Modernisation du système de santé (Procédure accélérée - Suite)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de modernisation de notre système de santé.

Discussion des articles (Suite)

ARTICLE 2 BIS B (Supprimé)

Mme la présidente.  - Amendement n°698, présenté par Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Après le troisième alinéa de l'article L. 5314-2 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« À ce titre, les missions locales sont reconnues comme participant au repérage des situations qui nécessitent un accès aux droits sociaux, à la prévention et aux soins, et comme mettant ainsi en oeuvre les actions et orientant les jeunes vers des services compétents qui permettent la prise en charge du jeune concerné par le système de santé de droit commun et la prise en compte par le jeune lui-même de son capital santé. »

Mme Annie David.  - Avec cet amendement, nous entendons reconnaître, comme l'a fait l'Assemblée nationale, le rôle des missions locales dans le repérage et la concrétisation du droit à la santé des jeunes de 16 à 25 ans. Leur rôle ne se limite pas à accompagner les jeunes dans l'emploi. Elles travaillent à l'insertion sociale et professionnelle d'un million d'entre eux, en lien avec près de 450 associations et contribuent ainsi à la lutte contre les inégalités.

Nous demandons le rétablissement de l'article 2 bis B supprimé par notre commission des affaires sociales.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°1033, présenté par Mme Archimbaud et les membres du groupe écologiste.

Mme Aline Archimbaud.  - Cette reconnaissance serait un signe de soutien aux missions locales et faciliterait le tissage de partenariats.

Mme Catherine Deroche, co-rapporteur de la commission des affaires sociales.  - L'article L. 5314-2 est suffisamment large pour couvrir l'ensemble des dimensions concourant à l'insertion des jeunes. L'action des missions locales relève de conventions pluriannuelles signées avec l'État et de partenariats signés avec les partenaires locaux. D'une manière générale, la loi n'a pas vocation à reconnaître des pratiques mais à prescrire. Avis défavorable.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.  - Avis favorable. Un des obstacles d'accès des jeunes à la santé et aux droits est l'éclatement des lieux de prise en charge. Cette reconnaissance par la loi du rôle que peuvent jouer dans ces domaines les missions locales est importante.

Les amendements identiques nos698 et 1033 ne sont pas adoptés.

L'article 2 bis B demeure supprimé.

ARTICLE 2 BIS

Mme la présidente.  - Amendement n°699, présenté par Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

I.  -  Alinéa 5

Compléter cet alinéa par les mots :

à l'exception de la vaccination

II.  -  Alinéa 7

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Art. L. 1111-5-1.  -  Par dérogation à l'article 371-1 du code civil, un infirmier, sous la responsabilité d'un médecin, peut se dispenser d'obtenir le consentement du ou des titulaires de l'autorité parentale sur les décisions à prendre lorsque l'action de prévention, le dépistage ou le traitement, à l'exception de la vaccination, s'impose pour sauvegarder la santé sexuelle et reproductive d'une personne mineure âgée de quinze ans ou plus, dans le cas où cette dernière s'oppose expressément à la consultation du ou des titulaires de l'autorité parentale afin de garder le secret sur son état de santé. Toutefois, l'infirmier doit, dans un premier temps, s'efforcer d'obtenir le consentement du mineur à cette consultation. Dans le cas où le mineur maintient son opposition, l'infirmier, sous la responsabilité d'un médecin, peut mettre en oeuvre l'action de prévention, le dépistage ou le traitement à l'exception de la vaccination. Dans ce cas, le mineur se fait accompagner d'une personne majeure de son choix. »

Mme Laurence Cohen.  - Nous proposons une nouvelle rédaction de l'article 2 bis afin de conserver l'obligation de consentement de l'autorité parentale pour certains actes - je pense notamment à la vaccination contre le papillomavirus. Coïncidence, hier, l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) et l'assurance maladie ont publié une étude démontrant l'innocuité du Gardasil quand des cas de sclérose en plaques ont été détectés ; des plaintes ont d'ailleurs été déposées. Sans mettre en doute son objectivité, j'y insiste, on peut regretter que cette étude ne respecte pas la charte sanitaire de mai 2013 : en méconnaissance des termes de l'article L. 152-1 du code de la santé publique, les scientifiques qui mettent en avant l'inefficacité ou les dangers de ce type de vaccination n'ont pas été associés. D'où cet amendement de précaution, alors que l'objectif du plan cancer est de vacciner 80 % des jeunes filles de 10 à 14 ans.

Mme Catherine Deroche, co-rapporteur.  - La France a pris beaucoup de retard dans la lutte contre le cancer du col de l'utérus. Avis défavorable.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Cet article a suscité beaucoup de débats. Pas de coïncidence, cette étude de pharmaco-épidémiologie, menée sur 2,2 millions de jeunes filles de 13 à 16 ans, a couvert la période 2008-2012. Elle s'appuie sur des données publiques. Elle démontre qu'il n'y a pas de risque associé au Gardasil de sclérose en plaques. Les jeunes femmes qui ont déposé plainte l'ont fait en toute bonne foi mais le fait est là. Je le dis très sereinement, nous n'avons pas à redouter cette vaccination. La France affiche un taux de vaccination de 17 %, contre 75 % à 88 % dans les pays voisins. C'est un enjeu de santé publique ; levons les doutes, les peurs et les inquiétudes. Nous aurons un débat à l'automne sur la vaccination. En attendant, l'étude donne des arguments significatifs aux médecins comme aux parents.

Mme Laurence Cohen.  - Je me réjouis du débat à venir. J'espère qu'on y traitera de façon objective des adjuvants aluminiques... Je redis que mon amendement est de précaution.

L'amendement n°699 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°1192, présenté par Mme Deroche, au nom de la commission des affaires sociales.

Compléter cet article par deux alinéas et un paragraphe ainsi rédigés :

...° À la première phrase du cinquième alinéa de l'article L. 1111-2, les mots : « des dispositions de l'article L. 1111-5 » sont remplacés par les mots : « des articles L. 1111-5 et L. 1111-5-1 » ;

...° À la première phrase du cinquième alinéa de l'article L. 1111-7, les mots : « à l'article L. 1111-5 » sont remplacés par les mots : « aux articles L. 1111-5 et L. 1111-5-1 ».

...  -  Au 2° de l'article 49 de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire, les mots : « à l'article L. 1111-5 » sont remplacés par les mots : « aux articles L. 1111-5 et L. 1111-5-1 ».

L'amendement de coordination n°1192, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article 2 bis, modifié, est adopté.

L'article 2 ter demeure supprimé.

L'article 2 quater est adopté.

ARTICLE ADDITIONNEL

Mme la présidente.  - Amendement n°184 rectifié bis, présenté par MM. Vasselle, B. Fournier et Laménie, Mme Hummel et MM. Mayet et Cambon.

Après l'article 2 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le soutien des jeunes enfants pour l'égalité des chances en santé, avant l'entrée dans les dispositifs scolaires, repose sur l'accompagnement des parents dès la naissance et pendant la petite enfance. Des interventions socio-éducatives et de soutien à la parentalité pendant la période périnatale, par des professionnels de l'aide à domicile, techniciens de l'intervention sociale et familiale, seront développées dans le cadre des politiques familiales de la caisse nationale d'allocations familiales et de la protection maternelle et infantile qui relève de la compétence du département.

M. Alain Vasselle.  - L'objectif est d'initier et d'accompagner la prévention et la promotion de la santé au sein de la cellule familiale de la naissance à l'entrée en milieu scolaire, et plus particulièrement auprès de familles vulnérables ou fragilisées. J'ai cru comprendre que le Gouvernement voulait faire de la prévention une priorité.

Mme Catherine Deroche, co-rapporteur.  - Hier, nous avons rejeté deux amendements semblables, les nos693 et 683. L'action sociale extra-légale des caisses d'allocations familiales relève de circulaires. L'article L. 2111-1 du code de la santé publique vous donne satisfaction. Retrait ?

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Avis défavorable.

M. Alain Vasselle.  - Puisque j'ai satisfaction, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes...

L'amendement n°184 rectifié bis est retiré.

L'article 3 est adopté.

ARTICLE 3 BIS (Supprimé)

Mme la présidente.  - Amendement n°1 rectifié ter, présenté par Mmes Laborde, Billon, Jouanno, Blondin et Jouve, MM. Amiel, Castelli et Guérini, Mme Malherbe, MM. Requier, Bonnecarrère et Détraigne, Mme Gatel, MM. Guerriau, L. Hervé et Kern, Mme Morin-Desailly et M. Houpert.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Au début de l'article L. 5134-1 du code de la santé publique, il est inséré un I A ainsi rédigé :

« I A.  -  Toute personne a le droit d'être informée sur les méthodes contraceptives et d'en choisir une librement.

« Cette information incombe à tout professionnel de santé dans le cadre de ses compétences et dans le respect des règles professionnelles qui lui sont applicables. Seules l'urgence ou l'impossibilité d'informer peuvent l'en dispenser. »

Mme Françoise Laborde, co-rapporteure de la délagation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes.  - Cet amendement, issu des recommandations du rapport « Femmes et santé » de la délégation aux droits des femmes, rétablit un article inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale. Trop souvent, les femmes ont le sentiment de se voir imposer une méthode de contraception. Cet amendement fait prévaloir le droit à l'information et le libre choix des femmes.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°700, présenté par Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Les femmes, comme d'ailleurs les professionnels de santé, sont mal informées de l'évolution des méthodes de contraception. Celles-ci ne sont pas toutes remboursées par la sécurité sociale et le coût de certaines d'entre elles, de 150 à 200 euros par an, est un obstacle à leur diffusion. Trop souvent, les femmes se font prescrire la pilule, méthode contraceptive qui n'est pas nécessairement adaptée à leur mode de vie, sans être informées de l'existence des autres.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°943, présenté par Mme Archimbaud et les membres du groupe écologiste.

Mme Aline Archimbaud.  - C'est le même amendement.

Mme la présidente.  - Amendement n°460, présenté par Mme Meunier et les membres du groupe socialiste et républicain.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Au début de l'article L. 5134-1 du code de la santé publique, il est ajouté un I A ainsi rédigé :

« I A.  -  Toute personne a le droit d'être informée sur les méthodes contraceptives masculines et féminines et d'en choisir une librement.

« Cette information incombe à tout professionnel de santé dans le cadre de ses compétences et dans le respect des règles professionnelles qui lui sont applicables. Seules l'urgence ou l'impossibilité d'informer peuvent l'en dispenser. »

Mme Michelle Meunier.  - Oui, il faut mieux informer les jeunes femmes. Trop souvent, elles prennent effectivement la pilule alors que d'autres méthodes seraient mieux adaptées à leur mode de vie.

Mme Catherine Deroche, co-rapporteur.  - L'article L. 1111-2 du code de la santé publique consacre un droit général à l'information et l'article L. 1111-4 du même code, le droit au consentement. Avis défavorable.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Quelque 70 % des IVG concernent des jeunes femmes sous contraceptif. Le problème de l'adaptation du contraceptif au mode de vie est réel. Ma préférence va aux amendements nos1 rectifié ter, 700 et 943. Mme Meunier pourrait retirer son amendement à leur profit.

L'amendement n°460 est retiré.

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales.  - Pourquoi remettre dans la loi ce qui y figure déjà ? Cela ne changera pas grand-chose au fait que la pilule est, parfois, mal utilisée.

À la demande du groupe communiste républicain et citoyen, les amendements identiques nos1 rectifié ter, 700 et 943 sont mis aux voix par scrutin public.

Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°245 :

Nombre de votants 340
Nombre de suffrages exprimés 339
Pour l'adoption 163
Contre 176

Le Sénat n'a pas adopté.

L'article 3 bis demeure supprimé.

(Marques de déception à gauche)

Mme Laurence Cohen.  - Quel recul !

ARTICLES ADDITIONNELS

Mme la présidente.  - Amendement n°701, présenté par Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Après l'article 3 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Au 4° de l'article L. 2112-2, les mots : « lors d'un entretien systématique psycho-social réalisé au cours du quatrième mois de grossesse » sont remplacés par les mots : « lors de l'entretien prénatal visé à l'article L. 2122-1. » ;

2° Le dernier alinéa de l'article L. 2122-1 est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Lors de cet examen, le médecin ou la sage-femme propose à la femme enceinte un entretien prénatal dont l'objet est de permettre au professionnel d'évaluer avec elle ses besoins en termes d'accompagnement au cours de la grossesse. »

Mme Laurence Cohen.  - Nous voulons repositionner l'entretien prénatal précoce comme outil de prévention en santé au sens large, en l'inscrivant à l'article L. 2122-1 du code de la santé publique. Pour mémoire, cet entretien individuel ou à deux, instauré par le plan de périnatalité 2005-2007, a été inscrit dans la loi du 5 mars 2007 relatif à la protection de l'enfance. Les professionnels nous alertent : que cet entretien soit qualifié de « psychosocial » est un frein à son acceptation. Certains en ont peur, d'autres ne se sentent pas concernés.

Mme la présidente.  - Amendement n°1024 rectifié, présenté par Mme Archimbaud et les membres du groupe écologiste.

Après l'article 3 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Au 4° de l'article L. 2112-2, les mots : « d'un entretien systématique psycho-social réalisé au cours du quatrième mois de grossesse » sont remplacés par les mots « de l'entretien prénatal mentionné à l'article L. 2122-1 » ;

2° L'article L. 2122-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Un entretien prénatal précoce au cours du quatrième ou du cinquième mois de grossesse est systématiquement proposé. Cet entretien est réalisé par une sage-femme ou par un médecin. »

Mme Aline Archimbaud.  - L'amendement est semblable : faire de cet entretien prénatal un véritable outil de prévention en évitant une appellation stigmatisante.

Mme Catherine Deroche, co-rapporteur.  - Le rapport sénatorial de juin 2014 de Mmes Dini et Meunier sur la protection maternelle et infantile (PMI) recommande cette mesure, l'Assemblée nationale l'a reprise en insérant l'article 11 ter dans la loi sur la protection de l'enfance, qui va bientôt revenir devant nous en deuxième lecture. Avis défavorable.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Retrait car la disposition figure effectivement à l'article 11 ter de la loi sur la protection de l'enfance qui est en navette, et celui-ci est mieux rédigé car il prévoit que l'entretien est systématique.

L'amendement n°1024 est retiré.

L'amendement n°701 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°371 rectifié, présenté par Mmes Laborde, Billon et Blondin, M. Bonnecarrère, Mme Bouchoux, MM. Castelli et Détraigne, Mme Gatel, MM. Guérini, Guerriau, L. Hervé et Houpert, Mmes Jouanno et Jouve, M. Kern, Mme Morin-Desailly et M. Requier.

Après l'article 3 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le titre III du livre Ier de la deuxième partie du code de la santé publique, il est inséré un titre ... ainsi rédigé :

« Titre...

« Information des  mineurs

« Chapitre unique

« Art. L. ...  -  Une consultation par un médecin ou une sage-femme est proposée aux mineurs pour les informer sur la contraception et sur la prévention des infections sexuellement transmissibles et des conduites addictives.

« Le mineur est informé de cette consultation lors de l'envoi de la carte Vitale par la caisse d'assurance maladie. »

Mme Annick Billon. - Quand 6,7 % des jeunes filles de 12 à 17 ans ont recouru une fois à l'interruption volontaire de grossesse, il est indispensable de simplifier et de faciliter l'accès à la contraception pour les adolescents.

Cet amendement reprend une recommandation de la Délégation aux droits des femmes ; il propose une consultation, dès 16 ans, auprès d'un médecin ou d'une sage-femme. Ce rendez-vous pourrait être proposé aux jeunes lors de l'envoi de leur carte Vitale ; il peut être l'occasion de les informer sur les pratiques à risque et de lutter contre les infections sexuellement transmissibles.

Mme Catherine Deroche, co-rapporteur.  - Quid des jeunes de moins de 15 ans ? Qui financera cette consultation gratuite ? Quant à l'information par la carte Vitale, elle semble contraire à l'article L. 161-31 du code de la sécurité sociale. Cette disposition n'a guère sa place ici. Qu'en pense le Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre.  - A ce stade et en l'absence d'étude d'impact, demande de retrait. La mesure est coûteuse, sa prise en charge doit être organisée. Le texte contient déjà des actions ciblées en direction des mineurs et les établissements scolaires ont déjà l'obligation de délivrer une information sur ces sujets. Nous devons approfondir la réflexion.

Mme Annick Billon, co-rapporteure.  - Soit, mais un entretien individuel avec un professionnel de santé n'équivaut pas à une information collective, et les collèges ne délivrent pas toujours ces informations.

L'amendement n°371 rectifié n'est pas adopté.

ARTICLE 4

M. François Commeinhes .  - Si nous saluons tous la lutte contre l'alcoolisation excessive des jeunes et le binge drinking, tout est d'abord affaire d'information, d'éducation et de prévention. A ce titre la viticulture française, fleuron de notre patrimoine, facteur d'attractivité touristique est exemplaire. Nos viticulteurs sont des gens responsables. Si Mme la ministre et le président de la République ont indiqué ne pas vouloir modifier la loi Évin, il faut, à notre sens, la clarifier. Ce sera l'objet de l'amendement n°32. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Les Républicains)

Mme la présidente.  - Amendement n°968, présenté par Mme Bouchoux et les membres du groupe écologiste.

I. - Alinéas 1 à 7

Supprimer ces alinéas.

II. - Alinéas 19 et 20

Supprimer ces alinéas.

Mme Corinne Bouchoux.  - Cet amendement ne va pas dans le même sens. Notre législation comporte déjà de nombreuses mesures répressives pour lutter contre la consommation excessive d'alcool. C'était une des conclusions du rapport d'octobre 2012 que j'avais élaboré avec M. André Reichardt ; nous y mettions l'accent sur la nécessité d'une prévention énergique. Les collectivités territoriales agissent en ce sens. Mieux vaut une prévention efficace que des dispositions répressives qui ne sont pas appliquées.

Mme Catherine Deroche, co-rapporteur.  - Grâce à cet article 4, il sera moins difficile de caractériser les infractions. La commission des affaires sociales l'a adopté sans modification. Retrait ou rejet.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Sortons des débats manichéens : on peut reconnaître l'apport de la viticulture au rayonnement de la France sans se voiler la face sur l'impact de la consommation excessive d'alcool, notamment sur les jeunes. Une étude indépendante et spectaculaire vient de montrer que le coût social et sanitaire de l'alcool atteint 120 milliards d'euros dans notre pays.

Les jeunes sont particulièrement exposés aux stratégies marketing des fabricants de spiritueux sur les campus universitaires, notamment, avec certaines formes de bizutage. Les critiques que vous formulez sont d'ailleurs celles que l'on opposait à la lutte contre le bizutage ; or, celui-ci a heureusement reculé parce que ces dispositions ont libéré la parole. Je donne donc un avis défavorable à cet amendement tout en exprimant mon incompréhension.

Mme Corinne Bouchoux.  - Je défendrai un amendement de repli.

L'amendement n°968 est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°969, présenté par Mme Bouchoux et les membres du groupe écologiste.

Alinéa 10

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Les messages de lutte contre les comportements d'hyperalcoolisation des jeunes doivent être réalisés et diffusés y compris dans le cadre de la prise en charge et la régulation par les pairs.

Mme Corinne Bouchoux.  - Les jeunes ne boivent pas seulement en raison de la nature de l'offre ; l'influence des pairs joue aussi un rôle majeur. Une étude de la FAGE réalisée sur 3 000 étudiants en 2014 montre que 71,4 % des jeunes sont plus sensibles aux messages délivrés par leurs pairs. Une méthode de communication horizontale s'impose, car plus efficace qu'une communication verticale. La réalisation de spots télé par des jeunes et pour des jeunes, avec la participation d'étudiants en médecine, serait une bonne idée.

Posons-nous la question : pourquoi ces jeunes boivent-ils autant ? Quelles perspectives leur donnons-nous ?

Mme Catherine Deroche, co-rapporteur. - L'objectif de prévention partagée a déjà été inscrit à l'article premier, à la suite de l?adoption hier d'un amendement de Mme Génisson. Retrait ?

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Avis défavorable à défaut d'un retrait. L'Inpes organise déjà des campagnes associant les jeunes. Début 2015, l'une d'entre elles a été lancée après consultation de jeunes. Au demeurant, la loi n'a pas à préciser les modalités de campagnes de prévention.

M. André Reichardt.  - J'ai eu l'occasion en effet de cosigner avec Mme Bouchoux un rapport sur l'alcoolisation des jeunes. Je n'aurais pas voté son premier amendement car l'incitation à la surconsommation doit être sanctionnée. Je la remercie en revanche de ne pas retirer celui-ci car il faut mettre l'accent sur la prévention. Les campagnes actuelles ne font pas assez de place aux jeunes eux-mêmes. C'est vrai.

Est-ce à la loi de préciser cela ? Elle peut en toute hypothèse pousser à l'action. Je voterai cet amendement.

M. Marc Laménie.  - Je le voterai aussi. L'alcoolisation est un problème ancien qui tourne au gigantesque gâchis. L'information gagnerait à être développée. En zone rurale, le pouvoir du maire est bien limité, par exemple lors de la tenue de fêtes patronales, pour faire respecter la réglementation en matière d'alcool. On ne sait plus quoi faire quand des gens arrivent avec leur coffre plein à ras bord, et l'on finit par renoncer.

L'amendement n°969 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°424 rectifié ter, présenté par M. Montaugé, Mme D. Gillot, M. Berson, Mmes Blondin et Yonnet, MM. Sueur et Cazeau, Mme Khiari, M. F. Marc, Mmes Bataille, Féret et Monier et M. Delebarre.

Après l'alinéa 11

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

...° L'article L. 3322 - 9 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le prix unitaire de vente des boissons alcoolisées pratiqué par les commerçants lors d'opérations de promotion ponctuelle dans le temps ne peut être inférieur à un seuil, fixé par décret, correspondant à une fraction du prix de vente unitaire affiché dans l'établissement. » 

L'article 4 renforce les moyens de lutter contre les nouvelles pratiques de la jeunesse en matière de binge drinking. Les happy hours, au cours desquelles les boissons sont proposées à des tarifs excessivement bas devraient être encadrées par la fixation d'un prix de vente plancher.

Mme Catherine Deroche, co-rapporteur.  - Le décret du 6 mai 2010 encadre déjà ces pratiques. Retrait ?

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Je comprends bien le sens de votre amendement. Sous couleur de convivialité, l'on incite les jeunes à consommer de l'alcool à bas prix. L'alcoolisation rapide au vu et au su de tout le monde, pratique plus traditionnelle dans les pays du Nord, se répand en France.

Concrètement, j'avoue ne pas savoir comment ce décret pourrait être rédigé : comment tenir compte de la diversité des boissons concernées ? Des prix qui varient de ville en ville ? De l'interdiction de la vente à perte ? Retrait, pour ces raisons juridiques.

Mme Dominique Gillot.  - Les pratiques commerciales incitant les jeunes à la surconsommation d'alcool doivent vous pousser à agir. Le législateur se doit d'entraver des pratiques qui gâchent les potentialités de la jeunesse de notre pays.

M. Jean-Baptiste Lemoyne.  - N'étant ni pour ni contre, bien au contraire (Sourires), je me bornerai à nous inciter collectivement à défendre la langue française et à parler plutôt d'alcoolisation rapide ou d'heures heureuses... (On apprécie)

Mme la présidente.  - C'est en effet beaucoup mieux dit.

M. Gérard Roche.  - Les débits de boissons ne sont pas seuls en cause : les jeunes vont également s'approvisionner au supermarché pour s'alcooliser ensuite, au vu et au su de tout le monde ou non...

M. Franck Montaugé.  - Je maintiens mon amendement, pour des raisons morales.

M. Alain Vasselle.  - J'ai vu et entendu le cas de jeunes s'étant retrouvés dans des situations dramatiques, parfois en coma éthylique, après avoir consommé de l'alcool. Les parents sont aussi à responsabiliser. Sans compter que ces pratiques pèsent sur nos comptes sociaux. On ne peut se contenter de ne rien faire au prétexte que ce serait trop difficile.

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement n°424 rectifié ter, mis aux voix par assis et levé, est adopté.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Je prends acte de ce vote qui témoigne d'un engagement en faveur de la santé publique que j'espère voir se concrétiser par la suite... (Sourires)

La bonne volonté du Gouvernement ou de l'administration n'est pas en cause, monsieur Vasselle : nous devons tenir compte du droit européen, des principes de libre concurrence...

Je ne sais pas quel sera le sort de cet amendement au cours de la navette...

Mme Catherine Procaccia.  - Si le Gouvernement n'en veut pas...

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Toujours est-il que les réponses à apporter à ces phénomènes ne sont pas simples ; ne nous résignons pas, réfléchissons ensemble à l'encadrement des nouveaux modes de consommation.

La séance est suspendue à 15 h 55.

présidence de M. Gérard Larcher

La séance reprend à 16 heures.