Débat sur la politique de l'État en matière de gestion des ressources halieutiques et des pêches

M. Jean-Claude Etienne, premier vice-président de l'office d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.  - Notre office est une structure originale, qui fait désormais école au niveau de plusieurs parlements, notamment en Europe. On y évalue et contrôle les politiques gouvernementales pour s'assurer de la prise en compte du progrès scientifique dans l'instruction des décisions politiques. Dans le cadre des nouvelles procédures nées de la révision constitutionnelle de juillet 2008, l'Office peut désormais, à la suite d'un rapport qui lui aura été présenté, solliciter de la Conférence des Présidents d'une assemblée l'organisation d'un débat sur le thème ayant fait l'objet du rapport. Le débat d'aujourd'hui est à cet égard une première. J'en remercie le président Larcher et la Conférence des Présidents au nom des parlementaires membres de l'Office -dont dix-huit sénateurs.

Si l'on s'en tient à l'étymologie, les mots « halieutique » et « pêche » peuvent sembler redondants ; mais c'est la notion de ressources qui donne toute sa signification au rapport de M. Cléach. Nous parlons ici d'un écosystème planétaire de la plus haute importance, prometteur en termes de développement durable. L'ampleur et la vulnérabilité du gisement marin appellent de la part des décideurs politiques la vigilance la plus sophistiquée. Nous avons besoin de données scientifiques rigoureuses et, pour les obtenir, des moyens d'investigation appropriés. Le rapporteur, M. Cléach, appuyé par un comité d'experts de renommée internationale, a procédé avec la rigueur qui est la marque de nos travaux.

Nous savons tous que la connaissance scientifique est nécessaire à l'instruction des décisions politiques, mais nous savons aussi que cette connaissance est toujours insuffisante et souvent incomplète. Plus le champ est vaste, plus s'étend l'immensité de l'inconnu. Méfions-nous de ceux qui croient savoir ! L'opinion publique de nos sociétés se forge souvent à partir de sentiments, eux-mêmes nourris d'une perception incertaine de la réalité. Nous en avons eu encore l'illustration récemment avec l'affaire des antennes de téléphonie. Les signes fonctionnels observés chez les populations qui vivent à proximité de ces antennes sont d'une extrême variabilité ; et lorsqu'on arrête le fonctionnement des antennes, certains continuent à les ressentir tandis que d'autres les voient régresser. La rigueur scientifique impose de s'attacher d'abord aux seconds.

L'Office est sans cesse confronté à des problématiques de cet ordre, exprimées le plus souvent en termes très généraux, qu'il s'agisse des pesticides qui provoqueraient des cancers, des OGM responsables de tous les maux de la terre, des pandémies menaçantes ou des sources d'énergie. Pour faire la part de la réalité objective et de l'interprétation humaine, il faut de la méthode et de la rigueur ; l'opinion se forme malheureusement souvent à partir de déterminants subjectifs.

Au nom de l'Office, je remercie et félicite M. Cléach qui a su emprunter les chemins de la méthode « maison » ; son rapport, appuyé sur les avis les plus pointus, permet de dégager, au-delà d'un titre un peu pessimiste, des lignes de force prometteuses. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Marcel-Pierre Cléach, auteur du rapport de l'Office sur la gestion durable de la pêche.  - Le sujet est grave, comme en témoigne l'actualité récente. Depuis la publication de mon rapport, il y a six mois, de nombreux travaux sont venus confirmer le diagnostic. En mars, le rapport biannuel de la FAO a rappelé que les prises mondiales avaient atteint leur plafond et que la plupart des stocks halieutiques étaient exploités à la limite ou au-delà de la limite de rupture ; elle a aussi démontré que sans la partie aval de la filière, l'activité de pêche serait économiquement déficitaire. Nous avons appris aussi, fin mars, que la France allait être placée sur la liste noire du Congrès américain pour sa gestion de la pêche au thon rouge de Méditerranée -aux côtés de la Libye, de la Tunisie, de la Chine, de Panama et de l'Italie. Plus récemment encore, dans le Livre vert préparant la réforme de la politique commune de la pêche, la Commission européenne a reconnu sa responsabilité et celle des États membres dans l'échec de la gestion des pêcheries communautaires, pointant du doigt une surpêche paradoxalement toujours plus subventionnée. Selon le mot du commissaire Borg, chaque Européen paierait deux fois son poisson, une fois chez le poissonnier et une autre chez le percepteur...

La crise de la pêche est profonde en France, en Europe, dans le monde. L'enjeu est rien moins que l'alimentation de la population mondiale. La pêche en mer fournit 20 % des protéines animales et en est la source majoritaire pour un milliard d'hommes. Contrairement à ce qui est souvent avancé, l'aquaculture ne peut résoudre le problème : on ne passera pas de la pêche à l'aquaculture comme on est passé de la chasse à l'élevage ou de la cueillette à la culture. L'aquaculture dépend en effet des ressources sauvages : les poissons d'élevage mangent des poissons sauvages, très majoritairement des anchois pêchés dans une seule région du monde, le Pérou. Heureusement, cette ressource est aujourd'hui très bien gérée avec l'aide trop méconnue d'halieutes français de l'Institut de recherche pour le développement.

Ensuite, l'aquaculture, majoritairement d'eau douce et asiatique, ne pourra remplacer les pêches sauvages d'ici 2030 puisqu'il faut 5 kg de poisson sauvage pour produire 1 kg de poisson d'élevage.

Renonçons à l'idée qu'il est possible de toujours pêcher plus. Les mers connaissent aujourd'hui, comme les lacs de taille plus modeste, un changement de régime irréversible avec la disparition définitive d'espèces en raison de leur surpêche. En mer, la prédation est fonction de la taille, et non de l'espèce. Conséquence, les espèces ne se maintiennent en haut de l'écosystème qu'en régulant leurs prédateurs, ce qu'elles ne peuvent plus faire si leur population diminue. Ce phénomène observé au Canada sur le cabillaud, ou encore au large de la Namibie, du Maroc ou en mer Noire, touche, dans une moindre mesure, l'anchois de notre Golfe de Gascogne et le thon en Méditerranée menacé par la prolifération de ses proies que sont les méduses et les petits pélagiques. Si rien ne change, l'extinction de la pêche est donc possible.

N'imputons pas ces déficiences de gestion aux pêcheurs -cela serait inexact et contreproductif !- quand, d'après les travaux scientifiques les plus récents, le milieu marin, pollué par des substances chimiques et autres déchets d'origine terrestre, est mité par les multiples activités humaines qui, quand elles ne polluent pas, gênent le développement de la faune, sans parler des conséquences du réchauffement climatique sur le cycle de la reproduction et des migrations des poissons. Premières victimes de cette situation, les pêcheurs sont souvent peu écoutés tant sont importants les intérêts à terre.

Cette crise, dont l'origine se trouve donc dans une surpêche structurelle et ancienne et l'affaiblissement du milieu marin, doit être l'occasion, comme l'ont montré les exemples américain, canadien, péruvien et norvégien, de promouvoir de bonnes pratiques de gestion des ressources halieutiques. Les décideurs politiques doivent s'employer à réconcilier pêcheurs et chercheurs par des opérations conjointes, tels les contrats bleus, ou par la modification des objectifs de l'Ifremer et de l'IRD. La mise en oeuvre des aires marines protégées donne l'occasion de réunir autour de la table pêcheurs, chercheurs, responsables politiques nationaux et locaux ainsi que les usagers. De nombreux professionnels sont volontaires pour cette expérience qui a donné des résultats encourageants à l'étranger.

Développons la science halieutique qui, durant longtemps, n'a pas été prioritaire dans notre pays. La gestion écosystémique, légitimement promue aujourd'hui par nos scientifiques en opposition à l'approche mono-spécifique, est complexe tant la biodiversité marine reste méconnue. Appuyons donc les scientifiques pour que cette avancée ne soit pas un leurre.

Modifions la relation entre l'État et les pêcheurs. Trop souvent, nous avons fermé les yeux sur la violation des règles relatives aux tailles minimales de capture ou aux quotas internationaux... En poussant les pêcheurs au suréquipement, au surinvestissement et à la surpêche, les pouvoirs publics français et européens les ont placés dans une situation d'autant plus fragile que les quotas baissaient. A la stratégie de court terme de défense des pêcheurs, l'État doit maintenant préférer une politique de pêche durable qui profite aux pêcheurs et préserve la ressource. Il doit également sanctionner, comme les pêcheurs le lui demandent, les fraudeurs, tout en accordant aux pêcheurs davantage de responsabilités. J'en reviens à la question centrale des quotas. Je me réjouis de la fermeté dont Michel Barnier a fait récemment preuve. L'expérimentation de quotas individuels transférables, dont certains font un épouvantail de la financiarisation de la pêche et les autres la recette miracle pour préserver les ressources, permettrait surtout de modifier les mentalités car, au lieu de pêcher le plus possible le premier, il faudrait optimiser la part réservée de pêche. Lier ainsi détention de quotas et action de pêche contribuerait à la préservation de la ressource et à la protection de la pêche artisanale et côtière.

Pour sortir de cette crise grave, profonde et complexe que traverse la pêche que l'on ne peut imputer à un unique acteur -rien ne sert donc de désigner un bouc émissaire-, faisons évoluer les pratiques. Madame la ministre, puissiez-vous défendre avec M. Borloo une pêche durable, fondée sur la diminution des rejets, l'amélioration des engins de pêche, le développement d'un écolabel et l'information des consommateurs. Vos efforts ne seront pas de trop pour obtenir des avancées lors des prochaines négociations sur la nouvelle politique européenne des pêches, les accords entre l'Union européenne et la Norvège et la définition d'une politique commune responsable en Méditerranée dans le cadre de l'Union pour la Méditerranée. Quels sont les projets du Gouvernement pour la pêche ? Cette activité que l'homme pratique depuis les origines et qui continue de le nourrir mérite un avenir ! (Applaudissements)

M. Robert Tropeano.  - Ce débat a lieu alors que nous sommes pris dans un tourbillon de « Grenelle ». La multiplication des mesures gouvernementales vide de leur sens les résultats du Grenelle de l'environnement et les dispositions de l'article 30 du « Grenelle I ». Compte tenu des difficultés de la filière, il est naturel que le Gouvernement cherche à apaiser en proposant à 200 écologistes, syndicalistes, experts de se réunir durant deux mois pour proposer une nouvelle politique de la mer. La France, grâce à ses territoires d'outre-mer, possède le deuxième territoire maritime au monde. Outre la dégradation des écosystèmes marins, nous devons relever un double défi : économique, car le secteur représente 190 000 pêcheurs en Europe et 3 à 5 % du PIB, et vital car 30 % des espèces sont menacées de disparition. Quand la surpêche menace la filière, il est plus que jamais urgent de mettre un terme à cette « guerre aux poissons » où le premier pêcheur à capturer est le mieux rémunéré.

La politique de la pêche, élaborée au niveau européen dont les deux principaux outils sont les totaux admissibles de capture et les quotas, a entraîné une réduction de notre flotte nationale de 21 % en dix ans tandis que la demande ne cessait de croître si bien que la France importe près de 85 % de sa consommation.

Vous souhaitez réduire les quotas. Soyons raisonnables ! Ils étouffent déjà nos pêcheurs. Seule une politique sérieuse de contrôle et d'individualisation des quotas réduira les effets de la piraterie et incitera les pêcheurs à jouer le jeu de la réglementation européenne, en les encourageant à être plus responsables.

Notre rôle de parlementaires est de protéger notre patrimoine marin. Or, 75 % de la biomasse pêchable est concentrée dans 5 % de l'espace marin, le plus souvent côtier et très exposé. L'objectif à court terme est de protéger 10 % des aires maritimes protégées d'ici à 2012, quand on n'en est aujourd'hui qu'à moins de 0,1 %.

Quels remèdes aux captures ? L'aquaculture, si elle n'est pas la solution miracle, peut constituer un palliatif à court terme et pourvoir aux besoins alimentaires. L'aquaculture est avant tout une culture d'eau douce : elle ne remplacera jamais la pêche maritime. Elle soulève de surcroît le problème de l'alimentation des espèces, ce qui conduira en tout état de cause à l'épuisement des stocks.

La France est forte d'une flotte de 5 232 navires, 63 ports de pêche, de nombreuses organisations de producteurs et plus de 350 entreprises de mareyage et de transformation des produits de la mer. Le secteur de la pêche compte non seulement au plan économique, mais dans l'aménagement du territoire. Assurer la durabilité des ressources marines et des entreprises qui les exploitent dans un contexte de demande croissante en produits de la mer, sur un marché évalué à 5 milliards d'euros en 2005 : telle est la gageure.

Or, le secteur n'est plus rentable. Une politique de labellisation ou encore d'incitation aux modes coopératifs permettrait d'encourager un commerce diversifié et d'accroître la professionnalisation du secteur par une meilleure reconnaissance de ses acteurs. La valorisation des métiers de la mer passe en effet par la création de l'éco-labellisation prévue à l'article 30 du projet de loi de mise en oeuvre du Grenelle. Il serait également opportun de diminuer les aides à la modernisation des navires, afin de réduire la surcapacité des techniques de pêche tout en préservant la pêche artisanale. Sans oublier, à l'autre bout de la chaîne, de sensibiliser le consommateur, pour une consommation responsable et éco-citoyenne. Enfin, la situation des stocks fait l'objet de nombreux débats entre professionnels et scientifiques. La coopération entre ces acteurs est aussi un enjeu majeur des années à venir.

Les solutions existent et sont multiples. D'autres approches sont expérimentées localement. Mon département, l'Hérault, vient de s'engager dans un partenariat de recherche et développement pour une nouvelle génération d'habitats artificiels propre à développer les ressources halieutiques. D'autres pistes sont également à l'étude, notamment la collecte de larves en milieu naturel pour le repeuplement de la bande côtière.

II faut aujourd'hui multiplier les approches pour assurer la pérennité de la filière pêche et garantir l'avenir de nos pêcheurs.

Mme Odette Herviaux.  - Après le débat sur la PAC, nous abordons aujourd'hui la deuxième grande politique communautaire, dédiée à la pêche, dans un contexte de crise économique faisant suite à une année 2008 marquée par une forte augmentation des produits pétroliers.

Cette situation difficile, encore exacerbée par la gestion difficile des quotas -dont témoignent les problèmes récents de Boulogne-, est d'autant plus grave que l'examen des dossiers pour le Fonds européen pour la pêche, qui aurait dû être engagé dès janvier 2007, n'a eu lieu qu'en juin 2008

La crise économique ne fait qu'aggraver une situation qui n'a que trop duré sans rencontrer de véritables solutions pérennes : fin des contrats bleus en 2009 et destruction d'activités. Dans une région vouée à la mer, on ne peut que déplorer de voir 46 navires bretons sortis de pêche en 2008, tandis que 50 autres sont condamnés en 2009.

Dans ce contexte tendu, le Gouvernement a décidé de mettre en oeuvre une réforme des structures professionnelles d'ici à 2011. Chacune des crises de ces dernières années a rendu palpable le manque de visibilité dont souffrent ces structures, peu ou mal organisées et qui, sans véritable perspective, sont conduites à faire des choix qui risquent à terme d'être contraires à l'intérêt de la profession.

Le rapport de l'Office parlementaire a bien posé le problème structurel que traverse le monde de la pêche : captures stagnantes ou déclinantes, effort de pêche croissant.

La France, avec une production annuelle d'environ 600 000 tonnes, pour un chiffre d'affaires d'1 milliard, occupe la troisième place en Europe, derrière le Danemark et l'Espagne. Le secteur regroupe environ 16 000 emplois à taux plein et concernerait 24 000 personnes embarquées. Mais en vingt ans, le nombre des navires a chuté de moitié, passant de près de 12 000 à 5 000, tandis que leur taille moyenne croissait de 6 % et leur puissance moyenne de 19 %.

Les Français consomment de plus en plus de poisson, 35 kg par habitant et par an. On pourrait s'en réjouir, mais la production nationale est loin de satisfaire la demande.

Comment mettre en adéquation la demande et la ressource ?

En 2008, le Conseil international pour l'exploration de la mer annonçait que sur les 53 stocks communautaires de la façade ouest, 10 peuvent être estimés en bon état, 33 à risque et 10 en état critique.

A l'heure du Grenelle de la mer, il est bon de rappeler les objectifs fixés lors du sommet mondial sur le développement durable de 2002, dont celui de ramener l'exploitation des stocks halieutiques à un niveau compatible avec leur production maximale d'équilibre d'ici à 2015.

La responsabilité des États, qui contrôlent, grâce aux zones économiques exclusives, 90 % du potentiel halieutique, et de la France en particulier, dont l'espace maritime le deuxième du monde, est donc majeure.

La politique commune de la pêche devrait constituer un formidable levier de régulation, d'organisation et d'action.

Depuis la réforme de 2002, l'objectif de la politique commune de la pêche est de garantir l'exploitation durable des ressources halieutiques et de prévenir une pression excessive sur les stocks.

Vouloir abandonner des quotas et des outils communautaires de gestion, comme l'a suggéré un temps le Président de la République, reviendrait à programmer la mort de la pêche.

Si c'est la Commission européenne qui soumet des propositions au conseil, ce sont bien les ministres des Vingt-sept qui décident en dernier ressort de la répartition par État des quotas de pêche par espèce et par zone maritime. Le Livre vert de la Commission déplore à juste titre les pressions politiques exercées en faveur d'un nombre incalculable de dérogations, d'exceptions et de mesures spécifiques pour augmenter les possibilités de pêche à court terme, aux dépens de la viabilité future du secteur.

Plus qu'ailleurs il est vital de maintenir l'équilibre entre l'économie, le social et l'écologie et ce n'est pas la marchandisation des quotas qui permettra le développement durable de la pêche.

Si les règlements communautaires déterminent les objectifs stratégiques de la politique commune de la pêche -répartition des fonds entre États membres, règles de cofinancement-, ce sont bien les États membres qui mettent en place des programmes opérationnels et répartissent les fonds au niveau national,

Leur responsabilité est donc essentielle. Si le Fonds européen pour la pêche, instrument financier et structurel de la politique commune, n'est doté que de 3,8 milliards d'euros, soit une diminution de 33 % par rapport au budget de son prédécesseur, l'Ifop (Instrument financier pour l'orientation de la pêche), c'est bien en vertu d'une décision du conseil des ministres de l'Union.

Sur le plan national, à l'occasion de la discussion des projets de loi de finances pour 2008 et 2009, j'avais souligné l'insuffisance et l'inadéquation des moyens. Et il faudra s'attendre, au-delà des plans conjoncturels, à une baisse drastique, dans les deux prochains budgets, des autorisations d'engagement, à hauteur de près de 20 %.

Parmi les principales modifications apportées à la politique commune en 2002 figurait l'abandon des objectifs obligatoires de réduction de la capacité au profit de plafonds nationaux dans la limite desquels les États membres sont libres de décider de la manière dont ils mènent leur politique. Le Livre vert de la Commission d'avril dernier va dans le même sens, précisant bien que l'effort doit porter sur la capacité, pas nécessairement sur le nombre de bateaux.

Le plan de casse engagé par le Gouvernement, via notamment le « plan pour une pêche durable et responsable » lancé au début de l'année 2008 et doté de 310 millions sur deux ans, a révélé un profond malaise, les demandes de destruction et de retrait ayant été deux fois plus importantes que prévu. Avec les effets pervers que cela comporte sur le renchérissement des bateaux, et partant sur l'installation.

Il serait plus pertinent de favoriser la sortie de vieux navires, peu économes en énergie et peu sûrs, en accordant une prime, sous réserve d'un engagement du patron à pratiquer une pêche responsable, pour la construction de navires neufs, plus économes en énergie.

A chaque conflit, le Gouvernement a tenté d'acheter la paix sociale au prix de mesure illégales au regard de la réglementation communautaire relative aux aides d'État. Ainsi des aides versées entre 2004 et 2006 par le Fonds de prévention des aléas de la pêche. Et même si le ministre nous a dit qu'il n'était pas envisageable que la restitution de ces fonds mette en péril la pérennité des entreprises, il faudra bien payer, au moment même où certaines clauses des contrats bleus apparaissent n'être pas non plus euro-compatibles. Enfin, le rapport de l'Office parlementaire lui-même souligne que ce plan reste un ajustement conjoncturel qui ne traite pas les questions fondamentales.

Tous les clignotants, madame la ministre, sont au rouge et, si j'en crois ce que vit ma région, je puis vous dire que la situation ne fait que s'aggraver depuis le début de l'année -mévente, effondrement des cours en criée, retraits en quantité importante-, fragilisant un secteur déjà durement touché.

II est donc grand temps d'envisager la réforme de la politique commune et de notre politique nationale, non pas par petites touches mais comme une véritable mutation.

II s'agit de promouvoir une activité économiquement rentable, socialement protectrice et écologiquement durable. Il faut, pour cela, aider au renouvellement de la flottille, à la transmission des entreprises, adapter le secteur aux mutations économiques et énergétiques, favoriser la recherche sur des outils de pêche mieux adaptés à la sélection des espèces. Tout cela vaut mieux que la poursuite des sorties de flotte.

Pour repenser la politique de pêche commune, il faut que nous portions un regard neuf sur la situation maritime globale et acceptions d'y mettre les moyens financiers et humains en sortant de la logique de rationnement nationalisé dans laquelle est enfermé le budget européen. Je forme donc le voeu que nos futurs parlementaires européens, qui disposeront à terme des pouvoirs de la nouvelle procédure de codécision, décident d'une politique commune qui préserve les ressources, réponde aux besoins des consommateurs et offre une activité solide et pérenne à nos pêcheurs. (Applaudissements à gauche)

M. Jean-Claude Merceron.  - La semaine dernière, la Commission européenne a engagé, avec beaucoup d'avance sur le calendrier prévu, les premières réflexions sur la réforme de la politique commune de la pêche, qui doit aboutir en 2012. Le Livre vert qu'elle a adopté s'ouvre sur une page qu'il faut malheureusement qualifier de politique-fiction pour l'horizon 2020 : « Presque tous les stocks halieutiques européens ont été reconstitués au niveau de leur production maximale équilibrée, ce qui signifie, pour nombre d'entre eux, un accroissement considérable des effectifs par rapport à ceux de 2010. Les pêcheurs tirent un meilleur revenu de ces populations de poissons plus nombreuses, composées d'individus matures et de plus grande taille. Dans les communautés côtières, les jeunes voient de nouveau la pêche comme un moyen stable et attrayant de gagner leur vie. »

A l'heure actuelle, la réalité est tout autre... En Vendée, les marins pêcheurs sont confrontés pour la quatrième année consécutive à la fermeture de la pêche à l'anchois. C'est l'avenir même de la pêche qui est en jeu, notamment dans le port de Saint-Gilles-Croix-de-Vie. Pour les jeunes, s'installer aujourd'hui et espérer vivre du produit de leur pêche est pure gageure... La pêche représente encore 16 000 emplois à temps plein, mais pour combien de temps ? D'importants efforts ont déjà été consentis par la profession, puisqu'en vingt-cinq ans, le nombre des navires a chuté de 54 %, mais globalement la situation reste toujours aussi difficile, comme en attestent les blocages de ports de ces dernières semaines. Les quotas qui, chaque fin d'année, font l'objet d'âpres discussions entre les ministres des différents pays, sont très rapidement atteints, tout du moins pour certaines espèces. Comment les marins pêcheurs peuvent-ils faire face à leurs charges s'ils ne peuvent aller pêcher ?

Je ne nie pas la situation très dégradée des ressources halieutiques et la nécessité d'instaurer une pêche durable mais, pour résoudre les crises récurrentes auxquelles la profession doit faire face, il faut prendre en compte plusieurs points. La flotte française, du fait de sa spécialisation chalutière, est beaucoup plus vulnérable à la hausse des coûts de l'énergie, comme celle de l'année dernière. Au début de 2008, le Gouvernement a mis en place un plan d'aide de 310 millions sur deux ans pour, notamment, diminuer la consommation d'énergie. J'espère que nous en aurons bientôt un premier bilan.

Il faut revoir la procédure de fixation des quotas, qui s'appuie aujourd'hui sur les préconisations des scientifiques mais nullement sur les observations des pêcheurs. Les propositions de la Commission sont ensuite soumises aux ministres de la pêche des 27 États membres, en décembre, et ce sont eux qui décident la répartition des quotas nationaux. Les discussions, souvent très longues, aboutissent à une décision votée à la majorité qualifiée. Les marins pêcheurs ne connaissent donc qu'au dernier moment les quotas qui leurs sont alloués et ne peuvent pas anticiper ni planifier leur saison de pêche. Dans son Livre vert, la Commission stigmatise ce mode de décision qui encourage une vision à court terme.

Si le marché français est composé de 85 % de poissons d'importation, la cause en est l'état de la ressource halieutique. La pêche européenne, pour la plupart des espèces, est constituée de poissons jeunes et de petite taille, la plupart du temps capturés avant d'avoir pu se reproduire. Outre la surpêche, le changement climatique et les pollutions marines sont aussi responsables. Du fait du réchauffement climatique, les zones désertiques de l'océan ont progressé depuis 1998 de 6,6 millions de km², les espèces se déplacent vers le Nord et subissent des déphasages chrono-biologiques. Quant à l'impact de la pollution sur la faune marine, il est mal connu mais incontestable.

Pour la Commission européenne, cette diminution des ressources halieutiques est due à cinq grands problèmes structurels : la surcapacité des flottes, des objectifs stratégiques flous, un mécanisme décisionnel qui encourage une vision à court terme, un cadre qui ne responsabilise pas suffisamment le secteur, un manque de volonté politique pour faire respecter la réglementation. Il me semble indispensable de prendre rapidement des mesures de bon sens, qui rejoignent l'analyse de Pierre-Marcel Cléach.

Il faut d'abord rouvrir le dialogue entre pêcheurs et scientifiques et les faire travailler de concert pour permettre à chacun de bien appréhender la ressource, de mieux y adapter les quotas et de faire accepter cette contrainte par les pêcheurs, qui y verront alors leur intérêt, Ce fut une grave erreur de ne pas l'avoir fait par le passé. Je me félicite de la tenue du Grenelle de la mer qui permet à toutes les parties prenantes -élus, associations, pêcheurs, scientifiques- de réfléchir ensemble et, je l'espère, de faire le point sur ce qui se passe vraiment sur le terrain. Les assises de la mer, annoncées par Michel Barnier pour décembre prochain, ne peuvent qu'être bénéfiques.

Il faut mieux coordonner la gestion des ressources. Le Livre vert propose de recourir, partout où cela est possible, à des systèmes de gestion régionaux spécifiques mis en oeuvre par les États membres et soumis aux normes et au contrôle de la Communauté. Je suis favorable à cette décentralisation de l'application de la politique européenne de la pêche au niveau de régions marines -Méditerranée, mer du Nord, mer Baltique, Atlantique- partagées par plusieurs États. Les Conseils consultatifs régionaux pourraient ainsi voir leur rôle accru. Le niveau européen doit mieux prendre en compte les situations régionales car la Politique commune de la pêche ne peut plus être un bloc monolithique. Les relations de terrain seront ainsi beaucoup plus régulières, avec Bruxelles.

Au-delà des frontières des 27 états, un renforcement de la coopération régionale est nécessaire et les Organisations régionales de gestion des pêches restent jusqu'à présent les meilleurs instruments de gouvernance des pêches, notamment pour ce qui est des stocks chevauchants et des stocks de poissons grands migrateurs des zones économiques exclusives et de la haute mer. Leurs résultats sont cependant inégaux et elles n'ont pas toujours été efficaces. Il faut donc améliorer leurs résultats globaux, ce qui suppose de coopérer avec nos partenaires internationaux. (Applaudissements au centre)

M. Gérard Le Cam.  - Au moment où se pose la question de l'alimentation mondiale, celle des ressources de la mer revêt une importance capitale sur notre terre qui est recouverte à 70 % d'océans et dans notre pays qui, avec 5 500 kms de côtes, devrait théoriquement occuper une place prépondérante dans le monde de la pêche. Mais la France ayant délégué l'essentiel de ses prérogatives dans le domaine de la pêche à l'Europe en 1983, année de naissance de la Politique commune de la pêche (PCP), son rôle se limite à négocier les quotas de pêche par espèces et par secteurs une fois les taux admissibles de capture établis et à accompagner les crises cycliques en proposant des plans financiers qui doivent être acceptés par la Commission. En 2008, Bruxelles a créé des difficultés à notre pays, au nom du sacro-saint droit européen et de la concurrence libre et non faussée, pour le prix du carburant ou les 310 millions d'aides prévus en 2008, dont 40 au titre de l'aide sociale et 230 destinés à moderniser et restructurer la flotte de pêche sur les trois années à venir. En ce moment, la porte-parole de la Commission tergiverse pour 4 millions d'aide aux pêcheurs de Calais ou Dunkerque !

Nous pouvons donc nous interroger sur les effets des politiques communautaires et nationales en matière de pêche depuis 1983. Le rapport de l'Office parlementaire donne l'exemple de la Bretagne et de l'augmentation de l'intensité capitalistique du secteur dans les années 80, montrant l'augmentation du nombre des bateaux de 16 à 25 mètres au détriment de ceux de moins de 10 mètres, augmentation liée à la politique de subventions. Ce rapport établit un lien entre la crise de la pêche artisanale et cette politique de subvention. La casse des bateaux de pêche, appelée en langage politiquement correct « sortie de flotte », pèse déjà 78 bateaux en 2009 dont 24 pour les départements bretons. Depuis vingt ans, la moitié de la flottille française a disparu et la pêche artisanale côtière est menacée alors qu'elle contribue au tissu social de nos ports, qu'elle est une sécurité face aux délocalisations, qu'elle est garante de qualité et de proximité. Existera-t-elle encore en 2013, au moment de la réforme annoncée de la Politique commune de la pêche ? Allons-nous faire comme pour la PAC, c'est-à-dire prendre conscience qu'il faut aider les petits agriculteurs au moment où ils ont disparu ?

La France et l'Europe n'échappent pas à la crise mondiale de la pêche tant au niveau des capacités d'exploitation que de la surexploitation des stocks. Les techniques et les périodes de pêche entraînent un volume de rejets qui se situe entre 20 et 50 % des quantités débarquées. La pêche minotière industrielle écume également les mers pour environ 23 millions de tonnes -contre 30 millions de tonnes de rejets... Ce type de pêche non sélectif est certes utile pour l'aquaculture, mais dangereux pour la conservation des espèces et, selon l'Inra, des farines végétales pourraient remplacer les farines de poissons. Bruxelles ne semble pas avoir pris ce sujet à bras le corps !

La pêche française souffre des quotas, mais aussi d'un réel problème de revenu qui n'est pas automatiquement lié aux quantités pêchées. La désorganisation logistique du marché et ses règles économiques conduisent à de multiples aberrations dans un pays qui importe près de 85 % de sa consommation. Il est scandaleux de détruire 40 tonnes de coquilles Saint-Jacques, un produit aussi noble, comme cela vient d'être fait. Les produits sont divers, irréguliers, débarqués en de multiples points de l'hexagone, les prix souvent élevés et instables, les consommateurs désorientés face à une offre inorganisée.

Certaines propositions de notre collègue Cléach vont dans le bon sens. Nous approuvons l'idée de développer les partenariats entre pêcheurs et scientifiques ; il ne serait pas inutile d'y ajouter les décideurs politiques qui, souvent, se contentent d'une approche très théorique du sujet. Seuls, ces partenariats permettront de respecter les Taux admissibles de captures (TAC) et quotas, à condition que ceux-ci soient gérés de façon pluriannuelle.

La question des rejets et de la pêche minotière requiert une aide technique et une réglementation plus sévère. Les quotas individuels transférables portent en eux-mêmes le danger de concentration et de délocalisation et ils risquent fort d'être écartés de leur vocation initiale, à savoir, la responsabilisation individuelle des pêcheurs.

La question de la rentabilité de l'activité pêche est complexe dans la mesure où la perte annuelle est égale à 64 % de la valeur débarquée dans le monde et revient à 51 milliards de manque à gagner. Les conclusions à en tirer seraient de réduire de 43 % le coût de la pêche, d'augmenter de 71 % le prix du poisson ou de réduire de 25 à 50 % la capacité de capture.

Le rapport de l'Office parlementaire évoque le sevrage des aides publiques. S'il est vrai que ces aides ont des effets négatifs pour la pêche artisanale en poussant à la concentration, il conviendrait dans un premier temps de les cibler vers une assurance revenu pour compenser les périodes de non-pêche et les aléas du marché. Les politiques actuelles de la pêche ressemblent davantage à une fuite en avant face à l'effondrement de la ressource qu'à une réelle volonté de rétablissement des stocks et de restructuration du marché. Ce problème appelle des décisions européennes et mondiales pour contrecarrer le braconnage, la surpêche, la falsification des chiffres réels et le colonialisme de pêche. L'acidification des océans liée aux émissions de CO2 appelle une intensification de la recherche.

Je voudrais conclure en citant Daniel Pauly, expert mondial de la pêche : « Il faut pêcher moins si l'on veut continuer à pouvoir pêcher. En ciblant la pêche industrielle, on réduirait beaucoup les capacités de pêche, sans affecter beaucoup de personnes ». Il dit aussi : « On ne gère pas les stocks avec son estomac, mais avec sa tête ». Je me permets d'ajouter une réflexion personnelle : ne gérons pas la pêche pour capitaliser de l'argent mais pour nourrir les hommes, sans oublier les pêcheurs. (Applaudissements à gauche ainsi que sur plusieurs bancs au centre et à droite)

M. René Vestri.  - La mer est une composante fondamentale de la vie terrestre, que l'on se place sous l'angle des phénomènes géologiques, physico-chimiques ou biologiques. Source de biodiversité, ses écosystèmes fournissent 80 % de l'oxygène de notre planète dans des conditions environnementales fragiles. La biodiversité génétique des espèces marines excède celle des continents. La physiologie des espèces supérieures, comme les poissons, est adaptée à ces conditions si particulières : croissance lente, durée de vie longue, maturité tardive.

C'est pourquoi je préconise, dans le cadre du Grenelle de la mer, que l'Ifremer soit doté de moyens supplémentaires afin de créer un véritable laboratoire du fond des mers chargé d'étudier la dynamique des écosystèmes à l'échelle de la décennie et de détecter des événements sismologiques sous-marins, à l'instar de ce qui se fait aux États-Unis ou au Japon.

L'environnement côtier doit également faire l'objet d'une protection spécifique à cause de ses particularismes : phénomènes sédimentologiques spécifiques, apports continentaux importants, y compris sous forme de pollutions, marées considérables couplées à des vents locaux et des courants intenses, exploitation intensive et variée des ressources, usage dense des espaces maritimes. On ne peut intervenir dans cet espace de manière parcellaire ou fragmentaire sans le fragiliser encore plus ; c'est pourquoi je défends, au-delà de la simple gestion intégrée de la zone côtière, la mise en place d'une nouvelle gouvernance qui associe tous les acteurs du milieu côtier au sein d'un parlement de la mer.

La mer a toujours été l'école de l'apprentissage du partage et de la solidarité, c'est cet esprit que je souhaite voir souffler sur les travaux du Grenelle. La mer est, également, un théâtre d'innovations techniques qu'il faut encourager, notamment dans le domaine des pêches maritimes où la dépendance énergétique est totale et où on manque d'innovation sur les motorisations. Faisons passer le secteur des pêches d'une logique de déclin à une dynamique de développement durable, avec des engins plus sélectifs et plus économes en énergie, avec des périodes de fermeture.

Il faut des quotas individuels de pêche attachés aux navires afin de limiter la course à l'accroissement des armements. Les pêcheurs doivent recevoir des garanties pour leurs investissements et pour leur avenir, que seul le quota de pêche individuel transférable peut assurer. Cela suppose une parfaite validité du droit de propriété acquis, et donc un contrôle sans faille par les services de l'État et l'interprofession.

Trois principes devront nous guider pour mettre en place un plan d'avenir pour la pêche : durabilité, car des droits à pêcher bien gérés sont indispensables pour une vision écosystémique des ressources ; stabilité, car des droits à pêcher définis sur quatre à cinq ans permettent aux entreprises de la filière de planifier les investissements rendus encore plus onéreux par le vieillissement de la flotte ; équité, car des droits à pêcher répartis en fonction des armements, des métiers, des lieux de débarquement garantissent la pérennité des acteurs en place sans interdire l'accès à des arrivants.

Ainsi gérés, ces quotas individuels transférables permettront à la pêche française, qui est à 95 % une pêche artisanale, d'aborder avec sérénité les échéances à venir, et principalement le renouvellement de la flotte qui est déjà le second poste de charge des armements après le carburant.

Je propose de sortir le plus rapidement possible du système de totaux admissibles de capture; la Commission européenne elle-même reconnaît que c'est un échec. Il faut aussi refonder l'organisation professionnelle de la pêche autour d'une gestion plus participative, plus anticipative et plus adaptative de la ressource et une montée en puissance de l'aquaculture et de la conchyliculture. Je propose également de créer un système d'information géographique unique et commun à l'ensemble des acteurs de la mer et des océans. La France pourrait développer une expertise en ce domaine et l'exporter. Il faut aussi généraliser la mise en place d'étiquetage et labels écologiques, qui valorisent encore mieux les origines géographiques et les terroirs, le tout au sein d'une démarche HACCP. Enfin, il conviendrait de lancer une grande étude sur l'impact de la pêche de plaisance sur les ressources, qui pourrait aboutir à un Livre blanc et à l'instauration de quotas pour les plaisanciers sur certaines espèces emblématiques et menacées.

Ces solutions, la France ne saurait les imposer seule car la mer et les poissons ne connaissent pas de frontières. Elle doit s'appuyer sur l'Union européenne et sur les organisations onusiennes, je pense notamment à l'Organisation maritime internationale. Les espaces maritimes européens doivent être régis par la règle environnementale la plus audacieuse en vigueur dans l'un des États membres : seule la pédagogie de l'exemple pourra favoriser une harmonisation vers le haut des réglementations maritimes. S'appuyer sur le système onusien, c'est faire valoir la voix de la France, seul État présent sur tous les océans et deuxième territoire maritime au monde.

Maintenant, je souhaite, en tant qu'élu des Alpes-Maritimes, aborder les problèmes inhérents à la mer Méditerranée, l'un des principaux sites critiques de la biodiversité mondiale, du fait de la croissance démographique, principale cause de surexploitation et de dégradation des écosystèmes.

Le manque d'intégration politique des pays riverains fait obstacle à l'adoption de politiques coordonnées. Les gouvernements commencent à se rendre compte que l'état de leurs ressources naturelles influence leurs perspectives économiques, mais cela ne se traduit pas en actes. Qu'attend-on pour mettre en oeuvre l'Union pour la Méditerranée ? États-Unis, Brésil, Inde, Chine, Royaume-Uni ou Russie, tous développent une grande politique maritime. Comme l'a dit Jean-Louis Borloo, « les espaces maritimes demeurent l'enjeu géostratégique majeur du siècle qui débute ».

Les avantages géographiques de notre pays ainsi que son savoir-faire naval et maritime lui donnent une responsabilité majeure dans l'avenir des océans et de la Méditerranée. Aujourd'hui, 88 % des stocks seraient victimes d'une pêche excessive qui met en péril la reproduction du cabillaud en mer du Nord et du thon rouge en Méditerranée. Résultat, l'Union européenne importe plus de la moitié des poissons qu'elle consomme.

Bruxelles souhaite briser ce cercle vicieux qui consiste à pêcher toujours plus des ressources qui s'amoindrissent, conduisant l'Europe à subventionner de manière croissante une activité de plus en plus déficitaire. Il est donc vital de protéger la mer, parce qu'elle fournit des ressources vivantes, minérales et énergétiques, et parce qu'elle est le lieu d'activités aussi stratégiques que le transport, la défense, le tourisme. C'est une responsabilité que nous avons vis-à-vis des générations futures, et déjà des générations actuelles.

Je conclurai par une phrase de l'écrivain croate Predrag Matvejevitch : « Il n'est pas ici question seulement d'histoire ou de traditions, de géographie ou de racines, de mémoire ou de croyances : la Méditerranée est aussi un destin. » Et je félicite Marcel-Pierre Cléach pour son brillant rapport. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Jacques Muller.  - La pêche, activité essentielle pour l'alimentation humaine, me semble emblématique du rapport de nos sociétés humaines à l'environnement. Elle peut illustrer le pire des scénarios ou s'inscrire dans une dynamique de développement durable et de valorisation économique de la biodiversité... A condition de s'en donner les moyens. Et il est une réalité peut-être difficile à entendre en ces temps de crise, mais rigoureusement incontournable : pour pêcher toujours, il faut pêcher mieux !

Les États membres ont confié à l'Union européenne la gestion des ressources halieutiques. La refonte, indispensable, de cette politique commune passe par la définition de plans d'action pluriannuels de restauration des espèces. Pour ce qui est de la gestion des stocks de notre pays, l'action du Gouvernement doit être réorientée dans deux directions. Tout d'abord, des contrôles plus rigoureux doivent être mis en place pour veiller au respect de la réglementation. La France s'est trop souvent distinguée par des retards importants dans les déclarations de capture. Il faut instaurer des brigades de contrôle à compétence nationale et mobiliser les services des douanes, en leur donnant les moyens de ces missions nouvelles, et l'Ifremer -dont le budget 2009 se distingue paradoxalement par une baisse de la masse salariale et des programmes scientifiques.

Ensuite, l'appui aux unités de pêche doit se concentrer sur les petites unités artisanales, tout en privilégiant l'aide aux groupements de pêcheurs et en cessant les aides directes aux grosses unités de pêche hauturière. Il s'agit d'une priorité absolue car l'impact négatif sur l'environnement des pêcheurs artisanaux et de leurs petites unités est moindre, et la pérennité de leur action est étroitement liée à la protection du milieu marin proche. Inversement, les grosses unités recherchent la rentabilité immédiate et sont moins concernées par la gestion des stocks à long terme car elles peuvent aller « piller » -il est permis de le dire- des stocks lointains.

Le soutien à la pêche artisanale est donc crucial pour faire obstacle au développement inconsidéré de l'aquaculture et conserver des stocks viables de poissons marins. Ainsi, l'aide de la collectivité ira à ceux qui le méritent ! Comme je le disais en introduction, pour pouvoir toujours pêcher, il faut pêcher mieux ! (Applaudissements à gauche)

M. Gérard Bailly.  - Vivant à près de 1 000 kilomètres de la mer, j'aborderai quant à moi la question des réserves de pêche en eau douce. Ce problème, qui peut paraître mineur, a beaucoup d'importance dans nos territoires ruraux : 4 200 hectares d'étangs sont concernés dans nos trois départements de Franche-Comté. Ainsi, la Bresse jurassienne allie une production piscicole significative et un patrimoine naturel de grande valeur, avec 1 000 hectares d'étangs de petite taille. Intervenant dans la régulation du régime des eaux et améliorant la qualité de celles-ci, ces plans d'eau constituent des écosystèmes d'intérêt majeur.

Les acteurs de la gestion piscicole sont cependant très inquiets car les problèmes liés à l'exploitation des étangs se multiplient alors que les revenus liés à l'activité chutent. La pisciculture d'étang est très hétérogène : l'activité d'une minorité de professionnels repose sur une majorité d'exploitants amateurs. Or cette filière souffre d'une forte pression fiscale et de la concurrence des produits d'importation. Ainsi, les pays de l'Est proposent à la restauration du filet de sandre à partir de 6 euros le kilo quand ce poisson vivant est vendu pour le repeuplement entre 10 et 20 euros. Sans parler de la perche du Nil en provenance du lac Victoria, disponible à moins de 5 euros. La pisciculture subit en outre le fléau des cormorans. (« Ah ! » à droite) Les quotas de tir ont été augmentés et la période de tir allongée, mais les prélèvements sont tout de même estimés, en Franche-Comté, à 120 tonnes de poissons, soit une valeur marchande de 300 000 euros par an. Les pertes peuvent atteindre un tiers de la production dans certains étangs. Les espèces envahissantes comme le ragondin, le poisson-chat et l'écrevisse pénalisent elles aussi une gestion rationnelle des étangs.

Surtout, la profession, et notamment le Syndicat des aquaculteurs de Franche-Comté, est en émoi car le projet de schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux 2010-2015 du bassin Rhône-Méditerranée préconise une « absence de recours aux repeuplements dans les masses d'eaux en très bon ou en bon état écologique » alors que la directive-cadre sur l'eau n'émet aucun jugement négatif sur cette pratique. On condamne le repeuplement de manière unilatérale, sur des bases scientifiques et techniques très fragiles. Les professionnels craignent la disparition d'une partie des acteurs des milieux aquatiques, aménageurs de territoires et créateurs d'emplois. Ils souhaitent donc qu'une réflexion se mette en place et qu'un groupe de travail, piloté par les ministères de l'écologie et de l'agriculture, regroupe les différents acteurs.

Enfin, les contraintes réglementaires et les programmes environnementaux durcissent régulièrement la réglementation en vigueur, et les propriétaires se résignent souvent à l'abandon des étangs. Certaines pratiques mériteraient pourtant d'être soutenues dans le cadre des mesures agri-environnementales territorialisées prévues par Natura 2000 : conservation des habitats remarquables, entretien des digues, assèchement des étangs tous les cinq ans, adaptation des structures, etc.

De tout temps, les hommes se sont nourris de poissons, et cette consommation est encouragée par le corps médical. Au moment où l'on parle de diminution des volumes en mer, faut-il contraindre encore la pisciculture en eau douce ? Ses professionnels aimeraient plus de reconnaissance et demandent à être associés aux décisions qui ont des répercussions sur l'avenir de la filière. La pisciculture d'étang est une des rares activités agricoles conforme aux objectifs de développement durable. Elle garantit le maintien d'écosystèmes riches et complexes et participe à la vie des territoires ruraux : elle mérite d'être mieux considérée et soutenue.

Je félicite Marcel-Pierre Cléach pour son excellent rapport, en espérant qu'il ne restera pas sans lendemain... (Applaudissements à droite)

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État chargée de l'écologie.  - Je remercie le Sénat et l'Office d'évaluation des choix scientifiques et technologiques pour leur initiative : ce rapport nous fournit une vision renouvelée des ressources halieutiques alors que vient d'être lancé le Grenelle de la mer. Demain, Daniel Pauly sera ici pour éclairer nos débats sur la pêche.

Le premier Grenelle s'est surtout concentré sur les problèmes propres à la terre, et c'est pourquoi nous avons décidé de lancer ce Grenelle de la mer. La France a une responsabilité particulière dans ce domaine puisqu'elle possède le deuxième espace maritime mondial et que ses eaux sont caractérisées, notamment en outre-mer, par une grande richesse en biodiversité. Notre débat doit éclairer les travaux de ce Grenelle.

Les ressources halieutiques représentent 20 % des apports en protéines animales de la population mondiale et constituent la principale source protéinique d'un milliard d'humains. Or les prévisions du FAO sont alarmantes, comme l'a rappelé M. Cleach : entre 75 % et 80 % des ressources sont surexploitées ou exploitées au maximum. La première crise écologique, si une telle crise doit avoir lieu, sera celle de la biodiversité et non du climat.

Les ressources halieutiques sont renouvelables, communes, mais aussi fragiles, car elles sont sensibles aux pollutions, aux changements climatiques et aux évolutions des écosystèmes. On assiste aujourd'hui à une véritable « course au poisson », chaque pêcheur croyant qu'il est dans son intérêt d'utiliser au maximum ses moyens de capture.

Or il est absurde d'opposer la protection de la pêche et celle de l'environnement : l'une ne va pas sans l'autre. (Marques d'approbation à droite) M. Barnier et moi-même sommes parfaitement d'accord sur ce point. La politique du Gouvernement vise donc à la fois à soutenir le secteur de la pêche et à préserver l'environnement.

La plan pour une pêche durable et responsable, annoncé par le Président de la République le 16 janvier 2008 dans un contexte de forte hausse du prix du gazole, comprend quinze mesures conjoncturelles et structurelles auxquelles sont affectés 310 millions d'euros. Nous souhaitons d'abord encourager le remplacement des vieux bateaux par des embarcations moins polluantes ; mais il est vrai que la recherche sur les bateaux économes en énergie n'a pas été très poussée jusqu'ici...

La priorité est d'étendre les connaissances scientifiques sur l'état des ressources halieutiques : je rejoins les préoccupations de MM. Etienne et Cleach. Une somme de 8 millions d'euros servira à multiplier les observations et à accroître notre expertise. L'Ifremer, dont le contrat quadriennal vient d'être renouvelé, sera doté de 16 postes supplémentaires. D'autres institutions, comme l'Institut de recherche pour le développement et le Muséum d'histoire naturelle, seront également soutenues. Il faut rapprocher la pêche de la science, car elles partagent les mêmes intérêts et les mêmes interrogations.

Nous poursuivrons également -je tiens à rassurer Mme Herviaux sur ce point- l'expérience innovante des « contrats bleus » qui consiste à rémunérer les pécheurs pour la récupération de déchets en mer ou l'accueil de savants sur leurs bateaux. Cette mesure, dont le bilan est positif, a été dotée de 30 millions d'euros pour l'année 2008-2009, et M. Barnier et moi-même y sommes tout à fait favorables.

Nous chercherons à valoriser l'offre française en créant des « écolabels » et peut-être une marque collective nationale, comme l'envisage France Agrimer.

Quant à la politique commune de la pêche, son bilan économique, social et environnemental est mitigé. Certes, elle a connu depuis 2002 des améliorations comme l'élaboration de plans de gestion pluriannuels et de plans de reconstitutions du stock de certaines espèces. Mais elle a échoué à réduire le volume de la flotte : si le nombre de bateaux a diminué, leur puissance a augmenté et l'effort de pêche est resté constant. En outre, le principe de stabilité relative des quotas, certes favorable à la France, ne permet pas de prendre en compte l'évolution de la ressource.

Le Livre vert de la Commission prévoit plusieurs mesures qui vont dans le bon sens. La gestion des rejets serait désormais fondée sur l'effort de pêche et non plus sur les taux autorisés de capture (TAC) et les quotas. Le principe de stabilité relative des quotas serait maintenu, mais rendu plus flexible : des droits de pêche transférables pourraient ainsi être alloués, à condition que cela n'entraîne pas une financiarisation ni une concentration excessive du secteur. Il est d'ailleurs envisageable d'adopter des systèmes différents selon les types de pêche : tandis que la pêche hauturière serait soumise à un système de quotas individuels transférables, la pêche côtière resterait régie par le principe de stabilité, avec les adaptations nécessaires.

Comme l'a dit M. Muller, il nous faut soutenir la pêche artisanale et côtière qui joue un rôle économique et social important et a droit à un traitement différencié. Les flottes artisanales doivent pouvoir bénéficier de soutiens publics dans le cadre d'une politique commune réformée.

Le Livre vert prévoit également la mise en place de systèmes de gestion régionaux, comme l'a indiqué M. Merceron. Je me félicite que la Commission reconnaisse ainsi la spécificité de chaque zone et la nécessité d'y adapter la réglementation : c'est en quelque sorte la conséquence du principe de subsidiarité. Les mers d'outre-mer et la mer du Nord ont des caractéristiques distinctes !

Il faut aussi responsabiliser les entreprises et améliorer la qualité des produits. Un pêcheur doit tirer profit du fait qu'il respecte les normes de la pêche « durable ». Plus généralement, il faut réformer la politique commune de pêche pour la rendre moins conjoncturelle et plus structurelle.

Les contrôles de la pollution et de la pêche doivent être renforcés. Les profits de la pêche illégale dans le monde se montent à 10 milliards d'euros, ce qui en fait le deuxième producteur mondial. M. Le Cam s'est justement ému de ce scandale. Le règlement INN -applicable à la pêche illicite, non déclarée et non réglementée- a été adopté en janvier 2010 et entrera en vigueur le 1er janvier prochain : il permettra de lutter plus efficacement contre ces pratiques.

Nous nous efforçons également de développer l'aquaculture durable, qui n'a pas vocation à se substituer à la pêche mais qui produit aujourd'hui la moitié du poisson consommé dans le monde et connaît une forte croissance. Or les conditions sociales et environnementales de cette production ne sont pas toujours très transparentes...

En ce qui concerne plus précisément la pisciculture, le Gouvernement, monsieur Bailly, est conscient du problème constitué par les cormorans. Un prélèvement donnant lieu à un bilan annuel doit éviter que ces oiseaux n'exercent une trop forte pression sur les ressources piscicoles. En outre, j'ai demandé aux Sdage -contrairement à ce qu'ils envisageaient d'abord- de laisser aux pisciculteurs la possibilité de procéder à des repeuplements dans des rivières en très bon état : cela me paraît justifié. Je rappelle cependant que nous sommes obligés, en vertu de la directive-cadre sur l'eau, de parvenir au bon état écologique des eaux en 2015.

Une mission a été confiée à Mme Hélène Tanguy en vue de promouvoir le développement de l'aquaculture. Un mémorandum élaboré en juin 2008 et signé par 18 pays membres de l'Union européenne prévoit l'élaboration d'une politique communautaire intégrée, la promotion de l'image de l'aquaculture, le renforcement des normes sanitaires et environnementales et des mesures de soutien économique. Une communication de la Commission sera examinée en conseil des ministres au mois de juin.

La plupart des États sont favorables au soutien de l'aquaculture dans des conditions environnementales et sociales satisfaisantes.

La France doit mettre à profit l'Union pour la Méditerranée (UPM), chère à M. Vestri, pour améliorer la gestion de la ressource halieutique dans cet espace si extraordinaire, mais si fragile, qu'est la Méditerranée. La coopération entre États riverains est indispensable pour traiter la surexploitation des ressources et l'effondrement des stocks. Nous avons déjà des études à notre disposition, comme celles sur le thon rouge. Mais nous devrons aller plus loin. Avec ses partenaires européens, la France a mis en place un système pour contrôler les pollutions et, dans le cadre de l'UPM, nous devrons poursuivre et renforcer ces actions.

D'une manière générale, pour ce qui concerne la qualité de l'environnement marin, il nous faut adopter des politiques écosystémiques. Jusqu'à présent, chaque problème donnait lieu à une politique distincte des autres : nous avons ainsi connu des politiques consacrées à la pêche, au transport maritime, aux pollutions des mers ou encore au tourisme. Les pêcheurs s'estimaient victimes de ces diverses politiques, notamment parce qu'ils souffraient des pollutions venues pour l'essentiel de la terre, de la destruction des zones de frai et de l'impact du changement climatique. Or, il est évident que la viabilité du secteur de la pêche repose sur une gestion intégrée de l'espace maritime. C'est d'ailleurs toute la logique de la directive-cadre portant stratégie pour le milieu marin et du Grenelle I. Le Grenelle de la mer que nous lançons poursuivra dans la même logique, en l'amplifiant. L'article 60 du Grenelle II, dont vous allez être prochainement saisis, met en avant cette approche écosystémique à l'échelle de chaque façade maritime, avec des propositions concrètes. Cette nouvelle gouvernance est bien l'un des enjeux majeurs de la quatrième table ronde du Grenelle de la mer.

J'en viens aux aires marines protégées : nous tentons de combler notre retard dans ce domaine et notre objectif est de parvenir à 10 % de zones protégées. Nous allons devoir faire de la pédagogie, M. Cleach a raison, afin que l'on comprenne bien que ces aires n'interdisent pas toute activité. La pêche y aura toute sa place dès lors qu'il s'agira d'une activité durable. On me dit souvent que les aires marines protégées équivalent à une mise sous cloche : si c'était le cas, nous n'aurions aucune chance de les mettre en place.

Avec Natura 2000 en mer, une centaine de sites ont été choisis en fonction de considérations scientifiques et ont été signifiés à la Commission. En outre, dix parcs naturels marins seront créés d'ici 2012. Un premier parc a déjà été créé et quatre autres le seront d'ici peu : côte de Vermeille, baie de Somme, Gironde-Pertuis-Charentais et Mayotte. Ces réseaux d'aires marines protégées seront la pierre angulaire de notre politique nationale. Dans le parc naturel d'Iroise, le seul créé à ce jour, trois des dix orientations concernent les activités de pêche et elles ont été adoptées à la demande des organisations professionnelles bretonnes. Il s'agit du soutien au développement durable de la pêche côtière, de l'exploitation durable des ressources halieutiques et de l'exploitation durable des champs d'algues.

Nous sommes donc bien dans une logique de concertation et de contractualisation.

De même, pour Natura 2000, nous sommes sortis du tout administratif. Aujourd'hui, nous sommes dans une phase contractuelle avec des comités de pilotage qui élaborent des documents d'objectifs. Les acteurs locaux édictent leurs propres règles pour gérer leur territoire de façon durable. Les aires marines protégées permettront donc de protéger les ressources des professionnels de la pêche.

Parmi les objectifs du sommet mondial du développement durable figuraient le développement des réseaux d'aires marines protégés d'ici 2012 et la reconstitution générale des stocks pour 2015. J'ai quelques doutes sur notre capacité à atteindre ce dernier objectif. Pourtant, nous sommes à un tournant : l'ensemble de nos partenaires internationaux se rendent compte que l'exploitation actuelle de la ressource n'est plus soutenable à terme et, au sein de l'Europe, les attitudes évoluent.

En France, avec M. Barnier, nous voulons sortir du coup par coup pour aller vers une véritable politique structurelle. Nous voulons réconcilier la pêche, l'écologie et la science et nous désirons redonner toute leur place aux pêcheurs dans cette logique de responsabilité. (Applaudissements à droite et au centre)

Prochaine séance, demain, mercredi 6 mai 2009, à 14 h 30.

La séance est levée à 19 h 25.

Le Directeur du service du compte rendu analytique :

René-André Fabre

ORDRE DU JOUR

du mercredi 6 mai 2009

Séance publique

A QUATORZE HEURES TRENTE

1. Proposition de loi relative au transfert du contentieux des décisions de refus d'entrée sur le territoire français au titre de l'asile, présentée par M. François-Noël Buffet (n°263, 2008-2009).

Rapport de M. Jean-René Lecerf, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (n°329, 2008-2009).

Texte de la commission (n°330, 2008-2009).

2. Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi pour le développement économique des outre-mer.

Rapport de M. Doligé, rapporteur pour le Sénat. (n°379, 2008-2009).

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DÉPÔTS

La Présidence a reçu de M. Éric Doligé, rapporteur pour le Sénat, un rapport fait au nom de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi pour le développement économique des outre-mer.