Table des matières


- Présidence de M. Pierre Fauchon, vice-président.

Résorption de l'emploi précaire dans la fonction publique - Habilitation du Gouvernement à transposer, par ordonnances, des directives communautaires - Désignation de candidats pour des commissions mixtes paritaires

La commission a tout d'abord procédé à la désignation de candidats pour faire partie des commissions mixtes paritaires chargées de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion sur les projets de loi suivants :

- elle a désigné MM. Pierre Fauchon, Daniel Hoeffel, Jean-Pierre Schosteck, René Garrec, Paul Girod, Jacques Mahéas, Mme Nicole Borvo comme candidats titulaires et MM. Nicolas About, Guy Cabanel, Raymond Courtois, Mme Dinah Derycke, MM. Patrice Gélard, Lucien Lanier et Simon Sutour comme candidats suppléants pour le projet de loi relatif à larésorption de l'emploi précaire et à la modernisation du recrutement dans la fonction publique ainsi qu'au temps de travail dans la fonction publique territoriale ;

- puis MM. Pierre Fauchon, Daniel Hoeffel, André Jourdain, Denis Badré, Ladislas Poniatowski, Simon Sutour, Robert Bret, comme candidats titulaires et MM. Nicolas About, Robert Badinter, Mme Dinah Derycke, MM. Patrice Gélard, Paul Girod, Lucien Lanier, Philippe Richert, comme candidats suppléants pour le projet de loi portant habilitation du Gouvernement à transposer, par ordonnances, des directives communautaires et à mettre en oeuvre certaines dispositions du droit communautaire.

Nomination de rapporteurs

Puis la commission a nommé des rapporteurs sur les textes suivants :

- M. Jean-Jacques Hyest pour le projet de loi n° 2544 (AN XIe législature) modifiant la loi n° 85-99 du 25 janvier 1985 relative aux administrateurs judiciaires, mandataires judiciaires à la liquidation des entreprises et experts en diagnostic d'entreprise (sous réserve de son adoption par l'Assemblée nationale et de sa transmission) ;

- M. Paul Girod pour le projet de loi n° 2545 (AN XIe législature) portant réforme des tribunaux de commerce (sous réserve de son adoption par l'Assemblée nationale et de sa transmission) ;

- M. Paul Girod pour le projet de loi organique n° 2546 (AN XIeme législature) modifiant l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 relative au statut de la magistrature et instituant le recrutement de conseillers de cour d'appel exerçant à titre temporaire (sous réserve de son adoption par l'Assemblée nationale et de sa transmission) ;

- M. Daniel Hoeffel pour le projet de loi n° 297 (1999-2000) adopté par l'Assemblée nationale, portant diverses dispositions statutaires relatives aux magistrats de la Cour des comptes et des chambres régionales des comptes et modifiant le code des juridictions financières ;

- M. Lucien Lanier pour la proposition de loi n° 415 (1999-2000) adoptée par l'Assemblée nationale, modifiant la loi n° 83-583 du 5 juillet 1983 réprimant la pollution par les navires ;

- M. Jean-Paul Delevoye
pour la proposition de loi n° 59 rectifiée (2000-2001) de M. André Vasselle et plusieurs de ses collègues, relative au statut de l'élu local ;

- M. Jean-Paul Delevoye
pour la proposition de loi n° 98 (2000-2001) de M. Jean Arthuis visant à créer une indemnité de retour à l'emploi pour les élus locaux ;

- M. Jean-Paul Delevoye
pour la proposition de loi n° 398 (1999-2000) de M. Jacques Legendre et plusieurs de ses collègues, tendant à assurer le maintien de la proportionnalité des indemnités de tous les élus municipaux ;

- M. Jean-Paul Delevoye
pour la proposition de loi n° 454 (1999-2000) de M. Jean-Claude Carle et plusieurs de ses collègues, tendant à revaloriser les indemnités des adjoints au maire, des conseillers municipaux, des présidents et vice-présidents d'un établissement public de coopération intercommunale.

PJLF pour 2001 - Crédits consacrés aux services généraux du ministère de la justice - Examen du rapport pour avis

La commission a ensuite procédé, sur le rapport pour avis de Mme Dinah Derycke, à l'examen des crédits des services généraux (administration centrale - juridictions judiciaires - juridictions administratives) du ministère de la justice inscrits dans le projet de loi de finances pour 2001.

Mme Dinah Derycke, rapporteur pour avis, a tout d'abord souligné que les crédits du ministère de la justice enregistraient une progression de 3,1 % à structure constante, deux fois supérieure à celle de l'ensemble des crédits de l'Etat, même si la part relative du budget de la justice dans le budget de l'Etat ne s'accroissait que lentement, passant de 1,62 % en 2000 à 1,63 % en 2001, toujours à structure constante.

Elle a ajouté que ce budget était marqué par la perspective de la prochaine entrée en vigueur de la loi du 15 juin 2000 tendant à renforcer la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes, qui soulevait bien des inquiétudes au sein du monde judiciaire, comme en témoignait la demande de report formulée par la plupart des organisations syndicales de magistrats et de greffiers. Après avoir noté que la chancellerie avait institué un groupe de suivi pour préparer la mise en place de cette très importante réforme, elle a précisé que les crédits consacrés aux services judiciaires comportaient de nombreuses mesures nouvelles destinées à l'application de la loi relative à la présomption d'innocence, soit au total 454 créations d'emplois, plus une enveloppe de 261,7 millions de francs, s'ajoutant aux créations d'emplois de juge des libertés et de la détention déjà anticipées depuis deux exercices budgétaires.

Tout en saluant cet effort budgétaire substantiel, Mme Dinah Derycke, rapporteur pour avis, s'est cependant demandé s'il serait suffisant pour permettre une amélioration du fonctionnement de la justice au quotidien, constatant qu'en dépit d'une certaine stabilisation des flux d'affaires civiles nouvelles, la situation des juridictions restait marquée par des délais de jugement toujours excessifs, en particulier devant les cours d'appel, pour lesquelles le délai moyen dépassait 18 mois. Elle a notamment relevé que les stocks d'affaires civiles en instance demeuraient considérables et que la productivité des juridictions ne connaissait pas d'amélioration sensible. Elle a par ailleurs indiqué que la régulation des flux d'affaires pénales continuait à être assurée par des classements sans suite encore trop nombreux bien qu'en diminution, qui concernaient près d'un tiers des affaires dites " poursuivables ". Elle a enfin noté qu'en dépit des efforts de productivité fournis par les magistrats administratifs, la situation des juridictions administratives restait caractérisée par un engorgement préoccupant, le délai théorique d'élimination des affaires en instance devant les cours administratives d'appel s'élevant à près de trois ans.

Puis Mme Dinah Derycke, rapporteur pour avis, a fait le point sur les efforts de recrutement effectués en vue du renforcement des effectifs des juridictions. Elle a, à cet égard, constaté que les créations d'emplois prévues par le projet de budget pour 2001, d'un nombre exceptionnellement élevé (525 pour les juridictions judiciaires et 90 pour les juridictions administratives), seraient entièrement absorbées par la mise en place des réformes nouvelles.

A propos des recrutements de magistrats judiciaires, elle a regretté que l'apport des voies de recrutement complémentaires à l'Ecole nationale de la magistrature soit jusqu'ici resté très limité, citant l'exemple du très faible nombre de magistrats à titre temporaire. Elle a souligné que compte tenu des créations d'emplois et du nombre peu élevé de départs à la retraite, les effectifs de magistrats réellement présents sur le terrain auraient été renforcés de plus de 10 % entre la fin 1997 et la fin 2001, tout en reconnaissant que les créations d'emplois prévues en 2001 ne se traduiraient pas immédiatement par des magistrats supplémentaires sur le terrain, compte tenu des délais de recrutement et de formation, ce qui risquerait d'entraîner des difficultés pour l'application de la loi relative à la présomption d'innocence au cours du premier semestre 2001.

S'agissant des fonctionnaires des greffes, Mme Dinah Derycke, rapporteur pour avis, a précisé que les créations d'emplois de greffes étaient moins nombreuses que celles des emplois de magistrats, ce qui entraînait une baisse du ratio fonctionnaires/magistrats. Elle a par ailleurs évoqué le mouvement de grève engagé par ces fonctionnaires, qui s'était conclu par un protocole d'accord entre le Gouvernement et certaines organisations syndicales prévoyant un renforcement des recrutements de greffiers dès 2001, ainsi qu'une revalorisation de leur régime indemnitaire.

Après avoir noté que le recours aux assistants de justice, qui donnait toute satisfaction aux magistrats, serait encore accru l'année prochaine, elle a indiqué que les effectifs des juridictions administratives seraient renforcés par 26 créations nettes d'emplois de magistrats en 2001, mais que celles-ci risquaient d'être absorbées par les nouveaux besoins liés à l'entrée en vigueur de la loi relative au référé dans les juridictions administratives, relevant par ailleurs la faiblesse du ratio d'emplois de greffes par emploi de magistrat administratif.

Abordant ensuite la présentation des crédits d'équipement, Mme Dinah Derycke, rapporteur pour avis, a expliqué que le programme d'investissements immobiliers serait poursuivi en 2001, en dépit d'un faible taux de consommation des crédits qui pouvait être justifié par le montant élevé des provisions constituées en vue de futures grandes opérations. Elle a en outre précisé que trois sites étaient actuellement envisagés pour la construction d'un nouveau tribunal de grande instance à Paris : la ZAC de Tolbiac, la prison de la Santé et l'hôpital Saint-Vincent-de-Paul.

Après avoir souligné qu'une meilleure maîtrise des dépenses de frais de justice avait permis de prévoir une baisse de la dotation qui leur serait consacrée en 2001, avec une mesure d'économie de 200 millions de francs, elle a constaté que la dotation affectée à l'aide juridictionnelle serait pour sa part stabilisée malgré une revalorisation des plafonds de ressources fixés pour l'admission à cette aide. Elle a en outre évoqué le mouvement de grève engagé par les avocats demandant une revalorisation de leur rétribution au titre de l'aide juridictionnelle, précisant que Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux, avait constitué une commission présidée par M. Paul Bouchet afin d'étudier les modalités d'une remise à plat de l'ensemble du dispositif d'aide juridictionnelle et qu'un accord pourrait être prochainement trouvé sur des mesures d'urgence concernant cinq domaines particulièrement importants en matière d'aide juridictionnelle.

Elle a enfin brièvement présenté la réforme envisagée des tribunaux de commerce, relevant que les créations d'emplois de magistrats d'ores et déjà anticipées en vue de cette réforme pourraient être utilisées dans l'immédiat pour la mise en oeuvre de la loi relative à la présomption d'innocence. Après avoir noté les suppressions de tribunaux de commerce déjà réalisées ou encore en projet, elle a néanmoins regretté que la réforme de la carte judiciaire concernant les autres juridictions semble aujourd'hui provisoirement abandonnée.

En conclusion, elle a fait valoir le caractère substantiel de la progression des crédits et le nombre exceptionnellement élevé des créations de postes prévues, tout en reconnaissant cependant que celles-ci risquaient d'être absorbées par la mise en place des nouvelles réformes, au détriment du fonctionnement de la justice au quotidien. Elle a donc proposé à la commission de donner un avis favorable à l'adoption des crédits.

Après que M. Pierre Fauchon, vice-président, eut rappelé que la commission des finances avait, pour sa part, proposé le rejet du budget de la justice, M. Christian Bonnet a considéré que l'indéniable progression arithmétique des crédits de la justice et du nombre des magistrats n'était pas à la hauteur des besoins résultant de la progression géométrique du nombre d'instances, qui résultait d'une judiciarisation croissante de la société, faisant en particulier observer que l'effectif global des magistrats ne s'était pas beaucoup accru depuis le début du siècle. En conséquence, il a indiqué qu'il ne pourrait s'associer à la proposition d'avis favorable formulée par le rapporteur pour avis.

Tout en approuvant le constat de la situation effectué par Mme Dinah Derycke, rapporteur pour avis, dans son rapport, M. Patrice Gélard en a tiré une conclusion contraire. Il a en effet considéré que, compte tenu notamment des délais nécessaires à la traduction effective des créations d'emplois sur le terrain, ainsi que des importants reports affectant les crédits d'investissement, le budget prévu pour 2001 ne permettrait pas d'assurer dans des conditions satisfaisantes la mise en oeuvre des réformes nouvelles et plus généralement, le fonctionnement de la justice qui représentait pourtant un devoir primordial pour l'Etat.

Constatant que la part des crédits consacrés à la justice dans le budget de l'Etat restait très faible, ce qui lui est apparu indigne d'un pays comme la France, il a estimé que le budget de la justice pour 2001, qui aurait pu être jugé bon les années précédentes, ne pouvait en revanche être accepté cette année eu égard à la perspective de la mise en oeuvre des nouvelles réformes.

M. François Marc a en revanche souligné l'accroissement de la part du budget de la justice dans le budget de l'Etat, le nombre particulièrement élevé de créations d'emplois de magistrats judiciaires, soit 729 en quatre ans, ainsi que la progression des dépenses ordinaires. Il a considéré que des efforts méritoires étaient donc engagés par l'Etat afin de mieux prendre en compte l'accroissement des besoins de la justice au quotidien résultant de la judiciarisation de la société. En conséquence, il a approuvé la proposition d'avis favorable formulée par le rapporteur pour avis.

Après avoir rendu hommage à la qualité du rapport présenté par Mme Dinah Derycke, rapporteur pour avis, M. Daniel Hoeffel a déclaré qu'il ne mésestimait pas l'effort budgétaire consenti pour 2001, mais que les défis auxquels serait confrontée la justice étaient d'une telle ampleur que les moyens prévus ne lui permettraient pas d'y faire face. Il a donc proposé de donner un avis défavorable à l'adoption des crédits du ministère de la justice pour 2001.

M. Jacques Mahéas a fait valoir que le nombre total de fonctionnaires du ministère de la justice s'était considérablement accru entre 1980 et 2000, ce qui traduisait un effort très significatif en faveur de la justice. Il a dénoncé le double langage que tenaient, selon lui, les membres de la majorité sénatoriale en condamnant d'une manière générale le nombre trop élevé de fonctionnaires et en demandant en même temps le renforcement des effectifs du ministère de la justice. Tout en reconnaissant que les effectifs de magistrats et de fonctionnaires devraient encore être accrus à l'avenir afin de permettre un fonctionnement plus rapide de la justice au quotidien, il a exprimé son entier soutien au rapporteur pour avis, ainsi qu'au garde des sceaux, compte tenu de l'effort budgétaire considérable fourni.

M. Charles Jolibois a souligné que les critiques formulées par certains de ses collègues à l'égard de ce budget s'inscrivaient dans le prolongement direct des précédents travaux de la commission. Il a en effet rappelé que celle-ci avait constitué en 1996 une mission d'information sur les moyens de la justice, qui avait mis en lumière l'ampleur des défis auxquels étaient confrontées les juridictions du fait de l'accroissement très rapide des flux de contentieux, notamment en matière de droit de la famille.

Rappelant par ailleurs les débats sur le projet de loi relatif à la présomption d'innocence, dont il avait été le rapporteur, il a fait part de ses doutes sur la capacité des moyens prévus à permettre d'appliquer, dans des conditions satisfaisantes, l'ensemble des nouvelles réformes prévues par cette loi, évoquant notamment l'appel des décisions des cours d'assises, la réforme du régime de la garde à vue, la juridictionnalisation de l'application de peines et l'institution du juge des libertés et de la détention.

En conséquence, il a considéré que le problème de l'évolution des effectifs du ministère de la justice était tout à fait spécifique et devait être distingué de la situation générale de la fonction publique dans les autres ministères.

A propos de l'évolution des contentieux en matière de droit de la famille, M. Jacques Mahéas s'est déclaré prêt à réfléchir sur les moyens susceptibles de permettre un désencombrement de l'institution judiciaire, par exemple en permettant que certains divorces soient prononcés en mairie.

Répondant ensuite à l'ensemble des intervenants, Mme Dinah Derycke, rapporteur pour avis, a précisé qu'une présentation détaillée des mesures prévues pour l'application de la loi relative à la présomption d'innocence figurerait dans son rapport écrit, soulignant à nouveau qu'un effort substantiel était fait pour la mise en oeuvre des réformes résultant de cette loi.

Constatant cependant que les besoins de la justice avaient considérablement augmenté en raison de la judiciarisation croissante de la société, elle a estimé que la responsabilité du retard pris au niveau du renforcement des moyens était collective, dans la mesure où ce retard datait de plusieurs décennies.

Rappelant que la commission avait émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la justice en 1998, suivi d'un avis de sagesse l'an dernier, elle a considéré que les délais constatés pour la traduction effective des créations de postes sur le terrain et pour la mise en oeuvre des projets d'investissements étaient inévitables. Elle s'est par ailleurs interrogée sur la capacité du corps des magistrats à absorber une augmentation de ses effectifs supérieure à 50 %, quand bien même des moyens budgétaires suffisants pourraient être dégagés.

M. Pierre Fauchon a cependant regretté que le recrutement des magistrats à titre temporaire soit resté limité à quelques unités, alors que ceux-ci pourraient notamment compléter utilement les formations de jugement collégiales.

A l'issue de cet échange de vues, la commission a émis un avis défavorable à l'adoption des crédits du ministère de la justice consacrés aux services généraux inscrits dans le projet de loi de finances pour 2001.

PJLF pour 2001 - Crédits consacrés à l'administration pénitentiaire - Examen du rapport pour avis

La commission a ensuite procédé, sur le rapport de M. Georges Othily, à l'examen pour avis des crédits de la justice pour 2001, consacrés à l'administration pénitentiaire.

M. Georges Othily, rapporteur pour avis, a tout d'abord souligné qu'en 2001, les crédits consacrés à l'administration pénitentiaire s'élèveraient à 7,89 milliards de francs à structure constante et ne progresseraient donc que de 0,4 % par rapport aux crédits inscrits en loi de finances pour 2000, alors qu'ils avaient progressé de 6 % l'année dernière. Il a toutefois noté qu'un amendement adopté à l'Assemblée nationale avait permis de porter à 1,22 % la progression des crédits de cette administration. Il a précisé que le projet de budget prévoyait la création de 530 emplois, 215 de ces emplois étant destinés à préparer l'ouverture, en 2002, de deux nouveaux établissements pénitentiaires, à Toulouse et en Avignon.

A propos des dépenses en capital, le rapporteur pour avis a indiqué que 844 millions de francs d'autorisations de programme étaient inscrits dans le projet de budget afin de réhabiliter le parc classique et de rénover les cinq plus grandes maisons d'arrêt. Il a souligné qu'à la suite de l'annonce, par le Premier ministre, du lancement d'un plan de rénovation des établissements pour un montant de 10 milliards de francs sur six ans, 1 milliard de francs d'autorisations de programme supplémentaire avait été inscrit au projet de loi de finances.

M. Georges Othily, rapporteur pour avis, a ensuite noté que le nombre des détenus continuait à diminuer légèrement et s'élevait à 51.441  le 1er janvier 2000, contre 52.961 le 1er janvier 1999. Il a fait valoir que la diminution était pour l'essentiel imputable à la baisse du nombre de prévenus puisque ceux-ci étaient 18.100 au 1er janvier 2000, contre 20.452 au 1er janvier 1999. Il a souligné que la baisse du nombre de détenus recouvrait des évolutions très différentes, observant que les entrées en détention pour des infractions telles que le vol simple ou les infractions, à la police des étrangers, étaient en chute libre, tandis que les entrées en détention pour atteintes aux moeurs ou vols aggravés progressaient fortement.

Le rapporteur pour avis a indiqué que l'augmentation du nombre de détenus condamnés pour viols ou autres agressions sexuelles était particulièrement impressionnante. Il s'est déclaré préoccupé par les retards pris dans la mise en oeuvre de la loi du 17 juin 1998 sur la prévention et la répression des infractions sexuelles, observant que les dispositions sur l'injonction de soins n'étaient toujours pas appliquées.

A propos de la situation des détenus, M. Georges Othily, rapporteur pour avis, a noté que le nombre de suicides demeurait préoccupant, 125 détenus s'étant suicidés dans les prisons en 1999, et 112 depuis le début de l'année 2000. Il a souligné qu'une récente étude avait montré qu'en 1980, le taux de suicide était cinq fois plus élevé en détention que dans la population générale et qu'en 1997, ce taux était douze fois plus élevé en détention que dans la population générale.

Le rapporteur pour avis a ensuite rappelé que l'année écoulée avait été marquée par la création de deux commissions d'enquête à l'Assemblée nationale et au Sénat. Il a indiqué que la commission d'enquête du Sénat, présidée par M. Jean-Jacques Hyest et dont le rapporteur était M. Guy Cabanel, avait proposé la mise en oeuvre de 30 mesures d'urgence pour améliorer les conditions de détention et désencombrer les maisons d'arrêt. Il a fait valoir que les réponses apportées par le Gouvernement aux travaux des commissions d'enquête ne paraissaient pas entièrement satisfaisantes, notant que le Gouvernement avait proposé l'élaboration d'une grande loi pénitentiaire qui redéfinirait les missions de l'administration pénitentiaire et rassemblerait tous les textes sur les prisons actuellement épars. Il a observé que l'élaboration d'une telle loi serait nécessairement très longue, et qu'il n'était pas possible d'attendre pour agir.

Evoquant le placement sous surveillance électronique, M. Georges Othily, rapporteur pour avis, a indiqué que les expérimentations avaient enfin commencé à Agen, Grenoble, Aix et Lille. Il a précisé que l'expérimentation devait durer neuf mois avant que le dispositif soit étendu à de nouveaux sites, puis généralisé en 2002 ou en 2003. Il s'est inquiété des débuts timides de l'expérimentation, observant que dix bracelets seulement étaient posés sur des condamnés en fin de peine, alors que quatre-vingts sont disponibles.

A propos du personnel pénitentiaire, le rapporteur pour avis a déclaré partager le sentiment de la commission d'enquête du Sénat selon lequel les personnels étaient dévoués, mais désorientés. Il a souligné que le projet de budget prévoyait un nombre important de créations d'emplois, mais que les vacances de postes demeuraient nombreuses et créaient une atmosphère d'exaspération au sein des établissements. Il a en outre observé que l'administration pénitentiaire devait recruter massivement, à un moment où le nombre de candidats au concours de surveillants diminuait. Il en a déduit qu'il existait un risque d'abaissement de la qualité du recrutement. Il a enfin indiqué que la féminisation croissante du personnel de surveillance soulevait certaines difficultés, dans la mesure notamment où ces personnels ne peuvent procéder à la fouille des hommes détenus.

M. Georges Othily, rapporteur pour avis, a ensuite évoqué la formation, soulignant que la nouvelle école nationale d'administration pénitentiaire, implantée à Agen à l'initiative de M. Pierre Méhaignerie, avait été inaugurée le 8 novembre dernier. Il a indiqué que ce changement de localisation de l'école avait été l'occasion d'une réorganisation complète de la formation, observant qu'elle était désormais organisée par disciplines et non plus par corps ou par catégories de personnels. Il a estimé que les personnels de surveillance devraient être davantage encouragés à postuler à des fonctions de formation, l'expérience de fonctionnaires en poste étant très utile aux élèves et aux stagiaires.

A propos des établissements pénitentiaires, le rapporteur pour avis a souligné que le programme " 4.000 places ", prévoyant la construction de six nouveaux établissements, était entré dans sa phase de réalisation et que deux établissements pourraient ouvrir leurs portes à la fin de 2002, les autres en 2003. Il a souligné que le Gouvernement avait annoncé la construction de trois établissements supplémentaires et avait en outre lancé un programme de rénovation des cinq plus grandes maisons d'arrêt, pour un montant d'environ 3,6 milliards de francs. Il a enfin rappelé que le Premier ministre avait prévu le lancement d'un plan global de rénovation pour un montant de 10 milliards de francs, qui viendraient s'ajouter à l'ensemble des mesures déjà annoncées.

Le rapporteur pour avis a observé que de multiples constructions et rénovations avaient été annoncées, et qu'il devenait difficile de percevoir la cohérence de l'ensemble. Il a souhaité que la création d'un établissement public pour la mise en oeuvre du plan de rénovation permette d'y voir plus clair. Il a en outre remarqué que les résultats tardaient à se faire sentir, que les projets prenaient du retard et que le taux de consommation des crédits de paiement était particulièrement faible.

Concluant, M. Georges Othily, rapporteur pour avis, a regretté que les travaux de la commission d'enquête du Sénat ne soient pas davantage suivis d'effet. Il a fait valoir que le gouvernement annonçait beaucoup de mesures et de crédits, mais que ces annonces ne seraient suivies d'effet qu'après un long délai, alors même que l'administration pénitentiaire avait besoin de mesures d'urgence qui pourraient être prises sans attendre. Il a exprimé la crainte que la situation des prisons soit de nouveau oubliée, comme elle avait pu l'être dans le passé.

Il a proposé de donner un avis défavorable à l'adoption des crédits de l'administration pénitentiaire.

Mme Dinah Derycke a rappelé que les conclusions de la commission d'enquête du Sénat avaient été adoptées à l'unanimité. Elle a estimé qu'il restait beaucoup à faire pour améliorer la situation dans les établissements pénitentiaires, tout en rappelant que le Gouvernement actuel avait consenti à des efforts sans précédent. Elle a supposé que la majorité sénatoriale entendait rejeter les crédits consacrés à l'administration pénitentiaire pour aider le Gouvernement à faire encore davantage.

M. Jean-Jacques Hyest a souligné que les conclusions de la commission d'enquête n'avaient pour l'instant pas été suivies d'effet. Il a estimé qu'il était indispensable de procéder à des modifications profondes du fonctionnement de l'administration pénitentiaire et a noté que la création d'un établissement public pour la mise en oeuvre du nouveau plan de rénovation démontrait que les méthodes actuelles ne fonctionnaient pas.

La commission a donné un avis défavorable à l'adoption des crédits du ministère de la justice consacrés à l'administration pénitentiaire.

PJLF pour 2001 - Crédits consacrés à la protection judiciaire de la jeunesse - Examen du rapport pour avis

La commission a ensuite procédé, sur le rapport de M. Patrice Gélard, à l'examen pour avis des crédits de la justice pour 2001, consacrés à la protection judiciaire de la jeunesse.

M. Patrice Gélard, rapporteur pour avis, a indiqué que le budget de la protection judiciaire de la jeunesse pour 2001, en augmentation de 7,3 % par rapport à l'année précédente (à structure constante), s'élevait à 3,4 milliards de francs, et représentait 12,1 % du budget de la justice.

Il a souligné que cet effort budgétaire important s'accompagnait de la création de 380 emplois en 2001, soit le même chiffre qu'en 2000, et d'un programme d'embauche de 500 agents de justice dans le cadre du dispositif " emplois-jeunes ".

M. Patrice Gélard a estimé nécessaire de revaloriser la carrière de certains personnels de la protection judiciaire de la jeunesse, notamment les éducateurs, à l'image de ce qui avait été fait, tant pour l'administration pénitentiaire que pour les magistrats. Il a regretté que les perspectives des éducateurs soient limitées aux seuls postes de directeurs de centres, s'est inquiété de leur formation et du délai entre la création du poste et l'affectation de l'agent.

S'agissant des équipements de la protection judiciaire de la jeunesse, M. Patrice Gélard a dénoncé le retard important dans les réalisations, la baisse de 53 % des crédits de paiement et le retour des gels de crédits. En conséquence, il a estimé que le programme initialement prévu, tendant à la création de 50 centres de placement immédiat (CPI) et de 100 centres éducatifs renforcés (CER), ne serait pas tenu, puisque seulement 6 CPI s'ajouteraient en 2001 aux 23 CPI déjà créés ou en cours de réalisation.

M. Patrice Gélard, rapporteur pour avis, a jugé que les besoins croissants auxquels allait être confrontée la protection judiciaire de la jeunesse excédaient l'effort budgétaire consenti. En effet, il a noté que l'augmentation de la délinquance juvénile s'était traduite en 1999 par la mise en cause de 126.000 mineurs par la police nationale et 43.900 par la gendarmerie nationale, le nombre de procès-verbaux et de plaintes mettant en cause des mineurs ayant augmenté de 9 %.

Il s'est félicité du développement du recours aux délégués du procureur, au nombre de 435, dont un tiers s'occupe exclusivement de mineurs.

Rappelant que 39.000 mineurs avaient été condamnés en 1999 et que 121.000 mineurs en danger avaient fait l'objet d'une mesure civile, M. Patrice Gélard, rapporteur pour avis, a regretté que les moyens de la justice évoluent moins vite que les cas de délinquance et de jeunesse en danger.

Face à la délinquance de mineurs de plus en plus jeunes, il a estimé que de nouvelles méthodes devaient être mises en place, notamment le développement des réseaux et de la contractualisation.

En conclusion, il a proposé à la commission de donner un avis défavorable à l'adoption des crédits du ministère de la justice consacrés à la protection judiciaire de la jeunesse, cet avis ne constituant nullement une marque de défiance envers l'action de la ministre de la justice.

Mme Dinah Derycke a rappelé que les populations de mineurs en danger et de mineurs délinquants se recouvraient.

M. Patrice Gélard, rapporteur pour avis, s'est inquiété du passage à l'âge adulte des mineurs en danger ou délinquants, rien n'étant prévu pour leur suivi et la transition vers d'autres modes de prise en charge.

M. Jean-Jacques Hyest a souligné que les moyens financiers mis en oeuvre par les conseils généraux dans le domaine de la prévention de la délinquance étaient loin d'être négligeables, et que les départements travaillaient en collaboration avec la protection judiciaire de la jeunesse et l'éducation nationale.

La commission a ensuite émis un avis défavorable à l'adoption des crédits de la protection judiciaire de la jeunesse inscrits dans le projet de loi de finances pour 2001.