Grenelle de l'environnement (Suite)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, de programme relatif à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement.

Discussion des articles (Suite)

Mme la présidente.  - Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'article 27.

Article 27

La surveillance des milieux aquatiques sera renforcée afin de répondre aux obligations liées à l'information environnementale et à l'accès à cette information et de préparer, à partir de 2012, les programmes de mesures pour la période 2016-2021 en application des objectifs de la directive-cadre sur l'eau. Elle permettra de mieux évaluer les impacts à la fois des pollutions historiques, notamment dans les sédiments, des pollutions émergentes et des modifications de l'hydromorphologie des masses d'eau.

A cet effet, une aide budgétaire supplémentaire de 10 millions d'euros par an pourra être allouée par l'État.

Les résultats des réseaux de surveillance des milieux aquatiques seront mis à disposition des partenaires concernés et du public dans un délai d'un an après la réalisation de la campagne de mesure.

Des interfaces de mise à disposition plus simples d'utilisation seront développées par l'État et les agences de l'eau. 

Mme la présidente.  - Amendement n°418, présenté par M. Raoult et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Dans la première phrase du premier alinéa de cet article, après les mots :

répondre aux obligations

insérer les mots :

notamment celles de la convention d'Aarhus signée par la France en 1998,

Mme Odette Herviaux.  - La France a signé en 1998 la convention d'Aarhus qui fixe un cadre précis pour la surveillance des milieux aquatiques. Par cet amendement, nous voulons lui rappeler ses engagements internationaux.

M. Bruno Sido, rapporteur de la commission des affaires économiques.  - Si nous mentionnons la convention d'Aarhus dans la loi, pourquoi ne pas citer également la Charte de l'environnement qui lui est supérieure dans la hiérarchie des normes ? En outre, l'amendement est satisfait par l'article 27 qui prévoit explicitement la publicité des résultats des réseaux de surveillance. Retrait, sinon défavorable.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État chargée de l'écologie.  - Même avis. J'ajoute que les décrets d'application de cette convention ont été pris et intégrés au code de l'environnement, ce qui vous donne toute satisfaction.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Certes, mais les États parties à la convention se sont engagés en 2005 à ratifier l'amendement modifiant l'article 6, paragraphe 11, relatif à l'accès à l'information, la participation du public au processus décisionnel et à la justice en matière d'environnement ; amendement qui a été approuvé par le Conseil de l'Union européenne. La France aurait dû respecter cet engagement avant le 1er février 2008. Ce texte est l'occasion de le rappeler, comme cela se pratique pour d'autres accords internationaux.

L'amendement n°418 est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°401 rectifié, présenté par M. S. Larcher et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Dans le dernier alinéa de cet article, après le mot :

agences

insérer les mots :

ou les offices

M. Serge Larcher.  - Amendement de précision : les offices sont propres aux régions d'outre-mer.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Favorable à cette utile précision.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Avis favorable.

L'amendement n°401 rectifié est adopté.

L'article 27, modifié, est adopté.

Article additionnel

Mme la présidente.  - Amendement n°419 rectifié, présenté par Mme Herviaux et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Avant l'article 28, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La politique agricole organise des modes de production capables de garantir la sécurité alimentaire de la France, le renouvellement des générations en agriculture, et de répondre aux besoins en alimentation de la planète dans le respect des hommes, particulièrement de leur santé, des écosystèmes et de la biodiversité.

Mme Odette Herviaux.  - Cet amendement, qui paraît au premier abord redondant avec l'article 28, réaffirme la nécessité de mener une politique agricole qui soit cohérente avec le Grenelle de l'environnement. De fait, cela n'est pas toujours le cas, comme en témoignent le dernier budget et certaines orientations retenues pour la prochaine réforme de la PAC.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Certes, il n'est pas interdit de tenir des propos généraux dans une loi de programme, voire une loi de programmation -un amendement va dans ce sens... Mais n'oublions pas que l'on reproche souvent à nos lois d'être trop bavardes. Si l'on ne peut qu'acquiescer au principe qu'énonce cet amendement, il alourdit inutilement le texte puisque des objectifs similaires sont énoncés au premier alinéa de l'article 28. Retrait, sinon rejet.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Même avis. Il s'agit d'un amendement d'appel. Le Gouvernement vous a entendue, madame : la rédaction de l'article 28 vous satisfait.

Mme Odette Herviaux.  - Madame le ministre, c'est un peu plus qu'un amendement d'appel, car nous demandons la mise en cohérence des politiques avec le Grenelle de l'environnement, je le maintiens donc.

Mme Marie-Christine Blandin.  - L'objectif de sécurité alimentaire va de soi. En revanche, il en va autrement du renouvellement des générations en agriculture. Tout le monde semble s'accorder sur le principe, mais notre politique agricole, fondée sur la mécanisation et l'apport d'intrants chimiques, va à son encontre. Écrivons-le donc dans la loi au nom du « Grenellement volontaire »... (Sourires) Quant à « répondre aux besoins en alimentation de la planète », il ne s'agit pas de nourrir le reste du monde, mais de mener une politique d'exportation et d'importation qui préserve l'autonomie alimentaire des autres peuples.

L'amendement n°419 rectifié n'est pas adopté.

Article 28

La vocation première et prioritaire de l'agriculture est de répondre aux besoins alimentaires de la population, et ce de façon accentuée pour les décennies à venir. Le changement climatique, avec ses aléas et sa rapidité, impose à l'agriculture de s'adapter, de se diversifier et de contribuer à la réduction mondiale des émissions de gaz à effet de serre.

Cependant les processus intensifs de production font peser des risques parfois trop forts sur les milieux, menaçant aussi le caractère durable de l'agriculture elle-même.

Au-delà des importantes évolutions des pratiques agricoles mises en oeuvre depuis une dizaine d'années, un mouvement de transformation s'impose à l'agriculture pour concilier les impératifs de production quantitative et qualitative, de sécurité sanitaire, d'efficacité économique, de robustesse au changement climatique et de réalisme écologique : il s'agit de produire suffisamment, en utilisant les fonctionnements du sol et des systèmes vivants et, leur garantissant ainsi une pérennité, de sécuriser simultanément les productions et les écosystèmes. L'agriculture contribuera ainsi plus fortement à l'équilibre écologique du territoire, notamment en participant à la constitution d'une trame verte et bleue, au maintien de la biodiversité, des espaces naturels et des milieux aquatiques, et à la réhabilitation des sols.

À cet effet, les objectifs à atteindre sont :

a) De parvenir à une production agricole biologique suffisante pour répondre d'une manière durable à la demande croissante des consommateurs et aux objectifs de développement du recours aux produits biologiques dans la restauration collective publique ou à des produits saisonniers à faible impact environnemental, eu égard à leurs conditions de production et de distribution. Pour satisfaire cette attente, l'État favorisera la structuration de cette filière et la surface agricole utile en agriculture biologique devrait atteindre 6 % en 2012 et 20 % en 2020. À cette fin, le crédit d'impôt en faveur de l'agriculture biologique sera doublé dès l'année 2009 afin de favoriser la conversion des exploitations agricoles vers l'agriculture biologique ;

b) De développer une démarche de certification environnementale des exploitations agricoles afin que 50 % des exploitations agricoles puissent y être largement engagées en 2012. Des prescriptions environnementales pourraient être volontairement intégrées dans les produits sous signe d'identification de la qualité et de l'origine. Une incitation pour les jeunes exploitants s'installant en agriculture biologique ou en haute valeur environnementale sera étudiée ;

c) De généraliser des pratiques agricoles durables et productives. L'objectif est, d'une part, de retirer du marché, en tenant compte des substances actives autorisées au niveau européen, les produits phytopharmaceutiques contenant les quarante substances les plus préoccupantes en fonction de leur substituabilité et de leur dangerosité pour l'homme, trente au plus tard en 2009, dix d'ici à la fin 2010, et, d'autre part, de diminuer de 50 % d'ici à 2012 ceux contenant des substances préoccupantes pour lesquels il n'existe pas de produits ni de pratiques de substitution techniquement et économiquement viables. De manière générale, l'objectif est de réduire de moitié les usages des produits phytopharmaceutiques et des biocides en dix ans en accélérant la diffusion de méthodes alternatives sous réserve de leur mise au point. Un programme pluriannuel de recherche appliquée et de formation sur l'ensemble de l'agriculture sera lancé au plus tard en 2009, ainsi qu'un état des lieux de la santé des agriculteurs et des salariés agricoles et un programme de surveillance épidémiologique. Une politique nationale visera la réhabilitation des sols agricoles et le développement de la biodiversité domestique, cultivée et naturelle dans les exploitations. La politique génétique des semences et races domestiques aura pour objectif de généraliser, au plus tard en 2009, le dispositif d'évaluation des variétés, d'en étendre les critères aux nouveaux enjeux du développement durable et d'adapter le catalogue des semences aux variétés anciennes, y compris les variétés de population, contribuant à la conservation de la biodiversité dans les champs et les jardins, et aux semences de populations, et de faciliter leur utilisation par les professionnels agricoles. Un plan d'urgence en faveur de la préservation des abeilles sera mis en place en 2009 et s'appuiera notamment sur une évaluation toxicologique indépendante relative aux effets, sur les abeilles, de l'ensemble des substances chimiques ;

c bis)  De réduire la dépendance des systèmes de production animale aux matières premières importées entrant dans la composition des produits d'alimentation animale et notamment les protéagineux et les légumineuses ;

d) D'accroître la maîtrise énergétique des exploitations afin d'atteindre un taux de 30 % d'exploitations agricoles à faible dépendance énergétique d'ici à 2013 ;

e)  D'interdire l'épandage aérien de produits phytopharmaceutiques, sauf dérogations.

L'État mettra en place un crédit d'impôt pour la réalisation d'un diagnostic énergétique de l'exploitation agricole. Il s'agira de suivre de manière précise la consommation et de réaliser des bilans énergétiques des exploitations agricoles afin de réaliser des économies d'énergie directes et indirectes (tracteurs et machines, bâtiments et serres, consommation d'intrants). Il faudra produire et utiliser des énergies renouvelables dans les exploitations agricoles (expérimentation, méthanisation, mobilisation du bois agricole, adaptation de la fiscalité sur l'énergie). 

L'État agira par une combinaison d'actions : l'encadrement des professions de distributeurs et d'applicateurs de produits phytopharmaceutiques par des exigences en matière de formation, d'identification ou de séparation des activités de vente et de conseil, dans le cadre d'un référentiel vérifiable d'enregistrement et de traçabilité des produits ; un renforcement des crédits d'impôt et des aides budgétaires pour aider les agriculteurs à développer l'agriculture biologique ; des instructions données à ses services en matière de restauration collective ; la promotion d'une organisation des acteurs agricoles et non agricoles pour mettre en oeuvre des pratiques agricoles avancées sur l'ensemble du territoire concerné ; une réorientation des programmes de recherche et de l'appareil de formation agricole pour répondre d'ici à 2012 aux besoins de connaissance, notamment en microbiologie des sols, et au développement des pratiques économes en intrants et économiquement viables, notamment par un programme de recherche renforcé sur les variétés et itinéraires améliorant la résistance aux insectes et aux maladies ; l'objectif est qu'au moins 20 % des agriculteurs aient bénéficié de cette formation en 2012 ; la généralisation de la couverture des sols en hiver en fonction des conditions locales ; l'implantation progressive, pour améliorer la qualité de l'eau et préserver la biodiversité, de bandes enherbées et zones végétalisées tampons d'au moins 5 mètres de large le long des cours d'eau et plans d'eau. Ces bandes enherbées contribuent aux continuités écologiques de la trame verte et bleue.

En outre, la France appuiera au niveau européen une rénovation de l'évaluation agronomique des variétés candidates à la mise sur le marché pour mieux prendre en compte les enjeux de développement durable et notamment la réduction progressive de l'emploi des intrants de synthèse.

M. Didier Guillaume.  - La vocation première de l'agriculture est de répondre aux besoins alimentaires de la population. Un célèbre poète bigourdan, François Fortassin, (sourires) nous disait hier soir qu'il était un militant de l'eau. Je veux vous dire, ce soir, que je suis un militant du bio ! (Sourires) C'est en participant à des expérimentations que l'État et les collectivités locales pourront faciliter l'émergence d'une filière bio de qualité.

Dans les départements engagés dans le bio, on observe d'ailleurs des signes encourageants : un taux de conversion significatif de l'agriculture traditionnelle vers le bio, une notoriété importante des territoires qui sont entrés dans cette dynamique, une attente des citoyens de plus en plus importante, le développement de filières économiques et la mise en place de formations en ce domaine. Ces signaux nous encouragent à aller plus loin et ce texte milite en faveur de l'agriculture biologique.

Mais nous devons aussi nous méfier des clichés : il faut arrêter d'opposer les agriculteurs bio à ceux qui pratiquent une agriculture conventionnelle. C'est un combat d'arrière-garde qui ne sert à rien et qui ne favorise ni les uns, ni les autres. Les agriculteurs bio ne sont pas tous des post-soixante-huitards travaillant sur de petites parcelles et ne sachant pas valoriser leurs productions, et les agriculteurs conventionnels ne sont pas tous d'affreux pollueurs abusant des intrants. Si nous voulons nourrir l'ensemble de la population, nous aurons besoin des deux agricultures, l'une, si je puis dire, se nourrissant de l'autre. D'ailleurs, les techniques de l'agriculture bio sont aussi utilisées par l'agriculture conventionnelle.

Deuxième cliché : l'éternel débat entre les OGM en plein champ et l'agriculture bio. Je suis intimement persuadé qu'il n'y a aucune compatibilité entre les deux ! Si l'on veut favoriser le bio, il faut interdire sur le même territoire les champs OGM.

Pour que l'agriculture bio puisse se développer, l'État doit aider les collectivités locales à organiser de véritables circuits de distribution qui permettent à nos concitoyens d'acheter des produits bio. En outre, il ne faudrait pas que cette agriculture soit réservée aux consommateurs qui en ont les moyens. Nous devrons faire en sorte que l'évolution des techniques ne soit pas freinée par des prix trop élevés.

Pour arriver à 20 % de bio dans la restauration scolaire, il faudra que les marchés publics autorisent de s'adresser à des producteurs locaux qui pratiquent des prix modérés. Nous devrons aussi faire en sorte que les centrales d'achat, les départements et les communes puissent s'approvisionner selon des circuits les plus courts possibles.

Enfin, il faut organiser les filières de la recherche. La demande de produits bio est aujourd'hui supérieure à l'offre. Ainsi, la Drôme, qui est le premier département bio de France, cultive de nombreuses plantes aromatiques. Ce n'est pourtant pas suffisant puisque les producteurs de parfum sont obligés d'importer du tilleul et d'autres plantes aromatiques de Hongrie ou de Bulgarie. Nous devrons donc réorganiser ces filières.

Le Gouvernement devra lancer des programmes nationaux de recherche, car seuls les progrès techniques permettent d'avancer. La tâche est immense. C'est pourquoi notre politique devra fixer des objectifs clairs et prévoir des crédits importants.

Mme Odette Herviaux.  - C'est avec beaucoup de plaisir que j'ai participé au groupe 4 du Grenelle au titre de l'Association des régions de France et j'ai constaté que des personnes qui n'avaient pas l'habitude de parler ensemble ont fait des efforts pour se comprendre. Le moment est venu de concrétiser.

Depuis de très nombreuses années, le nombre des agriculteurs n'a cessé de diminuer. Ils sont devenus très minoritaires même si, dans certaines régions, comme mon département, ce secteur reste incontournable. Pourtant, les problèmes des agriculteurs sont souvent méconnus, voire incompris. J'espère que cette loi permettra à nos concitoyens de mieux comprendre les problèmes de ce secteur.

Un constat inquiétant : les prix des produits alimentaires de base ont flambé dans le monde, notamment dans les pays en développement. Selon la Banque mondiale, les prix alimentaires de base ont progressé ces trois dernières années de 83 %. En France, l'augmentation de certains prix alimentaires a suscité de nombreux débats sur le pouvoir d'achat, avant même la crise actuelle. Pourtant, de nombreux experts et spécialistes n'ont cessé, depuis plus de vingt ans d'alerter sur l'insécurité alimentaire mondiale. Tout le monde a semblé redécouvrir l'importance stratégique de l'agriculture, alors que nous sommes à la veille d'un défi impressionnant : nourrir, en 2050, une population mondiale qui aura augmenté de 50 %, alors que les terres arables ont tendance à diminuer, surtout les meilleures terres, autour des grandes villes. Il nous faudra donc être capables de doubler la production alimentaire mondiale d'ici 40 ans alors que le changement climatique se précise, que les réserves d'eau diminuent et que les sols s'érodent.

Grâce à l'innovation et à l'intelligence des hommes, l'agronomie et l'agriculture peuvent répondre à ces défis en combinant les techniques anciennes et les nouvelles technologies. Mais nous devrons aussi promouvoir d'ambitieuses politiques publiques agricoles capables de réguler les à-coups inhérents à l'agriculture : il faudra à la fois protéger les agriculteurs et garantir une production agricole régulière, non spéculative et respectueuse de l'environnement. C'est tout l'enjeu d'une agriculture diversifiée, de qualité, productive et durable.

Les missions que remplissent les agriculteurs sont multiples : garantir l'alimentation de nos concitoyens, entretenir le territoire, assurer des productions non alimentaires, diversifier les produits et les activités. Ces missions multiples répondent à des besoins qui se diversifient et qui appellent des types d'agricultures complémentaires.

Comme le disait M. Guillaume, il ne faut pas chercher à opposer les différentes formes d'agriculture entre elles, ni tenter de hiérarchiser qualité et quantité. On peut dénoncer les dérives d'une agriculture productiviste mais pas au prix de la sécurité alimentaire. Réduire l'agriculture à des circuits courts et à des méthodes plus artisanales, c'est risquer d'abandonner irrémédiablement toute ambition économique alors qu'il s'agit d'une activité vitale pour l'aménagement du territoire. C'est en insistant sur la nécessaire alliance entre les différentes formes d'agriculture que nous parviendrons à répondre aux défis qui se posent à nous.

Conformément à l'esprit du Grenelle, une politique agricole ambitieuse devra reconnaître et promouvoir l'ensemble des agricultures écologiquement responsables. A cette condition seulement, notre pays garantira sereinement sa sécurité alimentaire, contribuera à réguler efficacement les soubresauts spéculatifs d'une mondialisation aveugle et sera un acteur majeur du développement durable et solidaire entre le Nord et le Sud et entre les générations actuelles et à venir.

M. François Fortassin.  - L'agriculture doit, avant tout, subvenir aux besoins alimentaires des populations. Notre production doit donc être quantitativement suffisante et qualitativement satisfaisante. Je milite pour une agriculture raisonnée et raisonnable et je n'oppose pas l'agriculture biologique à l'agriculture traditionnelle. Nous devrons réduire la consommation d'intrants, mais nous ne pourrons le faire que par pallier. Aujourd'hui, la réduction d'intrants réduit automatiquement les rendements.

Tous les ans, notre pays perd environ 60 000 hectares de terres agricoles, soit une production non négligeable. Les agriculteurs devront prendre conscience qu'en utilisant certains produits non seulement ils mettent sur le marché des produits médiocres mais font courir un risque à leur santé.

Il y a des symboles : s'occuper des abeilles peut sembler, à première vue, anodin. Mais c'est essentiel, car la survie des abeilles marquera le retour à une agriculture moins polluante.

M. Roland Courteau.  - C'est vrai !

M. François Fortassin.  - Nous devrons rapidement interdire les épandages aériens : il ne s'agit pas de se montrer sectaire en la matière mais nous avons besoin de produits irréprochables.

Il faut aussi préserver le paysage : et pour y parvenir, rien ne vaut une agriculture fondée sur les méthodes traditionnelles. Il est normal que les herbivores mangent de l'herbe : je vous expliquerai pourquoi en défendant un amendement à cet article. (Sourires)

Je regrette que l'article 28 ne traite pas de la sylviculture. La tempête a récemment mis à mal la forêt landaise. La forêt n'est rentable que sur la durée et une catastrophe naturelle peut anéantir la production pour de nombreuses années. Si les propriétaires ne peuvent pas vivre de leur forêt, leurs terrains sont bradés, livrés à la spéculation foncière et immobilière.

En montagne, il est judicieux d'éviter, dans certaines zones, de construire des routes ou d'ouvrir des pistes. Il y aurait bien la traction animale, mais peu d'exploitants savent conduire des mulets. Quant à l'exploitation par câbles, elle est dans le massif pyrénéen limitée par le manque de professionnels formés : elle dépend de câblistes autrichiens, qui viennent quand ils ne sont pas occupés ailleurs. Des pans entiers de la forêt seront détruits ; la forêt est vouée à être anéantie si elle n'est pas exploitée. L'arbre naît, vit et meurt.

Quelques mots enfin de la neige de culture : certaines années, elle garantit le bon déroulement de la saison de ski. Elle est aussi nécessaire que l'irrigation dans les pays secs ! Et si les opérations sont menées correctement, elles reviennent ni plus ni moins à stocker de l'eau.

M. Jacques Muller.  - Nous sommes heureux que le constat, dans cet article, corresponde à la réalité : les processus intensifs comportent des risques. Il est bon de le reconnaître dans la loi. Le cap proposé mérite la plus grande attention. « Produire suffisamment », ce n'est pas « produire toujours plus » et je me réjouis de cette évolution. Que l'agriculture participe à la constitution des trames bleue et verte et au maintien de la biodiversité, qu'elle soit invitée à un mouvement de transformation, ce sont des idées que nous partageons.

Les difficultés apparaissent lorsqu'il s'agit d'entrer dans le détail : la dimension sociale et socio-territoriale est absente du texte, alors qu'elle est partie intégrante de l'agriculture durable. Ce document du ministère de l'agriculture, (l'orateur brandit un fascicule) diffusé dans tous les lycées agricoles, expose les « indicateurs de durabilité des exploitations agricoles ». Cette étude comporte une définition de l'agriculture durable : c'est celle qui est à la fois économiquement viable, écologiquement saine et socialement équitable. Il est donc recommandé de préférer l'installation des jeunes à l'agrandissement et de veiller au maintien de l'emploi sur le territoire. La course à l'agrandissement se traduit par une dévitalisation du territoire, la contribution à l'emploi doit être appréciée précisément, conclut la brochure. Hélas, cet aspect fait totalement défaut dans le projet de loi. La priorité ne va pas seulement à la protection de l'environnement mais aussi au ménagement et à l'aménagement du territoire.

En tant qu'agronome, j'estime que le principe de transformation affiché n'est pas suffisamment précisé dans cet article. Jusqu'à présent, l'agriculture était fondée sur la mécanisation et la chimie, qui ont amélioré l'efficacité agricole. Nous voulons et devons aujourd'hui prendre un tournant : il faut donc affirmer dans la loi que les éco-systèmes et la biodiversité ne sont pas des contraintes mais des facteurs de production. Et cela porte un nom : l'agriculture intégrée. Elle n'est pas bio à 100 % mais repose sur une valorisation des éco-systèmes. J'y reviendrai à l'occasion d'un amendement.

Cessons de traiter les agriculteurs en boucs émissaires. Ils travaillent selon ce que leur ont prescrit les politiques publiques. Si nous reconnaissons aujourd'hui qu'il y a des problèmes, les solutions sont à chercher dans une inflexion des politiques agricoles menées jusqu'ici. Nous n'avons pas les moyens de changer seuls la PAC, mais faisons au moins en sorte que la déclinaison française respecte autant que possible les objectifs du texte !

Label rouge, labels bio, et tant d'autres, les consommateurs sont noyés sous les certifications. Point n'est besoin d'en créer toujours de nouvelles, appuyons-nous sur ce qui existe.

J'y insiste : le document du ministère fournit tous les éléments pour évaluer le caractère durable des systèmes d'exploitation agricole : il suffit d'infléchir la répartition des aides en conséquence !

M. Daniel Soulage.  - Les récents évènements dans le sud-ouest ont eu des conséquences néfastes pour nos concitoyens mais aussi pour l'économie locale, et au premier rang l'agriculture. La région est régulièrement le théâtre de catastrophes naturelles. Du reste, mon intervention concerne à la fois l'article 28 et l'article 39 relatif à la prévention des risques majeurs.

La loi du 13 juillet 1982 a fait de l'assurance contre les catastrophes naturelles une extension obligatoire des contrats dommages aux biens et pertes d'exploitation. Ce régime mixte associe l'État et les assureurs. Il est alimenté par une cotisation additionnelle, fixée par arrêté, égale pour 2009 à 12 % du montant des cotisations de base des contrats. Or, une partie des sommes ainsi allouées au régime « catastrophes naturelles » va au Fonds de prévention des risques naturels majeurs, dit Fonds Barnier, créé en 1995. Initialement de 2 %, le taux de prélèvement atteint à présent, je l'ai dit, 12 %. Cette augmentation reflète les dérives intervenues, car depuis 1995, les missions du Fonds n'ont cessé de s'étendre. Il était initialement consacré à l'indemnisation des personnes faisant l'objet d'une mesure d'expropriation de leurs biens exposés aux risques naturels prévisibles. Depuis lors, on lui a confié l'information des citoyens, les études et travaux relatifs aux plans de prévention des risques, les opérations de reconnaissance des cavités souterraines ou des marnières... Comme l'indique un récent rapport de la Direction générale de l'environnement, le Fonds intervient de plus en plus en substitution des crédits budgétaires de la prévention des risques naturels.

L'essor des cofinancements traduit une débudgétisation d'ampleur non négligeable. Cette dérive des missions conduit inéluctablement à l'épuisement rapide des réserves du Fonds et à l'inadéquation entre recettes et dépenses Augmenter le taux de prélèvement ne constitue qu'une solution d'appoint, reflet d'une politique au fil de l'eau.

L'article 154 du projet de loi de finances pour 2009 prévoit une augmentation des dépenses du Fonds de 74 millions par an alors que les ressources annuelles du Fonds sont augmentées de l'ordre de 53 millions !

Si l'objectif, en termes de prévention, est louable, le dispositif actuel implique un choix arbitraire entre prévention et indemnisation. Le code de l'environnement prévoit actuellement un prélèvement interne sur les primes additionnelles catastrophes naturelles des contrats d'assurance. En conséquence, ce qui va au Fonds Barnier est perdu pour les victimes de catastrophes naturelles. A l'heure du changement climatique, dont le sud-ouest vient de subir les effets, comment ne pas s'interroger sur cette dissonance entre prévention et indemnisation ?

La contribution de plus en plus significative du Fonds Barnier à la politique publique de prévention rend nécessaire une réforme structurelle qui en retrace les contours et lui redonne une lisibilité politique et technique.

C'est pourquoi, je vous demande de nous éclairer sur le financement futur de ce Fonds et sur ses missions.

Mme la présidente.  - Amendement n°221, présenté par Mme Didier et les membres du groupe CRC-SPG.

Dans la première phrase du premier alinéa de cet article, après le mot :

population,

insérer les mots :

en s'appuyant sur les principes de souveraineté et de sécurité alimentaire,

M. Gérard Le Cam.  - Affirmer que « la vocation première et prioritaire de l'agriculture est de répondre aux besoins alimentaires de la population » est un retour au bon sens, on pourrait dire au bon sens paysan. II y a deux ans, le discours ambiant n'était pas le même : les agro-carburants allaient révolutionner l'agriculture et abonder le revenu de la ferme France, les OGM se chargeaient du reste par des volumes de production inespérés. C'était oublier le monde impitoyable des spéculateurs. La suite, nous la connaissons : une crise alimentaire mondiale, une flambée des cours de céréales, la quasi-totalité des secteurs de production en crise.

Les précisions qu'apporte cet amendement sont loin d'être superflues. Quand 923 millions, voire un milliard de personnes sont sous-alimentées, il faut une autre conception des agricultures nationale, européenne et mondiale. Chaque pays doit pouvoir produire en priorité de quoi se nourrir. Certes les biotopes, les climats, le niveau de développement agronomique, ne permettent pas tout, tout de suite, mais tel doit être le but. Là où les cultures d'exportation ont remplacé les cultures vivrières, la misère et la famine se sont accrues.

C'est pays par pays qu'il faut agir pour atteindre la souveraineté alimentaire. Regardez l'Asie : elle héberge 75 % des personnes souffrant de malnutrition, elle ne possède que 30 % des terres cultivées et 14 % des terres cultivables mondiales. Avec plus d'un milliard de paysans, elle est le continent le plus sous-alimenté.

La sécurité alimentaire requiert à la fois la quantité et les stocks, et la qualité. Les stocks, quand ils existent, sont l'objet privilégié des spéculateurs et de la politique agressive des pays qui prônent la guerre alimentaire mondiale. Quand les stocks n'existent pas il est de la responsabilité des pays de les constituer.

Nous sommes loin de cette vision de l'agriculture mondiale et ce n'est pas l'OMC qui résoudra les problèmes : elle les exacerbe en mettant en concurrence les pays, les agriculteurs, les industries, les services.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Vous participez à l'oubli de la « souveraineté limitée » ! On ne peut que souscrire à la volonté de défendre la souveraineté et la sécurité alimentaire. Cependant, l'article 28 y fait déjà référence, en parlant de la nécessité de « répondre aux besoins alimentaires de la population », d'« impératifs de production quantitative », de « sécurité sanitaire » et de « produire suffisamment ». Il paraît sage de ne pas surcharger le texte inutilement. Retrait.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - On pourrait aussi faire appel à la Charte de l'environnement, au principe de préservation de l'environnement et de réparation des dommages. Retrait.

M. Jacques Muller.  - Dès lors que certains font de l'alimentation une arme, il est très important que la souveraineté et la sécurité alimentaires figurent dans le texte : la France doit dire ainsi qu'elle ne joue pas sur ce terrain.

L'agriculture a toujours été la base du développement ; ce fut le cas chez nous, cela pourrait l'être dans les pays du sud. Mais là-bas, dans les pays qui souffrent de la faim, ce ne sont plus les campagnes qui nourrissent les villes, ce sont les villes qui nourrissent les campagnes avec des produits importés !

L'amendement n°221 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°746, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

Dans la première phrase du premier alinéa de cet article, supprimer les mots :

, et ce de façon accentuée pour les décennies à venir

M. Jacques Muller.  - Si l'on raisonne quantitativement et non qualitativement, le grand défi auquel notre agriculture est confrontée n'est pas de produire plus, mais de rééquilibrer les productions : nous dépendons du soja importé du Brésil et des États-Unis. Il est là notre problème n°1 ; il ne s'agit pas de produire toujours plus pour inonder de nos produits subventionnés les pays du sud !

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Hier soir, dans la nuit, j'ai regardé à la télévision un reportage sur les exportations massives d'huile de palme en provenance d'Indonésie...

La croissance démographique mondiale va contraindre les agricultures à nourrir un nombre croissant de bouches. Je suis très étonné que vous n'en paraissiez pas conscients. Retrait.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Il ne s'agit vraiment pas de multiplier à l'infini nos exportations ! La population française a augmenté de dix millions en une dizaine d'années. Retrait.

M. Jacques Muller.  - Vous ne répondez pas à ma question. Je sais bien que la population mondiale s'accroît ; ce que je vous dis, c'est que chaque pays doit se nourrir lui-même. La France n'a pas à exporter ses produits partout ; son problème, c'est l'équilibre protéinique.

L'exemple indonésien montre bien ce qu'est une agriculture qui, pour exporter, tourne le dos aux cultures vivrières qui doivent nourrir le pays. Pour son indépendance alimentaire, l'Europe a créé la politique agricole commune de 1962, augmenté ses prix intérieurs et relevé ses barrières douanières. Tant que les pays du sud ne pourront pas le faire, ils ne parviendront pas à se développer.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Je suis sidéré de constater une fois de plus la fragilité de la mémoire humaine. Il y a 50 ans, l'agriculture de l'Europe ne suffisait pas à nourrir ses habitants ! Les gens avaient faim. (M. Jacques Muller l'admet) Il faut savoir que l'agriculture européenne est la moins agressivement exportatrice du monde, au contraire de l'Argentine, de l'Australie, du Brésil. (M. Jacques Muller en est d'accord)

Quand l'Indonésie affame sa population -je pèse mes mots- pour exporter de l'huile de palme, la France n'y est pour rien. L'agriculture française est déjà exemplaire : par rapport aux quantités mondiales, le taux de ses excédents exportés est faible.

M. Jacques Muller.  - Je ne nie rien de tout cela.

L'amendement n°746 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°487, présenté par M. Soulage et les membres du groupe UC.

Compléter le premier alinéa de cet article par une phrase ainsi rédigée :

Pour cela, il est indispensable de préserver les surfaces agricoles, notamment en limitant leur consommation et leur artificialisation. 

M. Daniel Soulage.  - L'agriculture doit faire face à une raréfaction du foncier agricole, avec la perte de 60 000 hectares de terres cultivables chaque année. Ce phénomène s'aggrave chaque jour un peu plus, parce que l'artificialisation est difficilement réversible. Le phénomène est cumulatif et beaucoup d'exploitations agricoles sont rattrapées par l'étalement urbain, le mitage ou la réservation de nouvelles emprises foncières pour des activités non agricoles. L'artificialisation des terres résulte d'abord d'une consommation excessive d'espace agricole. Comment parvenir à un développement durable, assurer l'alimentation humaine, lutter contre le réchauffement climatique, fournir des bioénergies et des biomatériaux et préserver la biodiversité sans un minimum de surfaces agricoles et forestières ? Il est urgent de mener une politique de protection des terres agricoles.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - L'objectif est louable mais le projet de loi comporte déjà des objectifs de préservation des espaces naturels et agricoles. Par exemple, le II de l'article 7 fixe comme objectif au droit de l'urbanisme de « lutter contre la régression des surfaces agricoles et naturelles » et « contre l'étalement urbain ». Sagesse.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Avis favorable. L'artificialisation des sols est un danger tant pour le climat que pour la production agricole.

M. Jacques Muller.  - Tout à fait favorable. En outre, la préservation des terres agricoles permettra aux jeunes de s'installer et aux formes d'agriculture alternatives, en particulier en périphérie des villes, de se développer.

L'amendement n°487 est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°123 rectifié, présenté par MM. César, Bizet, Doublet, Laurent, Cornu, Pointereau, Bailly, Vasselle, Grignon, Lefèvre, B. Fournier et Gilles.

Supprimer le deuxième alinéa de cet article.

M. Rémy Pointereau.  - Cet alinéa, uniquement déclaratif, n'apporte aucune orientation, aucune programmation et donne une image négative de l'agriculture. Compte tenu du coût des intrants, les agriculteurs freinent leur utilisation et tous pratiquent déjà une agriculture raisonnée.

L'amendement identique n°624 n'est pas défendu.

Mme la présidente.  - Amendement n°370, présenté par M. Vasselle.

Dans le deuxième alinéa de cet article, après le mot :

production

insérer les mots :

, auxquels est contrainte la profession agricole pour des raisons économiques,

M. Alain Vasselle.  - Amendement de repli par rapport au précédent qui supprimait ce deuxième alinéa. Il précise pourquoi la profession agricole en est arrivée là. Les agriculteurs ne demandent qu'une chose : retirer un revenu décent de leur activité.

Mme la présidente.  - Sous-amendement n°809 à l'amendement n°370 de M. Vasselle, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

Dans le dernier alinéa de l'amendement n°370, remplacer les mots :

est contrainte

par les mots :

a été poussée

et les mots :

pour des raisons économiques

par les mots :

par la politique agricole

M. Jacques Muller.  - Il est impératif de maintenir ce deuxième alinéa mais il faut souligner la raison historique de ce constat. La politique agricole s'est construite dans un contexte de production déficitaire. Nous avons donc augmenté les prix intérieurs pour augmenter les rendements. Les agriculteurs ont augmenté leur production parce qu'on le leur a demandé.

Mme la présidente.  - Amendement n°470, présenté par M. Guillaume.

Dans le deuxième alinéa de cet article, supprimer les mots :

parfois trop forts

M. Didier Guillaume.  - Il faut éviter tout manichéisme. La France a demandé aux agriculteurs de produire et elle est devenue le grenier de l'Europe. Ce deuxième alinéa doit être maintenu car il constate, il ne met pas en cause les modes de production. Nous proposons seulement d'en enlever un qualificatif qui n'apporte rien.

Mme la présidente.  - Amendement n°489, présenté par M. Soulage et les membres du groupe UC.

Compléter le deuxième alinéa de cet article par une phrase ainsi rédigée :

C'est pourquoi il faut poursuivre le développement de l'agriculture raisonnée et de l'agriculture biologique.

M. Daniel Soulage.  - Depuis plusieurs années déjà, les agriculteurs sont engagés dans des démarches de protection de l'environnement. L'agriculture devient une activité extrêmement technique et le consommateur doit savoir que les agriculteurs n'ont pas vocation ni même intérêt à déverser des quantités considérables de coûteux produits phytosanitaires. Désormais ils sont capables, grâce à des prélèvements réguliers, de connaître avec précision les besoins des plantes, tout au long de leur croissance. L'agriculture raisonnée, reconnue depuis 2002 comme un mode cultural respectueux de l'environnement, n'est même pas mentionnée dans ce projet de loi ! Il faut remédier à cette lacune et sortir de l'opposition caricaturale entre agriculture biologique et agriculture intensive !

Mme la présidente.  - Sous-amendement n°810 à l'amendement n°489 de M. Soulage et les membres du groupe UC, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

Dans le second alinéa de l'amendement n°489, remplacer le mot :

poursuivre

par le mot :

favoriser

et le mot :

raisonnée

par le mot :

intégrée

M. Jacques Muller.  - L'agriculture intégrée, c'est l'agro-écologie, ce n'est pas l'agriculture raisonnée. La seconde utilise la bonne dose d'engrais et de phytosanitaires tandis que la première en utilise le moins possible. Avec l'agriculture raisonnée, on reste dans le schéma classique. Un exemple en Alsace, dans le sud de mon département : on y pratique la monoculture du maïs, plante attaquée par la chrysomèle ; tous les pratiquants de l'agriculture raisonnée ont traité massivement ; de l'autre côté de la frontière...

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Comme Tchernobyl...

M. Jacques Muller.  - ... en Suisse, la chrysomèle est inconnue car on y pratique la rotation des cultures. L'agriculture raisonnée, c'est une invention du syndicalisme agricole et de l'industrie phytosanitaire, laquelle a intérêt à ce qu'on applique la juste dose plutôt que de s'en passer complètement.... Dans le cahier des charges de cette agriculture raisonnée, il y a 50 % de règlementaire et 50 % d'engagement de l'agriculteur ! Comme si on pouvait respecter la moitié du code de la route...

Madame la ministre, votre projet de loi annonce le besoin d'une transformation de l'agriculture. Cela ne signifie pas forcément qu'elle doit devenir biologique mais, au moins qu'elle doit devenir intégrée c'est-à-dire utiliser le moins possible d'intrants.

Allez voir l'Inra ; les experts vous diront qu'elle respecte les éco-systèmes, améliore les paysages et qu'elle est quantifiable.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Je répondrai globalement. M. Muller ne va pas nous donner toute la nuit des leçons d'agronomie, d'économie et d'écologie : il est expert en tout, alors que je ne suis qu'un modeste paysan ! N'ayons pas la mémoire courte : Edgar Pisani a présenté en 1963 à cette tribune sa loi d'orientation de l'agriculture. La France avait faim ou, plutôt, les Français se rappelaient qu'ils avaient eu faim. La PAC n'y est pour rien, qui était encore balbutiante. Il fallait seulement produire pour nourrir les Français puis les Européens, puis l'humanité. Tous les amendements me semblent superflus sauf, peut-être la proposition de M. Soulage, sur laquelle je m'en remettrai à la sagesse. Non, monsieur Vasselle, les agriculteurs n'ont pas été contraints, ils ont fait avec les moyens de l'époque mais cette époque est révolue ; la planète est menacée et nous devons changer notre fusil d'épaule.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Le texte résulte d'un compromis lentement élaboré entre tous les acteurs. Restons-en à l'équilibre de la rédaction initiale. M. Soulage pose des questions intéressantes mais plutôt que d'agriculture intégrée ou durable, plutôt que de certification environnementale, pourquoi ne pas parler d'un « modèle agricole économe en intrants » ?

M. Jean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques.  - Dans ce débat intéressant, certains sont amnésiques. La PAC n'était pas en cause il y a 30 ou 40 ans. Je rends hommage à Jean Monnet qui a souhaité une agriculture européenne intégrée mais je n'oublie pas le rôle de la recherche agricole et des nouveaux matériels : alors que les premiers tracteurs tassaient les sols, ceux d'aujourd'hui permettent de travailler comme des jardiniers. L'augmentation de la production a été obtenue par des intrants, par la recherche et par de meilleurs matériels.

Le texte du Gouvernement est très équilibré. Je suis très sensible à l'agriculture raisonnée qu'évoque M. Soulage. La recherche va d'ailleurs évoluer vers de nouvelles molécules. La rédaction à laquelle aboutira l'amendement de M. Soulage est très bonne alors que j'observe respectueusement que l'on ignore où commencent les intrants et où ils s'arrêtent. Restons-en à la raison et acceptons l'amendement de M. Soulage.

M. Didier Guillaume.  - Ce débat pourrait s'éterniser mais nous débattons du Grenelle de l'environnement et non d'une loi d'orientation pour l'agriculture, même si les deux doivent se conjoindre. Le deuxième alinéa du texte du Gouvernement nous va bien et si la commission et le Gouvernement préfèrent en rester là, nous y sommes disposés. Si on commence à parler des intrants, c'est tout le débat qu'on rouvre. Les agriculteurs ont été amenés à produire pour nourrir la France, puis l'Europe et force est de constater que dans certaines zones, sans intrants, on n'arrive pas à produire. N'opposons pas les uns et les autres et conservons le texte.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Je suis tout à fait de cet avis : restons-en là.

M. Rémy Pointereau.  - Je retire mon amendement, mais il importait de souligner que les agriculteurs ne sont pas fous, qu'ils gèrent avec responsabilité, d'où mon appréciation sur l'amendement de M. Soulage.

L'amendement n°123 rectifié est retiré.

M. Alain Vasselle.  - Je n'arrive pas à me résoudre à m'en tenir à cet alinéa. Il faut expliquer ce qui s'est passé. Or ni le président de la commission, ni le rapporteur, ni la ministre ne l'ont fait. Agriculteur depuis 30 ans, je me rappelle que lorsque je m'opposais à l'emploi de pesticides, le technicien de la Chambre d'agriculture m'expliquait qu'ils étaient indispensables pour assurer le retour sur investissement : pourquoi ne les aurais-je pas utilisés ? Certes, la recherche a permis d'améliorer les rendements, ce qui a déterminé une baisse des cours à laquelle nous n'avons pu faire face que grâce aux aides européennes. Ayons donc le courage de dire ce que nous savons tous afin que les Français qui prendront connaissance du texte en soient informés. Cette disposition n'apporte rien au texte ; le troisième alinéa se suffit à lui-même. Il explique dans quelle direction le Gouvernement souhaite que l'on s'engage.

Il s'agit de tourner le dos à l'agriculture intensive, de favoriser des modes de production plus respectueux de l'environnement et une alimentation saine. Mais il faut aussi permettre aux agriculteurs de vivre de leur travail ! Quel salarié accepterait que l'on diminue son salaire en échange d'une compensation partielle ? C'est ce que l'on veut faire avec les agriculteurs, en refusant de compenser intégralement la baisse des prix agricoles !

J'invite qui le souhaite à venir dans mon exploitation pour y examiner mes comptes : il verra ce qu'il en est. Je ne pense pas que la situation soit tellement différente en Haute-Marne, en Alsace ou en Dordogne. Je sais de quoi je parle !

Le sous-amendement n°809 n'est pas adopté.

L'amendement n°370 n'est pas adopté.

L'amendement n°470 est retiré.

M. Jacques Muller.  - L'amendement n°489 et le sous-amendement n°810 nous placent au coeur du débat. Devons-nous inscrire dans la loi les termes « agriculture raisonnée » ou « agriculture intégrée », ou encore nous en tenir au texte initial ? Mme la ministre proposait de parler d' « agriculture économe en intrants » : cette expression aurait au moins tracé un cap. Mais si M. Soulage maintient son amendement, je maintiens le sous-amendement.

M. Daniel Soulage.  - Je le retire. (M. Bruno Sido, rapporteur, s'en réjouit)

L'amendement n°489 est retiré.

Le sous-amendement n°810 devient sans objet.

M. Alain Vasselle.  - C'est dommage, je l'aurais voté !

M. Paul Raoult.  - L'expression « agriculture raisonnée » est aujourd'hui en vogue dans certains milieux paysans inspirés par la FNSEA. (Protestations à droite) Mais elle n'a pas de sens juridique précis, et si on l'inscrivait dans la loi, il faudrait un décret pour la définir.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - C'est vrai !

M. Charles Revet.  - L'expression « agriculture intégrée » n'est pas mieux définie...

M. Paul Raoult.  - Je connais des agriculteurs qui affichent des panonceaux « agriculture raisonnée » sans faire beaucoup d'efforts pour réduire le volume des intrants !

Mme la présidente.  - Amendement n°222, présenté par Mme Didier et les membres du groupe CRC-SPG.

Dans la première phrase du troisième alinéa de cet article, remplacer les mots :

d'efficacité économique

par les mots :

de rémunération équilibrée des exploitants agricoles en tenant compte des coûts de leurs productions

M. Gérard Le Cam.  - La priorité de l'agriculture est de satisfaire les besoins alimentaires de la population. Elle doit respecter des exigences qualitatives et quantitatives. Mais aucun indicateur ne permet d'assurer que la rémunération des exploitants agricoles est en équilibre avec les coûts de production.

La modernisation des techniques agricoles, les nouvelles normes et les crises répétées ont accru les charges des exploitants. Nombre d'exploitations, dans la plupart des créneaux de production, sont aujourd'hui dans une situation économique précaire : M. Soulage connaît bien le cas de la viticulture. Un nombre croissant d'agriculteurs quittent le métier au bout de quelques années, découragés par les astreintes inhérentes à certaines productions et les revenus rendus aléatoires par l'instabilité des marchés. Il convient d'assurer aux agriculteurs une rémunération sécurisée qui tienne compte des coûts de production, afin qu'ils puissent continuer à produire des aliments variés et de bonne qualité. Il faut également rééquilibrer les relations entre producteurs et distributeurs : selon des chiffres parus dans la presse ces derniers jours, les revenus des premiers n'ont cessé de chuter depuis plusieurs décennies, tandis que les marges des seconds augmentaient.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Revenons au texte : l'article fixe pour l'agriculture des objectifs « de production quantitative et qualitative, de sécurité sanitaire, d'efficacité économique, de robustesse aux changements climatiques et de réalisme économique ». On ne saurait être plus clair ! Il serait dommage d'interrompre ce bel élan en y insérant un long syntagme. Avis défavorable.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Avis défavorable. Notre objectif est de permettre aux agriculteurs de vivre de leur travail. La notion d'efficacité économique ne concerne pas que les exploitations, mais l'ensemble de la filière dont la durabilité est en jeu.

L'amendement n°222 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°751, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

Dans la première phrase du troisième alinéa de cet article, après les mots :

systèmes vivants

insérer les mots :

, en internalisant les impacts et les coûts environnementaux de l'agriculture

M. Jacques Muller.  - On est parvenu lors du Grenelle à la conclusion suivante : il est nécessaire d'internaliser les coûts occasionnés par les dommages à l'environnement provoqués par les activités humaines. On a laissé se développer par le passé une agriculture qui entraîne des coûts très importants pour la collectivité : il a fallu construire et entretenir des stations d'épuration d'eaux polluées par les nitrates ou les pesticides, fermer des captages, etc. L'externalisation des coûts n'encourage pas les pratiques vertueuses.

Il convient donc d'instaurer une fiscalité sur les intrants, différenciée selon la nocivité des produits pour les nappes phréatiques, les sols ou l'air. La diminution du volume des intrants favorise d'ailleurs les économies d'énergie et la réduction des gaz à effet de serre, puisque la fabrication de ces produits consomme beaucoup d'hydrocarbures.

Nous débattons d'une loi cadre et il n'est pas question d'entrer dans le détail des mesures. Mais il convient de tracer les grandes orientations.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Montesquieu a dit : « J'aime les paysans, ils ne sont pas assez savants pour raisonner de travers. » Que M. Vasselle sache qu'il n'est pas le seul agriculteur en activité dans cette assemblée !

Si j'ai bien compris, l'internalisation consiste à faire peser les charges résultant des atteintes à l'environnement sur les agriculteurs qui en sont responsables. Mais cet article a justement pour objet de soutenir les plus vertueux et de décourager ceux qui polluent, par des mesures incitatives ou contraignantes. Il n'est donc pas opportun d'y ajouter la notion d'internalisation des coûts, difficile à définir et dont la traduction réelle serait malaisée et incontrôlable. Retrait, sinon rejet.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - L'ensemble de cet article vise à faire évoluer les modes de production agricole pour les rendre plus respectueux de l'environnement. Cet ajout n'est pas nécessaire. Retrait, sinon rejet.

M. Jacques Muller.  - Je maintiens l'amendement. J'étais naguère professeur dans l'enseignement agricole (exclamations à droite) et j'y utilisais les fascicules publiés par le ministère de l'agriculture sur la durabilité des exploitations. J'ai ici des brochures datées de 2005-2006. (L'orateur brandit ces documents)

Lorsque nous traitions des pratiques agricoles, certains de mes élèves, fils de viticulteurs, se disaient prêts à utiliser des molécules moins dangereuses pour l'environnement. Toutefois, les produits « doux » sont plus chers que les traitements polluants. Les dégâts subis par l'environnement seraient donc gratuits. Il faut, en internalisant les coûts, moins taxer les molécules douces. Si l'on refuse ce principe, on réduit le Grenelle à un bavardage et on ne cherche pas vraiment à en atteindre les objectifs.

L'amendement n°751 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°553, présenté par Mme Blandin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Dans la dernière phrase du troisième alinéa de cet article, après les mots :

équilibre écologique du territoire

insérer les mots :

notamment en orientant les méthodes culturales vers le principe de rotation des cultures

Mme Marie-Christine Blandin.  - Je n'oublie pas que ce texte traite de la protection de l'environnement et de la biodiversité, et non de la programmation agricole, et que nous n'avons pas de leçons à donner aux agriculteurs.

M. Philippe Richert.  - Ça change !

Mme Marie-Christine Blandin.  - Autrefois, ils pratiquaient la rotation des cultures.

M. Charles Revet.  - C'était l'assolement.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Cette méthode permet de limiter l'emploi d'intrants artificiels, notamment parce que les parasites varient selon les plantes cultivées. Elle était déjà pratiquée au Moyen Age sous le nom d'assolement triennal !

Nous souhaitons donner un exemple vertueux car les agriculteurs appliquent la rotation des cultures quand ils le peuvent. En outre, les apiculteurs la réclament.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Enfin, on revient au bon sens ! (Sourires) Tous les agriculteurs connaissent cette façon culturale. Aujourd'hui encore, à l'exception de quelques territoires qui se consacrent à la monoculture du maïs -que François Fortassin nous a fort bien décrits hier-, l'assolement se pratique partout.

Nous ne pouvons inclure dans l'article 28 un précis exhaustif de l'art de cultiver les champs : ce n'est pas l'objet de cette loi d'orientation. En outre, comme Alain Vasselle, je pense que les agriculteurs pourraient donner des leçons à beaucoup d'entre nous. Avis défavorable. (MM. Charles Revet et Alain Vasselle approuvent)

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - Il est question ici de l'internalisation des externalités négatives, principe fondateur de ce texte. D'ailleurs, le dernier projet de loi de finances n'a jamais comporté autant de dispositions de fiscalité environnementale, telle l'augmentation de la TGAP phytosanitaire. Après l'agriculture raisonnée, qui nous a permis de dépasser le stade de l'agriculture productiviste, nous progressons vers une agriculture durable.

M. Alain Vasselle.  - Voilà de bonnes paroles !

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Nous sommes donc favorables au principe de la rotation des cultures, mais il ne s'agit que d'une des techniques possibles. Comme nous ne pouvons les citer toutes, je demande le retrait de l'amendement n°553.

M. Jacques Muller.  - Le principe de l'agriculture raisonnée a induit une prise de conscience de l'ensemble du monde agricole, mais ce n'est pas un concept scientifique, contrairement à l'agriculture intégrée. La méthode des indicateurs de durabilité des exploitations agricoles (Idea) a été validée par le ministère. La rotation des cultures est au coeur des mécanismes d'efficience environnementale de l'agriculture. On n'a pas voulu citer l'agriculture intégrée, mais on pourrait au moins évoquer la rotation des cultures.

L'amendement n°553 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°426, présenté par Mme Herviaux et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Dans la dernière phrase du troisième alinéa de cet article, remplacer les mots :

au maintien de la biodiversité

par les mots :

au maintien et à la restauration de la biodiversité sauvage et domestique

Mme Odette Herviaux.  - Nous proposons de rendre la rédaction de cet article cohérente avec celle de l'article 20 où il est écrit que « maintenir et développer la biodiversité sauvage et domestique exige des mesures de protection, de valorisation, de réparation et de compensation des milieux. »

Cette priorité a été inscrite dans la loi de 2008 relative à la responsabilité environnementale transposant la directive européenne du 21 avril 2004, qui donne un cadre concret à l'application du principe de réparation et de compensation en faveur de la biodiversité.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Cette précision est opportune. Avis favorable.

L'amendement n°426, accepté par le Gouvernement, est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°471, présenté par M. Guillaume et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Dans la première phrase du cinquième alinéa (a) de cet article, supprimer les mots :

ou à des produits saisonniers à faible impact environnemental

M. Didier Guillaume.  - Je souhaite revenir au texte initial du projet de loi : dois-je rectifier mon amendement ?

Dans mon département, la restauration scolaire dans les collèges utilise 20 % de produits biologiques. Nous souhaitons également encourager la consommation de produits saisonniers, mais cela n'est pas toujours possible, pour des raisons de coût notamment. Les mentionner au même titre que les produits biologiques réduit la portée de cet alinéa.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Comme vous, j'estime le texte limpide, c'est pourquoi la commission n'a pas présenté d'amendements sur cet article. Vous pouvez retirer votre amendement.

M. Didier Guillaume.  - Je le maintiens car je souhaite revenir au texte du Gouvernement, avant son examen par l'Assemblée nationale. Nous voulons donner un signal à la restauration en faveur des produits biologiques, mais il est trop tôt pour passer aux produits saisonniers -dont beaucoup sont, par ailleurs, biologiques.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - L'Assemblée nationale a ajouté cette possibilité car les productions de l'agriculture biologique ne peuvent actuellement satisfaire la demande de la restauration ; il est nécessaire d'en importer la moitié. Cet ajout permet d'encourager les approvisionnements locaux, provenant notamment des Associations pour le maintien d'une agriculture paysanne (Amap). L'importation de fruits à contre-saison produit du CO2.

Apprenons à consommer des fruits et des légumes de saison : manger des fraises en hiver n'est pas bon pour la planète ! La formulation retenue à l'Assemblée nationale ne réduit pas l'importance accordée à l'agriculture biologique pour laquelle nous nous fixons, en outre, des objectifs très précis en matière de surface agricole. Il s'agit de donner davantage de liberté aux collectivités pour s'approvisionner localement. Notre intérêt est de développer les circuits courts !

M. Bruno Sido, rapporteur.  - J'ajoute que les députés ne pouvaient rédiger autrement cette idée de bon sens que faire venir des fraises ou des melons biologiques -autrement dit, de l'eau parfumée... (Sourires)- du bout du monde n'est pas bon pour l'environnement. Réapprenons aux Français à manger des pommes en hiver et des melons...

M. Didier Guillaume.  - ... de la Drôme !

M. Bruno Sido, rapporteur.  - ... en été. Si une autre formulation avait été retenue, elle serait tombée sous le coup des réglementations internationales et européennes.

M. Didier Guillaume.  - Nous sommes donc tous d'accord, je n'insiste pas.

L'amendement n°471 est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°657, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

Dans la première phrase du cinquième alinéa (a) de cet article, après les mots :

restauration collective publique

supprimer le mot :

ou

M. Jacques Muller.  - Compte tenu des explications de M. le rapporteur et de Mme le ministre, je m'incline également. Le produit bio n'est pas intéressant en soi. S'il a traversé toute l''Europe, personne n'y gagne.

L'amendement n°657 est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°472 rectifié, présenté par M. Guillaume et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

I. - Dans la deuxième phrase du cinquième alinéa (a) de cet article, après le mot :

favorisera

insérer les mots :

la production et

et remplacer les mots :

et la surface

par les mots :

afin que la surface

II. - En conséquence, dans la même phrase, remplacer les mots :

devrait atteindre

par le mot :

atteigne

M. Didier Guillaume.  - L'objectif d'atteindre 6 % de surface agricole utile en agriculture biologique en 2012 et 20 % en 2020 ne doit pas être énoncé dans le texte au conditionnel, mais de manière ferme.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Avis favorable à cet amendement légitime.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Nous sommes très favorables à la proposition, mais la formulation que vous avez retenue introduit une confusion entre l'objectif de structuration de la filière, dont vous reconnaissez l'importance, et celui d'augmenter les surfaces agricoles consacrées à l'agriculture biologique. Pourriez-vous rectifier votre amendement afin d'éviter cet écueil ?

M. Didier Guillaume.  - Volontiers !

Mme la présidente.  - L'amendement sera donc ainsi rédigé :

I. - Dans la deuxième phrase du cinquième alinéa (a) de cet article, après le mot :

favorisera

insérer les mots :

la production et

et remplacer les mots :

et la surface

par les mots :

pour que la surface

II. - En conséquence, dans la même phrase, remplacer les mots :

devrait atteindre

par le mot :

atteigne

L'amendement n°472 rectifié bis est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°223, présenté par Mme Didier et les membres du groupe CRC-SPG.

Compléter la deuxième phrase du cinquième alinéa (a) de cet article par les mots :

en s'attachant à assurer un maillage dense d'exploitations sur l'ensemble des territoires, notamment en mettant à l'étude les modalités de soutiens spécifiques à l'installation et à la conversion

M. Gérard Le Cam.  - Un mot sur la question du biologique dans la restauration collective que nous connaissons bien en tant qu'élus locaux. Comment inciter les communes à servir ces repas qui coûtent deux fois plus cher que les repas dits ordinaires ? Créer un« Onibio » sur le modèle de l'Onilait pourrait être une solution...

J'en viens à l'amendement. Les objectifs ambitieux fixés dans le texte semblent difficilement réalisables ; ce qui expliquait, au reste, l'emploi du conditionnel... De fait, il faudrait que les commissions départementales d'orientation de l'agriculture accordent des parcelles en cas de cession d'exploitation à l'agriculture biologique. Rien de moins évident quand l'objectif du syndicat agricole majoritaire est d'agrandir les exploitations existantes...

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Quel anti-syndicaliste ! (Sourires à droite)

M. Gérard Le Cam.  - ... et que la conversion à l'agriculture biologique nécessite du temps pour la conversion des terres, la création immédiate de module de formations initiale et continue d'agriculture biologique dans l'enseignement. D'où l'importance de prévoir des aides spécifiques à l'installation et à la conversion, d'organiser des circuits courts et d'assurer à ceux qui se lanceront dans la filière un niveau de vie décent sans quoi l'objectif ambitieux fixé dans la loi sera de pur affichage. A moins qu'il ne s'agisse de considérer comme biologiques des produits cultivés selon des normes moins contraignantes, les fameux « produits à haute valeur environnementale » selon la formulation retenue dans le Grenelle II... (M. Bruno Sido, rapporteur, s'exclame) Soutenons véritablement la filière biologique, moins exigeante en termes de surface et porteuse d'avenir !

M. Bruno Sido, rapporteur.  - De nombreuses aides de soutien à l'agriculture biologique sont déjà prévues pour favoriser le développement agricole des terres les plus fragiles et les plus reculées. Encore que, avec tous les TGV que nous allons construire, il n'y aura plus de terres isolées ! (Rires) L'amendement alourdit le texte sans l'enrichir : retrait, sinon rejet.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Même avis. Qui plus est, le passage à l'agriculture biologique ne peut qu'être volontaire, car la démarche est longue, difficile et nécessite un apprentissage. Nous ne disposons pas d'outils pour imposer l'agriculture biologique à tous les territoires.

M. Gérard Le Cam.  - Je maintiens l'amendement. Madame le ministre, vous venez de reconnaître que vous ne disposez pas des outils nécessaires : comment les jeunes qui veulent s'installer en agriculture biologique trouveront-ils des terres ? Nous n'arriverons à rien de cette manière ! (Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État, le conteste) Rendez-vous dans cinq ans !

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Ce texte reprend scrupuleusement les conclusions du Grenelle de l'environnement, fruit des négociations entre toutes les parties, FNSEA comprise -le président de la Fédération, M. Lemétayer, est d'accord sur le principe du développement de l'agriculture biologique et l'a encore confirmé récemment. Même chose pour les produits à haute valeur environnementale !

M. Paul Raoult.  - Fixer des objectifs ambitieux dans la loi va dans la bonne direction. Toutefois, les agriculteurs de plus de 40 ans, qui font déjà l'effort d'adopter des méthodes culturales moins brutales, ne se convertiront pas instantanément à l'agriculture biologique. L'État devra fournir un effort financier significatif pour que l'on enseigne cette forme d'agriculture. Encore faudra-t-il que l'on trouve suffisamment de personnes capables de s'en charger, ce qui n'est pas certain... Il faut renforcer la formation : on ne s'improvise pas agriculteur biologique !

M. Jacques Muller.  - Je soutiendrai cet amendement, car l'enjeu est le développement d'une agriculture périurbaine biologique. Dans mon village, de plus en plus de jeunes néo-ruraux, qui n'ont donc aucune exploitation agricole à reprendre, veulent se lancer dans l'agriculture biologique parce qu'il y a des débouchés à proximité.

C'est dommage, car cette mesure aurait permis de donner une véritable impulsion : pour démarrer dans l'agriculture, il faut du capital.

L'amendement n°223 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°747, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

Dans la dernière phrase du cinquième alinéa (a) de cet article, après les mots :

l'année 2009

insérer les mots :

et une partie des crédits européens issus du premier pilier de la politique agricole commune sera redéployée

M. Jacques Muller.  - Pour en avoir discuté avec les professionnels concernés, il est très difficile de passer de l'agriculture intégrée à l'agriculture bio. Le zéro intrants implique des risques et des coûts importants. Comme les agriculteurs sont des acteurs économiques, ils sont sensibles aux prix mais aussi aux aides.

Or nous disposons de marges de manoeuvre considérables pour aider ces agriculteurs à réaliser ce saut technologique : 9 milliards sont consacrés au premier pilier de la PAC mais la distribution de ces crédits ne prend pas en compte les objectifs du Grenelle. Depuis 2006, les aides européennes sont en effet distribuées dans notre pays selon le principe des droits à paiement unique calculés en fonction des primes servies entre 2000 et 2003. Les parcelles consacrées aux cultures légumières ou arboricoles ne perçoivent donc aucune aide ; celles qui cultivaient de l'herbe touchent 60 euros, et du maïs 490 euros. Ce dispositif perdurera jusqu'à la prochaine réforme.

Cette répartition ne permet pas de répondre au Grenelle. Si nous utilisions une partie de ce premier pilier pour aider l'agriculture bio, nous pourrions atteindre nos objectifs et nous légitimerions le système actuel.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Je ne participerai pas à l'enlisement du débat. M. Muller n'a pas à nous donner des leçons ! Il se présente tour à tour comme enseignant puis comme agriculteur, mais il y a bien des choses qu'il ne sait pas !

Cet amendement anticipe sur les discussions actuelles sur le bilan de santé de la PAC. En outre, il ne relève pas de ce texte d'orientation. L'important, c'est que les crédits consacrés au bio augmentent, ce qui est le cas grâce à loi de finances et à ce texte.

Je demande donc le retrait de cet amendement.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Je souscris au principe de la mobilisation du premier pilier pour soutenir l'agriculture biologique ; M. Barnier, qui conduit actuellement les négociations, partage ce point de vue. Mais nous sommes en plein débat sur le bilan de santé de la PAC et sur son éventuelle renégociation. Il serait donc prématuré d'inscrire ces objectifs dans ce projet de loi.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Il ne faut pas oublier que les cours se sont effondrés cette année. Cet amendement ne tient aucun compte des revenus des agriculteurs ! Demander un transfert du premier pilier sur le deuxième, c'est se moquer du monde agricole !

M. Jacques Muller.  - J'avais prévu de retirer mon amendement, mais je constate qu'il y a un désaccord manifeste entre M. le rapporteur et Mme la ministre. La question n'est pas de faire basculer tout le premier pilier sur le deuxième mais de mobiliser une partie des crédits pour encourager l'agriculture bio ; il ne s'agit pas de donner des leçons mais de répondre aux attentes de nos concitoyens. La distribution des aides est aujourd'hui linéaire et ce n'est plus acceptable.

M. Charles Revet.  - Si les agriculteurs vous entendaient, ils éclateraient de rire. Ce que vous proposez est de la folie !

M. Jacques Muller.  - Ce qui est certain, c'est que le premier pilier verse les aides sans modulation et sans limite. En clair, s'il y avait une redistribution du premier pilier, les plus, grosses exploitations devraient partager avec les autres... Je maintiens donc mon amendement pour clarifier les choses.

L'amendement n°747 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°473, présenté par M. Guillaume et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

I. - Dans la dernière phrase du cinquième alinéa (a) de cet article, après le mot :

favoriser

insérer les mots :

à la fois

II. - Compléter le même alinéa par les mots :

et le recours à des produits biologiques, ainsi qu'à des produits « à faible impact environnemental », eu égard à leurs conditions de production et de distribution, pour l'approvisionnement en restauration collective

M. Didier Guillaume.  - Je n'ai pas souhaité tout à l'heure évoquer les produits saisonniers à faible impact environnemental en tête de chapitre car ce n'était pas un signe à donner et il est préférable de favoriser l'agriculture biologique. Cet amendement vise à développer la filière. Aujourd'hui, nous ne sommes en effet pas capables d'approvisionner la restauration collective en produits bio. C'est pourquoi il convient d'élargir le crédit d'impôt pour encourager le recours aux produits bio et à faible impact environnemental. Ce serait un signal fort pour toute la filière.

M. Thierry Repentin.  - Excellent !

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Diluer le premier pilier de la PAC dans le deuxième réduirait le revenu des agriculteurs qui est déjà très faible. Mais il faut être agriculteur pour le savoir, monsieur Muller ! Nous devons donc trouver d'autres ressources pour développer l'agriculture biologique.

Cet amendement diluerait le bénéfice du crédit d'impôt bio au profit de productions à faible impact environnemental. Or, celles-ci ne font l'objet d'aucune définition permettant d'en déterminer le périmètre. D'autre part, à enveloppe constante, cela reviendrait à réduire le financement des exploitations bio. La commission souhaite le retrait de cet amendement.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Ce crédit d'impôt, qui est doublé cette année, concerne les exploitations qui se convertissent à l'agriculture biologique. Il n'est pas prévu d'étendre cette mesure pour le recours à des produits biologiques ou à des produits de saison dans la restauration collective. Avis défavorable.

M. Didier Guillaume.  - J'ai un peu de mal à comprendre la logique des explications de M. le rapporteur et de Mme la ministre. Il est difficile d'approvisionner la restauration collective en produits bio car la filière n'est pas assez organisée. Il serait donc intéressant de voter cette mesure incitative. En outre, le crédit d'impôt ne serait pas réduit puisqu'il va doubler cette année. Le but est vraiment de dynamiser cette filière, sinon nous ne parviendrons pas à atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés.

L'amendement n°473 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°225, présenté par Mme Didier et les membres du groupe CRC-SPG.

Compléter le cinquième alinéa (a) de cet article par une phrase ainsi rédigée :

La France s'attache à promouvoir au niveau européen le principe d'une harmonisation des cahiers des charges de l'agriculture biologique, et demande à l'Union européenne de revoir en ce sens le règlement européen (CE) n° 834/2007 du conseil relatif à la production biologique et à l'étiquetage des produits biologiques et ses règlements d'application.

M. Gérard Le Cam.  - Le 2 juillet 2008, le conseil des ministres de l'agriculture de l'Union européenne a adopté un règlement d'application du règlement européen du 28 juin 2007, relatif à la production biologique et à l'étiquetage des produits. Le cahier des charges de l'agriculture biologique européenne est bien peu exigeant et il ouvre la possibilité de nombreuses dérogations.

Il en résultera une concurrence accrue entre producteurs des différents pays, des effets d'aubaine, un moins-disant dans les marchés publics, bref des obstacles au développement de la filière biologique française. On recourra aux importations pour atteindre les objectifs fixés par exemple dans la restauration collective d'État.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Il n'est pas normal que les pays membres n'aient pas tous à respecter les mêmes contraintes. Mais le nouveau règlement européen vise précisément à harmoniser les pratiques et l'étiquetage pour l'ensemble de l'Union européenne. En outre, pour valoriser les produits français qui répondent à un plus haut degré d'exigence, la Fédération nationale des producteurs bio étudie la création d'un identifiant à accoler au logo européen. Retrait ou rejet.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Même avis. Le règlement de 2007 est applicable en janvier 2009 : attendons de voir ce qu'il en est.

M. Gérard Le Cam.  - Le bio français est plus exigeant que le bio européen. Je maintiens mon amendement.

L'amendement n°225 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°421, présenté par Mme Herviaux et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Compléter le cinquième alinéa (a) de cet article par une phrase ainsi rédigée :

L'État soutiendra toutes les initiatives, particulièrement celles des collectivités locales, en matière de restauration collective en leur permettant d'intégrer les productions sous signe « agriculture biologique » comme critères d'attribution des appels d'offre ;

M. Roland Courteau.  - Il est indispensable de structurer la filière de l'agriculture bio. L'offre se développe. L'objectif de 20 % de surface agricole utile cultivée selon les méthodes bio est bienvenu car la France est très en retard par rapport à ses voisins. Le plan « Agriculture biologique : horizon 2012 » est également un bon outil. Il donne la priorité d'accès au Fonds d'intervention stratégique des industries agroalimentaires et renforce l'action de l'Agence bio qui sera dotée en 2009 d'un fonds de structuration des filières de 3 millions d'euros par an jusqu'en 2012.

Mais l'État doit également assumer ses responsabilités pour offrir plus de débouchés à l'agriculture biologique. Malgré quelques timides engagements -le ministère de l'agriculture montrera l'exemple dans sa restauration collective- et les quelques aménagements prévus dans le texte, le compte n'y est pas. Pourtant, 78 % des parents dont les enfants ne mangent pas bio le déplorent. Affichons cette orientation comme une priorité. Les collectivités locales peuvent offrir d'importants débouchés à la filière et ainsi consolider un modèle économique original. Mais si nous soutenons l'agriculture biologique, nous avons aussi le devoir de laisser les collectivités locales se déterminer librement. L'État doit envoyer un message clair aux collectivités.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Les collectivités peuvent déjà inclure le critère de production biologique dans leurs appels d'offres. Et l'alinéa 5 de l'article répond à votre souci. Retrait ou rejet.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Même avis. Une circulaire de mai 2008 vise précisément à soutenir la filière par la demande et à permettre une baisse des prix grâce à un élargissement des marchés.

L'amendement n°421 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°748, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

Rédiger comme suit le sixième alinéa (b) de cet article :

b) De développer une démarche qualitative de notation environnementale des exploitations agricoles fondée sur les indicateurs de développement durable des exploitations agricoles qui servira de support à la répartition des crédits issus du premier pilier de la politique agricole commune. Une incitation pour les jeunes exploitants s'installant en agriculture biologique sera étudiée.

M. Jacques Muller.  - Cette démarche de certification sèmera la confusion chez les consommateurs. Label rouge, label bio, agriculture raisonnée ; et voici une distinction de plus ! Plutôt qu'un label commercial, nous avons besoin d'un outil d'évaluation : et nous le possédons... Toutes les exploitations utilisent les indicateurs de durabilité pour évaluer leurs pratiques, pourquoi les pouvoirs publics ne feraient-ils pas usage de cet outil qu'ils ont forgé ?

Mme la présidente.  - Amendement n°226, présenté par Mme Didier et les membres du groupe CRC-SPG.

Dans la première phrase du sixième alinéa (b) de cet article, après les mots :

certification environnementale des exploitations agricoles

insérer les mots :

, tenant compte des contraintes techniques et financières des petites exploitations afin de ne pas les pénaliser,

M. Gérard Le Cam.  - Tenons compte des difficultés techniques et financières des exploitations les plus modestes. Il y va de l'égalité d'accès à la certification, qui reste coûteuse.

Mme la présidente.  - Amendement n°227, présenté par Mme Didier et les membres du groupe CRC-SPG.

Dans la première phrase du sixième alinéa (b) de cet article, après les mots :

certification environnementale des exploitations agricoles

insérer les mots :

, incluant notamment l'absence d'utilisation d'organismes génétiquement modifiés,

M. Gérard Le Cam.  - Nous n'allons pas refaire le débat sur les OGM. Mais la généralisation des pratiques agricoles durables est une grande avancée, elle garantit les besoins des générations présentes sans compromettre ceux des générations à venir.

Malheureusement la généralisation de ce type d'agriculture n'est pas encore effective. L'agriculture durable n'a pas les mêmes objectifs que l'agriculture classique ou l'agriculture intensive en place aujourd'hui. Sur les OGM, les chercheurs, les politiques, les paysans étaient partagés. Pollutions par pollinisation accidentelle de terres, risques réels ou supposés pour la santé humaine : il faudrait ajouter les impacts négatifs sur la qualité des sols qui auront hébergé des cultures d'OGM. Quelle agriculture voulons-nous pour les générations à venir ? Une agriculture durable, certes, mais surtout une agriculture de qualité, en accord avec son territoire. La priorité est de nourrir la population et en lui certifiant quelle ne risque rien pour sa santé, non de faire des profits à partir de pratiques encore non certifiées tels que la culture OGM. Cet amendement vise à garantir que la future certification environnementale des exploitations exclura tout recours à des OGM.

Mme la présidente.  - Amendement n°422, présenté par Mme Herviaux et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Dans la première phrase du sixième alinéa (b) de cet article, après les mots :

50 % des exploitations agricoles

insérer les mots :

en sus de celles engagées dans la production biologique,

M. Paul Raoult.  - Lors du Grenelle, un compromis a été recherché entre agriculture et environnement. Monsieur le rapporteur, je ne suis pas agriculteur mais je possède quelques connaissances du monde agricole. Seuls les agriculteurs ont-ils ici le droit de s'exprimer ? Je ne sache pas que le ministre de l'agriculture soit un agriculteur. Les ministres qui l'étaient ne furent pas les meilleurs, de même que les enseignants ne font pas les meilleurs ministres de l'enseignement, à droite comme à gauche. (Rires)

Il faut que vous écoutiez la parole des agriculteurs et celle des autres ! Il faut trouver un compromis entre la société et les agriculteurs, dont vous faites partie, c'est un honneur.

Nous sommes à un moment de l'histoire qui a vu l'agriculture faire des progrès fantastiques en 30 ans. Je le vois bien dans ma région d'agriculture intensive : pour la betterave à sucre, les choses ont complètement changé, il y a maintenant des graines monogermes dans une gaine en liège, des semoirs de précision... Tout cela ne change pas le fait que l'agression des sols et des sous-sols est bien réelle ; on arrive donc à un stade où l'on doit se poser la question d'un équilibre entre agriculture et environnement.

Quand, dans mon département, nous avons donné des crédits à l'agriculture biologique, les chambres d'agriculture se sont insurgées, et maintenant elles ont des formateurs à cette agriculture ; aujourd'hui, des responsables de la FNSEA font de l'agriculture bio ! Ce texte en prend acte. Si nous pouvons aider l'agriculture à mieux respecter l'environnement, tout le monde y gagnera.

Le problème est de savoir comment faire évoluer les agriculteurs qui ne sont pas bio. Cela a fait l'objet d'un très long débat au Grenelle. S'est dégagé un concept intéressant, celui de certification environnementale. L'immense majorité des agriculteurs est prête à entrer dans une logique de défense de l'environnement, le tout est de la labelliser, pour tous ceux qui ne font pas du bio et qu'on ne doit pas oublier.

Le texte proposé est en retrait du Grenelle, qui avait fixé un objectif de 50 % hors bio pour l'entrée dans un processus de certification environnementale.

Mme la présidente.  - Amendement n°656, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

Après la première phase du sixième alinéa (b) de cet article, insérer une phrase ainsi rédigée :

A cet effet, les procédures de certifications seront spécifiquement adaptées aux contraintes techniques et financières des petites exploitations afin de ne pas les pénaliser et permettront la participation des collectivités territoriales et de la société civile locale à la définition de leurs objectifs et à leurs processus de décision.

M. Jacques Muller.  - Il faut tenir compte des contraintes techniques et financières des petites exploitations. La certification est une charge fixe portant sur des productions plus faibles.

Il faut que cela se fasse avec la participation des collectivités territoriales : celles-ci doivent pouvoir entrer dans une démarche de qualité sans avoir à en référer à Paris.

Mme la présidente.  - Amendement n°420, présenté par Mme Herviaux et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Dans la deuxième phrase du sixième alinéa (b) de cet article, remplacer le mot :

pourraient

par le mot :

pourront

M. Paul Raoult.  - C'est dans le même esprit.

Bien sûr il vaut mieux manger des fraises à la saison que d'en importer par avion au mois de janvier, encore que les fruits de saison puissent être pleins de pesticides.

La restauration collective devrait être incitée à cette démarche de qualité. Dans mon parc régional, nous avons beaucoup de mal à faire passer cette idée; j'espère que nous pourrons passer des appels d'offres limités aux produits biologiques ! J'ai vu aussi des producteurs de lait bio se remettre à une marchandisation classique parce qu'ils ne parvenaient pas à bien vendre le bio. Les producteurs bio ont besoin de l'aide de l'État pour développer la filière et parvenir à des prix acceptables pour tous.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - La répartition des crédits PAC se fait en fonction du principe de conditionnalité, et non en fonction du principe du « plus offrant » d'un point de vue environnemental. Le principe de conditionnalité permet déjà de prendre en compte les enjeux environnementaux et s'applique de façon égalitaire ; il n'y a pas lieu de l'abandonner au profit d'un nouveau principe long et compliqué à mettre en oeuvre. Retrait, sinon rejet, de l'amendement n°748.

L'amendent n°226 vise à prendre en compte l'accès à la certification environnementale des petites exploitations, pour lesquelles cela représente des coûts et des complications proportionnellement plus importants. Cependant, l'élaboration des critères de certification, actuellement en cours, tient compte de ces paramètres et veille à ce que les petites exploitations ne soient pas exclues du dispositif. De plus, il importe, pour conserver au dispositif sa lisibilité et son homogénéité, qu'il ne fasse pas l'objet de multiples dérogations. Retrait, sinon rejet.

L'amendement n°227 exclut de la certification environnementale toute entreprise utilisant des OGM, au prétexte que ces organismes auraient des conséquences sanitaires ou environnementales néfastes. Or de telles conséquences ne sont pour l'instant pas prouvées et l'utilisation des OGM, dans certaines conditions, est aujourd'hui autorisée. Sachant enfin que le recours à certains OGM doit permettre de réduire le recours à des traitements phytosanitaires, il semble prématuré d'exclure de façon a priori et systématique les exploitations recourant, dans des conditions légales, aux OGM. Retrait, sinon rejet.

L'objectif de 50 % de certification environnementale doit concerner l'ensemble des exploitations, y compris biologiques : il n'est pas acquis que ces dernières n'aient aucun impact négatif sur l'environnement. De plus, les exploitations bio ne sont que 15 000 sur 600 000 ; leur prise en compte ne change donc rien au dispositif. Retrait, sinon rejet, de l'amendement n°422. Même avis pour le n°656, qui va dans le même sens que le n°226. En revanche, l'amendement n°420 va tout à fait dans le sens du Grenelle : avis favorable.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - La certification environnementale est en cours d'élaboration, sachant qu'il s'agit bien des exploitations et pas des produits : retrait, sinon rejet, de l'amendement n°748.

Même avis pour le n°226 : une démarche de certification environnementale est testée dans une centaine d'exploitations ; il est prévu d'avoir des indicateurs accessibles à toutes les exploitations. Retrait, d'autant que l'amendement est pris en compte dans la définition actuelle du référentiel.

Même avis que la commission pour l'amendement n°227, ainsi qu'au n°422 : le critère de haute valeur environnementale intégrera aussi des objectifs de performance énergétique. D'ailleurs, M. Barnier a signé hier l'engagement de performance énergétique défini avec l'Ademe. Nostalgie, nostalgie... (Sourires)

Sur l'amendement n°656 : nous intégrons bien ce critère de taille dans la définition de la haute valeur environnementale. Avis favorable au n°420.

M. Jacques Muller.  - Je retire le n°748 à condition que la certification environnementale ne puisse pas être utilisée à des fins commerciales. Il me faudrait un engagement sur ce point.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Sur le produit, je peux m'engager : la haute valeur environnementale ne touchera pas le produit. On est là dans une autre démarche, celle du « prix écologique ».

M. Jacques Muller.  - Parfois, l'agriculture raisonnée a été utilisée à des fins commerciales. Mais votre réponse est claire. Je retire l'amendement.

L'amendement n°748 est retiré.

L'amendement n°226 n'est pas adopté.

L'amendement n°227 est retiré.

M. Paul Raoult.  - Je retire le n°422. Il est vrai que le nombre des exploitations biologiques n'est pour le moment pas important. Et le critère de la qualification environnementale est plus large que celui de l'agriculture biologique.

L'amendement n°422 est retiré.

M. Jacques Muller.  - Compte tenu des explications de la ministre, je retire le n°656.

L'amendement n°656 est retiré.

L'amendement n°420 est adopté.

Prochaine séance, aujourd'hui, jeudi 5 février 2009, à 9 h 45.

La séance est levée à minuit trente-cinq.

Le Directeur du service du compte rendu analytique :

René-André Fabre

ORDRE DU JOUR

du jeudi 5 février 2009

Séance publique

A 9 HEURES 45

- 1. Suite du projet de loi (n°42, 2008-2009), adopté par l'Assemblée nationale, de programme relatif à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement.

Rapport (n°165, 2008-2009) de M. Bruno Sido, fait au nom de la commission des affaires économiques.

A 15 HEURES ET LE SOIR

2. Questions d'actualité au Gouvernement.

3. Suite de l'ordre du jour du matin.

_____________________________

DÉPÔTS

La Présidence a reçu de :

- M. le Premier ministre un projet de loi de développement et de modernisation des services touristiques.

- M. Jean-Jacques Hyest un rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur le projet de loi organique, adopté par l'Assemblée nationale, relatif à l'application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution (n° 183, 2008-2009).

- M. Jean-Claude Etienne un rapport fait au nom de la commission des affaires culturelles sur :

. la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, portant création d'une première année commune aux études de santé et facilitant la réorientation des étudiants (n° 146, 2008-2009),

. et la proposition de loi de M. Jean-Claude Etienne, relative à la création d'une première année commune aux études de santé et facilitant la réorientation des étudiants (n° 64, 2008-2009).

- M. Charles Gautier un rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur la proposition de loi de Mme Bariza Khiari, MM. Jean-Pierre Bel, Roger Madec, François Patriat, Yves Daudigny, Jean-Marc Todeschini et Yannick Bodin, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Roland Courteau et René Teulade, Mmes Nicole Bricq et Catherine Tasca, MM. Richard Yung, Jacky Le Menn, Didier Guillaume, Serge Larcher, Claude Domeizel et David Assouline, Mmes Christiane Demontès, Michèle André et Claire-Lise Campion, M. Daniel Reiner, Mme Françoise Cartron, MM. Jean-Pierre Sueur, Bernard Piras, Jean-Pierre Michel et Claude Jeannerot, Mme Marie-Christine Blandin, MM. André Vantomme, Charles Gautier et Jean-Pierre Godefroy, Mme Josette Durrieu, MM. Yves Krattinger, Daniel Raoul et Robert Badinter, Mmes Annie Jarraud-Vergnolle, Alima Boumediene-Thiery et Raymonde Le Texier et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, visant à supprimer les conditions de nationalité qui restreignent l'accès des travailleurs étrangers à l'exercice de certaines professions libérales ou privées (n° 176, 2008-2009).

- de M. Jean-René Lecerf, rapporteur du projet de loi pénitentiaire (n° 495, 2007-2008), le texte de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, ainsi qu'un rapport supplémentaire fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur ce même projet de loi.