Questions d'actualité

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.

Je me fais le porte-parole du Bureau pour appeler chacun, dans nos échanges directs et sincères, au respect mutuel, valeur essentielle du Sénat ! (Applaudissements)

Crise de la filière avicole

M. Pierre Médevielle .  - L'annonce le 24 novembre d'un premier cas d'influenza aviaire en Dordogne a été un cataclysme. Abattages massifs, périmètre de sécurité ont plongé les acteurs de la filière dans le désarroi. Le plan d'éradication du virus annoncé se traduira par un vide sanitaire total de nos élevages.

Les aviculteurs seront soumis à de nouvelles mesures de biosécurité qui alourdiront leurs charges. Ils doivent faire face à une cessation totale de leurs revenus. La filière aviaire et palmipèdes gras est un emblème national et un fleuron du made in France : 74 % du foie gras consommé dans le monde est produit en France. Préservons notre patrimoine gastronomique. Vous ne pouvez pas laisser tomber l'aviculture française. Allez-vous privilégier les aides directes, et selon quel calendrier ?

Ce virus est plus résistant que notre filière. Si le vide sanitaire n'était pas suffisant, comment sauver et pérenniser à long terme l'élevage avicole et la production de palmipèdes gras ?

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - Veuillez excuser l'absence de Stéphane Le Foll, en entretien avec son homologue iranien sur des contrats concernant l'agriculture. (Mouvements à droite)

La politique de vide sanitaire décidée par le Gouvernement est courageuse et innovante. C'est la garantie de l'avenir de la filière. Mais le Gouvernement est conscient de son lourd impact sur les opérateurs. Mardi matin, Stéphane Le Foll a rencontré les représentants de la profession. À la fin de la semaine prochaine, un arrêté sanitaire sera pris prenant en compte leurs remarques, pour tous types d'élevages.

Le plan d'assainissement prévoit un vide sanitaire pendant quatre semaines et une reprise de la production en mai.

Quelque 130 millions d'euros viendront compenser les baisses de revenus des éleveurs et accouveurs, sans compter les aides aux entreprises agroalimentaires, les dispositifs d'activité partielle, l'aide à la formation professionnelle, les baisses de charges pour les entreprises d'abattage et de transformation. Enfin, 220 millions d'euros seront débloqués sur cinq ans pour soutenir l'investissement. Voici les propositions fortes du ministre de l'agriculture. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain ; M. Alain Bertrand applaudit aussi)

Chômage

M. Jean-François Husson .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Les chiffres du chômage, cruels pour le Gouvernement, confirment son inexorable montée : 700 000 chômeurs de plus depuis 2012. La France est parmi les plus mauvais élèves de la zone euro, malgré une conjoncture économique favorable.

Quelque 5,7 millions de personnes pointent à Pôle Emploi, dont 2,5 depuis plus d'un an ! Triste bilan !

Ces chiffres nourrissent la désespérance, terreau du vote extrémiste. Derrière, ce sont des hommes et des femmes de tout âge, de toute condition qui souffrent. De la boîte à outils de septembre 2012 au énième plan annoncé en janvier, en passant par la promesse d'inversion de la courbe du chômage...

M. Charles Revet.  - On en est loin !

M. Jean-François Husson.  - ... le constat est accablant, qui traduit vos mauvais choix économiques et politiques. Quand allez-vous vous attaquer enfin aux causes profondes de ce mal ? (Applaudissements à droite et au centre).

Mme Myriam El Khomri, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social .  - Le nombre de demandeurs d'emploi de catégorie A a augmenté de 15 800 en décembre 2015, nous ne le nions pas. (Exclamations amusées à droite)

M. Philippe Dallier.  - Encore heureux !

Mme Myriam El Khomri, ministre.  - Les circonstances exceptionnelles de novembre et décembre ont pesé : moins 2,2 % d'offres d'embauche. Mais en 2015, la France a créé plus d'emplois qu'elle n'en a détruits, avec 46 000 créations nettes.

M. Bruno Sido.  - Il y a 500 chômeurs en plus chaque jour !

Mme Myriam El Khomri, ministre.  - C'est insuffisant pour faire face à notre démographie : pour 700 000 départs en retraite annuels, il y a 850 000 entrées sur le marché du travail ; en Allemagne, ces chiffres sont respectivement de 500 000 départs et 400 000 entrées.

2015 a vu le chômage des jeunes baisser pour la première fois depuis 2010, c'est encourageant.

Le contexte difficile justifie pleinement le plan de mobilisation pour l'emploi lancé par le président de la République (Exclamations à droite), axé sur l'aide à l'embauche pour les PME, pour laquelle 7 000 employeurs ont montré de l'intérêt, et l'accélération de la formation des demandeurs d'emploi afin de répondre enfin au problème des emplois non pourvus. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Jean-François Husson.  - Ne répondez pas à une question que je n'ai pas posée. Faites donc confiance aux entreprises, que le Premier ministre dit aimer, et écoutez-les ! Je ne me résous pas à ce que la génération Hollande soit la génération chômage. Faisons de l'emploi une grande cause nationale ! (Applaudissements à droite et au centre).

Composition des conseils intercommunaux

Mme Françoise Laborde .  - À l'occasion des dernières élections municipales, les électeurs ont désigné pour la première fois directement leurs représentants au conseil communautaire. Un système dérogatoire permet aux plus petites communes d'y avoir au moins deux délégués.

Or la loi NOTRe fixe au 31 mars 2016 la publication des nouveaux schémas de coopération intercommunale par les préfets, qui procèdent aux fusions et autres modifications de périmètre des EPCI. Les petites communes vont perdre un délégué dans l'opération... Des élus du suffrage universel direct se verront ainsi retirer leur mandat plusieurs années avant le terme ! Allonger un mandat peut s'entendre, le raccourcir beaucoup moins.

Madame la ministre, allez-vous donner des instructions précises aux préfets leur enjoignant d'informer les élus concernés des conséquences découlant de leurs schémas ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE, ainsi que sur plusieurs bancs à droite et au centre).

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique .  - La question se pose aussi pour les communes nouvelles, ou quand il faut réélire un maire démissionnaire... Il aurait fallu prendre langue avec Alain Richard, qui a essayé de trouver une solution garantissant une représentation des plus petites communes à la suite de la décision « Salbris » du Conseil constitutionnel. C'est cette décision, et non l'application de la loi NOTRe, qui est en cause. Des accords locaux ont parfois permis de trouver des arrangements, mais pas partout. La proposition de loi de M. Richard offrira peut-être une solution mais le Gouvernement n'a aucun moyen de contourner les décisions du Conseil constitutionnel. Une circulaire a été adressée aux préfets le plus tôt possible, mais la Constitution s'impose ; le Gouvernement en est aussi le garant ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Tests de pollution

Mme Aline Archimbaud .  - Depuis juin 2012, l'OMS classe les particules fines et les NOx parmi les cancérogènes certains. La pollution de l'air, rappelons-le, fait 40 000 morts par an, sans parler des innombrables maladies... Renault n'a pas fraudé, d'après la commission technique indépendante mise en place par la ministre de l'environnement. Mais la commission a constaté, sur les 22 premiers véhicules, des dépassements d'émissions très importants en condition de circulation réelle. Or les tests d'homologation ne sont pas réalisés en conditions de vent ou de vitesse normales : les constructeurs jouent avec la réglementation pour faire homologuer leurs véhicules. C'est légal, mais c'est inacceptable. Il faut consolider l'industrie automobile, mais pas au prix de la santé et de la confiance.

Les doutes subsistent de plus sur l'indépendance des organismes officiels d'homologation, qui réalisent de nombreuses prestations pour les constructeurs.

Le Parlement européen doit se prononcer sur la possibilité de porter les marges de dépassement des normes de pollution jusqu'à 110 %. La France s'y opposera-t-elle ?

La Commission européenne a annoncé vouloir conduire elle-même des tests sur les véhicules en circulation et envisage de demander des sanctions. La France soutient-elle cette démarche ? (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste)

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - Veuillez excuser Ségolène Royal (Exclamations à droite), qui participe au premier grand forum des investisseurs de l'économie bas carbone mis en place lors de la COP21.

Une commission technique indépendante a été mise en place pour évaluer les émissions polluantes des véhicules ; vous en connaissez les résultats. Le protocole de test a confirmé des fraudes à l'homologation sur deux véhicules Volkswagen, mais pas sur les autres. Il est exact que les contrôles ont montré des niveaux d'émissions supérieurs aux niveaux attestés.

La France soutient la démarche de transparence vis-à-vis des consommateurs. Elle a obtenu une clause de revoyure sur les coefficients, l'objectif étant une entrée en vigueur de la nouvelle réglementation en 2017. Le Gouvernement est actif, au plan national et européen, pour la transparence et la qualité des normes. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Jacqueline Sauvage

Mme Laurence Cohen .  - Jacqueline Sauvage a tué son mari après avoir été victime, avec ses quatre enfants, pendant quarante-sept ans, d'un homme violent, qui les frappait et les violait régulièrement. Sa condamnation à dix ans de prison ne fera qu'allonger son calvaire et celui de ses trois filles - son fils s'est suicidé. Cette décision, qu'il ne m'appartient pas de commenter, résulte de l'application stricte de l'article 122-5 du code pénal sur la légitime défense. C'est surtout le refus de la société de prendre en compte le fléau des violences conjugales.

Faut-il rappeler que 134 femmes sont mortes en France sous les coups de leur conjoint en 2014 ? Sidérées, neuf sur dix ne portent jamais plainte... Il faut tenir compte du contexte.

Le seul recours qu'il reste à Jacqueline Sauvage est d'obtenir la grâce présidentielle. Une pétition circule, signée par des milliers d'hommes et de femmes de toute sensibilité politique, dont de nombreux élus. Le contexte doit être pris en compte. Je sais que François Hollande est sensible à la situation de Jacqueline Sauvage et recevra sa famille et ses avocats demain. J'y vois un signe positif. Au-delà de la grâce présidentielle attendue, quels moyens financiers et humains le Gouvernement entend-il mobiliser pour lutter contre les violences faites aux femmes ? (Applaudissements sur tous les bancs)

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - Nous sommes nombreux à être émus par le cas de Jacqueline Sauvage et, plus largement, par le sort fait aux femmes, qui révèle un grave problème dans notre société. La mobilisation est forte, nous l'entendons. Je ne commenterai pas une décision de justice ; quant à la grâce, elle relève des prérogatives du président de la République qui recevra demain sa famille et son comité de soutien.

Ma collègue Pascale Boistard, particulièrement impliquée, agit avec force contre les violences faites aux femmes. Le Gouvernement, qui a fait de ce sujet une priorité, a renforcé la lutte contre le viol, le harcèlement sexiste, les violences sexuelles - combat dans lequel nous savons pouvoir compter sur les parlementaires, les élus locaux, les entreprises. C'est toute la société qu'il faut mobiliser, pour mettre en mouvement des droits réels. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Mme Laurence Cohen.  - En effet, cette question nous interroge, individuellement et collectivement.

Il y a eu des dysfonctionnements : malgré des signalements et plusieurs passages aux urgences, Mme Sauvage n'a pas échappé aux mains de son bourreau. La délégation aux droits des femmes du Sénat rendra le 11 février un rapport préconisant des moyens financiers et humains pour former tous les acteurs, magistrats, policiers et personnels de santé, ainsi que des observatoires départementaux et régionaux. La société doit prendre en compte ce fléau pour s'en libérer. Au Gouvernement de prendre ses responsabilités.

M. Alain Gournac.  - Très bien !

(Applaudissements sur de nombreux bancs)

Droit du travail

Mme Nicole Bricq .  - Madame la ministre du travail, depuis votre prise de fonction en septembre, vous avez beaucoup consulté, vous avez agi (Exclamations amusées à droite), annonçant un texte ambitieux, qui doit être présenté en conseil des ministres le 1er mars. Vous avez lancé une consultation publique sur le compte personnel d'activité (CPA) qui sera un outil d'émancipation individuelle, permettant à chaque salarié de définir sa trajectoire professionnelle. J'ai assisté auprès de France Stratégie au lancement de l'outil, qui enthousiasme notamment les jeunes qui ont connu des ruptures dans leur parcours professionnel.

Vous avez reçu lundi, avec le Premier ministre, le rapport du comité Badinter, qui a dégagé les principes fondamentaux du droit du travail. Votre texte, qui s'en inspirera, portera sur le temps de travail, bien sûr, mais aussi sur la liberté à laisser aux entreprises pour conclure des accords, bons pour l'emploi, bons pour l'activité, bons pour l'innovation.

Comment tirerez-vous le meilleur parti de ce rapport, madame la ministre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain ; exclamations ironiques à droite)

Mme Myriam El Khomri, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social .  - Le rapport Badinter pose 61 principes, réaffirmant le socle des droits des travailleurs. Une déclaration des droits des travailleurs, en quelque sorte, auxquels on ne saurait déroger.

Le 9 mars prochain, je présenterai en commission mixte paritaire le projet de loi qui s'en inspire. Son but sera d'adapter notre droit aux mutations du travail. Le CPA, véritable progrès social, est le moyen de sécuriser les parcours professionnels à une époque où l'on ne reste plus dans une même entreprise de 18 à 60 ans. Les ruptures doivent être l'occasion de rebondir, grâce à des formations, à des conseils en évolution professionnelle, au compte personnel de formation. Je vous invite à participer au débat public, jusqu'au 20 mars.

Comment adapter le droit du travail ? À partir d'un socle, quelle place pour la négociation collective ? Les accords d'entreprises seront développés, les accords de branche repositionnés et le dialogue social redynamisé, afin de créer un espace de respiration pour les salariés et les employeurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Encadrement des essais cliniques

M. Olivier Cigolotti .  - Madame la ministre de la santé, le 15 janvier dernier, nous apprenions l'hospitalisation au CHU de Rennes de patients ayant subi un essai clinique. Le 17 janvier, l'un des volontaires hospitalisés décédait. Quatre autres présentent encore des risques de conserver des séquelles neurologiques irréversibles.

Le protocole en question semble comporter des anomalies quant à la taille et à la composition de l'échantillon. L'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a d'ailleurs refusé de le communiquer.

Les délais de sécurité n'ont pas été respectés dès le premier palier. Les volontaires étaient traités par intervalles de 24 heures, un délai jugé très court. Le laboratoire concerné pourrait avoir été tenté d'aller plus vite par souci d'économie, une pratique qui semble se répandre.

« On ne rémunère pas un risque, mais une contrainte », a déclaré un porte-parole du centre d'essais cliniques ! C'est faux.

Comptez-vous, madame la ministre, proposer des évolutions des standards pour les essais cliniques de médicaments, afin d'éviter de tels drames et de mieux informer les volontaires des risques encourus ? (Applaudissements au centre)

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, de l'enfance, des personnes âgées et de l'autonomie .  - Veuillez excuser l'absence de Mme Touraine, qui reçoit le président iranien avec le président de la République. (Exclamations à droite) Six personnes ont été admises au CHU de Rennes ; l'une d'entre elles est décédée. Les cinq autres ont quitté le CHU mais demeurent suivies médicalement.

La ministre s'est rendue tout de suite auprès d'eux, lançant deux enquêtes sur place - indépendantes des procédures judiciaires : l'ANSM conduira une inspection technique sur le site et l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) a été saisie ; elle rendra dès le début de la semaine prochaine ses conclusions.

Un numéro de téléphone a été mis en place pour retrouver toutes les personnes concernées, mais aucun effet n'a été constaté. Vous le voyez, tout a été mis en oeuvre pour faire la lumière sur ce sujet et garantir un suivi des volontaires. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Situation financière des départements

M. Benoît Huré .  - En plus de la baisse de ses dotations budgétaires aux départements, l'État leur rembourse de moins en moins les dépenses liées aux allocations individuelles de solidarité (AIS) qui explosent : 8,1 milliards d'euros sont dus aux départements pour 2015. Le nombre de bénéficiaires du RSA a augmenté en moyenne de 9,3 %, de 25 % dans certains départements, et de 25,5 % dans les Ardennes ! Dans de telles conditions, l'équilibre budgétaire est impossible à atteindre dans ces collectivités.

Dix départements se sont déjà trouvés dans l'impasse financière en 2015 ; trente en 2016 ; tous seront dans le même cas d'ici 2018. Les départements attendent des actes à la hauteur, pour combler ce gouffre financier où risquent de sombrer les politiques de solidarité décidées par l'État mais menées dans la proximité. Et cela, au pire moment de l'histoire de notre Nation. Je n'ose imaginer la réaction des Français, dans la rue ou dans les urnes.

Quand le Premier ministre répondra-t-il aux propositions raisonnables adoptées par l'Assemblée des départements de France (ADF), pluraliste et unanime ? (Applaudissements à droite et au centre)

M. Bruno Sido.  - Tout va très bien, Mme la Marquise !

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique .  - Merci de votre participation au groupe de travail qui rendra ses conclusions fin mars. C'est sur toutes les AIS qu'il faut travailler : si le RSA progresse fortement dans certains départements, dont le vôtre, c'est parfois l'APA qui grève le plus les finances de certains départements. Nous y sommes très attentifs.

M. Sirugue est chargé d'une mission sur tous les minima sociaux.

Dès juillet 2013, le pacte de confiance avec l'ADF a conduit à verser 1,6 milliard d'euros par an aux départements.

La question est la suivante : qui finance la solidarité ? Sur quelle base fiscale ? Rendez-vous fin mars. (Quelques applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Lutte européenne contre le terrorisme

M. Alain Richard .  - La France fait toujours face à une menace terroriste forte, aux ramifications internationales profondes. Tous les groupes politiques représentés au comité de suivi de l'état d'urgence reconnaissent votre volonté de favoriser le partage d'informations.

Vous revenez du Conseil Justice et affaires intérieures de l'Union européenne. Nous attendons de nos partenaires des signes de solidarité et d'efficacité collectives, sur l'échange d'informations de manière fiable et en temps réel grâce aux fichiers de sécurité, en matière de lutte contre les documents d'identité falsifiés, d'efficacité du contrôle aux frontières extérieures, je pense en particulier aux multiples îles grecques.

Monsieur le ministre, quels acquis avez-vous pu obtenir à ce jour, et quels progrès attendez-vous du prochain Conseil européen, dans cet espace démocratique et d'échanges humains que doit rester l'Union européenne ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain et du groupe RDSE)

M. Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur .  - J'ai fait inscrire ces trois questions à l'ordre du jour du Conseil Justice et affaires intérieures.

Sur les frontières extérieures d'abord : le renforcement des contrôles sera la condition du maintien de l'espace Schengen. La modification de l'article 7-2 du code Schengen a été actée le 5 décembre dernier.

Frontex sera renforcé : les 250 millions d'euros de budget sont une première étape, qui permet la création de garde-côtes et de gardes-frontières ; la France fournit de nombreux collaborateurs et gardes-frontières.

Deuxième sujet : le SIS (système d'informations Schengen) que tous les États de l'Union européenne doivent alimenter et qui doit être interconnecté avec les grands fichiers criminels pour être efficace dans la lutte contre le terrorisme.

Troisième sujet : la lutte contre les faux documents, que Daech fabrique en séries. J'ai proposé la création d'une task force dédiée, à laquelle contribueront nos meilleurs spécialistes. Mon homologue allemand Thomas de Maizière se trouve sur la même ligne que nous. Nous sommes déterminés à faire des propositions communes au prochain Conseil, qui devra prendre des décisions importantes, assorties d'un calendrier. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Crise agricole

Mme Corinne Imbert .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Monsieur le Ministre de l'agriculture, la France agricole a mal ; chaque jour des exploitations ferment ; tous les deux jours, un agriculteur se suicide. Les filières du lait et de l'élevage traversent une crise grave. 700 millions d'euros ont été débloqués : un cautère sur une jambe de bois. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et républicain ; on renchérit à droite)

Quelle est votre vision de l'agriculture française ? Quels dossiers sont éligibles aux baisses de charges ? Accepteriez-vous de produire et de vendre à perte ? C'est une question de fierté !

Allez-vous enfin prendre vos responsabilités ? Nous avons pris les nôtres, en adoptant une proposition de loi pour aider les agriculteurs, qui vient, hélas, d'être rejetée par la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale (Indignation à droite) : c'est un véritable mépris affiché pour les agriculteurs ! (Protestations croissantes sur les bancs du groupe socialiste et républicain ; vifs applaudissements à droite)

Monsieur le Ministre, chaussez vos bottes, allez dans les campagnes, sortez de Paris ! (Mêmes mouvements) À force de laisser l'agriculture en jachère, vous récoltez la colère ! Prenez donc vos responsabilités, agissez, trouvez des solutions non plus conjoncturelles mais structurelles ! (Indignation à gauche ; vifs applaudissements à droite)

M. Jeanny Lorgeoux.  - Démagogie !

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - Attention, face à une situation aussi grave, soyons constructifs, articulons des propositions ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain) La crise agricole n'est pas seulement française, elle est au moins européenne et aussi mondiale. (Marques d'approbation sur les mêmes bancs) Le Gouvernement a agi dès l'été dernier, par des mesures conjoncturelles, en effet, nécessaires et efficaces, j'en veux pour preuve que 15 000 dossiers ont déjà été payés.

Oui, nous agissons, de nouvelles simplifications de normes seront présentées avant fin février -  dois-je rappeler que ce Gouvernement n'est pas seul à avoir mis en place ces contraintes qui se sont accumulées depuis des années (Applaudissements à gauche ; protestations à droite)

Le Gouvernement appelle solennellement les entreprises de transformation et de distribution à la solidarité et à la responsabilité. Et les choses bougent : outils commerciaux innovants dans la distribution de lait, contrats signés entre des producteurs de porc et un grand transformateur, les solutions structurelles se mettent en place.

Dans d'autres pays européens, des fonds d'aide privés ont été créés. Le Gouvernement incite la distribution à s'engager fortement en concertation avec les agriculteurs. Si l'ensemble de la représentation nationale s'y associait nous serions plus forts. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain ; huées à droite)

M. le président.  - Terminez !

Mme Corinne Imbert.  - Pourquoi n'avez-vous pas soutenu notre proposition de loi ?

MM. Didier Guillaume et Claude Bérit-Débat.  - Avec quel financement ?

Mme Corinne Imbert.  - Agissez ! (Applaudissements au centre et à droite)

Protection de l'enfance

Mme Michelle Meunier .  - Les 13 et 14 janvier, l'application par la France de la convention internationale sur les droits de l'enfant a été examinée par le Comité des droits de l'enfant de l'ONU, vingt-cinq ans après la ratification par notre pays de la convention adoptée par l'Assemblée générale des Nations unies, en novembre 1989. Longtemps, des dysfonctionnements graves ont été recensés, qu'il s'agisse des enfants pauvres immigrés, de la scolarisation des enfants handicapés, de la gestion des problèmes de santé mentale ou de toxicomanie des adolescents.

Depuis 2012, par le plan pluriannuel contre la pauvreté, la refondation de l'école, la création de places d'accueil, le Gouvernement agit. Mais un enfant sur cinq vit toujours dans la pauvreté, et le nombre des mineurs étrangers isolés augmente.

Comment garantirez-vous, madame la ministre, le droit des enfants - de tous les enfants ?

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, de l'enfance, des personnes âgées et de l'autonomie .  - En 2009, l'ONU nous avait tancés pour la désinvolture dont avait fait preuve la France à l'époque...

M. Roland Courteau.  - Tiens !

M. Marc Daunis.  - À l'époque !

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État.  - ... et nos politiques insuffisantes. Ce mois-ci, je me suis attachée à démontrer nos progrès, grâce à une stratégie interministérielle dirigée par mon secrétariat d'État, une politique familiale plus juste et plus redistributive, la refondation de l'école avec des rythmes scolaires plus adaptés aux rythmes biologiques et de meilleures conditions de scolarisation des enfants handicapés. La proposition de loi que vous avez préparée avec M. Daunis sur l'enfance en danger met l'enfant au centre de l'attention.

L'ONU est exigeante à notre égard, étant donné notre place dans l'histoire des droits de l'homme et parce que nous avons des moyens que d'autres pays n'ont pas. Mais elle s'étonne de certaines résistances symboliques. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Nouvelle-Calédonie

M. Pierre Frogier .  - Les conditions dans lesquelles les militaires exercent leur activité en Nouvelle-Calédonie s'aggravent. Les violences contre les forces de l'ordre se multiplient.

À la suite d'un crime crapuleux, la situation s'est tendue à Thio, là même où les manifestations avaient été vives lors des évènements de 1986. Je souhaite redire à la famille, meurtrie il y a trente ans, notre compassion. Les auteurs de ces faits, jeunes, mineurs parfois, ou jeunes majeurs, restent souvent impunis. J'espère qu'en l'occurrence ils seront jugés. Le processus engagé en 1988 est fondamental, mais fragile. Les citoyens de Nouvelle-Calédonie comme les autres ont droit à la sécurité et la sérénité est indispensable pour aborder les échéances décisives à venir.

Avez-vous seulement conscience de la fragilité du processus de Nouméa ? Une disposition spécifique de sécurité auprès du Haut-Commissaire ne serait-il pas utile ? (Applaudissements à droite, ainsi que sur quelques bancs au centre et sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Mme George Pau-Langevin, ministre des outre-mer .  - Je vous prie d'excuser l'absence du Premier ministre. Nous avons préparé cette réponse ensemble.

En effet, ce qui s'est passé le 30 décembre est grave et nous rappelle les évènements douloureux d'il y a trente ans. Les policiers et gendarmes font un travail formidable, et je veux rendre hommage à leur sang-froid.

Quatre escadrons de gardes mobiles, 468 gendarmes et des policiers sont présents en Nouvelle-Calédonie : les moyens sont là. Mais il faut aussi travailler sur le terrain avec les élus notamment pour prendre en charge les jeunes désorientés : des propositions vous ont été faites par le maire de Mont-Dore.

Quant à installer une disposition spécifique aux côtés du Haut-Commissaire, c'est à voir. Nous sommes conscients de la fragilité de la situation sur place. Nous comptons sur la mobilisation du comité des signataires de l'accord de Nouméa pour avancer dans la bonne direction. (Applaudissements à gauche et sur plusieurs bancs au centre et à droite)

La séance est suspendue à 16 heures.

présidence de Mme Isabelle Debré, vice-présidente

La séance reprend à 16 h 15.