Transport aérien de passagers (Nouvelle lecture)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle, en nouvelle lecture, la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, relative à l'organisation du service et à l'information des passagers dans les entreprises de transport aérien de passagers et à diverses dispositions dans le domaine des transports.

Discussion générale

M. Thierry Mariani, ministre auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé des transports.  - L'échec de la CMP sur la proposition de loi de M. Diard, destinée à améliorer l'information des passagers des transports aériens en cas de grève, nous conduit à réexaminer ce texte. Celui-ci garantit la liberté de circuler des personnes, sans porter atteinte au droit de grève. Les syndicats en ont bien compris l'objectif. Ils ont décidé de ne pas poursuivre un mouvement de grève qui menaçait la sérénité des vacances scolaires. C'est un des premiers bénéfices de ce texte. Un accord sur la stabilité des plannings des pilotes a été signé. Les vols seront désormais normalement assurés par des non-grévistes volontaires.

À l'Assemblée nationale le 22 février, le champ d'application du texte a été mieux circonscrit. Seules sont concernées les entreprises de transport aérien de passagers. L'obligation de déclarer sa renonciation à la grève 24 heures à l'avance est levée si la grève est suspendue : cela répond aux objections de certains d'entre vous en première lecture.

Enfin, le recours à la sanction disciplinaire est adapté en conséquence. L'objectif de ce texte n'est pas d'élargir l'arsenal disciplinaire à la disposition de l'employeur : il s'agit d'une simple faculté, sous le contrôle vigilant du juge, et qui n'est encourue qu'en cas de manquements répétés.

Les tentatives de contournement sont ainsi contenues. Notre objectif est d'intérêt général : la sécurité et la santé publique peuvent être menacées, dans un aéroport paralysé. Et les citoyens ne peuvent être laissés, en cas de grève, dans l'incertitude : il y va de leur liberté de déplacement.

Ce texte vise à prévenir les conflits. En cas d'échec de la négociation préalable, la déclaration obligatoire a pour but d'éviter les désordres liés à une grève. (Applaudissements à droite)

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales, en remplacement de M. Claude Jeannerot, rapporteur de la commission des affaires sociales.  - Je vous prie d'excuser M. Jeannerot, retenu par ses obligations de président du conseil général.

La majorité sénatoriale ne peut transiger sur les droits sociaux : d'où l'échec de la CMP. Concilier le respect du droit de grève avec celui de liberté de circulation est un exercice délicat, dans lequel cette proposition de loi n'a pas réussi. Deux points sont inacceptables. En premier lieu, la transposition pure et simple de la loi du 21 août 2007 sur le transport ferroviaire, inadaptée au transport aérien. La voix des salariés deviendra inaudible si, à la suite des pressions qui ne manquent pas de s'exercer après leurs déclarations, ils devaient renoncer à leur droit légitime de faire grève.

Je ne m'étendrai pas sur les difficultés que soulève le délai de dédit. En dépit des aménagements de l'Assemblée nationale, les dispositions méconnaissent les conditions des mouvements sociaux dans l'entreprise et la nature du droit de grève, par essence individuel.

Les constats de notre rapporteur, en première lecture, restent valables. Cessons d'opposer salariés et passagers, qui ne sont pas de simples victimes collatérales. La grève ne se décide pas dans la joie. L'accord intervenu à Air France entre les pilotes et la direction montre que la grève n'obère pas le dialogue social : il ôte tout son sens à ce texte. Cependant, la direction refuse toujours de négocier sur la situation de dizaines de milliers d'employés d'assistance en escale, catégorie particulièrement fragile.

L'examen à marche forcée de ce texte, enfin, le rend inacceptable. Il n'y a pas eu de concertation en amont, comme le prévoit le protocole que nous avons adopté. Ce n'est pas un hasard si vous avez cherché, en passant par la voie de l'initiative parlementaire, à éviter les observations du Conseil d'État : c'est que ce texte s'expose à un risque de censure constitutionnelle. D'autant que lui manque toute étude d'impact.

Vous comprendrez que nous vous incitions à voter la question préalable. (Applaudissements à gauche)

M. François Fortassin.  - Je ne m'étendrai pas sur les conditions d'examen de ce texte qui, à la veille d'échéances majeures, n'a fait l'objet d'aucune concertation préalable avec les partenaires sociaux.

Prévenir la grève ? Nous pourrions, sénateurs du RDSE, partager l'objectif. Les passagers supportent mal la paralysie du trafic. Mais la méthode pose problème. Le droit de grève est forcément perturbateur, mais c'est souvent le seul moyen dont disposent les salariés pour amener leur direction à la table de négociations. La disparition relative du dédit va au-delà de l'objectif affiché de prévention des conflits. Je regrette que vous n'ayez su privilégier la voie du dialogue social. Voilà qui n'est pas de nature à apaiser le climat dans l'entreprise.

Et le moment est-il opportun pour légiférer ? Personne n'est dupe d'une proposition de loi dont les arrière-pensées sont patentes. La grande majorité du groupe RDSE approuvera la question préalable.

présidence de M. Thierry Foucaud,vice-président

Mme Marie-Thérèse Bruguière.  - Ayant participé à la CMP, je déplore que le rejet en bloc rende le Sénat muet, suscitant des interrogations sur la légitimité de notre Haute assemblée.

La proposition de loi vise une meilleure prévisibilité du transport aérien. Dans les transports terrestres, la loi de 2007 avait suscité bien des levées de bouclier, or elle est maintenant bien acceptée.

Ici, du reste, il n'est question ni de service minimum ni de service garanti, puisque le transport aérien de personnes ne constitue pas une mission de service public. Mais les Français en ont assez d'être pris en otages. Les cohues dans les aéroports sont devenues une image familière. Il y a eu1 131 grèves ces trois dernières années, 175 jours de grève au total, ce matin encore il fallait trois heures pour rallier Orly depuis Nice.

Il est temps de concilier les intérêts des usagers et des salariés. La proposition de loi vise à éviter les grèves, empêcher la paralysie des transports, informer les passagers, qui resteront chez eux. La déclaration 48 heures à l'avance a suscité l'émotion de certains, mais il n'en résultera aucune stigmatisation des grévistes déclarés. Elle permettra d'informer 24 heures à l'avance les passagers des annulations de vols. Les déclarations suivies de changement d'avis seront sanctionnées, oui, car il faut empêcher de telles manoeuvres. Le texte est équilibré et le groupe UMP le votera. (Applaudissements à droite)

M. Joël Labbé.  - Les Français en ont assez d'être pris en otages, dit Mme Bruguière : voilà comment on stigmatise et on divise. (M. Jean-Jacques Mirassou renchérit) La proposition de loi sur le transport aérien nous revient. Sachez, madame Bruguière, que l'UMP n'a pas le monopole de l'empathie pour les voyageurs. Mais les mesures proposées ne sont pas appropriées, elles ne renforcent pas le dialogue social mais donnent tout pouvoir à l'employeur contre les salariés, déclaration de grève, de reprise, rétractation soumise à sanctions. Quelle avancée !

Mais peut-être cette réforme vise-t-elle à réduire à rien la possibilité de grève ? Vous clivez la société française, ici passagers et salariés, en espérant en tirer quelque bénéfice, mais vous refusez de voir les problèmes : vous n'empêchez pas Air Méditerranée de délocaliser en Grèce, vous ne vous souciez pas des emplois précaires, ni des conditions de travail déplorables de tous les salariés.

Le Conseil constitutionnel a plusieurs fois rappelé le caractère constitutionnel du droit de grève. Vous invoquez, pour les contourner, l'ordre public ainsi que la sécurité et la santé publiques. La grève est un droit civique. Les grévistes ne sont pas des terroristes. Votre texte est d'affichage. Personne n'en veut, pas même la direction d'Air France, qui vient de signer un accord avec les pilotes. Les Écologistes voteront la question préalable. (Applaudissements à gauche)

M. Vincent Capo-Canellas.  - Nous en sommes réduits à observer les modifications et les apports de l'Assemblée nationale. Je me réjouis que nos collègues députés aient repris nos amendements et qu'ils aient remédié à un défaut de la loi de 2007 en prévoyant des sanctions en cas de rétractation et en annulant le délai de reprise du travail. La loi de 2007 sera d'ailleurs modifiée en ce sens.

Dommage que le Sénat s'en soit tenu à faire de la figuration.

Ce texte n'ouvre pas la voie à un encadrement total de la grève dans le trafic aérien.

M. Thierry Mariani, ministre.  - Absolument.

M. Vincent Capo-Canellas.  - Il ne crée pas non plus un service minimum et ne supprime pas le droit de grève ; il le respecte, tout en respectant les droits des consommateurs. En 2007, chers collègues de la majorité, vous jugiez l'atteinte intolérable dans les transports terrestres et ferroviaires : or vous ne la remettez pas en cause. La proposition de loi s'inspire d'un dispositif validé par le Conseil constitutionnel et encourage le dialogue social. Qui peut nier l'importance des blocages dans le secteur aérien, qui transporte 150 millions de passagers par an ? En février dernier, un millier de vols ont été annulés et Air France a perdu entre 8 et 10 millions d'euros par jour.

Mme Annie David, rapporteure.  - Qu'elle accepte le dialogue social !

M. Vincent Capo-Canellas.  - L'accord intervenu ne limite pas l'intérêt des mesures. Le vrai sujet, du reste, n'est pas la catégorie des pilotes...

Les milliers de passagers désemparés, dormant par terre dans les aéroports, donnent une image déplorable de notre pays. Les aéroports d'Île-de-France génèrent 13,5 milliards d'euros de recettes. Roissy représente 240 000 emplois et le système aéroportuaire francilien, 340 000. Un peu plus de sécurité sera bienvenue. Les membres de l'UCR refuseront la question préalable. (Applaudissements à droite)

M. Jacky Le Menn.  - Le choix de la forme d'une proposition de loi n'est pas un hasard, mais une manoeuvre stratégique pour éviter la consultation des partenaires sociaux et l'examen par le Conseil d'État. Les organisations consultées ont quinze jours pour faire connaître leurs observations, mais elles n'ont pas été saisies. Précipitation, volatilité, temps médiatique : on somme le Sénat de se prononcer, sans lui laisser le temps de la réflexion et du travail. Cette hyperréactivité exacerbe les tensions. En plein conflit social, quelle erreur -sauf si le but est de satisfaire une certaine frange, la plus conservatrice, de la population.

Pour nous, il faut revaloriser le statut et les conditions de travail des salariés du secteur ; sans compter les 120 000 qui ne disposent que de contrats précaires, auprès de sous-traitants. Que faites-vous ici sinon imposer un préavis de grève qu'aucun impératif de service public ne justifie, puisqu'il s'applique à des entreprises privées ?

Seule l'exigence de continuité territoriale serait susceptible de limiter le droit de grève. Vous invoquez l'ordre public, la santé publique, l'information des passagers -mais cette dernière est à la charge des entreprises, et n'est déjà pas toujours assurée, dans le transport terrestre comme aérien. Or quelles sanctions en cas de carence ? Les passagers n'ont qu'à s'adresser aux tribunaux. Vos mesures visent en réalité à restreindre le droit de grève dans les entreprises privées du secteur, non délégataires d'un service public. La grève n'est pas un plaisir, elle témoigne d'une rupture du dialogue.

La vraie responsabilité du législateur consiste à créer tous les outils de dialogue social afin de rendre la grève inutile.

Les députés ont fini par mesurer l'absurdité de la clause de dédit, qui oblige de fait à attendre vingt-quatre heures avant de reprendre le travail et modifie aussi la loi de 2007.

Mais l'ajout ne résout rien : cela ne dérange pas les députés. « Eh bien, ils feront grève », a dit M. Rochebloine.

Votre texte restera sans effet. Le service minimum que vous voudriez imposer exigerait la réquisition de dizaines de milliers de salariés, et de sanctionner les récalcitrants : bonjour le dialogue social !

Ce texte est apparu à l'ordre du jour, pendant la grève du personnel de sécurité travaillant au sol, en décembre dernier. Mais cette catégorie assure une mission de service public, elle doit déjà respecter un préavis de cinq jours avant toute grève. Elle n'est donc pas concernée par ce texte. Ici, ce sont tous les salariés des entreprises privées qui sont visés. Le texte participe du projet global d'imposer silence aux salariés, à la faveur de la crise. Or le dialogue social est productif et crée un climat favorable dans les entreprises. Le Gouvernement cherche à restreindre le droit constitutionnel de grève. Nous voterons la question préalable. (Applaudissements à gauche)

Mme Isabelle Pasquet.  - Quelques heures de débat ont suffi à porter une atteinte grave au droit constitutionnel de grève. Aucune urgence, sinon dictée par votre volonté de passer en force, au mépris des salariés et des syndicats. Le Gouvernement, fidèle serviteur du Medef, déséquilibre les rapports au sein de l'entreprise. Il profite de la crise pour atomiser les droits des salariés. Le droit de grève n'est pas remis en cause, dites-vous ? Mais la déclaration préalable, les sanctions non précisées en cas de rétractation, le délai de vingt-quatre heures avant la reprise du travail compliquent à l'envi l'exercice de ce droit. Les pressions sont fortes sur les salariés.

L'avis du Conseil constitutionnel sur la loi de 2007 était politique, contraire aux jurisprudences des autres juridictions : arrêt Air France de 2003, arrêt de la cour de Grenoble, etc.

Le transport terrestre est un service public, quand le secteur aérien est ouvert à la concurrence, diversifié, avec des catégories de personnels hétérogènes. Le Conseil supérieur de l'aviation civile n'a pas été saisi de la proposition de loi, je le regrette. Ce texte va augmenter la conflictualité.

L'obligation de négocier, qui vaut dès le préavis, est négligée par les chefs d'entreprise. Pourquoi l'étendre ? La proposition de loi vise à mettre fin aux grèves. Le Gouvernement affirme que la loi de 2007 ne sera pas abrogée.

M. Thierry Mariani, ministre.  - C'est vrai, vous la garderez.

Mme Isabelle Pasquet.  - Moi, non. Ce qui mine les transports, aériens comme terrestres, ce ne sont pas les grèves mais le désengagement de l'État. Nous refusons ce texte rétrograde contraire à nos principes républicains. (Applaudissements à gauche)

M. Thierry Mariani, ministre.  - Ce texte indispensable organise bien un service garanti, non un service minimum. Simple affichage politique ? Je suis attaché comme vous au droit de grève. Le préavis s'applique seulement à ceux dont l'absence bloquerait le trafic aérien.

Le printemps arabe a entraîné une chute considérable du trafic vers la Tunisie et l'Égypte : trois vols contre 50 les années précédentes. C'est cela qui a mis à mal la compagnie Air Méditerranée. Si vous avez une solution pour ressusciter le tourisme vers ces pays, dites-le !

Comme ancien député, je ne comprends pas votre hostilité à l'initiative parlementaire. Cette proposition de loi va être votée et, si un jour vous arrivez aux affaires, vous la conserverez. (Applaudissements à droite)

La discussion générale est close.

Question préalable

M. le président.  - Motion n°1, présentée par Mme David, au nom de la commission.

En application de l'article 44, alinéa 3, de son Règlement, le Sénat,

Considérant que, au nom du droit à l'information des passagers, la présente proposition de loi a pour conséquence de limiter l'exercice du droit de grève dans les entreprises de transport aérien de passagers ;

Considérant qu'en imposant à un très grand nombre de salariés du secteur du transport aérien de déclarer quarante-huit heures à l'avance leur intention de faire grève, elle n'organise pas une conciliation équilibrée entre ce droit constitutionnellement protégé et des impératifs concurrents à la portée mal définie ;

Considérant que l'obligation pour tout salarié d'informer, vingt-quatre heures à l'avance, son employeur de son souhait de poursuivre ou reprendre le travail sera inopérante dans le secteur aérien, la multiplicité des acteurs concernés ne permettant pas de rétablir le service au niveau initialement prévu ;

Considérant que le texte ne règle en rien les véritables problèmes qui sont sources de tension sur les plates-formes aéroportuaires, et notamment les conditions de travail déplorables de certaines catégories de personnels et le manque de considération dont ils font l'objet ;

Considérant que cette proposition de loi a été examinée dans la précipitation, à moins de trois semaines de la fin de la session parlementaire, afin de paraître répondre à une prétendue urgence médiatique ;

Considérant que l'Assemblée nationale n'a pas fait jouer son protocole de consultation des partenaires sociaux alors que ce texte porte avant tout sur les droits sociaux des salariés ;

Considérant qu'après l'échec de la commission mixte paritaire, l'Assemblée nationale a confirmé, en nouvelle lecture, les orientations du texte d'origine sans tenir compte des observations du Sénat ;

Décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur la proposition de loi relative à l'organisation du service et à l'information des passagers dans les entreprises de transport aérien de passagers et à diverses dispositions dans le domaine des transports, adoptée par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture (n° 428, 2011-2012).

Mme Annie David, rapporteure.  - Je m'en suis déjà expliquée. La proposition de loi n'est pas plus acceptable qu'il y a quinze jours, elle porte une atteinte disproportionnée à un droit constitutionnel, le droit de grève, au nom de la liberté de circulation, autre droit fondamental. Or, les passagers seront certes informés, mais tout de même cloués au sol...

La proposition de loi n'améliore pas le sort des agents d'assistance en escale, de sécurité, bref tous ceux en situation précaire.

M. Thierry Mariani, ministre.  - Ce n'est pas l'objet du texte.

Mme Annie David, rapporteure.  - Le protocole de consultation des organisations syndicales, dont je rappelle que nous l'avions adopté à l'initiative de M. Gérard Larcher, n'a pas été respecté. Nous ne contestons pas le droit d'initiative parlementaire, mais l'usage détourné des propositions de loi que fait le Gouvernement. Nous avons eu raison d'adopter la question préalable en commission. Faisons de même en séance publique.

M. Thierry Mariani, ministre.  - Avis défavorable.

Mme Marie-Thérèse Bruguière.  - Je m'étonne de cet acharnement contre la proposition de loi, qui ne vise nullement à limiter le droit de grève mais prend en compte le droit d'aller et venir des passagers et l'ordre public. Quel manque de considération pour les usagers ! Je rappelle que les partenaires sociaux ont été auditionnés à l'Assemblée nationale, au Sénat aussi affirme Mme David, qui cependant ne nous a pas invités.

Ce refus de dialogue est regrettable, nous voterons contre la motion.

présidence de M. Jean Claude Carle,vice-président

M. Jean-Marie Bockel.  - Impression de déjà vu : une question préalable malgré les améliorations à l'Assemblée nationale, est à nouveau présentée au Sénat. La loi de 2007 fonctionne bien. La proposition de loi améliore l'information des usagers et les procédures qu'elle instaure n'ont rien de choquant. Le dispositif du dédit se justifie par les rétractations systématiques qui ruinent le dispositif existant.

Ce texte équilibré est en réalité rejeté pour des raisons idéologiques. Le groupe UCR votera contre la question préalable.

Mme Isabelle Pasquet.  - Le président d'Air Méditerranée a donné le choix à ses salariés : perdre leur emploi ou partir travailler en Grèce avec une très forte diminution de salaire. Ils ont écrit à Nicolas Sarkozy pour qu'il les aide à combattre cet odieux chantage à l'emploi et cette délocalisation. Et vous voudriez les désarmer totalement !

La continuité du service public, le maintien de l'ordre, la liberté d'aller et venir, que vous invoquez, n'ont rien à faire ici, puisque le secteur aérien n'assume pas une mission de service public.

Le droit de grève n'est pas un privilège, or vous donnez aux patrons de nouvelles armes, par un arsenal législatif encore plus réactionnaire qu'auparavant.

Faut-il rappeler la réquisition des salariés de la raffinerie de Grandpuits, ensuite annulée par le juge, le licenciement d'élus du personnel chez NextiraOne, validé par Xavier Bertrand, contre l'avis de l'inspection du travail ? De telles pratiques, qui sont légion, sont inacceptables. (Applaudissements à gauche)

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Notre collègue Bruguière a forcé la note en assimilant une grève des transports aériens à une situation insurrectionnelle mettant en cause l'ordre public !

Selon elle, la gauche adopte une posture idéologique. À trop vouloir prouver, on ne prouve rien. Notre position est conforme à nos principes : à une proposition de loi de circonstances, nous opposons une réponse sérieuse, sous forme d'interrogation : pourquoi les salariés font-ils grève ? Croyez-vous qu'ils le fassent par plaisir ? Il y faut des raisons fortes. Bien sûr, pour la droite, la grève ne doit gêner personne... mais ça n'a jamais marché, aujourd'hui comme en 1936 ! (Rires et applaudissements à gauche)

Nous voterons donc avec détermination la question préalable. (Applaudissements à gauche)

À la demande de la commission, la proposition de loi est mise aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 343
Majorité absolue des suffrages exprimés 172
Pour l'adoption 175
Contre 168

Le Sénat a adopté.

En conséquence, la proposition de loi est rejetée.