Transports scolaires

Mme la présidente, rapporteur.  - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi tendant à clarifier les conditions des délégations de compétences en matière de transports scolaires.

Discussion générale

M. Bruno Sido, auteur de la proposition de loi .  - La loi NOTRe a modifié la répartition des compétences entre les niveaux de collectivités territoriales. Le Sénat a amélioré le texte pour préserver l'essentiel des missions des conseils départementaux, échelon indispensable. Dans la France autour de Colombey-les-deux Églises - volontiers caricaturée, parfois qualifiée de « France profonde », de « territoire oublié de la République » -, l'échelon départemental finance des investissements, comme la fibre optique, partout il accompagne la contribution des intercommunalités, il structure les politiques sociales de proximité : son intervention est stratégique dans tous les territoires dépourvus de métropole.

La loi NOTRe a confié aux régions l'aménagement des territoires, la définition des grandes stratégies de développement. Pourtant, en dépit de l'opposition de l'Association des régions de France (ARF), de l'Association des départements de France (ADF), de nombreux parlementaires de tous bords, la ministre des collectivités territoriales de l'époque a réintroduit le transfert aux régions du ramassage scolaire. Or force est de reconnaître que le ramassage scolaire relève plus du cousu-main que de la définition de grandes stratégies. Il est de bon sens que la même autorité gère l'entretien routes et le ramassage scolaire. Le même bon sens voudrait que le transport de tous les élèves soit géré par la même collectivité, qu'ils soient handicapés ou non, sans discrimination. Les départements ont l'expérience nécessaire. Certes, la loi NOTRe autorise la région à déléguer cette compétence au département, mais, aux termes de la loi d'orientation des transports intérieurs (Loti), celui-ci ne peut à son tour subdéléguer aux autorités organisatrices de second rang comme les syndicats de commune. Or 83 % des départements ont recours à des délégations pour gérer le transport scolaire !

Cette proposition de loi est aussi simple que brève : elle généralise la faculté de subdélégation qui existe pour les départements couverts par le Stif : pas de subdélégation « en cascade » mais un retour au statu quo ante, pour maintenir une organisation bien rodée qui donne satisfaction aux parents comme aux élus. Il n'est pas absurde que le Sénat demande à ce que tous les territoires soient traités aussi bien que l'Île-de-France !

Certes, seule une minorité de régions souhaitent subdéléguer au département, mais nous permettons aux autres d'y réfléchir, elles n'en consacreront que mieux leurs moyens à d'autres actions prioritaires, comme l'emploi.

Le rapporteur, René Vandierendonck, a amélioré la rédaction et mis au point un ingénieux dispositif, je le remercie de m'avoir associé à son travail.

Je remercie le président Larcher et le président Retailleau d'avoir inscrit dans un agenda chargé cette proposition simple, utile et consensuelle, garante d'une plus grande liberté des collectivités territoriales dans l'exercice de leurs missions. (Applaudissements au centre et à droite, ainsi que sur plusieurs bancs des groupes RDSE et socialiste et républicain)

M. René Vandierendonck, rapporteur de la commission des lois .  - Les transports scolaires jouent un rôle déterminant dans le bon fonctionnement du service public de l'enseignement, et contribuent ainsi à l'égalisation des chances : 60 % des quatre millions d'élèves transportés quotidiennement le sont par les services départementaux.

La loi d'orientation des transports intérieurs (Loti) du 30 décembre 1982 a marqué une grande avancée décentralisatrice en confiant les transports scolaires aux départements. En trente ans, ils ont su organiser un service public de proximité de qualité, qui a contribué à la démocratisation des études scolaires plus longues.

La loi NOTRe marque une nouvelle étape. À compter du 1er septembre 2017, les régions géreront les transports scolaires, mais pourront toujours déléguer cette compétence aux départements. Or la plupart des conseils départementaux ont conclu avec les autorités organisatrices de second rang (AO2) des conventions pour la mise en oeuvre du transport scolaire, et la subdélégation à une troisième personne, publique ou privée, est interdite, sauf pour les départements franciliens, avec accord du Stif.

Dès lors, au 1er septembre 2017, les départements ne pourraient plus subdéléguer aux 3 345 AO2 actuellement délégataires, dont l'action de proximité permet de s'adapter à la diversité des territoires, fortiori avec la nouvelle carte régionale.

D'où la proposition de loi de notre collègue Sido, dont l'idée est bonne. Elle ne résiste pas, malheureusement, à l'analyse juridique. D'abord, le Stif est attributaire de la compétence ; ensuite, il représente 40 % des personnes transportées en France ; enfin, la Seine-et-Marne est seule concernée. Nous avons donc écarté la référence à ce cas de figure.

Les AO2 n'ont aucune information sur leurs éventuelles relations avec les régions. Dans la pratique, la proposition de loi ne s'appliquerait qu'à moins de dix départements. C'est pourquoi votre commission des lois, avec l'accord de M. Sido, a préféré assouplir le régime des conventions entre régions et départements, et prévoir la possibilité pour le département délégataire de contracter avec des collectivités ou des associations un contrat de prestations de service. Merci à l'ADF, à l'ARF et à notre collègue Nicole Bonnefoy pour leur soutien.

Fidèle à la méthode prônée par le président du Sénat, je suis allé sur le terrain, j'ai essayé de mettre de la souplesse dans ce texte. Il faut bien distinguer délégation de compétence et mode de gestion du service public. Ce dossier illustre combien la méthode du Sénat est la bonne : évaluer in concreto, sur le terrain, au cas par cas, la répartition des compétences sous l'empire de la loi NOTRe. Le Sénat, représentant constitutionnel des collectivités territoriales, ne s'interdit pas de procéder à des ajustements nécessaires, identifiés dans les territoires dans le cadre d'une évaluation méthodique.

Encore une fois, ce dossier illustre la nécessité de recourir au contrat comme outil de droit souple pour adapter la réponse du service public aux nécessités des territoires. (Applaudissements)

présidence de Mme Jacqueline Gourault, vice-présidente

M. Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales .  - La mise en oeuvre de la réforme territoriale est en fin d'achèvement. La recherche de la lisibilité passe par la suppression de la clause générale de compétence des régions et des départements et la détermination précise du champ de responsabilités de chaque échelon.

Le Gouvernement a choisi de renforcer les régions, échelon le plus pertinent pour l'aménagement du territoire et le développement économique. Les transports sont un élément essentiel de la stratégie de développement régional et figureront dans les schémas régionaux d'aménagement du territoire, de développement durable et d'égalité des territoires (Sraddet). Dès le 1er janvier 2017, les régions seront compétentes sur les transports intérieurs et sur les transports scolaires à la rentrée prochaine.

Cette proposition de loi adapte le régime juridique des délégations de compétences en prévoyant une subdélégation à une autorité organisatrice de troisième rang. Ce faisant, elle rouvre un débat qui avait été tranché en CMP. Le Gouvernement s'était opposé à toute subdélégation, incompatible avec l'objectif de lisibilité. Les délégations en cascade vont à l'encontre de l'objectif de responsabilisation des acteurs et de simplification de l'organisation administrative.

Certes, ce système existe en Ile-de-France ; de fait, il ne bénéficie qu'à la Seine-et-Marne. La région capitale a ses caractéristiques propres, avec le Stif.

L'amendement du rapporteur écarte la subdélégation mais autorise le département à recourir à des prestataires pour l'exécution de tout ou partie de la compétence.

II y aurait donc lieu de distinguer, d'une part, la convention de délégation et, d'autre part, un contrat de prestation de services conclu selon les règles classiques de la commande publique. Le Gouvernement ne peut pas davantage soutenir cette rédaction.

Remplit-elle notre objectif de clarification ? Non, elle délite les responsabilités. L'article L. 31-11-9 du code des transports modifié par la loi NOTRe autorise la région à déléguer tout ou partie du transport scolaire. Certes, la rédaction du rapporteur n'autorise pas explicitement la subdélégation ; mais pourquoi déléguer la compétence au département si celui-ci n'entend pas l'exercer ? Le système actuel est suffisamment souple pour permettre aux territoires de s'adapter au mieux, n'y ajoutons pas un étage intermédiaire au risque de la complexité.

M. François Bonhomme.  - La complexité, nous y sommes déjà !

M. Jean-Michel Baylet, ministre.  - Du reste, les régions, dans leur très large majorité, ont décidé de ne pas déléguer cette compétence aux départements. Je ne résiste pas au plaisir de les citer : l'Auvergne-Rhône-Alpes, sauf pour la Savoie et la Haute-Savoie ; la Bourgogne-Franche-Comté ; la Bretagne ; le Centre-Val de Loire ; le Grand Est ; les Hauts-de-France, sauf pour le Pas-de-Calais jusqu'en 2018 ; la Normandie, sauf pour la Manche ; l'Aquitaine ; l'Occitanie qui a demandé de repousser d'un an le transfert du bloc de compétences ; la région PACA, les Pays de la Loire.

Le Gouvernement estime que cette proposition de loi n'apportera ni clarification ni amélioration. Il ne peut qu'y être défavorable.

Mme Marie-Christine Blandin .  - Nous venons d'entendre la thèse et l'antithèse... À l'exclusion des transports spécialisés, notamment ceux des élèves en situation de handicap, la loi NOTRe a transféré aux régions le transport scolaire dès la rentrée prochaine - le délai est serré.

La Loti interdit aux délégataires de recourir à une autorité de troisième rang. Or 83 % des départements avaient délégué au moins une partie de leur compétence à plus de 3 0000 entités plus petites.

L'amendement de M. Vandierendonck concilie le bon sens de cette proposition de loi...

M. Philippe Bas, président de la commission des lois.  - Enfin du bon sens !

Mme Marie-Christine Blandin.  - ...et l'intérêt de la loi NOTRe qui clarifie les compétences.

Les départements auxquels la gestion des transports scolaires a été déléguée pourront recourir à des prestataires ; cependant, l'autorité supérieure, demeurant responsable, pourra définir la tarification et les services, les conditions de l'interopérabilité et garantir l'équité entre les territoires infrarégionaux et les familles.

Nous touchons à des enjeux plus importants qu'il n'y paraît. Les collectivités territoriales sont incitées, sinon obligées, à la vertu sur le mode de « faites ce que je dis, pas ce que je fais ». Elles sont sur le front de la lutte contre les dérèglements climatiques, de l'aménagement durable du territoire et des transports de demain. Or ces belles synergies, en phase avec les engagements internationaux que la France a pris la main sur le coeur, sont souvent contrecarrées par des arbitrages irresponsables : le fret est confié à la route ; les voyageurs impécunieux sont priés de prendre le bus et la loi Macron libéralise le transport par autocar en pleine COP21.

Pour fermer cette parenthèse de mauvaise humeur, le groupe écologiste votera cette proposition de loi qui ne constitue pas la troisième mi-temps d'un arbitrage défavorable aux départements mais une adaptation nécessaire pour mieux articuler instances stratèges et instances de proximité. (Applaudissements sur les bancs de la commission et du groupe Les Républicains ; M. Pierre-Yves Collombat applaudit également)

M. François Bonhomme .  - Les départements, au fil du mouvement décentralisateur, avaient su développer un service de transport scolaire de qualité. Sans doute parce que cela fonctionnait trop bien, peut-être parce que personne ne demandait rien, la loi NOTRe a tout chamboulé en confiant cette compétence aux régions. Si elles pourront faire appel aux départements, on a ignoré la réalité des territoires : en trente ans, la plupart des conseils départementaux ont conclu des conventions avec des autorités organisatrices de deuxième niveau pour constituer des services de transports scolaires à la carte, taillés sur mesure.

Dans le Tarn-et-Garonne, nous sommes inquiets. Face à l'absence de réponses du Gouvernement, la région Occitanie a demandé de reporter d'un an l'entrée en vigueur de la loi pour y voir clair. Monsieur le ministre, plutôt que de tenir des propos lénifiants, écoutez l'ADF. C'est le transfert du transport scolaire aux régions qui a tout désorganisé. Mme Lebranchu a reconnu elle-même, un an après, que « le Gouvernement n'a pas été bon » sur la loi NOTRe. Cette proposition de loi lui apporte un correctif nécessaire, plus utile que le prêchi-prêcha que vous venez de nous servir ! (Applaudissements à droite)

M. Christian Favier .  - Cette proposition de loi corrige une des nombreuses incohérences de la loi NOTRe que notre groupe CRC a toujours combattue. Les élus locaux attendaient une véritable loi de décentralisation, consacrant un service public du XXIe siècle, et pas une transcription technocratique de directives supranationales dictées par Bruxelles. Nous l'avions dit : cette réforme consacre la tutelle des régions, en contradiction avec l'article 72 de la Constitution.

Le transfert de la compétence des transports scolaires à la région est absurde. Comment une région XXL comme la nouvelle Aquitaine, presque aussi grande que le Portugal, pourrait-elle organiser le ramassage scolaire village par village ?

M. Bruno Sido.  - Bien sûr ! La loi NOTRe est de recentralisation.

M. Christian Favier.  - Je ne peux pas m'empêcher de penser que ce transfert de compétences a d'abord été réfléchi pour favoriser les grandes sociétés privées de transport. Et ce, au détriment des petits transporteurs locaux ainsi que des élèves et des familles qui, souvent à la demande d'élus communistes, bénéficiaient de la gratuité des transports scolaires dans de nombreux départements.

L'impossibilité d'une subdélégation est aberrante alors que les départements délèguent aujourd'hui leurs compétences à 3 453 autorités organisatrices de deuxième rang. Par principe de réalité, nous prenons acte de cette proposition de loi qui, ce n'est pas un hasard, est cosignée par trois présidents de conseils départementaux ; l'amendement du rapporteur apporte des sécurités juridiques bienvenues. La subdélégation, qui existe en Ile-de-France depuis 2008, fonctionne bien en Seine-et-Marne.

Décidément, les réformes territoriales technocratiques de cette législature ne résistent pas à l'épreuve de la réalité : rationalisation et regroupement des compétences menés au nom de l'austérité sont inadaptés aux besoins des territoires.

Le groupe CRC votera cette proposition de loi qui ne constitue qu'une première étape, la décentralisation reste à faire ! (Applaudissements sur le banc de la commission et quelques applaudissements à droite)

M. Pierre-Yves Collombat .  - Les transports scolaires fonctionneront-ils mieux quand la loi NOTRe entrera en vigueur ?

M. François Bonhomme.  - Non !

M. Pierre-Yves Collombat.  - Leur organisation sera-t-elle plus lisible pour les élèves et les parents ? Les responsables seront-ils plus accessibles ? On peut en douter... La loi NOTRe a d'ailleurs laissé aux départements le transport scolaire des élèves handicapés, en dépit du dogme de l'unicité d'exercice des compétences.

Espérons que d'obscures raisons juridiques, dont Bruxelles a le secret, ne remettent pas en cause la correction qu'apporte cette proposition de loi. On sait déjà que tous les départements ne sont pas prêts à assumer cette compétence qui n'est plus la leur. Si les régions veulent l'exercer, qu'elles le fassent. On jugera aux résultats...

Le transport scolaire, confié aux régions, sera-t-il moins onéreux ? Non ! On ne parle d'ailleurs plus des 20 milliards d'euros d'économies que devaient générer les réformes territoriales.... Si l'on veut maintenir la qualité du service, il faudra bien y mettre le prix.

Nous avons là une illustration des absurdités auxquelles on est conduit lorsqu'au lieu de partir des problèmes concrets, on part d'priori. « Il y a trop de communes en France » ; « Il y a trop de fonctionnaires » ; « C'est dans les métropoles que se crée la richesse, d'où elle ruisselle sur les territoires » ; autant de sornettes dont on se garde de vérifier la pertinence - on aurait des surprises. Je rêve d'une réforme où l'on se préoccuperait, non des compétences, mais du service rendu à la population. Dans « transport scolaire », pour nous, l'important est « scolaire ». Vu d'un bureau, l'important est « transport » ; on voit les bus, et non les élèves qu'il faut rapatrier d'urgence quand l'inspecteur nous le demande à cause des chutes de neige et du verglas.

M. Simon Sutour.  - Absolument !

M. Pierre-Yves Collombat.  - La feuille de papier, on le sait, « supporte tout » ; la loi, aussi ; la réalité, beaucoup moins ! Le groupe RDSE votera cette proposition de loi en espérant qu'elle ira à son terme. (Applaudissements sur quelques bancs socialistes, au centre et à droite)

M. François Bonhomme.  - Très bien !

M. Jean-Jacques Lasserre .  - La loi NOTRe est source de complexité en transférant aux régions le transport scolaire alors que le département conserve le transport des élèves handicapés. Certaines régions ont fait le choix d'exercer cette compétence, d'autres la délégueront à des départements à qui l'on interdit de manière incohérente la subdélégation quand ils avaient l'habitude de travailler avec des entités choisies.

Cette proposition de loi est bienvenue qui autorise les contrats de prestation de service. Le département est bien le niveau territorial le plus adéquat ; il doit pouvoir déléguer sa compétence si c'est opportun. Cela forme un tout cohérent avec la compétence sur les collèges, les routes et les transports spécialisés.

La loi NOTRe apporte de la clarté mais elle casse la proximité. Cette proposition de loi est une évidence. Elle donne de la souplesse. Il faudra aussi se soucier des conditions financières d'exercice de cette compétence. Attention à la voracité des régions ! Monsieur le ministre, votre position nous étonne. Laissons aux territoires le soin de s'organiser. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Simon Sutour .  - Cette proposition de loi que certains considèrent comme une rustine à la loi NOTRe n'en est pas moins essentielle pour clarifier la compétence transport entre régions et départements. Nous avons à résoudre « une équation à multiples inconnues », comme l'écrivait récemment un magazine bien connu.

Les modalités du transfert de la compétence du transport scolaire sont de moins en moins claires à mesure que s'approche l'échéance. Des autorités de deuxième rang au nombre de 3 345, des départements et des régions aux souhaits hétérogènes, il était temps de mettre fin à la surenchère d'ingéniosité déployée pour contourner la Loti.

Deux millions d'élèves transportés, 4 milliards d'euros de budget, le sujet n'est pas anodin. Le transfert du transport scolaire aux départements en 1982-1983 a été un élément majeur de la décentralisation. Pour l'avoir vécu et mis en place dans le Gard en tant que directeur général des services, je peux vous l'assurer : il a largement contribué à réduire les inégalités entre territoires urbains et ruraux. La proximité entre donneur d'ordre et exécutants est essentielle. C'est, entre autres, la condition de la réactivité lors d'alertes météorologiques. Et, vous ne l'ignorez pas, le Gard est touché par de nombreux épisodes cévenols.

Seuls 17 % des départements assumaient les responsabilités directes de cette compétence, les autres faisaient tous appel à des autorités de deuxième rang. C'est le cas du Gard où sont transportés 22 000 élèves pour une contribution annuelle de 70 euros alors que le coût réel s'élève à 900 euros.

Le transport interurbain sera confié aux régions le 1er janvier prochain, le transport scolaire le sera le 1er septembre. Cette dissociation est curieuse car les deux sont liés : un tiers des élèves empruntent les lignes interurbaines. Le service public ne connaît pas de clients mais des usagers.

Je défendrai toujours le droit de tous les élèves, y compris ceux qui habitent loin des centres urbains, à bénéficier du transport scolaire, quitte à faire appel à des taxis.

Il avait fallu une proposition de loi pour rendre aux départements la lutte contre les incendies de forêts, rendue impossible par la suppression de la clause de compétence générale dans la loi NOTRe. Il en faut une aujourd'hui pour revenir sur l'interdiction de la subdélégation. Sans elle, on ne pourra pas organiser le transport des élèves durant un an. Pardonnez-moi l'expression, c'est un peu la foire pour l'heure : certaines régions veulent déléguer cette compétence, d'autres l'exercer directement, l'Occitanie souhaite un délai... Le groupe socialiste votera le texte grandement amélioré par le rapporteur en espérant un consensus large au Sénat et son inscription rapide à une niche parlementaire à l'Assemblée nationale. (Applaudissements)

M. Daniel Gremillet .  - Je salue l'initiative des trois auteurs de cette proposition de loi, dans une démarche de proximité et d'efficacité. Il est rare de voir un texte tisser aussi finement la toile d'araignée territoriale, coller à la multiplicité des solutions trouvées par les territoires, reconnaître leur efficacité au service des enfants et des parents.

Derrière, se pose aussi la question de l'aménagement du territoire, du maintien des opérateurs de transport locaux et de leurs emplois, du maillage territorial. Élu de la région du Grand-Est, je connais la nécessité du dialogue entre tous les acteurs, toutes les collectivités. La loi NOTRe a été adoptée à marche forcée. Ce texte la rend viable au quotidien. Nous le devons aux familles, aux habitants. (Applaudissements)

M. René Vandierendonck, rapporteur et M. Charles Revet.  - Bravo !

M. Jacques Grosperrin .  - La loi NOTRe a dépossédé les départements de beaucoup de leurs compétences, au préfet des régions. Le transport scolaire est pourtant affaire de proximité. Le dispositif précédent fonctionnait bien. Pourquoi l'avoir changé ? Depuis 30 ans, les départements avaient parfaitement assumé leur mission, agissant au cas par cas pour résoudre les problèmes qu'ils rencontraient.

Comment les grandes régions feront-elles ? Les conseillers départementaux essuieront les plâtres, tant nos concitoyens sont habitués à l'idée que les transports scolaires relèvent des départements. Avec cette proposition de loi, nous pourrons prolonger des dispositifs qui ont fait leurs preuves. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Alain Marc .  - Les départements sont des collectivités territoriales de proximité. Mais au nom de la sacro-sainte boboïtude qui a envahi les sphères technocratiques parisiennes, on a voulu les supprimer. Une institution de 200 ans, ce n'était pas moderne... Heureusement, ils ont survécu. La loi NOTRe comporte beaucoup d'aberrations, comme le transfert de la compétence du transport scolaire aux régions ou de l'eau et de l'assainissement aux communautés de communes.

Dans certains départements, on va chercher les enfants jusque dans les fermes. Ailleurs, on se contente d'organiser un ramassage à des arrêts situés sur les voies principales. Les niveaux de service sont très différents. Les grandes régions devront harmoniser tout cela ; et, forcément, par le haut. La loi NOTRe, loin de favoriser des économies, entraînera des dépenses nouvelles. Nous voterons ce texte. (Applaudissements au centre et à droite ; M. Simon Sutour applaudit également.)

M. Jean-Michel Baylet, ministre .  - Après tout ce que j'ai entendu, y compris de la part de ceux qui l'ont votée, la loi NOTRe, je le rappelle, a fait l'objet d'un accord en CMP !

M. François Bonhomme.  - C'était « Sauve qui peut ! ».

M. Jean-Michel Baylet, ministre.  - Dès lors qu'elle est ainsi devenue loi de la République, elle doit être appliquée. Je crois d'ailleurs n'être pas pour rien, grâce au travail de persuasion que nous avons mené avec quelques amis, dans la survie des départements...

M. François Bonhomme.  - Au prix de quelle acrobatie !

M. Jean-Michel Baylet, ministre.  - La loi entre en vigueur, je le répète, qu'on le veuille ou non, ce n'est pas le fait du Gouvernement.

Il n'y aurait plus aucune souplesse ! Je répète que la région a tout loisir de subdéléguer, soit au département, soit directement aux collectivités territoriales, EPCI, associations...

Enfin, la quasi-totalité des régions ont décidé d'exercer pleinement cette compétence.

M. François Bonhomme.  - Qu'est-ce que cela prouve ?

La discussion générale est close.

Discussion de l'article unique

M. Philippe Bas, président de la commission des lois .  - Ne restons pas sur un malentendu. Le Sénat ne devient nullement révolutionnaire. Vous le saviez, ayant une assez longue pratique de cette assemblée... Il a certes voté la loi NOTRe, et ce faisant, il ne la dénonce ni ne l'approuve totalement. Nous avons conclu un compromis avec l'Assemblée nationale - car le Sénat est voué au compromis ; s'il le refuse, il est évincé du processus législatif...

M. René Vandierendonck, rapporteur.  - Très bien !

M. Philippe Bas, président de la commission.  - Il faut en outre distinguer délégation et subdélégation. Nous nous sommes réjouis de voir la région devenir autorité du droit comme pour l'organisation du transport scolaire et du transport interurbain de voyageurs. Elle peut déléguer cette compétence aux départements. Mais auparavant, les départements déléguaient déjà cette compétence.

La règle veut que, lorsqu'une collectivité reçoit délégation d'une compétence d'une autre collectivité, elle ne puisse à son tour la déléguer à une autre collectivité. Nous aménageons seulement cette règle pour préserver ce qui donne toute satisfaction : il n'y a là nulle révolution ! (Applaudissements au centre et à droite)

L'article unique de la proposition de loi est adopté.

Mme la présidente.  - C'est l'unanimité. (Applaudissements au centre et à droite)