Travaux de la commission des lois



- Présidence de M. Patrice Gélard, vice-président.

Nomination de rapporteurs

La commission a tout d'abord nommé M. Patrice Gélard rapporteur sur la proposition de résolution n° 213 (2003-2004), présentée par MM. Christian Poncelet, Josselin de Rohan, Michel Mercier, Jacques Pelletier, Henri de Raincourt et Xavier de Villepin, tendant à actualiser le Règlement du Sénat.

Puis la commission a nommé M. Christian Cointat, en remplacement de M. Laurent Béteille, empêché, rapporteur sur les propositions de loi  128 rectifié (2003-2004), présentée par M. Robert Del Picchia, Mme Paulette Brisepierre, MM. Jean-Pierre Cantegrit, Xavier de Villepin, Hubert Durand-Chastel, Louis Duvernois, André Ferrand, Michel Guerry ainsi que lui-même, etn° 208 (2003-2004), présentée par Mme Monique Cerisier-ben Guiga, M. Guy Penne et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, tendant à modifier la loi n° 82-471 du 7 juin 1982 relative au Conseil supérieur des Français de l'étranger.

Conseil supérieur des Français de l'étranger - Modification de la loi n° 82-471 du 7 juin 1982 - Examen du rapport

M. Christian Cointat, rapporteur, a évoqué les principales étapes ayant conduit le Conseil supérieur des Français de l'étranger du statut d'un simple organisme consultatif placé auprès du ministre des affaires étrangères à celui d'assemblée représentative des Français de l'étranger apportant une contribution essentielle à l'expression de la solidarité nationale envers les Français établis hors de France, à l'information des autorités françaises sur les difficultés et les attentes de ces derniers et au rayonnement de la France dans le monde. Enfin, il a mentionné l'existence d'organismes comparables en Italie, au Portugal, en Espagne et en Suisse.

M. Christian Cointat, rapporteur, a observé que les deux propositions de loi, identiques et cosignées par onze des douze sénateurs représentant les Français établis hors de France et l'ensemble des membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, étaient le fruit des réflexions consensuelles de la commission temporaire chargée de la réforme créée en 2000 par le Conseil supérieur des Français de l'étranger afin de se doter des moyens de jouer pleinement son rôle de représentant des Français expatriés et d'enrayer la chute de la participation électorale constatée lors des dernières élections.

Il a indiqué que les dispositions de ces deux textes tendaient à prévoir, en premier lieu, la transformation du Conseil supérieur des Français de l'étranger en une Assemblée des Français de l'étranger dont les attributions resteraient inchangées, en deuxième lieu, la diminution du nombre des personnalités qualifiées qui y siègent, l'amoindrissement de leurs prérogatives et l'encadrement des modalités de leur désignation, en dernier lieu, l'augmentation du nombre des délégués élus et l'actualisation de la délimitation des circonscriptions électorales.

Il a expliqué que le choix de la dénomination « Assemblée des Français de l'étranger » avait pour objet, d'une part, de consacrer la transformation du Conseil supérieur des Français de l'étranger en une assemblée d'élus, la qualification de « Conseil supérieur » étant habituellement réservée à des organismes à caractère technique, d'autre part, de faciliter son identification par les Français établis hors de France. Il a précisé que l'appellation « Conseil des Français de l'étranger » avait été envisagée mais écartée en raison de l'existence de la Caisse des Français de l'étranger et du risque de confusion des sigles. Il a estimé que le terme d'« assemblée » présentait l'avantage d'être employé pour qualifier les assemblées délibérantes de la plupart des collectivités territoriales dotées d'un statut particulier et a relativisé sa portée en rappelant qu'il était également employé dans la dénomination d'organismes ne procédant pas du suffrage universel tels que l'assemblée permanente des chambres de commerce et d'industrie.

M. Christian Cointat, rapporteur, a indiqué que les deux propositions de loi tendaient à réduire de vingt à douze le nombre des personnalités désignées, à leur conférer une voix consultative et non plus délibérative et à encadrer le pouvoir de nomination du ministre des affaires étrangères, en l'obligeant à désigner les titulaires de fonctions dont la liste serait établie par l'Assemblée des Français de l'étranger. Il a indiqué que la présence de personnalités qualifiées au sein d'une assemblée d'élus pouvait susciter de légitimes interrogations mais trouvait sa justification dans le fait que la plupart des responsables des associations et organismes de défense des intérêts des Français de l'étranger résidaient en France et, de ce fait, n'étaient pas éligibles au Conseil supérieur des Français de l'étranger.

M. Christian Cointat, rapporteur, a souligné que la carte électorale proposée, à l'instar de la carte en vigueur, ne reposait pas exclusivement sur des bases démographiques mais prenait en compte, à juste titre, des critères tels que : l'évolution de la présence française à l'étranger, l'étendue des circonscriptions électorales, le nombre des pays et des circonscriptions consulaires regroupés, l'éloignement de la France, les difficultés de communication, ou encore le degré de sécurité.

Il a rappelé que le Conseil constitutionnel, d'une part, admettait que le législateur puisse « tenir compte d'impératifs d'intérêt général susceptibles d'atténuer la portée de cette règle fondamentale » qu'est le principe de l'équilibre démographique, à condition toutefois de ne le faire « que dans une mesure limitée », d'autre part, avait considéré, dans sa décision du 12 février 2004 sur la loi organique portant statut d'autonomie de la Polynésie française, que « le nouveau découpage pour l'élection des membres de l'assemblée de la Polynésie française, qui a pour effet de réduire les disparités démographiques entre circonscriptions, tout en tenant compte de l'intérêt général qui s'attache à la représentation des archipels éloignés, n'appel[ait] pas de critique de constitutionnalité. »

Il a précisé que la réforme proposée tenait compte de l'accession à l'indépendance de plusieurs Etats, de la suppression de circonscriptions consulaires, des axes de communication et de la nécessité de créer des ensembles géographiques cohérents, prévoyait l'élection - et non plus la désignation - du délégué de la principauté d'Andorre, devenue indépendante en 1993, corrigeait des disparités démographiques entre circonscriptions et plafonnait à six - au lieu de 7 - le nombre de délégués par circonscription. Il a observé que le nombre total des membres de l'Assemblée des Français de l'étranger passerait ainsi de 183 à 179, soit 12 sénateurs représentant les Français établis hors de France, 155 délégués élus au suffrage universel direct et 12 personnalités qualifiées.

M. Christian Cointat, rapporteur, a tout d'abord proposé de généraliser le changement d'appellation du Conseil supérieur des Français de l'étranger, limité à la loi du 7 juin 1982 par les deux propositions de loi (article premier), de simplifier les modalités de désignation des personnalités qualifiées, en maintenant la liberté de choix du ministre des affaires étrangères, sous réserve de l'interdiction de nommer des personnalités remplissant les conditions de résidence requises pour être élu à l'Assemblée des Français de l'étranger (article 2), et de rectifier quelques erreurs figurant dans la nouvelle carte électorale (article 4).

En outre, il a proposé de compléter les dispositions des deux propositions de loi, d'une part, en substituant la qualification usuelle de « Bureau » de l'Assemblée des Français de l'étranger à celle de « Bureau permanent » (article 3), d'autre part, en instituant un contrôle de la recevabilité des candidatures préalable à l'élection des délégués à cette assemblée (article 5). Ayant indiqué que le Conseil d'Etat avait récemment considéré que les chefs des postes diplomatiques et consulaires ne pouvaient refuser d'enregistrer la déclaration de candidature d'une liste dont certains membres seraient inéligibles, il a expliqué que la contestation de l'éligibilité d'un candidat ou d'une liste de candidats ne pouvait donc intervenir qu'après le scrutin, ce qui risquait d'entraîner un grand nombre de contentieux et de rendre nécessaire l'organisation de nouvelles élections qui auraient pu être évitées si un contrôle juridictionnel préalable avait existé.

Enfin, M. Christian Cointat, rapporteur, a jugé nécessaire de prévoir un dispositif transitoire aux termes duquel les réformes des modalités de désignation des personnalités qualifiées et de la carte électorale des délégués élus à l'Assemblée des Français de l'étranger s'appliqueraient à compter des renouvellements triennaux de l'assemblée de 2006 et 2009 (article 9).

M. Michel Dreyfus-Schmidt a considéré que le fait d'être signataire d'une proposition de loi ne privait pas de tout pouvoir d'amendement, comme en témoignaient les propositions du rapporteur. Il a souhaité connaître le nombre des électeurs inscrits dans chaque circonscription pour l'élection des délégués au Conseil supérieur des Français de l'étranger. Il a estimé que les réformes opérées à l'étranger devaient inspirer plus souvent les autorités françaises, à l'exemple de l'autorisation du vote des étrangers aux élections municipales en Belgique. Il s'est étonné, d'une part, du maintien de la présence de personnalités qualifiées au sein d'une assemblée d'élus, d'autre part, de l'obligation faite au ministre des affaires étrangères par les deux propositions de loi de dresser une liste des fonctions dont les titulaires siègeraient au Conseil supérieur des Français de l'étranger après chaque renouvellement triennal. Enfin, il s'est opposé au changement de dénomination du Conseil supérieur des Français de l'étranger, l'estimant dépourvu de véritable justification.

M. Daniel Hoeffel s'est réjoui que la révision du nombre des délégués élus au suffrage universel direct et de la délimitation de leurs circonscriptions électorales ait fait l'objet d'un consensus au sein du Conseil supérieur des Français de l'étranger.

Observant que le Conseil supérieur des Français de l'étranger pouvait procéder à des auditions, M. Jean-Pierre Sueur s'est opposé au maintien de personnalités qualifiées au sein de cette assemblée composée d'élus au suffrage universel.

M. Jean-Claude Frécon a relevé que la nouvelle carte électorale plaçait le Kazakhstan, le Kirghizstan, l'Ouzbékistan, le Tadjikistan et le Turkménistan dans une circonscription électorale de la zone Europe alors que ces Etats n'étaient pas membres du Conseil de l'Europe et n'avaient pas vocation à y adhérer.

M. Christian Cointat, rapporteur, a indiqué qu'il était favorable, à titre personnel, à la suppression de la présence de personnalités désignées au sein du Conseil supérieur des Français de l'étranger mais qu'un consensus s'était dégagé, au sein de cette assemblée, sur une réforme consistant, dans un premier temps, dans la réduction du nombre, l'amoindrissement des prérogatives et l'encadrement des modalités de désignation des personnalités qualifiées. Il a rappelé les raisons justifiant cette présence, insistant sur le rôle des associations, en particulier l'Association démocratique des Français de l'étranger et l'Union des Français de l'étranger, auprès des Français établis hors de France.

Il a ajouté que la présidence par le ministre des affaires étrangères d'une assemblée d'élus au suffrage universel était tout aussi singulière que la présence de personnalités désignées mais justifiée par le manque de moyens du Conseil supérieur des Français de l'étranger.

En réponse à M. Jean-Claude Frécon, il a précisé que le Kazakhstan, le Kirghizstan, l'Ouzbékistan, le Tadjikistan et le Turkménistan, Etats membres de la Communauté des Etats indépendants auraient Moscou pour chef-lieu de circonscription. Il a indiqué que ces Etats ne comptaient pas un nombre suffisant de Français pour former à eux seuls une circonscription électorale.

M. Jean-Claude Frécon a souhaité connaître les raisons pour lesquelles ces Etats n'étaient pas rattachés à la circonscription électorale comprenant notamment l'Afghanistan et le Pakistan.

M. Christian Cointat, rapporteur, lui a répondu que cette circonscription électorale avait New Dehli pour chef-lieu et que les liaisons aériennes étaient plus aisées avec les Etats appartenant à la circonscription de Moscou.

M. Michel Dreyfus-Schmidt a indiqué que le Conseil supérieur des Français de l'étranger ne pouvait être qualifié d'assemblée dans la mesure où il était présidé par le ministre des affaires étrangères, comptait en son sein des personnalités désignées et ne disposait ni de pouvoirs délibératifs ni d'un territoire. Aussi a-t-il demandé à la commission de refuser son changement de dénomination.

M. Christian Cointat, rapporteur, a souligné que l'appellation d'Assemblée des Français de l'étranger répondait à la fois à l'évolution des prérogatives du Conseil supérieur des Français de l'étranger, à la nécessité de mieux le faire connaître, tant auprès des Français établis hors de France que des pouvoirs publics, et à une forte attente de l'ensemble de ses membres.

M. Patrice Gélard, président, après avoir fait part de ses réticences initiales à l'égard de ce changement de dénomination, s'est déclaré convaincu par les arguments du rapporteur.

La commission a adopté les conclusions proposées par le rapporteur.

Résolutions européennes - Création d'une agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures - Fixation du délai limite pour le dépôt des amendements

En application de l'article 73 bis, alinéa 6, du Règlement du Sénat, la commission a décidé de fixer le délai limite pour le dépôt des amendements auprès du secrétariat de la commission à la proposition de résolution n° 180 (2003-2004) présentée par M. Robert Del Picchia au nom de la délégation pour l'Union européenne, sur la proposition de règlement portant création d'une agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures (E 2447), au lundi 1er mars 2004 à 17 heures.

Le rapport de M. Alex Türk, ainsi que les éventuels amendements sur cette proposition de résolution, seront examinés le mercredi 3 mars 2004.