SÉANCE

du mardi 17 février 2015

66e séance de la session ordinaire 2014-2015

présidence de M. Claude Bérit-Débat, vice-président

Secrétaires : M. François Fortassin, Mme Valérie Létard.

La séance est ouverte à 09 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Questions orales

M. le président.  - L'ordre du jour appelle dix-neuf questions orales.

Indemnisation chômage des recrutés locaux

M. Richard Yung .  - Ma question porte sur l'indemnisation du chômage des agents non titulaires de droit local recrutés dans les administrations françaises à l'étranger.

Ils jouent un rôle important dans nos postes diplomatiques, instituts culturels et écoles. On estime leur nombre à 4 700 ou 4 800. À leur retour en France, ces agents se voient refuser une allocation chômage, ce que le juge administratif a jugé légal. Le Défenseur des droits, en février 2013, a considéré en revanche que cette différence de traitement n'est pas justifiée. Il a recommandé au gouvernement qu'ils puissent « bénéficier d'une protection sociale comparable à celle octroyée aux agents non titulaires de droit public ou aux salariés du secteur privé en poste à l'étranger. »

Aucune suite n'a été donnée à sa recommandation, non plus qu'à un télégramme diplomatique de septembre 2009 qui propose que ces agents puissent faire valoir leur droit à l'allocation chômage dans les douze mois qui suivent leur retour.

Le ministre des affaires étrangères, dans sa réponse à ma question écrite publiée le 21 août 2014, annonçait une concertation interministérielle sur le sujet. Il souhaitait « se conformer aux recommandations du Défenseur des droits et faire évoluer le dispositif d'indemnisation chômage ». À-t-elle eu lieu ? Qu'entend faire le gouvernement pour clarifier la situation ?

M. Matthias Fekl, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger .  - Veuillez excuser M. Fabius. L'État emploie de nombreux agents à l'étranger. Certains sont recrutés dans les conditions du droit local. Ils contribuent au bon fonctionnement de nos services publics. Lorsque ces personnes continuent de résider à l'étranger à la fin de leur contrat, elles relèvent de l'indemnisation chômage du pays concerné. Nous veillons à ce que les services employeurs s'acquittent des contributions.

Lorsque ces agents rentrent en France, la situation est plus compliquée : ils n'ont en effet pas droit à l'allocation temporaire d'attente, ni à l'allocation d'aide au retour à l'emploi, réservée aux agents détachés ou expatriés. Cette situation n'est guère équitable, comme l'a relevé le Défenseur des droits.

Le ministère des affaires étrangères souhaite définir des modalités de soutien et d'accompagnement du retour à l'emploi pour ces agents. Nous y travaillons, avec les services du ministère de la fonction publique, pour apporter une réponse dans les meilleurs délais.

M. Richard Yung.  - Merci de cette réponse qui montre que le gouvernement cherche une réponse. La réunion interministérielle a-t-elle eu lieu puisque c'est d'elle que jaillira la lumière ? On pourrait imaginer un dispositif d'auto-assurance ou une convention de gestion, ou autoriser ces agents à adhérer personnellement au régime français d'assurance-maladie.

Yézidis et Chrétiens persécutés par Daech

M. Christian Cambon .  - Depuis des mois, Daech sème la terreur, en Irak et en Syrie notamment. La France a beaucoup oeuvré pour les communautés chrétiennes, persécutées, on l'a encore vu dernièrement. Je veux attirer l'attention sur les massacres des Yézidis : plus de 5 000 femmes et enfants sont aux mains des djihadistes, en tant qu'esclaves, violées, converties de force à l'islam, exécutées si elles refusent de se marier avec les combattants de Daech. 150 femmes, dont certaines enceintes, ont connu ce sort. Beaucoup de ces femmes sont mineures. Les enfants yézidis sont utilisés comme boucliers humains et subissent sévices et torture. Plus de 500 000 Yézidis ont fui face aux attaques de Daech dans le nord de l'Irak, la plupart vers le Kurdistan. La situation humanitaire s'aggrave, l'hiver n'arrange pas les choses. Avant-hier, 21 chrétiens coptes ont encore été assassinés par Daech en Lybie.

Un bilan de ces atrocités est-il en cours, afin que les auteurs de ces crimes de guerre et de crimes contre l'humanité puissent être poursuivis devant la Cour pénale internationale ? Il est temps de combattre l'État Islamique, avec les armes mais aussi avec nos valeurs. Que peut-on faire, monsieur le ministre, sur le plan humanitaire ?

M. Matthias Fekl, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger .  - Vous avez rappelé l'horreur de l'actualité, les nombreuses persécutions contre les chrétiens d'Orient. La France les condamne. Elle est aux avant-postes de la mobilisation internationale. Laurent Fabius s'est rendu à Erbil dès le 10 août dernier afin de superviser la livraison d'aide humanitaire. Le président de la République s'est aussi rendu à Bagdad et à Erbil le 12 septembre 2014. Nous sommes déterminés à lutter contre Daech sur tous les fronts, en luttant contre les filières de financement, en apportant une aide aux populations civiles - la France a débloqué 500 millions d'euros à cette fin - en soutenant la recherche d'une solution politique, en accueillant les réfugiés irakiens qui le demandent - plus de 1 000 à ce jour.

Une session spéciale du Conseil des droits de l'homme de l'ONU a mobilisé la communauté internationale face aux crimes contre l'humanité commis par Daech en Irak. Une mission remettra ses conclusions en mars. L'Irak devra mettre en place un système judiciaire adapté pour les juger. Comme il n'a pas ratifié le pacte de Rome, il est difficile d'envisager un jugement devant la Cour pénale internationale, sauf pour les ressortissants de pays signataires. Nous sommes mobilisés pour lutter contre la barbarie.

M. Christian Cambon.  - Merci. Peut-être y a-t-il un déficit d'action au niveau de l'Union européenne ? N'oublions pas le drame que vivent ces populations.

Liaison ferroviaire Paris-Cambrai

M. Jacques Legendre .  - La SNCF a-t-elle entrepris de faire disparaître la liaison ferroviaire entre Paris et l'agglomération cambrésienne ? La liaison TGV a déjà été supprimée par la SNCF au motif d'un nombre insuffisant de voyageurs. Il nous reste une liaison Intercités par jour : la SNCF en a changé le cadencement. Le train part désormais à 5 h 40 du matin... - horaire qui n'enchante guère les voyageurs... et, de surcroît, le train n'est pas sûr d'arriver à l'heure à Paris ! Le 22 décembre, il est resté une heure à Saint-Quentin, à quelque 30 km de son point de départ, car la locomotive était dans un tel état qu'il a fallu l'arrêter... Régulièrement, on constate une heure ou une heure trente de retard. Pourquoi l'attitude méprisante de la SNCF à l'égard des usagers de ce train ? C'est un service public, qui doit faire vivre l'égalité des territoires. Les voyageurs sont ses clients, mais d'abord ses financeurs ! Dans le cas qui me préoccupe : il ne faudrait pas, en modifiant les horaires, en dégradant la qualité du service, faire fuir les voyageurs, puis arguer de leur nombre insuffisant pour supprimer la ligne. Nous ne voulons pas aller de Cambrai à Paris en autocar, monsieur le ministre.

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche .  - L'État, autorité organisatrice des trains d'équilibre du territoire depuis 2011, comme les régions Nord-Pas-de-Calais et Picardie, autorités organisatrices des TER, sont attachés à la qualité des liaisons ferroviaires. Les régions Picardie et Nord-Pas-de-Calais sont étroitement associées à la SNCF pour faire vivre cette liaison. Les horaires du train partant le matin de Cambrai ont été changés, c'est vrai.

Les voyageurs arrivent ainsi à Paris avant 8 heures, ou 9 heures en cas de correspondance. Les incidents que vous relatez témoignent des difficultés rencontrées par la SNCF. La convention sur les trains Intercités intègre un volet qualité, qui devra être réaffirmé.

J'ai confié à une commission de parlementaires, présidée par Philippe Duron, une réflexion sur les TET qui aboutira à une nouvelle convention entre l'État et la SNCF, pour une entrée en vigueur en 2016.

M. Jacques Legendre.  - Votre réponse est bien administrative... Est-il normal que le train ne parte pas le 25 décembre au soir, parce qu'un membre du personnel n'est pas présent - et ce, plusieurs années de suite ? Non, en dépit des « éléments de langage » de la SNCF, il n'y a pas de « qualité » sur cette liaison, monsieur le ministre. Nous ne voulons pas aller à Paris en autocar ! Si la SNCF s'emploie à rendre cette liaison infernale, c'est ce qui se passera... J'espère que vous allez oeuvrer pour une vraie amélioration, monsieur le ministre, sinon je ne manquerai pas de vous interpeller à nouveau.

Liaison ferroviaire Paris-Le Havre

Mme Agnès Canayer .  - Ma question porte sur la ligne Paris-Rouen-Le Havre. Aujourd'hui, il faut 2 h 16 pour rallier Le Havre à Paris -  contre une heure pour Paris-Lille  - et que des publicités vantent un Paris-Bordeaux en 2 heures en 2017...

M. Jacques Legendre.  - Eh oui !

Mme Agnès Canayer.  - La vétusté des rames entraîne quotidiennement des arrêts en pleine voie. Aucun investissement depuis quarante ans, à part des travaux d'extrême urgence... Le territoire normand évolue, la réorganisation des régions va faire de la Normandie la sixième région de France. Ce sera une porte d'entrée et de sortie de notre territoire, d'où la nécessité d'infrastructures adaptées. La ligne nouvelle Paris-Normandie, actée par RFF, est indispensable. La SNCF a une dette envers la Normandie, a reconnu Guillaume Pépy, président de la société nationale. La nouvelle commission sur l'avenir des TET doit rendre ses conclusions fin 2015. Les usagers normands peuvent-ils attendre une vraie amélioration ? Pouvez-vous confirmer que la ligne nouvelle Paris-Normandie est bien un chantier prioritaire ? Pourrai-je un jour faire Le Havre-Paris en 1 h 40, comme promis ?

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche .  - Il est vrai que les difficultés sont réelles, en partie à cause du goulet d'étranglement entre Poissy et Vernouillet. Dans l'attente des nouvelles infrastructures, l'État est attentif à la qualité du service proposé aux usagers. La ponctualité s'est améliorée, mais des travaux, des difficultés de maintenance perturbent le trafic, et on constate une dégradation depuis septembre 2014. L'État a demandé à la SNCF d'améliorer cette situation.

La saturation de l'axe Paris-Normandie rend prioritaire la réalisation de la ligne nouvelle Paris-Normandie. En 2016, sera choisie une zone de passage préférentielle. RFF a lancé les premiers appels d'offre, un dispositif de gouvernance a été mis en place. La commission nationale du débat public a validé le projet. Les collectivités locales seront associées aux différentes étapes du processus, le grand public sera informé et associé, via un site internet dédié et des réunions publiques.

Mme Agnès Canayer.  - Cette semaine encore, trois trains ont été supprimés sur cette ligne. Les usagers sont exaspérés. Les améliorations promises ne sont pas là. Nous attendons beaucoup de la nouvelle ligne qui devra aller jusqu'au port du Havre, pour améliorer aussi le fret.

Ruisseaux couverts des Cévennes

M. Simon Sutour .  - Quatre communes du Gard : Bessèges, Molières-sur-Cèze, Gagnières et Robiac-Rochessadoule sont concernées par le problème des « ruisseaux couverts ».

Pour répondre aux nécessités de l'exploitation industrielle du charbon au début du XIXe siècle, les compagnies minières ont construit de longs tunnels recouvrant les ruisseaux, afin de pouvoir remblayer les fonds de vallées encaissées, tout en laissant s'écouler l'eau. Les plateformes ainsi créées ont non seulement permis d'accueillir les carreaux de mine et les infrastructures liées à l'activité minière mais aussi, dans un territoire jusque-là rural, des villages et villes ont été bâtis, en quelques décennies, en partie sur ces plateformes avec leurs corons, que l'on appelle, dans les Cévennes, « cités » ou « casernes », leurs écoles, leurs salles des fêtes, leurs églises et même leurs routes. Certains tunnels, véritables oeuvres d'art, présentent d'impressionnantes proportions de dix mètres sur douze et ont été parfaitement dimensionnés selon l'importance du débit des ruisseaux, volumineux et puissant au moment des épisodes que l'on n'appelait pas encore cévenols. Or le transfert de propriété par des cessions foncières de l'État en direction des communes ou de particuliers à partir de la fin des années 1960 a conduit à un arrêt de l'entretien de ces ouvrages.

Au regard du droit français, un propriétaire est responsable du sous-sol au droit de ses limites. Des personnes publiques ou privées sont donc responsables d'une portion de tunnel recouvrant un ruisseau. Or, celles-ci ne le savent pas, pour la plupart. De ce fait, les tunnels ont sombré, peu à peu, dans l'oubli, jusqu'au 10 novembre 2012, date de l'effondrement de la clef de voûte d'un des tunnels sur le Rieusset, créant un cône de quarante mètres de diamètre, en plein coeur du bourg de Rochessadoule. Aujourd'hui, il y a urgence. Une étude conclut à la nécessité d'engager des travaux urgents. Les services de l'État redoutent sur de nombreuses communes de graves accidents, notamment avec la multiplication des épisodes pluvieux intenses.

Les particuliers et les collectivités n'ont pas les moyens financiers de recenser, sécuriser et réparer l'ensemble de ces tunnels.

Il faut que l'État assume cet héritage et intervienne massivement pour venir en aide aux particuliers et aux collectivités concernés.

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche .  - Mme la ministre de l'écologie est très attachée à la prévention des risques. La loi ne confie à l'État certaines des responsabilités des exploitants miniers qu'en cas de défaillances de ceux-ci. Les ruisseaux couverts n'étaient pas directement liés à l'activité minière. Les droits et responsabilités afférents à leur entretien ont été transférés avec la cession des terrains.

Conscient des difficultés, l'État intervient au cas par cas. Les services du ministère ont ainsi expertisé les éventuels risques. Une mission de l'école des mines d'Alès s'est penchée sur la question. Les agences de l'eau peuvent également octroyer des subventions aux collectivités locales concernées.

M. Simon Sutour.  - Je regrette que les services de l'État n'aient pas réellement pris conscience de la gravité de la situation. Ces ouvrages n'étant plus entretenus, les catastrophes vont se multiplier ! Les communes concernées sont très pauvres, les populations ne savent même pas qu'elles vivent au-dessus d'un ruisseau couvert. Il s'agit le plus souvent de retraités des mines qui n'ont guère de ressources et ne peuvent financer des travaux. Il n'y a que la puissance publique qui peut agir en la matière. J'espère que ma question ne restera pas sans suite... on pourrait le regretter !

Drones

M. François Bonhomme .  - Le récent survol de centrales nucléaires par des drones non identifiés a soulevé la question de l'essor de ces nouveaux engins de loisirs, qui font un tabac.

La France a été précurseur en matière de législation dans ce secteur ; l'usage des drones dans la sphère civile est réglementé par deux arrêtés ministériels du 11 avril 2012, le premier concernant la conception des drones, les conditions de leur emploi et les capacités requises des personnes qui les utilisent, et le second précisant les conditions d'utilisation de l'espace aérien par les drones. Par ailleurs, la collecte de données par voie aérienne est régie par le code de l'aviation civile. Enfin, une réglementation particulière s'applique pour le survol des centrales nucléaires mais aussi celui des zones urbaines.

La France va prochainement autoriser officiellement, début 2015, l'utilisation des drones de loisirs. De nouveaux arrêtés reconnaîtront la possibilité de prise de vues de toutes natures dès lors que celle-ci est accessoire au vol et que les vues réalisées ne sont pas exploitées à titre commercial. Ces textes s'inscrivent cependant dans un cadre assez strict qui n'autorise le pilotage de drones pour un usage non professionnel qu'à condition que ces aéronefs sans pilote restent dans le champ de vision de celui qui les dirige et ne dépassent pas une altitude de 150 mètres.

Plusieurs problèmes se posent : la méconnaissance de la réglementation par les utilisateurs de drones de loisirs ; les moyens à disposition de la gendarmerie des transports aériens pour faire respecter la réglementation et identifier les auteurs d'infractions.

Enfin, comme on le voit aux États-Unis, de vives controverses risquent d'apparaître sur la question de la protection de la vie privée. Dès lors que la collecte de données est aérienne, difficile de tracer une limite claire entre ce qui peut être licitement vu et entendu ou pas et ce qui fait partie de la vie privée. La Commission nationale de l'information et des libertés (Cnil) s'est saisie de cette question.

Comment le gouvernement entend-il concilier les nouveaux usages induits par ces innovations robotiques et la nécessité d'un cadre juridique clair, rassurant et protecteur ?

Mme Myriam El Khomri, secrétaire d'État auprès du ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, chargée de la politique de la ville .  - Veuillez excuser M. Cazeneuve. L'usage d'aéronefs sans personne à bord, les drones - qui ne sont pas désignés comme tels dans le code de l'aviation civile, sont régis par deux arrêtés du 11 avril 2012, qui visent à préserver la sécurité des biens et des personnes. Ils ne traitent pas directement de la protection de la vie privée. L'espace aérien est libre en dessous de 150 mètres, pour des aéromodèles de moins de 25 kg, en dehors des agglomérations, des rassemblements de personnes et d'animaux.

Il faut sinon disposer d'une autorisation préfectorale. Dès lors qu'un drone est équipé d'un appareil photo, d'une caméra ou d'un dispositif de géolocalisation, il peut porter atteinte au respect de la vie privée. Une notice d'information sur l'usage des aéromodèles, rédigée en collaboration avec la Cnil, a été largement diffusée ; elle sera fournie lors de la vente de drone. La Cnil se penche sur ce phénomène. À la suite du survol de zones dites sensibles, le premier ministre a lancé une réflexion sur l'évaluation des risques et menaces, la réponse capacitaire à apporter et le champ juridique. Enfin, la proposition de loi renforçant la protection des installations nucléaires que viennent d'adopter les députés prévoit un rapport du gouvernement au Parlement sur le survol des centrales. Le gouvernement entend concilier le développement de ce secteur avec les impératifs de respect de la vie privée et du maintien de l'ordre public.

M. François Bonhomme.  - Ma crainte venait d'une déclaration de Mme Royal, qui estimait que le survol de centrales nucléaires, il y a quatre mois, par des drones ne posait pas de problème de sécurité. Merci pour votre réponse, qui porte essentiellement sur la protection de la vie privée. Je note que la réflexion est en cours.

Revitalisation des centres-bourgs

Mme Anne Emery-Dumas .  - Lors du lancement du programme pour la revitalisation des centres-bourgs, les espaces ruraux étaient enfin pris en compte. Cette idée de dynamisation des campagnes de la Nièvre s'inscrivait parfaitement dans la démarche des « nouvelles ruralités ». Ainsi, trois communes de la Nièvre - La Charité-sur-Loire, Decize et Luzy - ont monté leur dossier et ont répondu à l'appel à manifestation d'intérêt. Or aucune commune d'entre elles n'a été retenue dans la liste des 54 villes sélectionnées, alors que la ville de Luzy était classée première par le préfet du département et deuxième par le préfet de région. C'est un revirement incompréhensible, à la fois au regard des efforts fournis par le département et de la qualité de la candidature de Luzy.

Lors des états généraux des nouvelles ruralités à Nevers, Mme Pinel avait pris l'engagement d'avoir une vigilance particulière sur l'avenir des petites villes, des petites communes et de certains centres-bourgs qui sont essentiels à l'attractivité du monde rural.

Le dossier de la ville de Luzy peut-il être réexaminé et est-il possible d'obtenir d'autres formes de soutien aux projets de dynamisation des territoires les plus ruraux ?

Mme Myriam El Khomri, secrétaire d'État auprès du ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, chargée de la politique de la ville .  - Veuillez excuser Mme Pinel. La pérennisation des centres-bourgs, qui sont des lieux de cohésion sociale, est une priorité. Nombre d'entre eux sont en grande difficulté. 300 centres-bourgs pré-identifiés ont été invités à présenter un programme expérimental ; seuls 54 ont pu être sélectionnés vu l'enveloppe disponible. Face à l'engouement pour ce programme, Mme Pinel a demandé au préfet de porter une attention particulière aux villes non retenues, comme Luzy, Decize ou La Charité-sur-Loire. Le préfet étudiera la possibilité de les faire bénéficier des dispositifs de droit commun comme la dotation d'équipement des territoires ruraux, majorée de 200 millions et du nouveau volet territorial des Contrats de plan État-Régions. Une animation nationale, pilotée par le commissariat général à l'aménagement du territoire et l'ANAH sera accessible aux villes non lauréates. Enfin, les trois villes de votre département bénéficient du prêt à taux zéro (PTZ) pour la rénovation de l'ancien dans les centres-bourgs, c'est un outil important.

Mme Anne Emery-Dumas.  - Merci, même si je regrette que la dotation d'équipement des territoires ruraux, majorée, soit appelée à financer ce type de projet : il ne faudrait pas qu'elle en soit phagocytée...

Gestation pour autrui

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx .  - Le 12 décembre 2014, le Conseil d'État a rejeté le recours de l'association « Juristes pour l'enfance » et validé la circulaire dite « Taubira » du 25 janvier 2013 visant à faciliter la délivrance de certificats de nationalité pour les enfants nés de gestation pour autrui (GPA) à l'étranger.

Par cet arrêt, le Conseil d'État valide de facto les conséquences d'une pratique interdite en France.

Alors que le rapporteur public a qualifié le commerce de la GPA de sordide et cauchemardesque, le Conseil d'État a considéré, s'appuyant sur l'arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme du 26 juin 2014, que la France ne peut plus priver un enfant de sa nationalité française, sous peine de porter une atteinte disproportionnée au respect de sa vie privée.

Or, selon l'article 21-12 1° du code civil, la nationalité est acquise, pour les enfants nés de GPA à l'étranger, de manière automatique au bout de cinq ans de résidence sur le territoire français. Il est donc inutile de créer des règles en ce domaine.

Il est, en revanche, porté une grave atteinte à l'intérêt supérieur de l'enfant.

Une convention de GPA ne peut pas être distinguée de ses effets, puisque la naissance de l'enfant constitue l'objet même et exclusif de cette convention. En validant ses effets, c'est la convention de la GPA en elle-même que l'on valide.

L'interdiction française de recourir à cette pratique ne devient alors qu'une pure pétition de principe, alors qu'elle est sanctionnée d'une peine d'un an d'emprisonnement et d'une amende de 15 000 euros.

Le Premier ministre s'est élevé publiquement, à plusieurs reprises, contre cette pratique indiquant que la « GPA est une pratique intolérable de commercialisation des êtres humains et de marchandisation du corps des femmes ». Entend-il intervenir concrètement contre cette pratique, et comment ?

Mme Myriam El Khomri, secrétaire d'État auprès du ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, chargée de la politique de la ville .  - Veuillez excuser Mme Taubira. L'arrêt du Conseil d'État ne revient nullement à valider la GPA comme vous le dites. En rejetant le recours contre la circulaire du 25 janvier 2013, il ne fait que rechercher un juste équilibre entre le principe d'ordre public d'interdiction de la GPA -  qui demeure et auquel le gouvernement est très attaché  - et le droit de l'enfant à mener une vie familiale normale.

Conformément à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH), le Conseil d'État confirme simplement la distinction entre le droit des parents et celui des enfants. La décision du Conseil d'État ne remet nullement en cause la lutte contre les trafics d'enfants menée par les autorités publiques.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - Qu'on le veuille ou non, le Conseil d'État a consacré une nouvelle avancée vers la GPA en France. Les enfants nés à l'étranger ont la nationalité de leur pays d'origine et peuvent obtenir la nationalité française au bout de cinq ans suivant leur arrivée sur le sol national, conformément au droit en vigueur. La CEDH est sortie de son champ de compétences. Il fallait faire appel. Le gouvernement ne l'a pas fait. C'est là toute son ambiguïté. En employant la méthode des petits pas, la circulaire Taubira préfigure la légalisation de la GPA.

Fracture numérique dans les Alpes-Maritimes

Mme Dominique Estrosi Sassone .  - Alors que le gouvernement encourage l'utilisation du numérique pour faciliter les démarches en ligne et les relations entre les citoyens et l'administration, avec des outils dématérialisés comme le dépôt de pré-plaintes ou le paiement des impôts, certaines communes n'auront plus de connexion au 1er janvier 2015, un comble à l'ère du tout-numérique. La commune du Mas, village de 170 habitants à 77 kilomètres au nord de Nice, est dans ce cas. Le maire craint pour le bon fonctionnement de la mairie et du service public. La raison invoquée pour son retrait part l'opérateur privé est le manque de rentabilité. Aucun autre prestataire ne prendra le relai. La seule alternative est l'installation d'un kit satellitaire, avec un abonnement trop onéreux pour une si petite commune et un débit bien plus lent. Ce n'est pas un cas unique : dix-huit autres communes des Alpes-Maritimes subissent la même situation.

L'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) a déjà mis en demeure deux opérateurs téléphoniques qui avaient deux à trois ans de retard sur leur taux de couverture attendu. Une enquête administrative a également été ouverte sur une zone blanche de montagne, censée disposer de réseau, comme l'a expliqué l'ancien président de l'ARCEP à l'Assemblée nationale le 18 juin 2014.

À l'heure de l'ultra-connectivité, où les campagnes de publicité des opérateurs vantent les mérites du très haut débit, les communes sont loin d'être égales face au numérique. Dans les Alpes-Maritimes, l'uniformisation des connexions a été fixée à l'horizon 2020. Le conseil général s'est engagé à financer les opérations grâce à un schéma départemental d'aménagement numérique, mais les opérateurs doivent joueur leur rôle, conformément aux accords, et proposer des offres aux habitants.

Comment, madame la ministre, comptez-vous encourager les opérateurs à s'implanter dans ces zones ? Allez-vous renforcer les moyens de l'ARCEP pour sanctionner les opérateurs qui se retirent d'une zone géographique ?

Mme Myriam El Khomri, secrétaire d'État auprès du ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, chargée de la politique de la ville .  - Je vous prie d'excuser Mme Lemaire. Pour le plan France très haut débit, nous avons engagé le chantier structurant de nos réseaux numériques de demain. Il nous faut aussi répondre aux besoins du moment et achever de couvrir les zones « blanches ». Aucune des 170 communes de ce programme n'est située dans les Alpes-Maritimes.

Il faut néanmoins assurément répondre aux besoins des communes les plus mal couvertes, y compris dans les Alpes-Maritimes. L'Arcep a ouvert une enquête administrative en mai dernier pour examiner pourquoi le programme précédent de couverture en 3G n'a pas été achevé. La réponse doit passer autant par la couverture fixe que la couverture mobile. Au Mas, un équipement d'Orange sur son réseau cuivre, un multiplexeur, historiquement nécessaire pour le raccordement téléphonique de la commune, gêne la réception du signal ADSL émis dans la commune voisine. La commune du Mas ne fait pas partie du plan de neutralisation d'Orange. La réponse viendra du plan THD avec l'installation de la fibre. Le gouvernement vous encourage à solliciter les services du conseil général des Alpes-Maritimes, tout en restant, avec la mission THD, à votre disposition.

Mme Dominique Estrosi Sassone.  - Bien évidemment, le conseil général s'en est saisi. Ce schéma a un coût, de 140 millions d'euros environ. L'État doit l'accompagner pour achever la couverture des communes non encoure touchées par le THD, aux côtés de la région Paca et de l'Union européenne.

Régime de retraite complémentaire des non-salariés agricoles

M. Henri de Raincourt .  - Une partie des non-salariés agricoles ne comprend les critères retenus par le décret du 16 mai 2014, qui prévoit l'attribution de points gratuits de retraite complémentaire aux conjoints et aides familiaux.

Le dispositif leur paraît d'autant plus injuste que seules 477 000 personnes bénéficient de ce dispositif, au lieu des 557 000 prévues par la loi. L'enveloppe actuelle n'est que de 133 millions d'euros au lieu de 160 millions prévus. Le gouvernement a reconnu cet écart, en apportant une réponse comptable qui ne peut satisfaire les intéressés vu le niveau de leur retraite. Des dispositions plus souples sont-elles envisagées ?

Mme Myriam El Khomri, secrétaire d'État auprès du ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, chargée de la politique de la ville .  - Je vous prie de bien vouloir excuser M. Le Foll.

Un plan ambitieux de revalorisation des retraites agricoles a été décidé dans le cadre de la réforme des retraites, comme s'y était engagé le président de la République. Les aides familiaux et conjoints d'exploitants peuvent bénéficier de l'attribution de points de retraite complémentaire obligatoires. Les conditions d'octroi de ces points ont été présentées en toute transparence avant le débat au Parlement. Elles ont fait partie de l'étude d'impact du projet de loi. Les décrets de mai 2014 y sont conformes. En 2014, la mesure n'est appliquée que sur onze mois. L'estimation de 557 000 bénéficiaires est fondée sur une estimation de 2011, ce qui explique la différence constatée.

M. Henri de Raincourt.  - Merci pour votre réponse. Rien de nouveau, comme prévu. Je reconnais l'aspect positif de cette mesure, tout en souhaitant que vous rappeliez au ministre de l'agriculture que le niveau de retraite de ces personnes est une misère. Tout ce que la société fera pour eux ne sera que justice.

Accès des chiens guides d'aveugles aux lieux publics

M. Claude Dilain .  - En novembre 2014, 67 % des Français considéraient que l'État ne s'impliquait pas assez pour faire reculer les discriminations envers les personnes handicapées, et 71 % reprochaient la même chose aux entreprises.

L'ordonnance du 26 septembre 2014 relative à la mise en accessibilité des établissements recevant du public, des transports publics, des bâtiments d'habitation et de la voirie pour les personnes handicapées a redéfini les modalités de la mise en oeuvre du volet « accessibilité » de la loi du 11 février 2005. Je salue votre implication dans le suivi de ce texte.

L'ordonnance mentionne la nécessité de reconnaître la spécificité de ces chiens guides d'aveugles et d'assistance, c'est-à-dire de sensibiliser les magasins, notamment d'alimentation, et les sociétés de vigiles à cet accès. De nombreuses plaintes concernant l'accès aux magasins continuent à être reçues et il faudra être vigilant sur l'effectivité de cette mesure.

En ce qui concerne les écoles, je souligne les difficultés que rencontrent de nombreux élèves pour y être accueillis avec leur chien d'assistance. Cette question concerne plusieurs ministères, elle est complexe en termes d'accueil et d'aménagement et de sécurité pour les établissements scolaires. Les bénéficiaires de ces chiens devraient néanmoins accéder de façon autonome à leur éducation.

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion .  - Les chiens guides d'aveugles et d'assistance sont admis dans les locaux scolaires, dès lors que l'élève possède une carte d'invalidité, que le chien est inscrit sur une liste ad hoc, que sa présence est considérée comme nécessaire, et qu'il a été formé, j'y insiste, dans un centre agréé.

Il reste des difficultés auprès des conducteurs de taxi et des établissements de santé, ce que l'on comprend au cas où les conditions d'asepsie doivent être respectées pour la dispensation de soins, mais ils doivent pouvoir être admis dans les salles d'attente.

La formation du personnel en contact avec le public inclut un module sur l'accueil des personnes handicapées. Nous lançons ainsi en 2015 une grande campagne dans les médias nationaux.

M. Claude Dilain.  - Il y a un vrai problème d'application des textes. J'espère que cette campagne et votre action rendra superflue une nouvelle interpellation.

Régime social des indépendants

M. Claude Dilain, en remplacement de M. Michel Boutant .  - Les cotisations des travailleurs indépendants sont souvent difficilement compréhensibles, en raison du décalage entre la perception des revenus et le paiement des cotisations. Le revenu des artisans, en particulier, est soumis à une variabilité importante qui peut menacer la trésorerie de certains.

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 a prévu de rapprocher la date de régularisation des cotisations sur les revenus de l'année N-1 sur l'année N, contre N-2 actuellement. La régularisation intervenant sur les deux derniers mois de l'année pourra également être anticipée dès le printemps.

Néanmoins, il n'est pas certain que ces avancées puissent apporter une solution complète aux variations de revenus et encore moins aux situations de cessations d'activité. La pratique de l'autoliquidation, de son côté, ne fait pas forcément l'unanimité. En particulier, les artisans sont inquiets de devoir faire appel aux services d'un expert-comptable et craignent une augmentation des frais. Le RSI et Acoss s'inquiètent d'une baisse du rendement du recouvrement, tout en soulignant la difficulté des contrôles.

Dans leur rapport d'information sur le RSI, MM. Cardoux et Godefroy proposent le recours aux dispositions dérogatoires de l'article L. 131-6-2 du code de la sécurité sociale, afin de calculer le montant des cotisations provisionnelles sur la base du revenu estimé de l'année en cours. Il serait également intéressant de mettre en avant la pratique du provisionnement des cotisations, permettant de lisser les variations de revenus.

Que propose le gouvernement ? Moi-même ancien médecin libéral, je connais bien le problème soulevé par M. Boutant.

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion .  - Le gouvernement est particulièrement attentif à une simplification du régime des indépendants, tout en étant conscient des spécificités de ce régime, en raison des variations de revenus des entrepreneurs d'une année sur l'autre.

La régularisation anticipée se généralisera en 2015. Les travailleurs indépendants pourront ainsi en mesurer les avantages. M. Boutant propose d'aller plus loin, ce qui relève de la responsabilité des entrepreneurs. Il leur revient de choisir la façon dont ils doivent anticiper la régularisation. Imposer un provisionnement systématique attenterait à leur liberté. Nous ferons le bilan de la régularisation anticipée pour l'ensemble des entrepreneurs une fois qu'elle aura été généralisée.

M. Claude Dilain.  - Merci pour votre réponse. Ce régime est extrêmement compliqué, plus on le simplifiera, mieux cela vaudra.

Carte scolaire dans l'Aude

M. Roland Courteau .  - L'annonce de la dotation académique en effectifs avait suscité beaucoup d'espoir pour le département de l'Aude. Pour l'académie de Montpellier, l'augmentation est substantielle : on passe de132 à 214 nouveaux postes. Nous étions persuadés que dans l'Aude, contrairement à 2014, nous allions enfin bénéficier en 2015 d'une prise en compte de la ruralité. La majorité de nos écoles se situent en zones de revitalisation rurale. La moyenne des effectifs par classe y est loin d'être faible. Or l'Aude ne reçoit que 5,5 postes sur les 214 de l'académie. Pis, aucun de ces postes n'ira à l'accueil des élèves supplémentaires à la rentrée 2015. Rien non plus pour les enfants de moins de trois ans. Il faudra donc fermer des classes ou des écoles ici pour en ouvrir là où l'exigeront les besoins les plus importants.

J'avoue ne pas comprendre. Les classes chargées en milieu rural n'existent pas moins que les classes surchargées en milieu urbain. Je souhaite donc que soit réexaminée la dotation en postes du département de l'Aude pour 2015.

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion .  - Je vous prie d'excuser Mme la ministre de l'éducation nationale. Je connais bien votre département.

M. Roland Courteau.  - Je le sais.

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État.  - Vous le savez, le président de la République a fait de la jeunesse la priorité de son quinquennat. La création des 60 000 postes dans l'Éducation nationale qu'il a annoncés se poursuit en 2015. Leur répartition se fait dans un souci de justice. La consultation par département est l'oeuvre des rectorats, en fonction des priorités de la politique de l'Éducation nationale visant à restaurer l'égalité des chances entre tous les élèves. Dans l'Aude, trois postes nouveaux ont été spécifiquement accordés pour 59 nouveaux élèves, inscrits à la rentrée 2015, soit un poste pour 20 élèves. Le ratio professeur-élève dans l'Aude se situe au-dessus de la moyenne académique. Le ministère de l'Éducation nationale veille à une juste répartition des moyens éducatifs.

M. Roland Courteau.  - Ces trois postes seront affectés à d'autres tâches que celles d'enseignement devant les élèves. On ne fera pas l'économie d'une demande de rendez-vous à Mme la ministre de l'Éducation nationale pour évoquer la spécificité de notre département.

Éducation prioritaire

Mme Aline Archimbaud .  - Depuis plusieurs semaines, enseignants et parents d'élèves se mobilisent contre la sortie de leur collège du dispositif d'éducation prioritaire. C'est le cas notamment en Seine-Saint-Denis, où cinq collèges sont concernés, ainsi que dans l'Oise. Nul ne peut pourtant nier les difficultés socio-économiques de ces zones.

La fin du classement d'un collège en éducation prioritaire menace les projets pédagogiques, souvent innovants, qui favorisent la mixité sociale, réduisent l'évitement social et les inégalités en matière de réussite scolaire. Elle aura des conséquences financières négatives sur les écoles primaires liées à ces collèges. En Seine-Saint-Denis, treize collèges rejoindront l'éducation prioritaire. Pour autant, cette aide légitime au regard de la situation sociale des bassins de vie, souvent sinistrés, ne peut se faire aux dépens d'autres collèges qui en ont autant besoin.

L'interrogation porte sur les indicateurs sociaux retenus comme critères d'entrée et de sortie du dispositif d'éducation prioritaire. Madame la ministre, pouvez-vous garantir la transparence des critères retenus pour redéfinir la carte de l'éducation prioritaire, ainsi que l'exactitude des données sur la base desquelles ont été sélectionnés les collèges sortis du dispositif ? Quelle garantie de moyens pouvez-vous donner aux collèges et écoles primaires anciennement classés en zones d'éducation prioritaire, afin de montrer que l'égalité des élèves reste la mission principale de l'Éducation nationale ?

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion .  - Il était impératif de refondre l'éducation prioritaire d'ici la rentrée 2015. Les contours n'en avaient pas été redéfinis depuis 2006.

Un indice social innovant a été défini par la direction de l'évaluation, de la prospective et de la performance, pour mieux prendre en compte les critères sociaux. Il est fondé sur quatre indicateurs : le taux de catégories socioprofessionnelles défavorisées, le taux de boursiers, le taux d'élèves résidant en zone urbaine sensible et le taux d'élèves en retard à l'entrée en sixième.

L'éducation prioritaire doit concerner les collèges et écoles qui concentrent le plus de difficultés, le plus de population scolaire en situation de grande fragilité. Elle n'a pas vocation à englober tous les collèges et toutes les écoles qui accueillent aussi des enfants de familles défavorisées. La réponse aux besoins légitimes de ces autres établissements se trouve dans la nouvelle allocation progressive des moyens qui mettra fin aux effets de seuils et ruptures de charges brutales entre les établissements qui relèvent de l'éducation prioritaire et ceux qui n'en relèvent pas. L'objectif est d'accompagner les établissements à la hauteur de leurs besoins même lorsqu'ils ne se situent pas en éducation prioritaire.

Il y va de la réussite de tous les élèves, quelle que soit leur origine sociale.

Mme Aline Archimbaud.  - Je constate que de nombreux collectifs de parents et d'enseignants travaillent sur ces questions. Il faudrait un cadre de concertations régulières avec eux. Ils ne sont pas dans la contestation, mais dans la proposition. Si l'on veut éviter la constitution de ghettos, il faut aussi investir dans les établissements qui ne concentrent pas le plus de difficultés.

Centre des finances publiques d'Ilkirch-Graffenstaden

M. Jacques Bigot .  - En 2004, l'État a acquis 2 000 mètre carrés au coeur de ma ville d'Ilkirch-Graffenstaden, pour y installer un centre des impôts et un centre de formation. Fin 2014, la DGfip annonce qu'on abandonne le site et qu'on envisage de louer des locaux dans une zone d'activités à quatre kilomètres du centre de Strasbourg.

Ma lettre adressée à M. Sapin le 14 décembre dernier n'ayant pas eu l'heur d'être honorée d'une réponse, je pose à nouveau ma question dans cet hémicycle, c'est celle du maire, mais aussi celle du sénateur, qui attire votre attention sur la prévisible difficulté où l'on sera de céder ces locaux. L'administration va payer un loyer et France Domaines aura sur les bras un bien non cessible ! Imaginez-vous par cet artifice inscrire au budget de l'État une recette que vous n'aurez ni en 2016, ni même en 2017 ?

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget .  - Le maintien sur l'ensemble du territoire d'un service public efficace répondant aux besoins effectifs des usagers est au coeur de l'action du gouvernement.

Comme il vous en a été rendu compte par des courriers de mes services datés du 18 décembre 2013 et du 25 février 2014, ainsi qu'à l'occasion d'échanges multiples avec le cabinet de Michel Sapin, la décision de déplacer le centre des finances publiques d'Illkirch-Graffenstaden répond à une préoccupation de sécurité aussi et surtout à une situation immobilière manifestement sans rapport avec les besoins du service. Installer nos services dans un immeuble voisin sur la commune de Strasbourg, dont la surface et la configuration répondent parfaitement aux nécessités de service, s'inscrit pleinement dans le cadre de la stratégie immobilière de l'État visant à optimiser son parc immobilier.

Cette décision a été accélérée par des incidents graves dans le système de chauffage de l'immeuble, pour lesquels une action judiciaire a été ouverte. La DGfip continue d'assurer l'entretien de cet immeuble, dont je ne puis laisser dire qu'il serait invendable. Le dynamisme du centre-ville d'Illkirch-Graffenstaden, les différentes évolutions des dessertes de transports en commun et la configuration même des locaux constituent autant d'atouts pour les acheteurs potentiels.

M. Jacques Bigot.  - Merci pour cette réponse de vos services mais l'administration ferait bien parfois d'écouter les élus. Le maire d'une commune qui a présidé la communauté urbaine connaît bien la situation de l'immeuble de bureaux. Je vous reposerai une question orale lorsque je constaterai que ce bâtiment reste abandonné et que par ailleurs l'État paie un loyer. On verra alors si j'ai tort -  mais je sais bien que l'administration a toujours raison...

Filière bois-papier

M. Didier Marie .  - Le 13 novembre 2014, le groupe UPM-Kymmene, spécialisé dans la fabrication de papier pour journaux et magazines, a annoncé un plan de réduction de ses capacités en Europe. Au total, 552 emplois sont menacés en Finlande, au Royaume-Uni et en France. Sur le site UPM-Chapelle-Darblay, située à Grand-Couronne en Seine-Maritime, 196 postes sont concernés.

L'usine installée en bord de Seine, en aval de Rouen, tout près du site de Pétroplus récemment fermé et dont les salariés manifestent en ce moment même à Rouen, s'est fait connaître par son choix du transport fluvial : acheminement des bobines de papier sur barges à destination des imprimeurs parisiens, chargement des balles de papier à recycler de l'Île-de-France vers l'usine de Grand-Couronne.

La région travaille avec les syndicats mobilisés pour étudier des alternatives. La filière bois-papier représente 10 000 emplois en Haute-Normandie. Quelles mesures seront prises rapidement pour accompagner cette filière ?

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget .  - M. Macron est retenu en cet instant à l'Assemblée nationale.

Le chiffre d'affaires de l'industrie papetière stagne, ou baisse, selon les supports. Le groupe UPM ne dispose plus que de deux unités en France. C'est dans ce contexte que la machine n° 3 du site de La Chapelle-Darblay, spécialisée dans le papier journal, va être arrêtée. Cette décision est motivée par la baisse structurelle de la demande de papier journal en Europe. Il reste la machine n° 6, pour laquelle le groupe a prévu un investissement de 3 à 6 millions d'euros.

Les acteurs publics sont mobilisés, afin d'analyser les conséquences de l'arrêt de la machine n° 3. Il importe d'étudier les solutions industrielles alternatives afin de conserver l'activité sur le site. Les travaux et rendez-vous se poursuivent. J'espère qu'avec toutes les parties prenantes, nous trouverons la meilleure solution pour l'avenir de la production et surtout l'emploi des salariés.

M. Didier Marie.  - Merci pour cette réponse rassurante. Le plan de sauvegarde de l'emploi devra être le plus adapté possible. Autre piste, la production de sacs en papier. Il faudra accompagner les salariés pour trouver une solution pérenne pour l'ensemble de la filière.

Construction de logements

M. Jacques Genest .  - J'avais interpellé le gouvernement sur la crise de l'emploi dans le BTP lors des questions d'actualité au gouvernement. Mme Delga m'ayant répondu à côté du sujet, je n'ai d'autre choix que de poser à nouveau une question, en espérant une réponse plus adéquate.

La construction stagne, et la France tourne le dos à l'objectif des 500 000 nouveaux logements par an, avec un minimum historique de 297 000 mises en chantier en 2014. Le gouvernement fait tout le contraire de ce qu'il faudrait faire : après l'usine à gaz de la calamiteuse loi Alur, la loi sur la transition énergétique complexifie encore les contraintes, de plus en plus nombreuses et rigides, pesant sur les maires. De plus en plus de terrains sont classés inconstructibles, ce qui fait grimper le prix du foncier. Conséquence, le nombre d'emplois dans le BTP a chuté de 12 % : 30 000 emplois seront détruits en 2015, comme en 2014. Quelles mesures compte prendre le gouvernement pour faire enfin repartir l'activité et l'emploi dans la construction ?

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget .  - Le gouvernement est préoccupé de la situation de la construction, qui est l'une des priorités de la reprise économique et de l'emploi. La baisse de la construction a en réalité débuté en 2009. Le gouvernement oeuvre pour un rééquilibrage entre territoires afin que l'on construise là où sont les besoins. Nous ne minimisons pas les difficultés rencontrées par le secteur. Nous favorisons l'accession à la propriété avec le renforcement du PTZ et son ouverture pour l'ancien dans 6 000 zones rurales.

M. Jacques Genest.  - Quel rapport ?

M. Christian Eckert, secrétaire d'État.  - Nous avons lancé un vaste chantier de simplification des normes d'urbanisme. Nous poursuivons le soutien de l'État à la construction de logements sociaux et très sociaux, et abaissons la TVA pour les logements intermédiaires. Nous mobilisons le foncier public et soutenons la rénovation de logements avec un nouveau crédit d'impôt et le programme de l'Anah. Ces mesures porteront leurs fruits, les chiffres du dernier trimestre 2014 sont encourageants.

Mme Pinel a entrepris un tour de France de la construction pour faire connaître ces nouvelles mesures. Les acteurs locaux enfin, doivent remplir leurs obligations : les sanctions seront renforcées envers les collectivités locales qui ne respectent pas la loi SRU.

M. Jacques Genest.  - La ruralité n'en peut plus, elle se sent pire que méprisée, ignorée.

Téléphonie dans l'hyper-ruralité

M. Alain Bertrand .  - M. Genest a raison : les ruraux et les hyper-ruraux se sentent abandonnés. Cela se traduit par des votes extrémistes...

Le gouvernement a passé un accord avec Orange pour faire vivre l'article 35-1 du code des postes et télécommunications, selon lequel « le service universel des communications électroniques fournit à tous un raccordement à un réseau fixe ouvert au public et un service téléphonique de qualité à un prix abordable ».

Or, le 1er août 2014, le village de Pompidou s'est retrouvé privé d'Internet, de téléphone fixe et de téléphone portable pendant quinze jours. À Cassagnas, le téléphone fixe est resté coupé durant trois semaines. Les gérants d'une entreprise ont été un mois sans téléphone ni Internet après un orage.

Pour qu'Orange apporte des solutions, il faut que l'État l'épaule. Il n'y a pas, en République, où l'égalité doit prévaloir, de sous-territoires, ni de sous-citoyens, la TVA est acquittée par nos concitoyens. Le Ricard et le café sont les mêmes dans les bistrots de Lozère et d'ailleurs ! L'égalité républicaine est un dû !

M. Christian Eckert, secrétaire d'État .  - Veuillez excuser Mme Lemaire. Avec le plan « France très haut débit », nous engageons le chantier des infrastructures numériques de demain. Mais il nous faut aussi répondre aux besoins du moment. Les coupures que vous évoquez ne sont pas acceptables. Orange doit respecter un cahier des charges précis, notamment sur le temps de réparation d'une défaillance du téléphone fixe. L'Arcep a ouvert le 27 mai dernier deux enquêtes administratives, le résultat en a été connu le 28 novembre 2014. Orange devra accorder des moyens supplémentaires à ses équipes d'intervention, mieux anticiper les dysfonctionnements et mieux informer les collectivités locales. Mme Lemaire sera très vigilante. En cas de manquement, l'Arcep mettra Orange en demeure de se conformer à ses obligations de service public universel, avec sanctions pécuniaires à la clé.

S'agissant de la couverture mobile, une seule commune de Lozère est concernée au titre du programme « zones blanches ». Une commune supplémentaire a été identifiée par le comité interministériel. Il faut aussi combler une lacune évidente du programme précédent, qui ne visait que les centres-bourgs. Il faut aller au-delà, et assurer aux territoires ruraux une couverture en Internet mobile en 3G. Le cas échéant, la loi pourra étendre les obligations existantes des opérateurs mobiles.

M. Alain Bertrand.  - Je crains qu'il y ait une incompréhension entre le gouvernement et les défenseurs de l'hyper-ruralité. Vous parlez de 3G, de 4G, etc. En Lozère, c'est dans la moitié des communes que le téléphone mobile ne passe pas. Cela a des conséquences, par exemple pour appeler les secours en cas d'accident de bûcheronnage, qui peut dès lors avoir une issue fatale. Pensez aussi aux entreprises, qui ne peuvent réaliser leur chiffre d'affaires, pour les chantiers, pour l'emploi.

Monsieur le ministre, dites à Mme Lemaire, au Premier ministre, au président de la République, dont vous êtes proche -  comme moi, parfois (Sourires)  - qu'il faut un ministre de l'hyper-ruralité. Il n'y a pas de sous-territoires, pas de sous-citoyens. Nous faisons partie intégrante de la France, défendez nos droits !

Merci de votre bonne volonté, mais il faudra faire plus...

Brigade des sapeurs-pompiers de Paris

Mme Catherine Procaccia .  - J'attire votre attention sur les risques que pourrait faire peser sur les populations de la future métropole la diminution conséquente du budget de la Brigade des sapeurs-pompiers de Paris. Lors de la présentation du budget pour 2015 à la préfecture de police de Paris, il a été annoncé aux élus des départements de la petite couronne et de la capitale que cinq des grandes échelles nécessaires aux interventions dans les immeubles de grande hauteur seraient supprimées, ainsi que deux engins-pompe. La création d'un centre opérationnel de back-up pour les appels a été également reportée.

Si ces choix sont définitifs, comment la sécurité des futurs projets d'immeubles de grande hauteur ou d'entrepôts pourra-t-elle être assurée à l'avenir, particulièrement ceux de la « petite couronne » ? Des constructions sont prévues autour des futures stations de métro du Grand Paris. En outre, quid de la sécurité des prochaines plateformes logistiques dont l'implantation est prévue dans le Val-de-Marne ?

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget .  - Fortement sollicitée, assurant sa mission sans rupture, la Brigade des sapeurs-pompiers de Paris s'adapte en permanence à son environnement. Elle a bénéficié ces dernières années de deux plans de modernisation, avec un nouveau centre opérationnel fin 2011. L'évolution de son budget doit s'apprécier sur une longue période : entre 2001 et 2015, son budget de fonctionnement a augmenté de 39 %, passant de 241 millions à 356 millions d'euros. En 2015, le budget primitif baissera de 1,2 %, sans effets sur sa capacité opérationnelle, y compris dans le Val-de-Marne.

Une démarche a été conduite, fondée sur les statistiques d'engagement des engins spécialisés et les possibilités de mutualisation de capacités avec les Sdis de grande couronne. C'est ainsi que cinq échelles sur cinquante ont été supprimées. L'actuel centre opérationnel, livré en 2011, est moderne, protégé, hors zone d'inondation. La réponse d'urgence sera améliorée en 2015. Un centre back-up reste nécessaire.

Le modèle d'organisation de la Brigade a montré son efficacité lors des récents événements de janvier ou lors de la crise Ebola. Une réflexion est lancée sur une évolution du modèle capacitaire ; ses conclusions seront rendues en juin 2015. Le gouvernement et les collectivités locales veilleront à ce que la capacité opérationnelle de la Brigade ne soit pas obérée, et à ce que ses moyens soient garantis par une convention pluriannuelle.

Mme Catherine Procaccia.  - Les départements de la petite couronne reconnaissent les qualités de la Brigade des sapeurs-pompiers de Paris. Les plans de modernisation réalisés jusqu'ici portaient essentiellement sur le personnel, pour faire face à un turnover important.

Le budget de 2015 tient compte des statistiques passées mais la métropole évolue. Un plan pourrait être adopté en juin 2015 pour répondre aux nouveaux besoins, j'y vois un espoir. Quant à faire appel aux grandes échelles des Sdis de Seine-et-Marne et du Val-de-Marne, c'est illusoire, compte tenu des difficultés de la circulation dans notre région : les immeubles seront en cendres avant qu'elles n'arrivent !

La séance est suspendue à midi.

présidence de M. Hervé Marseille, vice-président

La séance reprend à 14 h 30.