspection générale de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche (IGAENR) 18 ( * ) concernant l'enseignement supérieur privé a mis en évidence à la fois l'importance prise par ce secteur dans l'enseignement supérieur français au cours des dernières années et la situation économique et financière tendue que connaissent ces établissements. Il souligne également la fragilité des subventions publiques accordées.

D'après la Conférence des grandes écoles (CGE), les établissements d'enseignement supérieur privés sous contrat ont vu leurs effectifs augmenter de 77 % depuis 2004.

Ainsi, le montant de la subvention par étudiant est passé de 1 124 euros en 2010 à 817 euros en 2014, soit une baisse de plus de 27 %.

Évolution de la subvention par étudiant

(en euros)

Nb : les montants indiqués correspondent à la dotation inscrite à l'action 04 « Établissements d'enseignement privés » pour l'année concernée, sans les crédits consacrés à la formation initiale des enseignants des établissements d'enseignement privés sous contrat du premier et du second degrés, divisée par le nombre d'étudiants inscrits pour la rentrée universitaire de l'année précédente, selon les rapports annuels de performances.

Source : commission des finances d'après les données des rapports annuels de performances pour 2010 à 2014

Lors de ses auditions avec les quatre fédérations représentant les établissements d'enseignement supérieur privés, votre rapporteur spécial n'a pu que constater les grandes difficultés dans lesquelles se trouvaient certaines de ces écoles et, plus généralement, leur inquiétude compte tenu de la faiblesse de l'aide apportée par l'État. Selon leurs chiffres, la dotation de l'État serait désormais bien inférieure à 800 euros par étudiant pour 2015. Ils ont également mentionné le fait que, comme les écoles publiques, la réforme de la taxe d'apprentissage leur faisait perdre des ressources importantes.

En première lecture à l'Assemblée nationale, le Gouvernement a abondé le programme 150 « Formations supérieures et recherche universitaire » de 100 millions d'euros mais cette nouvelle dotation ne devrait pas bénéficier aux établissements d'enseignement supérieur privés, même pour une très petite partie. Pourtant, ils ont également participé au redressement des finances publiques au cours des dernières années et leur nombre d'étudiants ne cesse de progresser.

Aussi, votre rapporteur spécial vous propose un amendement tendant à ajouter 5,6 millions d'euros, permettant ainsi de rétablir la dotation initiale au montant fixé en 2013, à savoir 84,5 millions d'euros et de garantir un montant par étudiant proche de celui obtenu à cette période (plus de 900 euros compte tenu des crédits inscrits en loi de finances initiale, environ 850 euros une fois la réserve de précaution appliquée) .


* 5 Il convient de noter que 31 millions d'euros correspondent à des opérateurs relevant d'autres programmes à titre principal, à l'instar de l'École des hautes études en santé publique, l'école polytechnique, l'Établissement public du musée du quai Branly et Campus France.

* 6 Cf. le 3 du I de la deuxième partie du présent rapport.

* 7 Ces crédits figurent ainsi dans les montants présentés dans le 3 du présent A.

* 8 Seul 1,98 million d'euros est consacré à des opérations hors CPER et pour lesquelles l'État assure la maîtrise d'ouvrage.

* 9 Pour lesquelles 17,19 millions d'euros ne concernent pas les CPER mais les travaux de mise en sécurité.

* 10 Enquête de la Cour des comptes de juin 2015, réalisée à la demande de la commission des finances du Sénat en vertu de l'article 58-2 de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), « L'autonomie financière des universités : une réforme à poursuivre ».

* 11 Cf. le communiqué de presse de la CGE et de la CDEFI du 22 octobre 2015.

* 12 Voir les constats et préconisations de Philippe Adnot à la suite de la remise par la Cour des comptes de son enquête, demandée par la commission des finances en vertu de l'article 58-2 de la LOLF et concernant le bilan de l'autonomie financière des universités.

* 13 Enquête précitée de la Cour des comptes de juin 2015, à la demande de la commission des finances du Sénat, « L'autonomie financière des universités : une réforme à poursuivre ».

* 14 Loi n° 2007-1199 du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités.

* 15 Rapport de mars 2015 de l'inspection générale des finances et de l'inspection générale de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche sur la situation financière des universités.

* 16 Rapport d'information n° 547 (2012-2013) établi par Philippe Adnot et Dominique Gillot, au nom de la commission des finances et de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, sur le bilan consolidé des sources de financement des universités, « Financement des universités : l'équité au service de la réussite de tous ».

* 17 Selon l'enquête de la Cour des comptes, « si l'attribution des moyens budgétaires reste annuelle, le contrat pluriannuel devrait néanmoins prévoir la dotation de l'université pour chacune des années du contrat, sous réserve des crédits inscrits en loi de finances, en prenant en compte plusieurs dimensions :

« - l'activité de l'université, sur la base d'un modèle d'allocation des moyens fondé sur des indicateurs simples et objectifs liés à son activité ;

« - la performance de l'université en matière de formation, de recherche, d'insertion professionnelle et d'organisation ;

« - l'identification d'objectifs que le ministère souhaite soutenir (projets de développement, actions spécifiques pour la réussite en licence, préservation de disciplines rares, soutien d'une activité de recherche intensive, etc.) ;

« - la situation financière de l'université. » Rapport op.cit. p. 87.

* 18 Rapport de juin 2015 de l'inspection générale de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche, « L'enseignement supérieur privé : propositions pour un nouveau mode de relations avec l'État ».