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Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



Renvoi pour avis (Loi de finances rectificative pour 2010)

Débat préalable au Conseil européen des 16 et 17 décembre 2010

Simplification et amélioration du droit

Discussion générale

Discussion des articles

Articles additionnels avant l'article premier

Avis sur des nominations

Accord en CMP

Simplification et amélioration du droit (Suite)

Discussion des articles (Suite)

Article 2

Articles additionnels

Article 4 bis

Article 4 ter

Article 4 quater

Article 6

Article 6 bis A

Article 8 (supprimé)

Article 10

Articles additionnels

Article 11

Articles additionnels

Article 14 bis A (supprimé)

Article 15

Articles additionnels

Mandats sénatoriaux

Accord en CMP

Renvoi pour avis (Loi de finances rectificative pour 2010)

Débat préalable au Conseil européen des 16 et 17 décembre 2010

Simplification et amélioration du droit

Discussion générale

Discussion des articles

Articles additionnels avant l'article premier

Avis sur des nominations

Accord en CMP

Simplification et amélioration du droit (Suite)

Discussion des articles (Suite)

Article 2

Articles additionnels




SÉANCE

du lundi 13 décembre 2010

50e séance de la session ordinaire 2010-2011

présidence de M. Guy Fischer,vice-président

Secrétaires : Mme Christiane Demontès, M. Philippe Nachbar.

La séance est ouverte à 14 heures 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Renvoi pour avis (Loi de finances rectificative pour 2010)

M. le président.  - J'informe le Sénat que le projet de loi, adopté par l'Assemblée, de finances rectificative pour 2010, dont la commission des finances est saisie au fond, est envoyé pour avis, à sa demande, à la commission de la culture, de l'éducation et de la communication.

Débat préalable au Conseil européen des 16 et 17 décembre 2010

M. le président.  - L'ordre du jour appelle le débat préalable au Conseil européen des 16 et 17 décembre 2010.

M. Laurent Wauquiez, ministre auprès de la ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes, chargé des affaires européennes.  - Je suis heureux de m'exprimer devant le Sénat, qui a joué un rôle majeur dans la définition de la stratégie européenne de la France : je rends hommage au remarquable travail de M. Bizet. Le traité de Lisbonne va dans le sens d'une meilleure appropriation par les Parlements nationaux des enjeux européens.

Le récent conseil franco-allemand de Freiburg a réaffirmé la force du franco-allemand. Le conseil des 16 et 17 décembre intervient à un moment stratégique. Face à la crise de l'euro, attaqué par des spéculateurs, il doit affirmer la détermination de l'Europe et sa capacité à avancer. Sur le plan politique, il doit permettre à l'Union européenne de repartir à l'offensive.

Le Conseil européen devra améliorer le dispositif de défense de l'euro, mais pas seulement. En moins de dix-huit mois, nous avons beaucoup progressé : l'Europe n'avait pas de dispositif de défense -faiblesse originelle de la zone euro- lors de la crise grecque ; lors de la crise irlandaise, elle était prête.

La mise en place d'un mécanisme pérenne de gestion de crise montre que l'Europe est prête à tirer les leçons de la crise et à se doter collectivement des moyens de se protéger. Quand un pays de l'euro est attaqué, c'est notre monnaie qui est touchée : l'Union européenne ne doit laisser personne au bord du chemin. Je salue le rapport de M. Humbert sur les normes de régulation européenne. Le 28 novembre, à la suite d'intenses consultations entre le Président Sarkozy et la Chancelière Merkel, l'Eurogroupe a trouvé un accord sur le mécanisme de stabilité ; le prochain Conseil examinera la proposition du président Van Rompuy de révision du traité européen, la plus simple, la plus efficace et la plus rapide à transposer. Les travaux de M. Barnier sur la régulation du système bancaire vont dans le bon sens.

Il n'y aura pas d'euro stable sans gouvernance économique. Cette idée, encore taboue il y a quelques mois et que seule la France portait, s'est imposée à la grande majorité des États. Nous attendons que les orientations -toutes les orientations, rien que les orientations- décidées au Conseil européen d'octobre soient suivies et que la gouvernance économique ne se réduise pas à des sanctions.

Le budget de l'Union européenne 2011 doit désormais être adopté dans le cadre de la procédure de Lisbonne. La question est symbolique dans une phase ou certains testent l'Union. Chacun doit faire une partie du chemin. J'ai bon espoir que le Parlement européen l'adoptera le 15 décembre après que le conseil l'a adopté le 8. Ce budget doit montrer que l'Europe peut dépenser mieux sans sacrifier ses ambitions.

Le Conseil entendra un rapport de Lady Ashton sur les relations de l'Union avec ses partenaires stratégiques, Chine, Russie et États-Unis. Nous devons identifier nos intérêts communs et les défendre collectivement.

Le Conseil se penchera enfin sur le statut de candidat du Monténégro. Le processus d'élargissement comme le processus d'adhésion appellent la plus grande rigueur.

Le Conseil européen peut être un point de bascule. Certains ont voulu tester l'Union européenne, d'autres ont sombré dans le scepticisme. Face à des pays continents, face aux exigences du développement durable, face à la pression des marchés, l'Union européenne doit démontrer sa capacité à reprendre l'offensive. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Jean Bizet, président de la commission des affaires européennes.  - La situation de la zone euro est présentée comme de plus en plus alarmante. Il faut toutefois prendre un peu de recul. En 2009, la dette publique au sein de la zone euro avait atteint 79,2 % du PIB, et le déficit 6,3 % du PIB en moyenne ; aux États-Unis, au Japon, les dettes publiques atteignent respectivement 84 % et 190 % pour des déficits de 7,3 % et 9 %. Notre situation n'est donc pas pire -et même plutôt meilleure- que celle de zones économiques comparables. L'euro est encore à 13 % au-dessus de son cours d'introduction face au dollar. Mais la zone euro a laissé se développer des stratégies économiques divergentes et parfois dangereuses ; elle paie aujourd'hui le prix de ce manque de cohérence et prête davantage le flanc à la spéculation, avec le risque d'un effet dominos où les plans de sauvetage se succéderaient d'un pays à l'autre. La zone euro est le résultat d'une négociation diplomatique, non la traduction d'une conception d'ensemble. D'où ses faiblesses, l'absence de mécanisme efficace de coordination économique et budgétaire ou la clause de non renflouement qu'on s'évertue aujourd'hui à contourner.

A chaque crise, pourtant, l'Union européenne s'est ressaisie : en 2008, puis lors des crises grecque et irlandaise. Nous allons dans la bonne direction mais il nous faut progresser plus vite. Tout s'accélère mais l'Europe donne le parfois le sentiment de prendre son temps -au moment où elle devient un appât. Le Conseil européen devra montrer que la réforme de la gouvernance économique est en marche : le temps n'est plus aux petites phrases, tout défaut à la cohésion sanctionnera l'ensemble. Ce qui suppose qu'il soit mis fin au mauvais procès fait à l'Allemagne. Nous ne progresserons dans la solidarité européenne que si chacun balaie devant sa porte. La confiance se mérite, aucun mécanisme européen ne dispensera les États de procéder aux réformes nécessaires en termes de compétitivité et d'assainissement des finances publiques ; chacun prenant sa part, la mutualisation sera plus facile. « Ce qui ne me tue pas me renforce » disait Nietzche : je suis convaincu que l'Europe sortira renforcée de la crise. Les Européens doivent comprendre qu'ils ont tous partie liée. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Josselin de Rohan, président de la commission des affaires étrangères.  - Le Conseil européen des 16 et 17 décembre se consacrera principalement à la mise en place d'un mécanisme permanent de gestion de crise au sein de la zone euro ; il doit montrer le chemin vers la gouvernance économique européenne que la France appelle de ses voeux depuis plusieurs années. Une révision du traité est nécessaire. Quand l'Europe avance, c'est toujours à la suite d'un accord franco-allemand. Il faut dénoncer les discours irresponsables qui annoncent la faillite de la monnaie unique. La solidarité européenne a joué. Il importe que le Conseil engage l'économie européenne sur la voie du redressement des finances publiques.

En matière de sécurité et de défense, l'Union européenne progresse plus lentement -c'est un euphémisme. L'Union européen risque d'être marginalisée dans les décennies à venir face à la Chine et aux États-Unis : il est indispensable que l'Union renforce ses relations avec ses principaux partenaires, diplomatiques, commerciales, d'approvisionnements énergétiques. Nous devons définir nos priorités et nos objectifs, ce qui suppose une réelle unité entre pays européens. L'Union européenne, le 14 septembre, a essuyé un revers à l'ONU : on lui a refusé le droit de s'exprimer en tant que telle, ce qui montre qu'elle n'est pas considérée comme une puissance et n'inspire pas le respect. Monsieur le ministre, quelles sont les raisons de cet échec ? Quelle stratégie pour renforcer la position de l'Union au sein de l'ONU ?

La France est-elle prête à accorder le statut de candidat au Monténégro ? Quelle est sa position sur l'élargissement aux pays des Balkans occidentaux ?

L'effort de défense fait partie de la stratégie des pays émergents, non encore de celle des pays de l'Union ; celle-ci ne risque-t-elle pas de perdre toute influence sur la scène internationale ? L'accord franco-britannique, cependant, montre la voie d'une coopération renforcée. Avec la commission de la défense de l'Assemblée nationale, la Chambre des communes et celle des Lords, nous avons convenu de constituer un groupe de suivi de cette coopération.

Que penser de la proposition germano-suédoise de recenser les capacités européennes en vue d'une mutualisation ? Elle ne doit pas se traduire par la gestion de la pénurie... Il est indispensable que la disparition de l'assemblée parlementaire à l'UEO soit subordonnée à la création d'une structure associant les parlements nationaux ; s'il n'y a pas d'accord à 27, pourquoi ne pas imaginer une coopération entre les parlements volontaires ? (Applaudissements à droite et au centre)

M. Jacques Mézard.  - Après la Grèce, l'Irlande sollicite l'Europe pour financer sa dette : à qui le tour demain, de l'Espagne ou du Portugal ? La France risque-t-elle de suivre ? L'Union européenne a apporté son soutien immédiat à l'Irlande, après avoir tardé à le faire pour la Grèce. Les marchés, en attaquant les dettes souveraines des pays les plus fragiles, creusent l'écart entre les économies européennes ; ils révèlent une zone euro à plusieurs vitesses entre les économies à forte intensité technologique et excédents et ceux qui sont plus sensibles à la concurrence et accumulent les déficits, comme la France et les pays méditerranéens. Les marchés reconstituent-ils une zone Mark ? D'aucuns préconisent d'exclure les pays faibles de l'euro. Le constat d'une insuffisante gouvernance économique est récurrent.

Le Conseil européen doit conforter le mécanisme permanent de gestion de crise et faire le point sur les propositions de la Commission. Faut-il durcir le pacte de stabilité en prenant mieux en compte la dette ? Il faudrait, selon nous, distinguer entre le bon et le mauvais déficit, le premier étant lié à l'investissement dans le capital humain. Quelle est la norme de dette acceptable ? Que penser des sanctions et du mécanisme à majorité inversée proposée par le président Van Rompuy ? Des sanctions progressives, qui semblent peu crédibles ? La Commission propose que les États prospères se partagent les amendes : on croit rêver ! Et les sanctions politiques ? Faut-il ouvrir la boîte de Pandore des modifications du traité ?

L'Europe se fera dans les crises, écrivait Jean Monnet : la crise actuelle a réactivé la question de la gouvernance ; mais on a le sentiment que la vision allemande domine, celle de la gestion des seuls déficits. Quid de l'harmonisation fiscale, d'un budget européen à la hauteur des enjeux, d'une capacité de l'Union à emprunter ? Pourtant, le défaut de convergence ne fait que des perdants et risque de conduire au déclin. M. Trichet est dans son rôle de « pape de l'orthodoxie néo-libérale », comme l'a dit M. Chevènement, en appelant tous les pays au même effort. L'Europe ne doit pas seulement surveiller et sanctionner mais aussi relancer. La stratégie « Europe 2020 » ressemble fort à un catalogue d'incantations. Nous attendons de grands investissements publics mutualisés dans les transports, la recherche, l'éducation, autant de secteurs indispensables à la relance.

Comment le mécanisme de stabilisation financière sera-t-il pérennisé ? Les banques ont été soutenues sans contrepartie : que propose la France pour les responsabiliser, je n'ose dire les moraliser ?

Il est urgent de dégager l'Union européenne de la tutelle des marchés financiers ; cela suppose de faire jouer un autre rôle à la BCE. Pourquoi ne pas imaginer de mutualiser une partie des dettes souveraines et l'émission de bons européens sur les marchés ? Une véritable gouvernance économique suppose aussi la convergence des marchés du travail, des systèmes de retraites, des politiques fiscales. Le moment est venu de changer les règles du système économique européen, dans le sens d'une politique de relance. (Applaudissements sur les bancs RDSE)

M. Michel Billout.  - Devant les crises financières à répétions, notre groupe avait demandé un débat extraordinaire mais la Conférence des Présidents et le Gouvernement l'avaient refusé. Un tel débat aurait pourtant permis de montrer la détermination de la représentation nationale à trouver des solutions conformes à l'intérêt communautaire. Or l'Union a agi en ordre dispersé. Nous avons finalement ce débat à la veille d'un Conseil européen, sur lequel nous ne partageons pas l'optimisme du Gouvernement. Les solutions à l'étude ne permettront pas de prémunir l'Europe de crises à répétition.

La recette proposée est simple, renflouer ceux qui sont responsables de la crise. Or, le marché financier en demande toujours plus. Les prétendus plans de sauvetage n'ont pas empêché la crise de s'étendre. Face à la logique aveugle de soumission, il faut faire prévaloir l'intérêt général. Jacques Delors l'a dit : « ce n'est pas aux banquiers, qui ont reçu 4 500 milliards, de dicter aux gouvernements leur comportement ».

Quand les règles des marchés conduisent les banques à la faillite, ce n'est pas aux peuples de les renflouer ! Les banques irlandaises ont provoqué la bulle immobilière, il a fallu 50 milliards de fonds publics pour les recapitaliser ! On fait payer les pertes par la collectivité, tout en préservant les profits privés, sans que cela ne rassure les marchés. L'Europe a découvert son impuissance à protéger sa monnaie, cela exige de nouvelles solutions : changer les objectifs du pacte de stabilité, encourager les investissements productifs, taxer la spéculation ! Une partie de la gauche au Parlement européen a proposé une telle taxation pour abonder un Fonds européen pour le développement social. Il faudra aussi évidemment modifier les missions de la BCE.

M. Denis Badré.  - L'Europe est-elle en crise ? Comme toujours, puisqu'elle a toujours progressé par les crises. En grec, crisis est un moment décisif : nous y sommes encore.

Ceux qui préconisent une sortie de l'euro font le bonheur des spéculateurs ; l'euro nous a protégés. Que se passerait-il si nous devions rembourser notre dette en francs dévalués et avec des taux à la hausse ? Nos politiques budgétaires sont nationales, cadrées par un pacte de stabilité de nature intergouvernementale ; le budget est de nature communautaire mais les recettes sont votées à 85 % par les parlements nationaux... Nous avons une monnaie unique mais la gouvernance économique est en friche.

Une percée a été réalisée, les troupes doivent suivre : Maastricht a 20 ans, nous devons regrouper nos forces vers l'avant. Des euro-obligations, émises par les États ? L'Allemagne préfèrera emprunter seule à moindre taux. Mieux vaudrait une démarche communautaire mais l'Union européenne ne peut pas encore emprunter : levons ce verrou et nous progresserons beaucoup !

Le Fonds européen de stabilité n'est pas la solution miracle : il faut lui adjoindre une surveillance des politiques économiques et budgétaires des États. Il faut donc trouver le bon équilibre entre la situation économique des États et les sanctions. Le choix de ne pas sanctionner la France et l'Allemagne en 2003 a écorné la confiance dans le pacte de stabilité, les interventions pour la Grèce puis l'Irlande ont montré une certaine solidarité. Nous n'avons donc pas d'alternative au progrès, vers un gouvernement économique européen. Il devra démontrer sa volonté de rigueur, ce qui impose d'y associer les parlements nationaux, donc une meilleure pédagogie autour des enjeux européens en direction de nos concitoyens.

Le débat sur le budget européen -sa nature, son financement par des ressources propres- est aussi ouvert ; c'est tant mieux. Si les parlements nationaux doivent désormais accepter un regard communautaire sur les budgets nationaux, le Parlement européen devra accepter un regard sur les questions touchant au budget européen. De leur capacité à nouer un dialogue constructif et équilibré dépendra une bonne prise en compte des intérêts nationaux et de l'intérêt commun. Plus que jamais, l'Europe c'est nous !

M. Simon Sutour.  - La Maison Europe tremble quand des intérêts égoïstes des nations viennent à dominer, au point de remettre en cause l'ensemble de l'édifice. Les failles économiques et monétaires sont connues depuis juillet 2010, mais il a fallu attendre le mois de décembre pour mettre en place un mécanisme pérenne de défense. Les gouvernements refusent tout nouveau transfert de compétences, n'entendent pas aller plus loin sur la voie de l'intégration. Dans ces conditions, comment garantir l'efficacité du nouveau mécanisme de surveillance ? L'austérité ne doit pas se transformer en récession, ce serait catastrophique pour la société européenne et pour ses institutions.

Enfin, ce mécanisme doit impérativement s'accompagner d'une réforme globale de la zone euro.

Qu'en est-il d'éventuelles euro-obligations ? Qu'en est-il d'un véritable budget européen, de l'harmonisation fiscale ou la taxation des projets financiers ? Les socialistes refusent un simple rafistolage.

La stratégie de l'Union européenne 2020 comporte des objectifs chiffrés dont je me réjouis, mais les politiques d'austérité compromettent leur réalisation.

Quel crédit donner à cette stratégie quand les droits d'inscription universitaires augmentent, alors que l'impôt sur les sociétés reste inchangé ?

L'une des cinq priorités de la Commission européenne est que l'Union européenne pèse de tout son poids sur la scène internationale. Bravo ! Mais tout dépendra de la propension des États membres à agir de concert.

Or, au lieu d'élaborer une politique énergétique commune, chaque État poursuit son seul intérêt stratégique.

L'Union pour la Méditerranée était un projet phare du Président de la République ; il a tourné au fiasco et tué le processus de Barcelone sans le remplacer, et en affaiblissant l'Union européenne. Beau résultat ! La France satisferait-elle le souhait légitime de Mme Ashton de remettre ce projet dans le giron de l'Union ?

On ne pourra pas réconcilier les citoyens avec un projet européen injuste ou privé de moyens. (Applaudissements à gauche)

M. Jean-François Humbert.  - Je viens d'effectuer en Irlande une mission d'étude, à l'initiative de la commission des affaires européennes. Les limites du modèle irlandais sont récemment apparues au grand jour.

De 1992 à 2006, la croissance du pays résultait d'une politique solitaire, avec une aide européenne égale à cinq fois sa contribution. S'ajoutaient les effets d'une fiscalité très attractive pour les entreprises, drainant ainsi les investissements privés. Une bulle immobilière s'est formée, créant un deuxième moteur de croissance. L'OCDE n'a pas formulé la moindre objection à cette stratégie, comme le FMI, et les stress tests effectués l'an dernier ont conclu à la solvabilité des banques irlandaises.

En fait, la crise subie par ce pays est home made, faite maison, car elle a vu s'enchaîner un défaut de solvabilité des emprunteurs débouchant sur un manque de liquidités bancaires.

Le mécanisme européen intervient dans ce contexte, très différent du cas grec, mais son existence, concomitante avec l'intervention du FMI, a renforcé l'euroscepticisme de la population et sa colère, liée au fait que les banquiers jouissent d'une impunité de fait.

Au demeurant, le plan gouvernemental reporte sur la population l'intégralité du coût de la faillite du système bancaire, excluant toute réévaluation de l'impôt sur les sociétés.

Sans revenir sur le détail de l'aide européenne apportée par Ecofin en novembre, elle a pour but d'accompagner les réformes ambitieuses et courageuses du gouvernement irlandais.

Dans ce pays, la crise est fondamentalement bancaire, contrairement à ce qui se passe dans d'autres pays. Il est impossible de dire aujourd'hui si l'action européenne suffira aux côtés de celle du FMI.

Cette crise n'est pas sans incidences pour la gouvernance économique européenne car elle conforte la position allemande en faveur d'une meilleure gouvernance financière. Elle incite à renforcer la surveillance euro-économique.

Les difficultés annoncées du Portugal devraient constituer, dans les semaines à venir, un test d'une tout autre ampleur. La crise portugaise n'est pas une crise de croissance sur le mode irlandais ; elle pousse à s'interroger sur les conséquences économiques de l'introduction de l'euro et sur la réponse européenne durable et crédible qui doit impérativement être trouvée lors du prochain Conseil européen. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Laurent Wauquiez, ministre.  - Je remercie M. Bizet pour la pertinence de la comparaison avec des zones économiques comparables. Si cette crise permet de régler les faiblesses de l'euro, elle sera salutaire ; votre citation de Nietzsche est particulièrement bienvenue ! Bien sûr, la solidarité communautaire ne suffit pas. L'euro n'est pas un paratonnerre miracle exonérant les États membres à prendre les décisions courageuses qui s'imposent à eux.

Monsieur de Rohan, vous avez raison de souligner l'importance stratégique du service européen pour l'action extérieure ; tout le monde feint de s'interroger sur l'influence française, mais c'est l'un de nos plus brillants diplomates, M. Pierre Vimont, qui a été nommé secrétaire général exécutif.

A l'ONU, l'échec de la première résolution tient sans doute à l'insuffisance de la négociation en amont. Nous souhaitons que la prochaine tentative soit appuyée par les États membres.

Le Monténégro ? Les pays des Balkans ont vocation à rejoindre l'Union européenne, afin que cette zone de troubles devienne un socle de paix, mais il faut être exigeant lors des négociations.

Bien sûr, les parlements européens doivent jouer un rôle important pour la Pesc. Je salue l'effort germano-suédois.

J'en viens à l'intervention de M. Mézard. Pour la gouvernance économique, il faut resserrer les mailles du filet, renforcer la crédibilité du pacte tout en préservant la place du politique, assurer la convergence fiscale, dépenser mieux et responsabiliser les banques.

Monsieur Billout, merci d'avoir exposé la divergence de nos approches, qui n'empêche pas des points d'accord. En Irlande, toutes les banques ont été nationalisées : les actionnaires ont donc subi une sanction majeure. Vous avez raison pour la politique européenne d'innovation : elle est insuffisante.

Merci, monsieur Badré, pour votre vision stratégique. Les avancées sur la gouvernance économique sont un signe de maturité

Les euro-obligations ? Le temps n'est pas venu de lancer une foire aux bonnes idées. Chaque pays doit assumer les conséquences de ses actes, même dans un contexte communautaire. En 1958, le premier travail du général de Gaulle avait été de rétablir les finances publiques du pays.

Monsieur Sutour, les moyens du fonds mis en place sont suffisants. Le service européen pour l'action extérieure pourra progresser dans le Sahel, face au danger terroriste, dans une logique d'aide aux territoires concernés, et de sécurité pour l'Europe.

L'Union pour la Méditerranée pourra progresser d'abord grâce à une reconnaissance de diplômes.

Monsieur Humbert, l'Irlande satisfaisait aux critères de Maastricht malgré la surexposition des banques à l'immobilier. Nous devons donc revoir le dispositif de suivi économique.

Sur le plan bancaire, M. Barnier a fait des propositions. En outre, la meilleure surveillance des politiques économiques permettra de mieux anticiper les crises. Le Portugal ? Ne jouons pas les Cassandre ! Un soutien européen doit permettre de relancer la croissance. (Applaudissements à droite)

M. le président.  - Nous passons au débat interactif et spontané.

M. Pierre Fauchon.  - Monsieur le ministre, votre réponse à M. Badré nous laisse sur notre faim. Il a repris l'idée de M. Juncker, parfaitement raisonnable bien qu'elle ait apparemment vexée Mme Merkel et M. Sarkozy qui n'ont pas été consultés. Ce serait mettre la charrue avant les boeufs ? Mieux vaut des mesures préventives contre l'incendie que d'attendre l'intervention des pompiers !

Je comprends la position allemande, qui ne veut pas exonérer les pays membres de leurs responsabilités. Il faut donc un certain nombre de précautions, ainsi qu'une certaine prudence. Mais l'idée me semble tout à fait raisonnable.

M. Laurent Wauquiez, ministre.  - M. Badré a soutenu l'intégration accrue de l'Union européenne. Je lui en rends hommage.

M. Denis Badré.  - Merci.

M. Laurent Wauquiez, ministre.  - Je maintiens pourtant mon propos : il y a un temps pour l'action et un temps pour la réflexion. Nous sommes dans le temps de l'action.

Les eurobonds ne sont donc pas d'actualité : la question essentielle, c'est d'affronter la crise qui frappe certains Etats membres. Il faut franchir le gué avant d'explorer de nouveaux territoires.

M. Pierre Fauchon.  - Rendez-vous dans un an !

M. Robert del Picchia.  - Sans être alarmiste, je pense que de nouveaux épisodes de crise seront possibles. Hélas, le traité européen ne permet pas à un État membre de soutenir un autre.

Il semble que la révision du traité de Lisbonne s'impose pour l'après 2013. L'Allemagne s'oppose fermement à l'émission d'euro-obligations. Vous avez évoqué le bon sens, mais réviser le traité de Lisbonne pourrait signifier ouvrir la boîte de Pandore.

Quel serait l'éventuel calendrier des nouveaux mécanismes pérennes de soutien ?

M. Laurent Wauquiez, ministre.  - En effet, une révision est indispensable pour certains pays, mais il ne faut surtout pas ouvrir la boîte de Pandore.

La France est donc favorable à une révision la plus simple possible et la plus circonscrite possible : la réécriture doit se résumer à une frappe chirurgicale.

M. Richard Yung.  - Je m'exprime avec prudence, pour ne pas trop m'engager dans la « foire aux idées ».

M. Juncker a dit qu'il avait fallu cinq ans pour que son idée soit ratifiée. Vous êtes dans le temps de l'action : le Parlement est aussi dans celui de la réflexion.

La politique industrielle européenne est marquée par l'ampleur des affrontements franco-allemands. Nous sommes loin de créer les champions dont l'Europe a besoin. Ainsi l'Allemagne conduit sa propre politique énergétique.

Tout le monde a compris que la vente du Rafale au Brésil était plus que compromise. Est-ce étonnant, vu la concurrence entre producteurs européens, avec l'Eurofighter, notamment ?

M. Laurent Wauquiez, ministre.  - Le conseil franco-allemand a mis l'accent sur la politique industrielle. La concurrence est réelle, mais nous devons dégager des intérêts conjoints : nous unir, par exemple, pour lutter contre la concurrence chinoise...

L'Europe de l'avant-crise était le bras armé de la dérégulation et privilégiait la concurrence. L'Europe de l'après-crise devra changer de logiciel !

L'énergie est un enjeu stratégique européen. A Budapest, je me suis entretenu avec ma collègue hongroise : ce thème sera une priorité de la présidence hongroise. A ce propos, je souligne l'avantage apporté à la France par la filière électronucléaire.

M. Michel Billout.  - Vous avez dit que les banques avaient été sanctionnées par la nationalisation ; mais nationaliser une banque en faillite revient à socialiser les pertes. Mais quelles ont été les sanctions prises contre les banques européennes ayant encouragé la dérive des établissements irlandais ?

Ne faudrait-il pas créer une autorité européenne de supervision bancaire ? Où en est la création d'une agence européenne publique de notation ?

M. Laurent Wauquiez, ministre.  - Les actionnaires des banques irlandaises ont tout perdu ! Et les banques nationales des États membres n'ont pas poussé les Irlandais à la faute. Nos banques sont particulièrement solides, même par rapport aux établissements allemands.

Le dispositif, pérenne pour l'après 2013, sur le modèle du FMI, prévoit une clause d'action collective pour éviter qu'un créancier bloque le processus ; il prévoit une participation au cas par cas et une priorité au remboursement des créanciers publics ; autant d'avancées importantes !

M. Simon Sutour.  - Je me félicite de ce débat interactif.

Effectivement, le nucléaire est une chance pour la France.

M. Josselin de Rohan, président de la commission des affaires étrangères.  - Très bien ! Dites-le à Mme Voynet !

M. Simon Sutour.  - Je souhaite aborder la politique de convergence territoriale, inscrite dans le traité de Lisbonne. Les fonds seront-ils maintenus pour la période 2014-2020 ? L'inquiétude des élus est grande car d'autres priorités s'imposent dans le cadre d'un budget européen contraint.

M. Laurent Wauquiez, ministre.  - Merci pour votre observation sur la filière nucléaire car le consensus national est nécessaire sur ce sujet. La politique de cohésion territoriale n'est pas à l'ordre du jour du Conseil européen, mais il s'agit là d'un sujet majeur pour les collectivités territoriales et nos concitoyens. Hélas ! Les dossiers sont excessivement difficiles à remplir. Pire : le gouvernement français a parfois compliqué les choses. Simplifier les dispositifs européens sera une de mes priorités. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Jean Bizet, président de la commission des affaires européennes.  - Je me réjouis que les affaires européennes soient désormais confiées à un ministère de plein exercice. Le président de la Bundesbank a dit avec raison que la crise actuelle n'est pas due à l'euro mais aux déficits publics de certains États membres, tout comme M. Trichet a affirmé que l'euro était notre monnaie et devait rester notre destin. Crise après crise, l'Europe avance ; mais nous devons être très réactifs. Mme Merkel a dit fort justement que les fonds spéculatifs seraient mis à contribution après 2013.

Le Fonds européen de stabilité financière est d'ampleur considérable, avec 750 milliards d'euros. Là encore, c'est un signal clair adressé aux marchés !

Depuis le traité de Rome, la préférence communautaire n'était plus qu'une incantation politique, mais elle a désormais une signification comprise par tous. Ce principe doit animer toutes nos actions.

« L'Europe se dissout quand on la pense claire et rationnelle alors qu'il faut la concevoir dans sa pleine et complexe réalité », a dit une personnalité dont le nom m'échappe, peut-être Edgar Morin ; ces propos m'avaient autrefois séduit ; ce n'est plus mon avis, et encore moins celui des marchés ! Il faut que l'Europe parle d'une seule voix et que très rapidement, nous soyons dotés d'une gouvernance économique. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Josselin de Rohan, président de la commission des affaires étrangères.  - J'espère que lors du Conseil européen, les chefs d'État et de gouvernements parleront d'une seule voix pour condamner le coup de force qui s'est produit en Côte-d'Ivoire et demander que M. Ouattara, élu par son peuple, puisse exercer ses fonctions. Si L'Union européenne se tait, elle commettra un grave manquement. (Applaudissements à droite et au centre)

Simplification et amélioration du droit

M. le président.  - L'ordre du jour appelle l'examen de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, de simplification et d'amélioration de la qualité du droit.

Discussion générale

M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.  - (Applaudissements au centre et à droite) Le Gouvernement partage pleinement l'objectif de rendre le droit plus clair et plus lisible : c'est une oeuvre passionnante mais aussi délicate parce que la technique pose des questions politiques. Chaque assemblée a ses usages et ses priorités, le Gouvernement aussi, mais l'important est d'avancer ensemble vers le consensus. Le droit et la loi se complexifient, au gré des textes qui s'empilent, pas toujours de façon cohérente, mais aussi de la diversification des sources mêmes du droit, au point que même les professionnels se perdent dans le dédale du droit.

Nul n'est censé ignorer la loi : cette fiction, nécessaire, a pour corollaire la lisibilité des textes. Il est au demeurant un objectif de constitutionnalité : le Conseil constitutionnel ne manque pas de nous le rappeler, la clarté est une condition de la garantie des droits, au sens de la Déclaration de 1789.

Or, plus de 3 300 lois ont été adoptées depuis 1958, avec une accélération -aux effets parfois indésirables- depuis vingt ans : 64 codes et 2 600 lois sont en vigueur, assorties de 24 000 décrets. Depuis le 23 juin 2008, tout projet de loi est accompagné d'une étude d'impact, dans un souci de sécurité juridique, puis la révision constitutionnelle a permis au Conseil d'État d'examiner une proposition de loi.

Cependant, l'instabilité du droit demeure, car les lois se succèdent sans abroger les anciennes ni veiller à la cohérence de l'ensemble.

Des lois de simplification sont donc intervenues, le Parlement y a pris tout son rôle, comme pour le texte qui nous réunit aujourd'hui.

Le champ en est large, c'est la contrepartie nécessaire de l'ambition de ses auteurs.

Il s'agit d'abord de simplifier les démarches administratives, pour les particuliers comme pour les entreprises.

Ainsi nos concitoyens n'auront plus à fournir deux fois la même pièce ; l'Assemblée nationale a renforcé les garanties de protection des données personnelles. Votre commission propose une mesure à titre expérimental pour prévenir le contentieux en rendant obligatoire le recours administratif préalable pour les actes concernant les fonctionnaires. Un projet de décret est prêt.

L'administration doit être plus à l'écoute des usagers : vous proposez de supprimer leur consultation par internet, je souhaite le maintien de cette forme de démocratie participative.

Le texte valorise l'activité économique : il pose un cadre général pour les groupements d'intérêt économique.

Ce texte renforce encore les droits des citoyens, en encadrant mieux les fichiers informatiques. Une autre proposition est en cours d'examen à l'Assemblée nationale : votre commission propose d'y renvoyer mais, vu les garanties apportées sur les fichiers de police, je crois plus utile d'en débattre ici.

Votre commission propose de renvoyer les dispositions relatives au droit de préemption à un texte autonome, ce qui me paraît opportun.

Le texte met la France en conformité avec ses engagements européens, qu'il s'agisse de la directive Services ou de celle sur la médiation civile et commerciale, qui traite de litiges transfrontaliers et que le Gouvernement propose d'appliquer aux litiges nationaux.

Enfin, le texte clarifie notre droit pénal ; il supprime des dispositions devenues obsolètes, simplifie des formalités et propose des mesures de bonne administration de la justice. Votre commission ajoute des dispositions sur les autopsies judiciaires et le statut des prélèvements humains ; le Gouvernement déposera un amendement pour préserver les nécessités de l'enquête pénale. C'est dire l'ampleur du chantier que j'ai l'honneur d'ouvrir devant vous. La qualité de la loi est la garantie de son effectivité ! (Applaudissements à droite et au centre)

M. Bernard Saugey, rapporteur de la commission des lois.  - Ce nouveau toilettage étant large, la commission des lois a renvoyé aux autres commissions les sujets relevant de leur compétence, se réservant les 144 articles qui la concernaient directement. J'observe tout d'abord que la simplification du droit devient un exercice de plus en plus complexe : nous voici devant 206 articles, très divers, souvent techniques. Nous simplifions, nous clarifions, certes, mais nous innovons également, dépassant manifestement l'objet du texte, qui finit par servir de véhicule commode pour certains ministères. Ne peut-on y voir un assemblage hétéroclite de cavaliers législatifs en déshérence ? Ce serait altérer la sincérité du débat parlementaire, la lisibilité de la loi. Ce texte touffu, est-il simple ? Votre rapporteur jouera le jeu quand les articles se contenteront de simplifier. Mais nous déplorerons l'insertion de dispositions qui figurent déjà dans d'autres textes. (M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois, approuve)

La lecture des 141 articles en discussion souligne les dérives : nous allons supprimer la référence à la peine de mort ; nous réglerons le délai de paiement d'amendes forfaitaires, nous réparerons des omissions, nous supprimerons des régimes spéciaux sans objet ou encore des demandes administratives, nous préciserons les conditions de démissions des conseillers communautaires des EPCI, nous prendrons des dispositions utiles en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique.

Mais certaines dispositions dépassent l'objet du texte, quel que soit le bien-fondé des mesures : votre commission a donc supprimé les articles modifiant le droit de préemption, ou la définition des peines, dans le cas de prise d'otage, ou encore ceux relatifs à la mémoire numérique, puisque nous examinons un autre texte sur ce thème.

Votre commission, sur divers points, a aussi apporté les compléments et clarifications qui lui paraissaient nécessaires et cherché à améliorer le fonctionnement de la justice administrative. Elle a, en particulier, confirmé la suppression du classement de sortie de l'ENA, nous consoliderons la nouvelle procédure de classement à la sortie en revenant sur la procédure retenue par les députés pour les auditeurs au Conseil d'État, afin de vérifier l'adéquation des compétences.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Nous en reparlerons : les règles doivent être les mêmes pour tous !

M. Bernard Saugey, rapporteur.  - Je déplore le caractère tardif des 49 amendements gouvernementaux : nous avons commencé par les refuser en bloc, le 19 octobre, avant d'examiner mercredi ceux qui nous paraissaient opportuns. Sous ces réserves, la commission des lois vous invite à adopter son texte. (Applaudissements au centre et à droite)

Mme Françoise Henneron, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales.  - Je remercie la commission des lois de nous avoir fait confiance. Nous sommes attachés à la simplification du droit qui rend la loi plus accessible. Cependant, il faut également rechercher la rigueur et la clarté dès la rédaction des nouveaux textes, ce qui suppose de pouvoir en débattre avec suffisamment de temps, tout comme nous devons éviter de multiplier les habilitations.

Les lois de simplification ne doivent pas se transformer en lois « diverses dispositions » contenant toutes celles qui n'ont pu trouver place ailleurs.

Notre commission a supprimé tous les articles relevant de la loi de finances ou de la loi de financement, y compris, malheureusement, celui qui aurait profité aux conjoints de titulaires du RSA mais qui aggravait les charges des départements. Nous avons supprimé les articles transposant la directive Services parce qu'un projet de loi devait les accueillir mais le Gouvernement insiste pour éviter une condamnation. Nous vous proposerons également de supprimer certaines mesures relatives aux personnes handicapées, qui ne nous ont pas paru pertinentes.

Notre commission a approuvé la plupart des articles relevant du droit du travail et de la santé publique. Elle considère que l'apport de ce texte, dans ses domaines de compétences, est finalement assez modeste. Elle est favorable à l'adoption du texte, assorti de quelques réserves dont nous discuterons en examinant les articles. Peut-être faudrait-il à l'avenir changer notre méthode de simplification, avec des textes ciblés faisant une place accrue à la consultation.

M. Pierre Bordier, rapporteur pour avis de la commission de la culture.  - L'article 27 modifie la loi du 16 juillet 1949 relative aux publications destinées à la jeunesse, pour l'adapter à la directive européenne. Cette loi comporte de nombreuses mentions obsolètes. Nous y remédions, d'abord en modifiant la composition de la commission de contrôle des publications.

Le dispositif cependant, est aussi réglementaire : nous entendons du Gouvernement qu'il prenne les textes nécessaires. Comme pour les jeux vidéo, nous souhaitons que les éditeurs de publications pornographiques procèdent à une auto-classification, ce qui permettra à la commission de contrôle de se consacrer à sa véritable tâche.

L'Assemblée nationale a supprimé le Haut conseil à l'éducation, malgré l'utilité de son travail ; nous le rétablissons. Nous avons encore précisé les conditions d'inscription à l'Ordre des architectes.

La commission de la culture a donné un avis favorable, sous réserve de ses amendements. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Hervé Maurey, rapporteur pour avis de la commission de l'économie.  - Adopté le 2 décembre 2009, par l'Assemblée nationale, puis en octobre 2010 par notre commission, le texte arrive enfin devant nous. C'est un fourre-tout : auto-écoles et pollution marine, s'y côtoient, c'est dire...

La commission de l'économie a proposé une trentaine de modifications que la commission des lois a toutes retenues, y compris la suppression de la réforme du droit de préemption urbaine.

J'aimerais que ce soit la dernière loi de simplification. La commission des lois partage notre avis sur ce point.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Comme à chaque fois !

M. Hervé Maurey, rapporteur pour avis.  - Huit heures vingt, soit deux minutes trente par article : c'est la moyenne passée par nos collègues députés à ce débat. Est-il raisonnable que le Gouvernement dépose 43 amendements avant le débat en commission, puis 48 sur la rédaction établie par celle-ci ? Le délai de quelques heures pour les examiner n'est guère satisfaisant.

Depuis le début des années 2000, pas moins de quatre lois de simplification : d'initiative d'abord gouvernementale, avec force ordonnances, elle est devenue plutôt parlementaire. Mais comme le dit le professeur Delvolvé, ces textes sont souvent « indignes du Parlement » : je comprends qu'il faille toiletter la loi mais cela ne doit pas devenir la priorité du parlement, d'autant que la discussion de ces textes fourre-tout ne fait pas recette. Pire, le Gouvernement exhume des articles sur toutes sortes de sujets, quand nos collègues ne se prêtent pas également au jeu : la loi de simplification alors complexifie!

Parfois, on veut aussi rejouer le match en faisant passer des dispositions déjà écartées, comme par exemple à propos des logements vacants. C'est le signe d'un dysfonctionnement de la démocratie parlementaire, si nous légiférons trop -70 lois par an- et trop vite.

Ainsi, témoignage de cette frénésie législative, l'ordonnance de 1945 sur l'entrée et le séjour des étrangers a été réformée 70 fois !

Personne n'est hostile à la simplification, aussi serions-nous très inspirés de regarder ce que font nos voisins, avec des exercices réguliers et sectoriels de simplification.

Nous sommes proches de la fin de l'année : je forme le voeu que cette loi de simplification soit la dernière du genre et que la loi soit dorénavant plus claire et le débat plus attractif, conformément au voeu de notre Président !

Cependant, notre commission a émis un avis favorable. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Jean-Pierre Sueur.  - On respire !

M. Jacques Mézard.  - Après avoir posé le bon diagnostic, monsieur le ministre, vous n'avez pas prescrit le bon traitement ! Nos lois ne méritent pas d'être ainsi toilettées ! Depuis la précédente loi de 2009, le titre a changé. Il est vrai qu'elle avait suscité la polémique car une de ses dispositions, noyée dans la masse, qui avait franchi tous les sas de sécurité juridique, avait supprimé la possibilité pour le juge de dissoudre une personne morale coupable d'escroquerie. L'église de scientologie était alors dans tous les esprits...

Cette proposition de loi contient des dispositions extrêmement hétéroclites, dont des réformes de grande ampleur qui n'ont rien à voir avec la simplification ; elle méconnaît le principe de clarté et d'intelligibilité de la loi. Certes, cette proposition de loi a fait l'objet d'un examen préalable par le Conseil d'État, après que son auteur eût sollicité, sans publicité, le cabinet privé Nexis pour 84 000 euros. Trop de cabinets privés sont déjà à l'oeuvre, qui permettent le transfert de propositions législatives vers des textes accueillant -avec le maximum de discrétion. Une quinzaine de professeurs de droit ont été sollicités et certaines mesures proviennent de suggestions formulées sur le site internet « Simplifions la loi » ! Ce concerto cacophonique ne mérite pas un quatrième acte, du moins pas dans ces conditions.

Je salue le travail de M. Saugey mais ces lois de simplification tournent à la voiture-balai, au bric-à-brac législatif, à la session de rattrapage pour propositions de loi avortées ou rejetées, au moyen, pour les lobbies, de faire passer leurs desiderata.

Nous devons traiter cette maladie qu'est l'inflation législative et réglementaire, à laquelle aucun barrage ne résiste. Entre l'édit de Villers-Cotterêts de 1539 et la naissance de la Ve République, il y eût moins de lois que depuis 1958 ! Le recueil des lois de l'Assemblée nationale comptait 2556 pages en 2004 contre 620 en 1970...

Le texte a une utilité lorsqu'il supprime des lois. Celui d'aujourd'hui en élimine 50, devenues inapplicables faute de mesures d'application. L'article 33 évapore diverses commissions. Mais il ne faut pas mélanger le travail de suppression avec l'introduction de dispositions nouvelles, sauf à alimenter ce qu'on est censé combattre.

Le Conseil d'État, en 2006, a souligné que les lois de simplification finissaient souvent par compliquer les textes en vigueur. Ainsi, la proposition de loi modifie 48 codes, parfois en contradiction avec des textes en navette.

Nous déplorons l'empilement de normes stratifiées, que rien ne parvient à contenir malgré l'objectif à valeur constitutionnelle de clarté et d'intelligibilité de la loi. De surcroît, l'abolition de la barrière entre domaine législatif et réglementaire aboutit à des « neutrons législatifs », selon l'expression de Pierre Mazeaud.

Nous avons déposé des amendements de suppression, notamment de l'article relatif au droit de préemption qui n'a rien à faire ici ; on se demande d'ailleurs qui peut bien être à son origine... De même, le rapporteur a proposé de supprimer l'article 107 ; il approuve également la suppression de l'article 104.

De nombreuses dispositions se télescopent avec d'autres textes en cours d'élaboration ou de navette ; elles illustrent une dissociation de la pensée juridique -on utilise un autre nom dans d'autres matières...

La révision constitutionnelle de 2008 devait renforcer les droits du Parlement, dans les faits limités tant que le Gouvernement et une partie des parlementaires se calent sur le temps médiatique. Comme le notait M. Denoix de Saint-Marc, l'action politique a pris la forme d'une gesticulation législative. Il ajoutait qu'au lieu que la loi soit solennelle, brève et permanente, elle était devenue bavarde, précaire et banalisée. Ce texte appartient à cette dernière catégorie. Nous ne l'approuverons pas. (Applaudissements à gauche)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - « Simplification du droit » : la formule est trop vague. Nous en sommes pourtant à la sixième depuis le début de la législature. On pourrait s'attendre à l'élimination de textes obsolètes ou de procédures inutilement lourdes ; mais trop d'articles modifient substantiellement le droit sans le simplifier. L'intitulé prête à sourire. Personne ne peut trouver de l'ordre dans ce désordre, sinon la majorité et le Gouvernement...

En français, le terme « amélioration » désigne un changement en mieux. Il n'en est rien ici. Déjà, la loi du 12 mai 2009 comportait un article modifiant 57 dispositions législatives différentes, dont celle dont on a parlé à propos de la scientologie. Lorsqu'il était chargé de la réforme de l'État, M. Woerth avait donné mission à la Cour des comptes d'évaluer les effets de la loi du 2 juillet 2003 habilitant le Gouvernement à simplifier le droit par ordonnance ; celle-ci avait relevé les effets d'aubaine législatifs et souligné que « la complexité des textes renvoyait à la complexité des réalités de la société ».

On nous propose aujourd'hui de modifier des textes de loi fort disparates. Heureusement, le rapporteur a supprimé certains articles, mais laissé s'organiser la transposition en catimini de la directive Bolkestein, qui était au coeur du rejet par les électeurs de la Constitution européenne.

Non contents de légiférer trop, les parlementaires légifèrent mal, ce qui finit par les déconsidérer aux yeux de nos concitoyens. Depuis 2009, nous avons été saisis en majorité de textes présentés selon la procédure d'urgence. Ce n'est pas sans conséquence pour la lisibilité de textes censés exprimer la volonté générale selon les termes de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Le Conseil constitutionnel s'est appuyé sur les articles 3 et 6 de cette même déclaration pour exiger la clarté et la sincérité du débat parlementaire. Celui d'aujourd'hui n'est pas sincère puisque cette proposition de loi n'est qu'un projet de loi déguisé, qui a nécessité l'intervention de onze rapporteurs du Conseil d'État, l'appui de l'administration centrale et d'un cabinet privé.

Notre rapporteur suggère dans son rapport néanmoins honnête (on s'étonne sur le banc des commissions et sur celui du Gouvernement) qu'il faudra, à l'avenir, procéder autrement. Pourquoi pas aujourd'hui ?

Attachés aux services publics, nous repoussons la scélérate directive Bolkestein. Celle-ci aurait en principe dû être transposée il y a plus d'un an. Le Gouvernement semble avoir abandonné son projet de loi-cadre de transposition. Je ne sais pas si nous pouvons être « vigilants », puisque la présente proposition de loi est censée opérer à droit constant. Il est d'ailleurs étrange qu'une proposition de loi ratifie une ordonnance...

De nombreux amendements ont été déposés, ce qui ajoute au tour de passe-passe. Je pense à celui, surprenant, de M. Zocchetto qui bouleverse notre tradition contentieuse. Il semble que l'avis favorable de la commission ait été donné sans discussion au sein de celle-ci.

Sous prétexte de simplifier, le Parlement est dessaisi de sa fonction législative. Cette parodie de débat ne l'honore pas. Nous ne pouvons l'accepter. (Applaudissements à gauche)

La séance, suspendue à 18 heures, reprend à 18 heures 10.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Je vais m'abstenir de propos à caractère général, après l'exposé talentueux qui en a été fait par les précédents orateurs. En outre, il m'est arrivé jadis de rapporter à l'Assemblée nationale des textes « portant diverses dispositions » présentés par un gouvernement que je soutenais. J'espère que les leçons du passé seront tirées et que le gouvernement que je soutiendrai bientôt s'abstiendra de telles pratiques, mais rien n'est arrivé... (Rires)

Nous ne voterons aucune disposition relative à la directive Services. Un texte spécifique aurait dû être déposé pour sa transposition. Nous réprouverons également le recours aux ordonnances.

Je remercie le rapporteur de la commission des lois pour son écoute et la clarté de sa position quant à certains articles du texte, notamment celui supprimant les plans personnalisés de compensation du handicap : toutes les associations concernées défendent ce plan.

J'en viens à mes propositions d'enrichissement. Mme Tasca parlera de l'ENA. Je me bornerai donc à évoquer l'atteinte aux principes républicains. Nous en avons débattu ici il y a un an ou deux et nous nous étions retrouvés avec M. de Rohan.

Monsieur le garde des sceaux, notre proposition sur les écoutes administratives vous ira sans doute droit au coeur. Vous tendez l'oreille à juste titre. (Sourires) Un vrai malaise -le mot est faible- est apparu : il semble que la DCRI se soit préoccupée des appels passés et reçus par des journalistes, un membre du cabinet de votre prédécesseur, et même des magistrats. Le Premier ministre avait déclaré à l'Assemblée nationale que le respect des libertés publiques imposait que les interceptions fussent strictement limitées et contrôlées de façon étroite. On ne peut absolument pas utiliser la loi de 1991 pour justifier de telles pratiques. S'agissant des fichiers, la délégation parlementaire au renseignement devait être saisie des décrets en Conseil d'État créant des traitements dispensés de publication au Journal officiel.

Nous proposerons également de supprimer l'article L. 622-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : il s'agit de ce qu'on a appelé le délit de solidarité. En l'état du droit, le fait d'apporter une aide directe ou non à des étrangers en situation irrégulière est punie de cinq ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende, ce qui est particulièrement choquant. M'objectera-t-on que tel n'est pas l'objet du texte ? Mais la proposition de loi n'a pas d'objet précis ! En outre, son article 24 modifie le Ceseda. Je conseille à chacun de lire le petit livre Indignez-vous de Stéphane Hessel, personnalité de haute valeur morale, grand résistant, contributeur à la Déclaration universelle des droits de l'homme ; on y trouvera des paroles fortes à ce sujet. Mettre fin au délit de solidarité serait faire simplement oeuvre d'humanité. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Monsieur le garde des sceaux, il ne serait pas correct qu'au détour d'un amendement, on dispense le rapporteur public au sein des tribunaux administratifs de formuler ses conclusions à propos de matières fixées par décret. Le Gouvernement, en 1998, répondant à la Cour européenne des droits de l'homme, relevait à juste titre que le rapporteur public appartenait aux meilleures traditions françaises. Et je ne parle pas de l'intervention du décret.

Plusieurs de nos collègues proposeront des dispositions de simplification, notamment pour éviter les tracasseries et les vexations subies par nos concitoyens nés à l'étranger. Nous formulerons aussi des suggestions à propos du parc locatif privé, notamment au regard de la flambée des prix en Ile-de-France.

Enfin, nous avons présenté une série de dispositions sur l'autopsie judiciaire. Je vous remercie, monsieur le rapporteur, de les avoir prises en compte pour introduire plus d'humanité envers les familles. Un registre consigne aujourd'hui les noms des citoyens refusant le don d'organes : il faudrait aussi un registre d'acceptation.

A propos des entrées de villes, je déplore que le Gouvernement propose de supprimer des dispositions adoptées à l'unanimité par le Sénat.

Bien sûr, l'ensemble est disparate, mais telle est la loi du genre. Les concepts de justice, de solidarité, nos conceptions républicaines assureront l'unité de nos propositions. (Applaudissements à gauche)

M. Christophe-André Frassa.  - Longtemps, le droit français a été un modèle dans le monde car il était clair et concis. Depuis, les choses ont bien changé au gré de l'intégration de normes européennes et internationales et de lois toujours plus nombreuses, souvent plus complexes et obscures. La loi doit être claire, intelligible, stable et cohérente pour assurer la sécurité juridique des citoyens, donc le bon fonctionnement de la démocratie. Notre objectif n'est pas de fustiger une boulimie législative mais d'aider les Français à y voir plus clair dans ce que beaucoup considèrent encore comme un capharnaüm.

Enfin, comble de la légitimité, ce texte est le premier à avoir été soumis au Conseil d'État par l'Assemblée nationale : c'est dire que des précautions ont été prises. Certaines mesures concernent tous les Français : les administrations devront échanger entre elles les pièces au lieu de demander aux citoyens de les fournir de nouveau ; elles devront aussi informer de leur erreur les citoyens ayant produit une demande avec vice de forme et leur indiquer quelle démarche adopter.

Le droit des entreprises sera simplifié ; cela diminuera leurs coûts de gestion sans rien retirer à la transparence.

Les administrations ne sont pas oubliées : l'article 34 continue la « chasse aux rapports » ! Internet est pris en compte pour organiser des consultations ouvertes.

Ce texte est long et hétérogène, on l'a dit, il était dense et sa version initiale manquait de clarté : nos rapporteurs l'ont beaucoup amélioré, tout en le recentrant. Exit l'extension de la réforme du droit de préemption ; c'est une bonne chose. La simplification améliorera le travail administratif et législatif ; ce texte utile était très attendu. Nous nous devions d'agir avec résolution.

Le groupe UMP l'adoptera avec conviction ! (Applaudissements à droite)

M. Josselin de Rohan.  - Je me cantonnerai à l'article 146 bis, relatif à l'ENA. Le Gouvernement est un, monsieur le garde des sceaux : c'est donc vous qui allez devoir subir mon sermon ! (Sourires)

En supprimant le concours de sortie à l'ENA, le Gouvernement a oublié la procédure de recrutement pour les auditeurs au Conseil d'État, qui exigeait un texte de nature législative. Il a donc fait adopter, contre l'avis de la commission des lois de l'Assemblée nationale, une disposition particulière à l'affectation au Conseil d'État : c'était recréer un concours spécial ! Je félicite notre rapporteur de revenir au droit commun. De fait, le législateur peut s'exprimer bien que la mesure soit réglementaire. On remplace un système simple et éprouvé par un dispositif complexe qui sera source de frustration et de contentieux. La nouvelle procédure s'apparente au cross-country, voire au mercato : les élèves formulent leur souhait, une présélection anonyme est envoyée aux recruteurs, des entretiens ont lieu avant la décision prise collégialement. Suit une période probatoire de quelques mois, une commission ad hoc validant l'ensemble de la procédure. On dit que les élèves préfèrent cette procédure mais l'association des anciens élèves y est hostile ; les parlementaires ne paraissent guère enthousiastes : je l'ai constaté en posant une question orale. Pourquoi avoir supprimé le concours de sortie ? Comment le dossier d'aptitude permettra-t-il de distinguer les élèves ? Que devront faire les élèves pour attirer l'attention des recruteurs ? Bien danser ? Être bons bonimenteurs ? Être membres de tel cercle, de tel parti, de tel syndicat ? L'enjeu est pourtant l'accès aux plus hautes fonctions de l'État ! Comment éviter la cooptation ? Dans l'Éducation sentimentale, Flaubert fait dire à l'un de ses personnages qu'il faut supprimer les diplômes, avant qu'un autre ne veuille en confier la délivrance au peuple. L'ENA a mis fin à un système corporatiste ; la suppression du concours de sortie menace la transparence et l'équité. Je crains que vous ne soyez bientôt contraint de remettre l'ouvrage sur le métier ! (Applaudissements sur tous les bancs)

M. Richard Yung.  - Je me focaliserai sur les articles 135 bis et 149 quinquies. Je remercie M. le rapporteur d'avoir introduit le premier, relatif au droit électoral des Français de l'étranger. Il s'agit d'abord de communiquer la liste des candidats aux élections consulaires : actuellement, le ministère refuse de nous la communiquer, ce qui nous place dans une situation unique. Il s'agit ensuite de l'interdiction de propagande électorale à l'étranger : cette interdiction n'a plus de sens dans l'Union européenne mais nous traînons ce sujet depuis le XIXe siècle. Cependant, la supprimer déborderait notre sujet car cela reviendrait à autoriser la propagande électorale à la veille des élections en France : je vais réfléchir au problème pour trouver une solution.

Sur les inventions faites par des salariés ensuite, un problème se pose : pour se faire reconnaître comme inventeur, le salarié doit engager une procédure lourde. Mme Lagarde a demandé un rapport au Conseil supérieur de la propriété industrielle : ce rapport est tombé aux oubliettes ; en 2009, M. Sarkozy a souhaité mieux associer les salariées aux fruits de leurs inventions. Mais comme rien n'est venu depuis, je proposerai des amendements issus de ma proposition de loi. Le rapporteur et le Gouvernement me suivent, sauf sur la rémunération qui relèverait, selon eux, des accords professionnels ; c'est vrai... mais cela ne marche pas !

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - Ce texte hétéroclite est nécessaire, il comporte des mesures très utiles aux Français de l'étranger. J'ai proposé ailleurs d'établir des listes électorales uniques pour les Français de l'étranger : ce serait plus simple et moins cher. Je me réjouis de la suppression de l'article 149 bis, qui tendait à abroger la limite d'âge des administrateurs d'organismes de sécurité sociale.

Comment l'article 5 bis peut-il s'appliquer au Français de l'étranger ? L'aide juridictionnelle ne leur est pas assez accessible, en particulier en cas de déplacement illicite d'enfants : j'espère que le Gouvernement proposera des mesures dans ce sens. Je n'ai pu déposer un amendement, qui aurait subi l'article 40.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois.  - C'est certain !

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - Il faut simplifier le droit pour les Français de l'étranger car le dédale du droit est plus indéchiffrable encore pour eux. La refonte du guichet administratif unique sera un bon outil, de même que le portail unique de la Cnam. L'externalisation de certains services, à condition qu'elle soit encadrée, est une piste intéressante pour alléger la charge de nos consulats administratifs à l'étranger. J'ai toute confiance que le Défenseur des droits reprendra le flambeau du Médiateur et qu'il aura à ses cotés un délégué aux Français de l'étranger. (Applaudissements à droite)

Mme Catherine Tasca.  - Dans ce salmigondis législatif, la suppression du concours de l'ENA pourrait passer inaperçue ; l'énarchie a mauvaise presse mais la procédure « spéciale » de recrutement, chère au Président de la République, revient à jeter avec l'eau du bain le bébé et les principes chers au général de Gaulle et à Michel Debré. Le recrutement par corps avait démontré ses limites et la réforme de 1945, organisant une fonction publique spécialisée et unifiée pour les cadres supérieurs de l'État, devait garantir l'égal accès républicain aux plus hautes fonctions de l'État.

La nouvelle procédure empile plusieurs étapes : projet professionnel, commission de projets, entretiens personnalisés avec les ministères. Comment l'anonymat pourra-t-il être préservé ? Comment la cooptation pourra-t-elle être évitée ? Bien des pistes existent pour améliorer le classement mais on ne saurait s'en passer. L'affectation à la sortie ne détermine pas toute la carrière. L'enjeu, c'est rien moins que l'État et la fonction publique au XXIe siècle : l'État est-il une entreprise ? Le général de Gaulle estimait que non mais le Gouvernement, qui parle « d'employeurs », paraît regarder plutôt vers les cabinets de recrutement.

L'air du temps est à la fascination pour l'entreprise. Je déplore qu'on veuille y sacrifier le principe de l'égalité des chances. La Haute assemblée ne doit pas prêter main à cette pseudo-modernisation. Nous vous proposerons de rétablir le classement, la meilleure, en fait la moins mauvaise, des solutions possibles ! (Applaudissements)

Discussion des articles

Articles additionnels avant l'article premier

M. le président.  - Amendement n°106 rectifié, présenté par Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa de l'article L. 3141-3 du code du travail, les mots : « qui justifie avoir travaillé chez le même employeur pendant un temps équivalent à un minimum de dix jours de travail effectif » sont supprimés.

Mme Alima Boumediene-Thiery.  - Le 20 janvier 2009, la Cour de justice de l'Union européenne a clairement exclu que le droit à un congé payé puisse être subordonné à l'accomplissement d'un temps de travail effectif. Nous vous proposons donc de supprimer l'exigence d'une durée minimale de travail effectif.

Mme Françoise Henneron, rapporteur pour avis.  - La Cour de justice s'est juste prononcée sur le report des congés maladie, pas sur une durée minimale ouvrant droit à congé : avis défavorable, d'autant qu'une durée minimale n'est pas choquante.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Certes, notre droit national n'est pas conforme au droit européen, mais il ne faut pas toucher au droit complexe du travail sans concertation. De plus, une période transitoire semble nécessaire. Retrait ? Nous sommes prêts à travailler avec vous l'année prochaine.

Mme Alima Boumediene-Thiery.  - Pourra-t-on évaluer ce sujet en 2011 ? Dans le cas contraire, je maintiens l'amendement.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Nous y travaillerons dès l'an prochain, mais je ne peux vous garantir que nous en aurons fini le 31 décembre 2011. Au demeurant, vous avez peut-être d'autres préoccupations en ce moment... (Rires)

L'amendement n°106 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°107 rectifié, présenté par Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Avant l'article 1er, insérer un article  additionnel ainsi rédigé :

Le deuxième alinéa de l'article L. 3142-1 du code du travail est complété par les mots : « ou pour l'enregistrement de son pacte civil de solidarité ».

Mme Alima Boumediene-Thiery.  - Le salarié bénéficie d'un congé pour événement familial de quatre jours en cas de mariage. Nous voulons étendre ce congé à l'enregistrement d'un Pacte civil de solidarité (Pacs), comme cela existe déjà dans la fonction publique. Le Médiateur de la République l'a recommandé.

Mme Françoise Henneron, rapporteur pour avis.  - Je suis réservée face à cette étrange nouvelle pour les entreprises, y compris les PME. En outre, elle alignerait le statut du Pacs sur celui du mariage alors que si le Pacs a une utilité, c'est d'avoir un statut différent de celui du mariage. Avis défavorable.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Dès lors que le Pacs n'est pas un mariage, pourquoi demander le congé lié au mariage ? Les conventions collectives comportent déjà des dispositions applicables aux partenaires d'un Pacs. Avis défavorable.

Mme Alima Boumediene-Thiery.  - Cela existe pourtant dans le public !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Je vais déposer une proposition de loi pour faire bénéficier les pacsés de certains droits accordés aux mariés. Le Pacs, auquel nombre d'entre nous se sont opposés, est aujourd'hui un fait social, qui concerne jusqu'aux familles de parlementaires... On m'a répondu alors que la loi sur les retraites examinerait la question des pensions pour les pacsés ; pour les congés, que c'était l'affaire des conventions collectives. Or, la loi sur les retraites n'a rien fait. Nous voulons, comme pour la fonction publique, faire progresser les droits : c'est bien le rôle de la loi, mais vous n'en voulez pas. Un pas en avant, trois pas en arrière... Un alignement des droits est pourtant indispensable.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Le code civil définit trois modalités juridiques de former un couple : le mariage, le concubinage et le Pacs. Nos concitoyens ont toute l'information nécessaire pour choisir la voie qu'ils préfèrent en fonction des avantages et des inconvénients de chaque formule. On ne peut demander les avantages de toutes !

Mme Françoise Henneron, rapporteur pour avis.  - Très bien !

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Le système est clair, ne le rendons pas confus.

L'amendement n°107 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°109 rectifié, présenté par Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le cinquième alinéa de l'article 79 du code civil, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

...° Les prénoms et nom de l'autre partenaire, si la personne décédée était liée par un pacte civil de solidarité ;

Mme Alima Boumediene-Thiery.  - Lors de la dissolution du Pacs, consécutive au décès du partenaire, les dispositions du code civil ont pour effet de minorer non seulement l'existence du partenaire survivant mais également les droits qu'il détient en cette qualité. Il en est ainsi des droits mentionnés à l'article 515-6 du code civil.

Cette simplification aura également pour effet d'assurer un parallélisme avec les dispositions du code civil relatives aux mentions portées sur l'acte de naissance, qui font apparaître les prénoms et noms du partenaire d'un Pacs. La conclusion d'un Pacs est portée en marge des actes de naissance des intéressés. Par symétrie, il faut inscrire le nom du partenaire survivant en marge de l'acte de décès. C'est important au moins pour permettre son maintien dans le logement.

M. Bernard Saugey, rapporteur.  - Avis favorable, comme dans le cas du conjoint survivant.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Très bien !

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Toute mention portée sur un acte d'état civil doit être justifiée par une raison juridique précise. Aux termes de l'article 79 du code civil, la mention du conjoint survivant est justifiée par la vocation successorale de celui-ci. Or, le partenaire survivant d'un Pacs n'est pas héritier légal.

Mme Alima Boumediene-Thiery.  - Ce n'est pas un bon argument.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Si ! Quant au droit de jouissance du logement, il est attribué de plein droit au partenaire survivant qui en fait la demande. L'amendement n'a donc pas d'objet.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Depuis dix ans, le droit du Pacs a évolué. Il est ainsi mentionné en marge de l'acte de naissance.

Mme Alima Boumediene-Thiery.  - Je remercie le rapporteur pour son avis favorable car il a compris l'intérêt de l'amendement, fondé sur la symétrie par rapport à l'inscription du Pacs en marge de l'acte de naissance. Il s'agit non de succession mais de problèmes de la vie quotidienne, comme le maintien dans les lieux.

Mme Catherine Tasca.  - La mention en marge de l'acte de naissance avait pour but de protéger les droits des tiers. Idem pour la mention sur l'acte de décès.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Je comprends bien que vous évoquiez l'intérêt des tiers et celui du partenaire survivant mais je ne peux que vous renvoyer à l'article 79 qui traite de la succession.

L'amendement n°109 rectifié est adopté ; l'article additionnel est inséré.

(Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. le président.  - Amendement n°110 rectifié, présenté par Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 515-6 du code civil est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque le pacte civil de solidarité prend fin par le décès d'un des partenaires, le partenaire survivant est présumé avoir qualité pour pourvoir aux funérailles au sens des dispositions du code général des collectivités territoriales. »

Mme Alima Boumediene-Thiery.  - Cet amendement a pour objet de mettre un terme aux difficultés rencontrées par le partenaire d'un Pacs s'agissant du sort de l'urne cinéraire ainsi que des cendres du partenaire décédé.

En effet, la loi du 19 décembre 2008 est muette sur ce dossier. Le plus souvent, la responsabilité d'organiser les obsèques revient à une personne proche, avec laquelle le défunt avait un lien stable et permanent.

Il arrive que le partenaire soit tenu à l'écart par la famille du défunt, qui nourrit des préjugés contre l'homosexualité par exemple. Nous avons reçu des témoignages poignants de personnes ainsi écartées des funérailles à cause du silence de la loi.

Notre suggestion apaiserait les funérailles, en donnant au partenaire survivant la place qui est la sienne.

M. Bernard Saugey, rapporteur.  - La loi ne définit pas la personne en charge des funérailles. Il n'y a pas lieu de faire exception pour les pacsés. Avis défavorable.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - La loi n'attribue aucun droit en la matière au conjoint survivant. Au juge de se prononcer en cas de conflit. Retrait.

Mme Alima Boumediene-Thiery.  - J'ai pris des engagements auprès de personnes endeuillées qui ont connu ces situations dramatiques, mais je comprends l'application du droit commun. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

L'amendement n°110 rectifié est retiré.

L'article premier demeure supprimé.

L'article premier bis est adopté.

La séance est suspendue à 19 heures 45.

présidence de M. Guy Fischer,vice-président

La séance reprend à 21 heures 45.

Avis sur des nominations

M. le président.  - Conformément aux dispositions des articles 65 et 13 de la Constitution, M. le Premier ministre, par lettre en date du 12 décembre 2010, a demandé à M. le président du Sénat de lui faire connaître l'avis de la commission compétente du Sénat sur le projet de nomination par M. le Président de la République de M. Jean-Pierre Machelon et Mme Rose-Marie Van Lerberghe au Conseil supérieur de la magistrature.

M. le président du Sénat propose M. Pierre Fauchon et Mme Chantal Kerbec pour siéger comme membres du Conseil supérieur de la magistrature.

La commission des lois a été saisie de ces projets de nomination afin de donner son avis, en application de la Constitution.

Accord en CMP

M. le président.  - J'informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 est parvenue à l'adoption d'un texte commun.

Simplification et amélioration du droit (Suite)

M. le président.  - Nous reprenons l'examen de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, de simplification et d'amélioration de la qualité du droit. Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'article 2.

Discussion des articles (Suite)

Article 2

M. le président.  - Amendement n°43 rectifié, présenté par MM. Mézard, Alfonsi, Collin et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Marsin, Milhau, Plancade et Tropeano.

Supprimer cet article.

M. Jacques Mézard.  - Toute simplification des procédures va dans le bon sens mais cet article 2 relève du règlement. Il est pour le moins paradoxal qu'une loi de simplification du droit s'affranchisse de la délimitation du domaine de la loi et du règlement ! Cet article est en outre trop imprécis, malgré la précision apportée par l'Assemblée nationale. Enfin, il nécessiterait une réorganisation fort complexe de l'administration.

M. le président.  - Amendement identique n°89 rectifié, présenté par M. Collombat et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Nombre d'articles de cette proposition de loi sont de caractère réglementaire. Les adopter créerait une jurisprudence.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois.  - Elle n'est pas nouvelle !

M. Jean-Pierre Sueur.  - Je ne suis pas sûr que la distinction de la loi et du règlement soit toujours facile à établir...

En outre, cet article contient des truismes. Qui croirait que les services de l'État ne parlent pas tous les jours aux services de l'État ? Notre rapporteur craint que « cette réforme ambitieuse ne soit vidée de sa substance par le décret en Conseil d'État » si les services refusent de « jouer le jeu ». Nous n'allons pas courir un tel risque !

M. le président.  - Amendement identique n°144, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC-SPG.

Mme Josiane Mathon-Poinat.  - Il y a trente cinq ans, le croisement des données prévu par le fichier Safari -Système automatisé pour les fichiers administratifs et le répertoire des individus- avait donné lieu à un véritable tollé, à la suite, en particulier, de l'article de Philippe Boucher dans Le Monde ; c'est ce qui a provoqué la naissance de la Cnil qui a, d'ailleurs, toujours craint le regroupement des fichiers.

Comme nos collègues et pour les mêmes raisons qu'eux, nous refusons fermement cet article.

M. Bernard Saugey, rapporteur.  - Monsieur Mézard, la mesure relève bien de la loi, qui seule peut encadrer l'échange de données entre administrations. Monsieur Sueur, vous qui remplacez M. Collombat cloué sur son lit de douleur...

M. Jean-Pierre Sueur.  - Nous pensons à lui !

M. Bernard Saugey, rapporteur.  - ...le mécanisme proposé n'est pas flou, il est pragmatique : c'est le décret en Conseil d'État qui déterminera tout.

Madame Mathon-Poinat, les députés ont réduit les possibilités d'échanges aux données « strictement » nécessaires.

Défavorable donc à la suppression de cet article.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Cet article 2 s'inspire de l'avis du Conseil d'État. Les échanges de données entre administrations ont été multipliés : la loi doit les encadrer. Un décret en Conseil d'État précisera les modalités de ces échanges.

Les amendements identiques nos43 rectifié, 89 rectifié et 144 ne sont pas adoptés.

L'article 2 est adopté.

Articles additionnels

M. le président.  - Amendement n°44 rectifié, présenté par MM. Mézard, Alfonsi, Collin, Barbier et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Marsin, Milhau, Plancade et Tropeano.

Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À l'article 16-1 de la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, le mot : « administrative » est remplacé par le mot : « compétente ».

M. Jacques Mézard.  - L'article 16-1 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, introduit par la loi de simplification du droit du 20 décembre 2007, en a amoindri la portée.

M. Bernard Saugey, rapporteur.  - Disposition opportune.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Très bien !

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Excellent amendement.

M. Daniel Raoul.  - Comme d'habitude, Me Mézard a été pertinent. Je rêve d'habiter Amsterdam, où un seul numéro suffit à connaître toutes les informations utiles ou à renouveler ses papiers...

M. Paul Blanc.  - Il n'est pas interdit de rêver !

L'amendement n°44 rectifié est adopté et devient un article additionnel.

L'article 3 est adopté.

L'article 3 bis demeure supprimé.

L'article 4 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°24, présenté par M. Bordier, au nom de la commission de la culture.

Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 7121-7 du code du travail, il est inséré un article L. 7121-7-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 7121-7-1. - Les employeurs relevant du champ d'application du guichet unique fixé à l'article L. 7122-22 doivent, en l'absence de dispositions conventionnelles spécifiques aux artistes et techniciens du spectacle au titre de leur activité principale, lorsqu'ils emploient un artiste ou un technicien du spectacle, les faire bénéficier des dispositions d'une convention collective des activités du spectacle et s'y référer dans le formulaire de déclaration d'emploi. »

M. Pierre Bordier, rapporteur pour avis.  - La négociation des conventions collectives dans le secteur du spectacle, engagée après la crise de 2003, s'achève. Toutefois, il s'avère nécessaire de procéder à une mise en cohérence juridique afin d'assurer une couverture conventionnelle homogène aux artistes et techniciens du spectacle lorsqu'ils interviennent en dehors du champ des conventions collectives du secteur du spectacle vivant. Tel est l'objet du présent amendement.

M. Bernard Saugey, rapporteur.  - Favorable.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Favorable.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Notre groupe votera cet amendement particulièrement protecteur pour les intermittents.

L'amendement n°24 est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°123 rectifié, présenté par M. Collombat et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le deuxième alinéa de l'article L. 442-5-1 du code de l'éducation est ainsi rédigé :

« En conséquence, cette contribution revêt le caractère d'une dépense obligatoire lorsque la commune de résidence, le regroupement pédagogique intercommunal auquel elle participe, organisé dans le cadre d'un établissement public de coopération intercommunale ou d'une entente au sens de l'article L. 5221-1 du code général des collectivités territoriales, ne dispose pas des capacités d'accueil nécessaires à la scolarisation de l'élève concerné dans son école publique ou lorsque la fréquentation par celui-ci d'une école située sur le territoire d'une autre commune que celle où il est réputé résider trouve son origine dans des contraintes liées : »

M. Jean-Pierre Sueur.  - M. Collombat tient particulièrement à cet amendement.

L'article premier de la loi du 28 octobre 2009, dite loi Carle, ne définit pas de manière claire les regroupements pédagogiques intercommunaux concernés. Cette lacune pourrait permettre à certaines collectivités d'échapper à leurs obligations.

Le Sénat a souhaité que la capacité d'accueil d'une commune soit appréciée à l'échelle du regroupement pédagogique intercommunal (RPI). Le décret du 9 novembre dernier va contre la volonté ainsi manifestée par le Sénat et exclut la moitié des RPI de l'application de la loi Carle.

M. Pierre Bordier, rapporteur pour avis.  - Nous avions collectivement souhaité renvoyer à un décret. Or celui-ci ne tient compte que des RPI adossés à un EPCI ; l'amendement n°123 rectifié vise à ce que la loi Carle s'applique aussi aux ententes de communes. Défavorable.

Mme Marie-Thérèse Hermange.  - Belle simplification !

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - L'amendement Charasse aura beaucoup fait parler... Il y a toujours un cas particulier ! Le décret a été soumis à l'avis du Conseil d'Etat ; il a été examiné par le Conseil supérieur de l'éducation nationale le 30 septembre dernier et devrait être prochainement publié. Une précision n'est pas nécessaire. Retrait ou rejet.

M. Bernard Saugey.  - Cet amendement me paraît excellent. M. Collombat a raison : nous aurons des problèmes quand nous regrouperons des EPCI. Vous verrez !

M. Jean-Pierre Sueur.  - Je rappelle qu'il y a là une rupture d'égalité !

M. Daniel Raoul.  - Je me souviens de l'arrivée de l'amendement Charasse ! Depuis lors, on ne cesse de chercher à traiter des cas particuliers. Pourquoi ne pas revenir à l'avant-Charasse ? Pourquoi se compliquer la vie ? (Assentiment sur de nombreux bancs)

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement n°123 rectifié, mis aux voix par assis et levé, n'est pas adopté.

Article 4 bis

M. le président.  - Amendement n°145, présenté par M. Voguet et les membres du groupe CRC-SPG.

Supprimer cet article.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - La ratification de cette ordonnance n'a rien à faire dans une loi de simplification du droit.

M. Bernard Saugey, rapporteur.  - C'est à la commission de la culture de s'exprimer.

M. Pierre Bordier, rapporteur pour avis.  - Notre commission tient à ce que l'ordonnance relative au cinéma soit ratifiée.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Sagesse.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Nous ne pouvons voter cet amendement, quelque désamour que nous ayons pour les ordonnances. Celle-ci avait fait l'objet d'un projet de ratification présenté par notre collègue Lagauche, qui avait insisté sur le large accord des professionnels concernés. Nonobstant le fait qu'il y a ordonnance, nous sommes favorables au prochain amendement de M. Saugey.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Je suis convaincu par M. Sueur : contre. (Sourires)

L'amendement n°145 n'est pas adopté.

M. le président. - Amendement n°237, présenté par M. Saugey, au nom de la commission des lois.

Alinéa 2 à 5

Remplacer ces alinéas par un paragraphe ainsi rédigé :

... - Après le deuxième alinéa de l'article L. 112-1 du code du cinéma et de l'image animée, il est inséré un 1° A ainsi rédigé :

« 1° A De deux parlementaires désignés respectivement par les commissions chargées de la culture de l'Assemblée nationale et du Sénat ; »

M. Bernard Saugey, rapporteur.  - Amendement rédactionnel.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Favorable.

M. Daniel Raoul.  - Ce n'est pas rédactionnel !

M. Bernard Saugey, rapporteur.  - Mais si, c'était déjà le cas !

L'amendement n°237 est adopté.

L'article 4 bis, modifié, est adopté.

Article 4 ter

M. le président.  - Amendement n°146, présenté par M. Voguet et les membres du groupe CRC-SPG.

Supprimer cet article.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Même chose.

L'amendement n°146, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.

L'article 4 ter est adopté.

Article 4 quater

M. le président.  - Amendement n°147, présenté par M. Voguet et les membres du groupe CRC-SPG.

Supprimer cet article.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - La ratification de cette ordonnance n'a rien à faire dans une loi de simplification du droit.

M. Pierre Bordier, rapporteur pour avis.  - Défavorable.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Défavorable.

M. Daniel Raoul.  - Cette directive Services est lourde de conséquences pour les professionnels concernés. C'est bien pour cela que vous la morcelez ! Un débat d'ensemble aurait été nécessaire ; nous ne pouvons nous satisfaire de sa transposition en catimini.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - C'est fort de café qu'une directive qui pose d'énormes problèmes soit ainsi passée en douce.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois.  - Il s'agit simplement ici de ratifier une ordonnance de 2005 sur la profession d'architecte.

L'amendement n°147 n'est pas adopté.

L'article 4 quater est adopté, ainsi que les articles 5 et 5 bis.

Article 6

M. le président.  - Amendement n°148 rectifié bis, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéas 10 à 12

Supprimer ces alinéas.

Mme Josiane Mathon-Poinat.  - La loi du 30 juin 2000 avait fixé un cap important pour les recours devant l'autorité administrative. Mais les tribunaux administratifs, dont les moyens diminuent sans cesse, sont engorgés, en particulier par la hausse des recours en matière d'immigration et la baisse des effectifs. Il serait paradoxal de faire une expérimentation sur les Rapo !

M. Bernard Saugey, rapporteur.  - Il est exact que la loi du 30 juin 2000 avait fait de ces recours une obligation légale. Mais, hormis en matière militaire, cette loi est restée lettre morte. Nous le déplorons. Il faut sortir de ce blocage, c'est l'objet de cet article : mieux vaut une expérimentation réaliste qu'une obligation inapplicable. Retrait ?

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Même avis.

L'amendement n°148 rectifié bis n'est pas adopté.

L'article 6 est adopté.

Article 6 bis A

M. le président.  - Amendement n°81 rectifié, présenté par Mme Klès et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 2, dernière phrase

après le mot :

succession

insérer les mots :

ou donation

M. Jean-Pierre Sueur.  - Il s'agit des propriétés en temps partagé ; je suis reconnaissant à la commission d'avoir repris un de nos amendements mais je voudrais aller plus loin pour traiter le cas des nombreuses personnes qui sont dans une situation inextricable. Je pense à ceux qui ont hérité d'une semaine de propriété dans un appartement en temps partagé, la semaine durant laquelle la station de sport d'hiver est fermée. Ces personnes ne peuvent pas profiter de cette jouissance mais pas non plus sortir de cette propriété ! Pourquoi limiter la portée de cet article à « deux ans » ?

M. Bernard Saugey, rapporteur.  - La commission des lois a adopté un amendement Sueur sur cet article pour permettre un retrait, par décision de justice, d'un associé sans l'accord des autres associés. L'acheteur savait de quelle semaine il s'agissait ! La donation doit être acceptée par le donataire pour prendre effet ; dès lors qu'elle est acceptée, il n'y a pas lieu de prévoir un retrait de droit.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - La donation doit être expressément acceptée. L'amendement n°81 rectifié n'est donc pas justifié. Retrait.

L'amendement n°81 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°80 rectifié, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 2, dernière phrase

Á la fin supprimer les mots :

depuis moins de deux ans

M. Jean-Pierre Sueur.  - Je m'en suis expliqué.

L'amendement n°80 rectifié, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.

L'article 6 bis A est adopté, ainsi que les articles 6 bis et 7.

Article 8 (supprimé)

M. le président.  - Amendement n°197, présenté par le Gouvernement.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Lorsqu'une autorité administrative est tenue de procéder à la consultation d'une commission consultative préalablement à l'édiction d'un acte réglementaire, à l'exclusion des mesures nominatives, elle peut décider d'organiser une consultation ouverte permettant de recueillir, sur un site internet, les observations des personnes concernées. L'autorité administrative fait connaître par tout moyen les modalités de la consultation.

Au terme de la consultation, elle établit une synthèse des observations qu'elle a recueillies, éventuellement accompagnée d'éléments d'information complémentaires. Cette synthèse est rendue publique.

Cette consultation ouverte se substitue à la consultation obligatoire en application d'une disposition législative ou réglementaire. Les commissions consultatives dont l'avis doit être recueilli en application d'une disposition législative ou réglementaire peuvent faire part de leurs observations dans le cadre de la consultation prévue au présent article.

Demeurent obligatoires les consultations d'autorités administratives indépendantes prévues par les textes législatifs et réglementaires, les procédures d'avis conforme, celles qui concernent l'exercice d'une liberté publique, constituent la garantie d'une exigence constitutionnelle ou traduisent un pouvoir de proposition ainsi que celles mettant en oeuvre le principe de participation.

Un décret en Conseil d'État fixe les conditions d'application du présent article, notamment les modalités d'organisation de la consultation, dont la durée ne peut être inférieure à quinze jours.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Les consultations des commissions sont souvent trop formelles ; nous souhaitons favoriser l'émergence d'une démocratie participative ouverte sur la modernité.

M. Daniel Raoul.  - Ça fait courant d'air ! (Sourires)

M. Bernard Saugey, rapporteur.  - C'est court-circuiter les commissions consultatives que le pouvoir réglementaire n'ose pas supprimer ou réformer ; c'est aussi discréditer celles qui fonctionnent bien. Défavorable.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Lumineux !

L'amendement n°197 n'est pas adopté.

L'article 8 demeure supprimé, ainsi que les articles 9 et 9 bis.

Article 10

M. le président.  - Amendement n°91 rectifié, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Supprimer cet article.

M. Daniel Raoul.  - Dans le cadre de la LME -Leclerc Michel Edouard !-, le Gouvernement est allé au-delà de ce qu'exigeait la directive Services, notamment relative à la condition de nationalité pour l'inscription sur le registre national du personnel navigant de l'aviation civile.

M. le président.  - Amendement identique n°149, présenté par Mme Schurch et les membres du groupe CRC-SPG.

Mme Josiane Mathon-Poinat.  - Nous nous opposons à l'application de la directive Services au personnel navigant de l'aviation civile. Les garanties actuellement exigées doivent être conservées, elles sont indispensables. L'inscription dans les registres professionnels est un élément essentiel du statut du personnel navigant. Un moratoire est certes prévu pour les Français mais les compagnies aériennes seront incitées à recruter à l'étranger des navigants moins qualifiés.

M. Hervé Maurey, rapporteur pour avis.  - Nos collègues de l'opposition veulent supprimer petit à petit la transposition de la directive Services, laquelle a commencé il y a plusieurs années. Vos regrets sont d'arrière garde. (Exclamations à gauche) Cela dit, je suis favorable à cet amendement car cette disposition figure dans la proposition de loi Longuet-Bizet-Emorine, qui risque fort d'être définitivement adoptée avant ce texte-ci.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Même avis. La CMP est prévue le 21 décembre.

M. Daniel Raoul.  - Nous faisons un travail de bénédictin pour nous y retrouver ! Nous ne maîtrisons pas non plus le calendrier, c'est bien fâcheux s'agissant, par exemple, du droit de l'urbanisme.

Les amendements identiques nos91 rectifié et 149 sont adoptés et l'article 10 est supprimé.

L'amendement n°261 devient sans objet.

Articles additionnels

M. le président.  - Amendement n°70 rectifié, présenté par Mme Des Esgaulx.

Après l'article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le dernier alinéa de l'article L. 1321-6 du code du travail est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :

Ces dispositions ne sont pas applicables :

1° Aux documents reçus de l'étranger ou destinés à des étrangers ;

2° Aux documents nécessaires à la certification, à la maintenance, à l'utilisation opérationnelle des aéronefs et aux supports de formation dans ces domaines.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - Nous prenons des risques pour la sécurité du transport aérien. L'anglais s'est imposé comme unique langage d'échange aérien, y compris dans nos tours de contrôle. On ne peut exiger de tout traduire en français.

M. Hervé Maurey, rapporteur pour avis.  - La cour d'appel de Paris, le 1er octobre 2010, a obligé Air France à traduire tous ses documents techniques. L'anglais est obligatoire pour tous les navigants, mais notre amendement concerne la langue française et les relations dans le monde du travail : toutes les organisations syndicales demandent la traduction systématique. Avis défavorable.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Je comprends le souci de Mme Des Esgaulx, mais l'argument peut être réversible : les personnels navigants parlent mieux le français, leur communication est plus naturelle dans notre langue. C'est du reste pourquoi la cour d'appel s'est prononcée pour la traduction. Je vous propose de retirer l'amendement ; d'ici que le texte soit adopté, nous avons le temps d'y regarder de plus près.

M. Daniel Raoul.  - Je soutiendrais partiellement l'amendement. Les documents techniques n'empruntent qu'à peine à la langue de Shakespeare, ils sont d'abord technico-commerciaux... C'est du globish plus de l'english !

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - Je retire l'amendement mais l'argument de la Cour d'appel n'est pas recevable : les tribunaux appliquent la loi, nous l'écrivons ! Nous n'avons pas à nous plier à la décision de la cour d'appel. La France est seule à ne pas traduire. Dans un monde globalisé, c'est un problème de sécurité.

L'amendement n°70 rectifié est retiré.

L'article 10 bis est adopté, ainsi que l'article 10 ter.

M. le président.  - Amendement n°119 rectifié, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après l'article 10 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 972 du code civil est complété par trois alinéas ainsi rédigés :

« Dans les cas où le testateur ne peut pas parler, il peut faire un testament par acte public soit en se faisant assister par un interprète agréé en langue des signes, soit en écrivant lui-même son testament. Dans ce dernier cas, il est fait mention dans l'acte de suscription du fait que le testateur a écrit son testament en présence au moins d'un notaire. Dans l'un et l'autre cas, ce testament doit être signé par le testateur en présence du notaire et des éventuels témoins.

« Dans les cas où le testateur ne peut pas s'exprimer en français, il peut faire un testament par acte public en se faisant assister par un interprète agréé.

« Dans l'un et l'autre cas visés aux deux alinéas précédents, il est fait mention dans l'acte de suscription du fait que le testateur a été dans l'incapacité de dicter son testament. »

M. Roland Courteau.  - L'attention du Médiateur de la République a été appelée sur l'impossibilité actuelle pour les personnes muettes ou dans l'incapacité de s'exprimer oralement de recourir à la forme authentique pour établir leur volonté testamentaire.

En application de l'article 972 du code civil, le testament par acte public doit être dicté au notaire par le testateur en personne. Cette condition est interprétée strictement par la Cour de cassation qui a jugé que « le testateur doit énoncer lui-même, et de façon orale, ses dispositions et qu'il ne peut y être suppléé par de simples signes, fussent-ils aussi expressifs et peu équivoques que possible ».

Les personnes ne pouvant procéder à cette déclaration orale sont donc privées de la possibilité d'établir ce testament authentique et elles ne peuvent recourir qu'à l'une des autres formes de testaments prévues par la loi. La personne sourde semble autorisée à faire un testament par acte public, à condition qu'elle en donne elle-même lecture en présence des témoins et du notaire.

Contrairement au principe de non-discrimination envers les personnes handicapées consacré par le droit international, des personnes se trouvent exclues de l'exercice d'un droit au seul motif de leur handicap. Cette exclusion, choquante sur le principe, peut également avoir des effets pratiques dommageables puisque le testament authentique dispose d'une force probante renforcée. Nous remédions à cette lacune.

M. Bernard Saugey, rapporteur.  - Le problème existe mais il demeure si le notaire ne peut garantir l'exactitude de la traduction.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Le traducteur peut être assermenté.

M. Bernard Saugey, rapporteur.  - Cela ne suffira pas, il faut sécuriser le dispositif. Retrait.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - La Chancellerie travaille avec le Conseil supérieur du notariat sur ce sujet. Retrait, pour y revenir dans la navette, éventuellement.

M. Roland Courteau.  - D'accord, mais j'espère qu'on aboutira vite.

M. Bernard Saugey, rapporteur.  - Le travail a déjà été engagé, à la demande du Médiateur d'alors, M. Delevoye.

L'amendement n°119 rectifié est retiré.

L'article 10 quater est adopté.

M. le président.  - Amendement n°230, présenté par le Gouvernement.

Après l'article 10 quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 276-3 du code civil est ainsi rédigé :

« La prestation compensatoire fixée sous forme de rente peut être révisée, suspendue ou supprimée en cas de changement important dans les ressources ou les besoins de l'une ou l'autre des parties. Ce changement important peut notamment résulter :

« - du remariage,  d'un pacte civil de solidarité ou du concubinage,

« - de la naissance ou de l'adoption d'un enfant,

« - de la mise à la retraite,

« La révision ne peut avoir pour effet de porter la rente à un montant supérieur à celui fixé initialement par le juge. »

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Nous précisons les conditions de versement de la prestation compensatoire en matière de divorce pour mieux tenir compte des événements de la vie. Nous consacrons des critères jurisprudentiels.

M. Bernard Saugey, rapporteur.  - D'accord sur le fond mais sur la forme, il y a beaucoup à dire ! Nous avons reçu cela au tout dernier moment.

M. Michel Mercier, ministre.  - En octobre !

M. Bernard Saugey, rapporteur.  - De grâce, un peu de considération pour la commission ! Défavorable donc.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Notre rapporteur a raison de souligner les problèmes rédactionnels, d'abord un « notamment » de trop ! On peut tout imaginer après l'adverbe : « notamment » suppose qu'il y a d'autres cas. Lesquels ?

M. Jacques Mézard.  - L'intention est bonne mais elle est desservie par une telle forme... Des milliers de personnes sont concernées, on va créer beaucoup plus de contentieux qu'on ne va résoudre de problèmes.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois.  - Dans la mesure où l'amendement reprend la jurisprudence, je ne suis pas choqué. Mais le « notamment », toujours haïssable, sème la confusion. Il faut l'enlever. On ne peut pas écrire des choses pareilles dans le code civil !

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - J'ai assez siégé dans cette assemblée pour comprendre l'effet que cet adverbe produit sur les sénateurs. Cependant, cette disposition reprend la jurisprudence, pour aider les justiciables à y voir plus clair, mais il ne s'agit pas de la fixer. Enlevez l'adverbe et vous empêchez toute évolution de la jurisprudence -et vous revenez à l'avant 1876 quand le juge n'était que la bouche de la loi. (Exclamations sur les bancs socialistes) Si nous disposions d'un synonyme à « notamment », vous y seriez peut-être favorables.

M. Daniel Raoul.  - On trouvera une loi Longuet bis ! (Sourires)

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Ne vous forcez pas à être désagréable. Votez l'amendement...

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois.  - La suspension n'est pas dans la jurisprudence : cet amendement est mal rédigé. Il y a des cas qui ne sont pas couverts...

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - On peut enlever la suspension...

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois.  - Cela bouleverse l'amendement et il y a la règle de l'entonnoir, sans compter que la simplification du droit ne peut tout accueillir.

Au lieu de ce genre de mesures, on ferait mieux d'évaluer les lois.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Fixer la jurisprudence, pourquoi pas ; mais pourquoi déterminer les cas ? Ce qui compte, c'est le changement dans les ressources, pas l'origine de ce changement.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Je veux bien rectifier en excluant « suspendue » et « notamment ».

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois.  - On se retrouve avec une rédaction incohérente...

M. le président.  - Quelle est la position de la commission ?

M. Bernard Saugey, rapporteur.  - J'ai dit que, sur le fond, j'étais d'accord mais que, sur la forme, il y avait beaucoup à dire. Défavorable.

L'amendement n°230 rectifié n'est pas adopté.

Article 11

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Pourquoi cet article ? L'application de libéralités à certaines associations du culte en Alsace-Moselle -toujours sous le régime du concordat- fait l'objet d'un contrôle a priori, il devient a posteriori. Pourquoi ? Et les libéralités en provenance d'États étrangers échapperaient à tout contrôle ? Pourquoi ?

L'article 11 est adopté, de même que les articles 12 et 13.

Articles additionnels

M. le président.  - Amendement n°5 rectifié ter, présenté par MM. Couderc, Alduy et Beaumont, Mmes Bout et Bruguière, MM. Houel, Lecerf et Milon, Mme Sittler, MM. Leroy, Laménie et Pillet, Mme Panis, MM. Lefèvre et Doligé, Mme Goy-Chavent et MM. Trillard, Dulait, du Luart, Etienne, Dufaut, Cléach, Cointat, Saugey et del Picchia.

Après l'article 13, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Au premier alinéa de l'article L. 2213-14 du code général des collectivités territoriales, après les mots : « opérations d'exhumation », sont insérés les mots : « à l'exclusion de celles réalisées par les communes pour la reprise des concessions et des sépultures échues ou abandonnées ».

II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Michel Houel.  - La circulaire d'application de la loi du 19 décembre 2008 prévoit que les mesures de surveillance des opérations d'exhumation concernent les exhumations administratives des communes. Les mairies paient donc une vacation par corps exhumé lors de reprises de concessions. Notre amendement vise à faciliter les exhumations administratives.

M. Bernard Saugey, rapporteur.  - Sur le fond, pas de difficulté mais la matière est réglementaire. Sagesse.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Sagesse. Je lève le gage.

L'amendement n°5 rectifié quater est adopté, l'article additionnel est inséré.

L'article 14 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°6 rectifié ter, présenté par MM. Couderc, Alduy et Beaumont, Mmes Bout et Bruguière, MM. Houel, Leroy et Milon, Mme Sittler, MM. Laménie et Lefèvre, Mme Panis, M. Doligé, Mme Goy-Chavent et MM. Trillard, Dulait, du Luart, Etienne, Cléach, Saugey et del Picchia.

Après l'article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au deuxième alinéa de l'article L. 2223-4 du code général des collectivités territoriales, les mots : « , attestée ou présumée » sont remplacés par les mots : « ou attestée ».

M. Michel Houel.  - Le mot « présumée » pose des problèmes d'interprétation, et de nombreuses communes renoncent à la crémation des restes exhumés pour les déposer dans l'ossuaire, afin de ne pas prendre de risques. Si cette disposition est maintenue, les communes seront confrontées à des difficultés importantes de gestion des cimetières.

M. Bernard Saugey, rapporteur.  - Favorable.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Je comprends le bien-fondé de l'amendement ; la question est sensible car certaines religions sont hostiles à la crémation. Sagesse.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Le sujet est important, je voterai l'amendement. Pour en avoir parlé avec de nombreux maires et représentants de syndicats intercommunaux, je sais combien ils hésitent à la crémation, nombre de nos concitoyens y étant opposés pour des mobiles religieux, au point que deux ossuaires coexistent.

La présomption ne suffit pas, mieux vaux une intention déclarée.

L'amendement n°6 rectifié ter est adopté, l'article additionnel est inséré.

Article 14 bis A (supprimé)

M. le président.  - Amendement n°196, présenté par le Gouvernement.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

L'article L. 2223-23 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le contrôle de la conformité aux prescriptions mentionnées aux 3° et 5° est assuré par des organismes accrédités dans des conditions fixées par décret. »

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Nous proposons de faire évoluer les procédures d'agréments des organismes de contrôle des installations techniques vers un régime d'accréditation. Ce régime clarifiera les conditions d'accès à l'exercice de ces activités et répondra aux exigences de la directive.

Cette modification relève du domaine législatif : l'accréditation est en effet assimilable en tout point à un régime d'autorisation tel que l'agrément et justifie de ce fait que la modification du code général des collectivités territoriales soit portée au niveau législatif.

M. Bernard Saugey, rapporteur.  - La modification proposée relève clairement du règlement : c'est l'exercice du pouvoir de police administrative qui est concerné. Mais comme pareille disposition figure à l'article 47-22 du code du travail pour les équipements de travail, sagesse.

L'amendement n°196 est adopté ; l'article 14 bis A est rétabli.

L'article 14 bis est adopté.

Article 15

M. le président.  - Amendement n°274, présenté par le Gouvernement.

Supprimer cet article.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Le code de la route va prochainement être modifié en ce sens par la proposition de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne, votée le 17 novembre 2010 au Sénat.

M. Daniel Raoul.  - La loi Longuet !

M. Hervé Maurey, rapporteur pour avis.  - Eh oui... Favorable. Cependant, nous n'avons pas plus d'information que M. Raoul...

L'amendement n°274 est adopté.

L'article 15 est supprimé.

L'amendement n°45 rectifié devient sans objet.

Articles additionnels

M. le président.  - Amendement n°129 rectifié bis, présenté par Mme Bonnefoy, MM. Michel, Peyronnet et Sueur et Mme Blondin.

Après l'article 15, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La deuxième phrase du premier alinéa de l'article L. 212-10 du code rural et de la pêche maritime est complétée par les mots : « et pour les chats de plus de sept mois nés après le 1er janvier 2012 ».

M. Jean-Pierre Sueur.  - Mme Bonnefoy y tient particulièrement. Plus de 80 % des chats ne sont pas identifiés dans notre pays. Trop d'animaux sont perdus et placés en refuge avant d'être euthanasiés faute d'identification et ce, parfois par erreur. Les élus locaux et les associations de défense des animaux s'en inquiètent, comme les propriétaires de chats euthanasiés par erreur.

Cet amendement comble un vide juridique en appliquant aux chats de plus de 7 mois la législation en vigueur pour les chiens. (On s'amuse)

M. Hervé Maurey, rapporteur pour avis.  - Favorable au tatouage des chats, à partir de 2012, donc des chats à naître...

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Oui, à compter de juillet 2012, quand ils auront 7 mois. (Même mouvement)

L'amendement n°129 rectifié bis est adopté.

M. le président.  - Amendement n°159 rectifié, présenté par M. Bourquin et les membres du groupe socialiste.

Après l'article 15, insérer un article additionnel ainsi rédigé : 

La loi du 31 décembre 1903 relative à la vente de certains objets abandonnés est ainsi modifiée :

1° Le second alinéa de l'article 1er est ainsi rédigé : 

« S'il s'agit de véhicules terrestres à moteur, motocycles à deux ou trois roues ou quadricycles à moteur, le délai prévu à l'alinéa précédent est réduit à trois mois. »

2° Aux avant-dernier et dernier alinéas de l'article 6 bis, les mots : « véhicules automobiles » sont remplacés par les mots : « véhicules terrestres à moteur, motocycles à deux ou trois roues ou quadricycles à moteur ».

M. Roland Courteau.  - De plus en plus de véhicules sont abandonnés, les garages doivent les garder six mois. Nous raccourcissons ce délai et élargissons la gamme des véhicules concernés.

M. Bernard Saugey, rapporteur.  - Favorable. Nous perdons beaucoup de temps avec de nombreux amendements...

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - ...intéressants. Favorable.

L'amendement n°159 rectifié est adopté et l'article additionnel est inséré.

L'article 16 demeure supprimé.

M. le président.  - Amendement n°192 rectifié, présenté par le Gouvernement.

Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° Au 3° de l'article L. 205-7, après les mots : « recueillir les » est inséré le mot : « observations » ;

2° Au I de l'article L. 211-15, la référence : « troisième alinéa de l'article L. 211-29 » est remplacée par la référence : « deuxième alinéa de l'article 99-1 du code de procédure pénale » ;

3° Au deuxième alinéa de l'article L. 212-8, les références : « aux articles L. 221-5 et L. 221-6 » sont remplacés par les références : « à l'article L. 221-5 » ;

4° À l'article L. 215-12, les mots : « et L. 215-9 à L. 215-12 » sont supprimés ;

5° Au premier alinéa des articles L. 241-1 et L. 241-4, les références : « L. 241-2 à L. 241-5 » sont remplacés respectivement par les références : « L. 241-2 à L. 241-4 » et « L. 241-2 et L. 241-3 » ;

6° Au dernier alinéa de l'article L. 243-1, les références : « L. 241-6 à L. 241-13 » sont remplacés par les références : « L. 241-6 à L. 241-12 » ;

7° Le I de l'article L. 253-14 est abrogé et à la dernière phrase de cet article, les mots : « L. 253-15 à L. 253-17 » sont remplacés par les mots : « L. 253-16 et L. 253-17 » ;

8° Le 5° du II de l'article L. 253-17 est ainsi rédigé :

« 5° Le fait de ne pas respecter les prescriptions édictées en application des articles L. 250-6, L. 250-7 et L. 253-16 par les agents mentionnés à l'article L. 250-2. »

9° Au deuxième alinéa de l'article L. 256-2-1, les mots : « le décret prévu à l'article L. 256-3 » sont remplacés par le mot : « décret » ;

10° À l'article L. 257-10, les mots : « Par dérogation aux dispositions de l'article L. 257-2, des tâches particulières » sont remplacés par les mots : « Des tâches particulières » ;

11° Au I de l'article L. 272-2, les références : « , L. 231-5 et L. 232-3 » sont remplacés par les références : « et L. 231-5 » ;

12° Au premier alinéa de l'article L. 525-1, les mots : « statuts types approuvés par décrets en Conseil d'État » sont remplacés par les mots : « modèles de statuts approuvés par arrêté du ministre chargé de l'agriculture » ;

13° La première phrase du premier alinéa de l'article L. 631-26 est complétée par les mots : « et de la pêche et par les agents visés aux 1°, 3°, 4° et 5° de l'article L. 942-1 » ;

14° Au premier alinéa de l'article L. 663-3, la référence : « au I de l'article L. 251-18 » est remplacée par la référence : « à l'article L. 250-2 » ;

15° L'article L. 671-16 est ainsi rédigé :

« Art. L. 671-16. - Le fait de faire obstacle à l'exercice des fonctions des agents mentionnés à l'article L. 250-2 agissant en application de l'article L. 663-3 est sanctionné conformément aux dispositions de l'article L. 205-11. »

16° Aux premier et deuxième alinéas de l'article L. 717-1, les mots : « du présent chapitre » sont remplacés par les mots : « de la présente section » ;

17° Au premier alinéa de l'article L. 762-9, les mots : « un décret fixe chaque année, pour chaque département, le taux des cotisations » sont remplacés par les mots : « un décret fixe les modalités de calcul de ces cotisations » ;

18° A l'article L. 912-13, après les mots : « dans les conditions déterminées », sont insérés les mots « par décret » ;

19° Au c) du II de l'article L. 945-2 du code rural et de la pêche maritime, le mot : « autorisée » est remplacé par le mot : « réglementée » ;

20° Au 15° de l'article L. 945-4, après les mots : « De pêcher » sont insérés les mots : « détenir à bord, » et après les mots : « enfreindre les obligations » sont insérés les mots : « ou interdictions » ;

21° Le IV de l'article L. 253-16, le III de l'article L. 253-17 et l'article L. 921-8 sont abrogés ;

22° Au deuxième alinéa de l'article L. 214-9, les références : «, L. 221-6, L. 214-19 » sont supprimées ;

23° Au premier alinéa de l'article L. 221-4 et au cinquième alinéa de l'article L. 234-1, la référence : « L. 214-19 » est supprimée ;

24° Au 3° du IV de l'article L. 231-2-2, les mots : « aux dispositions mentionnées à l'article L. 231-2 » sont supprimés ;

25° A l'article L. 231-6, les mots : « de l'article L. 227-2, » sont supprimés ;

26° À l'article L. 273-1, les mots : « le deuxième alinéa de l'article L. 212-2, » sont supprimés ;

27° Au 1er alinéa du II de l'article L. 912-4, les mots : « et de représentants des chefs d'entreprise d'élevage marin » sont supprimés.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Nous corrigeons différentes erreurs ou insuffisances qui subsistent dans le code rural et de la pêche maritime à l'issue des ordonnances du 6 mai 2010 et de la loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche.

M. Hervé Maurey, rapporteur pour avis.  - La loi de modernisation de l'agriculture est récente, nous l'améliorons déjà. Nous avons été irrités de recevoir si tard cet amendement de 27 alinéas que nous nous sommes résolus à accepter après le report de la date initialement prévue d'examen de ce texte.

L'amendement n°192 rectifié est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°194, présenté par le Gouvernement.

Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À l'article L. 213-1 du code rural et de la pêche maritime, les mots : « est régie, à défaut de convention contraire, par les dispositions de la présente section », sont remplacés par les mots : « s'exerce, soit dans les conditions prévues par les articles 1641 à 1649 du code civil, soit dans les conditions prévues par la présente section ».

L'amendement de clarification n°194 est adopté ; l'article additionnel est inséré.

L'article 16 bis est adopté.

M. le président.  - Amendement n°11 rectifié bis, présenté par M. César, Mme Férat, MM. Pintat, Lefèvre, Grignon, Pointereau et Cornu, Mmes Lamure, Sittler et Hummel, MM. Revet, Doublet, Laurent et Couderc, Mmes Bruguière et Des Esgaulx, MM. Leroy et Beaumont et Mme Troendle.

Après l'article 16 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le quatrième alinéa de l'article L. 631-25 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« - ou, pour les produits soumis à accises, de ne pas exécuter le contrat conformément à ces clauses obligatoires, incluant celles relatives aux délais de paiement tels que définis au 3° de l'article L. 443-1 du code de commerce. »

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - La loi de modernisation de l'agriculture a besoin de clarification en ce qui concerne les sanctions en matière de contrats type.

M. Hervé Maurey, rapporteur pour avis.  - Les accords interprofessionnels seraient paradoxalement moins biens garantis que le régime légal. Favorable.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Favorable.

M. Daniel Raoul.  - C'est réparer un oubli regrettable.

L'amendement n°11 rectifié bis est adopté et devient un article additionnel.

L'article 16 ter est adopté.

M. le président.  - Amendement n°193, présenté par le Gouvernement.

Après l'article 16 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa de l'article L. 814-4 du code rural et de la pêche maritime est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Toutefois, il est appelé à statuer en premier et dernier ressort lorsqu'une section disciplinaire n'a pas été constituée ou lorsqu'aucun jugement n'est intervenu six mois après la date à laquelle les poursuites disciplinaires ont été engagées devant la juridiction disciplinaire compétente. »

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Le Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche agricole doit pouvoir statuer en cas de défaillance des établissements.

M. Hervé Maurey, rapporteur pour avis.  - Ce Conseil doit pouvoir se prononcer quand les établissements n'ont pas de structure adéquate comme le peut le Conseil national de l'enseignement et de la recherche : favorable.

M. Daniel Raoul.  - Je le voterai.

L'amendement n°193 est adopté ;l'article additionnel est inséré.

L'article 17 est adopté, ainsi que les articles 17 bis et 17 ter.

M. le président.  - Amendement n°92 rectifié, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après l'article 17 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Après le deuxième alinéa de l'article L. 1232-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le consentement explicite de la personne à un tel prélèvement peut être enregistré, de son vivant, sur un registre national automatisé prévu à cet effet. Il est révocable à tout moment » ;

2° Au 2° de l'article L. 1232-6, les mots : « du registre national automatisé prévu au troisième alinéa » sont remplacés par les mots : « des registres nationaux automatisés prévus aux deuxième et troisième alinéas ».

M. Jean-Pierre Sueur.  - Nos concitoyens peuvent faire figurer sur un registre leur refus de dons d'organes, mais il n'y a pas de registre pour déclarer son acceptation de tels dons : c'est injustifié et cela pose des problèmes aux médecins. Il y a pénurie : pourquoi ne pas encourager les dons grâce à un tel registre ? Certes, il y aura la loi bioéthique mais sans attendre, nous pouvons légiférer.

Nous pouvons prendre dès aujourd'hui une disposition simple, qui ne rencontre aucune opposition et qui va dans le sens du souhait exprimé par les médecins.

M. le président.  - Amendement n°93 rectifié, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après l'article 17 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la seconde phrase du deuxième alinéa de l'article L. 114-3 du code du service national, après les mots : « son refus » sont insérés les mots : « ou son accord explicite » et les mots : « sur le registre national automatisé prévu » sont remplacés par les mots : « sur les registres automatisés nationaux prévus ».

M. Jean-Pierre Sueur.  - Il s'agit d'un amendement de cohérence.

Mme Françoise Henneron, rapporteur pour avis.  - Le sujet est important mais sans rapport avec le sujet du projet de loi. (Exclamations à gauche) Il mérite un important débat de fond. Cet amendement doit être retiré jusqu'à la révision des lois bioéthique.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - En fait de simplification, cet amendement compliquerait les choses : il ferait double emploi avec le registre des oppositions au prélèvement.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Vous ne pouvez pas dire cela !

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Retrait.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Parlez avec les associations nationales.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Je parle en juriste.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Le registre négatif est une chose, nous parlons d'un registre positif ! C'est tout autre chose.

M. Daniel Raoul.  - L'existence d'un registre positif éviterait d'aller solliciter des familles traumatisées par un décès et faciliterait les choses, dans l'intérêt des greffés.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Nous voulons tous la même chose. Le dispositif actuel présume un accord.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Ce n'est pas parce qu'on n'a pas dit non qu'on a dit oui !

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Votre registre positif contiendra beaucoup moins de oui que ce que vous pensez. Le registre négatif contient la présomption d'accord.

M. Daniel Raoul.  - On n'aurait pas à aller solliciter les familles dans un moment difficile pour elles.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Bien sûr que si ! Votre amendement serait un recul.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois.  - Vous dites « les associations », pas toutes ! Il faut être prudent en la matière. Je ne suis pas sûr que l'efficacité soit au rendez-vous avec cet amendement. Je veux bien qu'on légifère sur des erreurs dans le code rural mais ne votons pas ce soir, dans la hâte, sur ce sujet délicat. Ne me contraignez pas à voter contre cet amendement, auquel je ne suis pas sûr d'être hostile.

L'amendement n°92 rectifié n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°93 rectifié.

Mandats sénatoriaux

M. le président.  - En application de l'article L.O. 320 du code électoral, le mandat sénatorial de MM. Jean-Marie Bockel, Hubert Falco et Mme Valérie Létard, dont les fonctions gouvernementales ont pris fin le 13 novembre, reprendra tout à l'heure, mardi 14 décembre, à 0 heure.

En conséquence, le mandat sénatorial de MM. Jacques Muller, Elie Brun et de Mme Béatrice Descamps cessera ce soir à minuit.

Accord en CMP

M. le président.  - La commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances pour 2011 est parvenue à l'adoption d'un texte commun.

Prochaine séance demain, mardi 14 décembre 2010, à 9 heures 30.

La séance est levée à 23 heures 55.

Lundi 13 décembre 2010

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Sommaire

Renvoi pour avis (Loi de finances rectificative pour 2010)1

Débat préalable au Conseil européen des 16 et 17 décembre 20101

Simplification et amélioration du droit6

Discussion générale7

Discussion des articles12

Articles additionnels avant l'article premier12

Avis sur des nominations14

Accord en CMP14

Simplification et amélioration du droit (Suite)15

Discussion des articles (Suite)15

Article 215

Articles additionnels15

SÉANCE

du lundi 13 décembre 2010

50e séance de la session ordinaire 2010-2011

présidence de M. Guy Fischer,vice-président

Secrétaires : Mme Christiane Demontès, M. Philippe Nachbar.

La séance est ouverte à 14 heures 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Renvoi pour avis (Loi de finances rectificative pour 2010)

M. le président.  - J'informe le Sénat que le projet de loi, adopté par l'Assemblée, de finances rectificative pour 2010, dont la commission des finances est saisie au fond, est envoyé pour avis, à sa demande, à la commission de la culture, de l'éducation et de la communication.

Débat préalable au Conseil européen des 16 et 17 décembre 2010

M. le président.  - L'ordre du jour appelle le débat préalable au Conseil européen des 16 et 17 décembre 2010.

M. Laurent Wauquiez, ministre auprès de la ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes, chargé des affaires européennes.  - Je suis heureux de m'exprimer devant le Sénat, qui a joué un rôle majeur dans la définition de la stratégie européenne de la France : je rends hommage au remarquable travail de M. Bizet. Le traité de Lisbonne va dans le sens d'une meilleure appropriation par les Parlements nationaux des enjeux européens.

Le récent conseil franco-allemand de Freiburg a réaffirmé la force du franco-allemand. Le conseil des 16 et 17 décembre intervient à un moment stratégique. Face à la crise de l'euro, attaqué par des spéculateurs, il doit affirmer la détermination de l'Europe et sa capacité à avancer. Sur le plan politique, il doit permettre à l'Union européenne de repartir à l'offensive.

Le Conseil européen devra améliorer le dispositif de défense de l'euro, mais pas seulement. En moins de dix-huit mois, nous avons beaucoup progressé : l'Europe n'avait pas de dispositif de défense -faiblesse originelle de la zone euro- lors de la crise grecque ; lors de la crise irlandaise, elle était prête.

La mise en place d'un mécanisme pérenne de gestion de crise montre que l'Europe est prête à tirer les leçons de la crise et à se doter collectivement des moyens de se protéger. Quand un pays de l'euro est attaqué, c'est notre monnaie qui est touchée : l'Union européenne ne doit laisser personne au bord du chemin. Je salue le rapport de M. Humbert sur les normes de régulation européenne. Le 28 novembre, à la suite d'intenses consultations entre le Président Sarkozy et la Chancelière Merkel, l'Eurogroupe a trouvé un accord sur le mécanisme de stabilité ; le prochain Conseil examinera la proposition du président Van Rompuy de révision du traité européen, la plus simple, la plus efficace et la plus rapide à transposer. Les travaux de M. Barnier sur la régulation du système bancaire vont dans le bon sens.

Il n'y aura pas d'euro stable sans gouvernance économique. Cette idée, encore taboue il y a quelques mois et que seule la France portait, s'est imposée à la grande majorité des États. Nous attendons que les orientations -toutes les orientations, rien que les orientations- décidées au Conseil européen d'octobre soient suivies et que la gouvernance économique ne se réduise pas à des sanctions.

Le budget de l'Union européenne 2011 doit désormais être adopté dans le cadre de la procédure de Lisbonne. La question est symbolique dans une phase ou certains testent l'Union. Chacun doit faire une partie du chemin. J'ai bon espoir que le Parlement européen l'adoptera le 15 décembre après que le conseil l'a adopté le 8. Ce budget doit montrer que l'Europe peut dépenser mieux sans sacrifier ses ambitions.

Le Conseil entendra un rapport de Lady Ashton sur les relations de l'Union avec ses partenaires stratégiques, Chine, Russie et États-Unis. Nous devons identifier nos intérêts communs et les défendre collectivement.

Le Conseil se penchera enfin sur le statut de candidat du Monténégro. Le processus d'élargissement comme le processus d'adhésion appellent la plus grande rigueur.

Le Conseil européen peut être un point de bascule. Certains ont voulu tester l'Union européenne, d'autres ont sombré dans le scepticisme. Face à des pays continents, face aux exigences du développement durable, face à la pression des marchés, l'Union européenne doit démontrer sa capacité à reprendre l'offensive. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Jean Bizet, président de la commission des affaires européennes.  - La situation de la zone euro est présentée comme de plus en plus alarmante. Il faut toutefois prendre un peu de recul. En 2009, la dette publique au sein de la zone euro avait atteint 79,2 % du PIB, et le déficit 6,3 % du PIB en moyenne ; aux États-Unis, au Japon, les dettes publiques atteignent respectivement 84 % et 190 % pour des déficits de 7,3 % et 9 %. Notre situation n'est donc pas pire -et même plutôt meilleure- que celle de zones économiques comparables. L'euro est encore à 13 % au-dessus de son cours d'introduction face au dollar. Mais la zone euro a laissé se développer des stratégies économiques divergentes et parfois dangereuses ; elle paie aujourd'hui le prix de ce manque de cohérence et prête davantage le flanc à la spéculation, avec le risque d'un effet dominos où les plans de sauvetage se succéderaient d'un pays à l'autre. La zone euro est le résultat d'une négociation diplomatique, non la traduction d'une conception d'ensemble. D'où ses faiblesses, l'absence de mécanisme efficace de coordination économique et budgétaire ou la clause de non renflouement qu'on s'évertue aujourd'hui à contourner.

A chaque crise, pourtant, l'Union européenne s'est ressaisie : en 2008, puis lors des crises grecque et irlandaise. Nous allons dans la bonne direction mais il nous faut progresser plus vite. Tout s'accélère mais l'Europe donne le parfois le sentiment de prendre son temps -au moment où elle devient un appât. Le Conseil européen devra montrer que la réforme de la gouvernance économique est en marche : le temps n'est plus aux petites phrases, tout défaut à la cohésion sanctionnera l'ensemble. Ce qui suppose qu'il soit mis fin au mauvais procès fait à l'Allemagne. Nous ne progresserons dans la solidarité européenne que si chacun balaie devant sa porte. La confiance se mérite, aucun mécanisme européen ne dispensera les États de procéder aux réformes nécessaires en termes de compétitivité et d'assainissement des finances publiques ; chacun prenant sa part, la mutualisation sera plus facile. « Ce qui ne me tue pas me renforce » disait Nietzche : je suis convaincu que l'Europe sortira renforcée de la crise. Les Européens doivent comprendre qu'ils ont tous partie liée. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Josselin de Rohan, président de la commission des affaires étrangères.  - Le Conseil européen des 16 et 17 décembre se consacrera principalement à la mise en place d'un mécanisme permanent de gestion de crise au sein de la zone euro ; il doit montrer le chemin vers la gouvernance économique européenne que la France appelle de ses voeux depuis plusieurs années. Une révision du traité est nécessaire. Quand l'Europe avance, c'est toujours à la suite d'un accord franco-allemand. Il faut dénoncer les discours irresponsables qui annoncent la faillite de la monnaie unique. La solidarité européenne a joué. Il importe que le Conseil engage l'économie européenne sur la voie du redressement des finances publiques.

En matière de sécurité et de défense, l'Union européenne progresse plus lentement -c'est un euphémisme. L'Union européen risque d'être marginalisée dans les décennies à venir face à la Chine et aux États-Unis : il est indispensable que l'Union renforce ses relations avec ses principaux partenaires, diplomatiques, commerciales, d'approvisionnements énergétiques. Nous devons définir nos priorités et nos objectifs, ce qui suppose une réelle unité entre pays européens. L'Union européenne, le 14 septembre, a essuyé un revers à l'ONU : on lui a refusé le droit de s'exprimer en tant que telle, ce qui montre qu'elle n'est pas considérée comme une puissance et n'inspire pas le respect. Monsieur le ministre, quelles sont les raisons de cet échec ? Quelle stratégie pour renforcer la position de l'Union au sein de l'ONU ?

La France est-elle prête à accorder le statut de candidat au Monténégro ? Quelle est sa position sur l'élargissement aux pays des Balkans occidentaux ?

L'effort de défense fait partie de la stratégie des pays émergents, non encore de celle des pays de l'Union ; celle-ci ne risque-t-elle pas de perdre toute influence sur la scène internationale ? L'accord franco-britannique, cependant, montre la voie d'une coopération renforcée. Avec la commission de la défense de l'Assemblée nationale, la Chambre des communes et celle des Lords, nous avons convenu de constituer un groupe de suivi de cette coopération.

Que penser de la proposition germano-suédoise de recenser les capacités européennes en vue d'une mutualisation ? Elle ne doit pas se traduire par la gestion de la pénurie... Il est indispensable que la disparition de l'assemblée parlementaire à l'UEO soit subordonnée à la création d'une structure associant les parlements nationaux ; s'il n'y a pas d'accord à 27, pourquoi ne pas imaginer une coopération entre les parlements volontaires ? (Applaudissements à droite et au centre)

M. Jacques Mézard.  - Après la Grèce, l'Irlande sollicite l'Europe pour financer sa dette : à qui le tour demain, de l'Espagne ou du Portugal ? La France risque-t-elle de suivre ? L'Union européenne a apporté son soutien immédiat à l'Irlande, après avoir tardé à le faire pour la Grèce. Les marchés, en attaquant les dettes souveraines des pays les plus fragiles, creusent l'écart entre les économies européennes ; ils révèlent une zone euro à plusieurs vitesses entre les économies à forte intensité technologique et excédents et ceux qui sont plus sensibles à la concurrence et accumulent les déficits, comme la France et les pays méditerranéens. Les marchés reconstituent-ils une zone Mark ? D'aucuns préconisent d'exclure les pays faibles de l'euro. Le constat d'une insuffisante gouvernance économique est récurrent.

Le Conseil européen doit conforter le mécanisme permanent de gestion de crise et faire le point sur les propositions de la Commission. Faut-il durcir le pacte de stabilité en prenant mieux en compte la dette ? Il faudrait, selon nous, distinguer entre le bon et le mauvais déficit, le premier étant lié à l'investissement dans le capital humain. Quelle est la norme de dette acceptable ? Que penser des sanctions et du mécanisme à majorité inversée proposée par le président Van Rompuy ? Des sanctions progressives, qui semblent peu crédibles ? La Commission propose que les États prospères se partagent les amendes : on croit rêver ! Et les sanctions politiques ? Faut-il ouvrir la boîte de Pandore des modifications du traité ?

L'Europe se fera dans les crises, écrivait Jean Monnet : la crise actuelle a réactivé la question de la gouvernance ; mais on a le sentiment que la vision allemande domine, celle de la gestion des seuls déficits. Quid de l'harmonisation fiscale, d'un budget européen à la hauteur des enjeux, d'une capacité de l'Union à emprunter ? Pourtant, le défaut de convergence ne fait que des perdants et risque de conduire au déclin. M. Trichet est dans son rôle de « pape de l'orthodoxie néo-libérale », comme l'a dit M. Chevènement, en appelant tous les pays au même effort. L'Europe ne doit pas seulement surveiller et sanctionner mais aussi relancer. La stratégie « Europe 2020 » ressemble fort à un catalogue d'incantations. Nous attendons de grands investissements publics mutualisés dans les transports, la recherche, l'éducation, autant de secteurs indispensables à la relance.

Comment le mécanisme de stabilisation financière sera-t-il pérennisé ? Les banques ont été soutenues sans contrepartie : que propose la France pour les responsabiliser, je n'ose dire les moraliser ?

Il est urgent de dégager l'Union européenne de la tutelle des marchés financiers ; cela suppose de faire jouer un autre rôle à la BCE. Pourquoi ne pas imaginer de mutualiser une partie des dettes souveraines et l'émission de bons européens sur les marchés ? Une véritable gouvernance économique suppose aussi la convergence des marchés du travail, des systèmes de retraites, des politiques fiscales. Le moment est venu de changer les règles du système économique européen, dans le sens d'une politique de relance. (Applaudissements sur les bancs RDSE)

M. Michel Billout.  - Devant les crises financières à répétions, notre groupe avait demandé un débat extraordinaire mais la Conférence des Présidents et le Gouvernement l'avaient refusé. Un tel débat aurait pourtant permis de montrer la détermination de la représentation nationale à trouver des solutions conformes à l'intérêt communautaire. Or l'Union a agi en ordre dispersé. Nous avons finalement ce débat à la veille d'un Conseil européen, sur lequel nous ne partageons pas l'optimisme du Gouvernement. Les solutions à l'étude ne permettront pas de prémunir l'Europe de crises à répétition.

La recette proposée est simple, renflouer ceux qui sont responsables de la crise. Or, le marché financier en demande toujours plus. Les prétendus plans de sauvetage n'ont pas empêché la crise de s'étendre. Face à la logique aveugle de soumission, il faut faire prévaloir l'intérêt général. Jacques Delors l'a dit : « ce n'est pas aux banquiers, qui ont reçu 4 500 milliards, de dicter aux gouvernements leur comportement ».

Quand les règles des marchés conduisent les banques à la faillite, ce n'est pas aux peuples de les renflouer ! Les banques irlandaises ont provoqué la bulle immobilière, il a fallu 50 milliards de fonds publics pour les recapitaliser ! On fait payer les pertes par la collectivité, tout en préservant les profits privés, sans que cela ne rassure les marchés. L'Europe a découvert son impuissance à protéger sa monnaie, cela exige de nouvelles solutions : changer les objectifs du pacte de stabilité, encourager les investissements productifs, taxer la spéculation ! Une partie de la gauche au Parlement européen a proposé une telle taxation pour abonder un Fonds européen pour le développement social. Il faudra aussi évidemment modifier les missions de la BCE.

M. Denis Badré.  - L'Europe est-elle en crise ? Comme toujours, puisqu'elle a toujours progressé par les crises. En grec, crisis est un moment décisif : nous y sommes encore.

Ceux qui préconisent une sortie de l'euro font le bonheur des spéculateurs ; l'euro nous a protégés. Que se passerait-il si nous devions rembourser notre dette en francs dévalués et avec des taux à la hausse ? Nos politiques budgétaires sont nationales, cadrées par un pacte de stabilité de nature intergouvernementale ; le budget est de nature communautaire mais les recettes sont votées à 85 % par les parlements nationaux... Nous avons une monnaie unique mais la gouvernance économique est en friche.

Une percée a été réalisée, les troupes doivent suivre : Maastricht a 20 ans, nous devons regrouper nos forces vers l'avant. Des euro-obligations, émises par les États ? L'Allemagne préfèrera emprunter seule à moindre taux. Mieux vaudrait une démarche communautaire mais l'Union européenne ne peut pas encore emprunter : levons ce verrou et nous progresserons beaucoup !

Le Fonds européen de stabilité n'est pas la solution miracle : il faut lui adjoindre une surveillance des politiques économiques et budgétaires des États. Il faut donc trouver le bon équilibre entre la situation économique des États et les sanctions. Le choix de ne pas sanctionner la France et l'Allemagne en 2003 a écorné la confiance dans le pacte de stabilité, les interventions pour la Grèce puis l'Irlande ont montré une certaine solidarité. Nous n'avons donc pas d'alternative au progrès, vers un gouvernement économique européen. Il devra démontrer sa volonté de rigueur, ce qui impose d'y associer les parlements nationaux, donc une meilleure pédagogie autour des enjeux européens en direction de nos concitoyens.

Le débat sur le budget européen -sa nature, son financement par des ressources propres- est aussi ouvert ; c'est tant mieux. Si les parlements nationaux doivent désormais accepter un regard communautaire sur les budgets nationaux, le Parlement européen devra accepter un regard sur les questions touchant au budget européen. De leur capacité à nouer un dialogue constructif et équilibré dépendra une bonne prise en compte des intérêts nationaux et de l'intérêt commun. Plus que jamais, l'Europe c'est nous !

M. Simon Sutour.  - La Maison Europe tremble quand des intérêts égoïstes des nations viennent à dominer, au point de remettre en cause l'ensemble de l'édifice. Les failles économiques et monétaires sont connues depuis juillet 2010, mais il a fallu attendre le mois de décembre pour mettre en place un mécanisme pérenne de défense. Les gouvernements refusent tout nouveau transfert de compétences, n'entendent pas aller plus loin sur la voie de l'intégration. Dans ces conditions, comment garantir l'efficacité du nouveau mécanisme de surveillance ? L'austérité ne doit pas se transformer en récession, ce serait catastrophique pour la société européenne et pour ses institutions.

Enfin, ce mécanisme doit impérativement s'accompagner d'une réforme globale de la zone euro.

Qu'en est-il d'éventuelles euro-obligations ? Qu'en est-il d'un véritable budget européen, de l'harmonisation fiscale ou la taxation des projets financiers ? Les socialistes refusent un simple rafistolage.

La stratégie de l'Union européenne 2020 comporte des objectifs chiffrés dont je me réjouis, mais les politiques d'austérité compromettent leur réalisation.

Quel crédit donner à cette stratégie quand les droits d'inscription universitaires augmentent, alors que l'impôt sur les sociétés reste inchangé ?

L'une des cinq priorités de la Commission européenne est que l'Union européenne pèse de tout son poids sur la scène internationale. Bravo ! Mais tout dépendra de la propension des États membres à agir de concert.

Or, au lieu d'élaborer une politique énergétique commune, chaque État poursuit son seul intérêt stratégique.

L'Union pour la Méditerranée était un projet phare du Président de la République ; il a tourné au fiasco et tué le processus de Barcelone sans le remplacer, et en affaiblissant l'Union européenne. Beau résultat ! La France satisferait-elle le souhait légitime de Mme Ashton de remettre ce projet dans le giron de l'Union ?

On ne pourra pas réconcilier les citoyens avec un projet européen injuste ou privé de moyens. (Applaudissements à gauche)

M. Jean-François Humbert.  - Je viens d'effectuer en Irlande une mission d'étude, à l'initiative de la commission des affaires européennes. Les limites du modèle irlandais sont récemment apparues au grand jour.

De 1992 à 2006, la croissance du pays résultait d'une politique solitaire, avec une aide européenne égale à cinq fois sa contribution. S'ajoutaient les effets d'une fiscalité très attractive pour les entreprises, drainant ainsi les investissements privés. Une bulle immobilière s'est formée, créant un deuxième moteur de croissance. L'OCDE n'a pas formulé la moindre objection à cette stratégie, comme le FMI, et les stress tests effectués l'an dernier ont conclu à la solvabilité des banques irlandaises.

En fait, la crise subie par ce pays est home made, faite maison, car elle a vu s'enchaîner un défaut de solvabilité des emprunteurs débouchant sur un manque de liquidités bancaires.

Le mécanisme européen intervient dans ce contexte, très différent du cas grec, mais son existence, concomitante avec l'intervention du FMI, a renforcé l'euroscepticisme de la population et sa colère, liée au fait que les banquiers jouissent d'une impunité de fait.

Au demeurant, le plan gouvernemental reporte sur la population l'intégralité du coût de la faillite du système bancaire, excluant toute réévaluation de l'impôt sur les sociétés.

Sans revenir sur le détail de l'aide européenne apportée par Ecofin en novembre, elle a pour but d'accompagner les réformes ambitieuses et courageuses du gouvernement irlandais.

Dans ce pays, la crise est fondamentalement bancaire, contrairement à ce qui se passe dans d'autres pays. Il est impossible de dire aujourd'hui si l'action européenne suffira aux côtés de celle du FMI.

Cette crise n'est pas sans incidences pour la gouvernance économique européenne car elle conforte la position allemande en faveur d'une meilleure gouvernance financière. Elle incite à renforcer la surveillance euro-économique.

Les difficultés annoncées du Portugal devraient constituer, dans les semaines à venir, un test d'une tout autre ampleur. La crise portugaise n'est pas une crise de croissance sur le mode irlandais ; elle pousse à s'interroger sur les conséquences économiques de l'introduction de l'euro et sur la réponse européenne durable et crédible qui doit impérativement être trouvée lors du prochain Conseil européen. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Laurent Wauquiez, ministre.  - Je remercie M. Bizet pour la pertinence de la comparaison avec des zones économiques comparables. Si cette crise permet de régler les faiblesses de l'euro, elle sera salutaire ; votre citation de Nietzsche est particulièrement bienvenue ! Bien sûr, la solidarité communautaire ne suffit pas. L'euro n'est pas un paratonnerre miracle exonérant les États membres à prendre les décisions courageuses qui s'imposent à eux.

Monsieur de Rohan, vous avez raison de souligner l'importance stratégique du service européen pour l'action extérieure ; tout le monde feint de s'interroger sur l'influence française, mais c'est l'un de nos plus brillants diplomates, M. Pierre Vimont, qui a été nommé secrétaire général exécutif.

A l'ONU, l'échec de la première résolution tient sans doute à l'insuffisance de la négociation en amont. Nous souhaitons que la prochaine tentative soit appuyée par les États membres.

Le Monténégro ? Les pays des Balkans ont vocation à rejoindre l'Union européenne, afin que cette zone de troubles devienne un socle de paix, mais il faut être exigeant lors des négociations.

Bien sûr, les parlements européens doivent jouer un rôle important pour la Pesc. Je salue l'effort germano-suédois.

J'en viens à l'intervention de M. Mézard. Pour la gouvernance économique, il faut resserrer les mailles du filet, renforcer la crédibilité du pacte tout en préservant la place du politique, assurer la convergence fiscale, dépenser mieux et responsabiliser les banques.

Monsieur Billout, merci d'avoir exposé la divergence de nos approches, qui n'empêche pas des points d'accord. En Irlande, toutes les banques ont été nationalisées : les actionnaires ont donc subi une sanction majeure. Vous avez raison pour la politique européenne d'innovation : elle est insuffisante.

Merci, monsieur Badré, pour votre vision stratégique. Les avancées sur la gouvernance économique sont un signe de maturité

Les euro-obligations ? Le temps n'est pas venu de lancer une foire aux bonnes idées. Chaque pays doit assumer les conséquences de ses actes, même dans un contexte communautaire. En 1958, le premier travail du général de Gaulle avait été de rétablir les finances publiques du pays.

Monsieur Sutour, les moyens du fonds mis en place sont suffisants. Le service européen pour l'action extérieure pourra progresser dans le Sahel, face au danger terroriste, dans une logique d'aide aux territoires concernés, et de sécurité pour l'Europe.

L'Union pour la Méditerranée pourra progresser d'abord grâce à une reconnaissance de diplômes.

Monsieur Humbert, l'Irlande satisfaisait aux critères de Maastricht malgré la surexposition des banques à l'immobilier. Nous devons donc revoir le dispositif de suivi économique.

Sur le plan bancaire, M. Barnier a fait des propositions. En outre, la meilleure surveillance des politiques économiques permettra de mieux anticiper les crises. Le Portugal ? Ne jouons pas les Cassandre ! Un soutien européen doit permettre de relancer la croissance. (Applaudissements à droite)

M. le président.  - Nous passons au débat interactif et spontané.

M. Pierre Fauchon.  - Monsieur le ministre, votre réponse à M. Badré nous laisse sur notre faim. Il a repris l'idée de M. Juncker, parfaitement raisonnable bien qu'elle ait apparemment vexée Mme Merkel et M. Sarkozy qui n'ont pas été consultés. Ce serait mettre la charrue avant les boeufs ? Mieux vaut des mesures préventives contre l'incendie que d'attendre l'intervention des pompiers !

Je comprends la position allemande, qui ne veut pas exonérer les pays membres de leurs responsabilités. Il faut donc un certain nombre de précautions, ainsi qu'une certaine prudence. Mais l'idée me semble tout à fait raisonnable.

M. Laurent Wauquiez, ministre.  - M. Badré a soutenu l'intégration accrue de l'Union européenne. Je lui en rends hommage.

M. Denis Badré.  - Merci.

M. Laurent Wauquiez, ministre.  - Je maintiens pourtant mon propos : il y a un temps pour l'action et un temps pour la réflexion. Nous sommes dans le temps de l'action.

Les eurobonds ne sont donc pas d'actualité : la question essentielle, c'est d'affronter la crise qui frappe certains Etats membres. Il faut franchir le gué avant d'explorer de nouveaux territoires.

M. Pierre Fauchon.  - Rendez-vous dans un an !

M. Robert del Picchia.  - Sans être alarmiste, je pense que de nouveaux épisodes de crise seront possibles. Hélas, le traité européen ne permet pas à un État membre de soutenir un autre.

Il semble que la révision du traité de Lisbonne s'impose pour l'après 2013. L'Allemagne s'oppose fermement à l'émission d'euro-obligations. Vous avez évoqué le bon sens, mais réviser le traité de Lisbonne pourrait signifier ouvrir la boîte de Pandore.

Quel serait l'éventuel calendrier des nouveaux mécanismes pérennes de soutien ?

M. Laurent Wauquiez, ministre.  - En effet, une révision est indispensable pour certains pays, mais il ne faut surtout pas ouvrir la boîte de Pandore.

La France est donc favorable à une révision la plus simple possible et la plus circonscrite possible : la réécriture doit se résumer à une frappe chirurgicale.

M. Richard Yung.  - Je m'exprime avec prudence, pour ne pas trop m'engager dans la « foire aux idées ».

M. Juncker a dit qu'il avait fallu cinq ans pour que son idée soit ratifiée. Vous êtes dans le temps de l'action : le Parlement est aussi dans celui de la réflexion.

La politique industrielle européenne est marquée par l'ampleur des affrontements franco-allemands. Nous sommes loin de créer les champions dont l'Europe a besoin. Ainsi l'Allemagne conduit sa propre politique énergétique.

Tout le monde a compris que la vente du Rafale au Brésil était plus que compromise. Est-ce étonnant, vu la concurrence entre producteurs européens, avec l'Eurofighter, notamment ?

M. Laurent Wauquiez, ministre.  - Le conseil franco-allemand a mis l'accent sur la politique industrielle. La concurrence est réelle, mais nous devons dégager des intérêts conjoints : nous unir, par exemple, pour lutter contre la concurrence chinoise...

L'Europe de l'avant-crise était le bras armé de la dérégulation et privilégiait la concurrence. L'Europe de l'après-crise devra changer de logiciel !

L'énergie est un enjeu stratégique européen. A Budapest, je me suis entretenu avec ma collègue hongroise : ce thème sera une priorité de la présidence hongroise. A ce propos, je souligne l'avantage apporté à la France par la filière électronucléaire.

M. Michel Billout.  - Vous avez dit que les banques avaient été sanctionnées par la nationalisation ; mais nationaliser une banque en faillite revient à socialiser les pertes. Mais quelles ont été les sanctions prises contre les banques européennes ayant encouragé la dérive des établissements irlandais ?

Ne faudrait-il pas créer une autorité européenne de supervision bancaire ? Où en est la création d'une agence européenne publique de notation ?

M. Laurent Wauquiez, ministre.  - Les actionnaires des banques irlandaises ont tout perdu ! Et les banques nationales des États membres n'ont pas poussé les Irlandais à la faute. Nos banques sont particulièrement solides, même par rapport aux établissements allemands.

Le dispositif, pérenne pour l'après 2013, sur le modèle du FMI, prévoit une clause d'action collective pour éviter qu'un créancier bloque le processus ; il prévoit une participation au cas par cas et une priorité au remboursement des créanciers publics ; autant d'avancées importantes !

M. Simon Sutour.  - Je me félicite de ce débat interactif.

Effectivement, le nucléaire est une chance pour la France.

M. Josselin de Rohan, président de la commission des affaires étrangères.  - Très bien ! Dites-le à Mme Voynet !

M. Simon Sutour.  - Je souhaite aborder la politique de convergence territoriale, inscrite dans le traité de Lisbonne. Les fonds seront-ils maintenus pour la période 2014-2020 ? L'inquiétude des élus est grande car d'autres priorités s'imposent dans le cadre d'un budget européen contraint.

M. Laurent Wauquiez, ministre.  - Merci pour votre observation sur la filière nucléaire car le consensus national est nécessaire sur ce sujet. La politique de cohésion territoriale n'est pas à l'ordre du jour du Conseil européen, mais il s'agit là d'un sujet majeur pour les collectivités territoriales et nos concitoyens. Hélas ! Les dossiers sont excessivement difficiles à remplir. Pire : le gouvernement français a parfois compliqué les choses. Simplifier les dispositifs européens sera une de mes priorités. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Jean Bizet, président de la commission des affaires européennes.  - Je me réjouis que les affaires européennes soient désormais confiées à un ministère de plein exercice. Le président de la Bundesbank a dit avec raison que la crise actuelle n'est pas due à l'euro mais aux déficits publics de certains États membres, tout comme M. Trichet a affirmé que l'euro était notre monnaie et devait rester notre destin. Crise après crise, l'Europe avance ; mais nous devons être très réactifs. Mme Merkel a dit fort justement que les fonds spéculatifs seraient mis à contribution après 2013.

Le Fonds européen de stabilité financière est d'ampleur considérable, avec 750 milliards d'euros. Là encore, c'est un signal clair adressé aux marchés !

Depuis le traité de Rome, la préférence communautaire n'était plus qu'une incantation politique, mais elle a désormais une signification comprise par tous. Ce principe doit animer toutes nos actions.

« L'Europe se dissout quand on la pense claire et rationnelle alors qu'il faut la concevoir dans sa pleine et complexe réalité », a dit une personnalité dont le nom m'échappe, peut-être Edgar Morin ; ces propos m'avaient autrefois séduit ; ce n'est plus mon avis, et encore moins celui des marchés ! Il faut que l'Europe parle d'une seule voix et que très rapidement, nous soyons dotés d'une gouvernance économique. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Josselin de Rohan, président de la commission des affaires étrangères.  - J'espère que lors du Conseil européen, les chefs d'État et de gouvernements parleront d'une seule voix pour condamner le coup de force qui s'est produit en Côte-d'Ivoire et demander que M. Ouattara, élu par son peuple, puisse exercer ses fonctions. Si L'Union européenne se tait, elle commettra un grave manquement. (Applaudissements à droite et au centre)

Simplification et amélioration du droit

M. le président.  - L'ordre du jour appelle l'examen de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, de simplification et d'amélioration de la qualité du droit.

Discussion générale

M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.  - (Applaudissements au centre et à droite) Le Gouvernement partage pleinement l'objectif de rendre le droit plus clair et plus lisible : c'est une oeuvre passionnante mais aussi délicate parce que la technique pose des questions politiques. Chaque assemblée a ses usages et ses priorités, le Gouvernement aussi, mais l'important est d'avancer ensemble vers le consensus. Le droit et la loi se complexifient, au gré des textes qui s'empilent, pas toujours de façon cohérente, mais aussi de la diversification des sources mêmes du droit, au point que même les professionnels se perdent dans le dédale du droit.

Nul n'est censé ignorer la loi : cette fiction, nécessaire, a pour corollaire la lisibilité des textes. Il est au demeurant un objectif de constitutionnalité : le Conseil constitutionnel ne manque pas de nous le rappeler, la clarté est une condition de la garantie des droits, au sens de la Déclaration de 1789.

Or, plus de 3 300 lois ont été adoptées depuis 1958, avec une accélération -aux effets parfois indésirables- depuis vingt ans : 64 codes et 2 600 lois sont en vigueur, assorties de 24 000 décrets. Depuis le 23 juin 2008, tout projet de loi est accompagné d'une étude d'impact, dans un souci de sécurité juridique, puis la révision constitutionnelle a permis au Conseil d'État d'examiner une proposition de loi.

Cependant, l'instabilité du droit demeure, car les lois se succèdent sans abroger les anciennes ni veiller à la cohérence de l'ensemble.

Des lois de simplification sont donc intervenues, le Parlement y a pris tout son rôle, comme pour le texte qui nous réunit aujourd'hui.

Le champ en est large, c'est la contrepartie nécessaire de l'ambition de ses auteurs.

Il s'agit d'abord de simplifier les démarches administratives, pour les particuliers comme pour les entreprises.

Ainsi nos concitoyens n'auront plus à fournir deux fois la même pièce ; l'Assemblée nationale a renforcé les garanties de protection des données personnelles. Votre commission propose une mesure à titre expérimental pour prévenir le contentieux en rendant obligatoire le recours administratif préalable pour les actes concernant les fonctionnaires. Un projet de décret est prêt.

L'administration doit être plus à l'écoute des usagers : vous proposez de supprimer leur consultation par internet, je souhaite le maintien de cette forme de démocratie participative.

Le texte valorise l'activité économique : il pose un cadre général pour les groupements d'intérêt économique.

Ce texte renforce encore les droits des citoyens, en encadrant mieux les fichiers informatiques. Une autre proposition est en cours d'examen à l'Assemblée nationale : votre commission propose d'y renvoyer mais, vu les garanties apportées sur les fichiers de police, je crois plus utile d'en débattre ici.

Votre commission propose de renvoyer les dispositions relatives au droit de préemption à un texte autonome, ce qui me paraît opportun.

Le texte met la France en conformité avec ses engagements européens, qu'il s'agisse de la directive Services ou de celle sur la médiation civile et commerciale, qui traite de litiges transfrontaliers et que le Gouvernement propose d'appliquer aux litiges nationaux.

Enfin, le texte clarifie notre droit pénal ; il supprime des dispositions devenues obsolètes, simplifie des formalités et propose des mesures de bonne administration de la justice. Votre commission ajoute des dispositions sur les autopsies judiciaires et le statut des prélèvements humains ; le Gouvernement déposera un amendement pour préserver les nécessités de l'enquête pénale. C'est dire l'ampleur du chantier que j'ai l'honneur d'ouvrir devant vous. La qualité de la loi est la garantie de son effectivité ! (Applaudissements à droite et au centre)

M. Bernard Saugey, rapporteur de la commission des lois.  - Ce nouveau toilettage étant large, la commission des lois a renvoyé aux autres commissions les sujets relevant de leur compétence, se réservant les 144 articles qui la concernaient directement. J'observe tout d'abord que la simplification du droit devient un exercice de plus en plus complexe : nous voici devant 206 articles, très divers, souvent techniques. Nous simplifions, nous clarifions, certes, mais nous innovons également, dépassant manifestement l'objet du texte, qui finit par servir de véhicule commode pour certains ministères. Ne peut-on y voir un assemblage hétéroclite de cavaliers législatifs en déshérence ? Ce serait altérer la sincérité du débat parlementaire, la lisibilité de la loi. Ce texte touffu, est-il simple ? Votre rapporteur jouera le jeu quand les articles se contenteront de simplifier. Mais nous déplorerons l'insertion de dispositions qui figurent déjà dans d'autres textes. (M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois, approuve)

La lecture des 141 articles en discussion souligne les dérives : nous allons supprimer la référence à la peine de mort ; nous réglerons le délai de paiement d'amendes forfaitaires, nous réparerons des omissions, nous supprimerons des régimes spéciaux sans objet ou encore des demandes administratives, nous préciserons les conditions de démissions des conseillers communautaires des EPCI, nous prendrons des dispositions utiles en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique.

Mais certaines dispositions dépassent l'objet du texte, quel que soit le bien-fondé des mesures : votre commission a donc supprimé les articles modifiant le droit de préemption, ou la définition des peines, dans le cas de prise d'otage, ou encore ceux relatifs à la mémoire numérique, puisque nous examinons un autre texte sur ce thème.

Votre commission, sur divers points, a aussi apporté les compléments et clarifications qui lui paraissaient nécessaires et cherché à améliorer le fonctionnement de la justice administrative. Elle a, en particulier, confirmé la suppression du classement de sortie de l'ENA, nous consoliderons la nouvelle procédure de classement à la sortie en revenant sur la procédure retenue par les députés pour les auditeurs au Conseil d'État, afin de vérifier l'adéquation des compétences.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Nous en reparlerons : les règles doivent être les mêmes pour tous !

M. Bernard Saugey, rapporteur.  - Je déplore le caractère tardif des 49 amendements gouvernementaux : nous avons commencé par les refuser en bloc, le 19 octobre, avant d'examiner mercredi ceux qui nous paraissaient opportuns. Sous ces réserves, la commission des lois vous invite à adopter son texte. (Applaudissements au centre et à droite)

Mme Françoise Henneron, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales.  - Je remercie la commission des lois de nous avoir fait confiance. Nous sommes attachés à la simplification du droit qui rend la loi plus accessible. Cependant, il faut également rechercher la rigueur et la clarté dès la rédaction des nouveaux textes, ce qui suppose de pouvoir en débattre avec suffisamment de temps, tout comme nous devons éviter de multiplier les habilitations.

Les lois de simplification ne doivent pas se transformer en lois « diverses dispositions » contenant toutes celles qui n'ont pu trouver place ailleurs.

Notre commission a supprimé tous les articles relevant de la loi de finances ou de la loi de financement, y compris, malheureusement, celui qui aurait profité aux conjoints de titulaires du RSA mais qui aggravait les charges des départements. Nous avons supprimé les articles transposant la directive Services parce qu'un projet de loi devait les accueillir mais le Gouvernement insiste pour éviter une condamnation. Nous vous proposerons également de supprimer certaines mesures relatives aux personnes handicapées, qui ne nous ont pas paru pertinentes.

Notre commission a approuvé la plupart des articles relevant du droit du travail et de la santé publique. Elle considère que l'apport de ce texte, dans ses domaines de compétences, est finalement assez modeste. Elle est favorable à l'adoption du texte, assorti de quelques réserves dont nous discuterons en examinant les articles. Peut-être faudrait-il à l'avenir changer notre méthode de simplification, avec des textes ciblés faisant une place accrue à la consultation.

M. Pierre Bordier, rapporteur pour avis de la commission de la culture.  - L'article 27 modifie la loi du 16 juillet 1949 relative aux publications destinées à la jeunesse, pour l'adapter à la directive européenne. Cette loi comporte de nombreuses mentions obsolètes. Nous y remédions, d'abord en modifiant la composition de la commission de contrôle des publications.

Le dispositif cependant, est aussi réglementaire : nous entendons du Gouvernement qu'il prenne les textes nécessaires. Comme pour les jeux vidéo, nous souhaitons que les éditeurs de publications pornographiques procèdent à une auto-classification, ce qui permettra à la commission de contrôle de se consacrer à sa véritable tâche.

L'Assemblée nationale a supprimé le Haut conseil à l'éducation, malgré l'utilité de son travail ; nous le rétablissons. Nous avons encore précisé les conditions d'inscription à l'Ordre des architectes.

La commission de la culture a donné un avis favorable, sous réserve de ses amendements. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Hervé Maurey, rapporteur pour avis de la commission de l'économie.  - Adopté le 2 décembre 2009, par l'Assemblée nationale, puis en octobre 2010 par notre commission, le texte arrive enfin devant nous. C'est un fourre-tout : auto-écoles et pollution marine, s'y côtoient, c'est dire...

La commission de l'économie a proposé une trentaine de modifications que la commission des lois a toutes retenues, y compris la suppression de la réforme du droit de préemption urbaine.

J'aimerais que ce soit la dernière loi de simplification. La commission des lois partage notre avis sur ce point.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Comme à chaque fois !

M. Hervé Maurey, rapporteur pour avis.  - Huit heures vingt, soit deux minutes trente par article : c'est la moyenne passée par nos collègues députés à ce débat. Est-il raisonnable que le Gouvernement dépose 43 amendements avant le débat en commission, puis 48 sur la rédaction établie par celle-ci ? Le délai de quelques heures pour les examiner n'est guère satisfaisant.

Depuis le début des années 2000, pas moins de quatre lois de simplification : d'initiative d'abord gouvernementale, avec force ordonnances, elle est devenue plutôt parlementaire. Mais comme le dit le professeur Delvolvé, ces textes sont souvent « indignes du Parlement » : je comprends qu'il faille toiletter la loi mais cela ne doit pas devenir la priorité du parlement, d'autant que la discussion de ces textes fourre-tout ne fait pas recette. Pire, le Gouvernement exhume des articles sur toutes sortes de sujets, quand nos collègues ne se prêtent pas également au jeu : la loi de simplification alors complexifie!

Parfois, on veut aussi rejouer le match en faisant passer des dispositions déjà écartées, comme par exemple à propos des logements vacants. C'est le signe d'un dysfonctionnement de la démocratie parlementaire, si nous légiférons trop -70 lois par an- et trop vite.

Ainsi, témoignage de cette frénésie législative, l'ordonnance de 1945 sur l'entrée et le séjour des étrangers a été réformée 70 fois !

Personne n'est hostile à la simplification, aussi serions-nous très inspirés de regarder ce que font nos voisins, avec des exercices réguliers et sectoriels de simplification.

Nous sommes proches de la fin de l'année : je forme le voeu que cette loi de simplification soit la dernière du genre et que la loi soit dorénavant plus claire et le débat plus attractif, conformément au voeu de notre Président !

Cependant, notre commission a émis un avis favorable. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Jean-Pierre Sueur.  - On respire !

M. Jacques Mézard.  - Après avoir posé le bon diagnostic, monsieur le ministre, vous n'avez pas prescrit le bon traitement ! Nos lois ne méritent pas d'être ainsi toilettées ! Depuis la précédente loi de 2009, le titre a changé. Il est vrai qu'elle avait suscité la polémique car une de ses dispositions, noyée dans la masse, qui avait franchi tous les sas de sécurité juridique, avait supprimé la possibilité pour le juge de dissoudre une personne morale coupable d'escroquerie. L'église de scientologie était alors dans tous les esprits...

Cette proposition de loi contient des dispositions extrêmement hétéroclites, dont des réformes de grande ampleur qui n'ont rien à voir avec la simplification ; elle méconnaît le principe de clarté et d'intelligibilité de la loi. Certes, cette proposition de loi a fait l'objet d'un examen préalable par le Conseil d'État, après que son auteur eût sollicité, sans publicité, le cabinet privé Nexis pour 84 000 euros. Trop de cabinets privés sont déjà à l'oeuvre, qui permettent le transfert de propositions législatives vers des textes accueillant -avec le maximum de discrétion. Une quinzaine de professeurs de droit ont été sollicités et certaines mesures proviennent de suggestions formulées sur le site internet « Simplifions la loi » ! Ce concerto cacophonique ne mérite pas un quatrième acte, du moins pas dans ces conditions.

Je salue le travail de M. Saugey mais ces lois de simplification tournent à la voiture-balai, au bric-à-brac législatif, à la session de rattrapage pour propositions de loi avortées ou rejetées, au moyen, pour les lobbies, de faire passer leurs desiderata.

Nous devons traiter cette maladie qu'est l'inflation législative et réglementaire, à laquelle aucun barrage ne résiste. Entre l'édit de Villers-Cotterêts de 1539 et la naissance de la Ve République, il y eût moins de lois que depuis 1958 ! Le recueil des lois de l'Assemblée nationale comptait 2556 pages en 2004 contre 620 en 1970...

Le texte a une utilité lorsqu'il supprime des lois. Celui d'aujourd'hui en élimine 50, devenues inapplicables faute de mesures d'application. L'article 33 évapore diverses commissions. Mais il ne faut pas mélanger le travail de suppression avec l'introduction de dispositions nouvelles, sauf à alimenter ce qu'on est censé combattre.

Le Conseil d'État, en 2006, a souligné que les lois de simplification finissaient souvent par compliquer les textes en vigueur. Ainsi, la proposition de loi modifie 48 codes, parfois en contradiction avec des textes en navette.

Nous déplorons l'empilement de normes stratifiées, que rien ne parvient à contenir malgré l'objectif à valeur constitutionnelle de clarté et d'intelligibilité de la loi. De surcroît, l'abolition de la barrière entre domaine législatif et réglementaire aboutit à des « neutrons législatifs », selon l'expression de Pierre Mazeaud.

Nous avons déposé des amendements de suppression, notamment de l'article relatif au droit de préemption qui n'a rien à faire ici ; on se demande d'ailleurs qui peut bien être à son origine... De même, le rapporteur a proposé de supprimer l'article 107 ; il approuve également la suppression de l'article 104.

De nombreuses dispositions se télescopent avec d'autres textes en cours d'élaboration ou de navette ; elles illustrent une dissociation de la pensée juridique -on utilise un autre nom dans d'autres matières...

La révision constitutionnelle de 2008 devait renforcer les droits du Parlement, dans les faits limités tant que le Gouvernement et une partie des parlementaires se calent sur le temps médiatique. Comme le notait M. Denoix de Saint-Marc, l'action politique a pris la forme d'une gesticulation législative. Il ajoutait qu'au lieu que la loi soit solennelle, brève et permanente, elle était devenue bavarde, précaire et banalisée. Ce texte appartient à cette dernière catégorie. Nous ne l'approuverons pas. (Applaudissements à gauche)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - « Simplification du droit » : la formule est trop vague. Nous en sommes pourtant à la sixième depuis le début de la législature. On pourrait s'attendre à l'élimination de textes obsolètes ou de procédures inutilement lourdes ; mais trop d'articles modifient substantiellement le droit sans le simplifier. L'intitulé prête à sourire. Personne ne peut trouver de l'ordre dans ce désordre, sinon la majorité et le Gouvernement...

En français, le terme « amélioration » désigne un changement en mieux. Il n'en est rien ici. Déjà, la loi du 12 mai 2009 comportait un article modifiant 57 dispositions législatives différentes, dont celle dont on a parlé à propos de la scientologie. Lorsqu'il était chargé de la réforme de l'État, M. Woerth avait donné mission à la Cour des comptes d'évaluer les effets de la loi du 2 juillet 2003 habilitant le Gouvernement à simplifier le droit par ordonnance ; celle-ci avait relevé les effets d'aubaine législatifs et souligné que « la complexité des textes renvoyait à la complexité des réalités de la société ».

On nous propose aujourd'hui de modifier des textes de loi fort disparates. Heureusement, le rapporteur a supprimé certains articles, mais laissé s'organiser la transposition en catimini de la directive Bolkestein, qui était au coeur du rejet par les électeurs de la Constitution européenne.

Non contents de légiférer trop, les parlementaires légifèrent mal, ce qui finit par les déconsidérer aux yeux de nos concitoyens. Depuis 2009, nous avons été saisis en majorité de textes présentés selon la procédure d'urgence. Ce n'est pas sans conséquence pour la lisibilité de textes censés exprimer la volonté générale selon les termes de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Le Conseil constitutionnel s'est appuyé sur les articles 3 et 6 de cette même déclaration pour exiger la clarté et la sincérité du débat parlementaire. Celui d'aujourd'hui n'est pas sincère puisque cette proposition de loi n'est qu'un projet de loi déguisé, qui a nécessité l'intervention de onze rapporteurs du Conseil d'État, l'appui de l'administration centrale et d'un cabinet privé.

Notre rapporteur suggère dans son rapport néanmoins honnête (on s'étonne sur le banc des commissions et sur celui du Gouvernement) qu'il faudra, à l'avenir, procéder autrement. Pourquoi pas aujourd'hui ?

Attachés aux services publics, nous repoussons la scélérate directive Bolkestein. Celle-ci aurait en principe dû être transposée il y a plus d'un an. Le Gouvernement semble avoir abandonné son projet de loi-cadre de transposition. Je ne sais pas si nous pouvons être « vigilants », puisque la présente proposition de loi est censée opérer à droit constant. Il est d'ailleurs étrange qu'une proposition de loi ratifie une ordonnance...

De nombreux amendements ont été déposés, ce qui ajoute au tour de passe-passe. Je pense à celui, surprenant, de M. Zocchetto qui bouleverse notre tradition contentieuse. Il semble que l'avis favorable de la commission ait été donné sans discussion au sein de celle-ci.

Sous prétexte de simplifier, le Parlement est dessaisi de sa fonction législative. Cette parodie de débat ne l'honore pas. Nous ne pouvons l'accepter. (Applaudissements à gauche)

La séance, suspendue à 18 heures, reprend à 18 heures 10.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Je vais m'abstenir de propos à caractère général, après l'exposé talentueux qui en a été fait par les précédents orateurs. En outre, il m'est arrivé jadis de rapporter à l'Assemblée nationale des textes « portant diverses dispositions » présentés par un gouvernement que je soutenais. J'espère que les leçons du passé seront tirées et que le gouvernement que je soutiendrai bientôt s'abstiendra de telles pratiques, mais rien n'est arrivé... (Rires)

Nous ne voterons aucune disposition relative à la directive Services. Un texte spécifique aurait dû être déposé pour sa transposition. Nous réprouverons également le recours aux ordonnances.

Je remercie le rapporteur de la commission des lois pour son écoute et la clarté de sa position quant à certains articles du texte, notamment celui supprimant les plans personnalisés de compensation du handicap : toutes les associations concernées défendent ce plan.

J'en viens à mes propositions d'enrichissement. Mme Tasca parlera de l'ENA. Je me bornerai donc à évoquer l'atteinte aux principes républicains. Nous en avons débattu ici il y a un an ou deux et nous nous étions retrouvés avec M. de Rohan.

Monsieur le garde des sceaux, notre proposition sur les écoutes administratives vous ira sans doute droit au coeur. Vous tendez l'oreille à juste titre. (Sourires) Un vrai malaise -le mot est faible- est apparu : il semble que la DCRI se soit préoccupée des appels passés et reçus par des journalistes, un membre du cabinet de votre prédécesseur, et même des magistrats. Le Premier ministre avait déclaré à l'Assemblée nationale que le respect des libertés publiques imposait que les interceptions fussent strictement limitées et contrôlées de façon étroite. On ne peut absolument pas utiliser la loi de 1991 pour justifier de telles pratiques. S'agissant des fichiers, la délégation parlementaire au renseignement devait être saisie des décrets en Conseil d'État créant des traitements dispensés de publication au Journal officiel.

Nous proposerons également de supprimer l'article L. 622-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : il s'agit de ce qu'on a appelé le délit de solidarité. En l'état du droit, le fait d'apporter une aide directe ou non à des étrangers en situation irrégulière est punie de cinq ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende, ce qui est particulièrement choquant. M'objectera-t-on que tel n'est pas l'objet du texte ? Mais la proposition de loi n'a pas d'objet précis ! En outre, son article 24 modifie le Ceseda. Je conseille à chacun de lire le petit livre Indignez-vous de Stéphane Hessel, personnalité de haute valeur morale, grand résistant, contributeur à la Déclaration universelle des droits de l'homme ; on y trouvera des paroles fortes à ce sujet. Mettre fin au délit de solidarité serait faire simplement oeuvre d'humanité. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Monsieur le garde des sceaux, il ne serait pas correct qu'au détour d'un amendement, on dispense le rapporteur public au sein des tribunaux administratifs de formuler ses conclusions à propos de matières fixées par décret. Le Gouvernement, en 1998, répondant à la Cour européenne des droits de l'homme, relevait à juste titre que le rapporteur public appartenait aux meilleures traditions françaises. Et je ne parle pas de l'intervention du décret.

Plusieurs de nos collègues proposeront des dispositions de simplification, notamment pour éviter les tracasseries et les vexations subies par nos concitoyens nés à l'étranger. Nous formulerons aussi des suggestions à propos du parc locatif privé, notamment au regard de la flambée des prix en Ile-de-France.

Enfin, nous avons présenté une série de dispositions sur l'autopsie judiciaire. Je vous remercie, monsieur le rapporteur, de les avoir prises en compte pour introduire plus d'humanité envers les familles. Un registre consigne aujourd'hui les noms des citoyens refusant le don d'organes : il faudrait aussi un registre d'acceptation.

A propos des entrées de villes, je déplore que le Gouvernement propose de supprimer des dispositions adoptées à l'unanimité par le Sénat.

Bien sûr, l'ensemble est disparate, mais telle est la loi du genre. Les concepts de justice, de solidarité, nos conceptions républicaines assureront l'unité de nos propositions. (Applaudissements à gauche)

M. Christophe-André Frassa.  - Longtemps, le droit français a été un modèle dans le monde car il était clair et concis. Depuis, les choses ont bien changé au gré de l'intégration de normes européennes et internationales et de lois toujours plus nombreuses, souvent plus complexes et obscures. La loi doit être claire, intelligible, stable et cohérente pour assurer la sécurité juridique des citoyens, donc le bon fonctionnement de la démocratie. Notre objectif n'est pas de fustiger une boulimie législative mais d'aider les Français à y voir plus clair dans ce que beaucoup considèrent encore comme un capharnaüm.

Enfin, comble de la légitimité, ce texte est le premier à avoir été soumis au Conseil d'État par l'Assemblée nationale : c'est dire que des précautions ont été prises. Certaines mesures concernent tous les Français : les administrations devront échanger entre elles les pièces au lieu de demander aux citoyens de les fournir de nouveau ; elles devront aussi informer de leur erreur les citoyens ayant produit une demande avec vice de forme et leur indiquer quelle démarche adopter.

Le droit des entreprises sera simplifié ; cela diminuera leurs coûts de gestion sans rien retirer à la transparence.

Les administrations ne sont pas oubliées : l'article 34 continue la « chasse aux rapports » ! Internet est pris en compte pour organiser des consultations ouvertes.

Ce texte est long et hétérogène, on l'a dit, il était dense et sa version initiale manquait de clarté : nos rapporteurs l'ont beaucoup amélioré, tout en le recentrant. Exit l'extension de la réforme du droit de préemption ; c'est une bonne chose. La simplification améliorera le travail administratif et législatif ; ce texte utile était très attendu. Nous nous devions d'agir avec résolution.

Le groupe UMP l'adoptera avec conviction ! (Applaudissements à droite)

M. Josselin de Rohan.  - Je me cantonnerai à l'article 146 bis, relatif à l'ENA. Le Gouvernement est un, monsieur le garde des sceaux : c'est donc vous qui allez devoir subir mon sermon ! (Sourires)

En supprimant le concours de sortie à l'ENA, le Gouvernement a oublié la procédure de recrutement pour les auditeurs au Conseil d'État, qui exigeait un texte de nature législative. Il a donc fait adopter, contre l'avis de la commission des lois de l'Assemblée nationale, une disposition particulière à l'affectation au Conseil d'État : c'était recréer un concours spécial ! Je félicite notre rapporteur de revenir au droit commun. De fait, le législateur peut s'exprimer bien que la mesure soit réglementaire. On remplace un système simple et éprouvé par un dispositif complexe qui sera source de frustration et de contentieux. La nouvelle procédure s'apparente au cross-country, voire au mercato : les élèves formulent leur souhait, une présélection anonyme est envoyée aux recruteurs, des entretiens ont lieu avant la décision prise collégialement. Suit une période probatoire de quelques mois, une commission ad hoc validant l'ensemble de la procédure. On dit que les élèves préfèrent cette procédure mais l'association des anciens élèves y est hostile ; les parlementaires ne paraissent guère enthousiastes : je l'ai constaté en posant une question orale. Pourquoi avoir supprimé le concours de sortie ? Comment le dossier d'aptitude permettra-t-il de distinguer les élèves ? Que devront faire les élèves pour attirer l'attention des recruteurs ? Bien danser ? Être bons bonimenteurs ? Être membres de tel cercle, de tel parti, de tel syndicat ? L'enjeu est pourtant l'accès aux plus hautes fonctions de l'État ! Comment éviter la cooptation ? Dans l'Éducation sentimentale, Flaubert fait dire à l'un de ses personnages qu'il faut supprimer les diplômes, avant qu'un autre ne veuille en confier la délivrance au peuple. L'ENA a mis fin à un système corporatiste ; la suppression du concours de sortie menace la transparence et l'équité. Je crains que vous ne soyez bientôt contraint de remettre l'ouvrage sur le métier ! (Applaudissements sur tous les bancs)

M. Richard Yung.  - Je me focaliserai sur les articles 135 bis et 149 quinquies. Je remercie M. le rapporteur d'avoir introduit le premier, relatif au droit électoral des Français de l'étranger. Il s'agit d'abord de communiquer la liste des candidats aux élections consulaires : actuellement, le ministère refuse de nous la communiquer, ce qui nous place dans une situation unique. Il s'agit ensuite de l'interdiction de propagande électorale à l'étranger : cette interdiction n'a plus de sens dans l'Union européenne mais nous traînons ce sujet depuis le XIXe siècle. Cependant, la supprimer déborderait notre sujet car cela reviendrait à autoriser la propagande électorale à la veille des élections en France : je vais réfléchir au problème pour trouver une solution.

Sur les inventions faites par des salariés ensuite, un problème se pose : pour se faire reconnaître comme inventeur, le salarié doit engager une procédure lourde. Mme Lagarde a demandé un rapport au Conseil supérieur de la propriété industrielle : ce rapport est tombé aux oubliettes ; en 2009, M. Sarkozy a souhaité mieux associer les salariées aux fruits de leurs inventions. Mais comme rien n'est venu depuis, je proposerai des amendements issus de ma proposition de loi. Le rapporteur et le Gouvernement me suivent, sauf sur la rémunération qui relèverait, selon eux, des accords professionnels ; c'est vrai... mais cela ne marche pas !

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - Ce texte hétéroclite est nécessaire, il comporte des mesures très utiles aux Français de l'étranger. J'ai proposé ailleurs d'établir des listes électorales uniques pour les Français de l'étranger : ce serait plus simple et moins cher. Je me réjouis de la suppression de l'article 149 bis, qui tendait à abroger la limite d'âge des administrateurs d'organismes de sécurité sociale.

Comment l'article 5 bis peut-il s'appliquer au Français de l'étranger ? L'aide juridictionnelle ne leur est pas assez accessible, en particulier en cas de déplacement illicite d'enfants : j'espère que le Gouvernement proposera des mesures dans ce sens. Je n'ai pu déposer un amendement, qui aurait subi l'article 40.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois.  - C'est certain !

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - Il faut simplifier le droit pour les Français de l'étranger car le dédale du droit est plus indéchiffrable encore pour eux. La refonte du guichet administratif unique sera un bon outil, de même que le portail unique de la Cnam. L'externalisation de certains services, à condition qu'elle soit encadrée, est une piste intéressante pour alléger la charge de nos consulats administratifs à l'étranger. J'ai toute confiance que le Défenseur des droits reprendra le flambeau du Médiateur et qu'il aura à ses cotés un délégué aux Français de l'étranger. (Applaudissements à droite)

Mme Catherine Tasca.  - Dans ce salmigondis législatif, la suppression du concours de l'ENA pourrait passer inaperçue ; l'énarchie a mauvaise presse mais la procédure « spéciale » de recrutement, chère au Président de la République, revient à jeter avec l'eau du bain le bébé et les principes chers au général de Gaulle et à Michel Debré. Le recrutement par corps avait démontré ses limites et la réforme de 1945, organisant une fonction publique spécialisée et unifiée pour les cadres supérieurs de l'État, devait garantir l'égal accès républicain aux plus hautes fonctions de l'État.

La nouvelle procédure empile plusieurs étapes : projet professionnel, commission de projets, entretiens personnalisés avec les ministères. Comment l'anonymat pourra-t-il être préservé ? Comment la cooptation pourra-t-elle être évitée ? Bien des pistes existent pour améliorer le classement mais on ne saurait s'en passer. L'affectation à la sortie ne détermine pas toute la carrière. L'enjeu, c'est rien moins que l'État et la fonction publique au XXIe siècle : l'État est-il une entreprise ? Le général de Gaulle estimait que non mais le Gouvernement, qui parle « d'employeurs », paraît regarder plutôt vers les cabinets de recrutement.

L'air du temps est à la fascination pour l'entreprise. Je déplore qu'on veuille y sacrifier le principe de l'égalité des chances. La Haute assemblée ne doit pas prêter main à cette pseudo-modernisation. Nous vous proposerons de rétablir le classement, la meilleure, en fait la moins mauvaise, des solutions possibles ! (Applaudissements)

Discussion des articles

Articles additionnels avant l'article premier

M. le président.  - Amendement n°106 rectifié, présenté par Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa de l'article L. 3141-3 du code du travail, les mots : « qui justifie avoir travaillé chez le même employeur pendant un temps équivalent à un minimum de dix jours de travail effectif » sont supprimés.

Mme Alima Boumediene-Thiery.  - Le 20 janvier 2009, la Cour de justice de l'Union européenne a clairement exclu que le droit à un congé payé puisse être subordonné à l'accomplissement d'un temps de travail effectif. Nous vous proposons donc de supprimer l'exigence d'une durée minimale de travail effectif.

Mme Françoise Henneron, rapporteur pour avis.  - La Cour de justice s'est juste prononcée sur le report des congés maladie, pas sur une durée minimale ouvrant droit à congé : avis défavorable, d'autant qu'une durée minimale n'est pas choquante.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Certes, notre droit national n'est pas conforme au droit européen, mais il ne faut pas toucher au droit complexe du travail sans concertation. De plus, une période transitoire semble nécessaire. Retrait ? Nous sommes prêts à travailler avec vous l'année prochaine.

Mme Alima Boumediene-Thiery.  - Pourra-t-on évaluer ce sujet en 2011 ? Dans le cas contraire, je maintiens l'amendement.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Nous y travaillerons dès l'an prochain, mais je ne peux vous garantir que nous en aurons fini le 31 décembre 2011. Au demeurant, vous avez peut-être d'autres préoccupations en ce moment... (Rires)

L'amendement n°106 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°107 rectifié, présenté par Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Avant l'article 1er, insérer un article  additionnel ainsi rédigé :

Le deuxième alinéa de l'article L. 3142-1 du code du travail est complété par les mots : « ou pour l'enregistrement de son pacte civil de solidarité ».

Mme Alima Boumediene-Thiery.  - Le salarié bénéficie d'un congé pour événement familial de quatre jours en cas de mariage. Nous voulons étendre ce congé à l'enregistrement d'un Pacte civil de solidarité (Pacs), comme cela existe déjà dans la fonction publique. Le Médiateur de la République l'a recommandé.

Mme Françoise Henneron, rapporteur pour avis.  - Je suis réservée face à cette étrange nouvelle pour les entreprises, y compris les PME. En outre, elle alignerait le statut du Pacs sur celui du mariage alors que si le Pacs a une utilité, c'est d'avoir un statut différent de celui du mariage. Avis défavorable.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Dès lors que le Pacs n'est pas un mariage, pourquoi demander le congé lié au mariage ? Les conventions collectives comportent déjà des dispositions applicables aux partenaires d'un Pacs. Avis défavorable.

Mme Alima Boumediene-Thiery.  - Cela existe pourtant dans le public !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Je vais déposer une proposition de loi pour faire bénéficier les pacsés de certains droits accordés aux mariés. Le Pacs, auquel nombre d'entre nous se sont opposés, est aujourd'hui un fait social, qui concerne jusqu'aux familles de parlementaires... On m'a répondu alors que la loi sur les retraites examinerait la question des pensions pour les pacsés ; pour les congés, que c'était l'affaire des conventions collectives. Or, la loi sur les retraites n'a rien fait. Nous voulons, comme pour la fonction publique, faire progresser les droits : c'est bien le rôle de la loi, mais vous n'en voulez pas. Un pas en avant, trois pas en arrière... Un alignement des droits est pourtant indispensable.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Le code civil définit trois modalités juridiques de former un couple : le mariage, le concubinage et le Pacs. Nos concitoyens ont toute l'information nécessaire pour choisir la voie qu'ils préfèrent en fonction des avantages et des inconvénients de chaque formule. On ne peut demander les avantages de toutes !

Mme Françoise Henneron, rapporteur pour avis.  - Très bien !

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Le système est clair, ne le rendons pas confus.

L'amendement n°107 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°109 rectifié, présenté par Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le cinquième alinéa de l'article 79 du code civil, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

...° Les prénoms et nom de l'autre partenaire, si la personne décédée était liée par un pacte civil de solidarité ;

Mme Alima Boumediene-Thiery.  - Lors de la dissolution du Pacs, consécutive au décès du partenaire, les dispositions du code civil ont pour effet de minorer non seulement l'existence du partenaire survivant mais également les droits qu'il détient en cette qualité. Il en est ainsi des droits mentionnés à l'article 515-6 du code civil.

Cette simplification aura également pour effet d'assurer un parallélisme avec les dispositions du code civil relatives aux mentions portées sur l'acte de naissance, qui font apparaître les prénoms et noms du partenaire d'un Pacs. La conclusion d'un Pacs est portée en marge des actes de naissance des intéressés. Par symétrie, il faut inscrire le nom du partenaire survivant en marge de l'acte de décès. C'est important au moins pour permettre son maintien dans le logement.

M. Bernard Saugey, rapporteur.  - Avis favorable, comme dans le cas du conjoint survivant.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Très bien !

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Toute mention portée sur un acte d'état civil doit être justifiée par une raison juridique précise. Aux termes de l'article 79 du code civil, la mention du conjoint survivant est justifiée par la vocation successorale de celui-ci. Or, le partenaire survivant d'un Pacs n'est pas héritier légal.

Mme Alima Boumediene-Thiery.  - Ce n'est pas un bon argument.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Si ! Quant au droit de jouissance du logement, il est attribué de plein droit au partenaire survivant qui en fait la demande. L'amendement n'a donc pas d'objet.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Depuis dix ans, le droit du Pacs a évolué. Il est ainsi mentionné en marge de l'acte de naissance.

Mme Alima Boumediene-Thiery.  - Je remercie le rapporteur pour son avis favorable car il a compris l'intérêt de l'amendement, fondé sur la symétrie par rapport à l'inscription du Pacs en marge de l'acte de naissance. Il s'agit non de succession mais de problèmes de la vie quotidienne, comme le maintien dans les lieux.

Mme Catherine Tasca.  - La mention en marge de l'acte de naissance avait pour but de protéger les droits des tiers. Idem pour la mention sur l'acte de décès.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Je comprends bien que vous évoquiez l'intérêt des tiers et celui du partenaire survivant mais je ne peux que vous renvoyer à l'article 79 qui traite de la succession.

L'amendement n°109 rectifié est adopté ; l'article additionnel est inséré.

(Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. le président.  - Amendement n°110 rectifié, présenté par Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 515-6 du code civil est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque le pacte civil de solidarité prend fin par le décès d'un des partenaires, le partenaire survivant est présumé avoir qualité pour pourvoir aux funérailles au sens des dispositions du code général des collectivités territoriales. »

Mme Alima Boumediene-Thiery.  - Cet amendement a pour objet de mettre un terme aux difficultés rencontrées par le partenaire d'un Pacs s'agissant du sort de l'urne cinéraire ainsi que des cendres du partenaire décédé.

En effet, la loi du 19 décembre 2008 est muette sur ce dossier. Le plus souvent, la responsabilité d'organiser les obsèques revient à une personne proche, avec laquelle le défunt avait un lien stable et permanent.

Il arrive que le partenaire soit tenu à l'écart par la famille du défunt, qui nourrit des préjugés contre l'homosexualité par exemple. Nous avons reçu des témoignages poignants de personnes ainsi écartées des funérailles à cause du silence de la loi.

Notre suggestion apaiserait les funérailles, en donnant au partenaire survivant la place qui est la sienne.

M. Bernard Saugey, rapporteur.  - La loi ne définit pas la personne en charge des funérailles. Il n'y a pas lieu de faire exception pour les pacsés. Avis défavorable.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - La loi n'attribue aucun droit en la matière au conjoint survivant. Au juge de se prononcer en cas de conflit. Retrait.

Mme Alima Boumediene-Thiery.  - J'ai pris des engagements auprès de personnes endeuillées qui ont connu ces situations dramatiques, mais je comprends l'application du droit commun. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

L'amendement n°110 rectifié est retiré.

L'article premier demeure supprimé.

L'article premier bis est adopté.

La séance est suspendue à 19 heures 45.

présidence de M. Guy Fischer,vice-président

La séance reprend à 21 heures 45.

Avis sur des nominations

M. le président.  - Conformément aux dispositions des articles 65 et 13 de la Constitution, M. le Premier ministre, par lettre en date du 12 décembre 2010, a demandé à M. le président du Sénat de lui faire connaître l'avis de la commission compétente du Sénat sur le projet de nomination par M. le Président de la République de M. Jean-Pierre Machelon et Mme Rose-Marie Van Lerberghe au Conseil supérieur de la magistrature.

M. le président du Sénat propose M. Pierre Fauchon et Mme Chantal Kerbec pour siéger comme membres du Conseil supérieur de la magistrature.

La commission des lois a été saisie de ces projets de nomination afin de donner son avis, en application de la Constitution.

Accord en CMP

M. le président.  - J'informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 est parvenue à l'adoption d'un texte commun.

Simplification et amélioration du droit (Suite)

M. le président.  - Nous reprenons l'examen de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, de simplification et d'amélioration de la qualité du droit. Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'article 2.

Discussion des articles (Suite)

Article 2

M. le président.  - Amendement n°43 rectifié, présenté par MM. Mézard, Alfonsi, Collin et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Marsin, Milhau, Plancade et Tropeano.

Supprimer cet article.

M. Jacques Mézard.  - Toute simplification des procédures va dans le bon sens mais cet article 2 relève du règlement. Il est pour le moins paradoxal qu'une loi de simplification du droit s'affranchisse de la délimitation du domaine de la loi et du règlement ! Cet article est en outre trop imprécis, malgré la précision apportée par l'Assemblée nationale. Enfin, il nécessiterait une réorganisation fort complexe de l'administration.

M. le président.  - Amendement identique n°89 rectifié, présenté par M. Collombat et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Nombre d'articles de cette proposition de loi sont de caractère réglementaire. Les adopter créerait une jurisprudence.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois.  - Elle n'est pas nouvelle !

M. Jean-Pierre Sueur.  - Je ne suis pas sûr que la distinction de la loi et du règlement soit toujours facile à établir...

En outre, cet article contient des truismes. Qui croirait que les services de l'État ne parlent pas tous les jours aux services de l'État ? Notre rapporteur craint que « cette réforme ambitieuse ne soit vidée de sa substance par le décret en Conseil d'État » si les services refusent de « jouer le jeu ». Nous n'allons pas courir un tel risque !

M. le président.  - Amendement identique n°144, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC-SPG.

Mme Josiane Mathon-Poinat.  - Il y a trente cinq ans, le croisement des données prévu par le fichier Safari -Système automatisé pour les fichiers administratifs et le répertoire des individus- avait donné lieu à un véritable tollé, à la suite, en particulier, de l'article de Philippe Boucher dans Le Monde ; c'est ce qui a provoqué la naissance de la Cnil qui a, d'ailleurs, toujours craint le regroupement des fichiers.

Comme nos collègues et pour les mêmes raisons qu'eux, nous refusons fermement cet article.

M. Bernard Saugey, rapporteur.  - Monsieur Mézard, la mesure relève bien de la loi, qui seule peut encadrer l'échange de données entre administrations. Monsieur Sueur, vous qui remplacez M. Collombat cloué sur son lit de douleur...

M. Jean-Pierre Sueur.  - Nous pensons à lui !

M. Bernard Saugey, rapporteur.  - ...le mécanisme proposé n'est pas flou, il est pragmatique : c'est le décret en Conseil d'État qui déterminera tout.

Madame Mathon-Poinat, les députés ont réduit les possibilités d'échanges aux données « strictement » nécessaires.

Défavorable donc à la suppression de cet article.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Cet article 2 s'inspire de l'avis du Conseil d'État. Les échanges de données entre administrations ont été multipliés : la loi doit les encadrer. Un décret en Conseil d'État précisera les modalités de ces échanges.

Les amendements identiques nos43 rectifié, 89 rectifié et 144 ne sont pas adoptés.

L'article 2 est adopté.

Articles additionnels

M. le président.  - Amendement n°44 rectifié, présenté par MM. Mézard, Alfonsi, Collin, Barbier et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Marsin, Milhau, Plancade et Tropeano.

Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À l'article 16-1 de la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, le mot : « administrative » est remplacé par le mot : « compétente ».

M. Jacques Mézard.  - L'article 16-1 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, introduit par la loi de simplification du droit du 20 décembre 2007, en a amoindri la portée.

M. Bernard Saugey, rapporteur.  - Disposition opportune.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Très bien !

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Excellent amendement.

M. Daniel Raoul.  - Comme d'habitude, Me Mézard a été pertinent. Je rêve d'habiter Amsterdam, où un seul numéro suffit à connaître toutes les informations utiles ou à renouveler ses papiers...

M. Paul Blanc.  - Il n'est pas interdit de rêver !

L'amendement n°44 rectifié est adopté et devient un article additionnel.

L'article 3 est adopté.

L'article 3 bis demeure supprimé.

L'article 4 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°24, présenté par M. Bordier, au nom de la commission de la culture.

Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 7121-7 du code du travail, il est inséré un article L. 7121-7-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 7121-7-1. - Les employeurs relevant du champ d'application du guichet unique fixé à l'article L. 7122-22 doivent, en l'absence de dispositions conventionnelles spécifiques aux artistes et techniciens du spectacle au titre de leur activité principale, lorsqu'ils emploient un artiste ou un technicien du spectacle, les faire bénéficier des dispositions d'une convention collective des activités du spectacle et s'y référer dans le formulaire de déclaration d'emploi. »

M. Pierre Bordier, rapporteur pour avis.  - La négociation des conventions collectives dans le secteur du spectacle, engagée après la crise de 2003, s'achève. Toutefois, il s'avère nécessaire de procéder à une mise en cohérence juridique afin d'assurer une couverture conventionnelle homogène aux artistes et techniciens du spectacle lorsqu'ils interviennent en dehors du champ des conventions collectives du secteur du spectacle vivant. Tel est l'objet du présent amendement.

M. Bernard Saugey, rapporteur.  - Favorable.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Favorable.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Notre groupe votera cet amendement particulièrement protecteur pour les intermittents.

L'amendement n°24 est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°123 rectifié, présenté par M. Collombat et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le deuxième alinéa de l'article L. 442-5-1 du code de l'éducation est ainsi rédigé :

« En conséquence, cette contribution revêt le caractère d'une dépense obligatoire lorsque la commune de résidence, le regroupement pédagogique intercommunal auquel elle participe, organisé dans le cadre d'un établissement public de coopération intercommunale ou d'une entente au sens de l'article L. 5221-1 du code général des collectivités territoriales, ne dispose pas des capacités d'accueil nécessaires à la scolarisation de l'élève concerné dans son école publique ou lorsque la fréquentation par celui-ci d'une école située sur le territoire d'une autre commune que celle où il est réputé résider trouve son origine dans des contraintes liées : »

M. Jean-Pierre Sueur.  - M. Collombat tient particulièrement à cet amendement.

L'article premier de la loi du 28 octobre 2009, dite loi Carle, ne définit pas de manière claire les regroupements pédagogiques intercommunaux concernés. Cette lacune pourrait permettre à certaines collectivités d'échapper à leurs obligations.

Le Sénat a souhaité que la capacité d'accueil d'une commune soit appréciée à l'échelle du regroupement pédagogique intercommunal (RPI). Le décret du 9 novembre dernier va contre la volonté ainsi manifestée par le Sénat et exclut la moitié des RPI de l'application de la loi Carle.

M. Pierre Bordier, rapporteur pour avis.  - Nous avions collectivement souhaité renvoyer à un décret. Or celui-ci ne tient compte que des RPI adossés à un EPCI ; l'amendement n°123 rectifié vise à ce que la loi Carle s'applique aussi aux ententes de communes. Défavorable.

Mme Marie-Thérèse Hermange.  - Belle simplification !

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - L'amendement Charasse aura beaucoup fait parler... Il y a toujours un cas particulier ! Le décret a été soumis à l'avis du Conseil d'Etat ; il a été examiné par le Conseil supérieur de l'éducation nationale le 30 septembre dernier et devrait être prochainement publié. Une précision n'est pas nécessaire. Retrait ou rejet.

M. Bernard Saugey.  - Cet amendement me paraît excellent. M. Collombat a raison : nous aurons des problèmes quand nous regrouperons des EPCI. Vous verrez !

M. Jean-Pierre Sueur.  - Je rappelle qu'il y a là une rupture d'égalité !

M. Daniel Raoul.  - Je me souviens de l'arrivée de l'amendement Charasse ! Depuis lors, on ne cesse de chercher à traiter des cas particuliers. Pourquoi ne pas revenir à l'avant-Charasse ? Pourquoi se compliquer la vie ? (Assentiment sur de nombreux bancs)

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement n°123 rectifié, mis aux voix par assis et levé, n'est pas adopté.

9

Le Directeur du service du compte rendu analytique :

René-André Fabre

ORDRE DU JOUR

du mardi 14 décembre 2010

Séance publique

A 9 HEURES 30

1. Questions orales.

A 14 HEURES 30

2. Suite de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, de simplification et d'amélioration de la qualité du droit (n°130, 2009-2010).

Rapport de M. Bernard Saugey, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (n°20, 2010-2011).

Texte de la commission (n°21, 2010-2011).

Avis de Mme Françoise Henneron, fait au nom de la commission des affaires sociales (n°3, 2010-2011).

Avis de M. Pierre Bordier, fait au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication (n°5, 2010-2011).

Avis de M. Hervé Maurey, fait au nom de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire (n°6, 2010-2011).

DE 17 HEURES A 17 HEURES 45

3. Questions cribles thématiques sur l'avenir de la filière photovoltaïque.

A 18 HEURES, LE SOIR ET LA NUIT

4. Suite de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, de simplification et d'amélioration de la qualité du droit (n°130, 2009-2010).