Mardi 25 octobre 2005

- Présidence de M. Gilbert Barbier, président, puis de M. Alain Milon, vice-président -

Audition de M. Jean Marimbert, directeur général, et Mme Emmanuelle Wargon, adjointe au directeur général, de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps)

La mission d'information a procédé à l'audition de M. Jean Marimbert, directeur général, et Mme Emmanuelle Wargon, adjointe au directeur général, de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps)

M. Gilbert Barbier, président, a rappelé que la mission d'information consacrée aux conditions de délivrance et de suivi des autorisations de mise sur le marché des médicaments a choisi d'organiser sa réflexion autour de quatre thèmes principaux : le rôle de l'agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps), l'indépendance des experts, l'information du corps médical et le développement des études post-AMM (études réalisées après qu'un médicament a reçu une autorisation de mise sur le marché (AMM). Ce travail rend indispensable l'audition des responsables de l'Afssaps, agence à la création de laquelle la commission des affaires sociales du Sénat a contribué.

Mme Marie-Thérèse Hermange, rapporteur, a voulu savoir si le principe de précaution a bien été respecté dans l'affaire du Vioxx et connaître les réponses faites par l'Afssaps aux critiques dont elle a fait l'objet. Elle s'est interrogée sur les leçons qu'il est possible de tirer de cette crise en ce qui concerne l'autorisation et le suivi de la mise sur le marché des médicaments.

M. Jean Marimbert a fait part de son intention, compte tenu de l'extrême importance de la question posée, de répondre avec toute la précision utile. Il a insisté sur la nécessité de revenir sur la chronologie des événements dont l'analyse démontre combien l'Afssaps a fait preuve de vigilance dans le cadre des processus d'évaluation applicables au Vioxx, comme aux autres produits de sa classe thérapeutique. Dans le domaine du médicament, le risque demeure présent puisqu'il faut agir sur l'organisme humain et qu'il est impossible d'éliminer tout risque. Il faut donc faire en sorte de développer les meilleures conditions de sécurité possibles pour les patients, en recourant à la notion de rapport bénéfice/risque.

Il a rappelé que le Vioxx, comme le Celebrex, est une spécialité pharmaceutique « anti-inflammatoire non stéroïdien », qui contient comme principe actif le rofexib et qui appartient à une nouvelle classe d'anti-inflammatoires non stéréoïdiens, dite « anti-Cox II » ou encore « Coxibs ». Cette spécialité pharmaceutique a la particularité d'inhiber une des enzymes (Cox II) impliquée dans les mécanismes d'inflammation mais également dans les mécanismes de protection de la muqueuse gastrique. L'apparition de cette nouvelle spécialité pharmaceutique a constitué une avancée par rapport aux médicaments qui l'ont précédée (les anti-inflammatoires non stéroïdiens, AINS), dont les effets secondaires gastro-digestifs sont bien connus. Les dossiers déposés pour la demande d'AMM n'avaient pas fait apparaître de signe particulier de risque cardio-vasculaire. Les indications revendiquées portent sur le traitement des crises douloureuses d'arthrose mais non sur une exposition prolongée au produit.

M. Jean Marimbert a indiqué que les deux premiers produits de cette nouvelle génération ont fait l'objet de demandes d'AMM, au niveau européen, dans le cadre de la procédure de reconnaissance mutuelle, qui ont été accordées en novembre 1999 pour le Vioxx et en mai 2000 pour le Celebrex.

M. Gilbert Barbier, président, a souhaité connaître le nombre de procédures de reconnaissance mutuelle instruites au niveau européen, ainsi que la part de cette procédure dans l'ensemble des AMM délivrées pour une commercialisation en France.

Mme Emmanuelle Wargon a précisé que l'on compte chaque année environ cinquante procédures centralisées d'AMM et cent par reconnaissance mutuelle, ces deux catégories étant gérées au niveau européen, pour un millier d'AMM délivrées en France. Cette dernière procédure concerne essentiellement des médicaments génériques, catégorie vis-à-vis de laquelle l'Afssaps fait preuve d'une exigence soutenue dans l'instruction des dossiers.

M. François Autain s'est étonné que, compte tenu des effets supposés des « Cox II », ces derniers soient prescrits avec des protections gastriques complémentaires, ainsi que le démontre l'étude Medicam 2004 publiée par la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés.

M. Jean Marimbert a précisé que la commercialisation du Vioxx ne s'est développée qu'à la suite de son admission au remboursement par l'assurance maladie, en juillet 2001. Dès cette période, les deux spécialités (Vioxx et Celebrex) ont été soumises, à l'initiative de l'Afssaps, à un suivi national de pharmacovigilance car il s'agissait d'une nouvelle classe de molécules actives. En outre, l'Afssaps avait des doutes sur le profil de sécurité globale de ces produits, qui ont donc fait l'objet d'un point de situation en comité technique de pharmacovigilance à deux reprises, en février et mai 2001, puis d'un examen en Commission nationale de pharmacovigilance en novembre 2001.

A la même période, une étude, dite VIGOR, qui comparait les effets du Vioxx à ceux d'un AINS classique, a fait ressortir davantage d'effets cardio-vasculaires pour le Vioxx que pour la spécialité pharmaceutique de la génération précédente (le Naproxene). Toutefois, cette étude portait sur des situations d'usage hors AMM, avec l'emploi d'une posologie double de celle approuvée en Europe. Devant ce résultat, le laboratoire Merck Sharp and Dohme (MSD) a soutenu que cette différence s'expliquait non pas par un effet cardio-vasculaire négatif propre au Vioxx, mais par un effet positif propre au Naproxene, explication qui revêtait une certaine plausibilité scientifique. Malgré cette argumentation, l'Afssaps, par l'intermédiaire de sa commission d'AMM, a demandé qu'une mise en garde puisse être ajoutée dans les recommandations caractéristiques du produit (RCP), dans le cadre de la procédure européenne de reconnaissance mutuelle. Cette modification ne peut en effet être menée unilatéralement par une agence nationale.

En juin 2002, a indiqué M. Jean Marimbert, la commission d'AMM de l'Agence a examiné les résultats de l'étude Class, portant sur les effets à un an de l'usage du Celebrex. Cette étude a mis en lumière le fait que l'effet bénéfique sur l'appareil digestif observé au bout des six premiers mois de traitement ne se confirmait pas après un an d'utilisation.

Au vu de ces données, qui faisaient peser un doute sur le bénéfice digestif spécifique des Coxibs, mais aussi au vu du suivi de pharmacovigilance mis en place depuis 2001, qui faisait état de l'apparition d'incidents cardio-vasculaires, l'Afssaps a demandé, dès le 28 juillet 2002, un arbitrage européen pour l'ensemble de la classe des Coxibs. Cette évaluation européenne s'est avérée relativement longue, puisque les conclusions de l'arbitrage européen n'ont été rendues publiques qu'en novembre 2003. Ces résultats ne remettaient pas en cause l'existence d'un rapport bénéfice/risque positif pour les Coxibs, mais relativisaient sérieusement les vertus qui leur étaient été prêtées à l'origine.

Les résultats de cette réévaluation ont été intégrés, au printemps 2004, dans les RCP des médicaments. A l'été 2004, la réévaluation européenne, comme d'ailleurs celle effectuée aux Etats-Unis, a abouti à reconsidérer les conditions d'emplois des Coxibs en renforçant les contre-indications et mises en garde, mais sans qu'il soit jugé nécessaire de retirer l'AMM de ces produits.

M. Jean Marimbert a observé que c'est une initiative isolée du laboratoire MSD qui a débouché, le 30 septembre 2004, sur l'annonce du retrait du marché du Vioxx à l'échelle mondiale. Le laboratoire, qui demeure le propriétaire du produit, a justifié sa décision en mettant en avant les résultats intermédiaires d'un essai clinique dont les résultats faisaient apparaître que le risque d'événements cardio-vasculaires serait deux fois plus important pour le Vioxx que pour le groupe placebo, à partir de dix-huit mois de traitement. Cette décision n'a donné lieu à aucune véritable concertation préalable avec les autorités sanitaires, qui n'ont appris la nouvelle que quelques heures avant son annonce publique. Cette manière de procéder pose une difficulté majeure en termes de santé publique quand il s'agit d'un médicament aussi largement répandu. L'absence de préparation d'une telle décision de retrait et son annonce aussi brutale peuvent en effet favoriser le déclenchement de réactions d'angoisse, voire de panique, et produire des effets indésirables lorsque les patients, au vu de ces informations, décident d'interrompre unilatéralement leur traitement sans consulter au préalable leur médecin.

En outre, la décision prise par le laboratoire de retirer, sans consultation, la spécialité pharmaceutique concernée a empêché le débat scientifique contradictoire indispensable pour évaluer la portée des résultats de l'étude et les remettre en perspective par rapport aux autres données disponibles. M. Jean Marimbert a jugé que cette décision a été motivée par le souci d'accorder la priorité aux actionnaires et aux marchés boursiers plutôt qu'aux agences sanitaires. Il a considéré que le système sanitaire n'est pas à l'abri de la répétition d'un tel scénario.

M. Gilbert Barbier, président, a voulu savoir si l'agence sanitaire américaine (Food and drug administration - FDA) a été mise en cause pour sa gestion du dossier.

M. Jean Marimbert a indiqué que le Sénat américain a procédé à des auditions, mais qu'à sa connaissance, seule la Chambre des communes britannique et le Parlement français ont publié un rapport sur le sujet.

Il a rappelé qu'à la suite du retrait du Vioxx, la Commission européenne a déclenché en novembre 2004, un second arbitrage concernant l'ensemble de la classe de Coxibs, qui s'était élargi depuis 2002 à quelques autres médicaments. Sans attendre les résultats de cette étude, l'Afssaps a recommandé aux médecins, dès le 22 décembre 2004, de limiter la prescription du Celebrex aux indications retenues par l'AMM.

La nouvelle réévaluation européenne a abouti le 17 février 2005 ; le rapport bénéfice/risque de ces produits a été considéré comme restant favorable, sous réserve du respect de nouvelles conditions d'emploi comportant des contre-indications supplémentaires chez les patients présentant une insuffisance cardiaque ou chez ceux souffrant d'une maladie cérébro-vasculaire. Parallèlement, il a été décidé d'engager en juin 2005 une réévaluation des AINS classiques, en vue d'identifier d'éventuels risques, notamment cardio-vasculaires, gastro-intestinaux et cutanés. Cette réévaluation vient d'aboutir, le 17 octobre 2005 : l'intérêt thérapeutique de ces produits n'est pas remis en cause et leur balance bénéfice/risque reste positive. Les AINS demeurent donc des traitements de référence dans la prise en charge des pathologies rhumatismales et des autres infections douloureuses.

M. Jean Marimbert s'est dit convaincu que l'Afssaps, dont l'action est encadrée par la législation française et européenne, a fait preuve de vigilance et a saisi les autorités européennes, seules compétentes, dès qu'elle a disposé des éléments permettant d'identifier les effets indésirables des spécialités pharmaceutiques concernées. Il a rappelé que les études précitées ont été conduites dans des conditions de durée et de dosage supérieures à celles prescrites en Europe. Les éléments d'information disponibles démontrent que les praticiens français ont respecté les recommandations d'AMM publiées par l'agence européenne pour l'évaluation des médicaments.

M. Gilbert Barbier, président, a voulu savoir si le recours à une procédure d'AMM nationale aurait permis à l'Afssaps de faire modifier plus rapidement les RCP des médicaments incriminés.

M. Jean Marimbert a estimé que la modification du RCP aurait pu être menée plus rapidement dans ce cas, probablement dès le premier semestre 2001.

M. Alain Milon a voulu connaître les raisons pour lesquelles l'étude reconnaissant un effet cardio-protecteur au Naxoprene n'a pas débouché sur une remise en cause du Vioxx.

Mme Emmanuelle Wargon a rappelé que l'Afssaps ne définit pas la méthodologie des études scientifiques menées par les laboratoires pharmaceutiques, ni le schéma de développement des produits. En conséquence, l'agence doit tenir compte des publications des laboratoires et laisser le débat scientifique contradictoire suivre son cours.

Mme Marie-Thérèse Hermange, rapporteur, a voulu savoir si l'Afssaps, qui a eu des doutes dès 2001, a pu en faire part à la commission chargée d'instruire la procédure d'admission au remboursement par l'assurance maladie des produits visés.

Mme Emmanuelle Wargon a indiqué que la commission concernée a été informée des points de situation faits par les instances de pharmacovigilance.

M. Jean Marimbert a rappelé qu'une autorisation de mise sur le marché, délivrée par la Commission européenne, ne peut être remise en cause que sur la base de données irréfutables, mais que les données disponibles étaient insuffisantes en 2001 pour demander l'ouverture d'une réévaluation. L'Afssaps a saisi l'agence européenne dès qu'elle a disposé d'un dossier suffisamment étayé.

Mme Emmanuelle Wargon a précisé que la décision d'autoriser le remboursement d'une spécialité pharmaceutique relève du ministre chargé de la santé. Elle a indiqué que les remarques présentées par l'Afssaps ont conduit à délivrer aux produits concernés un niveau de service médical rendu inférieur à celui espéré par les laboratoires pharmaceutiques.

M. Jean Marimbert a souligné le fait que le meilleur respect, par les patients et les prescripteurs français, des modalités conseillées d'utilisation du Vioxx, est le résultat de l'interdiction en France de la publicité directe pour les médicaments, ce qui n'existe pas aux Etats-Unis.

Mme Anne-Marie Payet, rapporteur, en a convenu et a rappelé le nombre plus faible d'accidents cardio-vasculaires dus au Vioxx en France par rapport aux Etats-Unis.

Elle s'est ensuite interrogée sur le niveau de pharmacovigilance en France et sur la faible sensibilité des pouvoirs publics et du corps médical à cette question.

Concernant les procédures d'AMM des médicaments, elle a demandé comment leur transparence peut être favorisée en rendant les données accessibles au grand public. Elle a également interrogé les représentants de l'Afssaps sur le nombre d'études post-AMM et leur mode de financement.

Mme Emmanuelle Wargon a estimé que l'évaluation des médicaments doit être continue, des essais cliniques à la sortie du marché. Deux outils de surveillance existent pour mener à bien cette évaluation : la pharmacovigilance et les études post-AMM. La pharmacovigilance est une technique de suivi des événements indésirables fondée sur la notification spontanée par les professionnels de santé. Elle existe en France depuis une trentaine d'année, structurée autour d'un réseau de trente et un centres régionaux en lien avec l'Afssaps. Ce dispositif permet à la France d'avoir le taux de notification d'effets indésirables le plus élevé d'Europe, après la Grande-Bretagne, avec 20.000 signalements annuels.

Elle a estimé, à cet égard, qu'il convient de renforcer les mécanismes de notification spontanée et de mobiliser et former les professionnels de santé sur la nécessité de cette démarche. Elle a également souhaité le développement d'études de pharmaco-épidémiologie sur des risques précisément identifiés pour certains médicaments.

Elle a ensuite rappelé que l'European Agency for the Evaluation of Medicinal Products (EMEA) et la Commission européenne ont permis la mutualisation des signalements au niveau communautaire grâce à la base de données Eudravigilance.

M. Jean Marimbert a considéré que les pouvoirs publics devraient mieux reconnaître le rôle des professionnels de santé en matière de pharmacovigilance.

Mme Emmanuelle Wargon a jugé les études post-AMM encore insuffisantes, malgré le volontarisme dont fait preuve la Direction générale de la santé (DGS). Ainsi, les études menées par les laboratoires pour tester la possibilité de nouvelles indications pour un médicament ne donnent pas d'information sur les risques présentés par l'utilisation qui en est déjà faite. Depuis environ trois ans, certains produits font l'objet d'une négociation entre la DGS, l'Afssaps et la commission de la transparence pour demander un suivi post-AMM aux laboratoires. Quarante études de ce type sont actuellement en cours.

M. Jean Marimbert a rappelé que la directive de 2004, en cours de transposition en droit interne, permet aux agences nationales de sécurité sanitaire de mieux anticiper les risques liés aux médicaments. Avant la signature de l'AMM, l'agence pourra désormais indiquer au laboratoire les conditions de suivi du médicament quand elle l'estime nécessaire. Ce type d'étude permettra une meilleure évaluation du service médical rendu et du rapport bénéfice/risque.

Mme Marie-Thérèse Hermange, rapporteur, a remarqué que, tant que les études post-AMM continueront à être financés par les seuls laboratoires, les pouvoirs publics demeureront dépendants de leur bon vouloir en la matière.

M. Jean Marimbert a reconnu que la question de leur financement est au coeur du problème des études post-AMM. Il faut inciter les laboratoires, dont les moyens financiers sont indispensables à la mise en oeuvre de ces études, à redéployer leurs crédits vers des études post-AMM à vocation sanitaire. Une enveloppe de crédits publics pourrait être créée au sein de l'Agence nationale de la recherche (ANR) pour ces dispositifs, afin de compléter les financements privés.

M. Gilbert Barbier, président, a interpellé les représentants de l'Afssaps sur la question de l'indépendance de leurs experts externes vis-à-vis de l'industrie pharmaceutique.

Mme Emmanuelle Wargon a rappelé que, avant la création de l'Agence, la totalité des expertises en matière d'AMM était effectuée par des experts externes. L'Afssaps partage aujourd'hui son activité d'évaluation entre ses propres experts et des intervenants extérieurs, notamment des médecins hospitaliers, qui ont l'avantage d'être directement en contact avec les patients. Ces experts extérieurs doivent déclarer leurs liens avec les laboratoires pour éviter les conflits d'intérêt sur certains dossiers. Ce risque est d'ailleurs limité par les règles de fonctionnement de l'Afssaps, qui imposent la collégialité de l'expertise, l'interdiction pour un expert d'intervenir dans un dossier dans lequel il a des intérêts et la mise en oeuvre d'un groupe d'experts référents en cas de conflit.

Rappelant qu'un tiers des experts externes de l'Agence reconnaît avoir des liens avec l'industrie pharmaceutique, Mme Anne-Marie Payet, rapporteur, a demandé de quels moyens dispose l'Afssaps pour intervenir en cas de conflit avéré.

Mme Emmanuelle Wargon a indiqué que l'expert mis en cause est alors exclu du traitement du dossier concerné. Citant les critiques émises sur l'indépendance des experts par la revue Nature, elle a rappelé qu'elles visent uniquement les recommandations de bonnes pratiques aux professionnels de santé et non la procédure d'AMM de l'Agence.

M. Gilbert Barbier, président, a demandé si la question de l'indépendance des experts se pose avec autant d'acuité au niveau européen.

M. Jean Marimbert a indiqué que l'EMEA dispose d'un système de règlement des conflits d'intérêt entre les experts et les laboratoires proche de celui de l'Afssaps. Il a jugé utopique que l'Agence puisse s'abstraire complément de ce type de liens. Rappelant que la majorité des chercheurs hospitalo-universitaires sont invités aux congrès internationaux par les laboratoires, il a estimé que des fonds publics doivent être mis à contribution pour ce type de dépenses.

Mme Marie-Thérèse Hermange, rapporteur, a interrogé les représentants de l'Afssaps sur les moyens dont dispose l'Agence pour inciter les autorités européennes à effectuer des études post-AMM sur des médicaments existants et pour lesquels certains doutes sont apparus, comme l'aspirine ou certaines pilules contraceptives.

Mme Emmanuelle Wargon a indiqué que les profils de risque de l'aspirine et de la pilule contraceptive sont déjà bien connus et leur usage correctement respecté par les prescripteurs et les patients en règle générale. Il arrive que les pouvoirs publics prennent l'initiative de mener une étude quand un doute apparaît sur un profil de risque, comme cela a déjà été le cas pour les traitements hormonaux de substitution. Ces études sont alors financées sur des fonds publics, dans le cadre de l'Institut national du cancer (INCa) par exemple.

M. François Autain s'est étonné de que ce l'Afssaps n'ait, à aucun moment, remis en cause la validité de la procédure d'AMM elle-même au moment de l'affaire du Vioxx. Il a demandé si le retrait du Vioxx est ou non révélateur d'une crise de l'évaluation du médicament. Il a estimé que cette évaluation est plus importante en amont qu'après l'AMM, surtout si les études post-AMM sont exclusivement financées par les laboratoires.

M. Jean Marimbert a considéré que l'Agence doit agir en fonction de deux exigences parfois contradictoires : la maîtrise du risque médicamenteux et la nécessité de favoriser les progrès thérapeutiques. Il a estimé que le niveau d'exigence de la procédure d'AMM actuelle est aujourd'hui satisfaisant au regard de ces deux objectifs. Il a reconnu que le risque demeure intrinsèque à toute mise sur le marché d'un nouveau médicament, notamment parce que les essais cliniques ne sont pas complètement transposables à l'ensemble de la population. Il a souhaité, à cet égard, que les laboratoires sortent d'une logique de commercialisation de masse pour adapter les médicaments à des populations ciblées afin de limiter les risques.

Mme Emmanuelle Wargon a considéré que, s'agissant des décisions d'AMM, le critère de la supériorité du produit par rapport aux médicaments existants ne doit pas être absolu. En effet, cela conduirait à offrir au premier produit autorisé un monopole de fait, ce qui présenterait un risque pour des patients auxquels il ne serait pas adapté. L'exemple des statines est à cet égard éclairant : le troisième produit de ce type mis sur le marché s'est, à l'usage, révélé plus efficace, supériorité qui n'apparaissait pas dans le dossier d'AMM au niveau des essais cliniques.

M. Jean Marimbert a confirmé que, dans l'intérêt des patients, il convient d'élargir l'éventail thérapeutique qui leur est proposé.

Audition de M. Didier Eyssartier, adjoint au directeur général de la santé et Mme Hélène Sainte Marie, sous-directeur de la politique des produits de santé à la Direction générale de la santé

La commission a procédé à l'audition de M. Didier Eyssartier, adjoint au directeur général de la santé et Mme Hélène Sainte Marie, sous-directeur de la politique des produits de santé à la Direction générale de la santé.

Mme Anne-Marie Payet s'est interrogée sur les leçons qu'il convient de tirer des crises récentes comme celle du Vioxx et a souhaité savoir si le principe de précaution est bel et bien resté lettre morte dans cette affaire. Elle s'est demandé comment assurer un haut niveau de précaution de la population dans un contexte d'inquiétude croissante de l'opinion publique.

Après avoir rappelé que le professeur Lucien Abenhaïm, alors directeur général de la santé, avait pris l'initiative avec le Vioxx de demander pour la première fois à une entreprise pharmaceutique, une étude postérieure à la décision de remboursement afin de mesurer l'effet de ce produit sur la vie réelle, M. Didier Eyssartier a souligné que le remboursement de cette molécule n'est intervenu qu'en juillet 2001 et que la France a demandé, en juillet 2002, un arbitrage européen sur les tolérances cardio-vasculaires des médicaments anti-inflammatoires de la famille des coxibs. Avant même l'annonce faite par les laboratoires Merck, le 30 septembre 2004, du retrait du Vioxx dans le monde entier, la Direction générale de la santé (DGS) avait saisi en 2003 la commission de transparence pour lui indiquer que les patients présentant un risque cardio-vasculaire devraient être exclus de la population cible du médicament. Il a indiqué que l'entreprise Merck a utilisé la complexité de la procédure juridique de façon à retarder la réalisation de l'étude dite « CADEUS » demandée par le professeur Abenhaïm, qui devrait faire toutefois l'objet d'une prochaine publication. Il est néanmoins possible de conclure d'ores et déjà que dans les conditions réelles d'utilisation du Vioxx en France, les patients ne sont pas exposés à un sur-risque cardio-vasculaire. Il a critiqué également le comportement de l'entreprise Merck qui, en choisissant d'annoncer brutalement le retrait de ce médicament, sans consulter ni même prévenir au préalable les autorités sanitaires européennes, a gravement porté atteinte à la crédibilité des mécanismes de délivrance et de suivi des autorisations de mise sur le marché des médicaments.

M. François Autain s'est élevé à son tour contre le comportement des laboratoires Merck.

Après avoir salué à nouveau la clairvoyance de Lucien Abenhaïm sur ce dossier, M. Didier Eyssartier a considéré qu'il convient de tirer plusieurs leçons de la crise de confiance suscitée par le retrait du Vioxx, à commencer par l'impératif de mieux cibler l'étude des populations faisant l'objet d'un suivi dans le cadre des essais thérapeutiques. Il a estimé par ailleurs que le prix des médicaments doit être fixé de façon cohérente par rapport au niveau des autres pays européens et de façon à inciter les laboratoires à promouvoir des prescriptions médicales respectueuses des objectifs recherchés en matière de « bonnes pratiques ». Il convient aussi, pour cela, de fournir des informations rigoureuses aux prescripteurs.

Mme Anne-Marie Payet a souligné l'importance cruciale de la formation des médecins dans la mesure où les laboratoires ne peuvent être tenus responsables des éventuelles prescriptions médicales inappropriées en dépit de la documentation mise à leur disposition.

Tout en reconnaissant que le rôle des visiteurs médicaux consiste par définition à promouvoir la vente des médicaments, M. Didier Eyssartier a considéré qu'il faut accompagner et aider les professions de santé à en faire le meilleur usage possible. Il a considéré, par ailleurs, que tirer toutes les leçons de la crise du Vioxx suppose aussi de retenir un second axe de réflexion reposant sur le développement du rapport bénéfice-risque d'un médicament après sa mise sur le marché, sur la mise en oeuvre des plans de gestion du risque ainsi que sur la limitation à un horizon de cinq ans des autorisations de mise sur le marché. Ces deux derniers points constituent des aspects primordiaux de la directive 2004/27/CE et du règlement CE.726/2004 du Parlement européen et du Conseil en date du 31 mars 2004. Il a précisé à ce sujet que, lors de la phase de négociation et d'élaboration de cette directive avec les instances communautaires, la France avait particulièrement insisté pour aboutir à ce résultat équilibré.

M. François Autain a demandé s'il est possible de faire confiance aux laboratoires pour se soumettre volontairement à cette nouvelle approche de la gestion du risque, ainsi que pour financer les études appropriées.

M. Didier Eyssartier a estimé que le développement des études post-autorisation de mise sur le marché (post-AMM) constitue un autre enseignement majeur qu'il convient de tirer de la crise du Vioxx.

Après avoir souligné la brutalité de l'annonce du retrait du Vioxx, Mme Anne-Marie Payet s'est interrogée sur l'opportunité de modifier les conditions d'élaboration des tests cliniques réalisés avant l'autorisation de mise sur le marché des médicaments.

Mme Hélène Sainte Marie, sous-directeur de la politique des produits de santé, a jugé que les autorités françaises s'efforcent de concilier au mieux en matière de sécurité sanitaire, la rapidité des procédures de mise sur le marché recherchées par les laboratoires et la nécessité de renforcer la qualité des contrôles. Après avoir rappelé que la France tend à être de moins en moins souvent choisie par les firmes pharmaceutiques internationales pour y réaliser des essais cliniques, dans la mesure où les procédures d'autres pays membres de l'Union européenne apparaissent moins contraignantes, elle a souhaité que soit réduit au maximum le temps consacré à la partie strictement bureaucratique d'instruction des dossiers, pour laisser la priorité aux travaux scientifiques.

Après avoir relevé l'intérêt du renforcement en cours du cadre juridique européen établi par la directive 2004/27/CE et le règlement (n° CE.726/2004), M. Didier Eyssartier a indiqué que la simple amélioration des bases de données de l'Agence française de sécurité sanitaire et des produits de santé (Afssaps) permettra déjà de faire gagner un temps précieux aux experts chargés de l'évaluation des médicaments, qui continuent malheureusement encore trop souvent à travailler sur des documentations en support papier.

Mme Marie-Thérèse Hermange a souhaité savoir quelle appréciation la Direction générale de la Santé (DGS) porte sur les études « post-AMM », réalisées après la mise sur le marché des médicaments, et elle s'est demandé en particulier si ce nouveau mode de suivi et de contrôle apparaît suffisant en France, s'il faut le développer davantage et qui doit le financer. Elle s'est également interrogée sur la question de l'indépendance des experts et de la séparation étanche que certains intervenants dans le débat public souhaitent voir instaurer entre eux et l'industrie pharmaceutique.

M. Didier Eyssartier a précisé que ces études post-AMM sont réalisées à la demande des pouvoirs publics ou à l'initiative des firmes pharmaceutiques elles-mêmes. Au cours des dernières années, la Direction générale de la santé a cherché à en assurer le développement. L'Agence française de sécurité sanitaire et des produits de santé (Afssaps) a aussi formulé des demandes en ce sens au niveau communautaire. Il a indiqué qu'un comité de liaison des études post-AMM a été créé pour coordonner les différentes administrations en charge de ces dossiers, notamment la Haute Autorité de santé (HAS), l'Afssaps, la Direction de la sécurité sociale et la Caisse nationale d'assurance maladie (CNAM), le Comité économique des produits de santé (CEPS) n'ayant pas souhaité être représenté dans cette instance.

M. François Autain s'est inquiété du risque de développement anarchique qui pourrait résulter de la multiplication récente des initiatives tendant à développer les études post-AMM.

Mme Hélène Sainte Marie a souligné que toutes les évaluations sont difficiles à réaliser, dans la mesure où il convient d'isoler certains facteurs de risques déterminés parmi un ensemble de patients ayant des habitudes de vie très diverses. Aussi certains travaux présentent-ils un caractère trop théorique pour être réellement utiles. Elle a précisé qu'après la phase d'autorisation de mise sur le marché d'un médicament, la décision de remboursement relève de la compétence du ministre de la santé. Les négociations qui sont conduites ensuite avec les firmes pharmaceutiques par le Comité économique des produits de santé font intervenir trois éléments principaux : les prix des médicaments, les volumes de commercialisation et les études à réaliser sur leurs effets prévisibles. Après avoir regretté que les données statistiques de l'assurance maladie ne soient pas davantage exploitables pour la conduite des études post-AMM, elle a jugé souhaitable de faire mieux connaître la coopération étroite existant entre ses services et ceux de l'Afssaps. Elle a par ailleurs rejeté les critiques de certains laboratoires pharmaceutiques invoquant à tort un nombre important de demandes des autorités françaises faisant doublon avec des études déjà existantes. Il est vrai, en revanche, que dans certains cas les pouvoirs publics français demandent aux multinationales pharmaceutiques de réaliser une étude spécifique sur la France, dans la mesure où les résultats des études similaires conduites dans d'autres pays d'Europe peuvent ne présenter qu'un intérêt limité pour notre pays, compte tenu des habitudes alimentaires des comportements spécifiques de la population française.

M. François Autain a demandé quelle sera l'implication réelle des entreprises pharmaceutiques dans les plans de gestion du risque, ainsi que dans leur financement.

Mme Hélène Sainte Marie a souligné que l'un des éléments des plans de gestion du risque réside précisément dans le recours aux études post-AMM. Dans la procédure d'autorisation de mise sur le marché, l'attitude des pouvoirs publics a consisté jusqu'à une date récente à pratiquer une surveillance passive des médicaments, par le biais des remontées d'information du réseau de pharmacovigilance. Il s'agit désormais de promouvoir une démarche « proactive » reposant sur l'anticipation des faits susceptibles de se produire. Pour sa part, la DGS a choisi un champ d'investigation beaucoup plus large, allant jusqu'à englober les conséquences prévisibles de l'utilisation d'un médicament sur le système sanitaire, voire son impact possible sur la fréquentation des services d'urgences des établissements hospitaliers.

M. Gilbert Barbier a posé la question de la subordination éventuelle de l'octroi des décisions de mise sur le marché des médicaments à l'exigence d'une preuve d'un progrès thérapeutique.

Reconnaissant toute la difficulté de ce débat, qui est apparu notamment lors des travaux préparatoires à l'élaboration de la directive 2004/27/CE, Mme Hélène Sainte Marie a précisé que la France ne s'est pas ralliée à cette notion, dans la mesure où les pouvoirs publics ne souhaitent pas voir certains patients souffrant d'une maladie très rare privés du bénéfice de médicaments qui seraient rejetés en raison de leur intérêt trop limité pour la grande majorité de la population. Elle a également rappelé que la DGS n'hésite pas à se prononcer en faveur de modalités de remboursement beaucoup plus limitées que le champ de l'autorisation de mise sur le marché d'un médicament ne le laisse supposer initialement. Les firmes pharmaceutiques tendent en effet à considérer qu'une autorisation de mise sur le marché vaut en quelque sorte, automatiquement et par avance, accord pour un remboursement de la sécurité sociale. Elle a précisé, par ailleurs, que le nombre total des études post-AMM demandées dans notre pays à partir de 2003 par l'administration, s'élève à soixante-dix dont trente-six sont en cours de réalisation ou sur le point d'être lancées. Il arrive que les pouvoirs publics réalisent eux-mêmes ce type de travail d'évaluation, mais la plus grande partie des études est réalisée par les laboratoires eux-mêmes, sur la base de protocoles validés par la commission de transparence.

M. François Autain a regretté que les organismes publics ne réalisent pas eux-mêmes davantage d'études post-AMM.

M. Didier Eyssartier a fait valoir qu'une généralisation des études post-AMM qui serait réalisée sur des fonds publics supposerait des moyens financiers et humains beaucoup plus importants.

Mme Marie-Thérèse Hermange a souhaité savoir si la DGS entretient des doutes sur certains médicaments commercialisés et si elle hésiterait, le cas échéant, à demander à leur sujet des études post-AMM.

M. Didier Eyssartier a déclaré que la DGS ne s'est jamais censurée pour demander les études post-AMM qui lui apparaissent nécessaires pour assurer la protection des Français. Mais il a reconnu que des difficultés de mise en oeuvre, à commencer par les limites entravant l'utilisation des bases de données de la Caisse nationale de l'assurance maladie, viennent contrecarrer ces efforts. Sur la question de l'indépendance des experts, il a estimé qu'il est nécessaire que les professionnels soient correctement rémunérés et que cette mission soit reconnue et prise en compte dans le cadre du déroulement de leur carrière. A ce titre, il a précisé que la DGS conduit actuellement, avec la Direction de l'hospitalisation et de l'offre de soins et le ministère de l'éducation nationale, une réflexion visant à assurer une juste reconnaissance du rôle d'expertise joué par les praticiens hospitaliers. Pour autant, il a considéré que le débat sur l'indépendance des experts recouvre trois autres dimensions au moins aussi importantes : le renforcement des exigences déontologiques, qui constitue au demeurant l'un des axes du prochain contrat d'objectifs et de moyens de l'Afssaps, la promotion de la collégialité dans la prise de décision et la mise en oeuvre du principe de transparence par la publication des travaux de cette agence.

M. Gilbert Barbier a observé que le principe de collégialité, pour important qu'il soit, diffère d'une prise de décision à l'unanimité.

M. Claude Domeizel s'est interrogé sur les modalités de fixation du prix des médicaments en France, ainsi que sur les instances habilitées à réaliser ce type de négociation.

Mme Hélène Sainte Marie a indiqué que le prix des médicaments fait l'objet de conventions signées entre le Comité économique des produits de santé d'une part, et les entreprises pharmaceutiques, d'autre part. Au préalable intervient une décision du ministre sur le principe du remboursement, et une autre de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie (Uncam) sur le taux de celui-ci. Il s'ensuit l'ouverture de négociations avec le laboratoire qui peuvent être longues, mais ne correspondent pas aux « retards bureaucratiques » fréquemment avancés à tort par les laboratoires.

M. Claude Domeizel a rappelé qu'à l'occasion de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005, il avait mentionné l'exemple du prix d'un médicament passé, en l'espace d'une semaine seulement, de 3 à 31 euros. Cela le conduit à s'interroger sur la possibilité même d'un ajustement tarifaire d'une telle ampleur, en un laps de temps aussi court.

M. Didier Eyssartier a indiqué, sans disposer de plus d'information sur la spécialité pharmaceutique en question, qu'il s'agirait probablement d'un déremboursement et non d'une hausse tarifaire semblant peu probable compte tenu de son ampleur

M. Claude Domeizel a considéré que les médicaments présentant un service médical rendu très insuffisant ne doivent pas faire l'objet d'une simple mesure de déremboursement, mais être retirés de la vente.

M. Gilbert Barbier a souligné l'importance du mécanisme de tarif forfaitaire de responsabilité (TFR) consistant à permettre aux assurés sociaux de se procurer deux médicaments semblables, l'un de type générique, l'autre princeps, à un prix similaire.

Mme Hélène Sainte Marie a précisé que la mise en oeuvre du tarif forfaitaire de responsabilité relève d'un choix politique du ministre de la santé, formulé à partir du constat que le taux de pénétration des médicaments génériques tend à plafonner entre 60 et 70 %. Il existe donc une proportion importante de la population, supérieure d'ailleurs à ce que l'on observe dans les pays étrangers comparables à la France, qui demeure rétive à l'idée même de recourir aux médicaments génériques. Le Gouvernement considère que le TFR constitue un outil permettant précisément d'aller au-delà des résultats déjà acquis.

Sur la question de l'information des médecins, M. Claude Domeizel s'est demandé si les pouvoirs publics ne devraient pas envisager d'agir eux-mêmes. Il s'est, par ailleurs, interrogé sur le lien qui pourrait exister entre le quasi-monopole de l'information médicale à destination des prescripteurs détenu par les laboratoires, et l'augmentation considérable des dépenses de la branche maladie de la sécurité sociale des quinze dernières années. Il a enfin souhaité connaître les résultats de la campagne d'information menée en direction du grand public avec pour objectif de limiter le recours aux antibiotiques.

M. Alain Milon s'est inquiété du déclin de la recherche médicale en France et du faible nombre des nouvelles molécules découvertes dans notre pays au cours des dernières années.

Après avoir reconnu que l'information sur le bon usage des médicaments n'est devenue une priorité dans notre pays que très récemment, M. Didier Eyssartier a souhaité que la Haute Autorité de santé réussisse à l'avenir à obtenir de bons résultats en la matière et puisse surmonter les réticences éventuelles de l'industrie pharmaceutique. Il a précisé que la nouvelle charte de la visite médicale permettra aussi de limiter les abus fréquemment évoqués en matière de prescription : les visiteurs médicaux doivent en effet remettre désormais aux médecins, en plus de leurs propres éléments d'information, les documents officiels sur les substances qu'ils entendent commercialiser. Il s'est également prononcé en faveur du développement de la formation continue du corps médical et indiqué que la campagne visant à limiter le recours aux antibiotiques produit un impact significatif auprès de la population.

M. François Autain s'est interrogé sur la position de la DGS à l'égard des modalités de recrutement des experts par les agences sanitaires. Il a souhaité savoir s'il est exact que certaines personnes auraient appris leur nomination en qualité d'expert à la lecture du Journal officiel, sans en avoir été informées au préalable. Il a également demandé quand sera publié le décret prévu à l'article L. 4113-13 du code de la santé publique, voté dans le cadre de l'article 26 de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades, et faisant obligation aux membres des professions médicales ayant des liens avec des entreprises pharmaceutiques de les faire connaître au public lorsqu'ils s'expriment sur de tels produits.

M. Didier Eyssartier a précisé d'une part, que la politique de recrutement des experts relève des agences elles-mêmes, la tutelle veillant simplement au respect des obligations déontologiques, d'autre part, que le décret mentionné par François Autain devrait être publié à la fin de l'année 2007, ou au plus tard au début de l'année 2008.

M. François Autain a indiqué qu'il semble qu'il existe, dans certaines de nos facultés de médecine, une formation aux essais thérapeutiques, qui serait néanmoins réservée aux seuls étudiants en médecine et en pharmacie se destinant à travailler pour l'industrie pharmaceutique.

M. Didier Eyssartier a précisé que la DGS se félicite de la création de l'école des hautes études en santé publique et qu'elle analysera par ailleurs les conclusions du rapport que doit bientôt remettre le professeur Bégaud sur les voies et moyens du développement de la pharmaco-vigilance.

M. Alain Milon a confirmé qu'il existe bien dans certaines facultés de médecine, et notamment à Marseille, des pôles d'expertise en matière de pharmacovigilance.

M. François Autain a souhaité obtenir des précisions quant aux modalités de transposition en droit interne de la directive 2004/27/CE, qui est supposée intervenir au plus tard le 30 octobre prochain.

M. Didier Eyssartier a confirmé que, malgré le temps considérable qui a été consacré à cette tâche par les services du ministère de la santé, un retard dans la transposition de ce texte sera effectivement à déplorer. Pour autant, le véhicule législatif prévu à cet effet doit être transmis très prochainement pour avis au Conseil d'État. Il estime donc probable que la phase législative de transposition de ladite directive sera terminée d'ici à la fin de l'année 2005 et que l'ensemble des mesures réglementaires d'application pourra être publié au cours du premier semestre de l'année 2006.