LOIS CONSTITUTIONNELLES, LEGISLATION, SUFFRAGE UNIVERSEL, REGLEMENT ET ADMINISTRATION GENERALE

Table des matières


- Présidence de M. Jacques Larché, président, puis de M. Charles Jolibois, vice-président.

Mission d'information - Marée noire provoquée par le naufrage du navire " Erika " - Désignation des membres de la commission

La commission a tout d'abord désigné MM. René Garrec, Luc Dejoie, Henri de Richemont, Marcel Charmant, François Marc, comme membres de la commission appelés à faire partie de la mission commune d'information chargée d'examiner l'ensemble des questions liées à la marée noire provoquée par le naufrage du navire " Erika ", de proposer les améliorations concernant la réglementation applicable et de définir les mesures propres à prévenir de telles situations.

Parité - Egal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives - Désignation des candidats CMP

La commission a ensuite désigné pour faire partie de l'éventuelle commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion du projet de loi organique tendant à favoriser l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats de membre des assemblées de province et du congrès de la Nouvelle-Calédonie, de l'assemblée de la Polynésie française et de l'assemblée territoriale des îles Wallis-et-Futuna et au projet de loi tendant à favoriser l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives : M. Jacques Larché, président, MM. Guy Cabanel, Patrice Gélard, Henri de Richemont, Daniel Hoeffel, Mme Dinah Derycke et M. Michel Duffour ; et comme candidats suppléants : MM. Nicolas About, Luc Dejoie, Paul Girod, Pierre Jarlier, François Marc, Jean-Pierre Schosteck et Simon Sutour.

Nomination d'un rapporteur

Puis la commission a nommé M. Paul Girod comme rapporteur sur le projet de loi organique n° 235 (1999-2000) modifiant le nombre de sénateurs et le projet de loi n° 236 (1999-2000) modifiant la répartition des sièges desénateurs.

Parité - Egal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives - Examen des amendements

La commission a procédé, sur le rapport de M. Guy Cabanel, à l'examen des amendements au projet de loi organique n° 193 (1999-2000), adopté par l'Assemblée nationale, tendant à favoriser l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats de membre des assemblées de province et du congrès de la Nouvelle-Calédonie, de l'assemblée de la Polynésie française et de l'assemblée territoriale des îles Wallis et Futuna et au projet de loi n° 192 (1999-2000), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, tendant à favoriser l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives.

Abordant en premier lieu l'examen des amendements au projet de loi organique, la commission a émis un avis défavorable à l'amendement n° 2 de M. Robert Laufoaulu tendant à supprimer l'article 2 (parité pour les élections à l'assemblée territoriale de Wallis et Futuna), M. Guy Cabanel, rapporteur, et M. Jacques Larché, président, faisant valoir l'opportunité de l'adoption d'une position cohérente sur l'ensemble des textes proposés.

Après un large débat auquel ont participé MM. Guy Cabanel, rapporteur, Jacques Larché, président, Mme Dinah Derycke, MM. Lucien Lanier, Simon Loueckhote et Guy Allouche, concernant les difficultés prévisibles d'application du texte proposé en Nouvelle-Calédonie, MM. Jacques Larché, président, et Guy Cabanel, rapporteur, ont constaté qu'aucun amendement n'avait été déposé concernant cette collectivité d'outre-mer.

La commission a ensuite constaté que l'amendement n° 6 de M. Robert Laufoaulu était satisfait par l'amendement n° 2 de la commission.

M. Patrice Gélard, exposant son amendement n° 4 tendant à insérer un article additionnel après l'article 4 de la loi organique pour prévoir la caducité de celle-ci le 31 décembre 2009, a considéré que l'objectif du texte devrait être atteint après que chacune des assemblées concernées ait été renouvelée au moins une fois.

Après un large débat, auquel ont participé MM. Jacques Larché, président, Guy Cabanel, rapporteur, Guy Allouche, Paul Girod, Mme Dinah Derycke, MM. Patrice Gélard, Jean-Jacques Hyest, Nicolas About, Charles Jolibois, Pierre Fauchon, et au cours duquel la question d'un éventuel report de la date d'application du texte en Nouvelle-Calédonie a également été évoquée, la commission a donné un avis favorable à l'amendement n° 4.

Examinant ensuite les amendements au projet de loi simple, la commission a émis un avis défavorable à l'amendement n° 34 tendant à insérer un article additionnel avant l'article premier de Mme Danièle Pourtaud et les membres du groupe socialiste pour affirmer le principe selon lequel les acteurs de la vie politique avaient le devoir de garantir le principe constitutionnel d'égal accès.

Elle a ensuite émis un avis défavorable aux amendements n°s 37 et 38 de M. Paul Girod tendant à insérer deux articles additionnels avant l'article premier pour prévoir l'application du principe de parité, d'une part, dans les contrats des communautés de vie à incidence patrimoniale et, d'autre part, au sein des juridictions civiles, pénales et administratives.

La commission a constaté que l'amendement n° 22 de M. Francis Grignon tendant à supprimer l'article premier A (modification du seuil de partage des modes de scrutins municipaux) était satisfait par l'amendement n° 1 de la commission.

Elle a ensuite émis un avis défavorable aux amendements n°s1 et 2 de MM. Daniel Eckenspieller et Joseph Ostermann tendant à insérer un article additionnel après l'article premier A pour prévoir la publicité des candidatures aux élections municipales dans les communes soumises au scrutin majoritaire.

La commission a émis un avis défavorable à l'amendement n° 35 tendant à insérer un article additionnel après l'article 1er de Mme Dinah Derycke et les membres du groupe socialiste pour prévoir la parité dans l'élection des délégués au sein des établissements publics de coopération intercommunale dotés d'une fiscalité propre.

Elle a considéré que l'amendement n° 23 de M. Gérard Larcher tendant à insérer un article additionnel après l'article 2 pour prévoir le vote préférentiel aux élections sénatoriales dans les départements soumis au scrutin proportionnel pourrait être plus utilement examiné dans le cadre de l'examen du projet de loi relatif à l'élection des sénateurs.

La commission a émis un avis défavorable à l'amendement n° 36 de Mme Monique Cerisier ben Guiga et les membres du groupe socialiste tendant à insérer un article additionnel après l'article 2 pour prévoir la parité lors de l'élection des membres du conseil supérieur des français de l'étranger.

La commission a donné un avis défavorable à l'amendement n° 25 de M. Alain Vasselle à l'article 12 (modulation du financement public des partis politiques) afin de remplacer la sanction financière prévue pour les partis dont l'écart entre les candidats de chaque sexe aux élections législatives dépasse 2% par une augmentation de l'aide publique pour les partis pour lesquels cet écart est inférieur ou égal à 2%.

La commission, considérant que la question de l'égalité professionnelle devrait être examinée dans le cadre d'un autre texte, a donné un avis défavorable aux amendements n°s  27 à 33 de M. Alain Vasselle tendant à insérer des articles additionnels après l'article 12 afin de prévoir la parité aux élections professionnelles.

La commission a, pour les mêmes raisons, émis un avis défavorable à l'amendement n° 26 de M. Lucien Neuwirth tendant à insérer un article additionnel après l'article 15 pour prévoir que le conjoint d'artisan ayant la qualité de conjoint collaborateur serait électeur et éligible dans les mêmes conditions que l'artisan inscrit au registre des chambres de métiers.

Enfin, la commission a donné un avis favorable à l'amendement n° 24 de M. Patrice Gélard tendant à insérer un article additionnel après l'article 15 pour prévoir que la loi deviendrait caduque le 31 décembre 2009.

Elections - Limitation du cumul des mandats électoraux et des fonctions - Examen des amendements

Puis la commission a examiné, sur le rapport de M. Jacques Larché, les amendements au projet de loi organique n° 212 (1999-2000) relatif à la limitation du cumul des mandats électoraux et des fonctions et à leurs conditions d'exercice et au projet de loi n° 213 (1999-2000) relatif à la limitation du cumul des mandats électoraux et des fonctions et à leurs conditions d'exercice.

M. Jacques Larché, rapporteur, a tout d'abord rappelé que la commission avait confirmé, lors de l'examen de son rapport de troisième lecture, les orientations principales adoptées par le Sénat au cours des lectures précédentes permettant l'exercice simultané de deux mandats électoraux avec une seule fonction exécutive.

Il a ajouté que, pour tenir compte de l'abaissement de 3.500 à 2.000 habitants du seuil d'application du mode de scrutin proportionnel pour les élections municipales, adopté par l'Assemblée nationale en première lecture du projet de loi sur la parité, la commission avait décidé, sur sa proposition, d'exclure du dispositif proposé sur les incompatibilités les mandats et fonctions dans les communes soumises au scrutin majoritaire.

Examinant d'abord les amendements au projet de loi organique, la commission a émis un avis défavorable à l'amendement n° 25 de M. Albert Vecten tendant à insérer un article additionnel avant l'article premier ter afin de réduire à 486 le nombre total des députés et à 254 le nombre de sénateurs élus dans les départements, M. Jacques Larché, rapporteur, relevant que cette disposition, digne d'intérêt au demeurant, n'avait pas de lien avec le projet de loi.

A l'article 2 (incompatibilité d'un mandat parlementaire avec une fonction d'exécutif d'une collectivité territoriale ou avec plus d'un mandat local), elle a donné un avis défavorable aux amendements n° 28 de M. Gérard Cornu, n° 31 de M. Michel Duffour et plusieurs de ses collègues et n°s 33 et 34 de M. François Autain et plusieurs de ses collègues, tendant à inclure les fonctions au sein des établissements publics de coopération intercommunale dans le dispositif proposé.

Elle a donné un avis défavorable à l'amendement n° 26 de M. Albert Vecten étendant l'incompatibilité proposée entre mandat parlementaire et chef d'exécutif aux fonctions de membre du bureau d'une collectivité et à celles exercées au sein des établissements publics de coopération intercommunale.

La commission a émis un avis défavorable à l'amendement n° 29 de MM. Gérard Cornu et Alain Vasselle tendant à limiter la compatibilité entre un mandat parlementaire et une fonction de maire, à celle des communes de moins de 3.500 habitants.

Elle a donné un avis défavorable à l'amendement n° 32 de M. François Autain et plusieurs de ses collègues, limitant l'incompatibilité entre parlementaire et maire des communes où le scrutin proportionnel s'applique, M. Jacques Larché, rapporteur, relevant que les auteurs de l'amendement admettaient la possibilité d'un seuil justifié par la situation particulière des plus petites communes.

La commission a constaté que l'amendement n° 30 de MM. Gérard Cornu et Alain Vasselle tendant à exclure les communes de moins de 3.500 habitants du dispositif proposé était satisfait par l'amendement n° 5 de la commission.

Enfin, elle a émis un avis défavorable à l'amendement n° 27 de M. Jacques  Oudin tendant à insérer un article additionnel après l'article 6 bis du projet de loi organique pour permettre aux communes d'avoir pour délégués au sein des structures de coopération intercommunale des élus non municipaux du ressort, M. Jacques Larché, rapporteur, faisant valoir qu'il était préférable de s'en tenir à une relation directe entre les conseils municipaux et ces structures de coopération.

Puis la commission, examinant les amendements au projet de loi simple, a constaté que l'amendement n° 38 de MM. Gérard Cornu et Alain Vasselle sur l'article premier (limitation à deux mandats locaux), tendant à exclure le mandat municipal dans une commune de moins de 3.500 habitants était satisfait par l'amendement n° 2 de la commission.

Elle a ensuite émis un avis défavorable à l'amendement n° 37 de M. Gérard Cornu tendant à inclure les établissements publics de coopération intercommunale dans le dispositif proposé et à l'amendement n° 45 de M. François Autain et plusieurs de ses collègues tendant à exclure de ce dispositif le mandat municipal dans les communes soumises au scrutin majoritaire.

A l'article 2 bis (incompatibilité entre un mandat local et une fonction de président d'une chambre consulaire ou d'une chambre d'agriculture), la commission a constaté que l'amendement n° 35 de M. Gérard César et les membres du groupe du Rassemblement pour la République tendant à supprimer cette incompatibilité était satisfait par l'amendement n° 3 de la commission.

Sur l'article 3 (régime d'incompatibilité des maires), la commission a constaté que l'amendement n° 39 de MM. Gérard Cornu et Alain Vasselle était satisfait par l'amendement n° 7 de la commission et a donné un avis défavorable aux amendements n°s 46 et 47 de M. François Autain et plusieurs de ses collègues tendant à exclure du dispositif les maires des communes soumises au scrutin majoritaire et à inclure dans celui-ci les fonctions de président d'un établissement public de coopération intercommunale.

A l'article 4 (régime d'incompatibilité des présidents de conseils généraux), elle a constaté que l'amendement n° 40 de MM. Gérard Cornu et Alain Vasselle était satisfait par l'amendement n°10 de la commission et elle a donné un avis défavorable aux amendements n°s 48 et 49 de M. François Autain et plusieurs de ses collègues tendant à exclure du dispositif les maires des communes soumises au scrutin majoritaire et à inclure dans celui-ci les fonctions de président d'un établissement public de coopération intercommunale.

A l'article 5 (régime d'incompatibilité des présidents de conseils régionaux), elle a constaté que l'amendement n° 41 de MM. Gérard Cornu et Alain Vasselle était satisfait par l'amendement n° 12 de la commission et elle a donné un avis défavorable aux amendements n°s 50 et 51 de M. François Autain et plusieurs de ses collègues tendant à exclure du dispositif les maires des communes soumises au scrutin majoritaire et à inclure dans celui-ci les fonctions de président d'un établissement public de coopération intercommunale.

A l'article 8 (régime d'incompatibilité des parlementaires européens), la commission a donné un avis défavorable à l'amendement n°36 de M. Albert Vecten tendant à étendre l'incompatibilité prévue avec une fonction de chef d'exécutif aux fonctions de membre du bureau d'une collectivité locale.

Elle a donné un avis défavorable aux amendements n°s 52, 53 et 54 de M. François Autain et plusieurs de ses collègues tendant à exclure du dispositif les maires des communes soumises au scrutin majoritaire et à inclure dans celui-ci les fonctions de président d'un établissement public de coopération intercommunale.

A l'article 11 (incompatibilité des maires de Polynésie française), la commission a émis un avis défavorable aux amendements n°s 55, 56 et 57 de coordination de M. François Autain et plusieurs de ses collègues.

A l'article 11 bis (régime d'incompatibilité des maires de Nouvelle-Calédonie), la commission a constaté que l'amendement n° 42 de MM. Gérard Cornu et Alain Vasselle était satisfait par l'amendement n° 26 de la commission et a donné un avis défavorable aux amendements de coordination n°s 58, 59 et 60 de M. François Autain et plusieurs de ses collègues.

A l'article 12 (incompatibilité applicable à St Pierre et Miquelon), la commission a constaté que l'amendement n° 43 de MM. Gérard Cornu et Alain Vasselle était satisfait par l'amendement n° 29 de la commission et elle a donné un avis défavorable aux amendements de coordination n°s 61, 62, 63 et 64 de M. François Autain et plusieurs de ses collègues.

A l'article 13 bis (application de la loi à Mayotte), la commission a constaté que l'amendement n° 44 de MM. Gérard Cornu et Alain Vasselle était satisfait par l'amendement n° 32 de la commission et a donné un avis défavorable aux amendements de coordination n°s 65 et 66 de M. François Autain et plusieurs de ses collègues.

Esclavage - Reconnaissance de la traite et de l'esclavage en tant que crime contre l'humanité et célébration de l'abolition de l'esclavage en France - Examen du rapport

La commission a commencé, sur le rapport de M. Jean-Pierre Schosteck, l'examen de la proposition de loi n° 234 (1998-1999) adoptée par l'Assemblée nationale, tendant à la reconnaissance de la traite et de l'esclavage en tant que crime contre l'humanité et de la proposition de loi n° 406 (1997-1998) de M. Michel Duffour et plusieurs de ses collègues, relative à la célébration de l'abolition de l'esclavage en France métropolitaine.

M. Jacques Larché, président, a tout d'abord souligné qu'il était contestable de faire de la loi un instrument d'appréciation des événements historiques.

M. Jean-Pierre Schosteck, rapporteur, a tout d'abord rappelé que la proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale avait pour objet principal la reconnaissance en tant que crime contre l'humanité de la traite négrière transatlantique ainsi que de la traite dans l'Océan indien d'une part, de l'esclavage d'autre part, perpétrés à partir du XVe siècle, aux Amériques et aux Caraïbes et en Europe contre les populations africaines, amérindiennes, malgaches et indiennes.

Le rapporteur a alors indiqué qu'incontestablement l'esclavage tel qu'il avait été pratiqué à partir du XVe siècle et jusqu'à son abolition en 1848 en France, constituait un crime contre l'humanité au sens où nous l'entendons aujourd'hui. Il a toutefois souligné que la proposition de loi constituait une pétition de principe et non un texte normatif, ces dispositions relevant dans le meilleur des cas du domaine réglementaire. Il a en outre souligné qu'un grand nombre d'événements du passé survenus en France ou ailleurs constituaient eux aussi des crimes contre l'humanité et qu'il était singulier de paraître isoler certains crimes.

Le rapporteur a ensuite rappelé que la traite négrière et l'esclavage visés dans la proposition de loi avaient débuté au XVe siècle avec la découverte de l'Amérique et l'organisation de grandes expéditions vers le Nouveau Monde. Il a souligné que les historiens estimaient qu'entre quinze et trente millions de personnes avaient été arrachées à l'Afrique pour être conduites en Amérique et réduites en esclavage. Il a en outre observé que plusieurs millions d'Indiens vivant sur le continent américain au début du XVIe siècle avaient été massacrés.

M. Jean-Pierre Schosteck, rapporteur, a ensuite souligné que le chemin vers la disparition de l'esclavage et de la traite négrière avait été long et heurté. Il a fait valoir qu'à la fin du XVIIIe siècle, les philosophes des lumières, en particulier Montesquieu et Voltaire avaient dénoncé de la manière la plus vive ces pratiques. Il a indiqué que l'esclavage avait été aboli dès 1793 à Saint-Domingue à la suite d'une violente insurrection avant que la Convention étende cette décision à l'ensemble des colonies françaises en 1794. Il a indiqué que Napoléon Bonaparte avait rétabli l'esclavage en 1802 et qu'il avait fallu attendre 1848 pour que soit définitivement aboli l'esclavage en particulier grâce à l'action de Victor Schoelcher, alors secrétaire d'Etat aux colonies.

Le rapporteur a noté qu'un grand nombre de textes internationaux, et notamment la Déclaration des droits de l'homme adoptée en 1948, condamnaient de la manière la plus claire la réduction en esclavage. Il a en outre souligné que le code pénal français faisait figurer explicitement la réduction en esclavage parmi les crimes contre l'humanité.

Le rapporteur a alors présenté le contenu de la proposition de loi, soulignant qu'outre la reconnaissance par la France de l'esclavage et de la traite négrière en tant que crime contre l'humanité, elle prévoyait le développement de la place consacrée à l'esclavage et à la traite négrière dans les manuels scolaires, le dépôt d'une requête en reconnaissance de la traite négrière et de l'esclavage comme crimes contre l'humanité auprès de plusieurs organisations internationales, la création d'un comité de personnalités chargé de proposer des lieux et des actions de mémoire, enfin la possibilité pour les associations défendant la mémoire des esclaves d'exercer les droits reconnus à la partie civile pour certaines infractions.

Concluant son propos, M. Jean-Pierre Schosteck, rapporteur, a observé que, sur le fond, les affirmations contenues dans la proposition de loi n'étaient pas contestables, mais qu'elles n'avaient rien de législatif. Il a indiqué que le Parlement français était l'un des seuls au monde à ne pas pouvoir s'exprimer solennellement par le vote de motions ou de résolutions, ce qui expliquait une tendance regrettable à vouloir inscrire dans la loi des dispositions sans portée normative.

M. Michel Duffour a souligné que la proposition de loi méritait d'être adoptée de la manière la plus large possible. Il a rappelé qu'il s'agissait d'une question extrêmement sensible dans les départements d'outre-mer, observant qu'une importante manifestation d'Antillais et de Réunionnais s'était déroulée à Paris en faveur d'une reconnaissance de l'esclavage comme crime contre l'humanité et de la mise en place d'une journée de commémoration de l'abolition de l'esclavage.

Il a fait valoir qu'à l'Assemblée nationale, des propositions de loi avaient été déposées non seulement par Mme Taubira-Delannon et les membres du groupe socialiste, mais également par le groupe communiste et par le groupe radical, citoyen et vert. Il a estimé qu'un certain non-dit tendait à se développer sur la question de l'esclavage et que certains événements aussi importants que le marronage ou la mise en place du code noir par Colbert étaient oubliés. Il a plaidé pour un devoir de mémoire indiquant que la proposition de loi devait faciliter la perpétuation de la réprobation du crime d'esclavage.

M. Patrice Gélard a tout d'abord estimé qu'il y avait quelque chose de démagogique à vouloir inscrire dans la loi des dispositions n'y ayant pas leur place et qui relèvent de la déclaration solennelle plus que d'un texte normatif. Il a noté que la proposition de loi présentée par M. Michel Duffour et les membres du groupe communiste, républicain et citoyen tendait à donner un rôle au service public de la radio-télévision dans la perpétuation du souvenir de l'esclavage et a rappelé que la radio et la télévision ne recevaient plus d'ordres de la part des autorités politiques. Il a estimé nécessaire que l'on recherche un moyen pour le Parlement de pouvoir s'exprimer sur certains sujets sans qu'il soit recouru à la loi qui doit conserver son caractère normatif.

M. Jacques Larché, président, a estimé que la proposition de loi n'était juridiquement pas adoptable en l'état. Il a fait valoir que la commission des lois devait veiller à la cohérence et à la tenue juridique des textes adoptés par le Sénat. Il a regretté que le Parlement n'ait pas d'autre moyen que la loi pour s'exprimer, observant que cette situation résultait des décisions du Conseil constitutionnel de 1959, qui avaient exclu l'adoption par les assemblées de résolutions. Il a indiqué qu'il avait eu des difficultés à obtenir, lors de la révision constitutionnelle préalable à la ratification du traité de Maastricht, que les assemblées puissent voter des résolutions en matière européenne. Il s'est demandé s'il ne conviendrait pas de réfléchir à de nouveaux moyens pour le Parlement de prendre solennellement position sur une question sans pour autant adopter des lois dépourvues de portée normative.

M. Charles Jolibois a observé que le nouveau code pénal, auquel le Sénat a apporté une contribution décisive, qualifiait très clairement l'esclavage de crime contre l'humanité dans son article 212-1. Il a estimé très problématique de condamner par voie législative l'une des formes d'esclavage, survenue à une période donnée, rappelant que d'autres formes d'esclavage passées et même présentes méritaient également condamnation.

M. Jean-Pierre Schosteck, rapporteur, a alors observé que le statut de la Cour pénale internationale adopté à Rome en 1998 faisait lui aussi de la réduction en esclavage un crime contre l'humanité. Il a souligné que la proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale ne prévoyait pas, contrairement à celle présentée par M. Michel Duffour, l'attribution au service public de la radio-télévision d'un rôle dans la perpétuation du souvenir de l'esclavage.

M. Lucien Lanier a estimé qu'il était inacceptable d'opérer dans la loi une condamnation partielle de l'esclavage. Il a fait valoir qu'aucun des articles de la proposition de loi n'était sans portée et s'est interrogé sur les conséquences imprévisibles que pourrait avoir son adoption.

M. Jacques Larché, président, s'est demandé si une telle démarche ne pouvait pas jouer à l'inverse des intentions de ses auteurs en paraissant entretenir l'idée qu'une partie de la population française devrait être considérée comme différente du reste de la population parce que descendant d'esclaves.

M. Pierre Fauchon a tout d'abord souligné qu'il s'était beaucoup intéressé à l'esclavage à l'occasion de travaux sur l'Abbé Grégoire. Il a estimé que la proposition de loi comportait de vaines déclarations de principes. Il a indiqué que certains événements beaucoup plus récents que la forme d'esclavage visée par la proposition de loi mériteraient tout autant condamnation. Il s'est en revanche déclaré favorable à la mise en place d'un comité de personnalités chargé de proposer des lieux et des actions de mémoire, considérant que cette disposition pouvait, pour sa part, avoir un caractère opérationnel.

M. Guy Allouche a estimé que la discussion d'un tel texte pouvait naturellement prêter à contestation. Il s'est toutefois déclaré favorable à son adoption, estimant qu'il pourrait contribuer au devoir de mémoire des jeunes générations. Il a observé que le Parlement était dans son rôle en rappelant certains faits et a noté qu'il existait encore des pratiques esclavagistes dans le monde.

M. Michel Duffour a indiqué que la proposition de loi n'était en aucun cas hypocrite. Il a estimé que l'esclavage avait profondément marqué l'histoire des colonies françaises et qu'il continuait à avoir des répercussions aujourd'hui. Il a estimé nécessaire que le Parlement s'élève contre l'oubli qui tend à se développer sur cette question.

M. Maurice Ulrich a indiqué qu'il ne participerait pas à l'adoption d'un tel texte. Il a estimé que la perpétuation du souvenir de l'esclavage était une mission de l'éducation nationale et qu'il n'était en aucun cas besoin d'une loi en cette matière. Il a fait valoir qu'il ne se sentait pas à même en tant que parlementaire de porter des jugements sur l'Histoire.

M. Jean-Pierre Schosteck a estimé qu'il n'était pas exact de prétendre que l'esclavage était en train d'être oublié. Il a indiqué que, dans les départements d'outre-mer, de très nombreuses initiatives avaient été prises pour que la mémoire ne s'efface pas. Il s'est demandé si la proposition de loi ne risquait pas d'avoir un effet contre productif en ravivant d'anciennes plaies.

M. Simon Sutour a rappelé que la proposition de loi avait été adoptée à l'unanimité par l'Assemblée nationale. Il a estimé qu'un rejet du texte par le Sénat aurait des conséquences catastrophiques et que certains, à l'extérieur du Parlement, pourraient vouloir en déduire que le Sénat n'était pas hostile à l'esclavage.

MM. Charles Jolibois, Patrice Gélard, Jacques Larché, président, etMaurice Ulrich se sont inscrits en faux, rappelant notamment sur le code pénal, voté par les deux chambres du Parlement, qualifie l'esclavage de crime contre l'humanité.

M. Patrice Gélard a estimé que la proposition de loi marquait en fait une volonté d'utiliser le Parlement en lui imposant de faire des choses qui n'entrent pas dans ses attributions. Il a souhaité que seul l'article de la proposition de loi prévoyant la fixation d'une date de commémoration de l'abolition de l'esclavage soit maintenu.

M. Jacques Larché, président, a rappelé que certains textes adoptés à l'unanimité par l'Assemblée nationale n'étaient pas exempts de tout reproche. Il a fait valoir que la rédaction de la proposition de loi relative à la délégation aux droits des femmes adoptée par l'Assemblée nationale était juridiquement très problématique et que le Sénat avait joué un rôle utile en modifiant ce texte malgré son adoption à l'unanimité par l'Assemblée nationale.

M. Jean-Jacques Hyest a estimé qu'il n'était pas possible pour le Parlement d'adopter des lois contenant uniquement des déclarations de principe.

M. Nicolas About a fait valoir que la reconnaissance en tant que crime contre l'humanité d'événements terminés depuis longtemps n'avait qu'un intérêt limité. Il a rappelé que l'esclavage était une réalité présente et que l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe se préoccupait de cette question. Il a indiqué que les formes modernes d'esclavage, telles que le travail et la prostitution des enfants méritaient prioritairement l'attention du Parlement.

A l'issue de cette discussion générale, la commission, après s'être prononcée pour l'adoption d'un texte sur l'esclavage, a reporté à sa prochaine réunion l'examen des amendements.