Immigration (Deuxième lecture - Suite)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la suite de la deuxième lecture du projet de loi, adopté avec modifications par l'Assemblée nationale, relatif à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité.

Discussion des articles (Suite)

Mme la présidente.  - Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'article 62.

Article 62

Mme la présidente.  - Amendement n°116, présenté par M. Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 2

Supprimer le mot :

sciemment

M. Richard Yung.  - Défendu.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°173, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC-SPG.

Mme Josiane Mathon-Poinat.  - Amendement de coordination.

Les amendements n°s116 et 173, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.

Mme la présidente.  - Amendement n°115, présenté par M. Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 2

Remplacer les mots : 

sans titre

par les mots :

non muni d'une autorisation de travail

M. Richard Yung.  - Défendu.

M. François-Noël Buffet, rapporteur de la commission des lois.  - Satisfait.

M. Philippe Richert, ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, chargé des collectivités territoriales.  - Même avis.

L'amendement n°115 n'est pas adopté.

L'article 62 est adopté.

Article 64

Mme la présidente.  - Amendement n°117, présenté par M. Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 1

Paragraphe I, 1°, article L. 8271-1-2

Supprimer les 1° et 9°.

M. Richard Yung.  - Le BIT, à la suite de plaintes de fonctionnaires, a condamné l'attribution aux inspecteurs du travail des missions de police contre les travailleurs sans papiers.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Défavorable. L'objectif de l'article est de protéger les droits sociaux des travailleurs.

M. Philippe Richert, ministre.  - L'amendement revient à ôter toute compétence aux inspecteurs du travail en matière de travail illégal. Défavorable.

À l'issue d'une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement n°117, mis aux voix par assis et levé, n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°118, présenté par M. Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 1

Compléter le I par deux alinéas ainsi rédigés :

3° Est ajouté un article L. 8271-6-3 ainsi rédigé :

 « Art. L. 8271-6-3. - Dans le cadre de la recherche et de la constatation des infractions constitutives de travail illégal, les agents de contrôle mentionnés à l'article L. 8271-7, constatant la présence de travailleurs étrangers sans autorisation de travail ayant le statut d'auto-entrepreneur et travaillant dans l'entreprise ou sur le lieu de travail de leur ancien employeur, sont habilités à dresser un constat de procès verbal pour travail illégal. Ces travailleurs sont assimilés, dans le cadre de la procédure ouverte pour travail illégal à l'encontre de l'employeur, à des salariés ayant travaillé pour le compte de ce dernier. »

M. Richard Yung.  - Des employeurs sans foi ni loi, afin d'échapper à des sanctions, demandent à leurs salariés étrangers munis de faux-papiers de démissionner et de prendre le statut d'auto-entrepreneur, ce statut permettant de contourner les droits des salariés. C'est un dévoiement de la loi.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Défavorable. Le juge prud'homal peut à tout moment requalifier le contrat.

M. Philippe Richert, ministre.  - Satisfait.

M. Jean-Pierre Michel.  - Nous voterons cet amendement. Nous sommes mobilisés, et regrettons que la majorité ne soit pas plus présente pour défendre ce texte puisque nos amendements sont rejetés en raison de l'égalité des voix !

M. Philippe Dallier.  - Preuve que vous n'êtes pas plus nombreux que nous !

L'amendement n°118 n'est pas adopté.

L'article 64 est adopté.

Article 66

Mme la présidente.  - Amendement n°119, présenté par M. Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 2, première phrase

Après la référence :

L. 8211-1,

insérer les mots :

elle peut solliciter auprès du tribunal de grande instance la nomination d'un administrateur provisoire afin de mettre fin aux recours au travail illégal et d'assurer le respect des droits des travailleurs illégaux. Le tribunal détermine la nature et la durée des missions de cet administrateur. À titre subsidiaire et uniquement en cas de récidive

M. David Assouline.  - Les mesures de fermetures d'entreprises, uniquement dissuasives, paraissent peu opérantes et interdiront à l'entreprise de se relever économiquement. Cet amendement permet à l'administration de prendre une sanction intermédiaire. Si l'entreprise persiste et signe, le dispositif prévu à l'article 66 s'appliquera.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Défavorable. La fermeture ne pourra être prononcée par le préfet que pour faits graves. La réponse doit être rapide, et la sanction ne pourra excéder trois mois. Les droits des travailleurs sont garantis.

M. Philippe Richert, ministre.  - La durée de la fermeture sera proportionnelle à la gravité des faits. Les droits des salariés sont effectivement garantis. Défavorable : cet amendement est inutile.

L'amendement n°119 n'est pas adopté.

L'article 66 est adopté.

Article 67

Mme la présidente.  - Amendement n°120, présenté par M. Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

I. - Alinéa 1

Remplacer les mots :

par un article L. 8272-4 ainsi rédigé

par les mots :

par les articles L. 8272-4 et L. 8272-4-1 ainsi rédigés

II. - Après l'alinéa 4

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Art. L. 8272-4-1. - Lorsqu'une personne publique signataire d'un contrat mentionné aux articles L. 551-1 et L. 551-5 du code de justice administrative, a connaissance d'un procès-verbal relevant une infraction à l'interdiction prévue aux 1° à 4° de l'article L. 8211-1, elle peut par décision motivée prise à l'encontre de la personne signataire dudit contrat, résilier ce contrat à ses frais et procéder à de nouveaux appels d'offres pour la continuation de l'exécution du contrat précité. Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'État. »

M. David Assouline.  - Une personne publique doit pouvoir mettre fin à un marché public en cours d'exécution, lorsque l'entreprise qui a obtenu le marché a embauché des salariés étrangers sans autorisation de travail. Il en va de la crédibilité de votre volonté affichée de lutter contre les patrons voyous.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Défavorable : l'amendement est satisfait par les articles 46 et 47 du code des marchés publics.

M. Philippe Richert, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°120 n'est pas adopté.

L'article 67 est adopté.

Article 74 bis

Mme la présidente.  - Amendement n°121, présenté par M. Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Supprimer cet article.

M. Richard Yung.  - Cet article est inutile et injuste. Vous nous demandez déjà de revenir sur la loi de 2006. Dans sa rédaction initiale, cet article interdisait l'accès à l'aide juridictionnelle aux demandeurs d'asile, dans le cadre d'un recours devant la CNDA. La commission des lois est revenue sur cette mesure, mais sans aller assez loin. La Cour de Luxembourg tranchera sur votre interprétation de la directive. En tout état de cause, celle-ci n'impose que des normes minimales. Tous les demandeurs d'asile devraient pouvoir demander l'aide juridictionnelle.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°174, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC-SPG.

Mme Josiane Mathon-Poinat.  - Priver le demandeur d'asile de l'aide juridictionnelle est une atteinte au droit à un recours effectif. Un tel déni de droit est injustifiable et contrevient à l'article 32 de la directive de 2005.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°200 rectifié, présenté par MM. Mézard et Collin, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano et Vall.

M. Jacques Mézard.  - Présumant la mauvaise fois, cet article interdit à un demandeur d'asile de solliciter l'aide juridictionnelle dans le cadre du recours dirigé contre une décision de l'Ofpra rejetant une demande de réexamen lorsque le requérant a déjà bénéficié de cette aide devant le même office ou la CNDA. La CNDA est surchargée, comme l'Ofpra, faute de moyens. Plutôt que de vous attaquer à ce problème, vous choisissez une solution de facilité en restreignant le droit au recours...

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Défavorable aux amendements de suppression. Cet article 74 bis vise à rationaliser l'octroi de l'aide juridictionnelle devant la CNDA, dont le coût a été multiplié par cinq depuis qu'a été supprimée la condition de l'entrée régulière. Les députés ont estimé que la plupart de ces demandes étaient dilatoires. La commission des lois a trouvé un équilibre entre cette nécessaire rationalisation et les garanties dues aux demandeurs d'asile. La proposition est strictement conforme au droit communautaire.

M. Claude Guéant, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.  - Défavorable. Il s'agit d'améliorer le fonctionnement de la Cour, dont les effectifs ont été renforcés, et de prévenir les recours abusifs, la plupart des demandes de réexamen étant dilatoires.

Mme Nathalie Goulet.  - Nous avons bataillé pour maintenir le budget de l'aide juridictionnelle. Combien de réexamens sont effectivement demandés ? Quelles sont les économies à attendre ?

M. Jean-Pierre Michel.  - Cet article me paraît inconstitutionnel. Le recours est une voie d'appel, or l'appel est un droit garanti par la Constitution. La règle de droit prime sur les considérations budgétaires ! Ce n'est pas à nous de dire si l'appel est dilatoire ou non. C'est seulement à la juridiction. Le droit d'appel est absolu. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois.  - Le réexamen n'est pas un appel. C'est un nouvel examen de la demande, à la lumière de nouveaux éléments.

M. Claude Guéant, ministre.  - Je confirme cette interprétation : le réexamen n'est pas un appel. Il peut intervenir après trois étapes d'examen, par l'Ofpra, la CNDA et à nouveau l'Ofpra. Madame Goulet, on compte près de 2 000 demandes d'aide juridictionnelle pour réexamen, pour un coût de 130 000 euros par an.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - On ne va pas ergoter sur le vocabulaire. Le recours existe, et doit ouvrir droit à l'aide juridictionnelle !

Les amendements identiques n°s121, 174, 200 rectifié, ne sont pas adoptés.

Mme la présidente.  - Amendement n°142 rectifié, présenté par Mmes Giudicelli et G. Gautier, MM. J. Gautier et B. Fournier, Mme B. Dupont, MM. Vasselle, Nègre, Ferrand et Demuynck et Mmes Lamure et Rozier.

Alinéa 4

Après les mots :

demande de réexamen

supprimer la fin de cet alinéa.

M. Jacques Gautier.  - Contrairement à ces amendements, le nôtre vise à donner toute sa portée à l'article 74 bis. L'Ofpra convoque dans près de 95 % des cas les primo-demandeurs, même s'ils ne viennent pas à ces auditions dans les mêmes proportions. Lors du premier recours, l'étranger a eu la possibilité, même s'il ne l'a pas utilisée, d'être assisté d'un conseil, en bénéficiant de l'aide juridictionnelle.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Défavorable.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Quand même !

M. Claude Guéant, ministre.  - L'amendement revient au texte initial du Gouvernement : sagesse.

M. Richard Yung.  - Nous voterons contre cet amendement, qui vise à limiter l'accès à la CNDA, qui joue un rôle essentiel dans la défense du droit d'asile, en cassant plus du tiers des décisions de refus de l'Ofpra.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois.  - Cet article est encore une initiative de l'Assemblée nationale : il ne figurait pas dans le texte initial du Gouvernement qui était équilibré. Nous cherchons un équilibre entre limiter les recours abusifs et garantir les droits des demandeurs d'asile. Je tiens à ce que le texte de la commission soit maintenu.

L'amendement n°142 rectifié n'est pas adopté.

L'article 74 bis est adopté.

Article 75

Mme la présidente.  - Amendement n°122, présenté par M. Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Supprimer cet article.

M. Richard Yung.  - Cet article précise la notion de fraude délibérée, afin d'élargir la mise en oeuvre de la procédure prioritaire qui restreint les droits des demandeurs d'asile.

Saisie d'une QPC, le Conseil constitutionnel a déclaré celle-ci conforme à la Constitution. Dont acte, mais l'absence de recours suspensif est dommageable. Dans l'attente de la décision de la Cour de Strasbourg, nous proposons de supprimer ces dispositions.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°201 rectifié, présenté par MM. Mézard et Collin, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano et Vall.

M. Jacques Mézard.  - En étendant la procédure prioritaire, cet article restreint la possibilité pour le demandeur d'asile d'obtenir une autorisation provisoire de séjour. On voit ici la différence de vues entre l'Assemblée nationale et le Sénat. Ce texte permet à l'administration d'expulser le demandeur avant même l'examen par la CNDA de la décision de rejet. Selon le droit en vigueur, il revient à l'administration de démontrer que la dissimulation constitue une fraude délibérée. Or cet article inverse la charge de la preuve, puisque, par exemple, la fraude pour dissimulation d'informations concernant l'identité devient la norme, à charge pour le demandeur d'asile de se justifier.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Défavorable. L'article 75 n'étend pas le champ de la procédure prioritaire mais précise la notion de fraude délibérée. Il vise concrètement la modification des empreintes digitales.

M. Claude Guéant, ministre.  - Cette disposition ne fait qu'aménager des dispositions procédurales. Défavorable.

Les amendements identiques n°s122 et 201 rectifié ne sont pas adoptés.

Mme la présidente.  - Amendement n°123, présenté par M. Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Rédiger ainsi cet article :

Les articles L. 741-4, L. 742-2, L. 742-4, L. 742-5, L. 742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont abrogés.

M. Richard Yung.  - Le Conseil constitutionnel et le Conseil d'État ont consacré le principe de l'admission au séjour des demandeurs d'asile, avec quatre exceptions, fort larges : près du quart des demandeurs en relèvent, alors que la procédure prioritaire est inéquitable et injuste.

Mme la présidente.  - Amendement n°175, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC-SPG.

Rédiger ainsi cet article :

L'article L. 741-4 du même code est abrogé.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Petit à petit, on dénature le droit d'asile, partant du principe que les demandeurs d'asile sont des fraudeurs. Ce droit est individuel, et s'accommode mal de catégories...

La France est le pays qui refuse le plus de demandes d'asile ! Elle n'est déjà pas généreuse ; elle le sera encore moins.

Parmi ceux qui cachent leur identité, il y en a qui fuient des persécutions, des traitements cruels, inhumains et dégradants dans des pays que vous considérez, à tort, comme sûrs ! Ils ont perdu toute confiance dans les autorités. Leur demande d'asile est légitime. Les procédures actuelles suffisent à écarter les fraudeurs, n'en rajoutons pas.

Mme la présidente.  - Amendement n°126, présenté par M. Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Rédiger ainsi cet article :

Le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :

1° L'article L. 741-4 est ainsi rédigé :

« Art. L. 741-4. - Sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission au séjour en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si l'examen de la demande d'asile relève de la compétence d'un autre État en application des dispositions du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des États membres par un ressortissant d'un pays tiers, ou d'engagements identiques à ceux prévus par ledit règlement avec d'autres États.

« Les dispositions du présent article ne font pas obstacles au droit souverain de l'État d'accorder l'asile à toute personne qui se trouverait dans ce cas. » ;

2° L'article L. 742-2 est ainsi rédigé :

« Art. L. 742-2. - Lorsqu'il apparaît, postérieurement à son admission au titre de l'asile, que l'étranger se trouve dans le cas prévu à l'article L. 741-4, le document provisoire de séjour peut être retiré ou son renouvellement refusé. » ;

3° À l'article L. 742-4, les mots : « au 1° de l'article L. 741-1 » sont remplacés par les mots : « à l'article L. 741-1 » ;

4° Au second alinéa de l'article L. 723-1, après les mots : « a été refusé ou retiré pour », la fin de cet alinéa est ainsi rédigée : « le motif mentionné à l'article L. 741-4, ou qui se sont vu refuser pour ce motif le renouvellement de ce document ».

M. Richard Yung.  - Il est défendu.

Mme la présidente.  - Amendement n°125, présenté par M. Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Rédiger ainsi cet article :

Le 4° de l'article L. 741-4 du même code est abrogé.

M. Jean-Pierre Sueur.  - On peut refuser l'accès du territoire à un étranger qui n'a pas encore demandé l'asile. Des personnes persécutées arrivent en France comme elles peuvent, sur des radeaux de fortunes ; arguer des conditions de leur arrivée pour leur refuser la possibilité de demander le droit d'asile est contraire au droit.

Mme la présidente.  - Amendement n°124, présenté par M. Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Rédiger ainsi cet article :

Le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :

1° À l'article L. 722-1, après le mot : « office », la fin de la première phrase du deuxième alinéa est supprimée ;

2° À l'article L. 741-4, après le mot : « susmentionnée », la fin du 2° est supprimée.

M. Jean-Pierre Sueur.  - En première lecture, les sénateurs ont aligné la définition des pays d'origine sûrs sur celle figurant à l'annexe II de la directive relative à des normes minimales concernant la procédure d'octroi et de retrait du statut de réfugié dans les États membres. Cette disposition nouvelle a été supprimée sans débat par l'Assemblée nationale ; il faut revenir à la position du travail du Sénat en première lecture, d'autant que les arguments du rapporteur de l'Assemblée nationale ne sont pas probants.

Mme la présidente.  - Amendement n°128, présenté par M. Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Rédiger ainsi cet article :

Le deuxième alinéa de l'article L. 723-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est supprimé.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Nous connaissons la décision du Conseil constitutionnel mais persistons à considérer que le droit d'accéder à un juge est fondamental.

Mme la présidente.  - Amendement n°127, présenté par M. Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéas 3 et 4

Supprimer ces alinéas.

M. Jean-Pierre Sueur.  - La procédure accélérée prive les candidats à l'asile de tout titre, même provisoire, de séjour. La Cour de Strasbourg est saisie ; attendons sa décision.

Mme la présidente.  - Amendement n°130, présenté par M. Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 4

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

« Toutefois, ne peut être considérée comme un recours abusif ou frauduleux, la demande d'asile présentée par un étranger qui invoque des circonstances susceptibles de lui permettre de se voir reconnaître, le cas échéant, la qualité de réfugié ou la protection subsidiaire. »

M. Jean-Pierre Sueur.  - Conformément à la jurisprudence du Conseil d'État, il s'agit de circonscrire l'application de la notion de recours frauduleux ou abusif aux seules demandes manifestement dilatoires. Si l'intéressé invoque les éléments permettant de le rattacher à une demande d'asile, il doit être admis au séjour.

Mme la présidente.  - Amendement n°133, présenté par M. Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - L'article L. 723-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Toutefois l'office peut, au vu des éléments présentés à l'appui de la demande d'asile, décider que l'instruction de la demande se fera selon la procédure normale. Dans ce cas, l'office informe l'étranger et l'autorité administrative compétente qui lui délivre le titre provisoire de séjour prévu à l'article L. 742-1. »

M. Jean-Pierre Michel.  - C'est à l'Ofpra de dire si l'on doit suivre la voie prioritaire ou la voie normale, pas au préfet.

Mme la présidente.  - Amendement n°129, présenté par M. Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - Le quatrième alinéa de l'article L. 723-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est supprimé.

M. Jean-Pierre Michel.  - Il est défendu.

Mme la présidente.  - Amendement n°135, présenté par M. Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - L'article L. 742-3 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« En conséquence, aucune mesure d'éloignement mentionnée au livre V du présent code ne peut être mise à exécution avant la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile si un recours a été formé auprès de celle-ci. »

M. Jean-Pierre Michel.  - Le droit à un recours effectif est dénié au demandeur d'asile en procédure prioritaire.

Mme la présidente.  - Amendement n°131, présenté par M. Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - Un rapport est remis au Parlement par le Gouvernement avant le 31 mai 2011 sur l'application en France du Règlement CE-343/2003 dit « Dublin II » et les coûts de sa mise en oeuvre.

M. Jean-Pierre Michel.  - Le règlement de Dublin 2 a été remis en cause récemment par un arrêt de la Cour de Strasbourg. Au-delà, c'est tout le système Schengen qui est remis en cause, ce qui ne nous chagrine pas beaucoup.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Ces amendements ont tous été rejetés en première lecture.

Nous avons besoin de la procédure prioritaire : défavorable aux amendements nos123, 175, 126, 125 -il faut pouvoir faire échec aux procédures dilatoires- et 124. La notion de pays d'origine sûrs est d'origine communautaire, dans le cadre du traité d'Amsterdam. Elle n'induit qu'une présomption et ne fait pas obstacle à l'acceptation d'une demande d'asile. Cette liste est établie par l'Ofpra. Le demandeur d'asile ne peut être éloigné sans que l'Office ait statué.

Défavorable également aux amendements nos128, 127, 130 et 133 : la décision de l'autorisation provisoire de séjour dépend du préfet, non de l'Ofpra, qui est consulté. Défavorable aussi aux amendements nos129 et 135.

Un étranger qui sollicite l'asile ne peut être refoulé sans qu'il ait été statué sur sa demande. Les préfectures s'abstiennent d'éloigner un étranger dont la procédure est pendante devant la CNDA.

Très défavorable, enfin, à l'amendement n°131 qui voudrait encore un rapport.

M. Claude Guéant, ministre.  - Le Gouvernement est défavorable à ces amendements.

En ce qui concerne l'amendement n°123, nous voulons appliquer un principe de responsabilité dans chaque État membre de l'Union européenne ; nous avons tous les mêmes normes pour l'asile.

En ce qui concerne l'amendement n°125, il faut bien traiter le cas des personnes qui utilisent des manoeuvres dilatoires pour prolonger indûment leur séjour.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Ce n'est pas ce que j'ai évoqué.

M. Claude Guéant, ministre.  - En ce qui concerne l'amendement n°124, la liste des pays sûrs est établie sous le contrôle du Conseil d'Etat. Ce dispositif préserve le droit à un examen individuel.

En ce qui concerne l'amendement n°133, je suis peiné que M. Michel ait ce préjugé défavorable à l'encontre du ministère de l'intérieur ! (Sourires) En fait, le préfet fait un usage équilibré de la procédure prioritaire : en 2010, elle a concerné moins de 25 % des demandes.

L'amendement n°123 n'est pas adopté, non plus que les amendements nos175, 126, 125, 124, 128, 127, 130, 133, 129, 135 et 131.

L'article 75 est adopté.

Article 75 ter

Mme la présidente.  - Amendement n°136, présenté par M. Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Supprimer cet article.

M. Jean-Pierre Michel.  - Nous refusons le recours à la visioconférence lors des audiences d'examen des recours. Le Gouvernement a trouvé dans la visioconférence la panacée à tous les problèmes : garde à vue, hospitalisation d'office... C'est extravagant. L'audience suppose un face-à-face physique.

Je sais bien que le rapporteur a introduit des garanties, mais celles-ci ne pèseront pas lourd : ces personnes sont en situation de telle infériorité qu'elles accepteront ce qu'on leur proposera.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°176, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC-SPG.

Mme Éliane Assassi.  - A l'origine, le recours à la visioconférence ne concernait que les demandeurs d'asile en outre-mer ; désormais, tous les demandeurs sont concernés. La mesure semble a priori favorable aux demandeurs, mais selon nous, sa présence est nécessaire : même si la visioconférence est encadrée, rien ne saurait remplacer une véritable audience.

L'entretien de vive voix est un droit, qui doit être reconnu à tous les requérants.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°202 rectifié, présenté par MM. Mézard et Collin, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano et Vall.

M. Jacques Mézard.  - Nous ne sommes pas très favorables au recours à des moyens audiovisuels en la matière. Moderniser la justice exigerait d'abord de renforcer ses moyens.

Une décision aussi importante pour la personne ne devrait pas pouvoir être prise sans que celle-ci ait été entendue.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois.  - Ce n'est pas un accusé !

M. Jacques Mézard.  - Certes, ce n'est pas un procès pénal. Je suis toujours sensible aux pertinentes observations du président de la commission des lois, mais nous n'avons pas toujours tort !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois.  - La majorité non plus.

M. Jacques Mézard.  - On verra dans quelques mois...

Le rapporteur, ici, reconnaît lui-même qu'il y a là une inégalité de traitement.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Il s'agit de permettre à des personnes qui ont déposé un recours devant la CNDA de pouvoir s'exprimer. A l'heure actuelle, la plupart d'entre elles ne viennent pas à l'audience. Même leur conseil, quand elles en ont un, ne se déplace pas. Cet article est un progrès, conforme au souhait de la présidente de la CNDA. Le consentement sera requis ; ce n'est pas négligeable.

M. Claude Guéant, ministre.  - Même avis défavorable.

La visioconférence va dans le sens d'une bonne administration de la justice, à laquelle elle facilite l'accès des requérants. Le cercle des avocats concernés sera également élargi.

Les amendements identiques n°s136, 176 et 202 rectifié ne sont pas adoptés.

Mme la présidente.  - Amendement n°137, présenté par M. Antoinette et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 2

1° Troisième phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

Si l'intéressé est assisté d'un conseil et, le cas échéant, d'un interprète, ces derniers sont physiquement présents auprès de lui ou bien dans les locaux de la Cour nationale du droit d'asile selon le choix de l'intéressé.

2° Avant-dernière phrase

Remplacer les mots :

d'audience ou

par les mots :

d'audience et

M. Richard Yung.  - Cet amendement, déposé à l'initiative de nos amis d'outre-mer, concerne la place des auxiliaires de justice et le compte rendu des audiences.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Défavorable. L'assistance de l'interprète est déjà prévue dans le droit positif en vigueur. Il est préférable que la Cour puisse avoir recours à ses interprètes, dans l'intérêt même des demandeurs. Enfin, le code de procédure pénale n'impose pas de cumuler enregistrement et procès-verbal écrit.

M. Claude Guéant, ministre.  - Même avis défavorable.

L'amendement n°137 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°214, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 2, dernière phrase

Après le mot :

qui

insérer les mots :

, séjournant en France métropolitaine,

M. Claude Guéant, ministre.  - Le Conseil d'État a jugé, le 13 avril 2010, que certaines circonstances justifient de ne pas recueillir le consentement du requérant.

Cet amendement subordonne le recours à la visioconférence devant la Cour nationale du droit d'asile au consentement du requérant, lorsque celui-ci séjourne en France métropolitaine.

L'existence d'un régime spécifique pour les collectivités d'outre-mer se justifie par les différences objectives de situation entre les requérants et par le fait que l'outre-mer n'appartient pas à l'espace Schengen. En créant la possibilité d'utiliser la visioconférence, le projet de loi améliore la situation des étrangers qui demandent l'asile dans une collectivité d'outre-mer : le délai d'examen de leurs demandes sera significativement réduit, puisqu'il ne sera plus tributaire, comme aujourd'hui, de l'organisation de missions foraines par la cour.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis favorable, compte tenu notamment de la remarque du ministre sur l'espace Schengen. Je rappelle que le recours à la visioconférence est un progrès indéniable outre-mer.

M. Richard Yung.  - Nos collègues d'outre-mer voient là une mauvaise manière. Ils ne sont pas favorables à la visioconférence et s'opposent résolument à ce traitement dérogatoire qui transforme l'outre-mer en laboratoire de votre politique d'immigration.

L'amendement n°214 est adopté.

L'article 75 ter, modifié, est adopté.

L'amendement n°75 quater demeure supprimé.

Article 83

Mme la présidente.  - Amendement n°177, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC-SPG.

Supprimer cet article.

Mme Marie-Agnès Labarre.  - C'est la suite logique de nos amendements de suppression.

L'amendement n°177, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.

L'article 83 est adopté.

Article 84

Mme la présidente. - Amendement n°178, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC-SPG.

Supprimer cet article.

Mme Marie-Agnès Labarre.  - Amendement de coordination.

L'amendement n°178, repoussé par la commission et le gouvernement, n'est pas adopté.

L'article 84 est adopté.

Interventions sur l'ensemble

Mme Éliane Assassi.  - Il n'y a pas de quoi être fier de la probable adoption de cette nouvelle loi qui tire encore vers le bas les droits des étrangers. Le Sénat n'a pas joué son rôle modérateur face aux excès des députés.

La disposition sur les étrangers malades, refusée deux fois, a finalement été acceptée. Le texte proposé par le rapporteur sur cet article, loin d'être un compromis, est la pire version d'un dispositif inacceptable !

La majorité sénatoriale a été très timorée et s'est contentée de timides améliorations. Nous craignons le pire pour la CMP, d'autant que le Gouvernement est sur la même longueur d'onde que les députés UMP.

Il faut pourtant cesser cette course folle dans laquelle s'est engagé le Gouvernement pour des raisons électorales.

Non, la France n'est pas trop généreuse : elle l'est moins que d'autres, il suffit de consulter les chiffres.

Non, la France n'est pas si accueillante que cela. La majeure partie des migrations se font sud-sud.

Non, l'immigration ne coûte pas cher à la France : ce qui coûte cher à la France, c'est votre politique économique et fiscale en faveur des nantis. L'apport d'une main-d'oeuvre immigrée est indispensable à notre économie ; encore faut-il qu'elle ne se fasse pas dans les mêmes conditions que dans les années 60, lorsqu'on a opposé main-d'oeuvre nationale et main-d'oeuvre immigrée.

Le monde change et s'ouvre ; il n'y a pas que les capitaux qui se déplacent : les hommes aussi !

Oui, la France est un pays ouvert sur le monde, un pays d'accueil et doit le rester.

Nous rejetterons ce texte qui n'honore ni la France ni les Français. (Applaudissements à gauche)

M. Richard Yung.  - Nous voterons vigoureusement contre ce projet de loi symbolique, très chargé idéologiquement, inutile. Il pose de nombreux problèmes, y compris juridiques : nous saisirons donc le Conseil constitutionnel.

Plusieurs points ont fait l'objet de très vifs débats.

C'est le cas de l'article 17 ter sur les étrangers malades. L'émotion suscitée dans le pays par ce texte durera ; votre décision vous suivra. C'est aussi le cas du bannissement, des mariages gris, de la visioconférence...

Le débat en première lecture nous avait donné le sentiment que le Sénat améliorait le texte. Mais après ! L'Assemblée nationale a tout raboté, à l'initiative de certains députés extrémistes bénéficiant du soutien bénévolent du Gouvernement. Ce texte qui nous revient est affolant et la commission des lois l'accepte.

Un seul de nos amendements a été adopté, sur la modification d'un titre... Avons-nous donc toujours tort ?

J'espère que nous serons bientôt en position de mettre en oeuvre notre politique. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Cette loi, déposée par le ministre de l'identité nationale Besson, puis soutenue par M. Hortefeux, et maintenant par M. Guéant, est l'occasion pour le Gouvernement et la majorité d'instiller des poisons : la France serait trop généreuse, la France serait envahie par les étrangers... Vous n'hésitez pas à recourir au mensonge, comme lorsque vous prétendez, en dépit des chiffres, que l'immigration irrégulière s'accroît.

Votre politique d'affichage n'est pas probante, à moins que vous ne pratiquiez délibérément la politique du pire.

Vous auriez pu abandonner ce texte, vous ne l'avez pas fait. Et vous introduisez des concepts que nous pensions disparus à jamais : « bannissement », « mariage gris », « Français d'origine étrangère »...Toujours plus de suspicions, toujours plus de menaces, toujours plus de différenciations, toujours plus de racisme, de haine et de peur de l'autre : on sait où cela mène !

Nous regrettons que la majorité sénatoriale n'ait pas tenu bon sur ses positions de première lecture, beaucoup plus mesurées ; mais le fait majoritaire lui a fait baisser les bras !

Nous voterons résolument contre ce texte. (Applaudissements à gauche)

Mme Marie-Agnès Labarre.  - Une fois encore, le Gouvernement montre ses priorités : quand 8 millions de personnes vivent dans la pauvreté, que le chômage explose, il se focalise sur son fonds de commerce : le repli sur soi et la peur de l'autre.

Le projet ultralibéral a toujours deux aspects, favoriser les patrons et combattre les pauvres. Vous ouvrez les frontières aux capitaux et les fermez aux hommes, à l'heure des révolutions arabes.

Ce texte est celui du racisme, celui qui rend l'immigré responsable des méfaits de votre politique libérale. Pour vous, l'immigré est une marchandise comme une autre... sauf que pour les marchandises, les frontières sont grandes ouvertes !

Votre texte va à l'encontre de notre conception de la France. Pour nous, la France est belle quand elle est métissée ; pour nous, la France, c'est celle de 1793 accordant la nationalité française aux étrangers résidant depuis un an dans notre pays !

Vous ne tenez même pas compte des rapports que vous commandez vous-mêmes, en particulier lorsqu'ils montrent que l'immigration présente un solde positif pour les finances publiques : les immigrés cotisent plus qu'ils ne coûtent ! Selon le Cor, l'entrée de 50 000 nouveaux étrangers par an ferait baisser de 0,5 point de PIB le déficit de notre système de retraites. Sans compter que les immigrés occupent des emplois dont les Français ne veulent pas. À l'inverse, la commission des finances du Sénat a pointé le coût des expulsions, 21 000 euros l'unité...

Vous êtes obnubilés par le Front national et ses mises en scène nauséabondes. Mais il a déjà accordé au ministre une carte d'adhérent de prestige... (Exclamations à droite)

Mme Catherine Procaccia.  - C'est scandaleux ! On n'a pas à prendre le Sénat pour une tribune politique. Vous ne faites pas une explication de vote mais un procès !

M. David Assouline.  - Après la première lecture, on pouvait être fier du Sénat, qui était revenu sur des dispositions insupportables. Après cette deuxième lecture, j'ai honte du texte qu'il va voter. Vous avez reculé sur de nombreux points, vous soumettant aux députés qui pourtant se moquent de votre travail ! L'article 17 ter relatif au droit au séjour des étrangers malades est loin d'être un compromis : il aggrave les choses ! Le fantasme du tourisme médical a la vie dure.

Votre loi, déjà la sixième sur le sujet en cinq ans, ne règle aucun problème. Quel résultat les précédentes ont-elles eu sur la maîtrise des flux migratoires ? Aucun. Vos mesures, dérisoires sur le plan de l'efficacité, sont dramatiques et, au prétexte de lutter contre quelques fraudeurs, pourrissent la vie de tous les étrangers qui veulent vivre dignement sur notre sol. C'est une loi politicienne, cynique, qui n'a d'autre but qu'électoral. Pas de répit : vous proposez déjà de nouvelles mesures sur l'immigration légale ! On peut être sûr que vous entretiendrez ce climat malsain jusqu'en mai 2012, alors que les Français ont d'autres préoccupations : le pouvoir d'achat, le chômage, l'éducation, les services publics... Mais vous préférez courir après le Front national...

Mme la présidente.  - Concluez !

M. David Assouline.  - Ce n'est pas une telle loi qui règlera quoi que ce soit. J'espère qu'en 2012 les Français ne se laisseront pas abuser. Vous n'êtes pas, monsieur le ministre, le directeur de campagne de Nicolas Sarkozy mais le ministre de l'intérieur.

Mme Bariza Khiari.  - Ce texte est une entorse à nos principes, à nos droits, à nos valeurs. Trois exemples symboliques : d'abord l'article 17 ter, capitulation de notre assemblée devant les ultras de l'UMP. Vous condamnez les étrangers malades à la mort ou à la clandestinité. Ensuite, le mariage « gris », qui porte le soupçon sur tous les mariages mixtes. Enfin, l'allongement du délai avant l'intervention du JLD. Il s'agit de mater ce rebelle qui empêche d'expulser en paix, quitte à fouler au pied nos textes fondateurs. Et je ne parle pas du bannissement. Nous saisirons bien sûr le Conseil constitutionnel.

Nous défendons une société ouverte, prenant sa juste part des malheurs du monde. Avec ce texte marqué d'inhumanité, vous vous alignez sur l'extrême-droite pour alimenter la peur du musulman, qui devient un Français d'origine contrôlée, car vous y voyez une martingale pour les prochaines élections... Mais les Français ne seront pas dupes. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme Catherine Morin-Desailly.  - Une majorité du groupe UC votera ce texte du fait des avancées obtenues par le Sénat. L'abandon de l'extension de la déchéance de la nationalité montre que nous avons été entendus.

Idem sur le droit du sol ; la disposition proposée remettait en cause sans justification un des principes majeurs de notre droit.

Pour autant, plusieurs sénateurs centristes, dont je fais partie, ainsi qu'Yves Détraigne, ne voteront pas ce texte. En première lecture, le Sénat avait adopté une position forte en repoussant l'article 17 ter sur le droit au séjour des étrangers malades. Le Sénat l'a finalement adopté hier, après y avoir apporté quelques améliorations formelles. Sur la forme : il est regrettable que nous n'ayons pas d'étude d'impact, cette mesure ayant été introduite par voie d'amendement à l'Assemblée nationale. Sur le fond : la protection des étrangers gravement malades est déjà encadrée ; la solution actuelle est équilibrée. L'humanisme n'est pas l'angélisme. On ne saurait déroger au respect de la vie et de la dignité humaines. Je m'abstiendrai ; plusieurs autres membres de mon groupe feront de même. (Applaudissements au centre et sur quelques bancs socialistes)

M. Jacques Mézard.  - La grande majorité de notre groupe votera contre ce texte. Nous ne sommes pas contre une politique ferme, nous sommes pour une politique juste. Tant que l'immigration sera utilisée médiatiquement pour diviser et rejeter, il y aura risque de dérapage et de dérive idéologique. Six lois en neuf ans, c'est trop et la démonstration, soit de l'inefficacité d'une politique, soit d'entretenir le feu médiatique, soit les deux... Les différences d'appréciation entre l'Assemblée nationale et le Sénat montrent les dangers de cette politique.

Imaginez nos hôpitaux publics sans les médecins issus de l'immigration ! (Mme Éliane Assassi renchérit) Un exemple parmi d'autres...

La loi de la République doit s'appliquer de la même manière à tous, avec les mêmes droits et les mêmes devoirs. Malgré les efforts du rapporteur, le texte n'est pas équilibré. Vous avez refusé tout amendement -vous en assumerez la responsabilité et les conséquences. (Applaudissements à gauche)

M. Jacques Gautier.  - Ce texte a suscité de nombreux débats. La Chambre haute l'a amélioré, respectant la tradition d'accueil de la France tout en luttant contre l'immigration irrégulière.

Merci monsieur le ministre de nous avoir permis d'agir sur le terrain. Je salue le travail du rapporteur Buffet et de la commission des lois sous la houlette du président Hyest. Le groupe UMP se satisfait des positions adoptées permettant la transposition de trois directives, contribuant ainsi à la construction d'une indispensable politique européenne d'immigration.

Nous nous réjouissons que le Sénat ait encore amélioré un texte très attendu par les Français : sur les mariages gris, l'accès à la nationalité, le contentieux du placement en rétention ou le droit au séjour des étrangers gravement malades. Il n'était pas question de remettre en cause notre tradition d'accueil de ces derniers, mais il fallait, tant pour eux que pour nos compatriotes, trouver une solution juridique équilibrée.

Nous avons choisi la bonne voie. La politique d'immigration choisie est à la fois ferme et généreuse. Le groupe UMP votera ce texte avec conviction et dit sa confiance au Gouvernement. (Applaudissements à droite)

À la demande des groupes socialiste et CRC-SPG, le projet de loi est mis aux voix par scrutin public.

Mme la présidente. - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 338
Nombre de suffrages exprimés 329
Majorité absolue des suffrages exprimés 165
Pour l'adoption 177
Contre 152

Le Sénat a adopté.

(Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Claude Guéant, ministre.  - Je me réjouis de ce vote, qui témoigne de l'engagement du Sénat en faveur de la lutte contre l'immigration irrégulière mais aussi de la rénovation de notre politique d'accueil et d'intégration. C'est un texte pragmatique, opérationnel et républicain. Je salue les intervenants de tous les groupes, et tout particulièrement le rapporteur et le président de la commission des lois ; je rends hommage au sens de la responsabilité et à la détermination de la majorité.

Le Gouvernement et le Sénat ont rapproché leurs points de vue sur des points essentiels.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Certes !

M. Claude Guéant, ministre.  - Aux deux assemblées désormais de concilier leurs points de vue afin que la loi entre en vigueur le plus rapidement possible. Ce texte sera efficace contre l'immigration irrégulière, tout en étant conforme à la tradition d'accueil de la France. (Applaudissements à droite)

La séance est suspendue à 13 heures.

*

*          *

présidence de Mme Catherine Tasca,vice-présidente

La séance reprend à 15 h 5.