Renforcement de l'efficacité des sanctions pénales (Procédure accélérée - Suite)

Mme la présidente.  - Nous reprenons l'examen de la suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, tendant à renforcer l'efficacité des sanctions pénales.

Discussion des articles (Suite)

ARTICLE 11 BIS AA

Mme la présidente.  - Amendement n°109, présenté par M. J.P. Michel, au nom de la commission.

Alinéa 2

Remplacer les mots :

doivent rechercher

par le mot :

recherchent

L'amendement rédactionnel n°109, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article 11 bis AA, modifié, est adopté.

L'article 11 bis A est adopté.

ARTICLE 11 BIS

Mme la présidente.  - Amendement n°17, présenté par M. Hyest et les membres du groupe UMP.

Supprimer cet article.

Mme Colette Mélot.  - Ce dispositif de contribution en faveur des victimes n'est pas cohérent.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.  - Le Gouvernement proposera un amendement de réécriture de l'article qui vous donnera satisfaction. Rejet.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Défavorable : la rédaction que je propose devrait vous satisfaire.

Mme Colette Mélot.  - Soit.

L'amendement n°17 est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°100, présenté par le Gouvernement.

Alinéas 4 à 6

Remplacer ces alinéas par cinq alinéas ainsi rédigés :

« Art. 706-15-3.  - I.  -  L'auteur de l'infraction et la personne civilement responsable qui ont été condamnés au paiement de dommages-intérêts à la partie civile peuvent, lorsque celle-ci ne demande pas le paiement des sommes qui lui sont dus, verser volontairement ces sommes au fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions prévu par l'article L. 422-1 du code des assurances.

« II.  -  Lorsque l'auteur de l'infraction qui a été condamnée au paiement de dommages-intérêts à la partie civile est détenu et que la part des valeurs pécuniaires affectée à l'indemnisation des parties civiles en application du premier alinéa de l'article 728-1 n'a pas été réclamée, ces valeurs sont, sous réserve des droits des créanciers d'aliments, versées au fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions à la libération du condamné.

« Un décret détermine les modalités d'application du présent article et fixe le montant minimal des sommes versées au fonds de garantie. »

... - L'article  L. 422-1 du code des assurances est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le fonds est également alimenté par des versements prévus aux I et  II de l'article 706-15-3 du code de procédure pénale.  Lorsque ces versements sont effectués, la victime est alors directement indemnisée par le fonds, à hauteur le cas échéant des versements effectués, et, à hauteur de ces versements,  les dispositions de l'alinéa précédent ne sont pas applicables. »

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Nous travaillons, depuis 2012, sur le financement de l'aide aux victimes. Nous devons en diversifier les sources en ces temps difficiles. Il a fallu du temps pour aboutir à un dispositif durable en coordination avec le fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions. D'où cet article introduit à l'Assemblée nationale que nous voulons sécuriser.

Jusqu'à présent, s'il n'y avait pas de victimes, si la victime ne s'était pas manifestée ou ne voulait pas de ces fonds, ces derniers étaient restitués à l'auteur à sa sortie de prison. Il y a là, à notre sens, un problème moral. Le condamné peut s'amender en contribuant à réparer le préjudice des victimes.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.  - Favorable.

L'amendement n°100 est adopté.

L'article 11 bis, modifié, est adopté.

ARTICLE 11 TER

Mme la présidente.  - Amendement n°52 rectifié, présenté par MM. Mézard, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin et Collombat, Mme Escoffier, MM. Esnol, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Requier, Tropeano, Vall et Vendasi.

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par les mots :

matérielle, familiale et sociale

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.  - Je reprends l'amendement.

Mme la présidente.  - Ce sera l'amendement n°123.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Favorable.

L'amendement n°123 est adopté.

L'article 11 ter, modifié, est adopté.

L'article 11 quater est adopté.

ARTICLE 12

Mme la présidente.  - Amendement n°67, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste.

I.  -  Alinéa 4

Après les mots :

condamnées

insérer les mots :

ou  prévenues

II.  -  Alinéa 5

1° Supprimer les mots :

conditions et

2° Remplacer les mots :

d'accès

par les mots :

d'intervention  de ces derniers pour favoriser l'accès

3° Après le mot :

condamnées

insérer les mots :

ou  prévenues

M. Joël Labbé.  - L'accès aux droits doit être assuré à toutes les personnes placées sous main de justice, qu'elles soient condamnées ou prévenues.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.  - L'administration pénitentiaire ne prend en charge que les détenus. Rejet.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Même avis.

L'amendement n°67 n'est pas adopté.

L'amendement n°53 rectifié n'est pas défendu.

L'article 12 est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

Mme la présidente.  - Amendement n°40, présenté par Mme Klès et M. Mohamed Soilihi.

Après l'article 12

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le deuxième alinéa de l'article 35 de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 précitée, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« À partir de l'âge de seize ans révolus, un enfant d'une personne détenue peut demander à exercer son droit de visite sans l'accord du titulaire de l'autorité parentale. L'autorité administrative ne peut refuser ce permis de visite à un enfant que pour des motifs graves relatifs à l'intérêt supérieur de l'enfant ou pouvant faire obstacle à la réinsertion du condamné. »

M. Thani Mohamed Soilihi.  - Je défendrai les amendements nos40 et 41. Tous deux facilitent le droit de visite des mineurs à leurs parents détenus. Cela favorisera la réinsertion et la prévention de la récidive. La Cour européenne des droits de l'homme insiste sur le droit à la vie familiale en prison ; le Défenseur des droits, également.

Mme la présidente.  - Amendement n°41, présenté par Mme Klès et M. Mohamed Soilihi.

Après l'article 12

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le troisième alinéa de l'article 145-4 du code de procédure pénale est complété par deux phrases ainsi rédigées :

« À partir de l'âge de seize ans révolus, un enfant d'une personne détenue peut demander à exercer son droit de visite sans l'accord du titulaire de l'autorité parentale. Le juge d'instruction  ne peut refuser ce permis de visite à un enfant que pour des motifs graves relatifs à l'intérêt supérieur de l'enfant ou au secret de l'instruction. »

M. Thani Mohamed Soilihi.  - Défendu.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.  - Favorable à cet amendement qui nous vient du Défenseur des droits, ou du moins de son administration.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Le droit de visite en prison des mineurs est prévu à l'article 8 ter du texte sur l'autorité parentale en cours d'examen à l'Assemblée nationale. Cela nous paraît un véhicule plus approprié. Il faut voir aussi quelle est la position du parent extérieur, et ce n'est pas à l'administration de trancher mais au juge aux affaires familiales.

Retrait, donc, même si je suis d'accord sur le fond : à 16 ans, on a une maturité suffisante pour rendre visite à son parent emprisonné.

Mme Catherine Tasca.  - Le Gouvernement doit veiller à ce que cette question soit bien traitée dans le texte sur l'autorité parentale qui n'est toujours pas inscrit à notre ordre du jour.

M. Thani Mohamed Soilihi.  - Je ne saurais mieux dire que Mme Tasca. En attendant, je n'insiste pas : je prends la réponse de Mme la ministre pour une garantie.

Les amendements nos40 et 41 sont retirés.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - La discussion de cette proposition de loi devrait s'achever demain à l'Assemblée nationale. Je m'engage à demander au secrétaire d'État aux relations avec le Parlement son inscription rapide à votre ordre du jour, et à lui indiquer que ces amendements ont été aimablement retirés au bénéfice d'un engagement du Gouvernement.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.  - Le retrait de ces amendements tels qu'ils étaient rédigés était une bonne solution... C'est le juge aux affaires familiales qu'il aurait fallu saisir dans le cas où l'un des deux parents refuse à l'autre, et de manière déraisonnable, le droit de visite.

ARTICLE 12 BIS

Mme la présidente.  - Amendement n°101, présenté par le Gouvernement.

Rédiger ainsi cet article :

L'article 30 de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 précitée est ainsi modifié :

1° Le 2° est ainsi rédigé :

« 2° Pour prétendre au bénéfice des droits mentionnés aux articles L. 121-1 et L. 264-1 du code de l'action sociale et des familles, lorsqu'elles ne disposent pas d'un domicile de secours ou d'un domicile personnel au moment de leur incarcération ou ne peuvent en justifier ; »

2° Il est ajouté par un alinéa ainsi rédigé :

« Pour faciliter leurs démarches de préparation à la sortie, les personnes détenues peuvent également procéder à l'élection de domicile mentionnée à l'article L. 264-1 du code de l'action sociale et des familles soit auprès d'un centre communal ou intercommunal d'action sociale, soit auprès d'un organisme agréé à cet effet, le plus proche du lieu où elles recherchent une activité en vue de leur insertion ou réinsertion ou le plus proche du lieu d'implantation d'un établissement de santé ou médico-social susceptible de les accueillir. »

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Cet article complète l'article 30 de la loi pénitentiaire qui concerne la domiciliation des personnes détenues au regard de l'exercice des droits civiques et civils et l'acquisition du domicile de secours. Il faut améliorer sa rédaction après son introduction à l'Assemblée nationale. Les personnes détenues pourront élire domicile dans les CCAS. Nous élargirons la mesure aux CIAS, aux associations et aux CHRS. Que de sigles ! C'est épouvantable. Je fais pourtant la guerre à mon cabinet.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.  - Favorable.

L'amendement n°101 est adopté, l'article 12 bis est ainsi rédigé.

ARTICLE 13

Mme la présidente.  - Amendement n°39, présenté par Mme D. Gillot et M. Mohamed Soilihi.

Alinéa 2, première phrase

Après le mot :

probation

insérer les mots :

ou les personnes morales habilitées auxquelles les mesures sont confiées

Mme Dominique Gillot.  - Amendement de cohérence. J'ai noté les propos de Mme la ministre sur les associations, partenaires de la justice pour la réinsertion des détenus. Elles ont acquis de grandes compétences depuis quarante ans, et ont montré leur fiabilité, leur inventivité, leur réactivité. Elles peuvent s'inscrire dans une démarche d'évaluation, comme les services de l'État. Sans nulle irresponsabilité, nous voulons élargir le partenariat avec ces associations, au bénéfice de tous les citoyens, y compris les condamnés.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.  - Avis favorable. La commission ne s'attendait pas à des débats contradictoires d'une telle ampleur sur ce sujet.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Nous restons chacun sur notre ligne : le Gouvernement considère que les missions post-sentencielles ont un caractère régalien. En outre, cet article concerne les Spip. En présentenciel, je travaille avec le réseau Citoyens et Justice, composé d'associations sérieuses et compétentes. Pour le post-sentenciel, il y a la loi du 27 mars 2012. Mais j'insiste : même ceux qui ne sont pas convaincus par ce projet de loi disent qu'il y faudra des moyens. Nous les mettons sur la table, en créant des postes de conseillers d'insertion et de probation, mais aussi de psychologues, ainsi que des postes administratifs et techniques. Nous améliorons ainsi la formation initiale et continue des conseillers d'insertion et de probation, pour mieux les spécialiser.

L'amendement n°39 est adopté.

L'article 13, modifié, est adopté.

ARTICLE 14

Mme la présidente.  - Amendement n°68, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste.

Alinéa 1

Remplacer cet alinéa par quatre alinéas ainsi rédigés :

L'article 13 de la loi n°2009-1436 du 24 novembre 2009 précitée est ainsi modifié :

1° Avant le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le service pénitentiaire d'insertion et de probation, avec la participation, le cas échéant, des autres services de l'État, des collectivités territoriales, des associations et de tous organismes publics ou privés, favorise l'accès aux droits et aux dispositifs d'insertion de droit commun des détenus et personnes qui lui sont confiées par les autorités judiciaires. Il s'assure, en particulier pour les personnes libérées, de la continuité des actions d'insertion engagées et définies par décret. Il peut également apporter aux personnes qui leur sont confiées par les autorités judiciaires une aide au sens de l'article 132-46 du code pénal. » ;

2° Le second alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

M. Joël Labbé.  - Le service pénitentiaire d'insertion et de probation n'est pas défini par la loi, alors que son rôle de coordination et sa mission d'insertion des personnes placées sous main de justice sont essentiels.

L'administration pénitentiaire pilote n'est d'ailleurs pas le seul intervenant dans le champ de l'insertion sociale et professionnelle des personnes placées sous main de justice en milieu ouvert. Le service pénitentiaire d'insertion et de probation est en charge du suivi de l'exécution de la mesure et les associations, de l'accompagnement social des personnes.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.  - Avis défavorable : c'est d'ordre réglementaire.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Je ne vois pas non plus la nécessité de faire remonter cette définition au niveau législatif. La vôtre est d'ailleurs incomplète ne retenant que l'accès au droit. Les services pénitentiaires d'insertion et de probation sont composés d'un personnel qualifié, à bac+3 avant l'entrée à l'école pénitentiaire, à bac+5 après. On ne peut pas le confiner à des rôles d'exécution subalternes.

Quant aux prévenus, ils sont en attente de jugement, c'est pourquoi le Gouvernement ne souhaitait pas les faire prendre en charge par les services pénitentiaires d'insertion et de probation.

M. Joël Labbé.  - Votre ton convaincant m'a convaincu. J'aurais dû retirer aussi l'amendement n°67.

L'amendement n°68 est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°54 rectifié, présenté par MM. Mézard, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin et Collombat, Mme Escoffier, MM. Esnol, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Requier, Tropeano, Vall et Vendasi.

Alinéa 2

Après les mots :

la situation

insérer les mots :

matérielle, familiale et sociale,

Mme la présidente.  - Il n'est pas défendu.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.  - Je le reprends car il précise les modalités d'évaluation de la situation des personnes condamnées.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Avis favorable.

L'amendement n°54 rectifié bis est adopté.

L'article 14, modifié, est adopté.

ARTICLE 14 BIS

Mme la présidente.  - Amendement n°87, présenté par le Gouvernement.

Supprimer cet article.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Cet amendement vise à supprimer un article introduit par la commission.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.  - À l'initiative de Mme Benbassa.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - L'article crée des rigidités, alors que nous cherchons à diversifier les activités des détenus. J'en comprends cependant l'esprit, et je partage sa philosophie.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.  - Avis défavorable, mais nous tiendrons compte de vos remarques, madame la ministre, en CMP.

M. Jean-René Lecerf.  - L'enfer est pavé de bonnes intentions. Pour développer le travail et la formation professionnelle en prison, il y a bien d'autres choses à faire, et il faut de la volonté politique. À Lille puis à Douai, des initiatives ont été prises pour former les détenus au tri des déchets, avec à la clé des contrats à la sortie de prison, et une baisse de la récidive. Je soutiens totalement le Gouvernement.

L'amendement n°87 est adopté et l'article 14 bis est supprimé.

ARTICLE 15

Mme la présidente.  - Amendement n°18, présenté par M. Hyest et les membres du groupe UMP.

Supprimer cet article.

M. Jean-René Lecerf.  - Il est défendu. Je le soutiens moi-même qui ne suis pas toujours d'accord avec mon groupe...

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.  - L'exposé des motifs ne vise que la première partie de l'article, déjà supprimé par la commission des lois. Retrait ?

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Je crois, moi aussi, qu'il y a une erreur d'appréciation. Cet article 15 renforce les prérogatives des forces de l'ordre dans le contrôle du respect de leurs obligations par les condamnés. Même demande de retrait.

M. Jean-René Lecerf.  - D'accord.

L'amendement n°18 est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°110, présenté par M. J.P. Michel, au nom de la commission.

I.  -  Après l'alinéa 10

Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :

ter) Le cinquième alinéa est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :

« La retenue s'exécute dans des conditions assurant le respect de la dignité de la personne. Seules peuvent être imposées à la personne retenue les mesures de sécurité strictement nécessaires.

« La personne retenue ne peut faire l'objet d'investigations corporelles internes au cours de sa rétention par le service de police ou par l'unité de gendarmerie.

« L'article 64 est applicable à la présente mesure de retenue. » ;

II.  -  Après l'alinéa 17

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

a bis) Le 7° est abrogé ;

III.  -  Alinéa 18

1° Après le mot :

épreuve,

insérer les mots :

d'un suivi socio judiciaire,

2° Remplacer les mots :

d'un aménagement de peine

par les mots :

d'une semi-liberté, d'un placement à l'extérieur, d'un placement sous surveillance électronique

IV.  -  Après l'alinéa 19

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

d) Le 11° est abrogé ;

V.  -  Alinéa 20

Rédiger ainsi cet alinéa :

4° Après l'article 709, sont insérés des articles 709-1-1 et 709-1-2 ainsi rédigés :

VI.  -  Alinéa 21

Remplacer la référence :

709-1

par la référence :

709-1-1

VII.  -  Après l'alinéa 28

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« La retenue s'exécute dans des conditions assurant le respect de la dignité de la personne. Seules peuvent être imposées à la personne retenue les mesures de sécurité strictement nécessaires.

VIII.  -  Alinéa 34

Supprimer cet alinéa.

IX.  -  Alinéa 35

Remplacer la référence :

709-1-1

par la référence :

709-1-2

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.  - Cet amendement étend aux mesures de retenues les principes de l'article 63-5 du code de procédure pénale, applicables à la garde à vue : la mesure doit s'exécuter dans le respect de la dignité de la personne.

Il met en cohérence des droits et obligations devant être inscrits au fichier des personnes recherchées en créant un régime commun à l'ensemble des peines et mesures post-sentencielles.

Enfin, il opère diverses coordinations de forme.

L'amendement n°58 rectifié n'est pas défendu.

L'amendement n°110, accepté par le Gouvernement, est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°32 rectifié, présenté par MM. Capo-Canellas, Détraigne, Bockel, Marseille et Roche, Mme Férat, MM. Amoudry, J.L. Dupont et Deneux, Mme Gourault et MM. Zocchetto, J. Boyer et Lasserre.

Alinéa 38

Rétablir le 5° bis dans la rédaction suivante :

bis L'article 709-2 est ainsi rédigé :

« Art. 709-2. - Lorsqu'il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'une personne condamnée sortant de détention n'a pas respecté l'interdiction qui lui est faite, en application de sa condamnation, d'entrer en relation avec certaines personnes, dont la victime, ou certaines catégories de personnes, notamment des mineurs, de fréquenter certains condamnés, notamment les auteurs ou complices de l'infraction, ou de paraître en un lieu, une catégorie de lieux ou une zone spécialement désignés, les services de police et les unités de gendarmerie peuvent, sur instruction du juge de l'application des peines ou, s'il a été fait application du deuxième alinéa de l'article 131-9 ou du second alinéa de l'article 131-11 du code pénal, du juge de l'application des peines, saisi à cette fin par le procureur de la République, procéder, sur l'ensemble du territoire national, à :

« 1° L'interception, l'enregistrement et la transcription de correspondances émises par la voie des télécommunications, selon les modalités prévues à la sous-section 2 de la section 3 du chapitre Ier du titre III du livre Ier ;

« 2° La localisation en temps réel d'une personne, à l'insu de celle-ci, d'un véhicule ou de tout autre objet, sans le consentement de son propriétaire ou de son possesseur, selon les modalités prévues au chapitre V du titre IV du livre Ier. » ;

M. Vincent Capo-Canellas.  - Je sais que je m'aventure sur un sujet sensible... Les députés ont voulu renforcer les pouvoirs de la police pour contrôler et surveiller les condamnés. En cas de violation de ses obligations par une personne sous main de justice, policiers et gendarmes pourront, sur instruction du juge de l'application des peines, saisi à cette fin, le cas échéant, par le procureur de la République, procéder à l'interception, l'enregistrement et la transcription de correspondances émises par la voie des télécommunications ainsi qu'à la localisation en temps réel d'une personne, d'un véhicule ou de tout autre objet.

Cet amendement rétablit la rédaction de l'Assemblée nationale : des écoutes de quatre mois maximum, renouvelables sur décision du juge.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.  - Avis défavorable.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Même avis. Je suis surprise de la position du groupe UDI-UC : les techniques spéciales d'enquête, employées pour les crimes et pour certains délits, ont-elles leur place ici ? Le projet de loi arme suffisamment les forces de l'ordre, avec les retenues et les visites domiciliaires.

Nous avons créé un cadre juridique de la géolocalisation, et débattu du quantum de peine encouru justifiant le recours à cette technique.

Le Conseil constitutionnel a censuré le recours à ces techniques spéciales en cas de fraude fiscale, lorsqu'il n'y a pas d'atteinte aux personnes.

M. Vincent Capo-Canellas.  - Merci de ces explications. Nous recherchons tous l'efficacité, mais le Sénat est conscient des problèmes posés par la géolocalisation. Je retire l'amendement.

L'amendement n°32 rectifié est retiré.

L'article 15 est adopté.

Les articles 15 bis et 15 ter demeurent supprimés.

ARTICLE 15 QUATER

Mme la présidente.  - Amendement n°83, présenté par Mme Cukierman et les membres du groupe CRC.

I.  -  Alinéa 4

Supprimer cet alinéa.

II.  -  Alinéa 6, deuxième et dernière phrases

Supprimer ces phrases.

III.  -  Alinéa 8, deuxième et dernière phrases

Supprimer ces phrases.

Mme Cécile Cukierman.  - La possibilité offerte aux conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance de constituer des groupes de travail sur l'exécution des peines viole le principe de séparation des pouvoirs et pose un problème de constitutionnalité, puisque ces conseils sont présidés par le préfet. De nombreux acteurs, comme les bailleurs sociaux, connaîtraient ainsi le nom des personnes condamnées, qui pourraient ainsi se voir privées d'un logement, d'un emploi...

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.  - La commission des lois est défavorable, mais j'attends les explications du Gouvernement.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Le Parlement a toujours pris cette question au sérieux. Au début du précédent quinquennat, il avait été question de confier aux maires l'identité des personnes condamnées ; de nombreux maires UMP s'y étaient opposés, voyant bien la responsabilité que cela représentait.

Les données nominatives ne doivent pas être divulguées inconsidérément. Mais le souci de la prévention exige qu'elles puissent être partagées. Le code de la sécurité intérieure l'autorise déjà, au sein des comités locaux de sécurité et de prévention de la délinquance, mais les pratiques diffèrent. Le comité interministériel de prévention de la délinquance vient d'élaborer une charte ad hoc. Au sein des comités locaux, seule l'autorité judiciaire peut autoriser le partage d'informations nominatives, qu'il faut encadrer rigoureusement sans l'interdire.

La commission des lois a amélioré le texte de l'Assemblée nationale, qui avait prévu l'accès au bulletin n°1 du casier judiciaire.

Je demande le retrait.

Mme Cécile Cukierman.  - Je maintiens l'amendement. Je vous fais confiance, madame la ministre, mais sous une autre majorité, avec un autre garde des sceaux, ces dispositions pourraient présenter des risques.

M. Jean-René Lecerf.  - Je ne voterai pas cet amendement. J'étais rapporteur du projet de loi de prévention de la délinquance, qui faisait du maire le pivot de celle-ci, et prévoyait un secret partagé avec les travailleurs sociaux. On ne peut se contenter de slogans, sans se donner les moyens de les appliquer.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Quand on travaille dans un quartier, il peut être nécessaire de disposer de données concrètes. Mais je suis sensible aux arguments de Mme Cukierman. Les conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance comprennent jusqu'à 30 ou 40 membres ; il faut réserver ces informations à un cercle plus restreint : il en va du respect dû à la personne, fût-elle condamnée.

M. Vincent Capo-Canellas.  - Je partage l'avis de M. Lecerf. Les conseils locaux travaillent en toute confidentialité, le procureur y veille, et leur règlement interdit déjà d'évoquer ces cas en-dehors d'un cadre très restreint, loin de réunir 30 à 40 personnes.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Mieux vaut être précis, car nos débats éclairent l'interprétation de la loi. C'est au sein de groupes restreints que les informations nominatives peuvent être partagées dans les conseils locaux. Tout manquement à la confidentialité est sanctionné. L'une des conditions de la réinsertion, c'est le droit à l'oubli. Or la loi est parfois impitoyable, interdisant par exemple aux condamnés l'exercice de certains métiers, même lorsqu'ils ont exécuté leur peine, et qu'ils sont formés pour. Un tel bannissement à l'intérieur de la République est insupportable. Je pense à des cas précis. Nous serons très attentifs à vos observations lors de la rédaction de la circulaire.

L'amendement n°83 n'est pas adopté.

L'article 15 quater est adopté.

ARTICLE 15 QUINQUIES

Mme la présidente.  - Amendement n°111, présenté par M. J.P. Michel, au nom de la commission.

Alinéa 3

Remplacer les mots :

Du rôle

par les mots :

De l'information

L'amendement n°111, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article 15 quinquies, modifié, est adopté.

L'article 15 sexies est adopté.

ARTICLE 16

Mme la présidente.  - Amendement n°69, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste.

Alinéa 4

Après le mot :

examinée

insérer les mots :

, après qu'elle eut été auditionnée,

Mme Esther Benbassa.  - Cet amendement impose l'audition de la personne libérable avant le prononcé de la libération sous contrainte, afin d'adapter les mesures prononcées et de permettre la réussite de cette sortie. De surcroît, la présence du détenu est indispensable pour qu'il accepte les obligations prononcées et s'y conforme.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.  - Avis défavorable : cela alourdirait trop la procédure.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Je comprends votre souci d'introduire du contradictoire dans cette procédure ; d'où notre amendement, adopté en commission, qui prévoit l'audition du détenu par le juge de l'application des peines et son accord exprès à la libération sous contrainte. Retrait ?

L'amendement n°69 est retiré.

L'article 16 est adopté.

Les articles 16 bis, 16 ter et 17 sont successivement adoptés.

ARTICLE ADDITIONNEL

Mme la présidente.  - Amendement n°70, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste.

Après l'article 17

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la première phrase du quatrième alinéa de l'article 730-2 du code de procédure pénale, après les mots : « d'une semi-liberté », sont insérés les mots : « , de placement à l'extérieur ».

Mme Esther Benbassa.  - En raison de son absence dans la liste des mesures pouvant être probatoires à la libération conditionnelle à l'article 730-2 du code de procédure pénale, la loi du 10 août 2011 ne permet plus le placement à l'extérieur des personnes condamnées aux peines les plus longues.

C'est pourtant l'aménagement de peine le plus à même de s'inscrire dans le parcours évolutif des personnes incarcérées depuis de très nombreuses années.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.  - La commission s'en remet à l'avis du Gouvernement.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Amendement bienvenu : il n'y a pas de raison d'exclure le placement à l'extérieur.

L'amendement n°70 est adopté et devient un article additionnel.

ARTICLE 17 BIS

Mme la présidente.  - Amendement n°71, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste.

Supprimer cet article.

Mme Esther Benbassa.  - Cet article étend à presque tous les délits la surveillance judiciaire mise en place par le précédent gouvernement, et alourdirait considérablement les obligations et interdictions pesant sur le condamné. Il y a fort à craindre que cette disposition, adoptée sans étude d'impact, entraîne une charge importante pour les services pénitentiaires d'insertion et de probation et les juges d'application des peines.

Enfin, cet article semble contraire à la Constitution. Dans sa décision du 8 décembre 2005, le Conseil constitutionnel notait que la surveillance judiciaire reposant non sur la culpabilité du condamné mais sur sa dangerosité, ne constitue ni une peine ni une sanction.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°84, présenté par Mme Cukierman et les membres du groupe CRC.

Mme Éliane Assassi.  - Cet amendement supprime l'article 17 bis qui instaure une nouvelle forme de surveillance judiciaire applicable à tous les condamnés sortant en fin de peine. Cette disposition est en totale contradiction avec l'esprit du texte, visant à favoriser une exécution de la peine en partie en détention, en partie en liberté, en engageant les détenus dans un processus dynamique d'aménagement de peine. 

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.  - Avis défavorable.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Le Gouvernement, d'abord réservé, se range à ces amendements, compte tenu des votes intervenus.

Les amendements identiques nos71 et 84 sont adoptés et l'article 17 bis est supprimé.

L'amendement n°72 n'a plus d'objet.

Les articles 17 ter, 18, 18 bis, 18 ter sont successivement adoptés.

ARTICLE 18 QUATER A

Mme la présidente.  - Amendement n°19, présenté par M. Hyest et les membres du groupe UMP.

Supprimer cet article.

M. Jean-René Lecerf.  - Les auteurs de cet amendement sont opposés à cet article introduit par la commission des lois qui tend à supprimer pour des raisons idéologiques la rétention de sûreté, indispensable dans certaines situations très particulières.

Je me félicite de la qualité des débats à ce sujet au sein de la commission des lois. La rétention ne s'est appliquée que dans de très rares cas, la loi n'étant pas rétroactive. Sa suppression pourrait avoir un effet pervers : sans garanties ni réexamen régulier de la situation des personnes, les jurys populaires prononceront des peines de réclusion criminelle à perpétuité, ou de trente ans, assorties de périodes de sûreté.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°30 rectifié, présenté par MM. Détraigne, Capo-Canellas, Bockel, Marseille et Roche, Mme Férat, MM. Amoudry, J.L. Dupont et Deneux, Mme Gourault et MM. Zocchetto et Merceron.

M. Vincent Capo-Canellas.  - Je ne répéterai pas les arguments de M. Lecerf. Ne touchons à la loi que d'une main tremblante. M. le rapporteur reconnaît lui-même que, faute d'évaluation globale, il ne peut être exclu que la rétention de sûreté ait eu des effets sur la récidive.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°91, présenté par le Gouvernement.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Disons-le clairement : le Gouvernement est favorable à la suppression de la rétention de sûreté, pour des raisons de droit et de philosophie politique.

Je n'ai jamais entendu d'arguments doctrinaux, que des arguments prosaïques sur la rétention de sûreté, qui intervient après que la peine a été exécutée. Dans certains cas, on peut craindre que la personne commette un nouveau crime - car il s'agit uniquement de crimes. C'est pourquoi le Gouvernement ne souhaite pas supprimer la rétention de sûreté dans ce texte qui concerne les seuls délits.

Faute pour la puissance publique d'avoir pris les dispositions nécessaires pour prendre en charge certaines pathologies, elle est contrainte de se protéger en recourant à des pratiques injustes. Considérez l'altération du discernement, qu'experts et juridictions ont fini par considérer comme un facteur aggravant. Vous avez rectifié cette injustice hier dans ce projet de loi. Le parallélisme avec la rétention de sûreté peut être fait. Parce qu'on n'a pas pris en charge en milieu hospitalier, avec toute les sécurités nécessaires, les personnes présentant de véritables pathologies, on s'est retrouvé à sortir l'artillerie lourde et à punir des actes qui ne sont pas encore commis...

Le Gouvernement est clair, il est pour la suppression de la rétention de sûreté, mais pas dans ce texte.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.  - Avis favorable. J'avais fait adopter par la commission un amendement supprimant la rétention de sûreté tout en préservant la surveillance de sûreté. La commission a ensuite adopté un amendement de M. Hyest, la majorité ayant changé...

« La rétention de sûreté altère les principes fondamentaux sur lesquels repose notre justice. Depuis la Révolution, seule la justice a le pouvoir d'emprisonner, pour punir une infraction. Pas de prison sans infraction : franchir la ligne qui sépare une justice de liberté à une justice fondée sur la dangerosité, appréciée par des experts, de l'auteur virtuel d'une infraction éventuelle est un changement profond. Je doute qu'il s'agisse d'un progrès ». Ce sont les propos de Robert Badinter. Je les partage, et regrette l'avis favorable de la commission à ces trois amendements de suppression. (M. Jean-Pierre Sueur applaudit)

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Il y a la rétention de sûreté, la surveillance de sûreté, les mesures de sûreté : le Gouvernement souhaite supprimer la première, non les deux dernières. Il y a un travail d'expertise à faire, c'est l'objet de la mission confiée à Bruno Cotte.

M. Thani Mohamed Soilihi.  - À titre personnel, je voterai contre ces amendements, car je m'oppose à la double peine consistant à imposer la rétention de sûreté à un justiciable qui a purgé sa peine. Je sais qu'il s'agit de cas très graves, mais il en va du respect des droits de la défense.

M. Jean-René Lecerf.  - Je respecte les propos de Jean-Pierre Michel, dont je connais les convictions profondes. Mais je ne comprends pas qu'on critique une loi pour sa non-application alors qu'elle n'était pas applicable, n'étant pas rétroactive : conscient des limites de la loi, le précédent Gouvernement avait prévu que la rétention de sûreté n'était pas applicable si pendant sa détention la personne n'avait pas reçu les soins nécessaires au traitement de sa dangerosité.

Les amendements nos19, 30 rectifié et 91 identiques sont adoptés.

L'article 18 quater A est supprimé.

Les amendements nos85 et 112 deviennent sans objet.

ARTICLE 18 QUATER

Mme la présidente.  - Amendement n°113, présenté par M. J.P. Michel, au nom de la commission.

Alinéas 1, 2 et 6

Remplacer la référence :

707-5

par la référence :

707-6

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.  - Amendement de coordination.

L'amendement n°113, accepté par le Gouvernement, est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°90, présenté par le Gouvernement.

I. - Alinéa 2

Supprimer les mots :

et qui est destinée à financer l'aide aux victimes

II. - Alinéas 9, 12, 14 et 15

Supprimer les mots :

destinée à financer l'aide aux victimes

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - L'Assemblée nationale, inquiète à l'idée que la ressource que nous créons ne soit pas expressément dédiée à l'aide aux victimes, l'a précisé. Or les règles de la comptabilité publique interdisent d'inscrire dans la loi que la taxe est affectée. D'où cet amendement, à mon corps défendant. Ces nouvelles ressources devront aller à l'aide aux victimes : il faudra y veiller, le Gouvernement s'y engage.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.  - C'est exactement ce que j'allais dire. S'agissant d'une taxe, cette ressource ne peut être affectée. Avis favorable à l'amendement, d'autant que la ministre s'est engagée à ce que ces sommes aillent bien à l'aide aux victimes.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - De toutes les forces de mon petit corps !

L'amendement n°90 est adopté.

L'article 18 quater, modifié, est adopté.

ARTICLE 18 QUINQUIES

Mme la présidente.  - Amendement n°20, présenté par M. Hyest et les membres du groupe UMP.

Supprimer cet article.

M. Christophe-André Frassa.  - Nous sommes opposés à la réduction de deux à un du nombre d'expertises médicales nécessaires à la suspension de peine des détenus. Nombre d'expertises uniques, faites par les médecins des établissements, ont conduit à des résultats inacceptables.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.  - Avis mitigé. J'étais favorable à ce que l'on conserve la rédaction de la proposition de loi Lipietz, adoptée à l'unanimité. L'UMP a proposé une autre rédaction, qui en dénature le texte...

M. Christophe-André Frassa.  - Qui l'améliore !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.  - Il y a eu partage de voix. Donc sagesse. La sagesse consistant, pour moi, à rejeter l'amendement...

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Même avis.

Mme Esther Benbassa.  - La double expertise est inutile, les associations l'ont dit lors des auditions. Pourquoi revenir sur le texte de Mme Lipietz que nous avons adopté à l'unanimité ?

L'amendement n°20 n'est pas adopté.

L'amendement n°55 rectifié n'est pas défendu.

Mme la présidente.  - Amendement n°93, présenté par le Gouvernement.

I. - Alinéa 2

Après les mots :

état de  santé

insérer les mots :

, physique ou mental,

II. - Alinéa 3

Supprimer les mots :

, lorsque le pronostic vital de la personne est engagé,

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Cet amendement indique expressément que le trouble susceptible de motiver la mise en liberté pour raison médicale peut être physique ou mental. Il précise également que la notion d'urgence ne se limite pas aux cas dans lesquels le pronostic vital est engagé.

Avec Mme Touraine, nous avons mis en place des groupes de travail « Santé Justice », qui doivent notamment évaluer l'application de la loi Kouchner sur les droits des malades. Un rapport nous a été rendu la semaine dernière, dont certaines des préconisations s'appuient sur le texte relatif à la mise en liberté pour raisons médicales que le Sénat a adopté à l'unanimité. Cet amendement précise les choses. L'état de santé est parfois incompatible avec la poursuite de la détention. L'État a déjà été condamné pour conditions d'emprisonnement indignes.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.  - Favorable.

L'amendement n°93 est adopté.

L'article 18 quinquies, modifié, est adopté.

ARTICLE 18 SEXIES

Mme la présidente.  - Amendement n°94 rectifié, présenté par le Gouvernement.

Rédiger ainsi cet article :

I.  -  L'article 720-1-1 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, après les mots : « état de santé », sont insérés les mots : « , physique ou mental, », et les mots : « d'hospitalisation des personnes détenues en établissement de santé pour troubles mentaux » sont remplacés par les mots : « des personnes détenues admises en soins psychiatriques sans leur consentement » ;

b) À la première phrase du deuxième alinéa, les mots : « deux expertises médicales distinctes établissent de manière concordante » sont remplacés par les mots : « une expertise médicale établit » ;

c) À la seconde phrase du deuxième alinéa, les mots : « , lorsque le pronostic vital est engagé, » sont supprimés ;

d) Au troisième alinéa, avant les mots : « la durée de détention », sont insérés les mots : « en cas d'urgence ou lorsque » ;

e) Après le quatrième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Dans les cas prévus par les deux précédents alinéas, le condamné peut être régulièrement représenté par son avocat lorsque son état de santé fait obstacle à son audition ; le débat contradictoire se tient alors au tribunal de grande instance.»

II.  -  L'article 729 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque le condamné bénéficie d'une mesure de suspension de peine sur le fondement des dispositions de l'article 720-1-1, la libération conditionnelle peut être accordée sans condition quant à la durée de la peine accomplie si, à l'issue d'un délai de trois ans après l'octroi de la mesure de suspension, une nouvelle expertise établit que son état de santé, physique ou mental, est toujours durablement incompatible avec le maintien en détention et si le condamné justifie d'une prise en charge adaptée à sa situation. »

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Nous réécrivons l'article pour tenir compte des conclusions du groupe Santé Justice.

Mme la présidente.  - Amendement n°73 rectifié, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste.

Avant l'alinéa 1

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  À la première phrase du premier alinéa de l'article 720-1-1 du code de procédure pénale, les mots : « hors les cas d'hospitalisation des personnes détenues en établissement de santé pour troubles mentaux » sont remplacés par les mots : « hors les cas des personnes détenues admises en soins psychiatriques sans leur consentement ».

Mme Esther Benbassa.  - Le rapport du groupe de travail « Santé Justice » préconisait de modifier l'article 720-1-1 du code de procédure pénale, qui a été interprété comme interdisant l'application de la suspension de peine aux personnes détenues atteintes de troubles mentaux. Telle n'était sans doute pas l'intention du législateur.

Nous réaffirmons que le dispositif s'applique aux personnes atteintes de troubles mentaux dont l'état de santé est incompatible avec la détention, à l'exception des personnes faisant l'objet d'une mesure d'hospitalisation sous contrainte.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.  - Avis favorable à l'amendement n°94 du Gouvernement ; en conséquence, l'amendement n°73 rectifié tombera.

L'amendement n°94 est adopté et l'article 18 sexies est ainsi rédigé.

L'amendement n°73 rectifié devient sans objet.

L'article 19 A est adopté.

ARTICLE ADDITIONNEL

Mme la présidente.  - Amendement n°95 rectifié, présenté par le Gouvernement.

Après l'article 19 A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 803-6 du code de procédure pénale, il est inséré un article 803-... ainsi rédigé :

« Art. 803-...  -  Lorsqu'une juridiction constate qu'en raison du non-respect des délais ou formalités prévus par le présent code, la détention provisoire d'une personne poursuivie est illégale et qu'elle ordonne sa mise en liberté immédiate si elle n'est pas détenue pour une autre cause, elle peut, dans cette même décision, ordonner le placement de la personne sous contrôle judiciaire ou sous assignation à résidence avec surveillance électronique si cette mesure est indispensable pour assurer l'un des objectifs énumérés à l'article 144.

« Si aucune juridiction n'est compétente, le procureur de la République saisit sans délai le juge des libertés et de la détention afin qu'il ordonne la libération immédiate de la personne et, le cas échant, conformément aux dispositions du présent article, son placement sous contrôle judiciaire. »

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Cet amendement tire les enseignements des situations malheureuses où, en raison d'une erreur de procédure, des personnes placées en détention provisoire doivent être libérées. Les juridictions font un travail rigoureux, mais l'erreur est humaine... Dans un des cas les plus récents, un rapport de transmission de fax n'avait pas été repéré et les délais de procédure n'avaient pas été respectés. L'autorité judiciaire étant responsable, une décision de mise sous surveillance judiciaire rigoureuse a été prise rapidement. Pour éviter tout délai, cet amendement autorise la chambre de l'instruction à décider immédiatement de la mise sous surveillance judiciaire.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.  - La commission comprend les arguments du Gouvernement, mais y est totalement défavorable pour des raisons éthiques. Cet amendement pourrait inciter les juridictions à être moins vigilantes sur les délais, la détention provisoire étant déjà trop longue et trop souvent employée.

Enfin, la manière dont cet amendement se combine avec l'article 144-2 n'est pas claire. Avis défavorable.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Dans l'absolu, je conçois qu'on puisse y voir une incitation à une moindre vigilance. Mais le sérieux avec lequel les magistrats exercent leur profession interdit de l'envisager. Plus d'1,2 million de décisions pénales sont émises chaque année ; quand trois erreurs interviennent en une année, il faut s'en émouvoir, certes, et tenter de les rattraper mais les choses doivent être ramenées à de justes proportions.

Nous avons par exemple mis en place un programme de formation des chefs de greffe des établissements pénitentiaires, un métier complexe. Avec cet amendement, nous pourrons réagir rapidement. J'entends votre scepticisme, mais ces quelques cas regrettables - pour lesquels j'envoie toujours l'Inspection générale des services judiciaires afin de prendre la mesure du dysfonctionnement à l'origine du manquement - ne signifient certainement pas que les magistrats et greffiers ne prennent pas leur mission au sérieux.

M. Vincent Capo-Canellas.  - Je voterai contre l'amendement n°95 rectifié. Reste qu'il faut trouver une solution à des situations que l'opinion publique ne comprend pas.

M. Thani Mohamed Soilihi.  - Je suis convaincu par les arguments du rapporteur. Cet amendement risque d'inciter à une moindre vigilance des professionnels. Quand il en va de la liberté des justiciables, instaurer ce qui s'apparente à une session de rattrapage n'est pas acceptable.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.  - Je comprends ce que dit Mme la garde des sceaux, mais nous ne pouvons pas accepter cet amendement un peu saugrenu. Ces cas ont toujours existé ! Pourquoi cet amendement maintenant ?

M. Jean-René Lecerf.  - L'argument de M. Michel est difficilement recevable. Mais il est vrai que ces cas, rarissimes, ont un effet désastreux sur l'opinion. C'est pourquoi je m'abstiendrai.

L'amendement n°95 rectifié n'est pas adopté.

ARTICLE 19 B

Mme la présidente.  - Amendement n°21, présenté par M. Hyest et les membres du groupe UMP.

Supprimer cet article.

M. Jean-René Lecerf.  - Nous nous opposons à la suppression des tribunaux correctionnels pour mineurs, mis en place par une loi très récente. Même si leur bilan n'est pas très concluant pour l'heure, laissons le temps au temps. Une telle mesure relève d'un texte spécifique sur la justice des mineurs. L'ordonnance de 1945 est devenue illisible.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°31 rectifié, présenté par MM. Détraigne, Capo-Canellas, Bockel, Marseille et Roche, Mme Férat, MM. Amoudry, J.L. Dupont et Deneux, Mme Gourault et MM. Zocchetto et Merceron.

M. Vincent Capo-Canellas.  - La question de la délinquance des mineurs ne peut être traitée par petits bouts : il faut revoir globalement l'ordonnance de 1945. La création des tribunaux pour mineurs est récente. En outre, la charge symbolique et la solennité de la procédure devant ces tribunaux favorisent la prise de conscience par le mineur de la gravité de l'acte qu'il a commis.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°96, présenté par le Gouvernement.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Ces tribunaux pour mineurs ont été créés à une époque où l'on cherchait à rapprocher justice des mineurs de justice des majeurs. Le discours politique présentait alors la délinquance des mineurs comme un phénomène massif, en pleine explosion, de plus en plus violent. Les statistiques montrent le contraire. Exit le discours sur les jeunes d'aujourd'hui qui ne sont pas ceux d'hier...

Néanmoins, quand il s'agit de la position que doit tenir la puissance publique, je ne m'en tiens ni à mes convictions, ni à mes élans. J'interroge. Les chefs de juridiction m'ont tous dit vouloir leur suppression : les uns pour des raisons de conviction - pour eux, la justice spécialisée pour mineurs est une spécificité française depuis 1912 ; les autres, pour des raisons pratiques. Les tribunaux pour mineurs ne condamnent pas plus massivement ni plus sévèrement que les tribunaux pour enfants. Le Gouvernement ne souhaite toutefois pas la suppression de cette excroissance procédurale dans ce texte, qui porte sur les délits. Mais, très clairement, je suis pour la suppression de ces tribunaux.

L'ordonnance de 1945 a été prise à un grand moment d'unité nationale, de convergence politique autour de la manière dont la société devait traiter les enfants délinquants.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.  - La commission a fort heureusement rejeté ces trois amendements. Pourquoi remettre à plus tard ce qu'on peut faire aujourd'hui dans un texte correctionnel ? Tous les magistrats sont contre cette juridiction, qui désorganise les tribunaux.

M. Thani Mohamed Soilihi.  - Très bien.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.  - Il faudra tenir bon en CMP. Le Sénat a souvent montré la voie en matière de libertés publiques.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Je suis très attaché comme vous tous au principe selon lequel on est jugé et condamné pour des faits et non des virtualités...

L'ordonnance de 1945 instaure une justice spécifique pour les mineurs car le mineur est un être en devenir. Qui va désespérer du cas d'un jeune ? Je n'ai rien à ajouter à votre magnifique plaidoyer, madame la ministre. Le rapport de Jean-Pierre Michel rappelle l'attachement de notre commission à la spécificité de la justice des mineurs.

Le calendrier du Parlement est très chargé. Il doit y avoir des priorités : la réforme d'ensemble de l'ordonnance de 1945 en est une. Il faut trouver le temps d'en traiter.

Mme Esther Benbassa.  - Bien sûr.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.  - Très bien !

M. Vincent Capo-Canellas.  - Nous devons aborder cette question avec sérénité. J'entends les arguments de fond et les arguments pratiques avancés par Mme la garde des sceaux. Pour autant, il est des territoires dans notre vieille France où la question de la délinquance des mineurs se pose avec une acuité particulière. Je crains, en outre, qu'adopter dans ce texte-ci la suppression des tribunaux correctionnels pour mineurs envoie un mauvais signal aux délinquants : on supprime pour eux et la prison et le tribunal.

M. Thani Mohamed Soilihi.  - La question est importante. Suppression des tribunaux correctionnels pour mineurs ne signifie pas impunité pour les mineurs. Symboliquement, on ne peut pas remettre à demain le dossier de la spécificité de la justice des mineurs.

M. Jean-René Lecerf.  - Je rejoins l'argumentation de M. Capo-Canellas. Les principes essentiels de l'ordonnance de 1945 ont été constitutionnalisés. La loi qui portait création des tribunaux correctionnels pour mineurs a été soumise au Conseil constitutionnel, qui en a reconnu la constitutionnalité. Décider, à dix, à la sauvette, de supprimer de la sorte les tribunaux correctionnels pour mineurs n'est pas convenable.

Mme Cécile Cukierman.  - Notre groupe était opposé à la création des tribunaux correctionnels pour mineurs. Nous aurions souhaité un texte sur la justice des mineurs pour mettre l'ordonnance de 1945 au diapason du XXIe siècle. À défaut, la suppression des tribunaux correctionnels pour mineurs trouve sa place dans ce projet de loi qui tend à individualiser les peines et à reconnaître les spécificités de chacun, et traduit notre désir d'une autre justice.

Plus qu'un symbole, c'est un acte fort de supprimer ces tribunaux correctionnels pour mineurs qui ont été créés, non pour résoudre un problème, mais pour satisfaire l'opinion publique. Le groupe CRC votera contre ces trois amendements de suppression.

M. Philippe Kaltenbach.  - Depuis deux ans, nous constatons l'inefficacité des tribunaux correctionnels pour mineurs. Pourquoi attendre ? Par peur de l'opinion publique ? (Exclamations au centre) Agissons d'autant que c'était l'un des engagements du président candidat François Hollande.

M. Vincent Capo-Canellas.  - Enfin une promesse tenue !

M. Philippe Kaltenbach.  - Le groupe socialiste votera contre ces amendements.

M. Yves Détraigne.  - La gauche nous reprochait de voter des lois de circonstance, au coup par coup, faut-il qu'elle les détricote au coup par coup ? Je préférerais qu'on travaille sur l'ensemble de l'ordonnance de 1945, pour l'adapter aux réalités d'aujourd'hui.

Mme Virginie Klès.  - Pour reprendre l'image du tricot, quand il y a trois rangs de maille tricotés à l'envers, mieux vaut tout reprendre.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Ça, c'est du vécu !

Mme Virginie Klès.  - Faire disparaître les tribunaux correctionnels pour mineurs, un outil peu et mal utilisé, ce n'est pas faire disparaître tout l'arsenal répressif contre la délinquance juvénile. Ayons le courage de faire ce que tous les professionnels nous demandent : supprimons les tribunaux correctionnels pour mineurs.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Oui, il faut remettre de la cohérence dans l'ordonnance de 1945 : tous les professionnels le disent. Nous y travaillons, nous aboutirons bientôt. (M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois, s'en félicite)

Quelques chiffres pour rétablir la réalité sur la délinquance des mineurs, différente du ressenti ou du discours télévisuel. La part des mineurs parmi les personnes interpellées est passée de 20 à 18 % entre 2009 et 2012. Le nombre de mineurs mis en cause par la police a baissé de 12,6 % entre juillet 2011 et juin 2013. Le premier contact avec la police est très dissuasif : 65 % des mineurs interpellés ne récidivent pas. Les faits criminels imputables aux mineurs, représentent moins de 1 % du total. Les atteintes à l'intégrité physique ont baissé de 18 % entre 2010 et 2013, les vols avec violence de 13 %.

Les délinquants ne sont pas de plus en plus jeunes : 4 % des mineurs délinquants seulement ont moins de 13 ans. Non la justice n'est pas laxiste : le taux de réponse pénale est de 93,5 % contre 89 % pour les adultes.

Enfin, les tribunaux pour enfants se montrent sévères, et même davantage en moyenne que les tribunaux correctionnels pour mineurs, avec 61 % de peines de prison ferme ou avec sursis.

Les amendements identiques nos21, 31 rectifié et 96 ne sont pas adoptés.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Je prierai à la commission des lois de me mandater pour demander au Premier ministre l'organisation d'un débat sur la justice des mineurs dans les prochains mois. (Marques d'approbation)

Mme la présidente.  - Amendement n°114, présenté par M. J.P. Michel, au nom de la commission.

I.  -  Alinéa 10

Remplacer le mot :

huitième

par le mot :

neuvième

II.  -  Alinéa 12

Rédiger ainsi cet alinéa :

5° À l'article 8-2, les mots : « soit devant le tribunal correctionnel pour mineurs, » et la deuxième phrase sont supprimés ;

III.  -  Alinéa 17

Rédiger ainsi cet alinéa :

10° Le chapitre III bis est abrogé ;

IV.  -  Alinéa 18

Supprimer cet alinéa.

V.  -  Alinéa 19

Rédiger ainsi cet alinéa :

12° Au deuxième alinéa de l'article 24-5, les mots : « , le tribunal pour enfants ou le tribunal correctionnel pour mineurs » sont remplacés par les mots : « ou le tribunal pour enfants » ;

VI.  -  Alinéas 22 à 24

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

II.  -  Le chapitre Ier bis du titre V du livre II du code de l'organisation judiciaire est abrogé.

L'amendement de coordination n°114, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article 19 B, modifié, est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

Mme la présidente.  - Amendement n°74, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste.

Après l'article 19 B

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Après l'article 116-1 du code de procédure pénale, il est inséré un article 116-2 ainsi rédigé :

« Art. 116-2.  -  Pour les délits dont la responsabilité est fixée par les articles 42 et 43 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, ou par l'article 93-3 de la loi n°82-652 du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle, lorsque le juge d'instruction envisage de procéder à la mise en examen, il peut procéder comme il est dit au présent article, par dérogation aux articles 80-1 et 116 du code de procédure pénale.

« S'il apparaît au cours de la procédure que des indices graves ou concordants justifient la mise en examen de la personne, le juge d'instruction l'informe de son intention par lettre recommandée avec accusé de réception en précisant chacun des faits qui lui sont reprochés ainsi que leur qualification juridique et en l'informant de son droit de faire connaître des observations écrites dans un délai d'un mois. Il peut aussi, par le même avis, interroger la personne par écrit afin de solliciter, dans le même délai, sa réponse à différentes questions écrites. En ce cas, la personne est informée qu'elle peut choisir de répondre auxdites questions directement en demandant à être entendue par le juge d'instruction.

« Lors de l'envoi de l'avis prévu à l'alinéa précédent, la personne est informée de son droit de désigner un avocat. En ce cas, la procédure est mise à la disposition de l'avocat désigné durant les jours ouvrables, sous réserve des exigences du bon fonctionnement du cabinet d'instruction. Les avocats peuvent également se faire délivrer, à leurs frais, copie de tout ou partie des pièces et actes du dossier dans les conditions mentionnées aux quatrième à dernier alinéas de l'article 114 du code de procédure pénale.

« À l'issue d'un délai d'un mois à compter de la réception de l'avis mentionné au deuxième alinéa, le juge d'instruction peut procéder à la mise en examen en adressant à la personne ainsi avisée et à son avocat une lettre recommandée avec accusé de réception selon les modalités prévues aux deux deuxième et troisième alinéas à l'article 113-8 du code de procédure pénale. Il informe à cette occasion la personne mise en examen que si elle demande à être entendue par le juge d'instruction, celui-ci est tenu de procéder à son interrogatoire. »

II.  -  L'article 80-1 du code de procédure pénale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation aux dispositions du présent article, dans le cas de délits dont la responsabilité est fixée par les articles 42 et 43 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, ou par l'article 93-3 de la loi n° 82-652 du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle, l'article 116-2 du code pénal s'applique. »

III.  -  L'article 116 du code de procédure pénale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation aux dispositions du présent article, dans le cas de délits dont la responsabilité est fixée par les articles 42 et 43 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, ou par l'article 93-3 de la loi n°82-652 du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle, l'article 116-2 du code de procédure pénale s'applique. »

Mme Esther Benbassa.  - Les infractions prévues par la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse sont fréquemment poursuivies à la suite de plaintes avec constitution de partie civile qui donnent lieu à l'ouverture d'informations judiciaires, soit parce que la nomination d'un juge d'instruction est nécessaire pour déterminer l'adresse d'un responsable, soit parce que le plaignant choisit délibérément cette voie, plutôt que celle de la citation directe. Perte de temps considérable !

Je sais bien que cet amendement est un cavalier mais je voulais attirer l'attention du Gouvernement.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.  - Mme Benbassa a tout dit : l'amendement est un cavalier. Elle pourra le retirer quand Mme la garde des sceaux lui aura succinctement répondu... (Sourires)

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - J'ai pris note.

L'amendement n°74 est retiré.

L'amendement n°103 n'est pas défendu, non plus que l'amendement n°102 rectifié bis.

ARTICLE 19

Mme la présidente.  - Amendement n°115, présenté par M. J.P. Michel, au nom de la commission.

Alinéa 1

Après les mots :

du code de procédure pénale

insérer les mots :

dans sa rédaction antérieure à celle résultant du II de l'article 6 de la présente loi

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.  - Amendement technique mais de bon sens. L'article 735 du code de procédure pénale doit continuer de s'appliquer dans sa rédaction actuelle pour les personnes dont le sursis a été révoqué de plein droit par une condamnation prononcée antérieurement à l'entrée en vigueur de la présente loi.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Pardon, favorable.

L'amendement n°115 est adopté.

L'article 19, modifié, est adopté.

ARTICLE ADDITIONNEL

Mme la présidente.  - Amendement n°86, présenté par Mme Cukierman et les membres du groupe CRC.

Après l'article 19

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  L'article 706-54 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi modifié :

a) Aux première et seconde phrases, après les mots : « des personnes », il est inséré le mot : « majeures » ;

b) Sont ajoutées deux phrases ainsi rédigées :

« Ces empreintes sont effacées sur instruction du procureur de la République agissant soit d'office, soit à la demande de l'intéressé, lorsque leur conservation n'apparaît plus nécessaire compte tenu de la finalité pour laquelle elles sont enregistrées. Lorsqu'il est saisi par l'intéressé, le procureur de la République informe celui-ci de la suite qui a été réservée à sa demande ; s'il n'a pas ordonné l'effacement, cette personne peut saisir à cette fin le juge des libertés et de la détention, dont la décision peut être contestée devant le président de la chambre de l'instruction. » ;

2°Après la référence : « 706-55 », la fin du deuxième alinéa est ainsi rédigée : « ou à l'encontre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'elle ait commis l'une des infractions mentionnées à ce même article, peuvent faire l'objet, à la demande du juge d'instruction ou du procureur de la République, d'un rapprochement avec les données incluses au fichier. Elles ne peuvent toutefois y être conservées. Il est fait mention de cette décision au dossier de la procédure. » ;

3° Le troisième alinéa est ainsi rédigé :

« Cet article ne s'applique pas aux infractions commises par des salariés ou agents publics, à l'occasion de conflits du travail ou à l'occasion d'activités syndicales et revendicatives, y compris au cours de manifestations sur la voie publique ou dans des lieux publics. » ;

4° Après le mot : « également », la fin du quatrième alinéa est ainsi rédigée : « , de manière distincte, les empreintes génétiques recueillies à l'occasion des procédures de recherche des causes de la mort ou de recherche des causes d'une disparition prévues par les articles 74, 74-1 et 80-4. » ;

5° Les 1° et 2° sont abrogés.

II.  -  L'article 706-55 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Au 2°, la référence : « 222-18 » est remplacée par la référence : « 222-16 » ;

2° Au 3°, la référence : « 311-1 » est remplacée par la référence : « 311-5 » et les références : « 322-1 et 322-14 » sont remplacées par les références : « 322-5 à 322-11-1 ».

III.  -  Le III de l'article 706-56 du code de procédure pénale est abrogé.

IV.  -  Après l'article 16-11 du code civil, il est inséré un article 16-11-... ainsi rédigé :

« Art. 16-11... - Un fichier national, placé sous le contrôle d'un magistrat, est destiné à centraliser les empreintes génétiques recueillies à l'occasion des recherches aux fins d'identification, prévues par l'article 16-11, à l'exception de celles des militaires décédés à l'occasion d'une opération conduite par les forces armées ou les formations rattachées.

« Les empreintes génétiques recueillies dans ce cadre sont effacées sur instruction du procureur de la République, agissant soit d'office, soit à la demande des intéressés, lorsqu'il est mis fin aux recherches d'identification qui ont justifié leur recueil. Les empreintes génétiques des ascendants, descendants et collatéraux des personnes dont l'identification est recherchée ne peuvent être conservées dans le fichier que sous réserve du consentement éclairé, exprès et écrit des intéressés.

« Les empreintes génétiques conservées dans ce fichier ne peuvent être réalisées qu'à partir de segments d'acide désoxyribonucléique non codants, à l'exception du segment correspondant au marqueur du sexe.

« Un décret en Conseil d'État, pris après avis de la commission nationale de l'informatique et des libertés, détermine les modalités d'application du présent article. Ce décret précise notamment la durée de conservation des informations enregistrées. »

Mme Cécile Cukierman.  - Depuis le début, on parle de réinsertion et de droit à l'oubli. Le fichage génétique à durée indéterminée y fait obstacle.

C'est important, y compris pour les militants syndicaux ? Nous n'oublions pas les Cinq de Roanne condamnés pour refus de prélèvement...

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.  - Je comprends le but. Cependant, vous remplacez le délai de quarante ans par la notion de durée de conservation « nécessaire ». Cette formulation imprécise ouvre la voie à toutes les interprétations, y compris les pires. Retrait ?

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Je salue votre constance. Je me souviens de votre proposition de loi qui a eu un parcours chaotique et cahoteux. Nous avions déjà discuté cette question lors du débat sur les scellés. Deux décrets sont sur le point d'aboutir, préparés en liaison avec le ministère de l'intérieur. Il faut aussi travailler sur les infractions concernées. Poursuivons nos travaux de manière coordonnée. Retrait ?

Mme Cécile Cukierman.  - Le groupe CRC est prêt à travailler avec vous. Imprécision pour imprécision, j'aurais aimé en savoir plus sur la date de publication des décrets.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Ah les dates ! Je ne les retiens plus, à la différence des chiffres.

Mme Cécile Cukierman.  - Que tous les députés qui ont été élus en se disant de gauche se rassemblent pour adopter la loi d'amnistie pour les militants syndicaux, après l'avoir renvoyée en commission et que le Gouvernement se montre aussi persuasif qu'en d'autres circonstances ! Je retire mon amendement.

L'amendement n°86 est retiré.

ARTICLE 20

Mme la présidente.  - Amendement n°122, présenté par le Gouvernement.

A. - Alinéa 1

Remplacer les mots :

Les articles 7 à 10

par les mots :

Les articles 7, 8, 9 et 10

B. - Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :

III. - L'article 11 bis de la présente loi entre en vigueur le premier jour du sixième mois suivant sa promulgation.

IV. - Hors les cas prévus par les I, II et III du présent article, les dispositions de la présente loi entrent en vigueur un mois après sa promulgation.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Ce sont des dispositions pratiques pour une mise en oeuvre efficace du texte : nous reportons de quelques mois l'entrée en vigueur de diverses dispositions.

Mme la présidente.  - Amendement n°116, présenté par M. J.P. Michel, au nom de la commission.

Alinéa 1

Remplacer les références :

7 à 10

par les références :

7 bis et 7 ter

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.  - Je suggère à la ministre de retirer son amendement, compte tenu de ce que nous avons fait de la contrainte pénale la peine de référence : elle sera d'application immédiate.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - On pourrait jouer sur le temps de publication des délais. Je m'y refuse, considérant que cela revient à décrédibiliser le travail parlementaire. Mieux vaut que je vous demande un délai qui se justifie pour des raisons pratiques : il faut adapter les Spip. Avis défavorable à l'amendement n°122.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.  - En me contraignant à m'expliquer vous allez provoquer un frisson dans l'hémicycle. Si la contrainte pénale n'est pas applicable immédiatement, toutes les personnes emprisonnées pour des délits qui tombent sous le coup de cette nouvelle peine devront être purement et simplement libérées. La contrainte pénale doit se substituer immédiatement à la peine de prison.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - C'est logique et clair.

L'amendement n°122 n'est pas adopté.

L'amendement n°116 est adopté.

L'article 20, modifié, est adopté.

ARTICLE 21

Mme la présidente.  - Amendement n°117, présenté par M. J.P. Michel, au nom de la commission.

Rédiger ainsi cet article :

I.  -  Les articles 1er à 11 quater, les articles 13 et 14, le I de l'article 15, les articles 15 sexies à 18 ter, les I, II, III et VI de l'article 18 quater, les articles 18 quinquies à 20 sont applicables aux îles Wallis et Futuna, en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie.

II.  -  Les articles 12 et 12 bis, le II de l'article 15, l'article 15 quinquies et le IV de l'article 18 quater sont applicables en Polynésie française.

III.  -  Les articles 12, 12 bis et 15 quinquies sont applicables en Nouvelle-Calédonie.

IV.  -  Le code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :

1° Le 3° de l'article L. 155-1 est complété par la référence : « et L. 132-16 » ;

2° L'article L. 155-2 est complété par un 9° ainsi rédigé :

« 9° À l'article L. 132-16, les mots : « ou, le cas échéant, du conseil intercommunal ou métropolitain de sécurité et de prévention de la délinquance, » sont supprimés. » ;

3° Au 3° de l'article L. 156-1, la référence : « et L. 132-14 » est remplacée par les références : « , L. 132-14 et L. 132-16 » ;

4° L'article L. 156-2 est complété par un 11° ainsi rédigé :

« 11° À l'article L. 132-16, les mots : « ou, le cas échéant, du conseil intercommunal ou métropolitain de sécurité et de prévention de la délinquance, » sont supprimés. »

V.  -  L'article 99 de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire est ainsi modifié :

1° Au 2° du I, la référence : « de l'article 3 » est remplacée par les références : « des articles 2-1 et 3 » ;

2° Au II, la référence : « 3 » est remplacée par la référence : « 2-1 » ;

3°Après le II, il est inséré un II bis ainsi rédigé :

« II bis. -  Pour l'application de l'article 2-1 en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, le troisième alinéa est ainsi rédigé :

« "Des conventions entre l'administration pénitentiaire et les autres services de l'État, les communes, les associations et d'autres personnes publiques ou privées définissent les conditions et modalités d'accès des personnes condamnées aux droits et dispositifs mentionnés au deuxième alinéa en détention. Les autres collectivités territoriales peuvent participer à la conclusion de ces conventions". »

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.  - Amendement de coordination pour les DOM et TOM.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.  - Favorable, évidemment.

L'amendement n°117 est adopté et l'article 21 est ainsi rédigé.

L'article 22 est adopté.

Interventions sur l'ensemble

M. Yves Détraigne .  - Lors de la discussion générale, le groupe UDI-UC avait clairement affiché sa volonté de dialoguer. Nous n'étions pas opposés à la contrainte pénale dans la version proposée par le Gouvernement. En revanche, nous avons dit notre hostilité à plusieurs modifications apportées par la commission des lois. Nous ne voulons pas d'une justice au service de l'idéologie, nous voulons d'une justice au service de la société. L'article 8 ter, qui supprime la peine de prison pour certains délits, y compris en cas de récidive, a été maintenu, contre l'avis du Gouvernement qui soutenait notre amendement de suppression. Cela rompt l'équilibre du texte et porte atteinte à la libre appréciation du juge. Pour reprendre les propres termes de Mme la ministre, cet article procède d'une confusion sur l'objectif et le contenu de la contrainte pénale.

Nous étions également opposés à la suppression de la rétention de sûreté. Fort heureusement, nous avons été entendus. Sans doute faudra-t-il revenir sur son régime dans les prochaines années.

Finalement, au terme de nos débats, le texte est très proche de celui de la commission, laxiste à bien des égards. C'est à se demander à quoi ont servi nos débats en séance plénière. Le groupe UDI-UC votera contre ce texte. (Applaudissements au centre)

Mme Catherine Tasca .  - Les débats n'ont pas toujours été très apaisés, comment pouvaient-ils l'être sur des sujets aussi délicats ? Dignité de la personne, respect des libertés, nous retrouvons là des thèmes chers au Sénat qui expliquent le ton passionné de nos débats. Je redis que nous regrettons la procédure accélérée. Toutefois, j'ai une lecture fort différente de M. Détraigne, de la presse et de certains députés : ce texte est loin d'être déraisonnable.

Peut-être a-t-il un temps d'avance sur l'opinion publique... Nous aurions pu en rester au statu quo, certes. Nous nous serions ainsi retrouvés dans l'impasse, devant un mur de délinquance, contre lequel nous aurions continué à nous casser la tête. Pensons aux générations futures car ce sont elles qui paieraient le prix de notre pusillanimité. À nous de profiter du temps qui nous sépare de la CMP pour nous entendre.

Le groupe socialiste votera ce texte (Applaudissements à gauche)

M. Jean-René Lecerf .  - Je l'ai souvent dit, le Sénat a un rôle particulier à jouer dans deux domaines : la défense des collectivités territoriales - sur ce point, nous devrons attendre un peu - et celle des libertés. Rappelez-vous la saisine du Conseil constitutionnel par le président Poher sur la liberté d'association.

Quel dommage que la procédure accélérée ! Nous n'avons cependant pas à rougir de notre travail. Le groupe UMP à mon unique exception, votera contre ce projet de loi, craignant qu'il n'envoie un message de laxisme. Pour ma part, je ne voterai pas contre car la contrainte pénale, une invention de Pierre-Victor Tournier, est une idée intéressante, qui favorisera la prévention de la récidive. Le projet de loi, à bien des égards, prolonge la loi pénitentiaire de 2009, ce dont je me félicite.

Je ne voterai pas non plus pour ce texte car je regrette en revanche le mélange des genres auquel s'est livrée la majorité, en traitant ici de la rétention de sûreté et des tribunaux correctionnels pour mineurs. La suppression de ces derniers ne renforcera pas l'efficacité des sanctions pénales, objectif affiché de ce projet de loi.

Mme Cécile Cukierman .  - Je regrette la procédure accélérée comme le rappel à l'ordre du président de la République sur l'équilibre trouvé à l'Assemblée nationale qu'il aurait fallu préserver. Où est la séparation des pouvoirs, chère à Montesquieu, sur laquelle est fondée la République.

Ce texte ambitieux interroge le sens de la peine, qu'elle soit effectuée en milieu ouvert ou fermé. Il interroge également le parcours du détenu, jusqu'à sa sortie et sa réinsertion... La contrainte pénale, je veux le souligner, ne concernera que les petits délits du quotidien, qui gênent beaucoup mais ne sont que de petits délits. Elle évitera la prison, une école de la récidive.

Je vois dans ce texte une incitation à approfondir la réflexion sur une justice du XXIe siècle, qui ne soit plus le bras armé d'une majorité politique. Le groupe CRC le votera (Applaudissements à gauche)

M. Vincent Capo-Canellas .  - La prison est parfois un mal nécessaire. Elle aggrave peut-être la récidive mais la contrainte pénale sera-t-elle plus efficace ? Il faudra le vérifier... Mal définie, cette nouvelle peine risque d'être ou trop faible ou trop forte.

Merci au président et au rapporteur de la commission des lois, à madame la ministre pour nos échanges. (Applaudissements sur le banc de la commission)

Mme Esther Benbassa .  - Les écologistes voteront ce texte qui, je l'espère, changera notre justice. Pour cela, la contrainte pénale doit devenir une peine à part entière et faire l'objet de pédagogie. Déjà, une certaine presse crie au laxisme. Nous saluons également la suppression des tribunaux correctionnels pour mineurs.

Le texte n'oublie nullement les victimes, qu'il protège au contraire. Ce n'est pas seulement une réforme pénale, mais aussi sociétale, qui resserrera le lien social ! Bref, un véritable texte de gauche. Qui pourra dire dorénavant que le Sénat manque d'audace et de liberté ? (Applaudissements à gauche)

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission .  - Je salue l'abnégation de M. Lecerf : il a exposé le point de vue de son groupe, que lui-même ne partageait pas.

On reproche beaucoup la procédure accélérée. N'oublions pas la conférence de consensus, suivie de la conférence à l'Unesco ; grâce à ces travaux préparatoires exceptionnels, nous aboutissons à un texte novateur qui crée une alternative à la prison. Notre vision est équilibrée. Puisque nous sommes contre l'impunité, nous sommes pour la diversité des peines. Mme Cukierman a dit souhaiter que la CMP soit un approfondissement et non un simple compromis. Nous espérons de tout coeur trouver un accord avec les députés : on a assez parlé de cette loi, il faut maintenant qu'elle s'applique, dans l'intérêt des justiciables et de la société. (Applaudissements à gauche)

Le projet de loi est adopté.

(Applaudissements à gauche)

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux .  - Sans vouloir abuser de votre patience, je tiens à vous remercier chaleureusement pour la qualité de nos échanges. Nous avons eu des échanges de fond avec l'opposition. Le Sénat a enrichi le projet de loi, en commission puis en séance, même si je regrette un ou deux votes. La colonne vertébrale de ce texte est renforcée. Il a pour objet de raffermir le contrat social, comme toutes les politiques que nous conduisons. L'acte délinquant brise le pacte républicain, nous avons le devoir de créer les conditions de la réinsertion des condamnés et de la restauration du corps social.

Monsieur Lecerf, vous avez évoqué à juste titre Pierre-Victor Tournier, qui a eu un rôle particulier dans la genèse de ce texte.

Merci de votre lucidité. La délinquance, ce n'est pas des statistiques. Chaque acte de délinquance blesse la société. Nous voulons être efficaces et lutter réellement contre la récidive, non plus seulement en la sanctionnant plus sévèrement, mais en la prévenant.

Au cours de mon tour de France, j'ai rencontré des personnes qui avaient de fortes préventions contre ce texte, qui avaient été endoctrinées sur notre prétendu « laxisme ». Chaque fois, le dialogue a permis de rassurer. Ce pays est celui des Lumières, de l'émancipation de l'individu par la raison. Des mesures ont été prises dans le passé pour lutter contre la récidive ; sincèrement, je n'en doute pas : nous n'avons pas de temps à perdre en jugements de valeurs. Mais les faits sont là : ces réformes ont été inefficaces.

Le laxisme est un mantra qui finira par s'évanouir, grâce à la « douce violence de la raison » dont parlait Brecht. Écoutons Wittgenstein, qui invitait à lutter contre l'ensorcellement de notre entendement par le moyen du langage. (Applaudissements à gauche)