Financement de la sécurité sociale pour 2010 (Conclusions de la CMP)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle l'examen des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010.

Discussion générale

M. Alain Vasselle, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire.  - Le projet de loi initial, qui comprenait 54 articles, en compte aujourd'hui 97 : nous avons été productifs ! Son examen a donné lieu à des débats d'une grande richesse. Le Sénat a contribué à en améliorer le texte en adoptant 92 amendements, dont 43 à l'initiative de notre commission des affaires sociales. Sur de nombreux sujets, nos points de vue ont été en parfaite adéquation avec ceux de Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis de la commission des finances. Plusieurs amendements du Gouvernement ont permis d'ajuster à la marge les équilibres du financement de la sécurité sociale. Le déficit prévisionnel du régime général pour 2010, de 30,6 milliards d'euros, n'est pas modifié. Les perspectives pluriannuelles le maintiennent à ce niveau jusqu'en 2013, ce qui justifie notre inquiétude.

L'organisation de nos travaux a été difficile. Nous avons siégé un week-end entier et terminé l'examen de ce texte dans la nuit de dimanche à lundi. Ce n'est pas satisfaisant. La commission des affaires sociales souhaite, à l'unanimité, que l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale en séance publique se déroule pendant une semaine entière et d'un seul bloc. Lors de la Conférence des Présidents qui s'est tenue hier, le Président du Sénat nous a indiqué que cette observation serait prise en compte dans le cadre de l'évaluation du fonctionnement de notre assemblée. Nous regrettons notamment de ne pas avoir pu mener le débat thématique sur la réforme des retraites. Nous essaierons de le tenir lors d'une prochaine semaine de contrôle -peut-être en janvier, bien que l'emploi du temps semble déjà chargé.

La CMP est parvenue à un accord sur les 56 articles qui restaient en discussion à l'issue de l'examen de ce projet de loi par le Sénat. Elle a maintenu la suppression de cinq articles, en a adopté trente dans le texte du Sénat, un dans celui de l'Assemblée nationale, supprimé quatre articles introduits par le Sénat et élaboré un nouveau texte pour seize articles. Parmi les dispositions revues par la CMP figure l'article 14, relatif aux retraites chapeau. Le principe d'une taxation plus forte des rentes les plus élevées, adopté par le Sénat à l'initiative conjointe des commissions des affaires sociales et des finances, a été maintenu ; l'assujettissement à des cotisations a été transformé en une contribution additionnelle de 30 %.

La CMP a précisé les modalités de mise en oeuvre de la contribution sociale sur les appels surtaxés dans le cadre des jeux télévisés, prévue à l'article 17 bis A, dont l'initiative revient à Nicolas About. Elle est parvenue à une rédaction commune sur l'article 29, relatif à la prise en charge du suivi médical des assurés après la sortie du régime des affections de longue durée (ALD). Je regrette un peu qu'elle n'ait pas retenu la disposition que nous avions adoptée pour donner une base législative au dispositif réglementaire : la loi devrait non seulement prévoir la fixation par décret de la durée du régime de suivi, mais aussi autoriser la fixation réglementaire de la durée d'admission en ALD. Le Gouvernement s'est engagé à publier un décret destiné à maîtriser l'entrée, la sortie et la durée du régime, ainsi que la prise en charge à 100 % par la suite.

Pour ce qui concerne l'article 30 quater, relatif à la responsabilité civile des gynécologues...

M. Guy Fischer.  - On cède !

M. Alain Vasselle, rapporteur.  - La CMP a étendu le dispositif voté sur proposition de notre commission.

A l'article 32, la CMP est revenue à la date initiale de 2018 prévue par le Gouvernement pour l'achèvement du processus de convergence, alors que nous souhaitions que celui-ci soit terminé en 2014. Nous ne comprenons pas pourquoi six années sont nécessaires pour tirer les conséquences des études sur les écarts de coûts, qui seront achevées en 2012, ni pourquoi aucun échéancier n'est fixé pour atteindre cet objectif. Quel signal le Gouvernement veut-il ainsi donner ? Où est la volonté d'améliorer l'efficience des dépenses hospitalières ? Il aurait été souhaitable de fixer quelques rendez-vous afin de savoir si la convergence avance à petits ou à grands pas. Nous reprendrons l'initiative lors du prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale car nous ne pouvons nous contenter d'une date aussi lointaine. Il faut avancer vers la convergence.

Pour la majoration des durées d'assurance, prévue à l'article 38, la CMP a ramené à trois ans au lieu de quatre le nombre d'années prévues avant que les parents se prononcent sur l'attribution de la deuxième partie de la majoration.

Enfin, la CMP a supprimé l'article 46 bis A, introduit à l'initiative de notre commission et de Jean Arthuis, Joseph Kerguéris et Alain Lambert, et qui consolidait juridiquement le regroupement des assistantes maternelles. Il s'agit, je l'espère, d'une incompréhension de la part de nos collègues députés car l'excellent rapport de Jean-Marc Juilhard et les expérimentations menées en Mayenne ont démontré la pertinence de notre proposition. Le dossier n'est pas clos et nous y reviendrons prochainement.

Nous regrettons que le Gouvernement souhaite revenir sur certains points de cet accord. Au cours des débats, un désaccord nous a opposés à Mme la ministre sur les dispositions relatives à la grippe A. Après avoir prévu d'affecter à l'assurance maladie la contribution financière à la campagne de vaccination des organismes complémentaires, le Gouvernement a fait volte-face et demandé son affectation à l'Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (Eprus), ce qui aurait eu pour effet de diminuer les sommes versées à ce dernier par l'État.

Nous ne partageons pas cette vision. L'assurance maladie est un tout : la participation des complémentaires doit s'imputer exclusivement sur la part de l'assurance maladie dans le financement de l'Eprus. Le Gouvernement entendait en outre faire financer par l'assurance maladie l'indemnisation des professionnels requis pour assurer la vaccination -qui, s'agissant d'une menace sanitaire, relève en totalité de l'État. Le projet de loi prévoyait enfin que les dépenses liées à la grippe A seraient neutralisées pour le déclenchement du seuil de dépassement de l'Ondam en 2010, ce qui nous a paru contestable. Outre que ces dépenses seront très difficiles à isoler, la grippe A ne pourra jamais expliquer à elle seule le dépassement d'un seuil d'alerte fixé en 2010 à 1,2 milliard d'euros. De plus, même liées à la grippe A, ces dépenses devront être financées : si l'alerte n'est pas déclenchée, nous fabriquerons du déficit supplémentaire. Nous ferons le point en 2011.

La CMP a validé l'ensemble de la position du Sénat sur la grippe. Mais le Gouvernement nous présente un amendement qui exclut à nouveau les dépenses liées à la grippe du seuil d'alerte de l'Ondam. Nous n'avons pas d'autre choix que de l'accepter, sauf à rejeter l'ensemble du texte. Mais nous persistons à penser que le Gouvernement prend ainsi une lourde responsabilité. Il donne le sentiment que l'Ondam 2010 est fixé à un niveau trop ambitieux et qu'on peut s'en affranchir lorsqu'il devient trop contraignant.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports.  - Mais non !

M. Alain Vasselle, rapporteur.  - Nous suivrons donc attentivement son évolution au cours de l'année qui vient.

Je me félicite en revanche que le Gouvernement ait renoncé à revenir sur les décisions de la CMP relatives à la répartition des financements des dépenses liées à la grippe entre l'État et l'assurance maladie ; je souhaite que cette position ne soit pas modifiée lors de l'examen en loi de finances de la mission « Santé ». Je sais que MM. Jégou et Milon ont déposé des amendements à cette occasion...

J'en viens à la responsabilité des gynécologues-obstétriciens. Nous avons dû ici même nous prononcer dans l'urgence sur une question particulièrement délicate, à la suite d'amendements déposés l'un par M. Dominique Leclerc et l'autre par le Gouvernement. Le premier aurait fait disparaître toute responsabilité civile de ces médecins, puisque la solidarité nationale aurait assuré le paiement des dommages et intérêts, dès lors que le montant d'assurance du professionnel aurait été dépassé ; le second proposait la mise en place d'une action subrogatoire de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux (Oniam) après la condamnation judiciaire d'un professionnel. Mais on ne voyait pas bien comment un juge pouvait être saisi pour statuer de nouveau ; et le Gouvernement envisageait que l'Oniam n'exerce son action que dans certains cas... Ce qui aurait fait naître un soupçon d'arbitraire et suscité de lourdes incertitudes juridiques.

Nous avions donc prévu, en accord avec le Gouvernement, que l'Oniam ne se substituerait au professionnel condamné à verser des dommages et intérêts que dans le cas où il ne serait plus couvert du fait de l'expiration du délai de validité de son assurance. Dans le même temps, le Gouvernement s'était engagé à relever les planchers d'assurance obligatoire des professionnels de santé de 3 à 6 millions d'euros par sinistre et de 10 à 12 millions d'euros par an. Il avait aussi précisé qu'il envisagerait de réévaluer l'aide au paiement des primes d'assurance. La position du Sénat a été entérinée en CMP, à ceci près que le dispositif de substitution a été étendu à l'ensemble des médecins libéraux.

M. Guy Fischer.  - Voilà !

M. Alain Vasselle, rapporteur.  - Le Gouvernement nous soumet aujourd'hui un amendement qui revient sur plusieurs de ces points. Il ne s'applique d'abord qu'aux médecins libéraux exerçant une spécialité chirurgicale, obstétricale ou d'anesthésie réanimation, condamnés pour des dommages subis à l'occasion d'un acte lié à la naissance -ce qui conduit à traiter différemment les victimes et les professionnels. Il s'applique d'autre part aux condamnations à des sommes supérieures au niveau d'assurance du professionnel lorsqu'il y a « impossibilité pour la victime d'obtenir l'exécution intégrale de la décision de justice auprès du professionnel ». Quel est le sens de cette expression ? Suffira-t-il que le professionnel ne donne pas suite à une demande ? Faudra-t-il une action judiciaire en exécution conduisant à constater l'insolvabilité du professionnel ?

L'amendement prévoit que l'Oniam interviendra pour payer les sommes qui restent dues à la victime et qu'il aura la possibilité de se faire rembourser par le professionnel sauf si « le juge compétent a constaté l'incompatibilité du règlement de la créance avec la solvabilité du professionnel ». Cette expression est là encore imprécise : cela vise-t-il le cas où le professionnel, après dispersion de ses biens, n'est toujours pas en mesure de régler l'intégralité de la créance ? Ou celui où payer la créance risquerait de lui poser des difficultés ?

On peut ensuite se demander si le nouveau mécanisme n'est pas plus favorable à la procédure contentieuse qu'à la procédure amiable. Il semble enfin, dans la mesure où l'Oniam réglera les sommes dues au-delà du niveau du contrat d'assurance, qu'il incitera les professionnels à ne s'assurer qu'au niveau du plancher, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.

M. Guy Fischer.  - Mais oui !

M. Alain Vasselle, rapporteur.  - Cet amendement est lourd d'incertitudes. Présenter, en lecture des conclusions de la CMP, une disposition qui modifie aussi substantiellement les conditions de recours à la solidarité nationale est en outre contestable. Nous aurons l'obligation d'y revenir. Les professionnels estiment que c'est un pas dans la bonne direction, mais un pas seulement.

Troisième sujet, la suppression du coefficient correcteur en faveur de certains établissements de santé. La commission était peu enthousiaste mais l'avait jugée légitime dès lors que l'horizon de la convergence était reporté à 2018. De nombreuses études ont été menées sur le sujet, qui toutes montrent un écart de charges entre les différentes catégories d'établissements au titre de leurs obligations légales et réglementaires. Doit-on vraiment attendre 2018 pour que les choses évoluent ? Dans la situation actuelle, on préserve l'hôpital public au nom de ses particularités mais on pénalise d'autres établissements en niant leur spécificité. Cette logique nous échappe.

Je conclurai par une remarque d'ordre général. Lors de l'examen de ce texte, nous entendions prendre nos responsabilités sur la question des déficits sociaux. L'effet dévastateur de la crise économique sur les recettes est une évidence ; mais voir la sécurité sociale s'installer dans une situation de déficit structurel est extrêmement inquiétant. M. Woerth ne l'a pas nié. En l'absence de mesures complémentaires, le retour de la croissance ne limitera pas l'ampleur du déficit. La dette cumulée, qui s'élève déjà à 92 milliards, pourrait augmenter encore de 170 milliards d'ici 2013. On ne peut la laisser à la charge des générations futures. C'est pourquoi nous souhaitions une hausse très modérée de la CRDS, dont le Gouvernement n'a pas voulu ; mais il a pris l'engagement que la question serait traitée dans le prochain projet de loi de financement, sur la base des propositions de la commission de la dette sociale qui sera bientôt créée autour de cinq sénateurs et de cinq députés. Je sais que lorsque M. Woerth prend des engagements, il les tient. Il faudra aussi se préoccuper des recettes.

Je me félicite de l'excellent climat qui a régné pendant les débats et de la qualité du dialogue avec le Gouvernement. Je remercie tous les rapporteurs et tous ceux qui ont participé à nos discussions. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale a pris beaucoup d'ampleur. Il répond très largement à nos souhaits passés. Je demande au Sénat d'adopter les conclusions de la CMP, même si elles ne sont pas totalement conformes à ce que nous voulions. L'essentiel est que nos concitoyens continuent de bénéficier de notre système de protection sociale dans des conditions globalement satisfaisantes. (Applaudissements à droite)

M. Eric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État.  - Le texte initial de ce projet de loi de financement était plus resserré que celui de ces deux dernières années. La discussion parlementaire a permis de l'enrichir dans de nombreux domaines ; 43 articles ont été ajoutés et 174 amendements adoptés. Il était indispensable de faire le point de la capacité de la sécurité sociale à affronter la situation de crise exceptionnelle à laquelle elle est confrontée.

La première orientation, c'est la sortie de crise. C'est pourquoi nous avons refusé d'augmenter la CRDS, tout en nous engageant à mettre en place un groupe de travail qui proposera des solutions pour le prochain PLFSS. De même, nous n'avons pas voulu toucher aux allègements de charges ; il faudra aborder la question l'année prochaine.

La deuxième orientation, c'est la poursuite des réformes pour assurer la pérennité de notre système. L'Ondam a quasiment été respecté en 2009. L'objectif est de contenir l'augmentation des dépenses d'assurance maladie tout en préservant les principes fondamentaux de notre système.

La troisième orientation, c'est la préservation des recettes de la sécurité sociale avec la réduction des niches sociales. Nous avons souhaité élargir le financement de la sécurité sociale pour qu'il pèse moins sur le travail. Vous avez su résister aux nombreux courriers, et supprimé des niches sur certains revenus du capital comme les plus-values mobilières et les intérêts des contrats d'assurance vie multi-supports, objets d'une campagne de désinformation.

Enfin, la dernière orientation, c'est la lutte contre les fraudes. Vous avez validé les grandes orientations de ce texte. Vous l'avez aussi fait évoluer à travers vos amendements. Je remercie tout particulièrement vos rapporteurs mais aussi la présidente Dini ainsi que le président About.

En matière de recettes, vous avez supprimé le droit à l'image collective des sportifs ; là aussi, il fallait résister aux pressions ! Vous avez également complété l'article doublant le taux des contributions de l'employeur pour les retraites chapeau afin de rendre ce dispositif socialement plus acceptable. Enfin, à l'initiative de M. About, vous avez créé une contribution sur les appels téléphoniques surtaxés dans le cadre des jeux à la télévision ou à la radio.

M. Nicolas About.  - Vous aurez peut-être de bonnes surprises : il y a des sous là-dedans !

M. Eric Woerth, ministre.  - Je l'espère !

Dans le domaine de l'assurance maladie, vous avez amélioré le cadre législatif de maîtrise des dépenses. Roselyne Bachelot y reviendra dans la discussion des amendements.

S'agissant des retraites, vos amendements ont sécurisé le dispositif proposé en vue de la réforme des majorations de durée d'assurance, tout en traitant de façon humaine et équilibrée certaines situations difficiles.

Dans le domaine des accidents du travail et des maladies professionnelles, vous avez précisé les conditions d'application du bonus-malus.

Le Gouvernement s'est fixé comme objectif 200 000 nouvelles offres de garde d'ici 2012. Le regroupement d'assistantes maternelles peut constituer un formidable outil, à condition d'éviter une excessive complexité administrative. Le Gouvernement est prêt à faire évoluer, dans les meilleurs délais, les dispositions législatives dans le sens attendu par le président Arthuis. Si cette évolution prenait la forme d'une initiative parlementaire, elle aurait notre entier soutien !

Enfin, en matière de fraude, vous avez voté l'expérimentation du contrôle des arrêts maladie des fonctionnaires par les CPAM, afin que tous les Français soient logés à la même enseigne, quel que soit leur statut.

M. Guy Fischer.  - Il faudrait faire pareil pour les patrons !

M. Eric Woerth, ministre.  - Ce texte est donc le résultat d'une parfaite collaboration entre Gouvernement et Parlement.

Le déficit de la sécurité sociale va rester pour plusieurs années à un niveau élevé, autour de 30 milliards, après le décrochage de 2009 et 2010. Ce n'est pas soutenable et, une fois la crise passée, nous devrons approfondir les réformes pour revenir à un niveau de déficit plus maîtrisé.

Le débat sur les solutions de l'après-crise va commencer dès l'année prochaine. La commission de la dette sociale, composée de cinq députés et cinq sénateurs, se réunira au printemps 2010 ; sur la base d'un rapport du Gouvernement, elle remettra ses conclusions en juin pour préparer le prochain PLFSS. Il ne s'agit pas de gagner du temps, mais de travailler main dans la main pour trouver des solutions.

Nous nous reverrons donc très vite pour garantir ensemble la pérennité de notre système de protection sociale. Aujourd'hui, j'espère que vous confirmerez votre soutien à notre politique en votant le texte de la CMP, ainsi que les six amendements présentés par le Gouvernement. (Applaudissements à droite)

M. Guy Fischer.  - Avant tout, je salue le travail des rapporteurs, qui nous a permis d'avoir un échange de qualité : nos débats auront été riches en confrontations, au sens noble du terme.

Je regrette que Gouvernement et majorité aient pris le parti du « laisser filer ». Les déficits astronomiques vous invitaient pourtant à agir, non seulement sur les dépenses, mais aussi sur les ressources ! Nous vous avons proposé de taxer les parachutes dorés, les stock-options et autres retraites chapeaux, bref, d'assujettir tous les revenus du travail aux cotisations sociales. De même, nous avons plaidé, en vain, pour la suppression du bouclier fiscal, grâce auquel les plus riches échappent à leurs obligations de solidarité.

En 2007, 10 000 foyers fiscaux ont déclaré pour un milliard de stock-options ; 2 500 grands patrons ont cumulé 2,5 milliards en parachutes dorés ! Il est inadmissible que de telles sommes échappent aux cotisations sociales. Le doublement du forfait social est une avancée, mais il faut aller plus loin, au nom de la justice sociale et pour garantir la pérennité de notre système. L'amendement adopté en CMP sur les retraites chapeau nous laisse sceptiques ; la taxation dès le premier euro aurait été plus équitable.

Vous poursuivez cette année encore votre politique d'exonération de cotisations sociales à l'égard des entreprises. Ces parts de salaires socialisées sont pourtant la propriété des salariés : vous ne pouvez les utiliser à votre guise ! D'autant que ces exonérations sont de véritables trappes à bas salaires, accentuant la paupérisation des salariés et asphyxiant la sécurité sociale.

A l'heure actuelle, nous assistons à un écrasement des salaires et des retraites : nos concitoyens y sont très sensibles.

Concernant le financement de la branche maladie, nous regrettons que vous n'ayez pas mis l'industrie pharmaceutique un peu plus à contribution. Pourtant, les laboratoires se portent bien : le premier groupe pharmaceutique français, numéro quatre mondial, affiche une hausse de 6,4 % de son bénéfice net consolidé, qui s'élève à 1,4 milliard, et le laboratoire Ipsen annonce une hausse de son chiffre d'affaires de 5,4 %, soit moins que le laboratoire lyonnais Boiron qui a vu son chiffre d'affaires croître de 7,5 %. Or, vous préférez recourir au mécanisme théoriquement exceptionnel de l'année dernière, à savoir l'instauration d'une taxe sur les organismes d'assurance complémentaire, au nom, cette année, de la lutte contre la pandémie de grippe A. Cette explication n'est pas crédible : votre ministère a acheté 94 millions de doses de vaccins, soit un coût de 712 millions. Or, la contribution des organismes d'assurance maladie complémentaire, qui correspond à leur prise en charge habituelle de 35 %, se montera à 870 millions. Au mieux, les mutuelles contribueront plus que ce qu'elles devraient ; au pire, il ne s'agit que d'un prétexte pour les contraindre à participer encore un peu plus au financement de notre système. D'ailleurs, ces sommes seront versées à la Caisse nationale d'assurance maladie et non à l'Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (Eprus).

De plus, nous dénonçons le mouvement assurantiel actuel. Qu'il s'agisse du déremboursement de plusieurs centaines de médicaments ou de la création du secteur optionnel, nous assistons à une substitution progressive de la sécurité sociale par les organismes complémentaires, ce qui fragilise notre pacte social et le principe selon lequel chacun contribue selon ses capacités et perçoit selon ses besoins.

Le modèle vers lequel vous nous menez, inspiré du système américain, est injuste car il repose sur la seule capacité contributive des assurés : seuls les contrats les plus chers prendront en charge le secteur optionnel. Ce secteur étant appelé à s'étendre, notamment parce qu'il siphonnera le secteur 1, les inégalités vont s'accroître et les patients les plus démunis seront fragilisés.

Nous nous étonnons aussi de l'amendement déposé en commission mixte paritaire par notre rapporteur général concernant la couverture d'assurance des médecins libéraux par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux (Oniam). Initialement prévue pour les seuls obstétriciens, cette mesure a été étendue à tous les généralistes. Notre rapporteur général aurait été mieux inspiré de présenter cet amendement en séance publique, car attendre la commission mixte paritaire pour proposer ce dispositif s'apparente à un dévoiement de procédure. (M. Alain Vasselle proteste)

Sur le fond, il fallait agir car ce ne sont pas aux enfants de médecins d'assumer financièrement les erreurs médicales de leurs parents. Mais il aurait fallu prévoir des règles plus strictes à l'égard des assureurs, afin d'éviter qu'ils n'en profitent pour réduire leurs protections.

Enfin, nous sommes totalement opposés à l'article 29 de ce projet de loi de financement concernant les affections de longue durée (ALD). Nous voulions la suppression de cet article qui va réduire la prise en charge à 100 % des patients en ALD. On assiste là à la première attaque frontale contre le remboursement de ces affections. Bien sûr, les enjeux sont très importants : M. Vasselle estime qu'il est encore possible de trouver de l'argent dans les budgets hospitaliers et sur les ALD. On est d'accord ?

M. Alain Vasselle, rapporteur.  - Ce n'est pas ainsi qu'il faut interpréter mes propos !

M. Guy Fischer.  - C'est pourtant bien ce que vous faites ! Chacun se souvient de vos propos discourtois tenus à l'encontre de notre groupe lors de l'examen de cet article. Je ne les ai pas encore digérés ! Nous ne sommes pas du tout convaincus. Vous avez tenté de nous faire croire que cette disposition ne changeait rien au fond...

M. Alain Vasselle, rapporteur.  - Vous comprenez ce que vous voulez bien comprendre !

M. Guy Fischer.  - ...et que les patients seraient toujours indemnisés de la même manière.

M. Alain Vasselle, rapporteur.  - Vous êtes enfermés dans votre idéologie !

M. Guy Fischer.  - Pourquoi changer les règles si cela n'emporte aucune conséquence ? Nous sommes encore plus inquiets après le passage en commission mixte paritaire, car les propos y étaient quelque peu différents de ce qui s'est dit ici. M. Jean-Pierre Door, rapporteur à l'Assemblée nationale, a estimé qu'il fallait réformer un système « très généreux ». C'est lâché ! Les personnes âgées et les personnes qui souffrent de maladie chronique doivent savoir à quoi s'en tenir ! On va les faire payer !

M. Alain Vasselle, rapporteur.  - Les patients en ALD ne sont pas que des personnes âgées...

M. Guy Fischer.  - C'est ce que je viens de dire !

M. Alain Vasselle, rapporteur.  - Ils continueront à être pris en charge à 100 % ! Ce que vous dites est complètement faux !

M. Guy Fischer.  - S'il est vrai que nous avons un des systèmes qui accompagnent le mieux les malades chroniques, il n'est pas généreux, mais solidaire ! Au-delà d'une simple querelle sémantique, c'est bien d'une différence de conception dont il s'agit, et il est bien plus facile de s'attaquer à une mesure généreuse que solidaire ! Nos craintes étaient donc fondées. Certes, il ne s'agit pas de la première, ni de la seule attaque à l'encontre de mesures solidaires.

Concernant la branche retraite, nous n'acceptons pas la suppression de la majoration des durées d'assurance dont bénéficiaient les femmes depuis 1976. (Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre, s'exclame) Cette majoration permettait de compenser les inégalités salariales dont elles étaient victimes et qui persistent encore aujourd'hui : le salaire des femmes équivaut à 73 % de celui des hommes et les retraites des femmes ne représentent que 62 % de celles des hommes : ainsi, 50 % des femmes à la retraite touchent moins de 900 euros par mois. En décidant de ne garantir aux femmes que quatre trimestres supplémentaires, vous risquez de les priver totalement ou partiellement des quatre trimestres restant ce qui réduira d'autant leurs pensions. Ce mauvais coup s'ajoute malheureusement à la suppression de l'allocation équivalent retraite et à la réintégration d'une condition d'âge pour bénéficier de la pension de réversion. En deux ans, ces trois mesures vont réduire les retraites des femmes, frappant leur pouvoir d'achat et leur qualité de vie. Ces décisions augurent mal du débat sur les retraites en 2010. La voie est déjà tracée : allongement pour tous de la durée de cotisations. Nous serons très vigilants et mobilisés, notamment sur la question de la reconnaissance de la pénibilité.

Pour ce qui est de la branche accidents du travail, maladie professionnelle, (ATMP) d'importants efforts restent à faire. Par respect pour les victimes, et parce que vous refusez l'instauration d'une réparation intégrale, il faudrait fixer le montant de l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (Acaata) à 100 % du Smic, et il conviendrait de permettre aux couples pacsés de bénéficier de la rente viagère que touchent les couples mariés. Il aurait d'ailleurs fallu rétablir la contribution au Fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (Fcaata) que vous avez supprimée l'année dernière. Cette contribution ne doit en effet pas être supportée par toutes les entreprises, mais par celles qui ont exposé leurs salariés à l'amiante.

J'en viens à la branche famille. Vous avez refusé l'extension de la pension de réversion aux couples pacsés et la modulation de l'allocation de rentrée scolaire en fonction du niveau d'études et de la nature de l'enseignement poursuivi. Pourtant, une rentrée dans l'enseignement professionnel coûte entre deux et trois fois plus cher que dans l'enseignement général. Les seules mesures nouvelles ont trait à l'extension du prêt pour l'amélioration de l'habitat aux assistants maternels et au regroupement des assistantes maternelles. Ce mode de garde, s'il peut constituer un complément aux crèches, ne doit pas les remplacer, d'autant que les familles, monoparentales y sont très attachées : 65 % des familles réclament plus de crèches, loin devant l'augmentation du nombre d'assistants maternels. Aujourd'hui, 350 000 places supplémentaires seraient nécessaires. En raison de ce déficit grave, seul un bébé sur dix peut être accueilli en crèche ou en halte-garderie. Pour changer la donne, il faut modifier radicalement le cours des politiques familiales.

Comme de très nombreux acteurs de la politique familiale, nous demandons l'octroi des allocations familiales dès le premier enfant, car c'est dès sa naissance que les frais augmentent.

A l'heure où, sous l'impulsion du Gouvernement, s'ouvre un débat sur l'identité nationale, je vous rappelle combien nos concitoyens sont attachés aux services publics. Selon un sondage réalisé par le CSA et Le Parisien, 60 % des Français considèrent comme aussi importants que la Marseillaise ou le drapeau tricolore, les services publics.

M. Nicolas About.  - Après la langue française et les droits de l'homme, quand même !

M. Guy Fischer.  - A n'en pas douter, ils sont au moins aussi nombreux, si ce n'est plus encore, à considérer notre protection sociale comme faisant partie de leur patrimoine. C'est pourquoi nous voterons contre ce projet de loi de financement pour 2010 car il porte en germe la disparition de ce système spécifique, issu du Conseil national de la Résistance, et qui fait la fierté de notre pays.

M. Alain Vasselle, rapporteur.  - Ce fut un discours idéologique !

M. Nicolas About.  - Compte tenu de la situation économique, il s'agit d'un projet de loi de financement d'attente qui présente trois caractéristiques : une relative maîtrise des dépenses d'assurance maladie, et c'est son seul aspect véritablement positif ; des recettes très lourdement marquées par la conjoncture qui nous conduisent à un déficit historique ; enfin, un nombre extrêmement réduit de mesures nouvelles. Cette dernière caractéristique est directement liée à la précédente et nous comprenons bien la stratégie gouvernementale consistant à accompagner la sortie de crise en ne pressurant pas le système au creux de la vague.

Dans le même temps, il est insupportable de laisser filer les déficits sans rien faire. MM. les rapporteurs l'ont déjà dit. Pour clarifier la situation, nous avons proposé que l'État reprenne à sa charge la partie conjoncturelle du déficit assumée par l'Acoss. Nous nous réjouissons que le Gouvernement n'ait pas fermé la porte à cette solution. Nous attendons beaucoup de la commission de la dette sociale que vous vous êtes engagés, madame, monsieur les ministres à réunir dans les plus brefs délais afin que des décisions énergiques soient prises dès le printemps prochain.

Si la question du déficit a été abordée dans un esprit d'ouverture, nous regrettons que la commission mixte paritaire soit revenue sur deux points importants du texte adopté par le Sénat.

Nous regrettons que la CMP soit revenue sur la date de 2014 pour l'achèvement de la convergence tarifaire car notre groupe, attaché à la convergence intrasectorielle, soutient également le volontarisme politique en matière de convergence globale.

M. Alain Vasselle, rapporteur.  - Très bien !

M. Nicolas About.  - Même regret concernant l'article sécurisant les regroupements d'assistants maternels, adopté à l'unanimité par le Sénat, moins une abstention. Le dispositif proposé, qui autorisait notamment la délégation d'accueil, prenait acte de l'expérience fructueuse menée par M. Arthuis en Mayenne en corrigeant la rigidité de la convention imposée par la Cnaf. Sa suppression par la CMP sonnait comme une remise en question de la libre administration des départements, difficilement acceptable au Sénat. Aussi nous réjouissons-nous que le Gouvernement ait trouvé un accord avec M. Arthuis selon lequel il présentera sa proposition de loi au nom de notre groupe dès le 14 janvier.

Hélas !, la remise en cause des acquis du Sénat se poursuit aujourd'hui avec certains des amendements présentés par le Gouvernement. Si l'amendement rétablissant l'article 28 dans sa rédaction initiale pour neutraliser le surcoût des dépenses liées à la grippe A au regard de l'Ondam peut encore se comprendre, l'amendement supprimant l'article 32 bis A l'est moins. Pour nous, les établissements sociaux, parce qu'ils supportent de lourdes obligations légales et réglementaires, doivent bénéficier d'un coefficient correcteur dans la convergence tarifaire.

Cela dit, il n'est pas question de noircir le tableau. La CMP a conforté le texte du Sénat, notamment sur les retraites chapeau et le droit à l'image collective des sportifs, de même que nos amendements tendant à préciser le contenu du tarif d'hébergement en maisons de retraite et visant à créer, à ma modeste initiative, une contribution sur les jeux télévisés ou audio diffusés. Il ne nous semble pas anormal que la protection de l'Oniam, en cas de condamnation judiciaire d'un professionnel de santé couvert par son assurance, soit restreinte aux professions de la périnatalité. Un tel dispositif est indispensable, faute de quoi nous n'aurions bientôt plus d'obstétriciens. En revanche, nous devrons peut-être revenir sur la question de la protection par l'Oniam des médecins insolvables qui pourrait inciter certains professionnels à organiser leur insolvabilité. Pour ce qui concerne l'amendement relatif au délai de choix pour l'attribution de la majoration parentale d'assurance vieillesse, je me réjouis que l'on ait retenu la position du Sénat.

En conclusion, même si la CMP est décevante sur des points ponctuels, elle est globalement positive. Dans la perspective du rendez-vous du début de l'année sur la dette sociale, l'immense majorité du groupe votera ce texte d'attente. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Yves Daudigny.  - Texte décevant.

M. Bernard Cazeau.  - Cette CMP ne manquait pas d'intérêt... Quelques points ont été clarifiés et améliorés, le rapporteur général l'a dit. Mais, que le Gouvernement présente après la CMP des amendements -comment dire ?- polémiques montre combien il fait peu de cas de sa majorité et du Parlement ! De toute façon, c'est devenu l'habitude...

Nos débats, de bonne tenue, n'ont pas abouti : le tabou financier n'a pas été levé ; l'omerta gouvernementale, qui interdit de poser les questions qui fâchent, a mis au pas les orateurs les plus intrépides de la majorité. N'est-ce pas, monsieur Vasselle ? (M. Guy Fischer renchérit ; M. Nicolas About s'exclame)

M. Alain Vasselle, rapporteur.  - Ne me provoquez pas !

M. Bernard Cazeau.  - Monsieur About, vous-même, fort vindicatif à l'ouverture des débats, vous avez sombré dans un mutisme de bon aloi... Au fil des jours, la combativité constructive a cédé la place à une passivité complice.

Pourtant, la situation est dramatique : nous serons trois fois plus déficitaires au sortir de la crise et le dérapage conjoncturel s'est transformé en déficit structurel. La stabilisation promise repose sur des prévisions béatement aventureuses. Une croissance annuelle de 5 % de la masse salariale à partir de 2011 ? Mais au plus fort de l'expansion à la fin des années 1990, celle-ci ne progressait que de 4 % par an ! Il me souvient que, fin 2008, vous promettiez le retour à l'équilibre pour 2012... Même en reprenant vos hypothèses hypervolontaristes, comme le disait poliment l'un de nos collègues, nous accumulerons au moins 135 milliards de déficit entre 2009 et 2013 qui s'ajouteront à la dette sociale. Pour autant, il faudrait patienter pour ne pas hypothéquer la sortie de crise. Est-ce une raison pour hypothéquer la sécurité sociale ? Vous préférez, de manière caricaturale, dire aux Français : « Dormez tranquilles, braves gens ! » Mais les Français savent et leur inquiétude, précisément, retarde la reprise. Comment voulez-vous que les Français consomment quand ils craignent une hausse de leur complémentaire, des soins moins remboursés et une retraite détériorée ? Monsieur Woerth, la compétitivité de l'économie n'est pas seulement fonction du taux de prélèvements obligatoires, mais aussi de la confiance de la société dans ses institutions de prévoyance sociale. D'où la nécessité de stopper l'hémorragie. Mais ce texte ne comporte aucune mesure en faveur du rétablissement des comptes : pas de reprise de dette ou un peu...

M. Alain Vasselle, rapporteur.  - Non ! Rien du tout !

M. Bernard Cazeau.  - ...aucune action efficace sur les recettes, un relèvement historique du plafond de l'Acoss à 65 milliards, aucune décision sur le taux de la CRDS, malgré les interventions de MM. Arthuis et Jégou. Bref, c'est la fuite en avant !

M. Alain Vasselle, rapporteur.  - Attendez la commission sur la dette sociale !

M. Bernard Cazeau.  - Quant aux perspectives d'économies, elles reposent sur de telles affirmations qu'on peine à les commenter sans sourire : un hôpital qui coûterait moins cher parce qu'on changerait son mode de tarification, des soins de villes qui n'augmenteraient presque pas alors que des négociations tarifaires sont en cours, des prescriptions de médicaments spontanément économes... Monsieur Woerth, j'ai lu vos propositions dans Le Monde. Mais nous ne sommes ni dans les années 1960 où les gens ne se soignaient pas ni dans les années 1980 où les gens avaient peur d'aller à l'hôpital ; aujourd'hui, les gens demandent des soins, ils vont à l'hôpital car ils savent qu'ils y trouveront une infirmière, une aide-soignante. Et encore, pas toujours, et peut-être de moins en moins... Mme Bachelot le sait, mais elle préfère négocier avec les syndicats médicaux chapeautés par d'anciens rétrogrades tenant de cette liberté tarifaire si destructrice pour la sécurité sociale. Il faut tenir compte de l'évolution de notre société, inventer un nouveau mode de gouvernance avec les professions de santé, la médecine de ville. Certes, c'est difficile ! Mais, depuis des années, vous ne faites rien en ce sens !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Nous avons bien commencé !

M. Bernard Cazeau.  - Seules décisions notables de ce texte, celles consistant à taper sur les assurés sociaux ! Nous refusons cette politique de déremboursement, de franchise et de redevance, au nom de la justice sociale.

Les contributions doivent varier selon les revenus de la personne et non selon son état de santé. Avec les mécanismes d'individualisation de la dépense que vous multipliez, plus les années passent et plus les malades paient pour eux-mêmes. Entre 2001 et 2009, les coûts directs de santé dans le budget des ménages, hors cotisations sociales, ont augmenté de 40 à 50 %. Les chiffres sont pires encore pour les personnes âgées.

Vous dénaturez ainsi la philosophie de l'assurance maladie. Le désengagement de la sécurité sociale, dont le fonctionnement est de plus en plus calqué sur celui des assurances individuelles, ne saurait plus durer. C'est avant tout à ceux qui bénéficient de revenus importants qu'il incombe de participer à la solidarité collective. La Cour des comptes a tracé des pistes en 2008, estimant à 2 ou 3 milliards annuels les recettes qui résulteraient d'un assujettissement des revenus non salariaux à une fiscalité normale. Qu'attendez-vous pour en finir avec les niches sociales ? Quand donc vous rendrez-vous à l'évidence dont la grande majorité des sénateurs, toutes travées confondues, a depuis longtemps pris conscience : la sécurité sociale a besoin de nouvelles recettes pérennes et dynamiques ? Temporiser comme vous le faites, c'est approuver la privatisation rampante de la prise en charge des soins (M. Guy Fischer et Mme Raymonde Le Texier approuvent) et le développement des inégalités dans l'accès à la santé. Nous ne pouvons le cautionner. C'est la raison pour laquelle nous voterons contre votre projet. (Applaudissements à gauche)

M. Yvon Collin.  - Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 est marqué par un triste record : 30 milliards de déficit. Et la fuite en avant se poursuit. Tout le monde en convient : la situation de notre système de protection sociale est alarmante. Certes, la crise, qui pèse sur les recettes, aggrave la situation. Mais la reprise de la croissance, même dans les hypothèses les plus favorables, ne suffira pas à rétablir l'équilibre de nos comptes sociaux, l'ampleur des besoins ne faisant que s'accentuer sous l'effet des évolutions démographiques.

Face à ces difficultés structurelles, votre texte, madame la ministre, reste frileux. Nous ne pouvons laisser nos enfants ou nos petits-enfants devant un tel abîme. Des réformes de fond s'imposent, dans lesquelles vous ne vous engagez pas.

Certes, vous faites de la chasse à certaines niches sociales l'une des mesures phare de votre texte ; vous doublez la contribution employeur sur les retraites chapeau et le taux du forfait social sur un certain nombre d'assiettes exonérées : on ne peut que s'en féliciter. Mais il fallait aller plus loin, notamment sur des niches dont la justification reste très contestable.

Avec plusieurs de mes collègues du RDSE menés par M. Barbier, nous avions déposé des amendements qui, dans un souci d'équité sociale et d'efficacité, proposaient d'exclure l'augmentation de la CSG et de la CRDS des impositions directes prises en compte pour l'application du bouclier fiscal. Je regrette vivement que ces amendements n'aient pas eu le soutien de notre assemblée alors qu'il s'agit d'une étape incontournable (M. Guy Fischer approuve) à laquelle nous n'échapperons pas. On ne peut plus demander aux seuls Français qui ont des revenus modestes de supporter le règlement de la dette.

Je regrette également la suppression par la CMP d'un amendement défendu par M. Barbier et adopté par le Sénat, qui imposait aux sages-femmes de communiquer au médecin traitant les informations qu'elles recueillent lors des consultations de contraception et de suivi gynécologique de prévention, dans le souci d'un meilleur suivi de la patiente. Nous ne comprenons pas en quoi cette mesure pose problème.

Je regrette, enfin, la méthode employée par le Gouvernement qui a, à l'issue de la CMP, présenté des amendements modifiant substantiellement la rédaction. Après la deuxième délibération, hier soir, sur la première partie du projet de loi de finances, en voici en somme une autre, sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Vous insistez pour écarter les dépenses exceptionnelles liées à la grippe A de la procédure d'alerte, disposition pourtant supprimée par le Sénat, suivi en cela par la CMP. Il s'agirait, dites-vous, d'éviter le déclenchement d'une alerte sur un risque de dépassement lié à une situation exceptionnelle. La vérité est que vous faites tout pour éviter d'avoir à prendre les mesures nécessaires à un redressement.

C'est par le même procédé que vous réservez la couverture assurance aux chirurgiens, anesthésistes et gynécologues-obstétriciens alors que la représentation nationale en a prévu l'extension à tous les médecins libéraux. (M. Alain Vasselle, rapporteur, le confirme) La plupart des initiatives raisonnées et responsables que nous avions adoptées pour fournir de nouvelles recettes aux comptes de la sécurité sociale ont été retirées à la dernière minute du texte définitif. (M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis, le confirme)

Comme lors de l'examen du projet de loi Hôpital, nous étions unanimes, sur ces bancs, pour vous reconnaître une réelle qualité d'écoute. Mais ce que vous faites aujourd'hui, en revenant sur les conclusions de la CMP, n'est pas de nature à faciliter le dialogue (Mme Raymonde Le Texier le confirme), d'autant que le Sénat se prononçant après l'Assemblée nationale, nous sommes requis de le faire en un seul vote.

Vous comprendrez que les motifs de satisfaction n'étant pas suffisants, quinze membres de mon groupe ne pourront pas se prononcer en faveur de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale. (Applaudissements à gauche)

M. Yves Daudigny.  - A quoi sert la représentation nationale ? Les conditions d'examen de ce texte témoignent du mépris dans lequel ce Gouvernement tient le Parlement, et peut-être du peu de considération qu'il accorde à la loi de financement.

Un débat qui après cinq jours s'achève dans la nuit du dimanche 15 novembre à trois heures du matin, sur les comptes de la branche famille, qui méritaient mieux... L'obstination de l'Élysée à faire passer, coûte que coûte, le projet de loi relatif à la privatisation de La Poste ayant repoussé l'examen de ce texte, le débat thématique sur les conséquences de la pénibilité au travail a été purement et simplement supprimé.

M. Alain Vasselle, rapporteur.  - La faute à qui ?...

M. Yves Daudigny.  - Alors que nous nous étions félicités l'an dernier d'avoir lancé ce type de débat, nous n'avons plus eu cette année qu'à nous plier aux desiderata du Gouvernement sur l'ordre du jour.

Le vote du Parlement est si formel qu'au-delà d'une application, très stricte, de l'article 40, qui anéantit une grande partie de nos propositions, vous trouvez encore moyen de marchander le retrait d'amendements contre la promesse de textes réglementaires. Ainsi de la question des sanctions prévues en cas de dépassement de la date limite fixée pour l'agrément d'accords salariés pour l'agrément du montant de la contribution financière des régimes d'assurance maladie à la mise en place des agences régionales de santé ou des conditions de sortie d'une affection de longue durée.

M. Guy Fischer.  - Et le forfait hospitalier !

M. Yves Daudigny.  - Comptez sur notre vigilance, madame la ministre, pour vérifier que ces engagements seront tenus. Car vous n'avez pas tenu parole pour l'ordonnance prévue par l'article 115 de la loi Hôpital. Je veillerai personnellement à l'engagement que vous avez pris concernant la prestation de compensation du handicap en contrepartie de l'abandon de l'amendement de péréquation soutenu par notre collègue Paul Blanc.

Le vote du Parlement est si formel que le relèvement du plafond de trésorerie de l'Acoss ou la création de franchises à charge des assurés sociaux sont décidés hors de cet hémicycle, par le Gouvernement. Nous verrons ce que dira le Conseil d'État de la nouvelle hausse du forfait hospitalier...

M. Guy Fischer.  - 13,5 %, c'est scandaleux !

M. Yves Daudigny.  - ...qui, ajoutée au nouveau déremboursement des médicaments, pourrait bien constituer un reste à charge tel pour les assurés qu'il entrave leur accès aux soins et porte atteinte au droit fondamental à la santé.

Mme Raymonde Le Texier.  - Évidemment !

M. Yves Daudigny.  - Le vote du Parlement est si formel qu'après accord en commission mixte paritaire, le Gouvernement s'autorise à déposer de nouveaux amendements et nous demande de revenir, à peu de chose près, au projet initial. (Mme Roselyne Bachelot-Narquin proteste)

Le Sénat avait supprimé l'article 28 qui excluait les dépenses liées à la pandémie grippale de l'évaluation du risque de dépassement de l'Ondam par le comité d'alerte. Or, avec l'article 6 rectifiant le montant de la contribution des régimes obligatoires d'assurance maladie au financement de I'Eprus et l'article 10, qui prévoit une contribution des assurances complémentaires, vous vous déchargez sur l'assurance maladie et les mutuelles des dépenses liées à une pandémie qui relève pourtant bien de la santé publique, donc de la responsabilité de l'État. Comment prétendre, sans contradiction, intégrer ces dépenses à l'assurance maladie, et pas à l'objectif national de dépenses d'assurance maladie lorsqu'il est soumis à l'appréciation du comité d'alerte ? En nous demandant de revenir sur un vote confirmé en CMP, vous voulez nous faire manger notre chapeau.

Toutes nos propositions ont été rejetées. Les raisons qui nous ont convaincu de voter contre ce texte subsistent entièrement.

Ce budget est fondé sur des hypothèses de croissance hypocrites, irréalistes insincères et irresponsables. Le Gouvernement table sur une augmentation de la masse salariale de 5 % par an alors qu'entre 1998 et 2000, les comptes de la sécurité sociale étant équilibrés, elle ne dépassait pas 3,7 % par an. Il prévoit également une hausse annuelle du PIB de 2,5 %, mais n'ignore pas que ces chiffres devront être revus à la baisse.

C'est un projet irresponsable, qui ne comporte aucune mesure structurelle propre à réformer un système menacé d'asphyxie : le déficit écrasant menace aujourd'hui l'avenir de l'organisation solidaire de notre protection sociale, mais le Gouvernement regarde couler la barque. Quel est son objectif ? A court terme la victoire aux régionales, à long terme une France privatisée : tous nos services publics -justice, police, éducation nationale, poste, hôpital- font aujourd'hui les frais de cette politique. (Applaudissements à gauche) Les agences régionales de santé vont coûter fort cher aux régimes sociaux, mais le ministère demande au Parlement un chèque en blanc ! Son inertie s'explique par son dogmatisme : il était possible d'agir sur les niches fiscales qui nous font perdre 70 milliards d'euros de recettes.

M. Guy Fischer.  - Il ne le veut pas !

M. Alain Vasselle, rapporteur.  - C'est fait en partie.

M. Yves Daudigny.  - Ce sont donc les assurés qui devront supporter la charge du déficit.

Les inégalités face à la santé s'aggravent, et ce ne sont pas les nouvelles conditions de sortie du régime des affections de longue durée, la division par deux de la majoration de durée d'assurance des femmes ayant élevé un enfant, la hausse du forfait hospitalier, les déremboursements de médicaments ou la fiscalisation des indemnités journalières des accidentés du travail qui les résorberont.

« Vous n'avez pas le droit, madame la ministre de la santé, de ne pas dire la vérité aux Français » : ainsi s'exprimait la majorité en 2002, alors que les comptes sociaux étaient à l'équilibre. (Applaudissements à gauche) Que ne la dites-vous aujourd'hui, madame la ministre ? Que n'annoncez-vous un déficit de 170 milliards d'euros et la fin de la protection sociale solidaire en France ?

M. Nicolas About.  - Qu'avez-vous fait de la croissance ?

M. Yves Daudigny.  - « Nos divergences dans ce débat, ce ne sont pas seulement nos approches respectives des comptes sociaux. Je crois plus globalement que ce sont bien des divergences fondamentales qui nous opposent sur les orientations que nous devons donner à nos politiques sociales et sur les droits sociaux dont doivent pouvoir bénéficier nos concitoyens. » Nous n'avons rien à changer à ce constat porté il y a sept ans : c'est pourquoi nous ne voterons pas ce projet de loi. (Applaudissements à gauche et sur les bancs du RDSE)

Mme Raymonde Le Texier.  - Je voudrais revenir sur une des principales injustices comprises dans ce texte : la révision de la majoration de durée d'assurance (MDA), ces huit trimestres de retraite jusqu'ici perçus par les femmes au titre de l'éducation des enfants. Cette compensation est divisée par deux au nom de la lutte contre les discriminations et les inégalités. C'est fort intéressant, car c'est justement pour tenter de réduire les inégalités économiques entre les hommes et les femmes, en particulier devant la retraite, que la MDA a été instituée au début des années 1970.

M. Guy Fischer.  - Par la loi Boulin, en effet.

Mme Raymonde Le Texier.  - Nous sommes tous d'accord pour dire que cette compensation doit être accordée à un homme ayant élevé seul ses enfants. La MDA est d'ailleurs parfaitement compatible avec le droit européen : les prestations du régime général n'entrent pas dans le champ des dispositions communautaires qui imposent un traitement identique des hommes et des femmes. Quant à savoir si le délai d'option ouvert aux parents pour le partage de la MDA doit être de trois ou quatre ans, ce débat est puéril. En revanche, étant donné que vous avez décidé de partager la MDA entre les hommes et les femmes sans augmenter le budget afférent, de jouer les pères contre les mères, la question est de savoir si les inégalités entre les hommes et les femmes ont suffisamment reculé pour justifier cette perte de revenus pour ces dernières.

Neuf femmes retraitées sur dix bénéficient actuellement de la MDA, qui représente 20 % de leurs pensions : la réforme n'est donc pas anodine ! Ne me dites pas qu'elle ne concerne que la deuxième année de majoration : cela ne change rien à l'affaire.

Les salaires des femmes sont en moyenne de 27 % inférieurs à ceux des hommes ; 87 % des smicards sont des smicardes ! Si l'écart de rémunération s'est réduit entre les années 1970 et le milieu des années 1990, il s'est maintenu depuis. A cela s'ajoute le travail partiel, généralement subi, qui touche à 80 % des femmes : près d'une femme sur trois travaille à temps partiel contre un homme sur vingt. Pas moins de 78 % des emplois non qualifiés sont occupés par des femmes : outre les immigrés, ce sont bien les femmes qui constituent la principale réserve de main-d'oeuvre bon marché et corvéable à merci.

Ces inégalités se répercutent sur les retraites. Selon le Conseil d'orientation sur les retraites, les pensions des hommes sont actuellement deux fois plus élevées que celles des femmes. Au sein de la génération de 1965-1974 qui partira prochainement à la retraite, cet écart devrait se réduire à 40 %. Mais un tiers des femmes vivant avec moins de 600 euros par mois sont des retraitées. Tout démontre une féminisation de la pauvreté dans notre pays.

Un dernier chiffre enfin, qui prouve une nouvelle fois la discrimination dont les femmes sont l'objet : elles consacrent trois fois plus de temps que les hommes à l'éducation de leurs enfants. Quand la parité aura été atteinte sur ce point, et quand les femmes recevront le même salaire que les hommes pour une tâche équivalente, alors on pourra réformer la MDA. Hélas, ce n'est pas pour demain. L'autisme du Gouvernement sur ce sujet nous fournit une nouvelle raison de ne nous opposer à ce projet de loi. (Applaudissements à gauche)

M. le président.  - Le Gouvernement souhaite-t-il répondre ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Nous avons répondu par avance.

La discussion générale est close.

Discussion du texte de la CMP

M. le président.  - En application de l'article 42, alinéa 12 du Règlement, le Sénat examinant le texte de la CMP après l'Assemblée nationale, il se prononce par un seul vote sur l'ensemble du texte en ne retenant que les amendements acceptés par le Gouvernement.

Article 4 (pour coordination)

M. le président.  - Amendement n°1, présenté par le Gouvernement.

I. - Alinéa 3, tableau

Rédiger ainsi le tableau :

                     (en milliards d'euros)

 

Prévisions de recettes

Objectifs de dépenses

Solde

Maladie

162,3

173,8

-11,5

Vieillesse

178,4

187,9

-9,5

Famille

56,6

59,7

-3,1

Accidents du travail et maladies professionnelles

12,1

12,6

-0,5

Toutes branches (hors transferts entre branches)

403,8

428,4

-24,6

II. - Alinéa 5, tableau

Rédiger ainsi le tableau :

                    (en milliards d'euros)

 

Prévisions de recettes

Objectifs de dépenses

Solde

Maladie

139,3

150,8

-11,5

Vieillesse

90,7

98,9

-8,2

Famille

56,1

59,2

-3,1

Accidents du travail et maladies professionnelles

10,5

11,2

-0,6

Toutes branches (hors transferts entre branches)

291,2

314,6

-23,4

M. Eric Woerth, ministre.  - Cet amendement de coordination tient compte de la modification de la dotation de l'assurance maladie à l'Eprus en 2009. L'argument vaut aussi pour l'amendement n°2 à l'article 7.

M. Alain Vasselle, rapporteur.  - La commission n'y voit pas d'objection.

M. Bernard Cazeau.  - Le groupe socialiste ne participera pas au vote sur les amendements du Gouvernement, parce qu'il ne souhaite pas cautionner cette mascarade ni s'immiscer dans les affaires internes de la majorité.

M. le président.  - Encore une fois, nous ne voterons que sur l'ensemble du texte.

Le vote de l'amendement n°1 et de l'article 4 est réservé.

Le vote de l'article 6 est réservé.

Article 7

M. le président.  - Amendement n°2, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 2, tableau

Rédiger ainsi le tableau :

                                 (en milliards d'euros)

 

Objectifs de dépenses

Maladie

173,8

Vieillesse

187,9

Famille

59,7

Accidents du travail et maladies professionnelles

12,6

Toutes branches (hors transferts entre branches)

428,4

Le vote de l'amendement n°2 et de l'article 6 est réservé.

Le vote des articles 9, 11, 12, 14, 17 bis A, 17 ter, 17 quater, 18 bis, 21, 22 et 23 est réservé.

Article 28 (supprimé)

M. le président.  - Amendement n°3, présenté par le Gouvernement.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

« En 2010, le surcoût induit par les dépenses exceptionnelles liées à la pandémie grippale n'est pas pris en compte par le comité d'alerte sur l'évolution des dépenses de l'assurance maladie pour l'évaluation, en application de l'article L. 114-4-1 du code de la sécurité sociale, d'un risque de dépassement de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie. »

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Ayant un très grand respect pour les travaux de la CMP, le Gouvernement n'a présenté à ses conclusions que six amendements, dont deux relèvent de la simple coordination.

Les autres prolongent la réflexion des deux assemblées, par exemple sur l'assurance responsabilité civile des médecins. Sur ce sujet, M. le rapporteur général a d'ailleurs raison d'estimer que le débat n'est pas encore arrivé à son terme. Pour le reste, le Gouvernement a traité un certain nombre de points dignes d'intérêt, dont l'adjonction n'a rien d'insultant pour le travail parlementaire. A ce propos, j'attire l'attention du rapporteur général sur le fait que le Gouvernement n'a souhaité rétablir que le premier paragraphe de l'article 28. (M. le rapporteur général en convient) Pour tout le reste, le Gouvernement a respecté les travaux de la CMP, bien qu'il n'approuve pas le sort fait à cet article.

J'en viens au comité d'alerte.

Lorsque l'Ondam a été conçu en septembre, il ne pouvait évidemment intégrer le coût de la pandémie à venir. D'ailleurs, nul ne propose aujourd'hui de réévaluation chiffrée en lien avec la grippe A. S'exprimant ce matin à l'antenne d'une radio périphérique, un éminent épidémiologiste estimait impossible de prévoir l'évolution de cette maladie, même à court terme.

Par nature, les dépenses induites par la pandémie échappent à toute régulation. Or, la procédure d'alerte débouche sur des mesures de redressement destinées à compenser les dépenses par des économies ultérieures, comme le blocage des revalorisations tarifaires alors même que des discussions seraient en cours.

M. Guy Fischer.  - On ne va quand même pas mettre les médecins à contribution !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - C'est à éviter dans les situations où ni les praticiens, ni les patients n'auraient la moindre responsabilité. Le comité d'alerte doit assurer une maîtrise des dépenses, non imposer des restrictions compensant une pandémie exceptionnelle.

M. Alain Vasselle, rapporteur.  - Je me limiterai à un simple commentaire, les dispositions ayant été adoptées par l'Assemblée nationale avec l'appui de son rapporteur, M. Bur.

Mme le ministre n'a formulé aucun argument nouveau, tout en mentionnant le risque pesant sur la revalorisation tarifaire lorsque le comité d'alerte intervient. Je suis surpris que ce comité ne puisse faire preuve de discernement dans la prise en compte des dépenses induites par la grippe A.

Au demeurant, celles-ci ne devraient pas excéder 400 millions d'euros au maximum, alors que l'alerte suppose un dépassement supérieur à 1 200 millions. La pandémie grippale ne saurait donc représenter autre chose qu'un « petit plus ».

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - L'argument est réversible.

M. Alain Vasselle, rapporteur.  - En tout état de cause, l'assurance maladie sera mise à contribution.

Le Gouvernement veut revenir à la rédaction initiale du premier paragraphe de l'article 28. J'en prends acte, tout en me félicitant qu'il se soit rallié à la position du Sénat pour le reste de l'article.

M. Jean-Jacques Jégou.  - Merci de laisser l'ancien rapporteur pour avis de la commission des finances s'immiscer dans cette discussion !

Je m'associe aux réflexions du rapporteur général.

Néanmoins, je regrette que le PLFSS omette les réflexions de la commission des finances, que ce soit à propos de la Caisse d'amortissement de l'aide sociale (Cades), des amendements examinés aujourd'hui ou de la fameuse convergence. Sur ce dernier thème, notre commission avait convaincu la Haute assemblée. Hier, M. le ministre du budget avait spécifiquement évoqué le dérapage des embauches hospitalières, ce dont le compte rendu analytique fait foi.

M. Eric Woerth, ministre.  - Je n'ai pas mentionné de « dérapage ».

M. Jean-Jacques Jégou.  - La différence entre la Haute assemblée et le Gouvernement tient à l'aspect statique du PLFSS. L'année prochaine montrera que nous avions raison, car il faudra prendre les mesures écartées aujourd'hui.

M. Guy Fischer.  - Il y aura la reprise !

M. Eric Woerth, ministre.  - J'ai parlé de dérapage exclusivement au sujet de la fonction publique territoriale, avec 40 000 créations annuelles de postes, alors que l'État en supprime 34 000.

Parlant de la fonction publique hospitalière, je me suis élevé contre l'idée d'une baisse des effectifs, alors que leur nombre s'est accru de plus de 10 % entre 2000 et 2007. Il peut y avoir des difficultés locales, mais globalement on recrute dans les hôpitaux. (M. Bernard Cazeau manifeste son désaccord)

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Plus de 100 000 postes ont été créés ! La vérité vous dérange.

Le vote de l'amendement n°3 est réservé.

Le vote des articles 29, 29 bis, 29 ter et 29 quater, 29 septies, 30 bis A et 30 bis est réservé.

Article 30 quater

M. le président.  - Amendement n°4, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Art. L. 1142-21-1. - Lorsqu'un médecin régi, au moment des faits, par la convention nationale mentionnée à l'article L. 162-5 du code de la sécurité sociale ou le règlement arbitral mentionné à l'article L. 162-14-2 du même code et exerçant, dans un établissement de santé, une spécialité chirurgicale, obstétricale ou d'anesthésie réanimation, est condamné par une juridiction à réparer les dommages subis par la victime à l'occasion d'un acte lié à la naissance, que la couverture d'assurance prévue à l'article L. 1142-2 est épuisée, et que la victime ne peut obtenir l'exécution intégrale de la décision de justice auprès du professionnel concerné, cette victime peut saisir l'office national d'indemnisation des accidents médicaux institué à l'article L. 1142-22 en vue d'obtenir le règlement de la part d'indemnisation non versée par le professionnel au-delà des indemnités prises en charge par l'assureur dans le cadre des contrats souscrits en application de l'article L. 1142-2. Le professionnel doit alors à l'office national d'indemnisation des accidents médicaux remboursement de la créance correspondante, sauf dans le cas où le délai de validité de la couverture d'assurance garantie par les dispositions du cinquième alinéa de l'article L. 251-2 du code des assurances est expiré ou que le juge compétent a constaté l'incompatibilité du règlement de la créance avec la solvabilité du professionnel. »

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Il s'agit de la responsabilité médicale, notamment des gynécologues-obstétriciens. Bien que nous ayons beaucoup insisté sur les divers aspects de cette question, tout n'est pas encore réglé. Le Gouvernement veut agir dans trois directions.

Tout d'abord, le plafond de la garantie sera porté à 6 millions d'euros par voie réglementaire, le cumul annuel atteignant 12 millions d'euros.

Ensuite, l'assurance maladie apportera une aide accrue à la souscription de l'assurance responsabilité civile des médecins, avec un soutien plus conséquent aux praticiens du secteur 1.

Enfin, nous vous proposons ici d'organiser l'intervention de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux (Oniam). L'origine de cette disposition remonte à la condamnation au civil d'un gynécologue-obstétricien, intervenue après l'expiration de la couverture assurancielle. La CMP a très largement étendu le mécanisme. A l'issue de la concertation engagée, il apparaît judicieux de l'appliquer aux professionnels de la naissance, aux chirurgiens et aux réanimateurs.

L'amendement sécurise également la situation des médecins ou chirurgiens condamnés à verser une indemnité excédant le plafond de la garantie mentionnée au contrat d'assurance. L'Oniam pourra indemniser la victime, puis se faire rembourser par le praticien, sauf si son insolvabilité est constatée par une décision de justice.

Le dispositif que je vous propose garantit à la victime l'indemnisation complète, encadre l'intervention de l'Oniam et limite les risques financiers des professionnels. L'État demandera à cet office, par une instruction signée par trois ministres, de renoncer au recours subrogatoire contre le professionnel de santé en cas d'infirmité évolutive consolidée à la majorité de l'enfant. Un décret donnera compétence pour cette action au conseil d'administration, et non plus au directeur.

Nous ne remettons pas en cause le travail accompli, mais le poursuivons. Il pourra encore être amélioré.

M. Alain Vasselle, rapporteur.  - Un pas en avant est accompli sur ce sujet délicat car ce texte garantit le droit des victimes même en cas d'insolvabilité du spécialiste. Les professionnels de santé peuvent être rassurés : lorsqu'ils auront cessé leur activité, l'Oniam prendra les indemnités en charge. Mme la ministre s'est engagée à relever les planchers d'assurance et à davantage aider les médecins du secteur 1 à régler les primes. Nous avions proposé en CMP de couvrir l'ensemble du secteur conventionné, mais vous avez préféré limiter le champ du dispositif aux professionnels les plus exposés.

Reste que, pour couvrir les professionnels, les compagnies d'assurance considèrent davantage les montants planchers que les plafonds. (Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre, approuve) Une lettre signée par trois ministres et un décret ne suffiront pas à changer les choses. Dans les semaines qui viennent, les ministères de l'économie et du budget devront dialoguer avec les compagnies d'assurance et les syndicats afin que les montants couverts soient plus élevés. Dans cette attente, je prends acte du progrès accompli par ce texte et je ne doute pas de la volonté du Gouvernement de continuer à avancer, avec le Parlement et les professionnels.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Merci.

M. Dominique Leclerc.  - Je suis opposé à cet amendement.

M. Nicolas About.  - Vous pourriez remercier la ministre !

M. Guy Fischer.  - Vous en voulez toujours plus.

M. Dominique Leclerc.  - Lors de nos discussions, il a toujours été question des professions les plus exposées, c'est-à-dire les chirurgiens, les anesthésistes-réanimateurs et les gynécologues-obstétriciens. Cet amendement sera pour eux un mauvais signe. Ces filières, autrefois choisies en priorité par les étudiants en médecine après le concours de l'internat, sont aujourd'hui des options par défaut. Je ne veux pas être complice de l'organisation d'une désaffection de ces filières. En outre, vous donnez également un mauvais signe à la médecine libérale.

Enfin, on nous dit souvent que nous nous tourmentons pour la responsabilité civile avec des problèmes qui n'ont pas lieu d'être. Or un article publié aujourd'hui dans Le Quotidien du médecin a pour titre : « La responsabilité civile des établissements de santé : les sinistres graves coûtent toujours plus cher ».

M. Nicolas About.  - Un texte de loi est en cours d'élaboration.

M. Dominique Leclerc.  - 56 % des cas relèvent de la chirurgie, 18 % de l'obstétrique. Nous ne pouvons laisser les assurances agir seules en matière de responsabilité civile médicale ; Jean-Pierre Fourcade a fait une proposition en ce sens. Nous ne pouvons pas non plus ne prendre en compte que l'obstétrique car toutes ces filières seront concernées demain.

Le vote sur l'article 30 quater, modifié par l'amendement n°4, ainsi que sur les articles 31 bis A et 32 est réservé.

Article 32 bis A

M. le président.  - Amendement n°5, présenté par le Gouvernement.

Supprimer cet article.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Je souhaite revenir sur l'instauration d'un coefficient correcteur tarifaire dont bénéficieraient les établissements de santé connaissant des charges supplémentaires en matière sociale et fiscale. Je reconnais l'apport du secteur privé non lucratif à notre système de santé, tant par ses missions que par le maillage social, mais ce mécanisme est potentiellement injuste et inéquitable. Au lieu de neutraliser les différences entre les secteurs de l'hospitalisation, il les accentuera. Il augmentera notamment les différences de rémunération entre les établissements privés à but non lucratif, qui bénéficient de l'échelle tarifaire du secteur public, et les établissements commerciaux. Les établissements publics de santé sont eux aussi soumis à des contraintes, notamment pour le droit du travail ou les achats, qui ne sont pas compensées. N'ouvrez pas la boîte de Pandore, de nouvelles demandes pourraient en surgir.

En outre, ce mécanisme devrait prendre en compte une multitude de particularismes en matière de rémunérations et de fiscalité locale. Comment instaurer un coefficient correcteur dans ces conditions ? Les modalités de financement deviendraient illisibles et contraires à l'harmonisation liée à la tarification à l'activité ainsi qu'à la démarche de convergence tarifaire.

Enfin, les transferts de ressources correspondants seraient d'au moins 180 millions d'euros, et la ponction sur le secteur public serait beaucoup plus importante, d'autant que le champ d'application de cette disposition est particulièrement imprécis. Ces financements seraient mieux utilisés pour la revalorisation de la profession d'infirmier ou les grands plans de santé publique.

Ce différentiel de charges sera pris en compte par le dispositif de convergence, sur lequel vous souhaitez être éclairé. Je m'engage à ce que le prochain rapport sur cette démarche, avancé au 15 septembre, contienne un développement approfondi sur ce sujet. Dans cette attente, il est préférable de supprimer cette disposition particulièrement dommageable à l'équilibre entre les secteurs, surtout vis-à-vis du secteur public.

M. Alain Vasselle, rapporteur.  - Cet article illustre bien les incompréhensions actuelles entre le Gouvernement et le Parlement -tout au moins le Sénat et la commission des affaires sociales.

Je comprends certains des arguments qui viennent d'être développés. Mais le Gouvernement nous dit qu'il n'est pas prêt. Ce n'est pas cependant la première fois que cette proposition est déposée, je l'avais faite il y a deux ou trois ans puis l'avais retirée, le Gouvernement m'ayant fait valoir que des études étaient en cours. Que s'est-il passé depuis ? Rien ! (Mme Raymonde Le Texier approuve) Et que fait le Gouvernement aujourd'hui ? Il souhaite des études complémentaires. Mais deux études au moins ont été menées à leur terme, sur la précarité et sur la permanence des soins, dont on a tenu compte pour le financement des établissements publics et les Migac.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Et celui des établissements privés !

M. Alain Vasselle, rapporteur.  - Pourquoi la même démarche n'est-elle pas possible pour le différentiel de charges ? Je sais bien que se pose le problème de la rémunération des médecins, ici salariés et libéraux là ; nous n'aurons de solution que lorsqu'on aura évolué sur le secteur optionnel...

On ne peut pas toujours reporter les décisions. Peut-on espérer la prise en compte des études avant 2018 ? Quant aux 180 millions d'euros, il n'est pas question de les faire supporter par l'assurance maladie, il faudrait redéployer. Je crois qu'il y a à l'hôpital public des marges d'efficience. (M. Guy Fisher s'exclame) Voyez le rapport de la Cour des comptes, qui nous dit que le nombre de médecins varie de un à dix dans les services de pneumologie...

Il faut que nous tirions de tout cela des enseignements pour le prochain projet de loi de financement. Les échéances sont tellement lointaines qu'on est en droit de s'interroger sur la volonté du Gouvernement de vraiment avancer. En attendant, je prends acte de l'amendement.

Le vote de l'article 32 bis A, modifié par l'amendement n°5, est réservé.

Article 38

M. le président.  - Amendement n°6, présenté par le Gouvernement.

I. - Alinéas 3 et 14

Remplacer le mot :

trois

par le mot :

quatre

II. - Alinéa 5, première phrase, alinéa 8 et alinéa 11, deuxième phrase

Remplacer le mot :

troisième

par le mot :

quatrième

III. - Alinéa 16

Rétablir cet alinéa dans la rédaction suivante :

« V bis. - L'assuré ne peut bénéficier, au titre de la majoration prévue au II, d'un nombre de trimestres supérieur au nombre d'années durant lesquelles il a résidé avec l'enfant au cours de la période mentionnée au premier alinéa du même II. ».

M. Eric Woerth, ministre.  - Il s'agit de consolider juridiquement un dispositif menacé par un arrêt de la Cour de cassation. Le Gouvernement entend rétablir à quatre ans la durée de référence pour l'attribution de la majoration de durée d'assurance (MDA) pour éducation d'un enfant. La CMP avait retenu trois ans, en établissant un lien non dépourvu de logique entre cette durée et l'âge d'entrée dans la scolarité. Mais la distinction entre la majoration liée à l'accouchement et à la maternité d'une part, et celle liée à l'éducation de l'enfant n'a de sens que si la durée de référence n'est pas trop brève et permet de mesurer l'implication de chaque parent dans l'éducation.

M. Alain Vasselle, rapporteur.  - Je relève, parlant sous le contrôle de MM. Lardeux et Juilhard, que cet amendement va dans le sens souhaité par le Sénat comme par sa délégation aux droits des femmes. Avis favorable.

Le vote de l'article 38, modifié par l'amendement n°6, est réservé.

Vote sur l'ensemble

M. Guy Fischer.  - Je confirme notre vive opposition à ce texte, qui est une attaque frontale contre l'hôpital public et les personnes atteintes d'affections de longue durée. M. Woerth ne s'en cache pas, qui déclare dans un entretien aux Échos qu'il faut améliorer la performance de l'hôpital public. Pour un manager comme lui, on sait ce que cela veut dire : une saignée dans les effectifs. M. Soubie, conseiller social du Président de la République, relevant de son côté que les années 2008 à 2015 verront 220 000 départs à la retraite, estime qu'il est temps, tout en préservant la qualité des soins, de mener les actions d'optimisation qui s'imposent. C'est dire que le Gouvernement, pour réduire le déficit cumulé de l'hôpital public -300 millions selon lui, sans doute plutôt 600- entend supprimer massivement des emplois. On en envisage 1 200 à l'APHP, d'autres nombreux aux Hospices civils de Lyon avant de généraliser le processus. Quoi qu'en dise le Gouvernement, l'hôpital public va perdre entre 10 000 et 15 000 emplois. Il va se retrouver pris entre le marteau et l'enclume...

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - C'est mieux qu'entre la faucille et le marteau...

M. Guy Fischer.  - Vous faites comme à l'ordinaire dans la provocation, madame la ministre, votre sourire n'y change rien... Je pourrais aussi parler de l'Ondam ou de la MDA. Il s'agit d'une des attaques les plus violentes qu'ait jamais eu à subir notre système de protection sociale. C'est très grave. Ce sont les plus démunis de nos compatriotes qui en subiront les conséquences. Nous voterons résolument contre ce texte.

M. Jean-Marc Juilhard.  - Je souhaite revenir sur un sujet dont nous serons inévitablement amenés à reparler dans les mois qui viennent : les regroupements d'assistantes maternelles. Le ministre lui-même a considéré que c'était une véritable innovation à condition de ne pas les fragiliser par une complexité administrative excessive. Je prends acte des engagements qu'il a pris. La commission des affaires sociales, sa présidente Mme Muguette Dini, le rapporteur M. André Lardeux et moi-même avons travaillé depuis six mois avec les associations d'assistantes maternelles pour tenter de donner un cadre sécurisé et opérationnel à ces regroupements. Nous n'étions pas loin du but, puisque l'amendement que la commission a soumis au Sénat a été repris par trois présidents de conseil général, MM. Jean Arthuis, Alain Lambert et Joseph Kergueris. Adopté au Sénat, il a cependant été supprimé par la CMP sous la pression du Gouvernement.

Comme tous les dispositifs innovants, notre proposition a suscité de vives oppositions. La Fédération des particuliers employeurs s'est employée à faire peur aux parlementaires, en les abreuvant d'informations inexactes et insidieuses ; la Cnaf, qui ne veut pas perdre le contrôle de la garde collective dans les départements, a activement milité contre notre amendement, de même, me dit-on, que certaines directions de ministères. Bien sûr, ces opposants n'ont pas eu la franchise de s'afficher comme tels.

Nous nous attendions à ce que cette innovation se heurte aux corporatismes, mais pas à ce que le Gouvernement sacrifie l'intérêt général aux exigences des lobbies et des conservatismes !

Notre proposition répondait à deux objectifs : permettre aux femmes qui travaillent tôt le matin ou tard le soir de conserver leur emploi, et lutter contre la désertification des communes rurales. De cette innovation si nécessaire et attendue, le Gouvernement n'a pas voulu. Tout en saluant les efforts de réforme du Gouvernement, je me vois donc contraint de m'abstenir pour manifester mon mécontentement sur ce point. (MM. Alain Vasselle et André Lardeux applaudissent)

M. Marc Laménie.  - En ces temps troublés, il faut maintenir et renforcer notre modèle social, fondé sur la solidarité nationale, tout particulièrement entre les générations. Nos débats ont été riches et sans tabou. La discussion sur une éventuelle augmentation de la CRDS a permis d'identifier la dérive des déficits sociaux. Nous comptons sur la commission de la dette sociale annoncée par M. Woerth pour trouver des solutions pérennes.

Nos votes ont répondu à un double principe de responsabilité et de justice sociale. Nous avons ainsi approuvé l'élargissement du financement de la protection sociale pour qu'il pèse moins sur le travail, poursuivant l'effort entrepris depuis 2008 pour réduire les niches sociales. A l'initiative de notre rapporteur général, nous avons transféré le contrôle des arrêts maladie des fonctionnaires, à titre expérimental, aux CPAM : c'est une question d'équité.

La CMP a maintenu la position du Sénat sur le droit à l'image collective, que nous avons prolongé jusqu'à la fin de la saison sportive. En revanche, elle a supprimé l'article 33 sexies, voté à l'initiative de M. Paul Blanc, sur l'emploi des seniors dans les établissements médico-sociaux. Une telle mesure ne relevait sans doute pas de la loi. Nous espérons que le Gouvernement transmettra rapidement la circulaire aux Urssaf afin de ne pas pénaliser ces établissements.

Le groupe UMP votera les conclusions de la commission mixte paritaire sur le PLFSS pour 2010. (Applaudissements à droite)

M. Eric Woerth, ministre.  - Le Gouvernement est ouvert aux propositions du président Arthuis sur les regroupements d'assistants maternels. J'ai dit être ouvert à une initiative parlementaire : c'est pourtant bien téléphoné ! Nous n'avons pu avancer dans ce texte-ci pour des raisons juridiques, mais l'engagement est clair. (M. Nicolas About approuve)

M. Jean-Marc Juilhard.  - J'ai bien entendu le ministre. Je voulais indiquer mon mécontentement.

M. Nicolas About.  - C'est fait !

M. Guy Fischer.  - Vous avez raison de vous abstenir : les autres se couchent tous !

M. Jean-Marc Juilhard.  - Je vais me coucher aussi : j'ai dit ce que j'avais à dire, et je voterai l'ensemble du texte, par solidarité majoritaire, mais aussi compte tenu des efforts accomplis. (Exclamations sarcastiques à gauche)

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Merci.

M. Yves Daudigny.  - Tout ça pour ça !

En application de l'article 59, les conclusions de la commission mixte paritaire sont mises aux voix par scrutin public

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 338
Nombre de suffrages exprimés 329
Majorité absolue des suffrages exprimés 165
Pour l'adoption 172
Contre 157

Le Sénat a adopté.

La séance est suspendue à midi quarante.

présidence de M. Gérard Larcher

La séance reprend à 15 heures.