AFFAIRES SOCIALES

Table des matières


Mardi 20 juin 2000

- Présidence de M. Jean Delaneau, président -

Audition de M. Michel Rocard, président de la commission de l'emploi et des affaires sociales du Parlement européen, accompagné de M. Bartho Pronk, député européen (PPE)

La commission a procédé à l'audition de M. Michel Rocard, président de la commission de l'emploi et des affaires sociales du Parlement européen, accompagné deM. Bartho Pronk, député européen (PPE).

M. Jean Delaneau, président, a rappelé que la présente audition s'inscrivait dans un contexte, celui de la volonté exprimée tant par Mme Nicole Fontaine, présidente du Parlement européen, que par M. Christian Poncelet, président du Sénat, d'un renforcement des liens entre les deux Assemblées.

Il s'est donc déclaré particulièrement heureux que la commission des affaires sociales puisse entendre M. Michel Rocard et s'est félicité de la présence à ses côtés de M. Barto Pronk, député européen, qui permettait à cette rencontre entre les deux commissions de ne pas rester exclusivement " franco-française ".

M. Michel Rocard, président de la commission de l'emploi et des affaires sociales du Parlement européen, a rappelé qu'il existait 22 assemblées parlementaires dans les pays membres de l'Union et que ne pouvait donc être sous-estimée la difficulté pratique, pour le Parlement européen, d'entretenir des relations bilatérales approfondies avec chacune d'entre elles. Pour autant, il a estimé que le développement de ces relations était indispensable et a salué, à son tour, l'initiative de M. Christian Poncelet, président du Sénat français, et de Mme Nicole Fontaine, présidente du Parlement européen, d'instaurer un dialogue renforcé entre ces deux assemblées. Il a précisé que la Conférence des chefs de groupes politiques de la Commission de l'emploi et des affaires sociales avait appuyé unanimement la décision de son président d'accepter l'invitation du Sénat français. Il a tenu à en remercier M. Bartho Pronk, président de la fraction la plus importante de la commission, le parti populaire européen.

M. Michel Rocard a rappelé l'évolution du Parlement européen qui, après avoir été composé de membres désignés et après avoir tenu un rôle essentiellement consultatif, a vu ses membres élus au suffrage universel et ses compétences se rapprocher de celles des parlements nationaux. Il a considéré que la démission de la commission présidée par M. Santer, provoquée par la perspective quasi certaine d'un vote de censure de la part du Parlement européen, marquait une étape décisive dans l'affirmation de cette assemblée parlementaire.

M. Michel Rocard a observé que le Parlement européen exerçait sa compétence de colégislateur sur l'ensemble des textes, y compris le budget. Il a rappelé qu'il lui revenait d'adopter de concert avec le Conseil des ministres les directives qui fixent des objectifs à atteindre pour les pays membres, ainsi que les règlements qui constituent des textes d'application directe dans les différentes législations nationales. Il a indiqué, néanmoins, que le Parlement européen restait dépourvu de tout pouvoir d'initiative législative, qui constitue une compétence exclusive de la Commission. Il a regretté que les travaux d'ordre législatif du conseil des ministres ne soient pas publics, alors même que cette instance est amenée à jouer le même rôle qu'une assemblée parlementaire.

M. Michel Rocard a rappelé que les compétences des institutions européennes en matière sociale étaient restées longtemps confinées aux seules questions intéressant les travailleurs frontaliers et la libre circulation des travailleurs dans le marché unique, toute évolution de la pratique par rapport au texte du traité de Rome ayant été freinée, notamment du fait de l'opposition du Royaume-Uni à toute idée d'intégration de la sphère sociale au niveau communautaire. Il a considéré que le protocole social annexé au traité de Maastricht, permettant à onze des douze pays membres d'entreprendre des actions communes dans le domaine social, n'avait pu donner entière satisfaction du fait notamment de l'interprétation restrictive de la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE) sur la valeur des actes ainsi adoptés.

M. Michel Rocard a constaté que le changement de gouvernement au Royaume-Uni avait sensiblement modifié la situation comme l'avait démontré le traité d'Amsterdam qui ouvre le champ du social à l'action au niveau européen. Il a observé que les partenaires sociaux avaient également pris des initiatives importantes dont témoignait l'accord sur le congé parental négocié récemment par l'Union des confédérations de l'industrie et des employeurs d'Europe (UNICE) et la Confédération européenne des syndicats (CES), accord ensuite transcrit sous forme de directive.

M. Michel Rocard a souligné que le législateur européen avait plus pour objectif de fixer des normes sociales minimales -sous réserve qu'elles ne pénalisent pas les entreprises et particulièrement les petites et moyennes entreprises (PME)- que d'adopter des textes directifs tels que pouvaient le faire les parlements nationaux.

Il a indiqué qu'à la suite du Conseil européen de Luxembourg, les pays membres avaient décidé d'adopter trois catégories de dispositions permettant de lutter contre les discriminations. Il s'agit d'une directive contre le racisme et l'antisémitisme, une directive contre les discriminations sur le lieu de travail, ainsi qu'un programme d'actions comprenant un certain nombre de mesures expérimentales et de propositions innovantes. Il a observé que la conviction des Etats membres d'agir de concert sur ce sujet avait été renforcée par le changement de gouvernement intervenu en Autriche et qu'il incomberait à la présidence française de faire aboutir ces travaux. Il a remarqué que l'objet même de ces textes constituait un élargissement du champ de compétences des institutions communautaires dans le domaine social.

M. Michel Rocard a reconnu, par ailleurs, que les questions relatives à l'emploi avaient longtemps été évoquées, au niveau européen, sur un mode par trop incantatoire jusqu'à ce que l'effort d'intégration et de convergence des économies ait mis en exergue la nécessité d'envisager la mise en place d'objectifs communs concernant les politiques de l'emploi de la même manière qu'avaient été institués des objectifs communs en matière économique et financière.

M. Michel Rocard a rappelé que le Parlement européen était amené, chaque printemps, à donner son avis sur les lignes directrices macro-économiques, puis chaque automne sur les lignes directrices pour l'emploi. Il a observé que le Conseil de Luxembourg avait déjà permis, sous l'impulsion de M. Lionel Jospin, de placer sur le même plan la politique économique et la politique de l'emploi. Il a néanmoins estimé qu'il était devenu nécessaire d'aller encore plus loin en organisant un débat commun relatif, d'une part, aux orientations macro-économiques et, d'autre part, aux politiques de l'emploi, comme venait d'ailleurs de l'envisager le Conseil européen de Lisbonne.

M. Michel Rocard a rappelé en outre que la présidence portugaise avait insisté sur les politiques de l'emploi liées aux nouvelles technologies et, plus généralement, sur la mise en place d'une Europe du savoir et de l'information fondée sur la formation et l'innovation dont les mesures d'application restaient toutefois à mettre en oeuvre.

M. Michel Rocard a insisté sur les responsabilités particulièrement lourdes incombant à la présidence française de l'Union européenne qui, outre la réussite de la Conférence intergouvernementale (CIG) et les échéances habituelles, comme le vote du budget -dont les crédits du fonds social européen- devra faire aboutir plusieurs dossiers en attente. Il s'agit de la directive très nécessaire relative au statut de la société européenne, sur lequel les Etats membres, après un blocage de quinze ans, semblent s'être accordés au prix d'un compromis sur un système à option permettant aux Allemands de conserver leur système de cogestion, ainsi que de la directive relative à l'information et à la consultation des travailleurs qui devrait permettre des progrès en termes de conditions de travail et qui doit rester indépendante de la directive sur les comités de groupe.

M. Bartho Pronk, député européen, a souhaité indiquer que, dans son esprit, le Sénat français était davantage que l'une des 22 assemblées parlementaires des Etats de l'Union ; il a souligné, en effet, qu'il existait d'importantes différences culturelles entre le nord et le sud de l'Europe et que la France occupait une place privilégiée à l'intersection de ces influences culturelles. Il a estimé que le rôle de la France avait été déterminant pour inscrire des objectifs de politique de l'emploi dans le traité d'Amsterdam, étant donné l'opposition de l'Allemagne qui préférait considérer que chaque pays devait conserver la responsabilité de sa politique de l'emploi. Il a indiqué néanmoins que si les partenaires de la France avaient accepté de discuter d'une stratégie commune pour l'emploi, il n'y avait pas eu d'accord sur les 35 heures, telles que les défendait le gouvernement français.

M. Bartho Pronk a salué l'initiative de M. Jean-Claude Juncker, premier ministre luxembourgeois à l'origine du mécanisme des lignes directrices pour l'emploi, associant objectifs et comparaisons. Ces lignes directrices avaient posé comme objectif commun un taux d'emploi de 70 % pour les salariés en Europe correspondant à un taux d'emploi d'au moins 60 % pour les femmes. Elles étaient en outre fondées sur la comparaison des différents systèmes existant en Europe, afin de permettre de recenser les " bonnes pratiques " susceptibles d'inspirer les différents Etats membres.

M. Bartho Pronk a souligné qu'il était également important de définir des références statistiques communes en matière d'emploi et de chômage, afin de pouvoir comparer les résultats des différents Etats membres. Il a observé, à cet égard, que le gouvernement de M. Tony Blair avait réinscrit plusieurs dizaines de milliers de personnes dans les statistiques du chômage afin d'établir des indicateurs pertinents et comparables entre les différents pays européens.

Il a remarqué que la difficile question du travail de nuit des femmes, dont était saisi actuellement le Parlement français, avait déjà été évoquée au Parlement européen à travers une directive. Il a insisté sur la difficulté de lutter contre les discriminations à l'embauche, étant donné les problèmes rencontrés pour établir des preuves matérielles desdites discriminations.

Evoquant à son tour la question de la publicité des débats lorsque le Conseil des ministres se prononce en matière législative, M. Bartho Pronk a observé que celui-ci exerçait alors les fonctions d'une chambre législative, en quelque sorte d'un Sénat. Il a estimé que la publicité des débats permettrait d'éviter que les ministres nationaux donnent, lors de la discussion de certains textes, une version de leur rôle par trop éloignée de la réalité et échappent, ce faisant, tant au regard des opinons publiques qu'à la vigilance des différents parlements nationaux.

M. Louis Souvet, après avoir rappelé que le Parlement européen et la Commission avaient affirmé que la négociation collective devait être la source privilégiée des normes sociales, s'est interrogé sur la place qu'occupaient aujourd'hui en France respectivement la loi et l'accord collectif dans la définition des rapports sociaux. Il a souhaité savoir si la France se distinguait des autres pays européens par le rôle qu'elle laissait à l'Etat dans la définition de ces normes. Il a également souhaité connaître comment on pouvait expliquer les difficultés persistantes à réformer le marché du travail français, alors même que plusieurs pays européens avaient adopté des réformes importantes dans ce domaine.

M. Jean Chérioux s'est interrogé sur le devenir des droits des salariés en matière de participation, lorsque plusieurs entreprises européennes prenaient la décision de se rapprocher, voire de fusionner et d'adopter un régime juridique différent.

M. Alain Gournac a demandé si le Parlement européen considérait que le gouvernement autrichien avait adopté des mesures contraires aux principes démocratiques partagés par les Etats membres de l'Union européenne. Il a souhaité savoir si l'on assistait aujourd'hui à une convergence des politiques dans le domaine social au niveau européen et si d'autres pays s'étaient engagés dans une démarche de réduction du temps de travail à 35 heures hebdomadaires comme l'avait décidé le gouvernement français.

Mme Marie-Madeleine Dieulangard a évoqué le projet de charte sur les droits fondamentaux qui devrait comporter des références aux droits économiques et sociaux. Elle s'est interrogée sur la valeur juridique qui devrait être reconnue à cette charte, après avoir rappelé qu'il existait encore aujourd'hui un vrai débat opposant les partisans d'une charte contraignante sur le plan juridique à ceux défendant le principe d'un texte simplement déclaratoire.

En réponse aux différents intervenants, M. Michel Rocard, président de la commission de l'emploi et des affaires sociales du Parlement européen, a estimé qu'il existait des différences culturelles importantes en Europe sur le rôle qui devait être réservé à la loi et à la négociation collective dans la définition des rapports sociaux. Il a rappelé que la priorité avait été donnée, dès les années 1930, dans les pays du nord, et notamment la Suède, à la négociation collective, compte tenu de la faiblesse de l'appareil d'Etat, et que cette situation avait perduré depuis lors, 80 % des textes étant le fruit d'une négociation entre partenaires sociaux. Il a souligné que ces pays étaient également imprégnés par le droit anglo-saxon, c'est-à-dire un droit flexible laissant une grande place aux juges et limitant la présence de l'Etat dans le champ social. Il a observé que les pays du sud avaient tendance à réserver une place particulière à l'Etat dans la définition des normes sociales et a insisté, au sein même des pays latins, sur les spécificités françaises, qui privilégient historiquement le recours à l'Etat et à la loi aux dépens de la société civile ou des collectivités décentralisées. Il a remarqué que cette originalité prenait toute sa dimension lorsqu'elle était observée depuis Bruxelles. Il a constaté que si les résultats enregistrés par la France restaient très bons, la lourdeur procédurale qui l'affectait rendait les évolutions difficiles et souvent coûteuses en " colères sociales ". Il a estimé bénéfique que les traités européens donnent la possibilité explicite de reprendre tels quels les accords signés entre les partenaires sociaux au niveau européen pour leur donner une portée législative.

M. Michel Rocard a considéré que l'organisation du marché du travail restait une compétence nationale conformément à l'application du principe de subsidiarité et qu'il n'appartenait donc pas à l'Europe de donner des conseils dans ce domaine à la République française.

Il a néanmoins observé que la France était caractérisée par la multiplicité des intervenants et la diversité de leur rôle (directions départementales du travail, Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA), Union nationale pour l'emploi dans l'industrie et le commerce (UNEDIC) et Agence nationale pour l'emploi (ANPE)) tandis que d'autres pays, comme l'Allemagne et la Suède, privilégiaient l'intervention d'un interlocuteur unique, mi-partenarial, mi-public, chargé d'accompagner le salarié au chômage tout au long de son parcours vers l'emploi et obtenant des résultats significatifs puisque, dans ces pays, 80 % des placements de travailleurs sont le fait de ces organes.

Aussi a-t-il fortement suggéré que les pouvoirs publics français s'inspirent davantage des solutions développées par les autres pays européens afin de favoriser un meilleur fonctionnement du marché du travail.

M. Michel Rocard a observé que la question de la participation devrait être abordée dans la future directive sur le statut de la société européenne et prise en compte dans les discussions en cours relatives à la modification des dispositions concernant la libre circulation des travailleurs en Europe.

Il a constaté que le gouvernement autrichien n'avait pas, pour l'instant, adopté de dispositions contraires aux principes fondamentaux auxquels sont attachées l'ensemble des démocraties européennes. Il a estimé que les pressions exercées sur ce gouvernement avaient eu leur utilité et qu'il convenait de les maintenir même si elles n'étaient pas sans poser quelques problèmes puisqu'elles revenaient à condamner l'Autriche pour ce qui pourrait être considéré comme un délit d'opinion.

M. Michel Rocard a rappelé que les années 1980 avaient été celles de la construction du marché unique tandis que les années 1990 avaient vu la préparation de la monnaie unique. Il a estimé que la décennie 2000 serait celle de la convergence des politiques de l'emploi, mais que cette évolution vers une unification des marchés du travail et de meilleures performances nécessiterait du temps.

Revenant sur le système à option retenu pour la future directive sur le statut de la société européenne, M. Michel Rocard a estimé qu'il était sans doute nécessaire de renoncer à une vision trop cartésienne des choses, de privilégier la correction des déséquilibres plutôt que l'invention de " cathédrales de logique ", afin que l'Europe puisse progresser sans contredire les différentes traditions nationales.

Evoquant la réduction du temps de travail à 35 heures hebdomadaires mise en oeuvre par le gouvernement français, il a rappelé ses réserves vis-à-vis de la définition d'une durée du travail précise devant servir de référence à l'ensemble des acteurs sociaux ; il a observé, par ailleurs, qu'une baisse modérée de la durée du travail était absorbée par les gains de productivité et que seule une forte baisse pouvait être créatrice d'emplois ; ainsi la résorption d'un chômage de 11 % aurait nécessité une durée hebdomadaire plus proche de 30 heures et demie que de 35 heures. Il a souligné que le coût élevé d'une telle opération ne pouvait être supporté par les entreprises qui n'en avaient pas les moyens, non plus que par les salariés qui s'y opposeraient légitimement. Dès lors qu'il n'y avait, de son point de vue, de bonne réduction du temps de travail que négociée dans chaque entreprise, M. Michel Rocard a souligné les difficultés de mise en oeuvre d'une telle politique.

Il a en revanche rappelé le coût élevé du chômage pour la collectivité qui s'élevait à environ 140.000 francs par an pour chaque salarié privé d'emploi et considéré que c'était l'économie entraînée par chaque embauche qu'il fallait réintroduire dans le circuit. Aussi avait-il préconisé, dès 1997, l'indexation des cotisations sociales sur la durée du travail accomplie par les salariés de chaque entreprise. Un tel dispositif aurait donné au processus une puissance considérable et une automacité absolue, faisant disparaître notamment la nécessité de négocier avec l'Etat l'application des conséquences de la réduction du temps de travail.

Il s'est félicité que les parlementaires européens aient adopté, à une très forte majorité, une recommandation ayant pour objet de chiffrer ce modèle de réduction du temps de travail.

M. Michel Rocard a indiqué qu'à titre personnel, il était partisan de reconnaître une portée juridique à la charte sur les droits fondamentaux aujourd'hui en discussion. Il a néanmoins reconnu qu'il n'y avait pas de consensus sur ce point et que, dans ces conditions, la charte pourrait se limiter à énoncer les droits élémentaires civils et politiques. Une autre solution pourrait consister à renoncer à donner un caractère contraignant à ce texte. Il a estimé qu'il pouvait être nécessaire d'accepter que cette charte conserve pour un temps une valeur proclamatoire à l'instar par exemple du préambule de la Constitution française de 1946 qui avait pu inspirer le législateur et guider la jurisprudence.

Mme Gisèle Printz a demandé si les autres pays européens avaient eu besoin de recourir à la loi pour promouvoir l'égalité entre les hommes et les femmes en matière de formation professionnelle.

M. Jacques Bimbenet a souhaité savoir si le principe de subsidiarité était appliqué en matière sociale.

M. Francis Giraud s'est enquis du développement d'une politique européenne de la santé.

M. Michel Esneu s'est interrogé sur les actions à mener au niveau européen en matière de lutte contre l'immigration clandestine. Il a souhaité connaître quelles étaient les instances européennes compétentes sur ce sujet.

En réponse aux différents intervenants, M. Michel Rocard a déclaré que la question de la lutte contre les discriminations entre hommes et femmes constituait une priorité pour le Parlement européen et que nombre de pays membres étaient plus avancés que la France sur ce sujet, ce qui expliquait qu'ils avaient moins ressenti la nécessité de recourir à la loi.

M. Michel Rocard a estimé que le principe de subsidiarité souffrait encore d'un problème de définition qui rendait son application malaisée. Il a souligné la nécessité de favoriser la prise en compte d'un souci de proximité sans renoncer pour autant à la définition d'un intérêt général européen.

Il a observé que la nécessité de concilier ces différents objectifs apparaissait, par exemple, lorsque l'on essayait d'organiser les droits à retraite des salariés circulant en Europe.

M. Michel Rocard a considéré que la politique de la santé n'avait pas vocation à devenir une compétence européenne. Il a observé en revanche que deux domaines relevaient d'une dimension européenne : d'une part, la prise en compte de normes minimales, tels les taux de mortalité infantile, justifiant des programmes européens, d'autre part, la nécessité de faire face dans le domaine de la défense de la santé et de la sécurité des consommateurs ou des travailleurs, à des problèmes communs tels que les organismes génétiquement modifiés (OGM) ou l'encéphalopathie spongiforme bovine (ESB).

Il a considéré que l'immigration clandestine relevait du troisième pilier, c'est-à-dire des questions relatives à la justice et aux affaires intérieures. Il a estimé que l'actualité allait conduire l'Europe à accorder toute son attention à cette question.

M. Jean Delaneau, président, a exprimé ses plus vifs remerciements à MM. Michel Rocard et Bartho Pronk pour la qualité et l'intérêt exceptionnel du dialogue qu'ils avaient noué avec les membres de la commission.