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Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



Questions orales

Obligation d'emploi des travailleurs handicapés

M. Philippe Mouiller

Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail

Soutien aux collectivités et contrats d'apprentissage

M. Vincent Delahaye

Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail

Suivi des personnes bénéficiant du chômage tout en ayant un emploi

M. Roger Karoutchi

Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail

Vétusté du réseau ferroviaire dans la Nièvre

M. Patrice Joly

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État

Travaux routiers dans le Lot-et-Garonne

Mme Christine Bonfanti-Dossat

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

Conséquences de la suppression des trains de nuit

Mme Martine Berthet

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

Pollution des terrains de l'ancienne usine Saft d'Angoulême

Mme Nicole Bonnefoy

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

Prévention des avalanches et qualité des bulletins météorologiques

M. Cyril Pellevat

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

Pollution plastique des océans

M. Didier Mandelli

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

Danger d'un projet éolien pour une commune

M. Jean-François Longeot

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

Relance énergétique de la petite hydro-électricité

M. Olivier Cigolotti

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

Financement de la société nationale de sauvetage en mer

M. Christophe Priou

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

Ouverture des grandes surfaces le dimanche

Mme Françoise Gatel

M. Cédric O, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances et du ministre de l'action et des comptes publics, chargé du numérique

Inquiétudes des travailleurs frontaliers sur la convention fiscale avec le Luxembourg

Mme Véronique Guillotin

M. Cédric O, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances et du ministre de l'action et des comptes publics, chargé du numérique

Ressources des chambres des métiers et de l'artisanat des outre-mer

M. Georges Patient

M. Cédric O, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances et du ministre de l'action et des comptes publics, chargé du numérique

Investissements locaux et nationaux

M. Yannick Vaugrenard

M. Cédric O, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances et du ministre de l'action et des comptes publics, chargé du numérique

Inquiétudes sur la réforme des finances publiques en Seine-Maritime

Mme Céline Brulin

M. Cédric O, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances et du ministre de l'action et des comptes publics, chargé du numérique

Nouvelle organisation des services des finances publiques

M. Alain Duran

M. Cédric O, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances et du ministre de l'action et des comptes publics, chargé du numérique

Fibre optique en Bretagne

Mme Sylvie Robert

M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement

Gestion de la compétence « affaires scolaires »

Mme Brigitte Micouleau

M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement

Service de gardes nature du Grand Belfort

M. Cédric Perrin

M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement

Rétablissement du conseiller territorial

Mme Christine Herzog

M. Christophe Castaner, ministre de l'intérieur

Fermeture du commissariat de Puteaux

M. Philippe Pemezec

M. Christophe Castaner, ministre de l'intérieur

Site des Brotteaux

M. Patrick Chaize

M. Christophe Castaner, ministre de l'intérieur

Retraites complémentaires des agriculteurs

M. Jean-François Rapin

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse

Médecine esthétique

Mme Élisabeth Doineau

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse

Mise en place du tiers payant

M. Jean-Pierre Moga

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse

Numerus clausus en Centre-Val-de-Loire

M. Jean-Paul Prince

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse

Zones sous-médicalisées

M. Roland Courteau

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse

Fermeture de lits de gériatrie

Mme Laurence Cohen

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse

Avenir de la médecine scolaire

Mme Mireille Jouve

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse

Droits à la retraite des enseignants

M. Olivier Paccaud

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse

Normes d'encadrement dans les collèges

Mme Christine Lavarde

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse

Droits des anciens combattants

M. Jean-Marc Todeschini

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse

Lutte contre les ravageurs des noisettes

M. François Bonhomme

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse

Hommage à une délégation parlementaire britannique

Organisation du système de santé (Conclusions de la CMP)

Discussion générale

M. Alain Milon, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire

Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé

Mme Laurence Cohen

M. Yves Daudigny

Mme Véronique Guillotin

Mme Élisabeth Doineau

Hommage à une délégation parlementaire irakienne

Organisation du système de santé (Conclusions de la CMP - Suite)

Discussion générale (Suite)

M. Daniel Chasseing

M. Michel Amiel

M. René-Paul Savary

Mme Nadine Grelet-Certenais

Discussion du texte élaboré par la CMP

ARTICLE 2

Création de l'Office français de la biodiversité Application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution (Conclusions des CMP)

Discussion générale commune

M. Jean-Claude Luche, rapporteur pour le Sénat des commissions mixtes paritaires

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

M. Claude Bérit-Débat

M. Ronan Dantec

M. Jérôme Bignon

M. Jean-Noël Cardoux

M. François Patriat

M. Guillaume Gontard

Mme Anne-Catherine Loisier

M. Jean-Paul Prince

Mme Anne Chain-Larché

M. Guillaume Chevrollier

Discussion du texte élaboré par la CMP sur le projet de loi

ARTICLE PREMIER BIS

ARTICLE 10

ARTICLE 12 (Nouveau)

Vote sur le texte de la CMP sur le projet de loi

M. Gérard Poadja

Mme Laurence Rossignol

M. Jean-Noël Cardoux

Échec en CMP

Rappel au Règlement

Énergie et climat (Procédure accélérée)

Rappels au Règlement

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques

M. Roland Courteau

Discussion générale

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

M. Daniel Gremillet, rapporteur de la commission des affaires économiques

Mme Pascale Bories, rapporteure pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable

M. Ronan Dantec

Mme Christine Herzog

M. Jean-Pierre Moga

M. Jean-Pierre Decool

M. Bernard Buis

M. Fabien Gay

M. Roland Courteau

M. Jean-François Husson

M. Éric Gold

Mme Anne-Catherine Loisier

M. Franck Menonville

Mme Élisabeth Lamure

Mme Angèle Préville

M. Stéphane Piednoir

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État

Discussion des articles

ARTICLE ADDITIONNEL avant l'article premier

Discussion des articles (Suite)

ARTICLE PREMIER

M. Stéphane Piednoir

M. Pierre Cuypers

M. Roland Courteau

M. Fabien Gay

M. Jean-François Husson

Mme Françoise Férat

M. Alain Duran

M. Maurice Antiste

M. Gérard Poadja

Mme Nicole Bonnefoy

Mme Patricia Morhet-Richaud

M. Franck Montaugé

M. Patrice Joly

M. Olivier Jacquin

M. Jean-François Longeot

Mme Angèle Préville

Mme Marie-Noëlle Lienemann

Annexes

Ordre du jour du mercredi 17 juillet 2019

Analyse des scrutins publics




SÉANCE

du mardi 16 juillet 2019

7e séance de la session extraordinaire 2018-2019

présidence de M. Thani Mohamed Soilihi, vice-président

Secrétaires : Mme Jacky Deromedi, Mme Patricia Schillinger.

La séance est ouverte à 09 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance est adopté.

Questions orales

M. le président.  - L'ordre du jour appelle 35 questions orales.

Obligation d'emploi des travailleurs handicapés

M. Philippe Mouiller .  - Les décrets d'application de la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel ont été publiés le 27 mai dernier et suscitent déjà des inquiétudes.

Afin de favoriser l'emploi direct des personnes handicapées, la loi prévoit que les contrats de sous-traitance conclus par les entreprises ou collectivités territoriales avec les établissements et services d'aide par le travail (ESAT) ou les entreprises adaptées (EA) - soit près de 250 000 travailleurs handicapés - ne feront l'objet que d'une déduction de la contribution des employeurs à hauteur de 30 %. Ne craignez-vous pas des retombées fâcheuses sur le secteur protégé ?

Nous regrettons également la suppression de la prise en compte de la lourdeur du handicap. Les premiers effets se font sentir avec la fin des contrats à temps partiel.

Qu'est-il prévu pour les travailleurs handicapés ayant les profils les plus difficiles ? En outre, nous sommes inquiets du risque d'absorption de l'Agefiph par Pôle Emploi. Où en est votre réflexion ?

Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail .  - Les associations du secteur du handicap sont inquiètes des effets de la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel sur les ESAT et les EA. Cette loi procède du constat que le taux d'emploi des travailleurs handicapés reste bas - 3,6 % avec une progression de 0,1 point par an - en comparaison avec l'objectif légal de 6 % !

N'opposons toutefois pas emploi direct et emploi indirect.

La loi ne change pas le principe mais les modalités de prise en compte des contrats de sous-traitance, qui prend la forme d'une déduction. Tout ceci a été fait en coopération avec les partenaires sociaux. Cela ne pose pas de problème aux responsables associatifs. Sur le terrain, lorsqu'on explique la réforme, elle est acceptée.

Je suis favorable à une gradation entre ESAT, EA et emploi direct. Avec Sophie Cluzel, nous avons passé un accord avec les entreprises adaptées pour un seuil qui passerait de 40 à 90 places. Quant à l'Agefiph, nous n'envisageons pas une fusion, mais un rapprochement, une coopération renforcée.

M. Philippe Mouiller.  - Nous partageons l'objectif de la réforme. Les curseurs - taux, prise en compte dans la sous-traitance - sont à déplacer avec prudence. Les structures sont sur une ligne de crête économique qu'il ne faut pas quitter. Attention, enfin, aux personnes les plus lourdement handicapées, sorties du dispositif.

Soutien aux collectivités et contrats d'apprentissage

M. Vincent Delahaye .  - À la suite du grand débat national, le Premier ministre faisait de l'apprentissage l'un des cinq chantiers prioritaires de l'action du Gouvernement.

Le taux de chômage des moins de 25 ans est supérieur à 20 % ; 1,3 million de jeunes sont actuellement sans emploi et sans formation. L'apprentissage peut être la voie royale pour lutter contre le chômage des jeunes puisque 70 % des apprentis se voient proposer un poste à l'issue de leur formation.

Néanmoins, si tout le monde s'accorde pour louer les vertus de l'apprentissage, les organismes gestionnaires de centres de formation d'apprentis (CFA) peinent souvent à trouver des employeurs prêts à accueillir des apprentis.

Afin de remédier à cette situation, nombre de collectivités territoriales, en particulier les communes, sont prêtes à accueillir des apprentis en leur sein. Le rapport publié par le Conseil d'État en 2015 dénombrait 10 000 apprentis accueillis dans la fonction publique, dont les deux tiers étaient recrutés dans les collectivités territoriales. Ce chiffre pourrait être bien supérieur car, à l'heure actuelle, rien n'est fait pour aider les collectivités territoriales à recruter des apprentis.

La loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel a créé une aide unique aux employeurs d'apprentis, limitée aux entreprises du secteur privé de moins de 250 salariés. Les organismes du secteur public non industriel et commercial, et donc les communes, n'y sont pas éligibles.

Cette situation est inéquitable dès lors que l'apprentissage est déjà plus coûteux pour les collectivités que pour les entreprises privées. Il existe une majoration spécifique de la rémunération des apprentis du secteur public en fonction du diplôme préparé. Un apprenti visant l'obtention d'un bac pro ou d'un BTS coûtera plus du double à la collectivité publique. Cette situation a pour conséquence un coût de revient beaucoup trop élevé pour les petites et moyennes collectivités. Voilà pourquoi tant de communes, pourtant de bonne volonté, sont aujourd'hui dissuadées de recourir à l'apprentissage.

Le Gouvernement compte-t-il aider les communes comme les entreprises de moins de 250 salariés ? Pourquoi ne pas élargir l'aide aux autres entreprises ?

Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail .  - Nous partageons votre objectif de développer l'apprentissage, voie royale d'excellence et d'insertion vers l'emploi. Les effets de la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel se font déjà sentir, avec une hausse de 7 % l'année dernière et une hausse de 10 % depuis le début de l'année. La diversité des métiers au sein des collectivités territoriales est exceptionnelle.

L'un des freins au développement de l'apprentissage était la prise en compte de la formation. Le projet de loi sur la fonction publique prévoit que les contrats signés par les communes après le 31 décembre 2019 seraient financés pour moitié par le CNFPT à hauteur de 45 millions d'euros, soit 15 000 apprentis ; l'autre moitié étant payée par les collectivités, lesquelles sont exonérées de taxe d'apprentissage.

Les régions percevront un soutien financier de l'État pour assurer la présence de CFA sur tout le territoire.

Une réflexion sur l'accès à l'emploi des apprentis dans la fonction publique territoriale est également en cours.

M. Vincent Delahaye.  - Une communication spéciale à l'attention des collectivités serait bienvenue.

Suivi des personnes bénéficiant du chômage tout en ayant un emploi

M. Roger Karoutchi .  - La presse s'est fait l'écho en juin de ce que la gestion des 830 000 permittents, qui cumulent emploi et allocation-chômage, serait externalisée. Or en 2014, la Cour des comptes avait souligné que Pôle Emploi, malgré ses défauts, était plus performant que le privé sur ce créneau... Confirmez-vous ou infirmez-vous cette réforme ?

La presse ajoute qu'elle s'accompagnerait d'une baisse en moyenne de 300 euros par mois de l'indemnité. Mais pour ma part, je ne crois que le Gouvernement...

Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail .  - Tout ce que dit la presse n'est pas vrai... Il n'y a aucune diminution du capital de points. Ce qui change, c'est que les permittents ne pourront plus gagner plus que lorsqu'ils travaillaient. En effet, les premiers mois, actuellement, les revenus sont supérieurs à ce qu'ils étaient quand la personne travaillait. Le bon sens s'en étonne. En contrepartie, les permittents verront leurs droits s'allonger.

Ces derniers continueront d'être gérés par Pôle Emploi. Celui-ci ne fait que sous-traiter une partie de ses prestations à des organismes aux compétences particulières. Cela se fait déjà d'ailleurs, pour la rédaction de curriculum-vitae par exemple. Pôle Emploi peut faire ou faire faire.

En l'occurrence, les permittents ont souvent du mal à bénéficier de l'accompagnement de Pôle Emploi, car ils peuvent être appelés à tout moment par un employeur. Grâce à cet accompagnement spécialisé, ils pourront participer à des ateliers ou des formations le week-end ou en soirée.

M. Roger Karoutchi.  - Merci de ces précisions. Il faut rassurer les gens : une communication plus précise du Gouvernement serait bienvenue.

Vétusté du réseau ferroviaire dans la Nièvre

M. Patrice Joly .  - Ma question porte sur la vétusté du réseau SNCF sur la ligne Paris-Nevers et en particulier dans la Nièvre. En 2018, pannes et incidents ont paralysé à plusieurs reprises la ligne Paris-Montargis-Nevers. Plus de vingt-trois trains ont été supprimés durant cette même année.

La multiplication de ces arrêts brutaux du trafic ferroviaire est le corollaire de la vétusté importante du réseau SNCF, certaines locomotives datant de la présidence de Georges Pompidou, mais aussi des nouveaux travaux de réfection des lignes.

À titre d'exemple, le 27 juin 2019, les passagers du train Paris-Clermont-Ferrand ont dû passer une nuit cauchemardesque sur les voies. Ils sont restés bloqués plus de onze heures dans le train sans eau ni climatisation, sans pouvoir utiliser les toilettes, hors d'usage, en raison d'une caténaire qui a disjoncté et fondu vers Montargis dans le Loiret, entraînant l'immobilisation du train.

Pourtant, SNCF Réseau, gestionnaire du réseau ferré français, a annoncé un investissement de 183 millions d'euros pour la modernisation et la maintenance du réseau régional. Dans la Nièvre, plusieurs chantiers d'importance sont annoncés ou en cours pour un montant total d'un peu plus de 20 millions d'euros.

Or ces travaux tant attendus sont également source de difficultés et de retards. Ils sont normalement exécutés sur les voies la nuit mais ils se prolongent souvent jusqu'au petit matin, paralysant ainsi les départs pour Paris. Ces écarts, non contractuels, causent un préjudice immense aux Nivernais qui ne peuvent circuler pour se rendre à leur lieu de travail.

Quelles mesures d'accompagnement le Gouvernement envisage-t-il de prendre afin d'améliorer le renouvellement des installations du réseau SNCF et de permettre aux Nivernais de se rendre notamment à Paris dans des conditions sereines ?

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État .  - Veuillez excuser l'absence de Mme Borne. Le retard exceptionnel du 27 juin est dû à deux incidents graves : un accident de personnes en région parisienne, qui a bloqué le départ du train pendant 3 heures, puis un arrachement de la caténaire près de Montargis après une mauvaise manipulation du conducteur du train précédent.

Les passagers ont été avitaillés en eau et en repas, et seront indemnisés à hauteur de 200 % du prix du billet.

La gestion de crise peut certes être améliorée. La loi pour un nouveau pacte ferroviaire attribue cette compétence en totalité à SNCF Réseau à partir de 2020.

Le Gouvernement est particulièrement attentif à l'amélioration des lignes existantes. Pour Paris-Nevers, à l'horizon 2025, plus de 1,1 milliard d'euros sera investi : 350 millions d'euros pour acquérir 12 nouvelles rames ; 760 millions d'euros pour la remise à niveau de l'infrastructure ; des opérations ciblées de modernisation et de performance feront l'objet de priorisation en lien avec les collectivités locales.

Depuis le 1er février 2019 également, le Wifi a été installé dans tous les trains pour environ 3,2 millions d'euros. C'est le premier train d'équilibre du territoire (TET) à en bénéficier, avec un retour très positif. Le but de ces travaux est d'améliorer la fiabilité de la ligne et de permettre un parcours de 1 h 55 entre Paris et Nevers.

Travaux routiers dans le Lot-et-Garonne

Mme Christine Bonfanti-Dossat .  - Les élus d'Agen et du Grand Villeneuvois se sont engagés à développer l'axe routier de la RN21 et plus particulièrement la section Monbalen-La Croix Blanche, qui relie Villeneuve sur Lot à Agen et à l'autoroute et donnerait un second souffle à notre économie départementale.

C'est dans cet esprit qu'en 2015, l'État a inscrit la RN2I dans le Contrat de Plan État-Région (CEPR). Mais hélas, trois années sont passées et le projet n'a toujours pas été concrétisé. Or en dépit de la réaffirmation de ces engagements à travers une convention de financement entre l'État, le département, la communauté d'agglomération d'Agen et la communauté d'agglomération du Grand Villeneuvois, signée le 18 mars 2019 et d'une seconde signée plus récemment, la concrétisation se fait attendre.

L'attente se transforme en inquiétude, depuis que le Gouvernement a annoncé vouloir transférer 4 000 kilomètres de routes nationales aux départements.

Lors de son déplacement en Dordogne le 31 janvier, la ministre des transports a déclaré vouloir apporter des réponses concrètes aux territoires plutôt que de leur vendre du rêve... Nous attendons donc une réponse sans langue de bois ! Allez-vous transférer la RN21 ? Les 24 millions d'euros de crédits prévus au CPER iront-ils au Lot-et-Garonne ? Comprenez que les esprits s'échauffent, car ce département est le seul à ne pas avoir bénéficié de crédits inscrits au CPER.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire .  - Mme Borne m'a chargée de vous répondre... sans langue de bois !

L'État est pleinement mobilisé pour assurer des équipements adaptés aux besoins. Les études de conception détaillée de la section « La Croix-Blanche - Monbalen », d'une longueur de 7,2 km, ont mis en évidence un fort surcoût, l'estimation passant de 36 à 50 millions d'euros. Les services ont cherché à optimiser le projet pour qu'il reste dans l'enveloppe initiale ; il s'agira de limiter la section neuve à deux fois deux voies à la création d'un créneau de dépassement au droit de Monbalen, à réaménager la section existante au sud de ce créneau et à créer un giratoire.

La convention financière signée le 18 mars dernier a confirmé cette solution. Elle ouvre la voie à la finalisation des études de conception détaillée pour lesquelles 2 millions d'euros ont été alloués cette année : un million pour l'engagement du marché de maîtrise d'oeuvre et les études géotechniques et un autre pour la réalisation des acquisitions foncières nécessaires.

Le transfert de la RN21 n'est pas envisagé pour l'instant, le Conseil départemental n'ayant pas fait part de son souhait. Si cette hypothèse devait être examinée, ses conditions, notamment financières, seraient directement inspirées des conditions mises en place dans le cadre de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales.

Mme Christine Bonfanti-Dossat.  - Merci pour votre réponse. Ces travaux sont importants notamment pour des raisons de sécurité. Les esprits s'échauffent, car le Lot-et-Garonne est le seul qui n'avait pas fait l'objet d'inscriptions au CPER.

Conséquences de la suppression des trains de nuit

Mme Martine Berthet .  - Ma question porte sur les suppressions de trains de nuit dans les territoires.

En Savoie, alors que deux TGV par jour ont été supprimés entre Paris et Chambéry, la disparition du train de nuit Paris-Bourg-Saint-Maurice au motif de sa non-rentabilité a également de lourdes conséquences pour la desserte des territoires de montagne des Alpes du nord, les places de TGV étant saturées en période de vacances et particulièrement onéreuses.

Il est essentiel de développer le tourisme non seulement en hiver, mais aussi en été. Au-delà de l'aspect économique, le tourisme d'été est source de beaucoup de bien-être, pour les familles et les jeunes urbains. Or un aller-retour en TGV depuis Paris coûte très cher une fois que ceux-ci n'ont plus droit aux cartes SNCF de réduction Jeune : 450 à 500 euros, voire plus pour un couple. Ils préfèrent dès lors louer une voiture.

À l'heure où les enjeux écologiques sont importants, il paraît indispensable de remettre en fonction la ligne de nuit Paris-Bourg-Saint-Maurice, au coût beaucoup moins onéreux pour ses utilisateurs.

Quelle est la position du Gouvernement sur la possibilité d'une relance d'une desserte des territoires par des trains de nuit modernes ?

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire .  - La diminution de l'offre TGV en Savoie est liée à des travaux temporaires menés depuis cette année et au moins jusqu'en 2023 sur le pôle d'échanges multimodal de Lyon Part-Dieu, se traduisant par la fermeture de 2 voies sur 11.

Cette contrainte technique a conduit SNCF Mobilités à travailler à une adaptation de l'offre grande vitesse entre Paris et les régions de l'Est et du Sud-Est de la France, en modifiant l'itinéraire ou en supprimant certains TGV à compter du mois de décembre 2018, dont la liaison Paris-Annecy desservant Chambéry.

Pour compenser la baisse de fréquence sur la liaison Paris-Annecy, SNCF Mobilités déploie de nouvelles rames à deux niveaux, en mesure d'accueillir davantage de voyageurs, ce qui permet une réduction du nombre de places de 10 % seulement.

SNCF Mobilités dispose pour son activité grande vitesse d'une autonomie de gestion, dans le respect de l'homologation par l'État de prix plafonds. C'est donc à elle de construire sa stratégie commerciale. Le Gouvernement est naturellement attentif à ce que des tarifs compétitifs rendent le TGV accessible au plus grand nombre.

Le train de nuit Paris-Bourg-Saint-Maurice a été supprimé par le précédent gouvernement au 1er octobre 2016 du fait d'un modèle économique non soutenable et d'existence d'alternatives de bon niveau. Mais les débats autour du projet de loi d'orientation des mobilités ont montré la nécessité de se réinterroger sur le modèle des trains de nuit. L'État réfléchit à l'amélioration de cette offre répondant aux besoins de désenclavement des territoires et qui réduit l'empreinte écologique.

Mme Martine Berthet.  - Merci pour votre réponse. Je note bien que le Gouvernement étudie les trains de nuit. Le développement économique et touristique le justifie autant que la décarbonation de ces transports.

Pollution des terrains de l'ancienne usine Saft d'Angoulême

Mme Nicole Bonnefoy .  - Ma question porte sur la gestion du dossier de la pollution des terrains de l'ancienne usine Saft du quartier Saint-Cybard.

La presse locale du 29 mai 2019 relate que des négociations auraient eu lieu entre le conseil départemental de la Charente et Alcatel Lucent participation (ALP), identifié comme l'ayant droit de la Saft. Selon la presse, ces négociations auraient abouti à un accord prévoyant un partage de la facture pour la dépollution du site, qui s'établirait entre 2 et 5 millions d'euros au total.

Je rappelle que l'État disposait parfaitement d'informations sur ce site industriel classé puisque celui-ci est classé parmi les sites industriels figurant sur la base de données des sites industriels et activités de service (Basias) qui indique que l'activité du site a commencé en 1936 et s'est achevée en 1984. Un inventaire des produits utilisés ou générés par l'activité du site est réalisé. Il relève la présence de cadmium, nickel, plomb, oxyde de plomb ainsi que des acides minéraux ou organiques. En outre, la base de données sur les sites et sols pollués ou potentiellement pollués (Basol), récemment mise à jour à la suite des derniers diagnostics, indique une date vraisemblable des faits de pollution, en 1977.

L'État avait donc depuis de nombreuses années la parfaite connaissance de la pollution des sols et des eaux souterraines. L'État a-t-il mis l'ayant droit en demeure de procéder à l'obligation de dépollution du site conformément au principe pollueur-payeur ? L'État entend-il prendre sa part dans le financement de la dépollution ?

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire .  - Le ministère de la Transition écologique et solidaire est attentif à la dépollution de ces terrains. Le ministre d'État, dans son courrier du 17 avril dernier, vous a indiqué qu'à ce stade les services de l'État n'ont pas retrouvé d'éléments démontrant que ce site anciennement exploité par la société Saft ait été classé au titre de la réglementation relative aux installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE), bien que comme vous l'indiquez ce site est recensé à la fois dans les bases de données Basias et Basol. En effet, cette première base recense les anciens sites industriels et activités de services, et pas uniquement les anciennes ICPE, et la fiche du site n'apporte aucun élément quant au classement ICPE de ce site. D'autre part, la fiche de la base Basol a été créée en juin 2018, soit après la transmission à l'État fin 2017 des premiers diagnostics de pollution par le conseil départemental de la Charente, et a été mise en ligne le 12 décembre 2018.

En conséquence, toute action administrative introduite par la préfète au titre de la législation sur les ICPE serait très fragile juridiquement et pourrait être annulée en cas de recours.

Comme cela a été annoncé lors de la réunion publique du 28 mai dernier, le conseil départemental a trouvé un accord avec l'ayant-droit de la société Saft, afin que celui-ci cofinance, dans le cadre d'une intervention volontaire, l'élaboration du plan de gestion, des diagnostics à réaliser dans les habitations et les mesures d'aménagement préconisées relatifs à la qualité de l'air ambiant, ainsi qu'à l'issue du plan de gestion les mesures de réhabilitation tant sur site que hors site.

Dans ce contexte, toute prescription envers l'ayant-droit de la société Saft pourrait déboucher sur une action contentieuse qui pourrait avoir pour conséquence, la remise en cause du cofinancement annoncé et la mise en stand-by des études et travaux de dépollution envisagés le temps que la justice ait statué.

Dans l'objectif partagé de réaliser les travaux au plus tôt, l'État ne mettra pas l'ayant droit en demeure et préférera la voie déjà empruntée avec le conseil départemental.

Mme Nicole Bonnefoy.  - Le responsable est parfaitement identifié. Alcatel seul doit payer. Il appartient au ministère de respecter le droit en mettant l'ayant droit en demeure d'assumer ses manquements, au lieu d'inventer une nouvelle règle, qui consiste à faire payer non le pollueur, mais le pollué !

Prévention des avalanches et qualité des bulletins météorologiques

M. Cyril Pellevat .  - Météo France est un établissement public administratif qui exerce les attributions de l'État en matière de sécurité météorologique des personnes et des biens. À ce titre, il apporte son expertise technique aux services compétents de l'État. Mais peut-on encore parler d'expertise au regard des failles systématiques dans les prévisions météorologiques annoncées par Météo France ? La menace de fermeture continue pourtant à planer sur les stations météo de Chamonix et de Bourg-Saint-Maurice, dont les agents disposent de la connaissance indispensable du territoire, de ses zones à risque ainsi que de l'évolution des conditions nivologiques en période de crise en zone de montage. Comment peut-on faire confiance davantage aux capteurs automatiques qu'aux salariés formés et expérimentés de Météo France ?

On peut craindre dans ces conditions une recrudescence des accidents mortels. Les chiffres sont édifiants : on compte 21 accidents mortels et 30 décès par an. Je comprends l'inquiétude des guides de montagne, qui ont relevé des erreurs de prévision « qui dépassent le seuil de tolérance qu'il faut bien avoir s'agissant d'une prévision ».

Pierre Dac disait que « les prévisions sont difficiles, surtout lorsqu'elles concernent l'avenir ». C'est vrai, mais la qualité des bulletins météorologiques à destinations des guides de montagne et autres acteurs référents du milieu relève d'une mission de sécurité publique qui ne peut pas être sacrifiée sur l'autel du budget.

Les professionnels de la montagne se fient en conséquence aux prévisions suisses ou belges. À terme, l'offre de prévision privée supplantera l'offre publique.

À l'heure de l'urgence climatique, la perte de précision des outils de Météo France n'est pas seulement une aberration, c'est un danger. Comment comptez-vous mieux assurer la sécurité des personnes et des biens ?

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire .  - L'enjeu est important : 60 accidents ont été recensés l'an dernier, tuant 13 personnes - ce qui est toujours moins que la moyenne de 30 décès par an enregistrés auparavant.

Le bulletin de Météo France contient des informations synthétiques sur les risques pour chacun des 36 massifs des Alpes, des Pyrénées et de la Corse. Pour la Haute-Savoie, ce sont trois bulletins qui sont diffusés concernant le Mont-Blanc, les Aravis et le Chablais. Ils sont rédigés par Météo France avec la contribution des observateurs du réseau nivo-météorologique et en partenariat avec l'Association des maires de stations de montagne, de domaines skiables France, et de l'Association des directeurs de pistes et de la sécurité des stations de sports d'hiver.

Compte tenu des révolutions technologiques en cours, nous avons demandé à Météo France et à ces acteurs, mais aussi à d'autres - association nationale pour l'étude de la neige et des avalanches, système national d'observation des sports de montagne, syndicat national des guides de montagnes, syndicat des moniteurs de ski, et représentants des usagers de la montagne - d'engager une réflexion pour accroître le partage d'informations avec les acteurs de terrain : un plan d'action sera rédigé d'ici la fin de l'année.

Pollution plastique des océans

M. Didier Mandelli .  - Avec 11 millions de km carrés et 18 000 km de côtes, la France possède le second espace maritime mondial derrière les États-Unis. La mer contribue à plus de 3 % du PIB français soit 80 milliards d'euros et 336 000 emplois dans les secteurs du transport, de la pêche, de l'aquaculture, de la plaisance, du tourisme. L'économie bleue, ce sont aussi les biotechnologies marines, les énergies renouvelables, le dessalement et les communications internationales assurées à 98 % par des câbles sous-marins.

Notre espace maritime et nos territoires littoraux sont une véritable richesse pour notre biodiversité, notre économie et notre attrait touristique. Selon l'OCDE, son poids économique doublera à l'horizon 2030. Pourtant, cette richesse est de plus en plus menacée par la multiplication des déchets plastiques dans les océans, les rapports d'ONG font état de la situation préoccupante de cet impact, notamment en Méditerranée.

Il y a eu une prise de conscience grâce à la mobilisation d'ONG et d'États. La France, grâce au projet de loi sur l'économie circulaire que nous examinerons bientôt, est précurseur en la matière. Elle devra associer tous les acteurs, notamment les collectivités territoriales qui ont étendu les consignes de tri. Ainsi par exemple, en Vendée, le système Trivalis du centre de tri départemental assure le tri et le recyclage de 80 % des déchets produits.

Comment la France parviendra-t-elle à mobiliser ses partenaires internationaux, quand on sait que 90 % de la pollution provient de dix cours d'eau d'Afrique et d'Asie ?

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire .  - Je partage votre constat. La France génère 3,3 millions de tonnes de déchets plastiques par an. Le taux de collecte pour recyclage est d'un peu plus de 20 % et leur réincorporation en France dans des produits neufs de l'ordre de 10 %. Il y a donc des progrès à faire.

Une fois en mer, les déchets se fragmentent en petits débris très nocifs pour l'environnement.

Notre responsabilité est de transformer l'usage des plastiques, en favoriser l'écoconception et le réemploi. Les secteurs prioritaires ont été identifiés par la feuille de route du ministère de la Transition écologique et solidaire d'avril 2018 : emballages, bâtiment, automobile et équipement électriques et électroniques. Nous visons l'incorporation d'un million de tonnes de plastique recyclé par an.

En février 2019, un pacte sur le plastique a été signé par treize entreprises pour atteindre 60 % d'emballages réutilisables, recyclables ou compostables en 2022, et 100 % en 2025.

Le code de l'environnement interdit de plus certains produits plastiques à usage unique tels que les sacs, les assiettes et les cotons-tiges ; la loi Egalim accentue cette politique. La France a joué un rôle clé dans la rédaction de la directive européenne du 5 juin 2019 qui prévoit l'interdiction en 2021 de plusieurs de ces produits pour l'ensemble des pays européens. Le projet de loi anti-gaspillage pour une économie circulaire présenté le 10 juillet dernier en conseil des ministres prévoit encore des mesures ambitieuses pour limiter les déchets, et quatorze expérimentations ont déjà été retenues pour une collecte des emballages innovante, performante et solidaire. Je compte sur le Sénat pour accompagner ce mouvement lors de l'examen du projet de loi.

M. Laurent Duplomb.  - Ce n'est pas le sens de la question.

M. Didier Mandelli.  - Oui, la France est vertueuse. Mais 90 % de la pollution provient essentiellement d'Afrique et d'Asie... Il s'impose à la France de mobiliser nos partenaires au-delà de l'hexagone. Il est bon d'être vertueux, mais il faudrait aussi être contagieux ! (M. Laurent Duplomb applaudit, de même que Mme Françoise Gatel.)

Danger d'un projet éolien pour une commune

M. Jean-François Longeot .  - Je veux dire mon inquiétude concernant le projet Bel Coster initié par la Confédération helvétique, projet visant l'exploitation de neuf éoliennes et qui est situé sur la frontière de la commune de Jougne et de la commune de Ballaigues. Ce projet est susceptible d'avoir des incidences notables sur le territoire français. En effet, il se situe sur le périmètre de leur source des Bonnes Eaux, source existentielle pour cette collectivité, qui alimente 1 875 habitants en eau potable et détériorerait durablement le périmètre fragile de la source. C'est pourquoi les élus, les habitants, ainsi que le préfet du Doubs ont tous émis un avis défavorable à sa réalisation.

Si chacun est convaincu de la nécessité d'encourager les énergies renouvelables, le développement actuel de ce parc éolien suscite toutefois de trop forts risques.

Force est de constater, dans ce cas précis, que ce projet n'est pas respectueux de la biodiversité. Le laisser en l'état, c'est prendre le risque de priver 1 875 habitants de leur alimentation en eau potable et donc de la vie.

Dans l'esprit de la bonne coopération transfrontalière entre nos deux pays, et en application des engagements qu'ils ont pris dans le cadre de la convention d'Espoo, je vous remercie de bien vouloir tenir compte du rejet de ce projet par les élus et la population locale.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire .  - Veuillez excuser l'absence de M. de Rugy.

En octobre 2017, la Suisse a ratifié l'accord de Paris. Le développement des énergies renouvelables, enjeu fort pour la souveraineté énergétique de la Suisse, ne doit pas se faire au détriment de l'environnement et des enjeux humains.

Vous évoquez le parc éolien du canton de Vaud dont l'emprise est située sur le bassin d'alimentation du captage des Bonnes Eaux.

Dès mars 2016, ce projet a été porté à l'ordre du jour de la session annuelle du dialogue franco-suisse, puis relayé lors de certains échanges diplomatiques avec le souci d'obtenir la pleine application de la Convention d'Espoo par les autorités cantonales, notamment la mise en oeuvre de la phase de consultations bilatérales.

L'insistance des autorités françaises a payé : la population a été consultée et le préfet du Doubs a émis un avis défavorable au projet en août 2017, car le projet ne présente pas toutes les garanties de préservation de la ressource en eau. À la suite de cet avis, un groupe de travail franco-suisse s'est constitué pour apporter des réponses et un hydrogéologue agréé français a formulé des recommandations.

En septembre 2018, les autorités du canton de Vaud se sont engagées à imposer toutes les mesures permettant d'éviter la pollution des eaux souterraines, durant les phases de chantier et d'exploitation du parc éolien. Les mesures de prévention, de surveillance et de protection sont aujourd'hui établies et sont en accord avec celles imposées en France dans le cas de l'implantation de projets éoliens en contexte environnemental analogue.

J'entends votre inquiétude et celle du maire de Jougne. La réunion d'information, qui s'est tenue à Pontarlier le 12 avril dernier, a permis aux parties prenantes au projet côté suisse de présenter les mesures prises en réponse aux demandes françaises.

Je veillerai personnellement à ce que les engagements pris par les autorités suisses soient respectés.

M. Jean-François Longeot.  - J'y suis sensible. Les inquiétudes sont en effet fortes dans le Doubs. Je suis rassuré par votre implication sur ce dossier.

Relance énergétique de la petite hydro-électricité

M. Olivier Cigolotti .  - La petite hydroélectricité, notamment à travers les petits ouvrages anciens, peut produire l'équivalent de la consommation électrique, hors chauffage, d'un million de foyers.

Pourtant, en France, certains choix de « continuité écologique » ont conduit à privilégier la destruction des sites de petite hydro-électricité et des barrages, au lieu de les équiper de passes à poissons quand cela est nécessaire, alors même que la Commission européenne soulignait dès 2012 que ces aménagements devaient être des choix de première intention.

La recherche en écologie a montré que les retenues, plans d'eau, canaux et zones humides, qui font partie des annexes hydrauliques de nombreux moulins notamment, ont des effets positifs sur la biodiversité des végétaux, insectes, oiseaux ou encore sur certains poissons.

Le choix français actuel paraît donc une option profondément contestable tant sur un plan écologique qu'énergétique, et témoigne d'une surtransposition excessive des règles européennes.

De plus, il est à noter qu'équiper les sites de petite hydro-électricité, au-delà de la production d'une énergie propre, non carbonée et locale, permet un investissement dans plusieurs filières d'emplois non délocalisables telles que les bureaux d'études, les installateurs-réparateurs, les turbiniers etc., ce qui bénéficie notamment aux territoires ruraux où les moulins sont les plus nombreux ; c'est le cas en Haute-Loire.

Les chercheurs estiment qu'aujourd'hui 25 000 moulins à eau pourraient être relancés sur le territoire français, qui a le plus gros potentiel de l'Union européenne.

Face aux contentieux soulevés par les choix français, et au blocage de nombreux projets, une nouvelle politique publique s'impose.

Quelles avancées législatives et réglementaires le Gouvernement envisage-t-il pour mettre en oeuvre le potentiel de la petite hydro-électricité, tout en facilitant les procédures administratives ?

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire .  - La petite hydroélectricité, essentielle à l'atteinte des objectifs environnementaux, fait l'objet d'appels d'offres périodiques lancés par le ministère de la transition écologique et solidaire. Le 26 juin, treize projets lauréats ont été désignés. Mais le rôle de la petite hydroélectricité est limité quant à l'atteinte des objectifs nationaux.

En outre, la multiplication de ces installations dans les cours d'eau peut avoir des impacts importants. En effet, les seuils fragmentent les cours d'eau, empêchent souvent le déplacement des espèces nécessaire à l'accomplissement de leur cycle de vie. Ils peuvent ralentir les eaux qui se réchauffent plus vite l'été, perdent de l'oxygène et créent des habitats de milieux stagnants favorisant des espèces incompatibles avec le bon état des cours d'eau.

Le développement de la petite hydroélectricité doit donc se faire de façon compatible avec le bon état des cours d'eau. Afin de limiter les impacts environnementaux, la priorité est donnée à l'équipement des seuils existants non-encore équipés en hydroélectricité ou à l'amélioration d'installations hydroélectriques existantes.

Le développement de la petite hydroélectricité doit être rendu compatible avec la biodiversité, il devra donc être sélectif. Les nouveaux projets font donc l'objet d'une attention particulière.

M. Laurent Duplomb.  - Dogmatique !

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État.  - De nombreux échanges ont lieu entre les directions du ministère et les acteurs de la filière afin d'orienter ces derniers vers les projets les plus vertueux tout en limitant les contraintes administratives qui peuvent peser sur les exploitants. Un groupe de travail sur la continuité écologique piloté par mon administration et sous l'égide du comité national de l'eau a élaboré un plan d'actions qui s'est traduit par la publication d'une note technique destinée aux services instructeurs, qui vise à prioriser la restauration de la continuité écologique et à mieux prendre en compte l'ensemble des enjeux, en particulier énergétique.

M. Olivier Cigolotti.  - Nous examinons cet après-midi un projet de loi sur l'énergie et le climat. C'est l'occasion pour le Gouvernement de montrer sa détermination à atteindre le mix énergétique envisagé et à simplifier les procédures administratives beaucoup trop lourdes pour atteindre les objectifs fixés. (Applaudissements sur les bancs des groupes UC et Les Républicains)

Financement de la société nationale de sauvetage en mer

M. Christophe Priou .  - J'attire votre attention sur le financement de la société nationale de sauvetage en mer (SNSM). La perte tragique de trois sauveteurs bénévoles expérimentés, le 7 juin, rappelle à quel point la SNSM est impliquée dans des opérations de secours compliquées au cours desquelles les marins risquent leur vie pour en sauver d'autres. « Aujourd'hui plus que jamais, les sauveteurs en mer ont besoin de vous » : tel est le slogan accompagnant la demande de don. Cependant, les dons restent insuffisants pour couvrir les besoins de la SNSM. Par exemple, la formation des nageurs sauveteurs nécessite près de 300 heures de formation. Les matériels techniques sont nombreux, ils doivent impérativement être financés ainsi que l'entretien et le renouvellement de la flotte. Si la SNSM n'est pas un service d'État, elle effectue néanmoins une importante mission de service public. Près de 80 % de ses ressources proviennent de dons privés. Ces dernières années, l'État a augmenté sa participation financière au bénéfice de l'association reconnue d'utilité publique. Toutefois, il existe une incertitude pour les prochaines années et les prochains budgets. Les efforts consentis par l'État seront-ils poursuivis au-delà de 2020 ? Il semble urgent de mettre en place des financements pérennes pour accompagner efficacement les missions irremplaçables assurées par les bénévoles.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire .  - Le dramatique naufrage du 7 juin aux Sables d'Olonne restera dans nos mémoires, comme l'a rappelé le président de la République qui s'est rendu sur place.

L'État n'a pas attendu cette catastrophe pour renforcer ses aides à la SNSM ; avec un triplement de moyens à 6 millions d'euros en 2019 par rapport à 2015. Il poursuivra ses efforts en 2020 et au-delà. François de Rugy organisera une table ronde sur le modèle financier de la SNSM. Il importe de renouveler sa flotte de canots ; de professionnaliser sa gestion technique et de renforcer la formation des 8 000 bénévoles.

Le modèle de la SNSM, fondé sur le don et le bénévolat, doit être pérennisé, car il exprime la solidarité des gens de mer. Cela nécessite l'engagement de tous dont les usagers de la mer, les entreprises et les collectivités territoriales.

L'État sera bien aux côtés de la SNSM pour l'aider dans sa modernisation.

M. Christophe Priou.  - La mission sénatoriale d'information sur le sauvetage en mer et la sécurité maritime émettra des préconisations. Nous espérons que l'État les suivra.

Ouverture des grandes surfaces le dimanche

Mme Françoise Gatel .  - Je souscris aux objectifs du Premier ministre sur le moratoire des ouvertures de grandes surfaces en périphéries et la préservation et la revitalisation du tissu commercial des centres-villes et des centres-bourgs. Or, dans le cadre de la loi Pacte, le Sénat a adopté mon amendement pour réguler l'ouverture des grandes surfaces le dimanche en dehors des zones touristiques. Cet amendement a été retoqué par le Gouvernement et l'Assemblée nationale. Mais Mme la ministre a dit qu'elle allait prendre le sujet à bras-le-corps.

Depuis plus de vingt ans en Ille-et-Vilaine, cinq intercommunalités, les enseignes et les partenaires sociaux ont signé des accords pour réguler les ouvertures du dimanche afin de préserver les commerces de proximité.

Où en est la réflexion du Gouvernement destinée à donner une assise juridique à de tels accords ? Tous les élus locaux continuent à défiler pour défendre le petit commerce.

M. Cédric O, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances et du ministre de l'action et des comptes publics, chargé du numérique .  - le Gouvernement s'est fortement engagé dans la revitalisation des centres-villes et centres-bourgs, notamment par le Programme Action Coeur de Ville et les récentes dispositions relatives à l'aménagement commercial de la loi ELAN. Le Gouvernement continue d'oeuvrer pour un meilleur équilibre entre les différents acteurs économiques et au développement des territoires.

Cependant, la législation concernant l'ouverture dominicale des magasins a vocation à réguler la concurrence entre les commerces d'une même profession. Elle ne peut pas être restreinte à un critère de préservation ou de revitalisation du tissu économique territorial.

Concernant l'ouverture dominicale, la Commission de concertation du commerce a été invitée à étudier des pistes d'expérimentation, de simplification ou d'évolution des dispositifs. Les objectifs de simplification et d'adaptation aux besoins devront s'articuler avec le principe de repos hebdomadaire prévu par la Convention 106 de l'OIT et veiller à ne pas générer de distorsion de concurrence.

La concertation locale et la cohérence entre les documents de planification urbaine et les outils locaux de dérogations à l'ouverture dominicale seront particulièrement prises en compte, afin de poursuivre la revitalisation des centres-villes que nous avons entamée et qui est au coeur de notre engagement.

Mme Françoise Gatel.  - Monsieur le ministre, je vous félicite pour la qualité de la lecture de cette réponse mais vous ne répondez pas à ma question. Où en est le groupe de travail lancé par Mme la ministre ? Transmettez-lui ma demande de rencontre avec les élus du pays de Rennes. Combien de temps les élus financeront-ils des commerces multiservices et des boulangeries alors que les grandes surfaces grignotent toute l'activité de commerce ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UC ; Mme Brigitte Micouleau applaudit également.)

Inquiétudes des travailleurs frontaliers sur la convention fiscale avec le Luxembourg

Mme Véronique Guillotin .  - Je me fais la porte-parole des travailleurs lorrains et ardennais qui chaque jour passent la frontière pour rejoindre le Luxembourg. Ratifiée en France le 25 février et au Luxembourg le 3 juillet, la nouvelle convention fiscale vise à éviter les doubles impositions, comme les doubles exonérations, et à prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu, la fortune et les sociétés. Elle trace également une nouvelle ambition concernant le télétravail, qui s'en trouve facilité. Même si nous aurions souhaité aller plus loin et permettre le télétravail 46 jours par an, compte tenu de l'engorgement des infrastructures de transport.

Cette convention succède à celle de 1958, devenue obsolète, et place nos deux pays en conformité avec les standards internationaux en vigueur. Ces avancées nous ont poussés à adopter la loi de ratification.

Néanmoins, lors de son examen en février, j'avais émis des réserves sur l'absence d'étude d'impact concernant la nouvelle méthode retenue pour le calcul de l'impôt sur le revenu : en effet, les services fiscaux calculeront désormais les impôts que les contribuables français auraient à payer en France sur les revenus du travail effectué au Luxembourg. Mais quid du différentiel ? Les salariés français aux revenus les plus modestes pourraient être les premiers impactés, en raison du plus faible taux d'imposition sur ces revenus au Luxembourg. Fortement attendues par les 100 000 frontaliers concernés, pourriez-vous nous apporter des clarifications sur ce point et rassurer au plus vite les travailleurs frontaliers sur l'application et l'interprétation fiscale de cette convention par la direction de la législation concernée ?

M. Cédric O, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances et du ministre de l'action et des comptes publics, chargé du numérique .  - Conformément au modèle de convention fiscale de l'organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), le 1 de l'article 14 de la convention fiscale franco-luxembourgeoise signée le 20 mars 2018 prévoit une imposition partagée des revenus d'emploi entre l'État de résidence du salarié et celui de l'exercice de son activité. La convention du 1er avril 1958 prévoyait une imposition exclusive dans ce dernier État, c'est-à-dire le Luxembourg pour les travailleurs frontaliers français.

Afin de tirer les conséquences de ce partage d'imposition, la méthode d'élimination des doubles impositions relative aux revenus salariaux a été modifiée dans la nouvelle convention. Le mécanisme d'exonération des revenus du travail étranger couplé à sa prise en compte pour le calcul du taux effectif de l'impôt à acquitter en France sur les autres revenus a ainsi été remplacé par un mécanisme d'imposition en France des revenus du travail étranger couplé à l'octroi d'un crédit d'impôt égal à l'impôt étranger acquitté sur ces mêmes revenus.

Cette méthode permet de se cantonner strictement à la nécessité d'éliminer la double imposition et de garantir que l'impôt acquitté par les contribuables français soit le même quel que soit le lieu d'exercice de leur activité. En d'autres termes, à salaire égal, l'impôt acquitté sera le même pour un salarié résidant en France et travaillant en France que pour un salarié résident en France et travaillant au Luxembourg.

Ce changement n'aura de conséquence sur le niveau d'imposition des travailleurs frontaliers que si l'impôt calculé en France sur les revenus salariaux luxembourgeois se trouve supérieur à l'impôt luxembourgeois sur ces mêmes revenus.

En raison d'une réforme fiscale introduite au Luxembourg en 2017 ayant conduit à une augmentation significative du crédit d'impôt pour salariés luxembourgeois et par conséquent à une diminution de l'imposition des travailleurs frontaliers, certains d'entre eux auront toutefois un reliquat d'impôt à acquitter en France. Ce reliquat sera égal à la différence entre l'impôt français qui aurait été dû si le travailleur exerçait son activité en France et l'impôt prélevé au Luxembourg.

Cette situation ne concernera toutefois qu'une minorité des contribuables concernés, l'impôt sur le revenu français étant globalement plus favorable, en raison notamment du quotient familial et des réductions et crédits d'impôt. Le recours aux frais réels pour les frais professionnels peut également conduire à un impôt français inférieur.

Mme Véronique Guillotin.  - Merci pour les 100 000 travailleurs frontaliers sur 600 000 habitants au Luxembourg ! Votre réponse n'est pas de nature à les rassurer...

Beaucoup n'ont pas d'autre choix que de traverser la frontière pour travailler. Ce sont les plus bas salaires qui seront le plus impactés. J'espère que la convention ne sera pas appliquée de façon abrupte et tiendra compte de la situation de nos concitoyens.

Ressources des chambres des métiers et de l'artisanat des outre-mer

M. Georges Patient .  - Les chambres des métiers des cinq départements d'outre-mer se meurent. Celle de Guyane a même célébré ses obsèques.

L'article 97 de la loi de finances du 30 décembre 2017 pour 2018 a acté des mesures d'exonération de la cotisation foncière des entreprises (CFE) et de la taxe pour frais des chambres des métiers et de l'artisanat pour les entreprises réalisant un chiffre d'affaires annuel de moins de 5 000 euros.

Malheureusement, aucune étude d'impact préalable n'a été réalisée concernant ces exonérations qui sont effectives depuis janvier. Or, depuis juin 2019, les directions des finances publiques ont communiqué les montants du produit de cette taxe aux chambres des métiers. L'évolution est insoutenable. Si en métropole, la baisse est estimée à 8 %, en Guadeloupe elle est de 26 % et en Guyane de 28 %. D'autres mesures ont un impact direct sur les ressources des CMA : suppression de l'obligation du stage préparatoire à l'installation, réduction des ressources du conseil de la formation, réduction des redevances d'immatriculation au répertoire des métiers. Ainsi pour la CMA de Guyane, pour 2020, à périmètre constant, les ressources seront réduites de 332 000 euros, soit 22 % de baisse et en 2021 elles seront réduites de 352 000 euros, soit 24 % de baisse.

Contrairement aux collectivités locales pour lesquelles le Gouvernement s'est engagé à compenser la perte de recette due à l'exonération de CFE, rien n'a été prévu pour compenser la perte de ressources dues à l'exonération de taxe pour frais pour les chambres des métiers.

Qu'entendez-vous faire pour atténuer la brutalité de ces pertes de ressources et pour aider les CMA des outre-mer à en absorber le choc et tout simplement survivre ?

M. Cédric O, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances et du ministre de l'action et des comptes publics, chargé du numérique .  - L'exonération de cotisation foncière des entreprises et des taxes pour frais de chambres figurant à l'article 97 de la loi de finances pour 2018 en faveur des redevables dont le chiffre d'affaires n'excède pas 5 000 euros s'inscrit dans le cadre du programme du Gouvernement en faveur des travailleurs indépendants, conformément aux engagements pris par le président de la République.

Ce programme poursuit quatre objectifs : garantir le pouvoir d'achat, soutenir la création d'entreprises, moderniser et améliorer la protection sociale, simplifier les démarches et la vie administrative des travailleurs indépendants.

L'impact de la mesure d'exonération de taxe pour frais de chambres des métiers et de l'artisanat et de taxe pour frais de chambres de commerce et de l'industrie est en partie supportée par l'État, dès lors que le produit des ressources affectées aux chambres est plafonné dans les conditions prévues à l'article 46 de la loi de finances pour 2012. Il est néanmoins exact que la part de produit revenant aux chambres après plafonnement est en général plus réduite dans les territoires ultra-marins, par rapport à la métropole, en raison des spécificités de leur tissu socio-économique.

Cela nous invite à poursuivre la réflexion sur la péréquation des ressources des CMA à l'instar de celle mise en place pour les CCI.

M. Georges Patient.  - J'entends vos propos, mais la CMA de Guyane n'a rien perçu depuis le début de l'année. J'espère que M. Darmanin, en Guyane prochainement, apportera des réponses concrètes.

Investissements locaux et nationaux

M. Yannick Vaugrenard .  - Les élus locaux de tout bord se plaignent à juste raison des délais de réalisation de leurs investissements. Le temps trop long passé à l'instruction des dossiers, du fait de normes excessives, tout comme les recours qui foisonnent, entraînant de mauvaises conséquences financières et économiques pour les territoires.

Les nouvelles technologies, tout autant que les nouveaux modes de communication, auraient dû au contraire permettre moins de lenteur et plus d'efficacité ; or c'est tout le contraire qui est constaté.

Lorsqu'il y a quinze ans, il fallait deux à trois années pour réaliser un investissement communal important, aujourd'hui, il peut se passer au mieux cinq à huit ans, entre le moment de la décision et l'inauguration.

Cette problématique se retrouve y compris s'agissant de grands investissements nationaux, tels que l'éolien offshore, où il faut deux fois plus de temps pour la mise en oeuvre en France par rapport à la Grande-Bretagne ou à l'Allemagne. En conséquence, ces deux pays font la course en tête dans ce domaine, procurant 70 % des installations européennes ! Notre pays, qui a la plus grande façade maritime, reste englué dans les recours à répétition.

Dans les deux cas, locaux et nationaux, c'est l'économie qui trinque, ce sont nos concitoyens qui en pâtissent, et c'est l'intérêt très particulier qui l'emporte fréquemment sur l'intérêt collectif. L'intérêt général doit l'emporter. Les recours systématiques et successifs mériteraient d'être pénalisés plus durement, les retards pris dans les réalisations mieux intégrés dans les jugements rendus au détriment des plaignants.

Comment le Gouvernement se saisira-t-il de cette question qui touche autant à l'économie qu'à notre bon fonctionnement démocratique ? Quelles mesures prendrez-vous ?

M. Cédric O, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances et du ministre de l'action et des comptes publics, chargé du numérique .  - Cet enjeu est important pour les industries, les collectivités et l'avenir de notre pays. L'initiative « Territoires d'industrie » lancée le 22 novembre 2018 apportera des réponses concrètes aux territoires. Les travaux engagés dans les 136 territoires labellisés ont bien identifié l'importance de la simplification administrative, dans un contexte où la multiplicité et la complexité des procédures freinent encore trop souvent le développement de certains projets.

Le 3 juin 2019, le Premier ministre a missionné le député d'Eure-et-Loir, Guillaume Kasbarian, pour proposer des mesures concrètes de réduction de la complexité et des délais. Je vous invite à lui faire part des cas concrets dont vous avez connaissance.

La France s'inspirera d'exemples étrangers. Les recommandations pourraient consister en une modification des textes en vigueur pour supprimer, raccourcir et adapter certaines procédures.

Des procédures dématérialisées et des expérimentations pourraient être proposées. La mission rendra ses conclusions en septembre 2019.

Le Gouvernement annoncera dans un deuxième temps les mesures qu'il retient pour parvenir à réduire les délais.

M. Yannick Vaugrenard.  - Vous n'avez pas évoqué l'aspect juridique. Des projets bien engagés sont souvent retardés par des recours successifs. Il faudrait pénaliser les personnes qui en abusent.

Inquiétudes sur la réforme des finances publiques en Seine-Maritime

Mme Céline Brulin .  - Le Gouvernement engage la réforme de la carte des trésoreries, en annonçant la prétendue ouverture de 15 structures supplémentaires en Seine-et-Marne. En réalité, il s'agit d'une désertification car à la place des 41 trésoreries actuelles, regroupant quasiment toutes les fonctions des finances publiques, les missions de ces structures réduiraient les services rendus.

Ces « points de contacts » ne sont que des permanences de la DGFiP dans une maison France Services ou un bureau de poste, alors que ceux-ci réduisent aussi leur présence dans nos territoires. Ces permanences pourraient également avoir lieu dans une mairie, mais les maires se méfient des transferts de charges et ne souhaitent pas participer à cette nouvelle vague de déménagement.

Certains services, comme le dépôt de numéraire, pourraient être délégués aux buralistes. Ces « points contacts » seraient des lieux d'enregistrement et de redirection vers des trésoreries plus éloignées. Les élus locaux, pour qui les trésoreries sont « de performants auxiliaires des communes » devraient avoir recours aux services de conseillers aux collectivités répartis à l'échelle des intercommunalités.

Enfin, cette réorganisation est déconnectée de la réalité, rattachant des communes à des services très éloignés, en méconnaissance totale des bassins de vie. Cette réorganisation traduit en fait des restrictions budgétaires et des suppressions de postes.

La dématérialisation ne pourra répondre aux besoins. Ce plan est censé faire l'objet d'une concertation avec les élus jusqu'en octobre. Pouvez-vous vous engager à tout remettre sur la table pour que nous puissions travailler, réellement, à une amélioration des services publics de proximité ?

M. Cédric O, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances et du ministre de l'action et des comptes publics, chargé du numérique .  - Vous avez appelé mon attention sur les conséquences de la future réforme des finances publiques dans le département de Seine-Maritime.

La DGFiP a vu ses missions évoluer depuis deux ans : le réseau se transforme en permanence pour s'adapter aux évolutions démographiques et aux nouveaux modes de relations avec le public, notamment grâce aux nouvelles technologies, tout en cherchant à s'adapter aux besoins.

Depuis 2012, près de 700 points de contact ont été fermés, soit 18 % et, jusqu'à présent, ces évolutions se décidaient annuellement, sans visibilité territoriale d'ensemble et sans que les élus, la population et les agents soient toujours bien informés en amont. Nous avons engagé une démarche fondamentalement différente : le Gouvernement souhaite assurer une meilleure accessibilité des services publics à la population, notamment dans les territoires où le sentiment d'abandon de l'État se développe. Il souhaite aussi porter une attention toute particulière aux usagers qui sont peu familiers ou éloignés des outils numériques, sans renier la nécessaire modernisation des services publics.

Il s'agit de tirer parti des nouvelles organisations du travail comme des nouveaux usages, notamment les démarches en ligne, la dématérialisation, le travail à distance et le développement d'un traitement plus automatique de certaines tâches répétitives.

Ainsi, nous pourrons multiplier les sites où un accueil physique de proximité sera assuré, notamment dans les maisons France Services ou dans les mairies. L'objectif est d'augmenter le nombre d'accueils de proximité de 30 % d'ici 2022. C'est un effort sans précédent et qui rompt avec la disparition programmée des accueils de service public.

C'est dans ce cadre, et en concertation avec le préfet du département, que la directrice régionale des finances publiques a élaboré une proposition de nouvelle organisation des services des finances publiques pour le département de la Seine-Maritime, ce qui se traduira par une présence de la DGFiP dans 57 communes, soit 15 de plus qu'actuellement, dont 9 de plus parmi les communes de moins de 3 500 habitants.

Cette proposition est le point de départ d'une concertation très approfondie avec l'ensemble des parties prenantes et des élus et elle a vocation à évoluer. La concertation doit se dérouler jusqu'en octobre avec l'ensemble des élus, de leurs associations représentatives ainsi qu'avec les agents de la DGFiP, leurs représentants et les services de l'État.

Mme Céline Brulin.  - Nous avons déjà eu ces explications mais les citoyens restent très inquiets en raison des files d'attente. Les élus locaux se mobilisent pour garder des services publics de proximité.

Nouvelle organisation des services des finances publiques

M. Alain Duran .  - Ma question porte aussi sur le projet de nouvelle organisation des services des finances publiques.

La DGFiP est une des administrations d'État au maillage le plus fin et le plus dense sur le territoire national. En Ariège, il existe 12 trésoreries et trois accueils de proximité. Sur les 245 agents, une quarantaine est affectée à ces accueils.

Nous sommes au début de la concertation, mais permettez-moi de vous faire part de mes inquiétudes. Dans mon département, vous prévoyez de transformer les 12 trésoreries actuelles en accueil de proximité. Vous prévoyez même d'en déployer 2 autres pour mailler le territoire. Si je prends l'exemple de la trésorerie de mon canton, à Tarascon, celle-ci est ouverte tous les matins cinq jours sur sept avec des agents des finances. À quelques kilomètres de là, dans le canton voisin, l'accueil de proximité qui a remplacé voici trois ans la perception, n'est ouvert que trois demi-journées par semaine. Ce n'est pas le même service ! La dématérialisation ne remplace pas la présence humaine, surtout pour nos administrés souvent âgés et peu familiers des outils numériques.

De plus, vous créez des conseillers aux collectivités territoriales, mais le comptable public occupera demain un bureau éloigné et perdra son statut de comptable public.

Alors que cette nouvelle organisation et, je vous cite, « vise à améliorer les prestations offertes en matière de gestion financière et comptable aux collectivités locales et aux élus », je m'interroge sur la qualité du service rendu en matière de gestion comptable, suite au retrait de huit emplois dans mon département en 2019, et aux 25 suppressions annoncées dans les trois ans à venir.

La fermeture annoncée de huit perceptions dans mon département va concentrer sur trois sites la gestion comptable des 327 communes. Or, je peux vous assurer que le nombre de collectivités restera le même avec tout le volume comptable qui s'y rattache.

Pouvez-vous m'assurer le maintien du principe de séparation ordonnateurs/payeurs, qui apporte des garanties de sécurité et de probité dans la gestion de l'argent public ?

M. Cédric O, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances et du ministre de l'action et des comptes publics, chargé du numérique .  - Le maillage de la DGFiP est l'un des plus denses des administrations d'État avec près de 3 600 points de contacts pour ses usagers, particuliers, entreprises et collectivités locales, en 2019. Cette présence importante traduit la diversité des missions de la DGFiP, mais elle doit être repensée pour répondre aux besoins actuels des usagers, des collectivités locales, notamment rurales, et permettre une amélioration des conditions de travail des agents.

La DGFiP a vu ses missions évoluer profondément depuis deux ans et continuera à se transformer avec des chantiers d'ampleur : prélèvement à la source, suppression de petites taxes, fin programmée de la taxe d'habitation, paiement en liquide externalisé vers d'autres réseaux, poursuite de la simplification de la déclaration de revenus...

Le Gouvernement souhaite assurer une meilleure accessibilité des services publics à la population, notamment dans les territoires où le sentiment d'abandon de l'État se développe. Il s'agit de tirer parti des nouvelles organisations du travail comme des nouveaux usages pour s'organiser différemment : d'un côté, concentrer et dématérialiser les tâches non visibles par le public pour gagner en efficacité et en rapidité de traitement, permettant à l'État de réaliser des gains de productivité sans dégrader la qualité du service public et, de l'autre, apporter une offre de service nouvelle en augmentant fortement les sites où un accueil physique de proximité sera assuré, L'extension de l'accueil sur rendez-vous améliorera la réponse apportée aux questions des contribuables. L'objectif est d'augmenter le nombre d'accueils de proximité de 30 % d'ici 2022. C'est un effort sans précédent et qui rompt avec la disparition programmée des accueils de service public.

Enfin, cette évolution doit également permettre d'améliorer les prestations offertes en matière de gestion financière et comptable des collectivités locales et de conseil aux élus, notamment pour les collectivités les plus petites ou les plus fragiles. À cet effet, la DGFiP dédiera des cadres de haut niveau exclusivement affectés à cette mission et directement installés dans les territoires, au plus près des élus et des collectivités.

Fibre optique en Bretagne

Mme Sylvie Robert .  - Aujourd'hui, nombreuses sont les régions qui se sont lancées dans le déploiement de la fibre optique. Pourtant, le taux de couverture reste hétérogène, et faible dans nombre de territoires ruraux.

Les collectivités bretonnes ont décidé d'accélérer le processus de déploiement afin de couvrir l'ensemble de la région d'ici à 2026 - plutôt que 2030. L'objectif est de résorber les fractures numériques au plus tôt et de permettre aux usagers de disposer d'une connexion optimale tout en maîtrisant les coûts du chantier.

Si le numérique démultiplie les opportunités, ceux qui en sont exclus sont d'autant plus victimes. Les aménagements ont un impact positif sur l'économie. En termes d'insertion et d'emploi, l'exemple breton devrait générer, en moyenne, plus de 600 emplois équivalents temps plein durant la période de déploiement. Le projet public régional de déploiement de la fibre optique est particulièrement structurant pour l'ensemble du territoire.

Cependant, si les collectivités bretonnes sont extrêmement mobilisées sur le sujet, elles manquent encore de visibilité quant à l'engagement financier de l'État au titre du fonds national pour la société numérique (FSN), créé dans le cadre du programme des investissements d'avenir. Ce fonds de 4,25 milliards d'euros doit accompagner les nouveaux usages, soutenir les secteurs publics et privés. Afin d'anticiper, de préparer au mieux la révision de leur plan de financement et de concrétiser le projet, les collectivités ont besoin de lever toute incertitude sur la participation financière de l'État.

Pourriez-vous préciser l'engagement de l'État, à travers le FSN, en faveur du projet de déploiement intégral de la fibre optique en Bretagne ?

M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement .  - Le numérique est un droit et non un luxe. Jusqu'à présent, il a accru les fractures territoriales. Aussi le président de la République en a fait une priorité en fixant des objectifs ambitieux, celui du bon débit pour tous en 2020 et du très bon débit pour tous à l'horizon de 2022.

Vous soutenez depuis longtemps le numérique en Bretagne : je suis à vos côtés en ce domaine. Le Gouvernement a sécurisé le financement du FSN par des crédits de paiement de plus d'un milliard d'euros. En Bretagne, ce fonds avait déjà été utilisé.

Nous avons vu que le secteur privé pouvait parfois intervenir, mais il nous faut aussi assurer le déploiement entre 2022 et 2025. Nous sommes en train d'identifier le montant des aides nécessaires, territoire par territoire. Nous vous transmettrons cette évaluation, puis nous prendrons des décisions lors des prochaines lois de finances.

Mme Sylvie Robert.  - Merci M. le ministre. J'attends avec impatience le prochain projet de loi de finances. Vous connaissez l'implication de la Bretagne. J'espère que l'État sera au rendez-vous.

Gestion de la compétence « affaires scolaires »

Mme Brigitte Micouleau .  - À la suite de la fusion d'intercommunalités, la compétence « affaires scolaires » a été restituée à certaines communes rurales qui, faute de pouvoir constituer un syndicat à vocation scolaire, ont opté pour une entente scolaire - la meilleure solution étant donné les exigences de la loi NOTRe et du schéma départemental de coopération intercommunale (SDCI).

Or la forme conventionnelle de ces regroupements suppose une commune juridiquement responsable, qui assume tous les risques et intègre dans son budget celui de l'entente scolaire. Son propre budget de fonctionnement est obéré par la prise en charge des emprunts contractés pour l'entente scolaire. Ces difficultés nourrissent la déception.

Le Gouvernement ne pourrait-il permettre la création d'un syndicat à vocation scolaire, notamment pour les petites communes rurales qui souhaitent mutualiser leurs moyens pour exercer une compétence commune dans de bonnes conditions ?

M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement .  - Sujet ô combien important ! La fusion d'intercommunalités peut modifier le périmètre des compétences. Un cadre existe déjà via le SDCI. La communauté de communes issue d'une fusion dispose d'un délai de deux ans pour se prononcer sur la manière dont elle entend exercer la compétence scolaire.

L'organe délibérant peut transférer partiellement les compétences restauration et activités périscolaires à ses communes membres qui peuvent les confier à un service commun porté par la communauté de communes.

Enfin, la loi permet d'instituer des syndicats intercommunaux ou mixtes compétents en matière de construction d'écoles élémentaires ou d'accueil de la petite enfance, indépendamment du schéma intercommunal.

Mme Brigitte Micouleau.  - J'entends ces arguments. Je ne suis pas sûre que les communes de Haute-Garonne qui font face à de grandes difficultés de fonctionnement, notamment Cadours, y soient sensibles.

Service de gardes nature du Grand Belfort

M. Cédric Perrin .  - Ma question porte sur l'impossibilité pour les communes extérieures à la communauté d'agglomération du Grand Belfort d'adhérer à son service de gardes nature.

Ce service, qui relevait, jusqu'au 31 décembre 2017, de la compétence du centre de gestion de la fonction publique du Territoire de Belfort, a été repris par le Grand Belfort, qui l'a sans aucun doute sauvé.

L'objectif du Grand Belfort était de proposer à ses communes membres, mais également à des communes ou établissements extérieurs, d'en bénéficier. Or les services préfectoraux ont informé l'EPCI de l'impossibilité d'ouvrir cette prestation aux communes situées en dehors de son périmètre au motif que le dispositif ne figure pas parmi ceux prévus à l'article L. 522-2 du code de la sécurité intérieure.

Le Grand Belfort ne peut donc pas mettre ses agents à la disposition des communes extérieures, notamment celles de la communauté de communes des Vosges du sud alors qu'elles en bénéficiaient par le passé. Faute de moyens, elles ne peuvent créer leur propre police rurale.

J'ai déposé une proposition de loi visant à faciliter la mutualisation des gardes champêtres. Le Gouvernement est-il prêt à la soutenir, par exemple dans le cadre du projet de loi Engagement et proximité ?

M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement .  - Effectivement, l'article L. 522-2 du code de la sécurité intérieure ne permet pas à une communauté d'agglomération de mettre des gardes nature à disposition des communes hors de son périmètre, mais l'article L.5216-7-1 du code général des collectivités territoriales permet à une commune même extérieure de confier une prestation de service à une communauté d'agglomération.

La vocation première d'un EPCI est d'exercer ses compétences sur le territoire de ses communes membres. L'intervention pour le compte d'autres personnes publiques ne peut avoir qu'un caractère marginal, c'est-à-dire être ponctuelle et d'importance limitée.

Le cas échéant, les communes extérieures au Grand Belfort peuvent s'associer dans un syndicat intercommunal ou dans un syndicat mixte avec le Grand Belfort pour mutualiser les agents. Enfin, leurs EPCI peuvent se substituer au centre de gestion pour l'exercice de cette compétence.

Je m'engage à ce que la préfecture vous accompagne pour trouver une solution, et à en parler à M. Lecornu en amont de son projet de loi.

M. Cédric Perrin.  - Les réponses de la préfecture ne permettent pas d'entrevoir une solution, c'est pourquoi je propose de faire évoluer la loi. C'est une question de bon sens !

Rétablissement du conseiller territorial

Mme Christine Herzog .  - J'appelle à rétablir la loi relative au conseiller territorial votée sous le gouvernement Fillon. Depuis 2004, les conseillers régionaux sont élus sur une liste unique, ce qui ne permet plus une représentation des sensibilités départementales. Le problème a été aggravé sous la précédente majorité par la création de nouvelles régions XXL. Le retour à la logique du conseiller territorial serait un moyen pertinent de répondre aux enjeux de démocratie locale et de proximité.

Le texte voté à l'époque pourrait être amélioré. Ces conseillers territoriaux pourraient être élus au scrutin de liste à la proportionnelle, au niveau de chaque département, ce qui garantirait la pluralité des sensibilités au sein des départements et, partant, leur spécificité.

Le conseiller territorial exercerait les attributions actuelles du conseiller régional et du conseiller départemental. Dans chaque région, le nombre des conseillers territoriaux serait égal au nombre actuel des conseillers régionaux, et le nombre de sièges attribués à chaque département serait proportionnel à sa population, avec un minimum de deux sièges par département.

Une telle réforme favoriserait la complémentarité de l'action de la région et des départements, tout en dégageant des économies par la réduction de l'effectif total. Qu'en pense le Gouvernement ?

M. Christophe Castaner, ministre de l'intérieur .  - Le Gouvernement partage votre ambition d'assurer une complémentarité entre département et région et de renforcer le lien de proximité entre les élus et les électeurs, condition de la démocratie locale.

Je ne partage pas votre solution qui aurait des conséquences négatives compte tenu des écarts de population. Ainsi, la Haute-Marne et la Meuse n'auraient plus que cinq conseillers territoriaux, contre 34 élus actuellement - sachant que les communes de moins de 100 habitants disposent de sept élus !

Le scrutin proportionnel de liste à l'échelle départementale risquerait de ne pas dégager de majorité. La seule solution serait d'augmenter le nombre de conseillers territoriaux, mais là encore les écarts seraient importants : sept conseillers territoriaux en Lozère mais 123 en Haute-Garonne, et un conseil régional d'Occitanie comptant plus de 500 membres.

Mme Christine Herzog.  - De nombreux élus seraient favorables au principe du conseiller territorial, pour réaliser des économies.

Fermeture du commissariat de Puteaux

M. Philippe Pemezec .  - Le grand débat national a mis en exergue le sentiment d'abandon des territoires. Quelque 90 % des Français demandent aux services publics une plus grande proximité, et le président de la République a promis d'assurer cette présence.

Or la réorganisation de la police de proximité menée depuis deux ans par le préfet de police de Paris va à l'encontre de ces annonces.

Après la fermeture de certains commissariats les week-ends et les nuits - deux seulement sont ouverts la nuit pour tout le département des Hauts-de-Seine - un nouveau palier est franchi avec l'annonce de la fermeture pure et simple du commissariat de Puteaux, dont les effectifs sont déjà passés de 70 à 10.

Les rumeurs évoquent la fermeture de la moitié des commissariats des Hauts-de-Seine ! Ne poussez-vous pas vers plus de police municipale, c'est-à-dire un nouveau transfert de charges vers les communes ?

Quels sont les objectifs de ce plan de réorganisation de la sécurité pour les Hauts-de-Seine ? D'autres fermetures de commissariats sont-elles prévues ? Je vous demande de reconsidérer la fermeture du commissariat de Puteaux.

M. Christophe Castaner, ministre de l'intérieur .  - Il n'est pas question de fermer la moitié des commissariats de votre département. Ne croyez pas les rumeurs ! En revanche, nous voulons une organisation qui permette d'avoir plus de policiers dans la rue, de jour comme de nuit, plutôt que dans les bureaux.

Depuis 2015, le recrutement de forces de police est à la hausse avec un objectif de 10 000 embauches, après une hémorragie de 12 000 postes entre 2007 et 2012. Les tâches administratives monopolisent les policiers et les empêchent d'intervenir sur le terrain.

À Puteaux, seulement 9 % du total des plaintes sont reçues entre 21 h et 6 h. La fusion se traduira par un effectif disponible de 135 agents. Cette capacité opérationnelle garantira deux patrouilles en journée sur le secteur Puteaux-La Défense ; entre deux et trois la nuit.

Une meilleure organisation de la chaîne hiérarchique est indispensable sur un territoire dont les limites communales ne sont connues que des maires.

Je demanderai au directeur de la police départementale de vous contacter pour vous rassurer.

Le commissariat de Puteaux accueillera du public sur une large plage horaire et un visiophone permettra de joindre le commissariat de La Défense. L'objectif est bien de renforcer la présence policière.

M. Philippe Pemezec.  - J'espère que vos arguments ne servent pas à masquer le manque de moyens de la police. Les fermetures ont des effets pervers sur les conditions de travail : sous-effectifs chroniques et dégradation des rapports avec la population. Espérons que ces annonces ne sont pas de la poudre aux yeux. Encore une fois, je vous demande de reconsidérer la fermeture du commissariat de Puteaux.

Site des Brotteaux

M. Patrick Chaize .  - Les pratiques et usages illégaux se développent sur le site des Brotteaux dans l'Ain. Ce site, enjeu important de conservation, fait face depuis quelques années à une augmentation exponentielle de son taux de fréquentation en période estivale, avec 50 000 personnes supplémentaires en une seule semaine. À la clé, des comportements qui constituent un véritable danger, tant pour l'environnement et la biodiversité locale que pour la sécurité des biens et des personnes : attitudes agressives, naturisme public, montagnes de déchets, feux, braconnage, etc.

Les élus sont isolés, désemparés, car les moyens d'action et de régulation sont très faibles au regard de la taille du site. La situation est grave et ne peut plus durer.

Je sollicite la mise en place en urgence de moyens pour assurer la surveillance de la basse rivière d'Ain en période de haute fréquentation. Le déploiement immédiat d'une brigade équestre est indispensable.

M. Christophe Castaner, ministre de l'intérieur .  - C'est l'intérêt des questions orales que d'attirer l'attention du ministre sur des problèmes locaux. Le site que vous mentionnez, remarquable, connaît une dynamique extrêmement forte. Nous devons accompagner la montée en puissance de certains territoires en période touristique.

J'ai lancé la saison d'été il y a deux semaines à Arcachon. Quelque 4 000 renforts de policiers et gendarmes supplémentaires appuient les forces de sécurité pendant la saison estivale, dont 400 en Gironde. L'adaptation aux variations de population en haute saison n'est pas simple.

Dans ce contexte, la gendarmerie de l'Ain prend en compte les enjeux de sécurité du site des Brotteaux, en lien avec le syndicat de rivière. En revanche, les conditions d'installation d'une brigade équestre de la garde républicaine sont trop lourdes pour être assurées dans un délai court. Je préfère le dire simplement : nous ne savons pas faire.

En outre, la garde républicaine est très sollicitée. Des patrouilles de surveillance ponctuelles en lien avec l'ONCFS et le garde champêtre sont régulièrement mises en place pour mieux lutter contre les incivilités telles que les déplacements en quad qui nuisent à l'environnement.

M. le président.  - Il est effectivement important que le ministre vienne répondre aux questions orales. Nous vous attendons pour la prochaine séance.

M. Patrick Chaize.  - J'entends votre ambition d'adapter les moyens. Cependant, comment faire dès lors qu'ils restent limités ? Ne faudrait-il pas des forces supplémentaires sur ce genre de sites d'une sensibilité extrême ? La semaine dernière, la situation était critique. Nous comptons sur les forces de sécurité pour rétablir une situation plus proche de la normale.

Retraites complémentaires des agriculteurs

M. Jean-François Rapin .  - Monsieur Attal, vous êtes ministre de la jeunesse et je vous interroge sur les retraites... Les agriculteurs perçoivent des indemnités de retraites minimes au regard de la pénibilité des tâches qu'ils ont exercées. Des organismes de retraites complémentaires leur proposent d'anticiper cette situation. Or nombre de retraités agriculteurs constatent que les revenus complémentaires ne sont pas à la hauteur des cotisations versées pendant plusieurs dizaines d'années. En l'espèce, un administré du Pas-de-Calais, qui avait versé 60 000 euros durant 35 ans, doit vivre jusqu'à 100 ans pour percevoir l'intégralité de sa rente ! L'organisme complémentaire s'oppose à tout aménagement. De telles dérives sont inexplicables.

Que proposez-vous pour améliorer la situation des agriculteurs retraités ? À la veille de la remise des conclusions de Jean-Paul Delevoye, il est essentiel de prendre en considération ces remontées du terrain.

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse .  - La question du pouvoir d'achat des retraités agricoles concerne tous les Français.

Je vous prie d'excuser Mme Buzyn.

Depuis la réforme de 2014, les agriculteurs partant en retraite ne peuvent avoir une pension inférieure à 75 % du smic. Le président de la République souhaite aller plus loin et a demandé que la pension, après une vie de travail, soit supérieure à 1 000 euros par mois. Le Gouvernement travaille à la mise en oeuvre de cet engagement dans le cadre de la réforme des retraites.

Un dispositif dit Madelin agricole existe depuis 1997. Les conditions tarifaires et le calcul de la rente viagère sont soumis à des conditions très strictes. Les assureurs sont tenus d'utiliser des tables de mortalité homologuées. Or celles-ci ne prévoient pas une espérance de vie de 100 ans. Il faudrait que l'administré que vous évoquez saisisse le médiateur des assurances.

Enfin, la loi Pacte procède à une réforme en profondeur des produits d'épargne retraite supplémentaire, avec une liberté de choix entre sortie en rente ou en capital. Les textes d'application préciseront les conditions d'application aux contrats en cours.

M. Jean-François Rapin.  - L'exemple que j'ai cité, même s'il est atypique, reflète un problème global. Ne faudrait-il pas prendre en compte la pénibilité du travail agricole, qui a varié selon les époques ? J'espère que la loi annoncée sur les retraites répondra à ces questions.

Médecine esthétique

Mme Élisabeth Doineau .  - De plus en plus de jeunes Français, influencés par les réseaux sociaux, recourent à la médecine esthétique.

On voit se développer des actes non chirurgicaux comme l'injection d'acide hyaluronique ou de Botox. Beaucoup se tournent vers des esthéticiennes qui cassent les prix et exercent illégalement la médecine. Faute de formation médicale, les risques pour la santé des clients sont importants.

Un encadrement plus strict s'impose. Le rapport Cazeau sur les dispositifs médicaux recommandait de renforcer les exigences de formation des médecins et d'encadrer strictement les professions non médicales qui pratiquent des soins esthétiques.

Ne faudrait-il pas instaurer un diplôme national de médecine esthétique et fixer par arrêté la liste des interventions à visée esthétique ne pouvant être exécutées que par des médecins diplômés ? Quelles mesures sont envisagées pour sécuriser l'exercice de la médecine esthétique ?

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse .  - La demande sociétale d'actes à visée esthétique est en constante augmentation. Ainsi plus de 75 000 appareils d'épilation à lumière pulsée et plus de 600 000 seringues de produits de comblement sont vendus chaque année en France.

Les nouvelles techniques doivent être encadrées pour garantir la sécurité de ceux qui y ont recours. Depuis la loi Hôpital Patient Santé Territoire (HPST) de 2009, le code de la santé publique interdit certaines pratiques en raison de suspicion de danger grave pour la santé.

L'encadrement des actes est fondé sur leur niveau de risque. La ministre de la Santé a demandé à ses services de préciser la réglementation pour la rendre plus efficace. Le rapport de M. Cazeau pourra servir de base. Des fiches d'information figurent sur le site du ministère de la Santé. Pour autant, il faut aussi diffuser l'information et alerter le grand public sur les risques encourus.

Mme Élisabeth Doineau.  - La communication est essentielle, car les réseaux sociaux laissent penser que tout est possible et entraînent des ravages. Créer un diplôme de médecine esthétique s'impose.

Mise en place du tiers payant

M. Jean-Pierre Moga .  - La directive du 6 février 2019 relative au tiers payant sera compliquée à mettre en place dans les petites communes. Le centre de santé du bassin de Tonneins en Lot-et-Garonne a été mis en service il y a un an. Son fonctionnement répond aux critères suivants : ouverture durant onze heures chaque jour en semaine et le samedi matin ; un recrutement de médecins dans les meilleures conditions ; un équilibre financier basé sur les retours des actes effectués dans le cadre d'un tiers payant généralisé.

Or dans les petits centres hospitaliers, les logiciels de gestion ne permettent pas la télétransmission des déclarations de médecins traitants, tels les arrêts de travail, maladie ou accident du travail. Cela pénalise la prise en charge des rémunérations sur objectifs de santé publique. Est également impacté le forfait patientèle médecin traitant. Le centre de santé ne peut pas se servir d'une carte professionnelle de médecin car la CPAM ne peut ou ne veut pas installer les données d'assurance maladie dans ce centre ; seule une carte professionnelle d'établissement peut être utilisée, qui ne permet pas la télétransmission des déclarations.

De nombreuses prestations ne sont pas ou sont mal remboursées. Cela condamne la mise en place du tiers payant à l'échec, à la fermeture de certains centres médicaux et à l'aggravation de la désertification médicale. Quelles solutions envisagez-vous pour y remédier ?

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse .  - L'instruction du 6 février 2019 a été prise à l'occasion de la mesure « 400 généralistes dans les territoires prioritaires ». La ministre est attentive aux conditions de déploiement du tiers payant. Son suivi est assuré par un comité de pilotage, qui s'est réuni le 9 juillet. Les données montrent que le tiers payant est pratiqué sur 99,2 % des actes facturés par les centres de santé. C'est le cas à 42,8 % sur la prise en charge à 100 %, à 32,3% sur la part prise en charge par les complémentaires et à 24,1 % sur la part assurance maladie uniquement. Cela montre une pratique du tiers payant très développée même si l'on peut faire mieux sur la part complémentaire. Le comité de pilotage y veille.

La CNAM a travaillé avec les centres de santé pour améliorer les procédures de facturation. Les complémentaires de santé développent les factures numériques. Des feuilles de soins électroniques existent qui permettent un paiement dans un délai de trois jours. Pour les arrêtés de travail dématérialisés, les outils ne sont pas encore totalement adaptés à la situation spécifique des médecins salariés des centres de santé. La CNAM lance actuellement une expérimentation visant à y remédier. Une attention est également portée au dispositif de rémunération.

Numerus clausus en Centre-Val-de-Loire

M. Jean-Paul Prince .  - Alors que la région Centre-Val de Loire détient le triste record de la plus faible densité médicale, citoyens et élus se sont émus de voir leur région exclue de l'augmentation du numerus clausus dans les facultés de médecine à la rentrée 2019. Seulement 2,74 % du numerus clausus national est attribué aux facultés de médecine de la région alors que celle-ci représente 3,83 % de la population.

En mai 2019, le Premier ministre a annoncé l'ouverture de places d'internat supplémentaires dans la région, sachant que la majorité des jeunes médecins s'installent là où ils ont obtenu leur diplôme. Certes, une augmentation du numerus clausus ne produit des effets qu'à moyen terme mais dans une situation aussi critique, toute amélioration est bonne à prendre. La région la plus touchée par les déserts médicaux ne devrait-elle pas bénéficier également de l'augmentation de numerus clausus prévue à la rentrée 2019 ?

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse .  - Les habitants de la région Centre-Val-de-Loire connaissent de réelles difficultés d'accès aux soins. Le retard régional du numerus clausus a été partiellement rattrapé avec une hausse de 20 % ces dix dernières années. Cependant, cette hausse ne s'est pas répercutée sur le nombre de médecins susceptibles de s'installer. La faculté de Tours forme beaucoup d'étudiants mais relativement peu d'internes : en 2018, le nombre d'étudiants admis en deuxième année a été de 255, mais le nombre de postes d'internes pourvus n'a été que de 214. La ministre des solidarités et de la santé s'est engagée, avec Frédérique Vidal, à ouvrir 255 postes d'internat en 2019 dans la région. Dès novembre prochain, ce seront autant d'internes supplémentaires qui viendront se former dans les services hospitaliers et les cabinets de médecine de ville, et qui pourront être accompagnés vers un exercice dans la région.

La réforme en cours doit favoriser une prospective pluriannuelle des effectifs. Nous souhaitons que la région Centre-Val-de-Loire soit un territoire d'anticipation du plan « Ma Santé 2022 ». Avec l'ARS et en lien avec l'ensemble des acteurs dont les élus, un plan régional visera à libérer du temps médical et la mesure « 400 médecins salariés » facilitera l'implantation de jeunes médecins.

Le Gouvernement veut faire de cette région une région pilote pour la montée en puissance de ces dispositifs.

M. Jean-Paul Prince, rapporteur.  - Il faut attendre une semaine pour avoir un rendez-vous chez un généraliste, six mois chez un dentiste, un an chez un ophtalmologiste. Les temps d'attente des consultations aux urgences de l'hôpital de Blois est d'au moins six heures.

Zones sous-médicalisées

M. Roland Courteau .  - Parmi les zones sous-médicalisées où les patients éprouvent d'importantes difficultés à accéder aux soins dans des conditions de proximité et de délais satisfaisantes, la situation des Hautes Corbières et des Corbières, dans l'Aude, est préoccupante, notamment à Tuchan où, depuis plusieurs mois, population et élus recherchent des solutions pour préserver la présence d'un médecin dans un territoire de 2 000 personnes et de 35 lits en Ehpad.

Jusqu'à ce jour et depuis quatre ans, un médecin opérait seule sur ce bassin de santé à raison de 12 heures par jour, deux gardes de nuit par semaine et d'un week-end par mois. La situation est devenue intenable pour ce médecin qui se trouve dans un état de grand épuisement et qui a dû cesser son activité faute d'être secondée par un deuxième médecin. Dès lors, il n'y a plus de médecin exerçant dans la maison de santé.

Une solution existe car un médecin originaire du Venezuela serait intéressé pour exercer sur ce secteur. Elle a notamment exercé, durant cinq années à l'hôpital de Barcelone où elle a suivi une formation en spécialité « médecine de famille et communautaire » pour laquelle elle a obtenu les mentions « remarquable » et « très bien ».

Cependant, l'ordre départemental des médecins a émis un avis défavorable à cette proposition. J'ai saisi la ministre, sans réponse.

Que compte faire le Gouvernement pour mettre en place une telle solution, rapidement et concrètement ?

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse .  - Les conditions d'exercice du Docteur Sanchez à Tuchan sont particulières : elle a bénéficié d'un contrat de stabilisation et de coordination valorisant son exercice dans un territoire sous-doté. Les maisons de santé professionnelles reposent sur un projet de santé. Il en existe deux sur votre territoire. Cependant, le docteur Cornic qui exerçait en libéral est parti dans une autre commune.

Un rapprochement a été effectué avec une autre maison de santé distante de 17 kilomètres mais les deux maisons de santé ont refusé de collaborer, même si un rapprochement a fini par avoir lieu à travers la communauté professionnelle territoriale de santé (CPTS) du Libaglir. Le projet de santé est un prérequis à la contractualisation avec l'ARS.

Quant au docteur Larrazabal, la réponse que lui a faite l'ordre des médecins est fondée sur l'article L.4112-7 du code de la santé publique.

Vénézuélienne, elle relève des procédures des étrangers hors UE à diplôme européen instruit par le Centre national de gestion (CNG). Le médecin a choisi d'aller exercer en Espagne. L'ARS a rencontré les parties prenantes à plusieurs reprises.

M. Roland Courteau.  - Mais quelle solution propose le Gouvernement ? Comment rassurer la population ?

Fermeture de lits de gériatrie

Mme Laurence Cohen .  - La direction de l'AP-HP prévoit de réduire de 30 % à 50 % le nombre de lits au sein des unités de soins de longue durée d'ici à 2024, soit plus de 1 000 lits en Île-de-France. Dans le Val-de-Marne, ce sera 44 % de lits en moins, soit 150 lits en moins pour l'hôpital Émile Roux de Limeil-Brévannes. Les hôpitaux Paul Brousse de Villejuif et Charles Foix d'Ivry-sur-Seine, comme d'autres structures accueillant des patients âgés, avec des pathologies qui nécessitent un suivi médical quotidien et sur la durée, subiront également les conséquences de ce plan drastique.

Une assemblée générale de la filière gérontologique a demandé l'arrêt de ces fermetures. D'autant que l'ARS d'Île-de-France préconisait une hausse du nombre d'unités de soins de longue durée (USLD).

Entendez-vous intervenir pour que ces lits de soins en longue durée soient maintenus ?

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse .  - L'AP-HP compte plus de 2 300 lits d'USLD répartis sur 18 sites hospitaliers. Seulement 35 % des patients nécessitent un suivi médical continu à l'hôpital. Pour les autres, il faut une prise en charge médico-sociale globale, hors de l'hôpital.

L'AP-HP a travaillé à un nouveau schéma stratégique des USLD, avec le maintien d'un certain nombre de lits, la mise aux normes des bâtiments et l'augmentation du nombre de places en Ehpad ou dans des structures hospitalières ou médico-sociales.

L'AP-HP maintiendra une coopération forte avec l'hôpital et travaillera en étroite concertation avec les élus, déjà associés, mais qui le seront plus encore à partir de septembre 2019 ; s'agissant du Val-de-Marne, une nouvelle rencontre des parties prenantes est prévue en septembre.

La qualité de prise en charge des personnes âgées en perte d'autonomie est une priorité que nous portons tous conjointement et cette réforme constitue une opportunité d'améliorer et d'adapter nos réponses.

Mme Laurence Cohen.  - Cette réponse me laisse dubitative. Ce que nous demandons, c'est la prise en charge des patients souffrant de polypathologies. D'autant que le personnel manque cruellement dans les Ehpad. Il faudrait pour faire face aux besoins créer 100 000 emplois en trois ans !

Encore une fois, la ministre répond à côté, sans déployer aucun moyen supplémentaire. En l'occurrence, votre réponse est un copier-coller de celle faite par lettre par M. Hirsch et M. Rousseau à Christian Favier.

Avenir de la médecine scolaire

Mme Mireille Jouve .  - En l'espace d'une dizaine d'années, le nombre de médecins scolaires a été divisé par deux. Dans le même temps, la liste des missions qui leur sont confiées s'est considérablement étoffée. Faute de moyens adaptés, les visites médicales obligatoires ne peuvent plus être assurées, tout comme les actions de promotion de santé. Le rôle de la médecine scolaire est essentiel en matière de dépistage précoce. Un nombre croissant d'enfants, du fait de difficultés économiques et sociales accrues au sein de leur famille, n'ont pas accès en dehors du milieu scolaire à une médecine préventive, alors que le cadre scolaire a été durant des décennies un outil précieux pour lutter contre les inégalités et tenter d'offrir aux enfants les mêmes chances de réussite.

Je ne peux que déplorer qu'avec le profond recul de la prévention médicale au sein des établissements, on laisse de nouveau s'installer une forme d'inégalité qui aura inéluctablement des conséquences sur le parcours des élèves.

Les dispositions de la loi pour une École de la confiance ne suffiront pas à répondre au manque de médecins scolaires. Ne faudrait-il pas un réel effort d'attractivité de la médecine scolaire ?

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse .  - Oui, l'école a des responsabilités fondamentales en matière de santé. On lie souvent les difficultés de recrutement des médecins scolaires à un souci d'économie, ce qui est faux.

Des mesures ont été prises pour rendre la profession plus attractive. Le régime indemnitaire des médecins scolaires a été amélioré en 2015. Des revalorisations du statut des médecins de l'Éducation nationale, conseillers techniques ont eu lieu, la grille indiciaire sera améliorée d'ici la fin de l'année, les niveaux de salaires des primo-recrutés seront relevés.

En 2017, une formation spécialisée transversale « Médecine scolaire » a été créée dans le cadre du troisième cycle des pédiatres, généralistes et médecins de santé publique.

Enfin, depuis la rentrée 2018, une immersion des étudiants en médecine scolaire est possible. Nous attendons que ces mesures portent leurs effets, d'où le maintien des postes non pourvus.

Nous travaillons avec le ministère de la Santé sur la promotion de la santé en milieu scolaire.

Droits à la retraite des enseignants

M. Olivier Paccaud .  - La loi est votée, promulguée, mais parfois non appliquée. Pourtant nul n'est censé ignorer la loi et l'exécutif ne doit pas se soustraire à ses devoirs.

C'est le cas de la loi du 26 juillet 1991 relative à la prise en considération des années de formation des élèves enseignants des instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM) pour leurs droits à la retraite, toujours sans décret d'application, 28 ans après !

Il y a quelques semaines, l'académie d'Amiens informe un enseignant souhaitant légitimement bénéficier de cette loi qu'il ne pourrait y prétendre, pour cette raison ! Même si l'article 14 de la loi du 26 juillet 1991 portant diverses dispositions relatives à la fonction publique indiquait que « les périodes pendant lesquelles ont été perçues des allocations d'enseignement créées par le décret du 1er septembre 1989 portant création d'allocations d'enseignement, ainsi que la première année passée en institut universitaire de formation des maîtres en qualité d'allocataire, sont prises en compte pour la constitution et la liquidation du droit à pension de retraite, sous réserve de la titularisation dans un corps d'enseignements et dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État », ces dispositions ne pouvaient en effet, selon ce courrier, être appliquées « en l'absence de décret d'application, (...) jamais entré en vigueur. » L'académie conclut donc « que les périodes d'allocataires de première année d'IUFM ne sont ni validables, ni valables pour la retraite ».

Après 28 ans, le délai raisonnable est plus que dépassé. La situation dont vous héritez, certes, est kafkaïenne et scandaleuse, mais il faut la corriger. Pourquoi ne pas envisager un décret permettant la rétroactivité des droits pour mettre fin à ce préjudice ?

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse .  - Voilà une absurdité telle que notre système sait en produire... La loi date de 1991 - j'avais 2 ans - et le décret en Conseil d'État n'a jamais été publié, c'est un fait. Près de trente ans après, il est difficile de demander au ministre de l'Action et des comptes publics de combler cette carence, d'autant que se prépare une réforme sur les retraites. Le rachat des années d'études a été rendu possible par la loi de 2003. Cette situation se réglera dans le cadre de la réforme des retraites à venir.

Le président de la République souhaite un suivi au jour le jour des textes d'application des réformes que nous portons, afin que ce type de situation ne se reproduise pas.

M. Olivier Paccaud.  - Pour que s'efface la défiance envers le monde politique, il faut que les politiques tiennent leur parole !

Normes d'encadrement dans les collèges

Mme Christine Lavarde .  - Le 17 juin 2019, était organisée au collège Jacqueline-Auriol, à Boulogne-Billancourt, une journée morte pour dénoncer le manque criant d'encadrement dans cet établissement, le danger potentiel sous-jacent pour les élèves, et l'épuisement de l'équipe en place.

Depuis l'abrogation de la circulaire du 25 octobre 1996 relative à la surveillance des élèves et son remplacement par celle du 7 décembre 2009, il n'existe plus de taux d'encadrement dans les collèges. En 2014, la ministre de l'Éducation nationale d'alors affirmait : « conformément aux indications de la circulaire du 11 juin 2003 relative aux assistants d'éducation, les crédits permettant le recrutement de ces agents sont répartis entre les établissements d'enseignements publics par les autorités académiques selon des critères objectifs et rationnels liés aux besoins des établissements. Actuellement, aucun nouveau barème n'a été transmis aux académies. Un ratio moyen de 112 élèves par assistant d'éducation est constaté à la rentrée 2013 dans les collèges. »

Ce ratio moyen s'est beaucoup dégradé : le ratio est donc de 1 pour 155,75 au collège Jacqueline Auriol ; ce ratio est de 1 pour 156,66 au collège Landowski à Boulogne Billancourt ; il est de 1 pour 138,75 au collège Les Champs Philippe situé à la Garenne-Colombes ; il est de 1 pour 163,33 au collège Évariste-Galois de Bourg-la-Reine.

Par ailleurs, comment expliquer les inégalités entre établissements ?

Pouvez-vous préciser la nature des « critères objectifs et rationnels » qui aboutissent à de tels ratios, et comment entendez-vous renforcer le taux d'encadrement dans les collèges ?

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse .  - Je suis attentif à la situation des établissements de Boulogne où j'ai moi-même été élu. Le ratio national, loin de se dégrader s'est amélioré, passant de 112 - en 2013 - à 89 élèves par assistant d'éducation. Les moyens sont répartis par le rectorat entre chaque établissement en fonction de ses caractéristiques propres, comme la présence d'un internat, l'origine sociale des élèves et l'environnement dans lequel ils grandissent. À Boulogne, la situation est plutôt favorable malgré des disparités.

Le collège Jacqueline Auriol possède un internat mixte, tout comme celui de Bourg-la-Reine et celui de la Garenne-Colombes. Le ratio y est plutôt satisfaisant avec quatre assistants d'éducation supplémentaires liés à la présence de cet internat. D'où la différence avec le collège Landowski, qui ne possède pas d'internat.

M. le président.  - Veuillez conclure.

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État.  - Le dispositif « Devoirs faits » fonctionne efficacement. Nous permettons à ceux qui souhaitent s'engager de pouvoir le faire après un contrat de trois ans.

Mme Christine Lavarde.  - Les parents d'élèves seront heureux de prendre connaissance de votre réponse. Je crains un décalage entre la réalité du terrain et les chiffres qui vous ont été communiqués par l'inspection d'académie.

Droits des anciens combattants

M. Jean-Marc Todeschini .  - Le 3 décembre 2019 doit entrer en vigueur l'ordonnance du 12 décembre 2018. Celle-ci porte sur diverses dispositions relatives à l'organisation des infrastructures ferroviaires et à l'ouverture à la concurrence des services de transport ferroviaire de voyageurs.

Cependant, au II de son article 6, cette ordonnance prévoit la suppression des quatre derniers alinéas de l'article L. 251-1 et l'abrogation des articles L. 251-2, L. 251-5 et L. 523-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre.

Cette abrogation prive les anciens combattants et leurs ayants droit de différents avantages qui faisaient partie intégrante du droit à réparation que la République doit à ces femmes et ces hommes qui se sont sacrifiés pour la France.

Ainsi, les titulaires d'une pension militaire d'invalidité égale ou supérieure à 25 % ne bénéficieront plus des tarifs préférentiels de la SNCF. De même, les pères et mères, les enfants, les conjoints, les frères et soeurs d'un ou d'une mort pour la France ne pourront plus bénéficier d'un voyage gratuit annuel pour se rendre sur la tombe de leur parent.

Ces nouvelles dispositions ont provoqué, pour ne pas dire plus, une profonde incompréhension au sein des associations d'anciens combattants et victimes de guerre. Pour nombre d'entre eux, gravement blessés au service de la France, ce mode de transport leur permet de retrouver une certaine autonomie et d'éviter l'immobilité dans laquelle l'infirmité les enfermerait.

À l'heure où chacun prend conscience de la nécessité de rendre les déplacements sobres en émissions de polluants, retirer le bénéfice des transports ferroviaires à tarifs préférentiels aux anciens combattants apparaît comme particulièrement anachronique.

Cette ordonnance sera-t-elle corrigée ? Ces tarifs seront-ils accordés par l'opérateur public historique comme par tous les autres opérateurs potentiels ? Dans quels délais ces décrets seront-ils signés et publiés ?

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse .  - Veuillez excuser l'absence de Mme Geneviève Darrieussecq, en déplacement en Serbie avec le président de la République.

L'ordonnance que vous citez a abrogé les articles relatifs aux tarifs spéciaux des voyages pour se rendre sur les tombes des morts. Cette abrogation était nécessaire car ces articles ne visaient que la SNCF et non les autres opérateurs ferroviaires.

Mais la loi de 2018 prévoit qu'un décret peut fixer des tarifs spéciaux pour tous les opérateurs. Le décret, en cours de préparation, sera pris avant le 3 décembre 2019, afin qu'aucune rupture de droits n'ait lieu. Le système continuera donc bien d'exister dans le cadre de l'ouverture à la concurrence.

Les associations du monde combattant seront régulièrement tenues informées, soyez-en certain.

M. Jean-Marc Todeschini.  - Merci pour ces propos rassurants.

Lutte contre les ravageurs des noisettes

M. François Bonhomme .  - Ma question porte sur les dégâts causés par la larve du balanin des noisettes, responsable des noisettes véreuses, dont on ne se rend compte que quand il est trop tard. Cette situation menace fortement la filière de la noisette de France qui se trouve démunie pour lutter contre ce ravageur. En effet, l'interdiction de l'usage des néonicotinoïdes contre le balanin des noisettes, en particulier du produit Calypso, dont la substance active, l'acétamipride, a été inscrite à l'annexe 1 européenne, met cette filière en grande difficulté pour réduire ce ravageur, responsable de 80 % des dégâts sur les récoltes.

Je rappelle que nous importons des noisettes en provenance de différents pays qui ne présentent, contrario de la filière française, laquelle propose une production tracée et certifiée, aucune garantie en matière sanitaire et de résidus. Ces importations ne font l'objet d'aucun contrôle efficace tant pour les producteurs nationaux que pour les consommateurs français. Par ailleurs, un nouveau ravageur polyphage, la punaise diabolique, a été détecté sur notre territoire, ce qui constitue un facteur d'autant plus aggravant que cet hémiptère a été à l'origine en 2017 de la destruction de 90 % de la récolte en Géorgie.

Qu'entendez-vous faire pour répondre à cette urgence phytosanitaire et permettre à la filière de la noisette de France de lutter efficacement contre cette grave menace ?

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse .  - Voici la réponse préparée par le ministre de l'agriculture, M. Guillaume.

L'utilisation des néonicotinoïdes est interdite depuis le 1er septembre 2018. En effet, par égard pour la santé des Français, un arrêté du 7 mai 2019 a autorisé la filière noisette à utiliser par dérogation l'acétamipride jusqu'au 1er juillet 2020, après avis de l'Anses. La Direction générale de l'alimentation appuie la filière en ce sens. Ainsi la recherche d'une solution de remplacement est en cours.

Quant à la punaise diabolique, repérée en 2012 dans le Bas-Rhin et en 2015 dans les Landes, les conditions climatiques européennes lui conviennent et il n'est plus possible de l'éradiquer. Sa surveillance a été renforcée dans le cadre du dispositif de surveillance biologique nationale du territoire. Un séminaire a été organisé le 5 février par l'Inra sur ce sujet. Un comité de pilotage mène des projets d'études.

Ce nouveau ravageur se développe, hélas, à la faveur du réchauffement climatique.

M. François Bonhomme.  - Faire un colloque, c'est bien. Surveiller, aussi. Je partage les préoccupations sanitaires du Gouvernement mais l'importation de produits non contrôlés est vraiment problématique. Le Tarn-et-Garonne est le deuxième producteur français de noisettes : hâtons-nous de trouver une solution !

La séance est suspendue à 12 h 45.

présidence de M. Jean-Marc Gabouty, vice-président

La séance reprend à 14 h 30.

Hommage à une délégation parlementaire britannique

M. le président.  - (Mme la ministre ainsi que Mmes et MM. les sénatrices et sénateurs se lèvent.) J'ai le plaisir de saluer, dans la tribune d'honneur du Sénat, une délégation de six parlementaires britanniques du groupe d'amitié Royaume-Uni - France, issus de la Chambre des Communes et de la Chambre des Lords, conduite par Stephen Crabb. Ils sont accompagnés par notre collègue Jean-François Rapin, vice-président du groupe interparlementaire d'amitié France - Royaume-Uni.

Arrivée en fin de matinée, la délégation s'est entretenue avec notre collègue Jean Bizet, président de la commission des affaires européennes, qui co-préside le groupe de suivi sur le retrait du Royaume-Uni et la refondation de l'Union européenne.

Cet après-midi, la délégation participera à un débat sur les conséquences du Brexit pour les entreprises, organisé conjointement par le groupe d'amitié et la Délégation aux entreprises.

Aujourd'hui, plus que jamais, il est important de réaffirmer les liens historiques forts qui unissent nos deux pays. La France et le Royaume-Uni doivent oeuvrer pour conserver d'excellentes relations et agir dans leur intérêt commun.

Le Sénat est particulièrement attaché au dialogue interparlementaire avec le Parlement britannique, auquel il souhaite témoigner sa fidèle amitié.

Mes chers collègues, permettez-moi de souhaiter, en votre nom à tous, à nos homologues du Parlement britannique, la plus cordiale bienvenue, ainsi qu'un excellent et fructueux séjour. (Applaudissements)

Organisation du système de santé (Conclusions de la CMP)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle l'examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à l'organisation et la transformation du système de santé.

Discussion générale

M. Alain Milon, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire .  - Je souhaite d'abord vous dire ma satisfaction de voir les deux chambres parlementaires arriver à un texte commun sur ce projet de loi si structurant.

De 23 articles dans le projet de loi initial, il en compte désormais 63, dont 28 avaient été adoptés conformes par le Sénat. Au cours de la commission mixte paritaire, 31 l'ont été dans la rédaction du Sénat et 14 introduits au Sénat ont été maintenus.

Certes, le texte de la CMP n'est pas parfait. Le projet de loi déposé par le Gouvernement était loin de l'être. Les renvois aux décrets ou aux ordonnances sont trop nombreux, la réforme sur le statut du personnel hospitalier et sur la carte hospitalière est un chèque en blanc donné au Gouvernement ; et la gouvernance et le financement de la sécurité sociale restent trop peu précisés.

Nous resterons vigilants pour accompagner la mise en oeuvre de ce texte ; troisième loi de santé en dix ans.

Ces réserves faites, je me félicite que l'esprit constructif de nos travaux ait été partagé par le rapporteur de l'Assemblée nationale et la CMP.

À l'heure où la demande d'accès aux soins est de plus en plus urgente et où le personnel hospitalier souffre, il aurait été dramatique de ne pas nous accorder.

Je me réjouis que le texte prenne en compte les préoccupations du Sénat sur l'offre de soins dans les territoires et l'adaptation du système de santé au numérique.

Sur le premier volet, nous sommes parvenus à un accord sur une disposition emblématique de l'article 2 introduite en séance publique par le Sénat : la mise en place d'une professionnalisation de la dernière année d'internat de médecine, sous la forme d'une année de pratique ambulatoire en autonomie se déroulant en priorité dans les zones sous-dotées. Cette disposition résultait d'une démarche transpartisane portée par nos collègues Corinne Imbert, Yves Daudigny et Daniel Chasseing. Elle visait à répondre à l'attente immense que nous entendons tous dans nos territoires et qui s'est largement exprimée dans le grand débat national.

Les difficultés d'accès aux soins que subissent des millions de nos concitoyens ne peuvent plus attendre dix ou quinze ans pour être traitées, en comptant sur les effets encore incertains de la réforme du numerus clausus. Nos débats au Sénat ont été vifs à ce sujet, comme ils l'avaient d'ailleurs été à l'Assemblée nationale.

L'accord auquel nous sommes parvenus en CMP a fait l'objet d'âpres négociations avec la majorité de l'Assemblée nationale comme avec les représentants des internes en médecine, concernés au premier chef.

La rédaction retenue permet à la fois de proposer une première réponse efficace et pragmatique à l'urgence territoriale, dans un horizon temporel acceptable, et de prendre en compte les inquiétudes légitimement exprimées par les étudiants quant à la qualité de leur formation.

Le dispositif adopté prévoit la généralisation obligatoire du stage en soins premiers en autonomie supervisée (Saspas) pour les étudiants de dernière année de médecine générale, en l'ouvrant également aux étudiants d'autres spécialités. Alors que la possibilité du Saspas existe depuis 2004, cette expérience de pratique ambulatoire n'est pas suivie par l'ensemble des étudiants en médecine générale, notamment en raison du manque de maîtres de stage.

Ce stage, désormais obligatoire et généralisé, devra avoir une durée d'au moins un semestre. Dans l'organisation actuelle du troisième cycle, cela permettra aux étudiants de se succéder sur un même terrain de stage semestre après semestre, ces terrains de stage devant être prioritairement définis dans les zones sous-dotées. Il sera effectué sous le régime de l'autonomie supervisée, dont les contours seront définis par décret. Ce décret pourra notamment ouvrir la possibilité d'une supervision à distance afin de laisser davantage de souplesse dans l'organisation des terrains de stage.

Pourtant, il serait plus satisfaisant de pouvoir disposer de maîtres de stage en nombre suffisant, et donc de déployer très largement leur formation au cours des prochaines années.

Ce stage obligatoire permettra à l'ensemble d'une promotion, soit près de 3 500 étudiants, de découvrir l'exercice ambulatoire dans les territoires, pour y poursuivre éventuellement leur exercice professionnel. Surtout, cela permettra de déployer dans deux ans l'ensemble d'une promotion sur les territoires qui disposeront ainsi du renfort d'étudiants parvenus presque au terme de leur formation.

Cette disposition laisse en suspens la question de l'alignement de la formation de médecine générale sur celle des autres spécialités : la réflexion sur la mise en place d'une quatrième année devra être poursuivie.

Le volet territorial du texte intègre également une invitation des partenaires conventionnels à ouvrir des négociations sur les conditions dans lesquelles les médecins participent à la réduction des inégalités territoriales dans l'accès aux soins. Cette disposition, introduite au Sénat à l'initiative de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, me semble constituer un signal positif, d'autant qu'elle ne restreint pas priori la palette des outils qui pourront être déployés pour parvenir à cet objectif.

Au chapitre du numérique, les apports du Sénat ont été heureusement conservés, comme l'ouverture automatique d'un espace numérique de santé et du dossier médical partagé.

Afin de ne pas prendre un retard qui serait ensuite impossible à rattraper, notre assemblée avait également souhaité renforcer les exigences d'interopérabilité applicables au secteur en instituant un mécanisme de certification accompagné d'instruments à visée incitative pour les éditeurs : je me félicite de le voir figurer dans ce texte.

J'ai toutefois quelques regrets, notamment sur la composition des commissions médicales de groupement hospitalier de territoires (GHT) dont le Sénat avait souhaité qu'elles émanent des commissions médicales des établissements parties pour ne pas en faire des instances hors sol ou au sein desquelles les établissements supports seraient parfois les seuls représentés. Puissent les décrets et les ordonnances préserver un certain équilibre.

À l'article 21, relatif aux Padhue exerçant en Ehpad, je regrette aussi la solution retenue. Nous devrions entendre parler des Padhue au cours des prochaines années.

Face aux engagements pris par le Gouvernement, nous avons accepté de supprimer les mesures incitatives à l'installation rapide des jeunes médecins dans les territoires - nous y reviendrons en PLFSS ; nous serons attentifs au contenu des ordonnances qui devront correspondre aux orientations développées lors de nos débats.

Pour ce qui concerne l'organisation de la santé au niveau des territoires, nous avons insisté sur la nécessaire souplesse dans les démarches de structuration des acteurs, pour prendre en compte la diversité des situations locales. Le projet de faire entrer tous les territoires dans un même moule est voué à l'échec. Ce que Blaise Pascal a exprimé mieux que moi par ces mots : « La multitude qui ne se réduit pas à l'unité est confusion ; l'unité qui ne dépend pas de la multitude est tyrannie ».

Je vous invite à adopter le texte issu de la CMP, ainsi que l'amendement de coordination du Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains, UC et RDSE)

Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé .  - C'est une grande satisfaction quand les deux chambres du Parlement parviennent à un texte commun ; et c'est d'autant plus vrai pour ce texte qu'il y a urgence à réformer notre système de santé.

Cette loi nous permettra de répondre aux inquiétudes légitimes des Français, aux sollicitations des élus et aux aspirations des professionnels de santé.

Le changement de paradigme porté par le plan « Ma Santé 2022 » porte déjà ses fruits car des accords ont été signés : les professionnels de santé libéraux ont signé les accords avec l'assurance maladie sur le déploiement des assistants médicaux et le financement des communautés professionnelles territoriales de santé. Il nous faut maintenant traduire concrètement ces avancées pour nos concitoyens.

La première orientation de « Ma Santé 2022 » est de construire le système autour du patient, et c'est bien lui qui sera l'évacuateur de notre réussite.

Les débats au Parlement ont été riches. Ils ont permis d'améliorer plusieurs dispositions, de lever certaines craintes et de répondre au mieux aux situations des territoires.

Je veux d'abord dire un mot des apports sénatoriaux lors de la CMP. Je pense à la fusion des multiples dispositifs d'aide à la coordination des parcours des patients qui coexistent aujourd'hui : parcours de santé des personnes âgées en risque de perte d'autonomie, plateformes territoriales d'appui, et les méthodes d'action pour l'intégration des services d'aide et de soins dans le champ de l'autonomie. Cette simplification envisagée dans un précédent rapport est salutaire.

Vos apports sont également déterminants en matière de numérique en santé. Grace à vous, l'ouverture automatique du dossier médical partagé pour tous dès 2021 et l'interopérabilité des systèmes, qui fait aujourd'hui défaut sur le terrain, deviendra réalité.

Enfin, je souhaiterais aussi saluer l'équilibre qui a été trouvé à l'article 2 concernant le développement des stages d'internes en médecine de ville. Je suis heureuse qu'un compromis ait pu être trouvé pour maintenir une formation encadrée tout au long des études. Loin des mesures coercitives, le texte obligera les universités et les services de l'État à trouver des terrains de stages en priorité dans les territoires en tension.

Ce projet de loi prépare les futurs soignants aux besoins du système de santé de demain : nous aurons désormais des professionnels de santé mieux sélectionnés, aux profils variés et mieux formés à travailler ensemble.

Dans le même temps, nous créons sur tous les territoires, un collectif de soins au service des patients et nous offrons aux professionnels de santé les outils pour se rassembler et coopérer.

Avec cet accord en CMP, le message politique envoyé est fort. Je veux vous remercier pour les échanges sincères et éclairés que j'ai eus avec vous dans l'hémicycle et en dehors.

Merci d'avoir donné votre accord à la transformation du système de santé. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains, UC, RDSE et LaREM)

Mme Laurence Cohen .  - Je reste, avec les autres membres du groupe communiste, persuadée que cette loi n'améliorera pas la situation des patients et des professionnels, notamment à l'hôpital public. Votre seule réponse est, comme vos prédécesseurs, de limiter les dépenses publiques : c'est inefficace et nocif.

Vous n'écoutez pas la colère des professionnels, madame la ministre : pas moins de 205 services d'urgences sur 524 sont en grève pour demander des moyens supplémentaires et une revalorisation des salaires de 300 euros. Or vous avez décidé avec Bercy qu'il n'y aurait pas de ressources supplémentaires pour les hôpitaux.

Comme solutions, vous proposez de dégager du temps médical avec des délégations des tâches et la création des auxiliaires médicaux, mais vous sous-estimez la réalité du terrain et l'épuisement des équipes.

Alors que le personnel subit la dégradation des conditions de travail, vous introduisez dans le projet de loi Fonction publique des dispositions renforçant le recours aux contrats temporaires. Le ministre Dussopt ne connait rien à la fonction publique hospitalière : il a tenu des propos mensongers qui ont donné lieu à un rappel au Règlement.

Vous préférez amputer les hôpitaux de leurs compétences, renforçant les structures privées et éloignant les services de soins des habitants. C'est le contraire qu'il faudrait faire, en embauchant et donc en rendant la fonction publique hospitalière plus attractive.

L'accord trouvé entre le Gouvernement, l'Assemblée nationale et la majorité du Sénat aggravera les déserts médicaux. Le stage de dernière année est un progrès, mais les étudiants ne choisiront pas prioritairement les hôpitaux de proximité, et préféreront exercer de manière collective afin d'être salariés.

Et que dire du scénario antidémocratique qui s'est joué pour retoquer l'amendement allongeant le délai de l'IVG ?

Enfin, notre déception est profonde concernant les praticiens à diplômes hors Union européenne et notamment pour celles et ceux qui disposent de la nationalité française. Le Sénat avait adopté l'élargissement de l'exercice des Padhue dans le secteur médico-social, sur laquelle est revenue la CMP.

Tous ces arguments nous conduisent à ne pas voter cette loi qui ignore la démocratie sanitaire.

Dans le discours de la méthode, Descartes nous invitait à douter de tout. Ce n'est pas la marque de fabrique du Gouvernement, hélas. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE ; Mme Maryvonne Blondin applaudit aussi.)

M. Yves Daudigny .  - Le 20 juin dernier, la CMP est parvenue à un accord. Je développerai deux sujets.

La faible accessibilité aux soins de cinq millions de Français est l'un des facteurs destructeurs du pacte républicain.

Trois amendements initiaux portés par Corinne Imbert, Daniel Chasseing et moi-même, puis un travail commun où l'intérêt général et la volonté d'agir ont écrasé les rivalités partisanes, une majorité forte de 311 voix, une difficile négociation entre les deux rapporteurs ont abouti à un vote unanime de la commission mixte paritaire sur un amendement de compromis porteur de l'essentiel, à savoir la réalisation par les étudiants de médecine générale en dernière année de troisième cycle d'un stage d'un semestre au minimum en régime d'autonomie supervisée, en priorité dans les zones sous-denses.

Le gain en temps médical disponible pour les habitants sera immédiat.

Qui niera qu'un tel stage suscitera des vocations ? Certes, tout n'est pas réglé, mais un sillon est creusé qui témoigne de la valeur du travail parlementaire, de l'intérêt du bicamérisme et de la capacité d'initiative du Sénat.

J'en arrive à mon second point. Lors de la discussion, nous étions défavorables aux articles 8, 9 et 10. Le renvoi massif à des ordonnances contourne le travail parlementaire. La notion de gradation des soins qui figure à l'article 8 est partagée, mais trop d'incertitudes demeurent sur son application concrète.

L'article 9 avait été voté conforme au Sénat. Le régime d'autorisation des activités de soins et des équipements lourds sera modifié par ordonnances. Les autorisations sont les actes essentiels dans le dessin de la carte sanitaire. Enfin la commission mixte paritaire a rétabli la presque totalité de l'article 10 dans sa rédaction issue de l'Assemblée nationale réactivant ainsi les craintes déjà formulées sur l'avenir des commissions médicales d'établissement.

Le Gouvernement se donne ainsi les moyens de dessiner seul la nouvelle carte sanitaire du pays, sans tenir compte de quoi que ce soit.

Soyez extrêmement vigilante, madame la ministre, à la situation financière des hôpitaux ; le moment en cours en dit long sur le malaise du personnel des urgences.

Des points d'opposition, des regrets, des points de convergence : le groupe socialiste s'abstiendra donc. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)

Mme Véronique Guillotin .  - Nous saluons l'esprit et l'équilibre de ce texte qui propose de la souplesse pour répondre aux défis du XXIe siècle et qui a su s'affranchir des positions partisanes.

À titre personnel, je me réjouis de l'absence de mesures coercitives grâce à notre ministre et à notre rapporteur. Si les débats ont été vifs, c'est que l'inquiétude est grandissante face aux difficultés d'accès aux soins.

Je crois en cette loi. Les territoires qui se portent le mieux sont ceux dont les professionnels et les élus se saisissent des outils de coordination, créant ainsi une dynamique attractive pour les jeunes qui aspirent à exercer en équipe. À cet effet, la signature récente d'un accord entre la CNAM et les syndicats sur le déploiement des CPTS est à saluer.

Le texte propose un changement de philosophie quant aux études médicales.

J'en viens ici à l'article 2, qui a concentré l'essentiel des débats de la CMP. J'étais contre la professionnalisation en dernière année, craignant que cela n'affecte la qualité de la formation mais un accord satisfaisant a été trouvé en CMP qui inscrit dans la loi un stage de six mois en autonomie supervisée au cours de cette ultime année.

La question qui se pose est celle du nombre de stages variés et formateurs. Les conditions d'obtention du statut de maître de stage sont trop contraignantes, donc décourageantes, et l'article 2 ter a su les assouplir.

Les conditions de stage en zone sous-dotée restent en question, notamment en termes de logement et de mobilité.

Les hôpitaux sont fortement dépendants des internes dans leur fonctionnement et les stages y sont indispensables. Les études ne doivent toutefois pas être la variable d'ajustement pour répondre au manque de médecins.

Les apports du Sénat en matière numérique sont bienvenus, avec notamment la généralisation de l'espace numérique de santé et le dossier médical partagé.

Nous notons le maintien de notre proposition visant à adosser à chaque établissement de santé un plateau télémédical. Merci, madame la ministre, d'avoir soutenu cette mesure.

L'Assemblée nationale a renforcé la gouvernance des groupements hospitaliers de territoire (GHT) via la mutualisation des moyens humains médicaux. S'il faut être pragmatique, il faudra veiller à ce que les plus petites structures ne soient pas négligées.

Compte tenu de la situation difficile des praticiens à diplôme étranger hors Union européenne (Padhue) et des déserts médicaux, cette loi aurait pu aller plus loin.

Cependant, le groupe RDSE votera ce texte dans son immense majorité. À charge du Gouvernement de préciser les conditions de financement et l'accompagnement de nombreux territoires atones afin de ne pas creuser l'écart avec les métropoles. (Applaudissements sur les bancs des groupes RDSE et UC)

Mme Élisabeth Doineau .  - Le 20 juin dernier, je présidais la CMP, première expérience heureuse puisqu'elle s'est soldée par un accord.

Pourtant, quelques jours plus tôt, l'article 2 qui portait sur la troisième année du troisième cycle en autonomie en zone sous-dotée faisait blocage. Députés et sénateurs se sont accordés sur un stage en autonomie supervisée pour une période de six mois. Chacun peut regretter que ses amendements n'aient pas été retenus dans le texte final mais des compromis étaient nécessaires pour que le texte soit soutenu par le plus grand nombre. Députés et sénateurs ont su faire preuve de responsabilité.

Cette responsabilité implique que nous nous emparions de l'ensemble des articles de ce texte pour apporter des réponses concrètes à nos concitoyens selon la diversité de leur situation et des territoires.

Les Français nous attendent sur ce point. Nous devons faire du sur-mesure pour contrer l'inégalité de l'accès aux soins.

C'est pourquoi, je me félicite que perdure dans le texte final l'instauration d'une concertation au moins une fois par an entre le directeur général de l'ARS et les élus locaux sur l'organisation territoriale des soins.

Que retenir du texte de CMP ?

Nous avons entériné la suppression du numerus clausus, péage trop sélectif. Le nombre d'étudiants autorisés à passer en deuxième année sera déterminé en lien avec les ARS et en fonction des besoins des territoires.

Il n'est pas possible de développer les stages sans développer le nombre des maîtres de stage. L'année dernière, leur nombre a augmenté de 14 %, soit 10 736 praticiens qui sont référencés.

En termes d'organisation, l'accent est mis sur le développement des projets territoriaux de santé et des CPTS. Je souscris à ces orientations, qui doivent prendre désormais leur pleine mesure. Mis à la disposition des professionnels de santé et constitué à leur initiative, ces organisations ont tous les atouts pour s'adapter au contexte local, pour structurer les liens ville/hôpital et pour fédérer les coopérations.

Pas moins de 8,6 % des Français n'ont pas de médecin traitant ce qui les prive d'un suivi adapté et d'un meilleur remboursement de soins.

En complément du projet territorial, j'avais proposé que les médecins puissent être désignés conjointement médecins traitants dès lors qu'ils participent à une même communauté professionnelle territoriale de santé. La CMP a jugé cette mesure prématurée. Il faudra y revenir ultérieurement.

Ces dernières décennies, nos dirigeants ont manqué d'anticipations sur les besoins de santé de nos concitoyens. Nous devons y remédier.

Quant aux CPTS, ils relèvent de l'exploit si l'on considère le manque de temps qui caractérise l'exercice des professionnels de santé.

Le projet de loi crée les hôpitaux de proximité, qui assureront le premier niveau des soins hospitaliers et ne bénéficieront ni de la chirurgie ni de l'obstétrique sauf dérogations. Madame la ministre, pourriez-vous envisager de prévoir une mesure en faveur des maternités pour rassurer les futurs parents inquiets ?

Malgré votre volonté d'apurer la situation des Padhue, le problème n'est pas réglé, ce qui crée un sentiment d'injustice.

Enfin, je regrette la désaffection des étudiants pour les métiers d'aides-soignants, d'infirmiers et autres métiers d'aides aux soins des personnes handicapées ou âgées. Les écoles ont beaucoup de mal à atteindre leurs objectifs. Je l'ai constaté en Côte-d'Or, la semaine dernière. Des aménagements de Parcoursup seraient nécessaires.

La réorganisation de notre système de santé passera plus par les initiatives de terrain que par la loi. Je suis convaincue de la nécessité de dialoguer. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC et sur quelques bancs du groupe Les Républicains)

Hommage à une délégation parlementaire irakienne

M. le président.  - (Mme la ministre ainsi que Mmes et MM. les sénatrices et sénateurs se lèvent.) J'ai le plaisir de saluer la présence, dans la tribune d'honneur, d'une délégation de députés du Parlement irakien, conduite par Mme Ala Talabani, présidente du groupe d'amitié Irak-France.

La délégation est accueillie par le groupe d'amitié France-Irak, présidé par notre collègue Bernard Cazeau, pour une visite consacrée au rôle de la France dans la reconstruction de l'Irak.

La délégation participera à un déjeuner de travail avec le groupe d'amitié, ainsi qu'à un petit-déjeuner économique, avec l'Agence française de développement, la direction générale du trésor et plusieurs entreprises françaises qui souhaitent développer leur présence en Irak.

Elle sera également auditionnée par le groupe de liaison, de réflexion, de vigilance et de solidarité avec les chrétiens, les minorités au Moyen-Orient et les Kurdes, présidé par notre collègue Bruno Retailleau.

Cette visite s'inscrit dans le cadre d'une intensification des relations interparlementaires, avec la perspective de la prochaine visite à l'automne du président du Parlement irakien Mohammad al-Halboussi.

La France s'est tenue aux côtés de l'Irak au sein de la coalition internationale conte Daech. Elle entend également le soutenir dans le processus de reconstruction politique et économique, pour lequel le Parlement, clé de voûte des institutions irakiennes, est appelé à jouer un rôle central. Le Sénat sera attentif à toutes les sollicitations formulées par nos partenaires irakiens contribuant au renforcement du parlementarisme, garantie d'une participation inclusive de l'ensemble des citoyens à la vie politique.

Mes chers collègues, permettez-moi, en votre nom à tous, de souhaiter à nos homologues du Parlement irakien la bienvenue au Sénat français, ainsi qu'un fructueux séjour. (Applaudissements sur tous les bancs)

Organisation du système de santé (Conclusions de la CMP - Suite)

Discussion générale (Suite)

M. Daniel Chasseing .  - L'accord de la CMP témoigne de la qualité du travail des deux assemblées, mais aussi de l'urgence qu'il y a à agir pour garantir l'accès aux soins dans tous les territoires.

Nous nous félicitons de l'adoption de l'amendement transpartisan sur le stage ambulatoire en autonomie supervisée. Les zones rurales souffrent d'un manque de médecins mais ne sont pas les seules concernées. Plus de 45 % des médecins ont plus de 55 ans. La désertification médicale, dénoncée depuis plus de vingt ans, va s'accroître. Cet amendement renforcera l'attractivité de la profession et créera des vocations. La mobilisation des jeunes est un levier d'action important pour résorber en quelques années les problèmes d'accès aux soins. Merci au président Milon pour son soutien à ce sujet.

L'accès aux soins ne se réduit pas à la disponibilité des médecins. Certains médicaments manquent et les ruptures de stock s'accroissent. Une mission sénatoriale conduite par M. Decool a fait des recommandations, sur le sujet et, madame la ministre, vous avez présenté une feuille de route. Encore faut-il que les médicaments soient disponibles ! Vendredi dernier, dans mon canton de Corrèze, j'ai constaté que de nombreuses pharmacies n'avaient plus de corticoïdes.

Toutes les actions d'amélioration sont nécessaires pour répondre au principal défi sanitaire de la France, à savoir garantir l'accès aux soins dans tous les territoires.

La prise en charge globale de la santé nécessite une approche territoriale et transversale à travers les CPTS. Les établissements travaillent avec les ARS pour trouver les solutions les plus adaptées à toutes les situations.

La stratégie engagée par le Gouvernement à travers le plan « Ma Santé pour 2022 » modernisera notre système de santé et les études médicales. La levée progressive du numerus clausus facilitera l'implication de l'hôpital dans l'accès à la santé en lien avec les élus locaux et les CPTS. Chaque maison de santé doit disposer d'un médecin.

Nous regrettons l'exclusion des Padhue travaillant en hôpital privé, dans le dispositif. Néanmoins, cette vaste réforme de santé est très attendue.

Le groupe Les Indépendants le soutient pleinement. (Mme Véronique Guillotin applaudit.)

M. Michel Amiel .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM) Nous avons examiné ce texte équilibré, troisième loi de santé en dix ans après la loi de 2009 et celle de 2016. Traduction du plan « Ma Santé pour 2022 », il a pour ambition de transformer en profondeur notre système de santé pour garantir à tous nos concitoyens la qualité et la sécurité des soins.

Réformer les études de médecine, notamment en supprimant le numerus clausus, réarticuler médecine de ville et hôpital, développer l'offre numérique, améliorer l'offre hospitalière de proximité, promouvoir les CPTS : tels ont été les points centraux de nos discussions.

Si nos assemblées n'avaient pas la même vision des enjeux, elles ont trouvé un compromis en CMP, notamment sur la lutte contre les déserts médicaux.

Je réitère ma crainte quant à la suppression du numerus clausus qui n'aura des effets que dans dix à quinze ans, mais j'applaudis l'ambition d'un changement de culture bienvenu.

L'accès aux études médicales ne sera plus réservé qu'aux seuls étudiants issus de la Paces. Des problèmes subsistent, notamment sur l'accueil des étudiants dans les universités, l'orientation des étudiants via Parcoursup, et les critères de définition des besoins en professions médicales des territoires, discutés entre universités et ARS. Le vote de la suppression de l'examen actuel pour le remplacer par un dispositif prenant en compte l'ensemble du parcours des candidats nous satisfait.

Pour autant, le problème de la démographie médicale n'est pas totalement réglé. Le stage à effectuer en ambulatoire, pendant six mois, dans des zones sous-dotées est intéressant.

Je salue tout autant le développement des CPTS qui permettront une meilleure prise en charge de la population. La notion et la prise en compte de la responsabilité populationnelle des professionnels de santé doivent être encouragées car le médecin, l'infirmier mais aussi les aides-soignants, les kinésithérapeutes sont des acteurs de santé publique.

Je regrette que les avancées prévues par le Sénat sur les infirmiers référents n'aient pas été suivies.

Le numérique représente un virage essentiel qu'il faut faciliter. L'automaticité de l'ouverture du dossier médical partagé et d'un espace numérique de santé permettra une prise en charge mieux coordonnée des patients. Les deux assemblées se sont accordées sur une offre de proximité de qualité. Les hôpitaux de proximité sont indispensables au maillage territorial. La gradation des soins n'est pas la création d'une médecine à deux vitesses mais la réorganisation d'un système à bout de souffle et l'affirmation d'une meilleure coordination entre médecine de ville et hôpital.

Notre groupe se félicite des avancées concernant les territoires d'outre-mer, notamment concernant les Padhue, et sera vigilant sur l'urgence sanitaire à Mayotte et le financement de la future ARS.

Si cette loi poursuit un objectif d'amélioration de l'exercice de la médecine, il faudra réfléchir aux mécanismes de financement durable d'un tel projet ; nous y reviendrons dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Madame la ministre, vous avez montré la voie. Puisque M. Milon a cité Pascal et Mme Cohen Descartes, je citerai Confucius : « Quand le sage montre le Lune du doigt, l'insensé regarde le doigt. » (Sourires)

Le groupe LaREM votera ce texte. (« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

M. René-Paul Savary .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Mme Imbert ne peut être présente en raison d'un décès dans sa commune. Je lirai son intervention, puis interviendrai en mon nom.

La désertification médicale touche tous les territoires. Même les grandes villes peinent à proposer une offre de soins satisfaisante. (MJulien Bargeton le confirme.) Nous manquons de généralistes comme de spécialistes.

Afin de répondre à la désertification, Mme Imbert avait proposé de transformer la dernière année de troisième cycle en année de pratique ambulatoire en autonomie dans les zones sous-dotées - solution à la fois rapide et pragmatique. Quelque 3 500 étudiants en médecine générale auraient pu intervenir en renfort dans des zones rurales, ce qui aurait contribué à déconstruire les a priori et optimiser les installations. Le nombre de patients pris en charge aurait été accru. Cette mesure de bon sens a été votée par la quasi-totalité des sénateurs.

Non, le Sénat n'est pas tombé sur la tête, il a fait honneur à sa mission, à son esprit constructif.

Mme Catherine Deroche.  - Très bien.

M. René-Paul Savary.  - L'Assemblée nationale et le Sénat sont parvenus à un compromis : un stage de six mois minimum dans un territoire sous-doté, en autonomie supervisée. C'est un début mais nous devrons trouver des solutions innovantes car la colère gronde. Entendez-la, madame la ministre, avant que les solutions drastiques ne s'imposent d'elles-mêmes.

Le Sénat a renforcé la place des élus locaux dans le pilotage territorial de la santé, trop souvent déconnecté des réalités du terrain. D'où le renforcement des prérogatives du conseil de surveillance des établissements publics de santé, où siègent les représentants des collectivités territoriales.

La Haute Assemblée, lieu de représentation des territoires, a apporté plus de souplesse à la structuration du système de santé pour que les spécificités de chaque territoire soient prises en compte dans le cadre des projets territoriaux de santé.

Malgré une commission mixte paritaire conclusive, ce texte laisse un sentiment d'inachevé. De nombreuses mesures seront prises par ordonnance, et le volet financement n'est pas abordé.

Madame la ministre, comptez sur la force de proposition du Sénat, dès le prochain PLFSS, notamment sur l'exonération de cotisations sociales pour les jeunes médecins ou le financement des hôpitaux de proximité.

Mme Imbert remercie chacun et souligne que la majorité des Républicains votera ce texte, en espérant des résultats concrets sur le terrain au plus vite.

Quant à moi, je souhaite vous faire part de remontées de terrain. Des mesures incitatives peuvent devenir contraignantes : ainsi à Vertus, trois jeunes médecins ont eu un mal de chien à percevoir leur aide à l'installation qui ne leur a été versée qu'au bout de deux ans, quand la direction de l'ARS a enfin réglé le problème.

Autre exemple de difficulté, une jeune fille qui reçoit son traitement pour le déficit en lipase acide lysosomale toutes les trois semaines, traitement qui coûte 500 000 euros à l'année, somme excessive pour l'hôpital d'Épernay alors que Necker peut le prendre en charge. Attention à éviter une médecine à plusieurs vitesses dans le traitement des pathologies lourdes...

Nous avons mené des auditions très intéressantes avec les biotech. Le discours est toujours le même, pour déplorer la longueur des délais de délivrance de l'ATU et de la fixation des prix pour des médicaments innovants. Les biotechnologies françaises ou étrangères ont du mal désormais à mobiliser des investisseurs. C'est pire qu'avant.

La tarification modèle n'est pas toujours adaptée à la pathologie. Le traitement de certains cancers de la prostate à bas risque concilie médicament, dispositif médical et acte chirurgical, soit trois tarifications différentes...

En matière de prévention, il faut oser. Il faut diminuer les risques quand on ne peut pas les supprimer totalement : le plan antitabac ne fera pas disparaître le tabagisme, mais le vapotage ou le tabac chauffé et non brûlé sont autant de pistes à étudier.

Malgré le vote de cette loi, le travail n'est pas terminé. Comptez sur le Sénat pour avancer. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains, UC et Les Indépendants)

Mme Nadine Grelet-Certenais .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR) Ce projet de loi cristallisait les attentes de territoires marqués par la désertification médicale et la crise de confiance. La concurrence malsaine entre territoires pour attirer des médecins laisse nombre d'élus sans solution. Les grèves aux urgences montrent combien la situation est tendue.

Le Sénat a réalisé des avancées notoires notamment à l'article 2. Les effets du stage ambulatoire en zone sous-dense pourraient se faire sentir rapidement contrairement à la fin du numerus clausus. Les territoires attendent beaucoup de cette mesure emblématique.

La télémédecine est une réponse pour un public incapable de se déplacer mais rien ne remplacera la présence humaine. Attention à ne pas créer une médecine à deux vitesses, présentielle pour certains territoires, virtuelle pour d'autres.

Je ne me résous pas à l'abandon de l'article 13 bis A sur la médiation numérique en santé, recommandée par le Défenseur des droits.

L'accès à l'IVG peut être remis en cause par le simple départ à la retraite d'un médecin, comme ce fut le cas l'été dernier dans la Sarthe, à l'hôpital du Bailleul. Alors que des députées appellent dans une récente tribune à constitutionnaliser ce droit, il est étonnant que la majorité à l'Assemblée nationale ne réintroduise pas l'article 27 réclamant un rapport sur l'accès effectif à l'IVG. Il aurait mis en lumière les difficultés de nombre de femmes qui ne peuvent plus exercer leur droit. Nous attendons plus de cohérence, madame la ministre.

Nous avons défendu le principe du consentement au traitement des données personnelles en santé et remis le patient au centre. Le health data hub n'est pas suffisamment encadré. Nous nous réjouissons toutefois de l'extension de l'espace numérique de santé aux bénéficiaires de l'AME, de l'intégration de l'accompagnement social et médico-social ou encore de la protection renforcée des données lors de la conclusion d'un contrat.

Au regard de ce bilan mitigé, le groupe socialiste s'abstiendra. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)

La discussion générale est close.

Discussion du texte élaboré par la CMP

ARTICLE 2

M. le président.  - Amendement n°1, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 47

Après la référence :

I bis

insérer les mots :

de l'article L. 632-2 du code de l'éducation

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - Amendement de coordination.

M. Alain Milon, rapporteur.  - Avis favorable.

Le projet de loi est définitivement adopté.

(Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, RDSE, Les Indépendants, UC et Les Républicains)

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - Merci pour la qualité des échanges et du texte final. Je mettrai une énergie folle à le déployer sur le territoire. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et RDSE)

Mme Laurence Cohen.  - Mettez autant d'énergie à écouter les professionnels...

Création de l'Office français de la biodiversité Application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution (Conclusions des CMP)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle l'examen des conclusions des commissions mixtes paritaires chargées d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant création de l'Office français de la biodiversité (OFB), modifiant les missions des fédérations des chasseurs et renforçant la police de l'environnement et du projet de loi organique modifiant la loi organique du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution.

Il a été décidé que ces deux textes feraient l'objet d'une discussion générale commune.

Discussion générale commune

M. Jean-Claude Luche, rapporteur pour le Sénat des commissions mixtes paritaires .  - Au terme de plusieurs semaines d'échanges nourris avec les députés, je suis heureux de vous présenter un texte commun.

L'objectif était triple : doter le monde de la biodiversité d'un opérateur public unique, renforcer les prérogatives des agents de l'État en matière de police de l'environnement et réformer l'organisation des activités de chasse.

En CMP, nous avons tenu à préserver l'équilibre délicat trouvé au Sénat. Le texte de compromis conserve l'essentiel de nos apports.

Je remercie Anne Chain-Larché, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales et Jean-Noël Cardoux, président du groupe d'études Chasse et pêche pour leurs contributions.

La gouvernance du nouvel établissement public a été modifiée pour une représentation plus équilibrée des différentes parties prenantes. Nous avons introduit la représentation des organisations professionnelles agricoles et forestières, des acteurs de la chasse et posé le principe d'une présence minoritaire de l'État, assortie d'un droit de veto.

Nous avons aussi précisé que le financement de l'OFB ne devait pas se faire au détriment des agences de l'eau ; nous y veillerons en loi de finances.

En matière de police environnementale, nous avons précisé les attributions des inspecteurs de l'environnement, dans le sens du travail de l'Assemblée nationale.

Nous avons consacré la contribution financière du monde de la chasse à la protection de la biodiversité et entériné l'engagement de l'État à soutenir ces actions à hauteur de 10 euros par permis de chasse. Il faudra rester vigilant sur l'utilisation de ces fonds et sur la solidarité entre fédérations départementales.

Le Sénat a adopté plusieurs dispositions renforçant la lutte contre les dégâts de grands gibiers, fléau pour les agriculteurs et les forestiers : nourrissage et transport de sangliers vivants sont encadrés et les pouvoirs du préfet renforcés. Les fédérations régionales de chasseurs pourront être gestionnaires de réserves naturelles.

À titre personnel, je ne suis pas favorable à une participation à l'hectare comme cela a été décidé. Un permis à 250 euros -  contre 400 euros auparavant  - aurait été plus simple et plus juste.

C'est aussi au Sénat qu'ont été adoptés l'harmonisation réglementaire des règles de sécurité et un régime de rétention ou de suspension du permis de chasse en cas de comportements dangereux.

Enfin, nous avons précisé les critères de reconnaissance des zones humides, élargi le périmètre des aires marines protégées et introduit dans la loi une définition de la géodiversité.

Ces évolutions ont été apportées en tenant pleinement compte du travail effectué par les députés. Nous avons oeuvré activement avec Barbara Pompili, rapporteure de l'Assemblée nationale, pour trouver un accord. Je salue aussi l'implication du président Hervé Maurey.

Un point a suscité des débats nourris : l'introduction, en première lecture, à l'initiative de M. Cardoux, d'un délit d'entrave aux activités de chasse. En effet, chasseurs et pêcheurs sont régulièrement victimes d'exactions insupportables de la part d'une minorité radicale. La disposition était fondée, mais l'Assemblée nationale, hélas, l'a repoussée pour des raisons d'affichage. Nous avons consenti à son retrait après que le Gouvernement s'est engagé à étudier la proposition de loi de Jean-Noël Cardoux, qui sera inscrite à l'ordre du jour du Sénat en octobre. Souhaitons que le texte soit également rapidement inscrit à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale.

Police, gouvernance, financement, organisation de la chasse : sur tous ces sujets, un compromis exige des concessions. Mais nous pouvons être fiers de l'importante contribution du Sénat sur ce texte, que je vous invite à adopter. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC)

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire .  - J'ai grand plaisir à être devant le Sénat pour le vote de ce texte. Je remercie les parlementaires qui se sont investis et ont permis à la CMP d'aboutir.

L'un des points les plus débattus portait sur le délit d'entrave aux activités de chasse. Le Gouvernement s'est engagé à faciliter la discussion de la proposition de loi Cardoux ; nous y reviendrons donc.

Si la création de l'OFB faisait consensus, nous avons eu des échanges nourris sur sa gouvernance, ses missions ou encore la représentation des outremers ; je crois que nous avons trouvé un point d'équilibre.

Cet établissement qui réunit 2 700 agents sera au service du ministère. Il sera très mobilisé pour la mise en oeuvre de l'ambition commune fixée dans le plan biodiversité et les Assises de l'eau.

Les inspecteurs de l'environnement seront ainsi dotés de pouvoirs d'enquête renforcés et n'auront plus à se dessaisir au profit d'un OPJ généraliste. Les peines seront renforcées pour les délits d'atteinte aux espèces et habitats protégés et pour exercice illégal de la chasse.

La sécurité à la chasse est une priorité du Gouvernement. La tendance est à la baisse des accidents, mais les incidents augmentent. La loi prévoit des obligations minimales de sécurité au niveau national, la rétention ou suspension du permis en cas de manquement grave ainsi qu'une obligation de formation pour les accompagnateurs de jeunes chasseurs.

Contre les dégâts de gibier, en sus de la restriction des lâchers dans les enclos et l'interdiction de nourrissage des sangliers, la loi incite financièrement les chasseurs à mieux réguler le grand gibier.

La loi consacre le principe de gestion adaptative de certaines espèces pour adapter les prélèvements et instaure une éco-contribution des chasseurs en faveur de la biodiversité pour financer des actions concrètes.

La modification de la définition des zones humides était importante pour lever les ambiguïtés.

Restent des erreurs ou oublis de coordination, qui ont motivé le dépôt de quatre amendements, adoptés par l'Assemblée nationale.

L'OFB sera créé au 1er janvier 2020. Les textes d'application paraitront rapidement, et trois rapports sont prévus.

Le financement de l'Office sera assuré par voie budgétaire, ce qui évitera de mettre les agences de l'eau à contribution.

Nous avons en outre avancé sur les questions de ressources humaines, dont la requalification d'agents de catégorie C en catégorie B.

Le déclin de la biodiversité est très préoccupant - le président de la République a même reçu les scientifiques de l'IPBES. Ce texte d'action nous permettra de mieux la protéger.

M. Claude Bérit-Débat .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR) Le 25 juin, un accord a été trouvé sur la création de l'OFB. Je m'en félicite car rien n'était acquis. Les mesures les plus clivantes ont été aménagées ou supprimées par la CMP. Aussi je ne m'opposerai pas à ce texte. Je salue la volonté de compromis des rapporteurs et du Gouvernement et l'excellent travail en amont du groupe Chasse.

Le projet d'intégration de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) dans l'Agence française de la biodiversité était naguère combattu par le monde de la chasse ; j'y étais moi-même opposé. Désormais, tout est différent. Le président de la République et le président de la Fédération nationale des chasseurs se sont accordés sur le permis national à 200 euros et sur la contribution des chasseurs au fonds pour la protection de la biodiversité. La fusion est désormais acceptée comme partie intégrante de la stratégie nationale pour la biodiversité. Entre le monde de la chasse et celui de la protection de la nature, il y a une convergence des objectifs et une complémentarité qui justifie cette fusion.

Le texte issu de la CMP est acceptable, même si c'est un compromis. La voix du Sénat a été entendue et il faut s'en féliciter.

Les sénateurs socialistes se sont attachés à préserver les missions essentielles du futur établissement et à prendre en compte les attentes des différentes parties prenantes. Nous avons ainsi milité pour que le monde agricole et forestier figure nominativement au conseil d'administration de l'Office.

Nous soutenions aussi l'inscription dans le texte de la contribution de l'État au futur fonds pour la protection de la biodiversité, dont la gestion est confiée à la fédération nationale des chasseurs. Nul doute qu'elle saura prendre en compte les souhaits des fédérations départementales.

Enfin, le groupe socialiste a fait adopter l'affectation à titre gratuit à l'OFB de biens mobiliers transférés à l'État par décision de justice.

J'ai été particulièrement attentif aux dispositions sur les dégâts de grand gibier, souvent des sangliers, la Dordogne étant directement touchée. Je me réjouis des avancées obtenues en la matière par M. Cardoux, ainsi que du renforcement des compétences des fédérations départementales.

Il nous faudra veiller à ce que le financement de l'OFB provienne du budget général et non d'un prélèvement sur les agences de l'eau.

Je suis un défenseur de la chasse populaire. La disparition du permis bi-départemental représente une hausse tarifaire discriminante pour les plus modestes.

Il nous faudra rester attentifs au respect de toutes les parties prenantes au sein du conseil d'administration et veiller à ce que le droit de veto du Gouvernement ne mène pas à des abus.

Je regrette que l'extension aux territoires « susceptibles d'être chassés » du dispositif de participation des territoires de chasse ait été supprimée au motif qu'elle relevait de la loi de finances. Il faudra y revenir dans le PLF.

Enfin, des questions demeurent sur le financement de l'OFB : 21 millions d'euros de baisse du permis de chasse, 10 millions d'euros de participation de l'État au fonds national, 9 millions d'euros de compensation : les besoins s'élèvent à 41 millions d'euros... Nous serons attentifs au respect par l'État de ses engagements en loi de finances.

Le groupe socialiste votera majoritairement pour ce texte. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR, LaREM et sur quelques bancs du groupe RDSE)

M. Ronan Dantec .  - Je regrettais il y a trois ans que l'ONCFS ne soit pas intégré à l'AFB ; je me réjouis donc de l'accord trouvé en CMP sur ce texte, qui inscrit cette fusion dans la loi et participe de la stratégie pour enrayer la perte de la biodiversité.

Le nouvel office devra s'investir dans la définition de cette stratégie pour en finir avec les pollutions chimiques et le gaspillage insensé des terres agricoles et naturelles.

Une proposition de résolution Laborde-Labbé sur l'artificialisation des terres est inscrite dans la niche du groupe RDSE en octobre prochain.

Je déplore que beaucoup d'amendements de la majorité sénatoriale aient servi à passer des messages de soutien à certains chasseurs peu représentatifs du monde de la chasse. Je n'insisterai pas sur la chasse à la glu, chère à de nombreux sénateurs, y compris RDSE, qui a déjà conduit à des condamnations au niveau européen.

Certaines pratiques jouent contre l'image de la chasse, freinent les vocations alors que nous avons besoin de chasseurs pour réguler les populations de sangliers !

Je ne désespère pas que nous ayons un jour un débat serein sur l'image de la chasse. L'enjeu est d'abord la synergie entre chasseurs et écologistes sur la gestion dynamique de notre patrimoine naturel, pour augmenter les populations d'espèces chassables, ce que nous souhaitons tous.

La contribution de 10 euros par chasseur fait grincer bien des dents chez les associations de protection de l'environnement. Aux chasseurs de faire mentir les procès d'intention.

La gestion adaptative des espèces suscite également des inquiétudes. Il s'agira soit de limiter la pression sur des espèces fragiles, soit d'augmenter la liste des espèces chassables. Le comité d'experts a recommandé un moratoire pour la tourterelle des bois, avec un quota de 18 300 volatiles abattus, alors que le Gouvernement autorise un prélèvement de 30 000 tourterelles. Difficile d'avoir un dialogue apaisé si les avis scientifiques ne sont pas suivis...

Les politiques de reconquête de la biodiversité ne fonctionneront pas en l'absence de financement, qu'il faudra préciser.

Il ne saurait être question de ponctionner les ressources des agences de l'eau.

Nous défendions également une police de l'environnement unifiée, mais encore devra-t-elle avoir les moyens humains de fonctionner.

Le groupe RDSE votera très largement les conclusions de cette CMP.

M. Jérôme Bignon .  - La CMP est parvenue à un accord sur la création de l'OFB. C'est une bonne nouvelle.

L'idée, ancienne, a longtemps été controversée. Les deux grands établissements publics précédents mutualisent leurs moyens et leurs compétences, fournissant au nouvel organisme 2 700 agents. Cela parachève le mouvement de fusion entamé avec la loi sur la biodiversité de 2016. Attention toutefois, quand on fait tellement de fusions, on en finit par oublier parfois qui est fusionné...

Placer les enjeux environnementaux au niveau territorial, faire converger les politiques de l'eau et l'action en faveur de la biodiversité et renforcer les pouvoirs de police de l'environnement, tels sont les objectifs fixés à l'OFB.

Je me félicite du maintien de nombreuses propositions du Sénat, en faveur d'une meilleure protection du patrimoine naturel, comme celles sur les zones humides et l'élargissement des aires marines protégées.

Je me félicite aussi du renforcement de la police de l'environnement à l'heure où le changement climatique, heureusement rajouté à l'article premier, frappe une nature précaire. La note scientifique n°12 publiée en janvier par l'Opecst insiste sur le fait que la France se situe parmi les premiers pays où les espèces sont les plus menacées. Il est urgent d'agir.

Je me félicite de la création de l'OFB, opérateur clé qui agira de manière efficace. Membre du conseil d'administration de l'AFB pour le Sénat, je suis avec attention la territorialisation progressive des agences sur le terrain. M. Pierre Dubreuil, désigné comme préfigurateur, et avec qui je suis en contact, accomplit un travail remarquable. L'OFB doit bénéficier de moyens humains et financiers suffisants pour agir concrètement. Nous avons en France le génie d'inventer des outils brillants. Mais Bercy ne doit pas ensuite empêcher cet établissement public remarquable d'avancer pour le bien commun.

Il sera primordial que tous les acteurs s'investissent pour le bon fonctionnement de l'office.

Le groupe Les Indépendants soutiendra le texte issu de la CMP. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Indépendants ; M. Jean-Claude Luche, rapporteur, ainsi que M. Jean-Paul Émorine applaudissent également.)

M. Jean-Noël Cardoux .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Que cela a été difficile, tant dans l'hémicycle qu'en CMP ! Le Sénat a une nouvelle fois fait preuve de sa volonté de défendre les territoires ruraux. Je remercie à mon tour le rapporteur, ainsi que mes collègues du groupe de travail sur la chasse, qui ont fait preuve d'une solidarité totale.

Permis à 200 euros, gestion adaptative, défense de l'environnement, protection du statut des associations de chasse agréées : tous ces points de l'accord entre le président de la République et le président de la fédération des chasseurs ont été conservés.

Le Sénat a interdit des mesures pour limiter les dégâts des grands gibiers et les engrillagements. Il a apporté sa pierre à l'édifice sur la gouvernance de l'OFB. Je salue la capacité de dialogue de la ministre.

Je ne reviendrai pas sur les crispations qui ont eu lieu sur le délit d'entrave. Madame la ministre, vous vous êtes engagée à ce que la proposition de loi que j'ai déposée soit rapidement inscrite à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale. Nous en prenons note.

Nous avons un sentiment d'inachevé. Les pouvoirs des agents contractuels des fédérations de chasseurs semblent finalement régresser un peu. Peut-être faudrait-il faire évoluer leur statut. Nous n'avons pas pu maintenir la généralisation de la contribution à l'hectare à tous les départements. Nous en discuterons à nouveau dans la prochaine loi de finances.

Au risque de heurter M. Dantec (Celui-ci s'exclame.), le refus de la sanctuarisation des chasses traditionnelles est regrettable. Nous finirons sans doute l'un et l'autre nos mandats de sénateurs sans avoir trouvé d'accord... (M. Ronan Dantec proteste.) Quoi qu'il en soit, nous nous retrouvons sur le fait que chasseurs, pêcheurs et écologistes doivent oeuvrer ensemble à la défense de l'environnement. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Les Républicains, ainsi que sur ceux des groupes UC et SOCR ; M. Ronan Dantec applaudit également.)

On pourrait parler de la tourterelle, des quotas, des comités d'experts...Vos propos sont parfois mal perçus par les gens modestes qui vivent en milieu rural et y sont attachés. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains, ainsi que sur quelques bancs des groupes UC, Les Indépendants et RDSE)

M. François Patriat .  - (Quelques exclamations à droite) Il y a près de vingt ans, la loi Chasse que j'avais présentée puis qui a été votée à l'Assemblée nationale avait suscité passion et excès dans les débats, avant d'aboutir à un texte d'équilibre. Elle a permis une chasse durable.

Je redoutais que les mêmes passions se déchaînent pour l'examen de ce projet. Cela n'a pas été le cas et je remercie chacun pour les concertations qui ont conduit à ce nouveau texte d'équilibre.

Issu d'un document voté à 98 % par les chasseurs il y a deux ans qui a abouti à un accord grâce à la volonté du président de la République, ce texte instaure un permis de chasse à 200 euros certes, mais incite surtout les chasseurs à assumer leurs responsabilités en faveur de l'environnement. La co-contribution de 5 euros par permis de chasse et de 10 euros par l'État doit servir à financer des projets en faveur de la biodiversité que les fédérations des chasseurs pourront assumer pleinement.

La raison l'a emporté. Je me félicite que l'argent ne soit pas réparti selon le nombre de chasseurs mais bien selon la pertinence des projets. Je crois que l'argent de l'eau doit aller à l'eau et l'argent de la chasse à la chasse. C'est à l'État d'assurer l'expertise de la biodiversité, dans ses fonctions régaliennes.

Qui aurait pu croire il y a deux ans que l'on arriverait à un consensus sur la gestion adaptative des espèces ? Il s'agit de tenir compte de l'effet de cliquet affectant certaines espèces non chassables en expansion, tels les goëlands et les cormorans. Sur la tourterelle des bois, j'ai répondu à mon ami Ronan Dantec. Nous aurons demain une gestion contributive de l'Agence qui permettra de gérer intelligemment les espèces, dans un esprit de responsabilité et de sauvegarde.

Même chose pour la police rurale. Plutôt que de s'arcbouter sur le « Touche pas à mon office », cette police de proximité pourra défendre efficacement la biodiversité, avec efficacité. Il faudra redonner aux agents de développement le pouvoir de verbaliser sur tout le territoire.

Ce texte ne concerne pas seulement la chasse mais porte aussi sur des exigences environnementales nécessaires. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

M. Guillaume Gontard .  - La CMP a été conclusive, ce qui n'était pas ce que nous espérions tant le texte a été dénaturé par le Sénat.

Cependant ce projet de loi n'a au bout du compte pas été complètement dévoyé et nous avons échappé aux mesures sénatoriales qui auraient aggravé l'effondrement en cours de la biodiversité par l'autorisation de techniques d'un autre temps, telles que la chasse à la glu ou la chasse aux oiseaux migrateurs. C'est un soulagement, alors que la France a perdu un tiers de ses espèces d'oiseaux depuis le début du siècle. Vous pourrez toujours, amis chasseurs, chasser une vingtaine d'espèces menacées...

Je me félicite également de la suppression de l'odieux délit d'entrave à la chasse. Chacun pourra profiter de la nature, notre patrimoine commun. Les trop nombreux accidents de chasse qui ont coûté la vie à des promeneurs auraient dû faire réagir chacun.

Nous saluons la création de l'OFB mais nous demeurons inquiets face à l'affectation de 15 millions d'euros d'argent public à un fonds géré par la fédération des chasseurs de manière peu transparente. Nous espérons que le prochain budget actera les 600 millions d'euros supplémentaires demandés par Nicolas Hulot pour le plan Biodiversité.

La sanctuarisation du budget de l'OFB est indispensable, notamment pour mener à bien l'indispensable politique de l'eau.

Votre Gouvernement est devenu expert en « plomberie administrative » : il réorganise tout en espérant améliorer l'action publique à moyens constants, voire avec moins. Cependant, il ne pourra pas grand-chose sans moyens humains.

Madame la ministre, stopperez-vous l'hémorragie humaine qui touche votre ministère ? L'OFB aura besoin d'agents sur le terrain, notamment pour déployer le plan Loup, qui n'est toujours pas complètement financé.

Enfin, le compromis trouvé en CMP où l'État renonce à sa majorité au conseil d'administration est inquiétant.

Le groupe CRCE votera néanmoins en faveur de cette dernière mouture du texte par sens du compromis.

Mme Anne-Catherine Loisier .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe UC) Comme beaucoup, nous nous félicitons de cette CMP conclusive sur un texte polémique.

Je regrette toutefois pour l'efficacité de l'OFB le retrait de certaines dispositions. Tenir à l'écart les propriétaires agricoles et forestiers n'est pas une position tenable. Quel intérêt à ignorer la problématique du multiusage ?

Un amendement prévoyait la compatibilité entre les plans de chasse et les plans d'aménagement des forêts publiques. Il est regrettable qu'il n'ait pas été voté.

Nous comptons sur la sagesse des décisionnaires de l'OFB pour choisir des options d'équilibre et garantir une gouvernance plus légitime de l'office : pouvoirs renforcés du préfet pour lutter contre les dégâts de grands gibiers ou péréquation entre la fédération nationale des chasseurs et fédérations locales sont quelques-uns des enjeux.

Le délit d'entrave a été supprimé après l'engagement du Gouvernement de faire examiner la proposition de loi de Jean-Noël Cardoux. Nous l'attendons dans les plus brefs délais.

La CMP a aussi supprimé l'extension de la contribution à l'hectare aux territoires susceptibles d'être chassés, ce qui risque de créer des effets d'aubaine. Le rétablissement de la rédaction de l'Assemblée nationale sur l'encadrement du droit d'opposition à un terrain dans le cadre d'une association communale de chasse agréée contredit une décision du Conseil d'État d'octobre 2018 fondée sur la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

En matière de financement, elle a sanctuarisé les ressources des agences de l'eau. Elle a maintenu l'engagement de l'État à soutenir les fédérations, à hauteur de 10 euros par permis de chasse.

Malgré ces avancées, le texte n'a pas écarté l'épée de Damoclès que représente l'augmentation massive du gibier en forêt. Nous comptons sur la lucidité des responsables de l'OFB pour trouver des solutions et assurer la pérennité des massifs en danger.

Le groupe UC, dans sa grande majorité, votera ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC)

M. Jean-Paul Prince .  - (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UC) L'adoption de ce texte en CMP est une très bonne nouvelle. La création de ce nouvel office rendra plus effective la lutte pour la préservation de la biodiversité sur notre territoire. Elle permettra une répartition plus homogène des équipes sur le terrain. Les moyens de police de l'environnement seront mutualisés pour une meilleure efficacité. La gestion adaptative des espèces favorisera la préservation de notre patrimoine naturel.

Le délit d'entrave à la chasse a été retiré du texte, mais la proposition de Jean-Noël Cardoux sera bientôt examinée par le Parlement. L'idée d'apporter une réponse pénale adaptée à cet inquiétant phénomène n'est donc pas abandonnée.

L'examen de ce texte a été l'occasion d'alerter sur l'engrillagement qui représente quelque 3 600 km de clôture en Sologne. Les élus doivent se saisir de cette question, qui peut être réglée au niveau des collectivités, lors de l'élaboration des documents d'urbanisme.

La commission a renforcé les pouvoirs du préfet dans la lutte contre les dégâts de grand gibier. La CMP a en outre sanctuarisé les ressources des agences de l'eau, ce qui est heureux. La question des ressources de l'établissement reste posée, mais je veux croire que le Gouvernement fournira à l'office les moyens nécessaires.

Les actions de restauration de la biodiversité sont définies avec plus de précision. Elles seront financées à hauteur de 5 euros par permis par personne et 10 euros par permis venus de l'État.

Les défis qui attendent l'OFB sont importants : déforestation, utilisation trop grande des ressources naturelles, pollution, espèces exotiques invasives. En 2019, des experts de l'ONU ont rendu à ce propos un rapport alarmant.

Le groupe UC votera en majorité ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC)

Mme Anne Chain-Larché .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) L'accord en CMP sur ce projet de loi n'était pas gagné d'avance. Je remercie en particulier MM. Luche et Cardoux. Ce projet de loi conserve nombre d'apports du Sénat, ce dont je me félicite.

La création de l'OFB était très attendue. Le Sénat était particulièrement attentif à la place des chasseurs dans sa gouvernance : ils seront 10 % de son conseil d'administration. L'État sera minoritaire mais disposera d'un droit de veto.

Nous tenions aussi à écrire dans la loi que l'État versera 10 euros par permis de chasse à des actions en faveur de la biodiversité. Les fédérations départementales seront rassurées.

Le volet consacré à la sécurité est essentiel. Chaque accident de chasse est de trop. Les dispositions sénatoriales d'harmonisation des pratiques ont été conservées dans ce texte.

Les ACCA, de petite taille, sont protégées. Elles sont la garantie d'une chasse populaire, ouverte à tous, qu'il faut préserver.

Le mot chasse disparaît du nom de l'Office. Espérons que ce ne soit pas de mauvais augure.

Le délit d'entrave à la chasse a disparu du texte après l'engagement du Gouvernement de faire examiner la proposition de loi Cardoux sur le sujet.

Madame la ministre, nous comptons sur vous pour que le budget de l'OFB soit à la hauteur.

En attendant, le groupe Les Républicains votera les conclusions de la CMP. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Guillaume Chevrollier .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) La création de ce grand établissement témoigne d'une volonté collective de préserver la biodiversité, qui est à saluer. Le pilotage de la politique en faveur de la biodiversité a été réformé par la loi de reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages de 2016.

L'ONCFS et l'AFB - elle-même issue de quatre établissements - donnent naissance à l'OFB. Le Sénat avait exprimé ses craintes à l'encontre de la création d'un établissement tentaculaire et aveugle.

Madame la ministre, il faut s'attacher à mener des politiques publiques de longue durée, si possible avec une stabilité ministérielle... Or nous avons en définitive peu d'informations sur l'avenir à long terme de l'OFB.

Le Sénat défendait la contribution de 10 euros de l'État pour chaque permis de chasse.

Le délit d'entrave à la chasse a été supprimé. Le Gouvernement a estimé que la proposition de loi était un véhicule plus adapté : soit.

L'année 2020 sera importante pour la biodiversité, avec le congrès mondial pour la nature à Marseille et une conférence internationale en Chine. Au-delà de ces rendez-vous indispensables, il faut défendre et soutenir les acteurs locaux.

Le groupe Les Républicains invite le Gouvernement à s'appuyer sur eux pour réaliser une reconquête de la biodiversité en métropole et outre-mer, où elle est si riche. Il votera ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains, ainsi que sur quelques bancs du groupe UC)

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État.  - Je note le soutien de chacun des orateurs qui se sont exprimés dans cette discussion générale et je les en remercie. C'est un beau travail parlementaire pour un texte qui n'oppose pas chasse et biodiversité.

Nous avons discuté avec la fédération nationale de la chasse sur les permis bidépartementaux. Elle s'est engagée à y revenir.

Nous passons de 90 000 à 30 000 tourterelles chassables. Cela va dans le bon sens. Je confirme le financement budgétaire de l'office. Je serai particulièrement attentive aux ressources humaines avec la volonté de maintenir les agents au plus près du terrain.

Ce beau texte équilibré nous fera avancer sur la biodiversité. Merci à tous. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM ; MM. Jean-Claude Luche, rapporteur, Yvon Collin et Franck Menonville applaudissent également.)

La discussion générale est close.

M. le président.  - Je rappelle qu'en application de l'article 42, alinéa 12, du Règlement, le Sénat examinant après l'Assemblée nationale le texte élaboré par la commission mixte paritaire, il se prononce par un seul vote sur l'ensemble du texte en ne retenant que les amendements présentés ou acceptés par le Gouvernement.

Discussion du texte élaboré par la CMP sur le projet de loi

ARTICLE PREMIER BIS

M. le président.  - Amendement n°1, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 4, seconde phrase

Après la référence :

insérer les mots :

du I

ARTICLE 10

M. le président.  - Amendement n°2, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 1, au début

Insérer les mots :

Le 1° bis de l'article 1er bis

Amendement n°3, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 7

Remplacer les mots :

et l'article 390-1 du code de procédure pénale, dans leur rédaction résultant du 1° bis et du 6° du III de l'article 2 de la présente loi, sont applicables

par les mots :

, dans sa rédaction résultant du 1° bis du I de l'article 2 de la présente loi, est applicable

ARTICLE 12 (Nouveau)

M. le président.  - Amendement n°4, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 5

Remplacer les mots :

à L. 413-15

par les mots :

à L. 413-8

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État.  - Les quatre amendements sont de coordination.

M. Jean-Claude Luche, rapporteur.  - Oui, ou rédactionnels. Avis favorable à ces quatre amendements.

Vote sur le texte de la CMP sur le projet de loi

M. Gérard Poadja .  - Trois ans après l'entrée en vigueur de la loi Biodiversité, nous allons adopter ce texte. Contre toute attente, un accord a été trouvé en CMP.

Le conseil d'administration comptera entre 30 et 40 membres. J'avais moi-même proposé de fixer ce nombre à 30 par amendement. C'est toujours un progrès par rapport au projet initial. Autre avancée en faveur d'une pluralité nécessaire au bon fonctionnement de l'Office, l'État ne sera plus majoritaire au conseil d'administration.

Nous partions de loin pour ce qui est de l'outre-mer, qui n'était pas même pas mentionné. Pourtant, la Nouvelle-Calédonie est le deuxième hotspot planétaire de biodiversité et abrite à elle seule, 75 % des récifs français.

Je partage l'inquiétude de Michel Magras sur l'absence de référence à une instance spécifiquement ultramarine. L'Office doit représenter toutes les parties prenantes.

Je voterai ce projet de loi avec une majorité du groupe UC. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC)

Mme Laurence Rossignol .  - En première lecture, j'avais voté contre ce projet de loi. La CMP est revenue sur nombre de dispositions.

Je suis élue d'un département forestier dans lequel les veneurs se déploient chaque semaine et les atteintes à la propriété dans la forêt sont constantes. Chaque année, il y a des accidents graves entre riverains et chasseurs. La population prend la défense des animaux réfugiés dans les jardins et centres-villes au risque permanent du conflit.

Je connais l'objectif de la proposition de loi Cardoux qui vise à limiter l'action des habitants. Aussi m'abstiendrai-je.

M. Jean-Noël Cardoux .  - Je suis surpris des contre-vérités énoncées par Mme Rossignol. (Celle-ci proteste.) Il n'y a eu d'incidents que dans l'Oise, il y a dix-huit mois, et qui ont été montés en épingle. Les veneurs ne « squattent » pas les forêts domaniales. Ils ont le droit d'y être. Grâce à une charte qui leur est opposable, désormais les chasseurs doivent arrêter les chiens à un kilomètre de toute zone urbaine. La chasse à courre est la chasse la plus naturelle qui soit. Une telle désinformation est inadmissible dans cet hémicycle. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Mme Laurence Rossignol.  - Continuez et je voterai contre !

Le projet de loi, modifié, est définitivement adopté.

(Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et LaREM)

M. le président.  - Conformément à l'article 42, alinéa 12, du Règlement, je vais mettre aux voix l'ensemble du projet de loi organique dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire. Le scrutin public est de droit.

Voici le résultat du scrutin n°165 :

Nombre de votants 342
Nombre de suffrages exprimés 337
Pour l'adoption 337
Contre     0

Le Sénat a adopté.

(MM. Jean-Claude Luche, rapporteur, Yvon Collin et Jean-Claude Requier applaudissent.)

Échec en CMP

M. le président.  - J'informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2018 n'est pas parvenu à l'adoption d'un texte commun.

Rappel au Règlement

M. Jean-Claude Requier.  - Je demande une rectification de vote sur le scrutin qui vient d'avoir lieu.

Vous aviez dit, monsieur le Président, que vous ne participeriez pas au vote, or j'ai mis votre bulletin dans l'urne. Je demande donc une rectification de ce scrutin.

M. le président.  - Je ne demande pas de rectification. (Sourires)

La séance, suspendue à 17 h 30, reprend à 17 h 45.

Énergie et climat (Procédure accélérée)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à l'énergie et au climat.

Rappels au Règlement

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques .  - Ce rappel au règlement est fait au nom de la commission des affaires économiques et sans doute au nom de tous mes collègues.

Ce texte engage la politique énergétique de la France pour le demi-siècle qui vient. On va y parler de fermetures de centrales, de nucléaire, d'énergie renouvelable, du développement des filières industrielles, des tarifs règlementés, de rénovation des bâtiments... Bref, de petits sujets (Sourires)

Depuis le début de l'examen de ce texte, nous subissons l'inversion de la hiérarchie des normes. Le Parlement se voit obligé de ratifier des éléments de la programmation pluriannuelle de l'énergie... Le règlement précède la loi, c'est un comble.

Après un mois et demi de préparation à l'Assemblée nationale, le texte est passé de 12 à 55 articles et il n'est plus resté que quelques jours au Sénat pour auditionner le ministre et examiner les 43 articles additionnels de l'Assemblée nationale. Nos collègues n'ont eu que deux jours et demi, week-end compris, pour déposer des amendements. Les deux rapporteurs, à qui je rends hommage, n'ont eu que 24 heures pour examiner plus de 400 amendements. Nos équipes ont travaillé nuit et jour...pour voir, apothéose, le ministre démissionner à deux heures de l'examen de ce texte.

Merci d'être là, madame la ministre, c'est une forme d'héroïsme que de reprendre un texte aussi important, mais le Sénat n'est vraiment pas content d'être traité avec tant de désinvolture. (Applaudissements sur tous les bancs)

M. Roland Courteau .  - Je déplore à mon tour, au nom du groupe socialiste, les conditions de travail exécrables qui nous sont imposées sur ce texte. Nous sommes invités à légiférer en urgence, en effervescence, et ce n'est pas acceptable. (Applaudissements)

M. le président.  - Acte vous est donné de ces rappels au Règlement.

Discussion générale

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire .  - C'est un texte important en effet, et j'assurerai la continuité de l'État en représentant le ministère de la transition écologique et solidaire pour que les débats se passent dans les meilleures conditions possibles.

Il y a en effet urgence : tous les signaux sont au rouge. La planète se réchauffe et, avec elle, les conditions de notre pérennité sont en jeu.

Le grand débat et le scrutin européen ont confirmé la préoccupation des Français pour l'écologie, dont l'épisode caniculaire récent a rappelé l'importance. Aujourd'hui, 61 départements sont en alerte sècheresse. L'avenir de la planète est en jeu.

Le président de la République a voulu que l'ambition écologique soit au coeur de l'acte 2 du quinquennat, et le Premier ministre l'a confirmé dans son discours de politique générale en juin.

Depuis 2017, le Gouvernement a mis fin à l'exploration et à l'exploitation des hydrocarbures, développé les aides aux plus modestes pour se chauffer, se loger ou de se déplacer. Il a proposé une stratégie énergétique pour les dix ans qui viennent avec la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) et la stratégie nationale bas carbone. Certes, la PPE a été prise par décret mais en accord avec la volonté du législateur. Cette PPE repose sur des économies d'énergie, un développement massif des énergies renouvelables et la réduction de la part du nucléaire dans notre mix énergétique. Nous avons défendu au niveau européen et international le renforcement des normes environnementales et travaillé dans le cadre des Assises de l'eau à économiser les ressources.

Ce texte vise à mettre en oeuvre la PPE, à réduire notre dépendance aux énergies fossiles, à diminuer l'émission de gaz à effet de serre par 6 par rapport à 1990. Le Haut Conseil pour le climat créé à l'article 2 formulera des recommandations pour mieux intégrer l'écologie dans nos politiques publiques. Ce Haut Conseil a d'ores et déjà commencé ses travaux.

Troisième objectif : fermer nos quatre centrales à charbon, soit l'émission de 10 millions de tonnes de CO2, l'équivalent de 4 millions de véhicules thermiques. Depuis dix mois, nous mettons tout en place pour réussir cette mutation. Dans les quatre territoires concernés, les conventions devraient être signées d'ici la fin de l'année.

Dernier objectif : accélérer le développement des énergies renouvelables, notamment le photovoltaïque.

Sur les tarifs de l'électricité, le Gouvernement a pris des engagements forts devant les Français : geler les hausses en hiver et augmenter le chèque énergie mais il nous faut aussi favoriser la stabilité des prix, en relevant le plafond de l'Arenh à 150 TWh, (M. Pierre Ouzoulias ironise.) ce qui permettra au consommateur de profiter de la stabilité des prix issus du parc nucléaire.

Nous avons aussi fait procéder à une saisine rectificative du Conseil d'État pour que les éléments de la loi Pacte concernant les tarifs régulés du gaz et de l'électricité puissent être adoptés dans le cadre de ce projet de loi.

Nous comptons sur le travail parlementaire pour enrichir le texte. Près de 378 amendements ont été adoptés à l'Assemblée nationale et en commission au Sénat. Les parlementaires aspirent à être associés à la politique énergétique, ce qui est légitime. Le principe d'une loi quinquennale sur le climat répond à cette attente. Cette loi vous sera présentée à l'échéance de la PPE en 2023. Tous les cinq ans, le Parlement aura les moyens de se prononcer sur notre stratégie énergétique ; il jouera ainsi pleinement son rôle dans la transition écologique.

Les députés ont légiféré sur les passoires thermiques, aberration écologique et gouffre financier pour nos concitoyens.

Le texte prévoit trois phases - incitation, obligation, contrainte - pour mieux lutter contre ces passoires, la dernière phase sera définie en 2023 et la convention citoyenne pour le climat pourra proposer d'en accélérer la mise en oeuvre. Dans la première période, nous travaillerons avec Julien Denormandie à la simplification des aides et à l'amélioration de l'accompagnement des professionnels et des particuliers pour rendre le dispositif le plus fluide, opérationnel et efficace possible.

Les amendements du Gouvernement sont essentiellement techniques. Nous soutenons l'hydrogène décarboné et entendons garantir l'efficacité de l'autorité environnementale.

Le Gouvernement doit pouvoir garder la possibilité de relever le plafond de l'Arenh.

Les délais ont été très courts, mais nous nous sommes montrés constructifs et le travail a été riche. Des simplifications heureuses soulignent la connaissance fine que vous avez de ces sujets.

Il revient au législateur de fixer les orientations de long terme de la politique énergétique et climatique et au Gouvernement de mettre en oeuvre les moyens nécessaires pour les réaliser. Ce texte répond à la nécessité des actes. Enrichi par le débat parlementaire, il forme une étape décisive dans la transition écologique, la seule bataille dans laquelle nous devons mettre toutes nos forces. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

M. Daniel Gremillet, rapporteur de la commission des affaires économiques .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et sur quelques bancs du groupe UC) Je salue Mme Bories, co-rapporteure sur ce texte.

J'ai déjà employé la formule en commission : malgré l'inflation du nombre de ses articles, la petite loi Énergie l'est encore, sans conteste, par son manque de vision à long terme. Le Gouvernement dit s'inscrire dans le prolongement de la loi de transition énergétique de 2015, mais nombre de sujets sont absents du texte : enjeux de compétitivité de nos entreprises, gestion des ressources de biomasse et exploitation du carbone par nos sols et nos forêts. Je pense aussi à l'éolien, au biogaz, au solaire, à l'hydroélectricité et à la géothermie.

Le Conseil constitutionnel rejette ce qui s'apparente à des cavaliers. Nous avons été frustrés en tant que rapporteur et nos collègues l'ont sans doute été aussi.

M. Roland Courteau.  - Tout à fait !

M. Daniel Gremillet, rapporteur.  - Le secteur du logement a été ajouté à l'Assemblée nationale par voie d'amendement.

Ce projet de loi ne porte que la seule ambition d'atteindre la neutralité carbone en 2050. C'est un objectif louable, mais encore faut-il savoir comment on y parvient. Le texte ne comportait qu'une seule mesure concrète : la fermeture des quatre dernières centrales au charbon d'ici 2022, comme si l'essentiel était renvoyé à la convention citoyenne sur le climat.

En s'inscrivant dans la mécanique de la loi de 2015, ce texte s'inscrit aussi dans l'inversion de la hiérarchie des normes. Fort heureusement, c'est la dernière fois que nous vivons pareille situation : le Parlement fixera le cap de la prochaine PPE.

La fermeture de quatre centrales à charbon ne sera pas suffisante. Nous corrigeons aussi l'anomalie démocratique qui fait que le volume des certificats d'économies d'énergie (CEE) est fixé par décret, alors qu'il s'agit de plus de 3 milliards par an prélevés sur les consommateurs, soit 3 à 4 % de leurs dépenses d'énergie. En 2023, ce volume sera fixé par la loi sur recommandation de l'Ademe.

En matière de nucléaire, le texte reconnait que la date de 2025 était non seulement irréaliste mais surtout contreproductive, car il aurait fallu faire appel à des moyens thermiques supplémentaires pour assurer notre approvisionnement.

Alors que le GIEC voit dans le nucléaire une solution possible pour lutter contre le réchauffement climatique, il est nécessaire de fixer des objectifs ambitieux, mais aussi réalistes.

Notre commission a cherché à promouvoir une bonne politique énergétique pour donner une visibilité aux filières dans lesquelles la France a encore une carte industrielle à jouer. Nous fixons à 27 gigawatts de capacité hydroélectrique installée en 2028, nous proposons d'augmenter l'éolien en mer d'un gigawatt par an d'ici 2024, nous ciblons 8 % de biogaz en 2028 pour respecter l'objectif de10 % fixé pour 2030.

Sur le soutien au biogaz, j'entends les considérations budgétaires. Mais on consacre 7 à 8 milliards d'euros par an pour l'électricité renouvelable alors que certaines filières sont matures et l'on hésite à financer de quelques centaines de millions d'euros le démarrage d'une filière non intermittente, porteuse d'avenir et non délocalisable !

Nous devrons aussi revoir nos dispositifs de soutien pour mieux gérer notre empreinte carbone dans tous les secteurs. Ce sera bon pour le climat et bon pour nos entreprises : le bilan carbone doit être analysé de façon transparente et non discriminatoire.

La commission a ajouté plusieurs dispositifs pour simplifier les augmentations de puissance des installations hydroélectriques concédées, sans mise en concurrence, pour faciliter le déploiement de centrales photovoltaïques sur les sites dégradés en zones littorales.

Elle a reporté de dix-huit mois la réforme des garanties d'origine et a assuré un accès privilégié des collectivités territoriales à ces garanties.

En matière de rénovation énergétique des logements, la commission a tourné la page des mises sous séquestre et a réaffirmé la primauté à l'incitation et à l'accompagnement. La contrainte est contreproductive car elle sort un grand nombre de logements du marché.

La condition de la révision des loyers en zone tendue a été reportée à 2024.

La commission a souhaité accompagner les salariés concernés par la fermeture des centrales à charbon. Dans le cadre de la fin des tarifs réglementés, la commission a souhaité accompagner les entreprises et les consommateurs en introduisant dans la loi Pacte un prix de référence réglementé par la CRE. Cela n'exonère pas d'une réforme globale car le système de l'Arenh est à bout de souffle.

On ne peut pas passer par pertes et profits la juste rémunération du parc historique. La commission a mentionné explicitement la prise en compte du relèvement du plafond dans la fixation du prix, et a mentionné la prise en compte de l'inflation, puisque le prix n'a pas évolué depuis 2012. C'est une revendication raisonnable, parfaitement audible par Bruxelles.

Même si ce texte n'a pas l'ambition souhaitée, la commission l'a adopté après l'avoir amendé afin de donner de la visibilité et du soutien à nos filières, de l'accompagnement à nos salariés, et un rôle accru pour le Parlement.

Avant de terminer, je veux saluer les administrateurs de la commission : je suis fier de leur travail. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains, UC, Les Indépendants et sur quelques bancs du groupe SOCR)

Mme Pascale Bories, rapporteure pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) La commission de l'aménagement du territoire a reçu la délégation de neuf articles de la commission des affaires économiques, notamment les articles 2 sur le Haut Conseil pour le climat et 4 sur l'Autorité environnementale. C'est une chance que deux commissions aient travaillé sur ce texte, vu des délais si courts. L'urgence climatique nous oblige à l'action. Elle ne saurait nous conduire à voter dans une hâte excessive un texte dont l'objet premier serait l'obtention d'un satisfecit médiatique.

Je déplore le manque de dimension territoriale du texte. Pourtant la réduction des émissions de gaz à effet de serre relève surtout des actions locales.

Quelle est votre ambition ? Que dire de l'article 2 qui crée un Haut Conseil pour le climat, installé en novembre 2018 et qui a déjà remis un rapport il y a trois semaines ? Néanmoins, le Sénat et notre commission ont voulu se montrer constructifs. Aussi nous avons conservé des apports de l'Assemblée nationale et avons adopté des amendements à l'article 2.

S'agissant de la réforme de l'Autorité environnementale, vous prétendez clarifier la situation à la suite de la décision du Conseil d'État d'annuler la compétence du préfet de région pour être l'Autorité environnementale en charge d'évaluer la qualité des études d'impacts réalisées.

Mais loin de sécuriser les porteurs de projets, votre réforme risque au contraire de conduire à une multiplication des recours compte tenu de l'absence d'autonomie de l'autorité qui sera en charge d'examiner au cas par cas les projets par rapport à celle compétente pour les autoriser. Notre commission a souhaité limiter les situations potentielles de conflits d'intérêts.

Enfin, li est risqué, et même dangereux, de vouloir mener tous les combats : ainsi en est-il de la fermeture prévue de 14 réacteurs nucléaires d'ici 2035 concomitamment à la fermeture des centrales à charbon. C'est d'autant plus risqué qu'aucun accompagnement des milliers de salariés n'est prévu. Nous y avons donc remédié.

Ce projet de loi comme la PPE dont le décret se fait attendre admettent des postulats qui ne sont pas gravés dans le marbre. Parfois, ils relèvent de la pensée magique comme la perspective d'évolution des véhicules électriques à 580 et 610 térawattheures. Nous n'avons qu'un horizon : décarboner notre production électrique. Mais encore faut-il s'y préparer. Quid des EPR ? Quid de l'accès aux métaux précieux ? Ces questions sont sans réponse.

Je déplore que ce texte, voté si rapidement, nous prive d'un véritable débat de fond sur notre politique énergétique. Je forme le voeu que nous puissions débattre de cette question essentielle de manière moins expéditive. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC)

M. Ronan Dantec .  - Ce texte a d'abord pour fonction de permettre la publication de la prochaine PPE qui ne prévoyait pas jusqu'alors de réduction de la part du nucléaire - le texte y remédie  - et de décaler les objectifs pour les repousser de dix ans. Il traduit la difficulté que nous avons à nous défaire de notre dévotion au dieu Atome.

Je salue les apports de la majorité sénatoriale : M. Gremillet a intégré dans le texte de nouvelles ambitions notamment dans l'éolien offshore. La majorité gaullienne soutient désormais les énergies renouvelables. C'est à souligner.

La France veut jouer un rôle leader en Europe et dans le monde en matière d'environnement. Comment le faire si nos émissions continuent d'augmenter comme ce fut le cas entre 2015 et 2017 ? L'argument dilatoire selon lequel la France pèse si peu dans le monde en matière d'émissions ne vaut pas. Avec cet engagement, il en va de la crédibilité de l'accord de Paris. Il convient donc de réduire la mobilité thermique et rénover les logements anciens et énergivores.

Le débat à l'Assemblée nationale n'a pas brillé par le volontarisme en matière de rénovation des bâtiments. Le Sénat n'a pas vraiment fait mieux, ce qui est regrettable. Alors qu'il y avait des trous dans la raquette, la commission des affaires économiques a enlevé le reste du cordage.

Si la loi reste en l'état, la France ne pourra pas tenir ses engagements en matière de climat et notre crédibilité en souffrira. C'est même tout l'édifice mondial des négociations climatiques qui est menacé. La question financière est au coeur du problème. Il faudra y revenir lors de l'examen du prochain projet de loi de finances. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR et RDSE)

Mme Christine Herzog .  - La pollution de l'air est la troisième cause de mortalité en France. Les transporteurs routiers sont les premiers émetteurs de GES en France. Or les camions étrangers se déportent des autoroutes françaises vers les départementales et les nationales. Les départements frontaliers, comme la Moselle, en souffrent. Le projet d'écotaxe constituait une réponse pertinente reposant sur les principes de l'utilisateur-payeur et du pollueur-payeur.

La ministre des Transports a annoncé le 9 juillet la suppression de deux centimes par litre du gazole pour les transporteurs routiers. Toutefois, cette mesure est insuffisante. De plus, elle est injuste puisque les poids lourds étrangers y échapperont, car ils font le plein de carburant au Luxembourg ou en Espagne, ce qui leur permet de traverser la France sans y acheter une goutte de gazole. Il faudrait être plus ambitieux en développant des outils plus efficaces. Pourquoi ne pas étudier le retour à une écotaxe sur les poids lourds ?

M. André Reichardt.  - Vraie question !

M. Jean-Pierre Moga .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe UC) Madame la ministre, nous avons dû travailler dans la précipitation sur un texte qui méritait mieux et qui aurait pu être plus ambitieux. Je salue le travail des rapporteurs dans ces conditions.

S'agissant du nucléaire, le texte confirme une réduction à 50 % de sa part de la production d'électricité à l'horizon 2035, au lieu de 2025. C'est un objectif réaliste plus atteignable que celui qui avait été initialement prévu.

Je salue le dispositif encadrant la reconversion des salariés des centrales à charbon qui fermeront en 2022. Elles représentent seulement 1,8 % de la production d'électricité mais 35 % des émissions de gaz à effet de serre.

Rénover le parc des bâtiments en finançant la rénovation énergétique des logements est un autre moyen à développer pour atteindre la neutralité carbone en 2050. Les bâtiments représentent 45 % de la consommation d'énergie et 27 % des émissions de gaz à effet de serre. La solution est de financer un grand plan de rénovation énergétique des logements.

Une réglementation plus contraignante pour les bailleurs serait souhaitable pour la rénovation des passoires thermiques. Les logements qui ne respectent pas un standard minimal de performance énergétique devraient être considérés comme impropres à la location. Cependant, il faut y associer des outils de financement incitatifs, orientés vers les ménages aux revenus modestes.

La PPE reprend l'objectif de développement des énergies renouvelables. Pour l'éolien terrestre, il est prévu l'installation de 9 à 10 gigawatt par période de cinq ans. Si les objectifs d'installation d'éoliennes et de capacités solaires - 50 gigawatt à l'horizon 2028 - devraient compenser la diminution de la production relative au nucléaire, force est de constater que la gestion des énergies renouvelables devient très complexe lorsque leur taux de pénétration dépasse 30 % du mix énergétique.

Le maintien de l'effort sur l'éolien offshore est à saluer.

Le groupe UC ne perd pas de vue qu'il est urgent d'agir pour le climat dans l'intérêt de nos concitoyens et des générations futures. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC)

M. Jean-Pierre Decool .  - Face à l'urgence climatique, il n'y a pas une minute à perdre mais ne confondons pas vitesse et précipitation. Le temps dévolu à l'examen de cette loi est trop court. Cette « petite loi » est passée de 8 à 56 articles...

La PPE, instrument politique décisif, échappait au Parlement. Nous saluons les mesures prises à ce propos.

Pour parvenir à un bouquet énergétique de sources variées, il faut une diversité de solutions. Il faut encourager toutes les énergies renouvelables, notamment hydroélectriques.

Nous plaidons pour une plus grande autonomie des territoires et des élus en la matière et pour l'anticipation de la mise à niveau puis du démantèlement des installations, des friches et de la dépollution. Les enjeux sont technologiques, écologiques mais aussi sociaux. Je songe à la destruction d'emplois, à l'impact sur les salariés des sous-traitants...

L'écologie du quotidien sur laquelle le Gouvernement fait reposer l'acte II du quinquennat doit être concrète. La lutte contre les passoires thermiques doit être intensifiée, car l'énergie la plus écologique demeure celle qui n'est pas consommée.

Il y a plus de quinze ans, un certain président de la République disait : « notre maison brûle et nous regardons ailleurs ». Les jeunes générations nous invitent aujourd'hui à ouvrir les yeux ! (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Indépendants et UC, ainsi que sur celui de la commission)

M. Bernard Buis .  - Le principal objectif de ce projet de loi est d'accélérer la transition énergétique. Depuis 2017, le Gouvernement est à l'oeuvre : plan Climat dès juillet 2017 ; loi Hulot sur la fin de l'exploration et de l'exploitation d'hydrocarbures sur le sol français - nous en mesurons l'importance en Ardèche et dans la Drôme, pour nous être battus contre l'exploitation du gaz de schiste ; engagement de fermer les quatre dernières centrales à charbon d'ici 2022 ; aide à la rénovation énergétique avec le crédit d'impôt transition énergétique et le prêt à taux zéro  ; prime à la conversion, forfait mobilité durable ou renouvellement des flottes dans la loi Mobilités, dont vous avez fait échouer la CMP.

Enfin, le Gouvernement a engagé dès 2017 la révision de la stratégie nationale bas-carbone (SNBC), avec l'objectif de neutralité dès 2050 et s'est attelé à la révision de la PPE.

Je m'étonne dès lors que cette loi soit qualifiée de petite, sans vision.

Elle dit la vérité sur la trajectoire choisie, diversifie le mix énergétique et réaffirme la priorité de la lutte contre le changement climatique et la baisse des émissions de gaz à effet de serre.

Elle s'organise à cette fin autour de quatre axes : la baisse de notre dépendance aux énergies fossiles, avec un objectif de réduction de la consommation à 40 % d'ici 2030, la lutte contre les passoires thermiques qui concernent surtout les plus modestes (M. Roland Courteau le confirme.), la réforme du pilotage et de la gouvernance de cette politique et une meilleure maîtrise du prix de l'énergie, assurée par l'accès régulé à l'énergie nucléaire historique (Arenh) à 150 TWh au lieu de 100.

Les experts du GIEC ont alerté en 2018 sur les conséquences du réchauffement climatique : montée et acidifications des océans, pertes de biodiversité irréversibles, risques socioéconomiques majeurs. Le réchauffement ne peut être limité à 1,5°C que par des mesures radicales.

Dominique Théophile nous a alertés sur la prolifération des sargasses dans la Caraïbe, véritable désastre écologique, sanitaire et économique. En juin, dans la Drôme, une tempête de grêlons a tout anéanti en quelques minutes. Ce sont deux exemples parmi des centaines.

Ce projet de loi est un texte de responsabilité. Nous devons tous être mobilisés. Dorénavant, les futures lois de finances devront obligatoirement prendre en compte l'impact carbone, les parlementaires fixeront les objectifs tous les cinq ans.

Ce projet de loi, considérablement enrichi par les députés, ne renvoie pas qu'à des décrets ultérieurs, monsieur le rapporteur. J'espère que le Sénat prendra toute sa part dans la discussion. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

M. Fabien Gay .  - Nous partageons l'ambition de ce projet de loi, mais nous cherchons les moyens pour atteindre l'objectif. La Cour des comptes européenne estime qu'il faudrait 145 milliards d'euros par an sur dix ans pour faire face aux besoins, dont les deux tiers consacrés aux transports et au logement.

Où sont les filières industrielles pour développer les énergies renouvelables, éolien en mer, méthanisation ou encore hydrogène décarboné ?

Pourtant l'urgence climatique est là.

Sans changement radical dans notre mode de développement, nous allons droit dans le mur : îles englouties, ouragans et cyclones intenses, épisodes de canicule, hivers de plus en plus rudes, million d'espèces disparues, feux de forêt... La conséquence, ce sera 100 millions de pauvres en plus en 2030, 250 millions de réfugiés climatiques en 2050. Nous sommes en train de tuer notre planète et les espèces qu'elle porte, nous compris.

C'est une politique globale et radicale qu'il faut mener. La présentation du projet de loi est rattrapée cruellement par la réalité. Vous affichez l'objectif de neutralité carbone en 2050 mais l'Assemblée nationale est en train de ratifier le CETA et l'Union européenne a signé un accord avec le Mercosur. Et treize nouveaux traités de libre-échange sont prévus. À contre-courant de l'histoire, ils vont accroitre encore le transport de marchandises, alors qu'il est urgent et vital de relocaliser agriculture et industrie. Un jour, ces traités seront caducs et reconnus comme responsables de crimes d'écocide, au même titre que les pollutions plastiques et de fioul ou la déforestation à outrance.

Cette question aurait pu être un sujet de philosophie au bac : tout peut-il être marché ? Nous n'aurions sans doute pas rendu la même copie.

Madame la ministre, vous faites ce pari en espérant tirer profit d'une croissance verte qui nécessite de casser toutes les barrières, à commencer par les tarifs réglementés du gaz et de l'électricité. C'est le dogme de la main invisible du marché. Et tant pis si elle broie nos concitoyens en les plongeant dans la précarité énergétique. Ce même dogme vous conduit à vendre l'énergie nucléaire au concurrent d'EDF avec le déplafonnement de l'Arenh.

M. Roland Courteau.  - Absolument !

M. Fabien Gay.  - Là encore, vous répondez aux injonctions des opérateurs privés, avides de profits. Pas un mot dans ce projet de loi sur la future concession de 150 barrages électriques au privé. Après avoir vendu Engie, vous préparez le démantèlement d'EDF. Vous voulez casser une entreprise publique intégrée pour livrer toute la filière au privé. Or les Français en ont marre de voir leur patrimoine ainsi bradé, en témoigne leur soutien au projet de loi référendaire sur ADP.

Pour réussir le défi de l'avenir, il faut un grand service public de l'énergie. Je vous invite à méditer cette phrase du chef sioux Sitting Bull : « Quand ils auront coupé le dernier arbre, pollué le dernier ruisseau, pêché le dernier poisson, ils s'apercevront que l'argent ne se mange pas ». (Applaudissements sur les bancs des groupes CRCE et SOCR, ainsi que sur quelques bancs du groupe UC)

M. Roland Courteau .  - Parce que les sirènes de l'urgence climatique se faisaient de plus en plus stridentes et le rapport du GIEC de plus en plus alarmant, il fallait amplifier la loi de transition énergétique adoptée en 2015.

Ce projet de loi est-il à la hauteur des enjeux et répond-il à l'urgence ? Ne manque-t-il pas d'envergure ? Compte tenu du rapport du GIEC, les objectifs en matière de consommation d'énergies fossiles ou d'émissions de gaz à effet de serre seront-ils compatibles avec un scénario à 1,5° ou 2°C ? Surtout, comment les atteindrons-nous ? Quels moyens, quels financements sont-ils prévus ? On ne voit rien de précis.

Le fondamental, c'est la rénovation thermique des huit millions de logements passoires. L'enjeu est écologique, climatique et social. Il y a certes des dispositions dans ce projet de loi mais elles ne répondent ni aux enjeux ni à l'urgence. Les échéances sont repoussées à 2028 et 2033 et il y a de trop nombreuses exceptions.

Nous avions déposé un amendement permettant au Gouvernement de lever un emprunt à moyen et long terme afin de financer les investissements dans la rénovation thermique. Il s'est hélas heurté à l'article 40 ; la balle est donc dans votre camp.

Je rappelle les engagements du candidat Macron : création d'un fonds public, rénovation de la moitié des logements passoires en 2022. Mais la cohérence avec ses actes ne me saute pas aux yeux. La France donne volontiers des leçons, mais pas assez l'exemple !

Face à des enjeux majeurs, nous attendions mieux. Les sujets de mécontentement, comme le déplafonnement de l'Arenh et la fin des tarifs réglementés, ne manquent pas. Et je ne dis rien du projet Hercule d'EDF.

Je reconnais toutefois que les nouvelles échéances sont plus réalistes. Je défendais naguère la réduction de la part du nucléaire à 50 % en 2015, ce qui était, je le reconnais, un peu ambitieux.

Ce texte est celui des occasions manquées, sur la fermeture des centrales à charbon, ou l'éolien flottant en Méditerranée.

Il faut rétablir la primauté du législatif sur le réglementaire. La survie de l'humanité se joue à l'échelle planétaire. Au-delà de 2°C nous entrons dans l'irréversible, disait un ancien ministre.

Gardons-nous d'oublier que la transition énergétique et la justice sociale doivent être liées car sans adhésion des citoyens, il n'y aura pas de transition réussie. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR et sur quelques bancs du groupe UC)

M. Jean-François Husson .  - Réjouissons-nous que le nouveau monde nous soumette un texte qui a bien failli ne jamais parvenir au Palais du Luxembourg. Comment croire que le Gouvernement respecte le Parlement en imposant des délais aussi courts et en lui faisant adopter une PPE décidée depuis longtemps ? Comme pour le Haut Conseil pour le climat, institué par décret il y a deux mois, votre conception de la hiérarchie des normes étonne !

Cette petite loi, de huit articles initialement, se bornait à habiliter le Gouvernement à agir par ordonnance ou à transposer des directives. La révision des objectifs énergétiques était nécessaire, mais nous aurions gagné du temps si le Gouvernement avait écouté le Sénat dès 2015.

Les députés puis les rapporteurs du Sénat ont considérablement enrichi le texte. Sans eux, la loi n'aurait même pas évoqué la rénovation des bâtiments ou les énergies renouvelables et la PPE aurait été adoptée par décret.

Où est la vision de grand-angle du Gouvernement sur l'environnement ?

Où est la loi courageuse qui dépassera la vision punitive de l'écologie pour concilier croissance, attractivité et respect de l'environnement ?

Nos territoires, nos chefs d'entreprise, nos concitoyens ont besoin d'un cadre clair et stable pour être davantage impliqués. Cela passe par une large concertation, une mobilisation du secteur bancaire. La jeunesse s'engage, les projets portés en région grâce au financement solidaire et participatif nous obligent à regarder l'avenir différemment.

Nous aurions aimé voter une fiscalité verte positive. Vous réduisez la part du nucléaire alors que c'est lui qui limite nos émissions de gaz à effet de serre. Vous n'investissez guère dans les énergies propres, en oubliant que sans diversification du mix, nous continuerons à traîner une facture énergétique annuelle de 40 milliards d'euros !

Ce projet de loi est décevant au regard des enjeux et des ambitions. Il manque significativement de cohérence d'ensemble et fait entériner par la loi des choix faits par décret.

Madame la ministre, votre prédécesseur déclarait, lors de l'adoption de l'accord de Paris, que l'essentiel n'est pas ce qui brille mais ce qui dure. Tout est dit. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC)

M. Éric Gold .  - Les mesures relatives aux passoires thermiques ont fait l'objet de vifs débats. Le secteur du bâtiment représente 20 % des émissions de gaz à effet de serre en France. Prétendre atteindre la neutralité carbone en 2050 sans s'attaquer au logement, c'est aller droit dans le mur. Un logement sur huit est énergivore. Il y a urgence, climatique mais aussi sociale. La précarité énergétique coûte cher, il faut faire baisser la facture.

Manque de moyens, méconnaissance des droits, marchands de sommeil, les réalités sont diverses et se rencontrent en ville comme à la campagne. Il ne s'agit pas de stigmatiser mais de proposer un panel de solutions.

La transformation du crédit d'impôt transition énergétique en une prime unique est une bonne idée. Il faut y adjoindre un meilleur accompagnement des particuliers, car le manque d'information sur les aides est source de renoncements.

Nous proposerons de définir un seuil maximal des logements considérés comme décents, un objectif intermédiaire de rénovation d'un million de logements mal isolés d'ici 2022, l'interdiction de la location des logements classés G dès 2022 et des logements classés F dès 2028... Seules des mesures fortes permettront d'atteindre les objectifs fixés par le candidat Macron.

Le groupe RDSE votera en fonction de l'évolution des débats. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE)

M. Jean-François Husson.  - Ah !

Mme Anne-Catherine Loisier .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe UC) Je félicite les rapporteurs compte tenu des conditions d'examen de ce texte. Celui-ci se concentre sur l'offre énergétique plutôt que sur la maîtrise de la demande dans les secteurs les plus émetteurs, oubliant l'évaluation et l'exemplarité de l'État.

Comment parvenir à zéro émission en 2050 en nous privant du levier que constituent les puits de carbone ? Selon des chercheurs suisses, 900 millions d'hectares de canopée en plus absorberaient 205 des 300 gigatonnes de gaz à effet de serre émis depuis la fin du XIXe siècle. Je proposerai ainsi de soutenir le reboisement, les matériaux de substitution, ainsi que les petites unités d'hydroélectricité.

M. Laurent Duplomb.  - Bravo !

Mme Anne-Catherine Loisier.  - La planète étouffe. Il n'y a pas de solution miracle ; recourons à tous les moyens à notre disposition en diversifiant notre mix énergétique.

Du fait de la place du nucléaire dans son mix électrique, la France doit viser une meilleure efficacité énergétique et faire évoluer les usages, plutôt que se lancer dans une coûteuse conversion des moyens de production existants.

Il faut contrôler et évaluer la rentabilité des projets ENR qui bénéficient d'un soutien public massif, avoisinant les 200 milliards d'euros à l'horizon 2045. La contribution au service public de l'électricité (CSPE) explose ; 70 % des recettes vont aux ENR plutôt qu'aux mobilités propres ou à la rénovation thermique. Or les coûts de maintenance des ENR ont baissé de 35 %...

La Cour des comptes et la commission de régulation à l'énergie (CRE) appellent à un meilleur contrôle des appels d'offres. Madame la ministre, envisagez-vous une réflexion sur la chaîne de valeur des ENR et un bilan environnemental complet, qui tienne aussi compte des emplois créés ?

Peut-on se satisfaire des stratégies qui ne prévoient aucune réduction des émissions de gaz à effet de serre avant 2028 ? Il est temps de reconsidérer certains choix de soutien public.

Le groupe UC sera soucieux d'apporter des solutions au cours des débats. (Applaudissements sur les bancs des groupes UC et Les Indépendants, ainsi que sur certains bancs du groupe RDSE)

M. Franck Menonville .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Indépendants) Notre nouveau regard sur l'énergie devra être un levier majeur de la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Il appartient au Parlement de fixer des objectifs.

La France bénéficie, ne l'oublions pas, d'un atout fiable et peu coûteux : le nucléaire. La fermeture d'un quart des réacteurs devra être assortie d'alternatives crédibles - nous y serons attentifs.

La production locale de méthane en est une qui permet la gestion des effluents agricoles et soutient notre agriculture. L'agriculture peut faire beaucoup en matière d'énergie.

Le couple biocarburant et agriculture est porteur de promesses, notamment dans le biokérosène. La lutte contre le changement climatique passera par les territoires mais aussi le monde de l'entreprise. La lutte contre les fraudes aux certificats d'économie d'énergie est essentielle. Nous serons également attentifs à la solution d'avenir que constitue l'hydrogène décarboné.

Ces combats sont à mener à l'échelle européenne. Le groupe Les Indépendants soutient l'adoption de ce texte enrichi par nos travaux. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Indépendants et UC, ainsi que sur quelques bancs du groupe LaREM)

Mme Élisabeth Lamure .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et sur quelques bancs du groupe UC) Je félicite à mon tour les rapporteurs qui ont travaillé dans des conditions difficiles.

Daniel Gremillet a évoqué en commission la pauvreté du projet de loi initial, qui visait essentiellement à entériner les choix de la PPE.

Je note pour ma part deux grands absents : l'industrie et le transport. L'industrie nucléaire n'est abordée que négativement. La diminution à 50 % de la part du nucléaire dans le mix énergétique est tout au plus reportée de dix ans. Que n'avons-nous été entendus lorsque nous disions irréaliste l'objectif de 2025 ! Je ne suis ni pour ni contre le nucléaire, mais il sera indispensable pour atteindre l'objectif de neutralité carbone en 2050.

Sur l'industrie dite de four, le rapport de Valérie Létard sur la filière sidérurgique a rappelé l'importance du coût de l'énergie pour les entreprises électro-intensives. Or certaines verront leur contrat de fourniture historique arriver à terme en 2020, et doivent négocier d'urgence un nouveau tarif. Jean-Pierre Vial a déposé un amendement sur le sujet, hélas déclaré irrecevable.

Deuxième absent du texte : le transport, notamment de marchandises. Le Gouvernement renvoie à la loi d'orientation des mobilités... qui n'aborde pas davantage le sujet !

Notre territoire a un bon réseau ferré, un bon réseau fluvial, les deux sont sous-utilisés. Entre Lyon et Marseille, seul un tiers des capacités du réseau fluvial est exploité, alors qu'une barge poussée transporte autant que 300 camions, pour un coût trois fois moindre ! À Fos-Marseille, une quinzaine de trains quittent le port chaque jour, contre 150 à Hambourg.

Nicolas Hulot s'en était ému, de même que Mme Borne. Pourtant, rien ne bouge ! Allez-vous aussi vous en émouvoir et agir, madame la ministre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe UC)

Mme Angèle Préville .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR) Le texte n'est ni à la hauteur des enjeux ni doté d'une vision globale. Où sont les actions concrètes, les moyens dédiés ? Bref, c'est une loi d'affichage.

Les transports représentent 39 % des émissions de gaz à effet de serre mais sont absents du texte ; la date butoir de 2022 pour la rénovation des passoires thermiques est celle des échéances électorales et le débat sur le nucléaire n'est nullement tranché.

La diminution de la part du nucléaire entraine le passage d'une production électrique concentrée à une production plus diffuse, répartie sur le territoire, ce qui pose la question de l'acceptabilité - on le voit pour les éoliennes.

Avec la disparition à terme des grosses machines que sont les alternateurs des centrales thermiques, essentiels au maintien du réseau et des fréquences, seule l'hydroélectricité a la capacité requise, ce qui plaide pour le développement de la petite hydro électricité.

M. Jean-Pierre Decool.  - Très bien.

Mme Angèle Préville.  - L'impact social de la fermeture des réacteurs est négligé. Les décisions doivent être assumées, madame la ministre ! Les plans de réemploi doivent être finalisés. Comment maintenir le réseau dans l'ouest avec le retard du chantier de Flamanville ?

La situation d'EDF est durablement fragilisée. Avec l'essor des énergies renouvelables, une chute de prix sur le marché européen n'est pas à exclure. Les coûts de production d'un parc nucléaire vieillissant et les obligations de l'Arenh s'ajoutent à l'équation.

Le groupe socialiste attend des avancées sur la rénovation thermique et la mobilité verte et défend des propositions concrètes pour assurer la continuité du service public et répondre à la précarité énergétique.

La lutte contre le réchauffement est liée aux écosystèmes ; hélas, nos amendements sur la biodiversité ont été déclarés irrecevables. La nature est pourtant une alliée à ne pas négliger ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)

M. Stéphane Piednoir .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Ce texte fixe des objectifs déclaratifs ambitieux sans prévoir les moyens pour les atteindre. Il est décevant car il manque d'envergure. L'article premier regorge pourtant de dates, de chiffres, de calculs impressionnants... Tout cela est-il sérieux ? Je me demande s'il ne s'agit pas de justifier le choix anti-nucléaire idéologique de la précédente majorité, dont une partie est toujours aux responsabilités. (On renchérit sur les bancs du groupe Les Républicains.)

Pourquoi renoncer à la production nucléaire, la plus vertueuse pour réduire les émissions de gaz à effet de serre ? Sans plan d'action concret de diversification de notre mix énergétique, l'objectif ne restera qu'une annonce idéologique.

Pour paraphraser le cheikh Yamani, l'âge de pierre ne s'est pas terminé par manque de pierres ! (On apprécie sur les bancs du groupe Les Républicains.)

Sur la rénovation énergétique des logements, les annonces sont volontaristes mais ne sont guère traduites sur le terrain. Les missions du service public de la performance énergétique de l'habitat sont très floues. Pourtant, il serait bien utile de clarifier les choses et de faciliter l'accès à un conseil neutre et indépendant pour les particuliers. Il faudrait une stratégie globale, avec les régions comme chefs d'orchestre et les intercommunalités comme relais. Plutôt que de sanctionner et taxer, encourageons et valorisons les propriétaires bailleurs qui réalisent des travaux dont le coût s'élève à 30 000 euros en moyenne.

La future loi quinquennale permettra, je l'espère, un débat parlementaire approfondi pour déterminer les objectifs et fixer les priorités d'action pour le consommateur lambda qui est prêt à modifier son comportement mais aspire à une déclinaison pragmatique expurgée de toute idéologie. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État .  - Je remercie les rapporteurs des deux commissions et tous les orateurs. Les délais ont été brefs, c'est certain. Les débats doivent permettre de trouver les solutions dont nous avons besoin.

Grande ou petite loi ? La transition écologique est une action de système.... La loi ne peut pas tout, elle doit d'abord porter une vision. (M. Laurent Duplomb ainsi que M. Fabien Gay ironisent.) Elle fixe le cap et il reste à organiser les actions.

Mais, vous l'avez dit, sans moyens, rien de possible. D'où l'importance du projet de loi de finances et de notre capacité à investir (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains, ainsi que sur quelques bancs des groupes CRCE et SOCR)

L'État ne peut pas tout...

M. Roland Courteau.  - Il peut tout de même !

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État.  - ...et les collectivités territoriales ont un grand rôle à jouer dans le développement de la transition écologique. (On ironise derechef sur les bancs du groupe Les Républicains.)

Les filières industrielles sont un enjeu majeur. Nous les traitons, avec Bruno Le Maire, dans le pacte productif, dans le groupe de travail sur l'énergie, afin de développer des solutions autonomes, de garder une énergie compétitive pour nos entreprises et nos industriels, en particulier les électro-intensifs. Elles font également l'objet de tous les comités stratégiques de filières.

Les financements sont aussi privés, d'où le plan France Transition destiné à mobiliser banques et grands financeurs, comme cela a été annoncé au Conseil de défense écologique.

Enfin, il faut mobiliser les citoyens. Nous devons aider les plus faibles. Le modèle social est en cause. Le Gouvernement a augmenté le chèque énergie. Cette loi nous permettra d'aller plus vite et plus fort.

Je confirme que les objectifs que nous nous sommes fixés sont compatibles avec l'Accord de Paris. La PPE est un décret depuis la loi de 2015. C'est le législateur qui l'a décidé. Tous les cinq ans, la loi de programmation fixe les grandes lignes, ce qui rétablit l'équilibre.

Le Haut Conseil sur le climat a toute son importance. Les hypothèses sous-jacentes à la PPE sont ambitieuses. La bonne énergie est d'abord celle qu'on ne consomme pas.

La rénovation thermique est une priorité. La loi de 2015 a créé un chef de filat des régions qui ne s'est pas pleinement exercé. Nous contractualiserons avec les collectivités territoriales dans un chantier que nous mènerons avec Julien Denormandie. Nous fusionnerons le crédit d'impôt écologique et les aides de l'Anah. Nous travaillerons sur le droit des copropriétés dans une ordonnance d'application de la loi Elan. Nous renforcerons la lutte contre la fraude aux certificats d'économie d?énergie.

Nous recentrerons les aides sur les ménages les plus modestes. Quant au biogaz et à l'éolien offshore, vous souhaitez une trajectoire ambitieuse. La PPE est en cours et le développement de la filière pourra se déployer sans réduire les prix.

La modification du plafond de l'Arenh est nécessaire. Le bon équilibre passera par une discussion sur les tarifs, mais nous ne lions pas les deux sujets.

M. Roland Courteau.  - Ah si !

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État.  - Nous fermerons d'ici 2022 les centrales à charbon sur trois sites sur quatre. Pour le site de Cordemais, nous appellerons ponctuellement une capacité de production en partenariat avec EDF. Nous apporterons une attention toute particulière aux salariés concernés par ces fermetures et aux sous-traitants.

Nous fermerons les deux tranches de Fessenheim en 2020. Un travail sur la réindustrialisation est prévu pour offrir des perspectives aux salariés et aux sous-traitants. Nous avons annoncé que nous ne fermerons pas totalement des sites, mais des tranches.

Nous souhaitions revenir au système antérieur à 2017 sur l'autorité environnementale, qui doit pouvoir rendre des avis.

Les transports ont été traités dans la LOM. Pour ce qui est de la contribution des transports routiers, des réflexions sont en cours. Nous devons veiller à la compatibilité avec le droit communautaire. L'annulation récente d'un dispositif allemand par la Cour européenne de justice nécessite une analyse approfondie.

Les certificats d'économie d'énergie concourent à atteindre nos objectifs en matière de transition écologique. Fixer les volumes par voie législative est trop rigide.

L'hydroélectricité est la première source d'énergie renouvelable en France. Sur les concessions hydroélectriques, nous travaillerons à un système en réseau. Nous voulons développer la petite hydroélectricité sans revenir sur la continuité des rivières. Travaillons à partir des ouvrages existants.

L'exemplarité de l'État est un sujet majeur, sur lequel nous devons travailler.

La discussion générale est close.

Discussion des articles

ARTICLE ADDITIONNEL avant l'article premier

M. le président.  - Amendement n°254, présenté par M. Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Avant l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 100-4 du code de l'énergie, il est inséré un article L. 100-... ainsi rédigé :

« Art. L. 100-....  -  Afin de respecter les objectifs mentionnés aux articles L. 100-1 et L. 100-4, la France mène une expertise indépendante sur les conséquences environnementales et climatiques de la ratification de tout nouvel accord de libre-échange.

« Un tel accord ne peut être ratifié s'il est contraire aux engagements internationaux de la France en matière d'émissions de gaz à effet de serre, des autres objectifs environnementaux fixés au niveau national et des objectifs de développement durable. »

M. Fabien Gay.  - Nous demandons une expertise indépendante avant la signature de tout traité de libre-échange. Pas moins de treize sont sur la table, qui sont négociés dans la plus grande opacité. Tafta, Ceta, Tefta, Mercosur... Les négociations sur le Mercosur ont débuté il y a vingt ans. L'accord vient d'être signé et nous n'avons toujours pas le texte.

Quant au CETA, il pose problème : par exemple sur la traçabilité du saumon, impossible à établir. Nous allons donc voir arriver du saumon OGM, spécialité de l'entreprise Aqua Bounty ! Idem sur les boeufs canadiens. Une filière sans OGM et sans farines animales est en cours de constitution, mais cela prendra des années... En attendant, elle n'existe pas !

Une expertise indépendante établirait si ces traités contreviennent à notre protection environnementale.

M. Daniel Gremillet, rapporteur.  - Cet amendement est d'actualité. Cependant, il est problématique car trop contraignant tant pour le président de la République que pour le Parlement qui disposent tous deux du pouvoir de ratifier les traités. Il n'est pas besoin d'empêcher la ratification d'un accord dès lors que ses engagements sont pleinement applicables. Avis défavorable.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État.  - Avis défavorable. Le Gouvernement est attentif à ce que les accords de libre-échange soient compatibles avec nos objectifs environnementaux. Le principe d'une évaluation indépendante est déjà mis en oeuvre. Certains accords relèvent enfin d'une compétence exclusive de la Commission européenne.

M. Fabien Gay.  - Mettons-nous d'accord ! Les traités de libre-échange de seconde génération modifient sensiblement nos lois et des tribunaux arbitraux sont prévus pour trancher les litiges. Ceux-ci ont déjà été saisis plus de 800 fois dans les derniers mois. Les traités de libre-échange de seconde génération doivent être ratifiés par les Parlements nationaux ou par référendum. C'est le minimum pour rendre de la visibilité aux Français car ni les mandats de négociations particulièrement opaques ni les études que vous mentionnez ne sont publics. Si vous avez des informations, pourquoi ne les diffusez-vous pas ? Nous demandons la publicité des études indépendantes. C'est le minimum vital et nous demandons un scrutin public sur cet amendement.

M. Roland Courteau.  - Nous considérons cet amendement comme pertinent et légitime. Nous le soutiendrons. (Marques d'approbation sur les bancs des groupes SOCR et CRCE)

À la demande du groupe CRCE, l'amendement n°254 est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°166 :

Nombre de votants 341
Nombre de suffrages exprimés 339
Pour l'adoption   98
Contre 241

Le Sénat n'a pas adopté.

La séance est suspendue à 19 h 55.

présidence de Mme Hélène Conway-Mouret, vice-présidente

La séance reprend à 21 h 30.

Discussion des articles (Suite)

ARTICLE PREMIER

M. Stéphane Piednoir .  - Je m'étonne du grand écart entre les annonces faites à long terme et leur concrétisation : existe-t-il une vraie stratégie pour notre pays ? La France est une très bonne élève pour les émissions de gaz à effet de serre, mais elle le doit à sa production d'électricité nucléaire. Le plan Hydrogène lancé par Nicolas Hulot ne donne pas grand-chose, tant les crédits qui devaient y être affectés ont été utilisés à d'autres fins... Vivement que nous ayons un vrai débat sur ces différents sujets.

M. Pierre Cuypers .  - Enfin, le Gouvernement agit pour atteindre la neutralité carbone en 2050. Mais les biocarburants sont les grands absents de ce texte. Que de rendez-vous manqués ! Leur fiscalité n'évolue pas. Les Français ne s'y trompent pas : en utilisant du bioéthanol, ils savent qu'ils réalisent de sérieuses économies.

Les biocarburants seraient une solution incontournable pour le transport aérien. La France a un rôle primordial à jouer pour contribuer au verdissement du transport aérien. Des unités de production dans les zones rurales, créant des centaines d'emplois, revitaliseraient nos territoires. C'est votre Gouvernement qui gagnerait en crédibilité en soutenant cette filière ce qui permettrait de préserver 30 000 emplois. Quand vous arrêterez-vous de créer des taxes ? Je pense à celle que vous venez de mettre en place et qui frappe les billets d'avion.

M. Roland Courteau .  - Le Premier ministre l'a indiqué, le chemin pour atteindre 50 % de production d'électricité nucléaire en 2035 passe par l'éolien en mer, et notamment l'éolien flottant en Méditerranée.

La France a pris de l'avance dans cette technologie. Mais pour en profiter, la filière doit bénéficier de volumes significatifs et avoir un calendrier resserré. Sinon, cette industrie ira en Europe du Nord. L'appel d'offres de Dunkerque est bienvenu. Nous sommes des pionniers en matière d'éolien flottant : restons-le !

M. de Rugy a indiqué s'être battu pour des programmes en Bretagne Sud, mais aussi en Occitanie et en PACA. Confirmez-vous cette très bonne nouvelle pour la région méditerranéenne ?

M. Fabien Gay .  - Je rebondirai sur les propos de la ministre plutôt que de lire mon intervention, car nous devrions organiser des débats de manière plus interactive.

Vous voulez atteindre la neutralité carbone en 2050, nous aussi ! Mais comment le faire en signant des accords de libre-échange qui vont augmenter la production de GES ? C'est une première interrogation.

Vous dites : la loi ne peut pas tout. Vous ajoutez : il faut soutenir nos filières industrielles, aussi laissons faire Bruno Le Maire. Or nous avons du retard dans les énergies renouvelables et on licencie avec l'argent public !

Vous dites encore : laissons faire les collectivités territoriales sur la rénovation thermique des logements... Mais avec quels moyens ? À l'allure actuelle, il faudrait 140 ans pour venir à bout des passoires thermiques ! Il faut un plan Marshall, et pour cela, il faut l'État.

La loi LOM n'a rien arrangé sur le développement des transports propres : vous avez démantelé le service public de la SNCF...

Je vous félicite d'avoir fait circuler le train Perpignan-Rungis hier soir à vide : les marchandises étaient sur les quais, mais elles sont montées dans les camions.

Il faudra, enfin, mobiliser de l'argent privé, notamment celui des banques.

M. Jean-François Husson .  - Vos objectifs énergétiques pour 2050 s'entendent si on fixe des étapes intermédiaires, car ils engagent plus vos successeurs que vous-même.

Le dépassement des budgets carbone a été de 4 % entre 2015 et 2018 et de 6 % pour 2019 à 2023. La France a même été condamnée par la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) pour des infractions répétées en matière de pollution atmosphérique.

L'objectif de 23 % d'énergies renouvelables dans notre mix en 2020 ne sera pas atteint, puisque nous sommes aujourd'hui péniblement à 17 %.

Si nous voulons redonner de la confiance dans l'action publique en faveur de l'environnement, il faut des objectifs réalistes et s'inspirer de l'exemple de l'Europe du nord, où elle passe par un consensus national qui s'inscrit dans le temps. Il faut accorder des moyens humains et financiers, et qui ne viennent pas uniquement de l'État.

Mme Françoise Férat .  - L'article premier porte sur les objectifs de la politique énergétique. Comme l'indique le programme international « Global carbon project », les émissions continuent à grimper dans le monde, à l'inverse des promesses faites lors de l'accord de Paris : 2,7 % en 2018, plus qu'en 2017 avec 1,6 %. Les responsables : la Chine, l'Inde et les États-Unis.

Les émissions européennes baissent légèrement de 0,7 % en 2018. La France produisait 367 millions de tonnes de CO2 en 2010, 335 en 2011, 304 en 2014, mais nos émissions sont reparties à la hausse atteignant 309 millions de tonnes en 2015, puis 316 en 2016.

Force est de constater que le nucléaire est un formidable allié de la lutte contre le réchauffement climatique et peut assurer la transition énergétique. La Suède a réduit ses émissions de moitié entre 1970 et 1990, grâce à une énergie moitié renouvelable, moitié nucléaire.

M. Alain Duran .  - Le train des primeurs Perpignan-Rungis fonctionne à vide depuis vendredi dernier. L'exploitation de cette ligne qui devait cesser mi-juillet se poursuit dans des conditions ubuesques.

Alors que cet article prévoit d'atteindre la neutralité carbone en 2050, quelles mesures proposez-vous pour éviter ce non-sens économique et écologique que représenterait le report du trafic fret ferroviaire sur 80 camions supplémentaires chaque jour ?

Si la loi ne peut pas tout, l'État porte une lourde responsabilité. Que proposez-vous ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)

M. Maurice Antiste .  - À l'occasion de l'ouverture de la 24e Conférence mondiale sur le climat en Pologne, le Président Macron avait promis des mesures « historiques et structurantes » en matière de transition énergétique et de lutte contre les changements climatiques. À ce jour, ni la LOM ni la PPE ne corroborent ces annonces.

Pourtant, il y a véritablement urgence à agir en matière écologique et climatique. L'article premier a au moins le mérite d'exister... J'ai en tête un dicton de chez moi : « Ce n'est pas lorsque tu as faim que tu dois commencer à faire cuire ton repas ».

Les émissions de GES générées par les activités humaines ont provoqué une augmentation de la température d'environ 0,74°C en un siècle.

Les conséquences du dérèglement climatique sont multiples et alarmantes : fonte des glaciers, montée du niveau de la mer, désertification, dégradation des systèmes agricoles, augmentation de l'activité cyclonique. Elles constituent une source de grande souffrance et de destruction dans nos territoires. L'outre-mer en est d'ailleurs la première victime.

C'est pourquoi nous attendons beaucoup de votre politique écologique et énergétique, et c'est pour cela que nous avons déposé des amendements pour améliorer le texte qui nous est proposé.

J'espère que vous privilégierez l'intérêt général à toute considération politique, afin de nous démontrer que l'urgence climatique constitue bien une priorité pour le Gouvernement.

M. Gérard Poadja .  - Le Gouvernement affiche une grande ambition : diviser par six les émissions de GES, atteindre la neutralité carbone en 2050, réduire les énergies fossiles de 40 % en 2030.

L'État a une grande ambition, mais quelles solutions apporte-t-il aux collectivités pour y parvenir ?

En 2009, le Grenelle fixait déjà l'objectif d'autonomie énergétique des outre-mer, et 50 % d'énergies renouvelables en 2020. Mais aujourd'hui, les énergies renouvelables ne représentent que 36 % du mix énergétique à La Réunion, 20 % en Guadeloupe, 13 % en Nouvelle Calédonie, 7 % en Martinique, 5 % à Mayotte...

Les outre-mer sont bien loin du compte car le Gouvernement n'a pas donné suffisamment de moyens pour réaliser ces objectifs ambitieux.

En 2010, il a supprimé les incitations fiscales sur les investissements dans le photovoltaïque. La filière, qui commençait à émerger, s'est effondrée.

De même, entre 2012 et 2014, l'État a construit des centrales thermiques au diesel dans plusieurs territoires ultramarins, qui les approvisionneront en énergie fossile jusqu'en 2050.

Alors à quoi bon fixer des objectifs de réduction des énergies fossiles si l'État ne nous donne pas les moyens de les atteindre ?

Mme Nicole Bonnefoy .  - Avec des collègues, nous avions déposé un amendement qui donnait à l'autorité de police la possibilité d'interdire la circulation sur les routes nationales des poids lourds de plus de 3,5 tonnes en transit.

Je regrette qu'il ait été jugé irrecevable car il aurait permis de réduire les émissions de GES et aurait soulagé les communes polluées par ces camions.

Mme Patricia Morhet-Richaud .  - L'hydroélectricité est un secteur stratégique. Représentant 12 à 14 % de la production électrique nationale, elle représente 61 % de nos énergies renouvelables. La Commission européenne a mis en demeure la France de respecter l'article 106 du TFUE et donc de mettre en concurrence les concessions arrivant à échéance. L'État a pourtant la capacité de mettre en place des partenariats publics privés pour exécuter ces contrats. Je salue les initiatives de certains départements, comme celui des Hautes-Alpes, qui ont créé des SEM hydroélectriques. J'espère que l'État le verra d'un bon oeil.

M. Franck Montaugé .  - Quelques principes d'intérêt général devraient guider nos débats : l'énergie de première nécessité pour les particuliers devrait relever de la notion de bien commun. La péréquation tarifaire devra être préservée, comme les tarifs réglementés qui protègent les plus modestes. L'ouverture du marché de l'électricité dans l'Union européenne s'est fondée sur le principe de libre concurrence, car elle devait bénéficier au consommateur. Je n'ai jamais eu la preuve que la concurrence avait fait baisser les prix.

La France ne doit pas sacrifier son entreprise nationale, EDF, qui est au coeur de notre industrie depuis 1946. La transition énergétique ne se fera pas sans EDF.

Le plan Hercule ne doit pas enclencher un démantèlement définitif. L'État doit jouer un rôle majeur, dans le cadre d'une stratégie industrielle assumée, loin des errements que nous avons connu avec Alstom.

M. Patrice Joly .  - Malgré l'intérêt de ce projet de loi, nous ne pouvons pas traiter de tous les aspects liés à l'énergie et au climat. Par exemple, il est inacceptable que nous ne puissions pas traiter de la privatisation des barrages, qui signifie la mort de toute politique écologiste dans ce secteur. En outre, ces barrages ont été construits avec les impôts des Français. D'autres privatisations, comme celles des autoroutes, n'ont pas donné des résultats probants.

Par ailleurs, la petite hydroélectricité doit pouvoir être mobilisée pour atteindre les objectifs de production d'énergies renouvelables. Il faut trouver un point d'équilibre entre les enjeux de continuité écologique et les enjeux énergétiques.

La biométhanisation, elle aussi, est positive car elle soutient notre agriculture et l'emploi local. Mais il ne faut pas qu'elle soit liée à un mode d'élevage que nos concitoyens désapprouvent : votre ministère devrait se saisir de notre proposition d'un label « méthanisation verte ».

M. Olivier Jacquin .  - Je veux moi aussi déplorer que les transports soient si peu abordés dans ce texte alors qu'ils représentent plus de 30 % des émissions de gaz à effet de serre.

Le Haut Conseil du climat, en juin 2019, invite à agir en cohérence avec nos ambitions. Or la LOM ne propose pas de solutions pour encourager, par exemple, le fret ferroviaire, je ne reviens pas à mon tour sur le sinistre épisode du train Perpignan-Rungis.

Mes amendements sur la redevance kilométrique des poids lourds et la contribution carbone des donneurs d'ordre ont hélas été déclarés irrecevables.

Autres contradictions : une taxe sur l'aérien mais rien sur le maritime alors que la production d'oxyde de soufre y est considérable.

Jeff, jeune de 17 ans rencontré lors d'une marche pour le climat à Nancy, m'a demandé de vous inviter à devenir adulte avant que lui le soit !

M. Jean-François Longeot .  - Mon amendement sur la contribution des poids lourds sur les routes nationales et départementales a lui aussi été déclaré irrecevable. Or, les véhicules étrangers circulent de plus en plus sur ces routes, sans rien consommer et en nous laissant les charges de leur passage, et je n'ose parler des accidents. La réglementation permettant d'y remédier existe me dit-on mais les préfets ne l'appliquent pas ! Comment renvoyer ces camions sur les autoroutes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UC ; Mme Nicole Bonnefoy et M. Martial Bourquin applaudissent également.)

Mme Angèle Préville .  - Nous comprenons enfin le monde naturel, végétal et animal, le vivant en général. Les végétaux apprennent à coloniser les sols, à s'adapter à leur environnement et composent 99 % de la biomasse sur terre. Quentin Hiernaux, dans Penser le végétal, invite à repenser les végétaux sous l'angle de ce que nous leur faisons. Il faut lutter contre le réchauffement climatique et l'appauvrissement de la biodiversité, c'est deux sujets sont indissociables. (M. Joël Labbé applaudit.)

Mme Marie-Noëlle Lienemann .  - Voeux pieux que ce projet de loi mais il manque de cohérence d'ensemble. Pour la neutralité carbone en 2050, qui coûtera cher, il faut faire des arbitrages cohérents et immédiats. Le Gouvernement renvoie les transports, l'industrie ou les logements à d'autres véhicules législatifs, alors que c'est le coeur du sujet ! Une industrie puissante doit être hyper performante en matière énergétique.

Ce qui manque aussi à ce texte est une stratégie de service public. L'État, c'est-à-dire la puissance publique dans sa diversité, doit donner le la. Les collectivités territoriales doivent accompagner la poursuite de l'intérêt général. Hélas, les tarifs réglementés sont démantelés, les capitaux des entreprises énergétiques ouverts au privé, les barrages hydroélectriques vendus.

Troisième lacune : le lien entre émissions de gaz à effet de serre et multiplication des échanges mondiaux. Traités de libre-échange inutiles et pollueurs... Or, vous allez nous demander de ratifier des traités de libre-échange qui ne s'imposent pas. Tous ces facteurs de pollution sont ainsi passés sous silence !

Mme la présidente.  - Amendement n°227, présenté par le Gouvernement.

I.  -  Alinéas 2 à 4

Supprimer ces alinéas.

II.  -  Alinéa 8

Rédiger ainsi cet alinéa :

« 10° Valoriser la biomasse à des fins de production de matériaux et d'énergie, en conciliant cette valorisation avec les autres usages de l'agriculture et la sylviculture, en gardant la priorité de production alimentaire et en préservant les bénéfices environnementaux et la capacité à produire, notamment la qualité des sols. »

III.  -  Alinéa 17

Supprimer cet alinéa.

IV.  -  Alinéa 20

Supprimer cet alinéa.

V.  -  Alinéa 22

Après le mot :

hydraulique

supprimer la fin de cet alinéa.

VI.  -  Alinéa 23

Supprimer cet alinéa.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État.  - Cet article fixe les ambitions du Gouvernement en matière de transition énergétique. Le Haut Conseil du climat dit que nous n'allons pas assez vite, mais nos résultats commencent à apparaître : en 2018, nos émissions de GES ont baissé de 4,2 %.

Cet article contient de nombreuses dispositions qui ne sont pas du domaine de la loi. Cet amendement, en conséquence, les supprime.

Les alinéas 2 à 4 inscrivent dans les principaux objectifs de la politique énergétique le développement de la cogénération. Or, nous bénéficions déjà d'une production d'électricité déjà faiblement émettrice de carbone.

Il faut nous concentrer sur la réduction des émissions de la production chaleur en privilégiant les technologies qui disposent du meilleur rendement. Le Gouvernement soutient cela à travers le fonds chaleur.

La commission met en avant l'usage énergétique de la biomasse en précisant les usages spécifiques de l'agriculture et de la sylviculture. Si l'usage de la biomasse à des fins énergétiques est nécessaire dans le cadre de l'objectif de neutralité carbone, il est également nécessaire de mentionner l'usage matière de la biomasse et de rappeler la nécessité de respecter la hiérarchie des usages.

Le dix-septième alinéa priorise la réduction des consommations d'énergie fossile, en mettant fin en priorité à l'usage des énergies fossiles les plus émettrices de gaz à effet de serre. Cette rédaction est redondante avec le 3° du code de l'énergie qui prévoit déjà que l'objectif de réduction de consommation des énergies fossiles est modulé par énergie fossile. Il est donc proposé de supprimer cet alinéa.

L'article L. 100-4 du code de l'énergie a vocation à fixer des objectifs principaux. L'ajout d'un sous-objectif en 2028 pour un objectif en 2030 n'est pas opportun. Il faut donc supprimer cet alinéa.

La commission fixe un objectif chiffré de 27 gW pour l'hydroélectricité en 2028. Il s'agirait de la seule filière pour laquelle un tel objectif de capacité installée figurerait dans la loi. Si l'hydroélectricité constitue aujourd'hui la source de production d'électricité d'origine renouvelable majoritaire, le projet de PPE prévoit aujourd'hui un objectif de 26,4 gW à 26,7 gW. L'amendement supprime la mention de l'objectif chiffré sur l'hydroélectricité. Celui-ci sera précisé dans la programmation pluriannuelle de l'énergie, comme pour les autres filières.

Sur les barrages, le Gouvernement a deux pistes : soit l'allotissement pour obtenir des vallées cohérentes, soit la reprise en régie nationale des concessions...

M. Fabien Gay.  - Ah ?

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État.  - Le vingt-troisième alinéa introduit un nouvel objectif de développement de la filière de l'éolien en mer avec des objectifs de parcs installés de 1 gW par an d'ici 2024. Pour répondre aux questions qui m'ont été posées, nous prévoyons un parc en Bretagne du sud et deux nouveaux parcs en région PACA et en région Occitanie. Le Gouvernement est favorable au développement et au déploiement de l'éolien en mer, mais il ne paraît néanmoins pas souhaitable de mentionner explicitement cette filière par rapport aux autres, tant électriques, que chaleur, gaz et carburants. De plus, les objectifs de 1 gW par an d'ici 2024 ne sont pas accessibles à court terme compte tenu de la durée nécessaire pour faire émerger un projet.

Mme la présidente.  - Sous-amendement n°466 rectifié à l'amendement n° 227 du Gouvernement, présenté par M. Gremillet, au nom de la commission des affaires économiques.

Amendement n°227

1° Alinéas 1 et 2

Supprimer ces alinéas.

2° Alinéa 5

Remplacer la quatrième occurrence du mot :

de

par les mots :

donnée à la

3° Alinéas 6 à 15

Supprimer ces alinéas.

M. Daniel Gremillet, rapporteur.  - Le présent sous-amendement conserve la précision rédactionnelle apportée par l'amendement à l'objectif de « valorisation de la biomasse à des fins énergétiques », tout en retirant dans le même temps les suppressions d'objectifs envisagées.

Mme la présidente.  - Amendement n°321 rectifié, présenté par Mme Sollogoub, MM. Capo-Canellas, Longeot et Cigolotti, Mme Saint-Pé, MM. Médevielle, Bonnecarrère, Janssens et Mizzon, Mme Guidez, MM. Kern, Cadic et Lafon, Mme Vermeillet, M. Moga, Mmes Perrot et Billon, MM. Prince, Delcros et Henno, Mme Joissains, M. Delahaye, Mme C. Fournier et M. Canevet.

Alinéa 4

Après le mot :

mots : «

insérer les mots :

y compris l'autoconsommation

Mme Nadia Sollogoub.  - Encourager l'autoconsommation serait vertueux. La loi est certes souvent bavarde, mais c'est là l'énonciation d'un principe général important. Des porteurs de projets ont abandonné, face à des complications insurmontables.

Mme la présidente.  - Amendement n°448 rectifié, présenté par MM. Labbé, Artano, Cabanel, Castelli, Collin et Corbisez, Mme Costes, M. Dantec, Mme N. Delattre, MM. Gold et Gontard, Mme Guillotin, M. Jeansannetas, Mme Jouve et MM. Requier, Roux et Vall.

Alinéa 8

1° Après les mots :

fins énergétiques,

insérer les mots :

sans concurrence avec les cultures dédiées à l'alimentation et

2° Supprimer les mots :

l'agriculture et

M. Joël Labbé.  - Cet amendement alerte sur une dérive possible de la méthanisation, à savoir la concurrence qu'elle organise entre production alimentaire et production énergétique.

M. Laurent Duplomb.  - Oh là là...

M. Joël Labbé.  - Sur le terrain, on voit ainsi se développer des maïs en cultures intermédiaires, avec pesticides et irrigation, destinés à la méthanisation. L'utilisation des prairies après ensilage semble également se développer, dans un contexte de sécheresses de plus en plus fréquentes, entraînant des manques de fourrage, ce qui crée des tensions avec le monde de l'élevage.

La valorisation de la biomasse à des fins énergétiques doit se faire sans concurrence avec les productions alimentaires. Il faut éviter le modèle allemand où, en 2014, près de 7 % de la surface agricole était consacrée à la méthanisation.

Entre un quart et un tiers du maïs cultivé en Allemagne est dévolu à la production énergétique. Si l'on ne réglemente pas, on risque la multiplication de fermes-usines.

Cette production semble vertueuse mais est néfaste pour les territoires et les agriculteurs.

Mme la présidente.  - Amendement n°433 rectifié, présenté par MM. Jacquin, Bérit-Débat, J. Bigot et P. Joly, Mme Lepage, MM. Duran, Manable, Mazuir, Temal, Roger et Marie, Mme Blondin et MM. Kerrouche et Montaugé.

Alinéa 20

Compléter cet alinéa par les mots :

, notamment par le développement de la méthanisation agricole et du biogaz en conciliant la production d'énergie avec l'agriculture et la sylviculture

M. Olivier Jacquin.  - Cet amendement prend en compte le développement de la méthanisation agricole et la production de biogaz dans les objectifs de la politique énergétique française.

Le gaz renouvelable constitue l'un des moyens de la décarbonation du secteur énergétique et des transports et de l'indépendance énergétique des territoires. Sa production fait appel a? deux atouts dont dispose la France : l'agriculture et le savoir-faire en matière d'économie circulaire.

En prenant en compte les risques de dérives liées à ces nouvelles pratiques, notamment l'industrialisation excessive de la méthanisation et la possibilité qu'elles remplacent l'activité agricole sur une partie conséquente des terres, une attention spécifique est portée à la conciliation de cette production d'énergie avec l'agriculture.

L'amendement n°300 n'est pas défendu.

Mme la présidente.  - Amendement n°132 rectifié, présenté par Mme Sollogoub, MM. Delahaye, Capo-Canellas, Canevet, Longeot, Cigolotti et Médevielle, Mme Vullien, MM. Bonnecarrère, Janssens et Mizzon, Mme Guidez, MM. Kern, Cadic et Lafon, Mme Vermeillet, M. Moga, Mmes Perrot et Billon, MM. Prince et Henno et Mmes Joissains et C. Fournier.

Alinéa 22

Après le mot :

hydraulique

insérer les mots :

, de toute nature et de toute puissance,

Mme Nadia Sollogoub.  - La réponse faite par le Gouvernement à ma question écrite récente semble favorable à la petite hydroélectricité, mais au cas par cas... Soyons plus fermes, n'en déplaise aux poissons et aux pêcheurs. Le code de l'environnement dit que la gestion équilibrée de la ressource en eau ne fait pas obstacle à la préservation du patrimoine hydraulique, en particulier des moulins. Mais remettre un moulin en fonction est un parcours du combattant, ce qui ne devrait pas être le cas. (Mme Michèle Vullien applaudit.)

Mme la présidente.  - Amendement n°354 rectifié, présenté par Mme Loisier, MM. Bonnecarrère et Prince, Mme Vermeillet, MM. Louault, Laugier et Kern, Mme Perrot, MM. Menonville, Canevet, Le Nay, Détraigne et Delahaye, Mme Berthet, M. Capo-Canellas, Mme Doineau, M. Longeot, Mmes Sollogoub, Billon, Férat et Morhet-Richaud, M. B. Fournier et Mmes Saint-Pé et N. Delattre.

Alinéa 22

Après le mot :

hydraulique

insérer les mots :

, à tout niveau de puissance, y compris en autoconsommation,

Mme Anne-Catherine Loisier.  - Il est analogue et déjà défendu. Il y a aussi une dimension d'engagement social au soutien à la petite hydroélectricité.

Mme la présidente.  - Amendement n°260, présenté par M. Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéa 22

Après le mot :

hydraulique

insérer les mots :

sous maitrise publique

M. Fabien Gay.  - L'hydroélectricité, ce sont 25 000 personnes et 1,5 milliard d'euros de recettes. Soit vous ouvrez au privé, soit nous revenons à une régie nationale.

Nous sommes, au groupe CRCE, plutôt favorables à la maîtrise publique de ce secteur. Si vous voulez développer les énergies renouvelables, il va falloir du stockage et, aujourd'hui, il n'y a pas mieux que les barrages.

Vous dites que les barrages resteront propriété de l'État, certes, mais les recettes iront au privé. En outre, qui nous dit que l'État pourra racheter au terme des 30 ou 40 ans ? On oublie toujours qu'il faut racheter ces équipements et leur prix en empêchera peut-être l'État de le faire ! Non, gardons-les sous maîtrise publique.

Mme la présidente.  - Amendement n°357 rectifié ter, présenté par MM. Decool, Menonville, Chasseing, A. Marc, Wattebled, Guerriau et Fouché, Mme Mélot, M. Lagourgue, Mme C. Fournier, M. Bonnecarrère, Mmes Vullien et Noël, MM. Pellevat, Joyandet, Canevet, Daubresse et Rapin, Mme Berthet et MM. Longeot, Moga, Lefèvre, Malhuret et Gabouty.

Alinéa 22

Après le mot :

hydraulique

insérer les mots :

, y compris par des aménagements utilisant l'énergie marémotrice,

M. Jean-Pierre Decool.  - La France présente le deuxième potentiel européen pour l'énergie marémotrice avec des gisements d'environ 15 gW concentré sur les côtes normandes et picardes qui pourraient fournir 5 % des besoins nationaux d'électricité. Comment ne pas y avoir recours ?

Mme la présidente.  - Amendement identique n°400 rectifié ter, présenté par M. Bignon.

M. Jérôme Bignon.  - Ouvrir le champ des possibles au marémoteur ne signifie pas que cela aboutira. Mais la capacité énergétique identifiée est 15 gW : c'est autrement plus que les 18 mW que représente un champ d'éolien. On inonde les Hauts-de-France d'éoliennes : mille mâts rien que dans la Somme ! Regardons au moins le sujet. Le projet pilote aux Pays de Galles fonctionne. De plus, la digue protégerait le littoral. Nous avons certes du vent, mais aussi la mer ; ne fermons pas le champ des possibles. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Indépendants et sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains)

Mme la présidente.  - Amendement n°79 rectifié bis, présenté par MM. Duplomb, D. Laurent et Guené, Mme Estrosi Sassone, MM. J.M. Boyer, Bascher, Segouin, Houpert et Sol, Mmes Morhet-Richaud et Lassarade, MM. Chaize et de Nicolaÿ, Mmes Deromedi et Imbert, M. Danesi, Mme de Cidrac, MM. Sido, Saury, Genest, Bazin, Savary, Savin, Chatillon, Vogel, Pellevat, Priou, Chevrollier, Mandelli et de Legge, Mme Bonfanti-Dossat, M. Charon, Mmes Noël et Lopez, M. Joyandet, Mmes Procaccia, A.M. Bertrand et Lamure et MM. Rapin, Vaspart, B. Fournier, Lefèvre, Laménie, Milon et Gilles.

Alinéa 22

Remplacer les mots :

27 gigawatts en 2028

par les mots :

27,5 gigawatts en 2028, soit 2000 megawatts supplémentaires, dont un quart au moins produits en petite hydroélectricité

M. Laurent Duplomb.  - Le passage de 27 à 27,5 gW en 2028 donnerait de l'espoir à la petite hydroélectricité. Sur 40 000 seuils non exploités, 20 000 pourraient l'être rapidement.

Nos moulins sont l'oeuvre de nos ancêtres, qui ont su exploiter la force motrice des cours d'eau. Aujourd'hui, l'Agence française de la biodiversité interdit dogmatiquement de développer la petite hydroélectricité. Regardons ce que font nos voisins, au Portugal ou en Italie ! Assez de dogmatisme, sachons être aussi intelligents que nos ancêtres qui avaient compris que c'était une énergie gratuite et renouvelable. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Mme la présidente.  - Sous-amendement n°467 à l'amendement n°79 rectifié de M. Duplomb, présenté par M. Gremillet, au nom de la commission des affaires économiques.

Amendement n°79

1° Alinéa 5

Supprimer les mots :

, soit 2 000 mégawatts supplémentaires, dont un quart au moins produits en petite hydroélectricité

2° Après l'alinéa 5

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

....  -  Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Un quart de l'augmentation des capacités installées de production entre 2016 et 2028 doit porter sur des installations dont la puissance est inférieure à 4,5 mégawatts ;

M. Daniel Gremillet, rapporteur.  - Ce sous-amendement précise ce que recouvre la petite hydroélectricité, à savoir les installations dont la puissance est inférieure à 4,5 mW. Il supprime la mention de 2 000 mW supplémentaires, redondante avec l'objectif d'au moins 27,5 gW de capacité installée de production.

Mme la présidente.  - Amendement n°173, présenté par Mme Préville et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 22

Compléter cet alinéa par les mots :

, dont un quart au moins en petite hydroélectricité

Mme Angèle Préville.  - À mon tour de vanter la petite hydroélectricité, énergie renouvelable, décarbonée, qui maintient les réseaux. Au vu des difficultés de développement dans certaines régions, cet amendement réserve une partie de l'objectif minimal de développement à la petite hydroélectricité sous autorisation, afin de sécuriser les appels d'offres et dynamiser les projets sous 1 mW.

La petite hydroélectricité est une chance et une richesse pour les territoires ruraux. Elle apporte de la stabilité aux réseaux, remédie aux difficultés d'intégration des énergies renouvelables et dégage une valeur ajoutée quelle que soit la puissance. C'est un domaine de passionnés, respectueux du milieu, qui entretiennent les berges. Ce que demandent les propriétaires, c'est le respect de la loi sur la continuité écologique, ni plus ni moins. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes Les Républicains et UC)

M. Laurent Duplomb.  - Bravo !

Mme la présidente.  - Amendement n°360 rectifié, présenté par MM. Roux, Dantec, Arnell, Artano, A. Bertrand, Cabanel, Castelli, Collin et Corbisez, Mme Costes, MM. Gabouty et Gold, Mme Guillotin, M. Jeansannetas, Mme Jouve et MM. Labbé, Léonhardt, Requier et Vall.

Alinéa 22

Compléter cet alinéa par les mots :

, dans le cadre d'une gestion partagée et raisonnée des usages de l'eau

M. Éric Gold.  - Avec la multiplication prévisible des épisodes de stress hydrique, de sécheresse et les conflits d'usage, nous réaffirmons que la production d'énergie hydraulique doit s'inscrire dans une stratégie de gestion partagée et raisonnée des usages de l'eau.

M. Daniel Gremillet, rapporteur.  - L'amendement n°227 va à l'encontre des orientations de la commission en faveur du biogaz ou de l'éolien en mer. Il envoie un signal négatif aux professionnels qui comptent sur le soutien des pouvoirs publics pour réussir la transition énergétique. Les objectifs fixés par la commission sont inspirés de la PPE en cours de révision et de la déclaration de politique générale. Je vous propose donc d'adopter le sous-amendement qui supprime les dispositions problématiques.

L'ajout prévu par l'amendement n°321 rectifié n'est pas opportun ; la PPE comprendra une stratégie idoine.

Mon sous-amendement répond à l'objectif de l'amendement n°448 rectifié : la production d'énergie issue de la biomasse ne saurait se faire au détriment de la production alimentaire. L'amendement n°433 rectifié est lui aussi satisfait.

Les amendements nos132 rectifié, 354 rectifié, 260, 79 rectifié bis, 173 et 360 rectifié concernent l'énergie hydraulique. L'amendement n°79 rectifié bis semble le plus abouti, le chiffrage est cohérent avec la PPE et l'article 6 bis B qui facilite l'augmentation de puissance des installations existantes. Je propose de le préciser par mon sous-amendement.

Les amendements identiques nos357 rectifié ter et 400 rectifié ter concernent l'énergie marémotrice, déjà incluse dans l'hydroélectricité au sein de la PPE. Les porteurs de projets que j'ai auditionnés n'en sont pas au stade de la concrétisation.

Avis favorable aux amendements nos227 et 79 rectifié bis, sous réserve des sous-amendements, avis défavorable aux autres.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État.  - Avis défavorable au sous-amendement n°466 qui rétablit largement le texte de la commission. La PPE est claire sur la volonté de soutenir l'autoconsommation ; les précisions de l'amendement n°321 rectifié sont excessives. Les amendements nos448 rectifié et 433 rectifié sur les modalités de production du biogaz sont satisfaits par l'amendement du Gouvernement et le sous-amendement de la commission.

Nous devons trouver le bon compromis pour développer la petite hydroélectricité tout en maintenant la continuité écologique des rivières et la biodiversité. Le Gouvernement a lancé un appel d'offres pour débloquer 350 mW de petite hydroélectricité.

Je suis prête à approfondir le travail avec les parlementaires et les parties prenantes pour avancer de manière opérationnelle.

M. Jean-François Longeot.  - Très bien !

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État.  - Dès lors, avis défavorable aux amendements nos132 rectifié et 354 rectifié.

Avis défavorable à l'amendement n°260, dont la rédaction est ambiguë. Les ouvrages peuvent être exploités sous le régime de la concession ou de l'autorisation, sous le contrôle de l'État.

Avis défavorable aux amendements nos357 rectifié ter et 400 mais le travail doit reprendre entre les parlementaires et les services du ministère pour explorer cette piste qui pourra faire l'objet, le moment venu, d'appels à projet PIA.

Avis défavorable à l'amendement n°79 rectifié bis qui augmente le seuil de puissance installée. Nous ne sommes pas en mesure de quantifier la part de la petite hydroélectricité dans le mix. Même avis pour le sous-amendement n°467 et les amendements nos173 et 360 rectifié.

Mme Anne-Catherine Loisier.  - La ministre s'étant engagée à travailler sur la petite hydroélectricité, nous retirons les amendements nos132 rectifié et 354 rectifié.

L'amendement n°132 rectifié est retiré, de même que l'amendement n°354 rectifié.

M. Roland Courteau.  - Le développement de la méthanisation ne doit pas être restreint mais elle fait l'objet de polémiques. Attention à ne pas flécher les ressources végétales vers la méthanisation au détriment de l'alimentation. Tirons les leçons de l'expérience allemande. On pourrait imaginer une charte de bonne conduite, un label de méthanisation verte... Il faut agir pour le développement raisonné de cette filière afin d'éviter les excès.

Merci, madame la ministre, de m'avoir confirmé l'installation de deux fermes d'éoliennes flottantes en Méditerranée, l'une au large des côtes d'Occitanie, l'autre de PACA.

M. Laurent Duplomb.  - Je suis favorable au sous-amendement du rapporteur à mon amendement n°79 rectifié. Je ne comprends pas quel dogme pousse le Gouvernement à refuser 0,5 gW pour la petite hydroélectricité.

M. Joël Labbé.  - Mon amendement visait à encadrer la méthanisation en donnant la priorité à l'alimentation et au retour au sol de la biomasse. Je le retire au bénéfice de celui du Gouvernement.

L'amendement n°448 rectifié est retiré.

Mme Nadia Sollogoub.  - Je maintiens l'amendement n°321 rectifié sur le principe, même si je comprends qu'il soit difficile pour le Gouvernement de soutenir une forme de production d'électricité qui échappe à toute taxation...

M. Olivier Jacquin.  - Je retire mon amendement au profit de l'amendement n°227 du Gouvernement, dont la précision est intéressante.

L'amendement n°433 rectifié est retiré.

M. Jean-Pierre Decool.  - Nous avons été entendus par le rapporteur et la ministre sur l'énergie marémotrice. Nous acceptons volontiers ce travail partenarial sur le sujet.

Les amendements identiques nos357 rectifié ter et 400 rectifié ter sont retirés.

M. Daniel Gremillet, rapporteur.  - Le texte de la commission est très clair : il interdit que la biomasse d'origine agricole ou forestière entre en concurrence avec l'alimentaire ou la sylviculture. Sur le pourcentage, il va plus loin que Joël Labbé !

M. Fabien Gay.  - Nous maintenons notre amendement. Nous voulons un débat sur les 150 barrages qui risquent d'être concédés. Soit nous obéissons à Bruxelles et livrons ces ouvrages aux appétits financiers du privé, soit nous optons pour une régie nationale.

Le sous-amendement n°466 rectifié est adopté.

L'amendement n°227, sous-amendé, est adopté.

L'amendement n°321 rectifié n'est pas adopté, non plus que l'amendement no260.

Le sous-amendement n°467 est adopté.

L'amendement n°79 rectifié bis, sous-amendé, est adopté.

L'amendement n°173 n'a plus d'objet.

L'amendement n°360 rectifié n'est pas adopté.

La séance est suspendue quelques instants.

Mme la présidente.  - Amendement n°168 rectifié, présenté par M. Montaugé et les membres du groupe socialiste et républicain.

Après l'alinéa 4

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

...° Le 5° est ainsi rédigé :

« 5° Participer à la structuration de filières industrielles de la croissance verte en veillant à prendre en compte les enjeux sociaux et environnementaux de leurs activités ; »

M. Franck Montaugé.  - Cet amendement incite les opérateurs de la politique énergétique à prendre en considération les enjeux sociaux et environnementaux consacrés par la loi Pacte. Il s'agit de favoriser les opérateurs de la croissance verte qui visent la performance sociale et environnementale de leur activité.

L'amendement clarifie la prise en compte par la CRE des engagements sociétaux et environnementaux des opérateurs. La prise en compte des objectifs de développement durable par le secteur permet d'évaluer l'empreinte écologique et environnementale de la France.

Mme la présidente.  - Amendement n°170 rectifié, présenté par M. Montaugé et les membres du groupe socialiste et républicain.

Après l'alinéa 4

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

...° Le 5° est ainsi rédigé :

« 5° Participer à la structuration de filières industrielles de la croissance verte en veillant à prendre en compte les enjeux environnementaux de leurs activités ; »

M. Franck Montaugé  - Amendement de repli qui omet la dimension sociale.

M. Daniel Gremillet, rapporteur.  - Avis favorable à l'amendement n°168, qui a été rectifié dans le sens souhaité par la commission. L'amendement n°170 rectifié tombera s'il est adopté.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État.  - Avis favorable à l'amendement n°168 rectifié qui prend en compte les enjeux environnementaux et sociaux pour les filières industrielles de la croissance verte. L'amendement n°170 rectifié tomberait en effet.

L'amendement n°168 rectifié est adopté.

L'amendement n°170 rectifié n'a plus d'objet.

Mme la présidente.  - Amendement n°445 rectifié, présenté par MM. Patient, Amiel, Bargeton, de Belenet et Buis, Mme Cartron, M. Cazeau, Mme Constant, MM. Dennemont, Gattolin, Hassani, Haut, Karam, Lévrier, Marchand, Mohamed Soilihi, Patriat et Rambaud, Mme Rauscent, M. Richard, Mme Schillinger et MM. Théophile et Yung.

Après l'alinéa 8

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Valoriser la capacité de stockage du carbone dans les zones tampon telles que la forêt amazonienne et la mer. »

M. Bernard Buis.  - La forêt et la mer sont de formidables puits de carbone ; la seule forêt française stockerait 80 tonnes à l'hectare. Il convient de valoriser cette capacité de stockage.

M. Daniel Gremillet, rapporteur.  - La notion de zone tampon est plus géographique que juridique. Sur le fond, l'amendement est satisfait par le texte de la commission qui mentionne les puits de carbone et la préservation des sols. Avis défavorable.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État.  - Le principe de la neutralité carbone suppose de développer les puits naturels, mais cela ne saurait constituer un objectif de politique énergétique. De plus, les terres agricoles sont aussi des puits de carbone. Enfin, le stockage dans l'océan ne saurait être piloté comme un objectif de politique publique. Retrait ou avis défavorable.

L'amendement n°445 rectifié est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°255, présenté par M. Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéa 10

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

1° A Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« I.  -  Pour répondre à l'urgence écologique et climatique, la politique énergétique nationale assure la programmation de l'action de l'État afin : » ;

M. Guillaume Gontard.  - Les lois énergie se multiplient depuis quelques années avec des déclarations d'intentions plus vertes les unes que les autres mais les effets concrets sont rarement au rendez-vous.

Il convient de mettre en place une véritable programmation pour lutter contre le changement climatique, réduire la consommation d'énergie, sortir des énergies fossiles, développer les énergies renouvelables.

Donnons un poids supplémentaire à la PPE en l'inscrivant dans la loi.

M. Daniel Gremillet, rapporteur.  - L'amendement est satisfait par l'article premier bis A : le Parlement définira tous les cinq ans les objectifs et les priorités d'action dans les domaines de l'énergie et du climat. Un rapport annexé au projet de loi de finances est même prévu. Retrait ou avis défavorable.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État.  - L'article premier bis A relève au niveau législatif une partie de la PPE et permettra au Parlement de se prononcer sur les grandes orientations.

Le Haut Conseil pour le climat a souhaité en outre renforcer l'évaluation de l'impact des politiques énergétiques et le Conseil de défense écologique a été créé pour cela. Retrait ou avis défavorable.

L'amendement n°255 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°257 rectifié, présenté par M. Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'alinéa 11

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...) À la première phrase, les mots : « 40 % entre 1990 et 2030 et de diviser par quatre les émissions de gaz à effet de serre entre 1990 et 2050 » sont remplacés par les mots : « 57 % entre 1990 et 2030 et de réduire l'empreinte carbone de la France de 57 % entre 1990 et 2030 » ;

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Le CNTE insiste sur l'empreinte carbone liée à la consommation de produits importés. En 2017, l'empreinte carbone de la France était 1,7 fois plus importante que les émissions territoriales. En effet, les émissions liées aux importations ont augmenté de 93 % entre 1995 et 2015 tandis que les émissions sur le territoire national baissaient de 18 %.

Fixer un objectif ambitieux de réduction de l'empreinte carbone est un moyen de lutter contre les délocalisations et la multiplication des échanges inégaux, injustes et polluants.

Mme la présidente.  - Amendement n°188, présenté par M. Courteau et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 12

Rédiger ainsi cet alinéa :

a) La première phrase est ainsi rédigée : « De réduire l'empreinte carbone de la France de 57 % entre 1990 et 2030 et d'atteindre la neutralité carbone à l'horizon 2050 en divisant les émissions de gaz à effet de serre par huit entre 1990 et 2050. » ;

M. Roland Courteau.  - Il est défendu.

Mme la présidente.  - Amendement n°159, présenté par M. Courteau et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 12

après le mot :

phrase,

insérer les mots :

le taux : « 40 % » est remplacé par le taux : « 57 % » et

M. Roland Courteau.  - Selon le rapport du GIEC, un réchauffement global à 1,5°C en 2100 plutôt qu'à 2°C signifierait 55 millions d'Africains en moins touchés par la faim, 73 millions d'Européens en moins touchées par des vagues de chaleur, des événements extrêmes moins intenses, 10 millions de personnes en moins exposées aux risques liés à la montée du niveau des mers, des chutes de rendement moindres pour le maïs, le blé et le riz, une diminution de moitié de la population exposée au risque de pénurie d'eau, des risques moindres pour la pêche.

Le rapport du GIEC le rappelle avec force : chaque demi-degré compte. Il indique la quantité nette de gaz à effet de serre en 2030 au niveau mondial pour rester sous 1,5°C. Une projection des émissions nationales prenant en compte des critères d'équité par rapport aux autres pays aboutit à une baisse de 55 à 57 % des émissions de gaz à effet de serre en 2030 par rapport à 1990.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°256, présenté par M. Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

M. Fabien Gay.  - Oui, chaque demi-degré compte. Face à l'urgence environnementale, il faut accélérer le rythme de la transformation nécessaire pour atteindre la neutralité carbone en 2050 et contenir le réchauffement climatique.

Cessons de toujours reporter les efforts. Le Haut Conseil pour le climat nous invite à renforcer notre action dès à présent, sans attendre que nos voisins agissent. Face à un défi planétaire, chacun doit prendre ses responsabilités.

Mme la présidente.  - Amendement n°258, présenté par M. Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéa 12

1°Remplacer l'année :

2050

par l'année :

2040

2° Remplacer le mot :

six

par le mot :

huit

M. Fabien Gay.  - Nous devons revoir à la hausse nos ambitions. Le projet de loi envisage une diminution des émissions par un facteur 6 en 2050. Le code de l'énergie prévoyait un facteur 4. Une hausse de 2°C serait en effet déjà trop risquée ; nous proposons donc d'inscrire dans la loi un facteur 8, comme le prônait l'ex-ministre de l'énergie sur Twitter le 7 février dernier.

Mme la présidente.  - Amendement n°157, présenté par M. Courteau et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 12

Remplacer le mot :

six

par le mot :

huit

M. Roland Courteau.  - Les objectifs nationaux doivent être renforcés avec une baisse supérieure au facteur 8 des émissions en 2050. La France disposant de plus de puits carbone naturels que d'autres pays, elle devrait atteindre la neutralité carbone avant 2050.

Mme la présidente.  - Amendement n°189, présenté par M. Courteau et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 12

Remplacer les mots :

un facteur supérieur à six

par le mot :

huit

M. Roland Courteau.  - Amendement de repli. L'objectif de neutralité carbone correspond à une division par 8 des émissions de gaz à effet de serre, comme l'avait initialement indiqué le Gouvernement.

M. Daniel Gremillet, rapporteur.  - Les amendements nos258, 157 et 189 proposent une diminution par un facteur 8 des émissions. L'objectif semble trop ambitieux pour pouvoir être tenu : avis défavorable. Il faudra déjà diviser par deux notre consommation énergétique...

Les amendements nos257 rectifié et 159 mettraient sous tension certains secteurs : avis défavorable.

Défavorable à l'amendement n°188 : l'empreinte carbone a le mérite d'inclure les importations mais les difficultés méthodologiques ont conduit l'Assemblée nationale à reporter son application à 2022 et à ne la retenir que comme indicateur.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État.  - L'objectif de neutralité carbone en 2050 a été validé par le Haut Conseil à l'action climatique ; il est cohérent avec la trajectoire retenue par le Gouvernement qui correspond à un réchauffement à 1,5 degré. La PPE fait de la France un pays leader en matière d'objectifs.

La mesure de l'empreinte carbone est soumise à de nombreux aléas méthodologiques et ne peut donc se piloter : avis défavorable à l'amendement n°257 rectifié.

Sur le facteur 8, je rejoins le rapporteur : avis défavorable aux amendements nos188, 159, 157, 258 et 189.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Valse des ministres, valse des promesses ! M. de Ruggy était favorable au facteur 8 avant son entrée au Gouvernement, comme M. Hulot était hostile au CETA avant d'être nommé ministre. Nos concitoyens ne s'y retrouvent plus, car les déclarations lénifiantes s'enchaînent et ne sont jamais suivies d'effets : les ministres découvrent le réalisme en arrivant aux responsabilités et redeviennent écologistes en les quittant.

Cessons de reporter les efforts aux calendes grecques !

Enfin, la question du libre-échange ne peut être éludée : en augmentant nos importations, on aggrave à la fois notre empreinte carbone et l'effet de serre : ce sera perdant-perdant !

Pendant des années, le Parlement européen a débattu du bilan carbone. Si un pays parvient à définir cette notion de façon rigoureuse, elle sera adoptée par ses voisins. Soyons pionniers !

M. Roland Courteau.  - C'est la science qui recommande ces objectifs. Or le Premier ministre a dit qu'il fallait la suivre. Écoutons, pour une fois, le Premier ministre ! (Sourires)

M. Fabien Gay.  - Le rapporteur dit que le facteur 8 est trop ambitieux (M. le rapporteur le conteste.) ; je crois qu'il faut l'être. Si nous ne changeons pas radicalement nos modes de production, tout le reste, c'est du vent ! Vous ne pourrez pas éluder le débat sur le libre-échange pendant trois jours. Comment atteindre la neutralité carbone en faisant ratifier le CETA à l'Assemblée nationale et en signant les treize nouveaux traités que vous nous proposez ?

Sur ce plan, vous ne pouvez pas faire du « en même temps ».

L'amendement n°257 rectifié n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°188.

Les amendements identiques nos159 et 256 ne sont pas adoptés.

Les amendements nos258, 157 et 189 ne sont pas adoptés.

Mme la présidente.  - Amendement n°442 rectifié ter, présenté par MM. Fouché, Menonville, Capus, Decool et Bignon, Mme Raimond-Pavero, MM. Chasseing, Guerriau, Babary et Lagourgue et Mme Mélot.

Alinéa 13, seconde phrase

Supprimer les mots :

, sans tenir compte des crédits internationaux de compensation carbone

M. Jean-Pierre Decool.  - L'exclusion de toute compensation par des crédits internationaux dans la définition de la neutralité carbone a été introduite par la voie d'un amendement adopté à l'Assemblée nationale. Elle n'a fait l'objet d'aucune étude impact, ni d'aucun véritable débat.

Or la définition de la neutralité carbone dans la loi française ne doit pas donner l'impression d'empêcher les entreprises et les territoires de développer une coopération Nord-Sud utile pour les populations locales, notamment en Afrique, en utilisant la flexibilité offerte par les crédits carbone internationaux. Cette définition doit être cohérente avec l'accord de Paris.

Plusieurs États européens, dont la Norvège et le Royaume-Uni, qui s'inscrivent dans un objectif de neutralité carbone à court ou moyen terme, semblent aller vers la voie de la compensation par des crédits internationaux.

Si cette définition semble porter sur l'inventaire national et non sur le bilan carbone des entreprises, il est important que le Gouvernement confirme publiquement cette affirmation afin de rassurer les entreprises et de dissiper les doutes.

M. Daniel Gremillet, rapporteur.  - L'exclusion des crédits internationaux a été ajoutée à l'Assemblée nationale. La commission n'a pas souhaité revenir dessus. Les mécanismes issus du protocole de Kyoto restent valables. Avis défavorable.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État.  - Même avis. Ce point a fait l'objet d'une longue concertation. L'objectif est bien national. Il ne faut pas affaiblir cette ambition. La France contribue, via l'AFD, à la réduction des émissions de gaz à effet de serre à l'international.

M. Ronan Dantec.  - Restons sur une logique nationale ! Mais il faudra être plus précis demain sur nos ambitions internationales. Cet amendement d'appel est donc important.

L'amendement n°442 rectifié ter est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°190, présenté par M. Courteau et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 14

Après le mot :

intermédiaires

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

de 9 % en 2023, de 17 % en 2028 et » et le taux : « 20 % » est remplacé par le taux : « 22 % » ;

M. Roland Courteau.  - Cet amendement précise les objectifs de réduction de consommation finale de l'énergie dans le temps, de 2023 à 2030, en augmentant à 22 % l'objectif de réduction fixé pour 2030, comme le propose le Réseau Action Climat.

Le rythme actuel de réduction de la consommation énergétique finale est insuffisant. Pour atteindre une baisse de 50 % de la consommation d'énergie en 2050, la baisse devrait être au moins de 22 % en 2030.

Les économies d'énergie doivent être la priorité absolue de la politique énergétique selon la recommandation émise le 18 juin par la Commission européenne. La France doit détailler les politiques et mesures mises en place afin d'atteindre les objectifs de réduction de sa consommation énergétique finale.

Mme la présidente.  - Amendement n°259, présenté par M. Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéa 14

Compléter cet alinéa par les mots :

et le taux : « 20 % » est remplacé par le taux : « 25 % »

M. Pierre Ouzoulias.  - Avec le même argumentaire que M. Courteau, nous proposons un taux de 25 %. La stratégie bas carbone proposait 28 %. L'Ademe plaide pour une réduction de 30 %. Notre proposition n'est donc pas déraisonnable.

Mme la présidente.  - Amendement n°17 rectifié bis, présenté par MM. Dantec, Cabanel, Corbisez, Gold, Jeansannetas, Kerrouche, Labbé, Léonhardt, Roux et Vall, Mme Benbassa et M. Gontard.

Alinéa 14

Compléter cet alinéa par les mots :

et le taux : « 20 % » est remplacé par le taux : « 22 % »

M. Ronan Dantec.  - Tout va se passer dans les prochaines années. Pourquoi 22 % ? C'est le scénario AMS2 élaboré en 2015 par la DGEC. Je ne comprends pas d'ailleurs pourquoi l'État est moins ambitieux que ses propres services... Ce n'est pas du doigt mouillé !

Mme la présidente.  - Amendement identique n°145, présenté par Mme Préville et les membres du groupe socialiste et républicain.

Mme Angèle Préville.  - La réduction doit se faire de façon régulière, d'autant plus que les premières baisses seront les plus faciles. Il s'agit d'anticiper pour permettre à chacun de s'adapter progressivement.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°215 rectifié bis, présenté par MM. Longeot, Mizzon et Canevet, Mme Vermeillet, MM. Kern, Le Nay, Capo-Canellas et Delcros, Mmes Vullien et Billon, MM. Cigolotti et Médevielle et Mme Férat.

M. Jean-François Longeot.  - Le Conseil supérieur de l'énergie s'est prononcé en faveur de l'établissement de jalons intermédiaires afin de tracer clairement la trajectoire de réduction de nos consommations d'énergie d'ici à 2030 et d'atteindre la neutralité carbone à l'horizon 2050. L'objectif intermédiaire doit être rehaussé de 20 % à 22 %.

Cela peut aussi entraîner pour les ménages, les entreprises et les collectivités territoriales un gain de pouvoir d'achat et des économies.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°388 rectifié bis, présenté par MM. Bignon, Decool, Lagourgue et Guerriau, Mme Mélot et MM. Menonville, Fouché, Wattebled et Malhuret.

M. Franck Menonville.  - Il a été bien défendu.

M. Daniel Gremillet, rapporteur.  - Au total, les jalons portés par les amendements nos190 et 259 sont plus sévères que la PPE. Gardons-nous de multiplier les jalons qui nuisent à la lisibilité et à l'appropriation des objectifs. Avis défavorable à tous ces amendements. Je rappelle qu'il s'agit d'une loi quinquennale.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État.  - Oui, ce sont bien les premières années de la trajectoire qui sont les plus importantes, puisqu'il faut enclencher la trajectoire dans les années qui viennent pour être en capacité d'atteindre les objectifs fixés pour 2050. Mais la PPE prévoit déjà des jalons. La réduction de 20 % en 2030 est déjà un objectif très ambitieux : ne le rehaussons pas. Il est de plus déjà compatible avec les accords de Paris.

M. Ronan Dantec.  - Si l'État pensait en 2015 qu'on pouvait y arriver, pourquoi cela ne l'est-il plus aujourd'hui ?

L'amendement n°190 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°259.

Les amendements identiques nos17 rectifié bis, 145, 215 rectifié bis et 388 rectifié bis ne sont pas adoptés.

Mme la présidente.  - Amendement n°248, présenté par M. Canevet.

Après l'alinéa 19

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...) Après le mot : « chaleur », sont insérés les mots : « et de froid » ;

M. Michel Canevet.  - Dans la lutte contre l'effet de serre, il faut aussi prendre en compte les appareils luttant contre le réchauffement climatique, producteurs de froid.

M. Daniel Gremillet, rapporteur.  - Cet amendement est utile. C'est un enjeu majeur. Madame la ministre, vous avez d'ailleurs réuni un groupe de travail à ce propos. Mais il me semble nécessaire de l'inscrire dans la loi. Cet amendement est compatible avec mon amendement n°214.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État.  - Oui, le froid renouvelable doit faire l'objet de notre attention. Mais la notion ne devrait pas être définie au niveau européen avant 2021. Retrait ?

M. Michel Canevet.  - Non : il faut avoir de l'ambition !

L'amendement n°248 est adopté.

L'amendement n°295 rectifié bis n'est pas défendu.

Mme la présidente.  - Amendement n°87 rectifié, présenté par MM. Dantec, Cabanel, Corbisez, Gold, Jeansannetas, Labbé, Roux et Vall.

Alinéa 24

Rédiger ainsi cet alinéa :

3° À la fin du 5°, les mots : « à l'horizon 2025 » sont remplacés par les mots : « au plus tard en 2030 » ;

M. Ronan Dantec.  - Cet amendement assortit l'horizon 2025 d'une limite portée au plus tard à 2030 pour l'objectif de réduction à 50 % de la part du nucléaire dans la production de l'électricité. Si le projet a pour objet de décaler l'échéance à 2035, ce décalage n'est pas totalement justifié, puisque plusieurs scénarios, celui de l'Ademe et les scénarios Ampère et Ampère + publiés dans le bilan prévisionnel de RTE, montrent qu'il reste possible de tendre vers l'échéance 2025.

Cette date de 2035 n'est pas consensuelle. Les risques d'accident augmenteront avec l'âge et le vieillissement du parc nucléaire...

M. Daniel Gremillet, rapporteur.  - Cette échéance est issue de la stratégie nationale bas carbone. Un arrêt précipité du nucléaire serait en contradiction avec nos engagements en faveur de la réduction des émissions de gaz à effet de serre. C'est l'analyse qu'avait faite le Sénat lors de l'examen du projet de loi de transition énergétique.

Enfin, une telle échéance ne laisse pas EDF se préparer à cette transition.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État.  - Avis défavorable. Nous avons réévalué nos objectifs sur la base des travaux de RTE : il apparaît que 2035 est plus crédible que 2025. Nous fermerons les deux réacteurs de Fessenheim dès l'année prochaine.

M. Ronan Dantec.  - Mon amendement était un peu taquin... Le rapporteur trouve pertinent ici ce qu'il ne trouvait pas pertinent pour les 22 %. Gardons en mémoire cette contradiction pour en tirer les conséquences sur nos méthodes de travail en amont de la prochaine PPE.

Je note l'argument très fort qu'EDF ne s'est pas préparé alors que les réacteurs étaient tout de même initialement prévus pour 40 ans !

L'amendement n°87 rectifié est retiré.

L'amendement n°294 rectifié bis n'est pas défendu.

Mme la présidente.  - Amendement n°28 rectifié, présenté par MM. Gold, Dantec, Arnell, Artano, A. Bertrand et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Castelli, Collin et Corbisez, Mmes Costes et N. Delattre, M. Gabouty, Mme Guillotin, M. Jeansannetas, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et MM. Requier, Roux et Vall.

Après l'alinéa 24

Insérer trois alinéas ainsi rédigés :

...° Le 7° est ainsi modifié :

a) Le mot : « majoritairement » est remplacé par les mots : « en priorité » ;

b) Sont ajoutés les mots : « , avec pour objectif intermédiaire de rénover un million de logements mal isolés d'ici 2022 » ;

M. Éric Gold.  - Le projet renforce les objectifs de la politique énergétique, quatre ans après la loi du 17 août 2015. Un plan de 14 milliards d'euros devait être lancé pour rénover des millions de logements par an ; or notre pays abrite toujours 7,4 millions de passoires thermiques.

Cet amendement retranscrit l'engagement pris par le président de la République, alors candidat, de rénover un million de logements mal isolés d'ici 2022 tout en accordant la priorité aux propriétaires les plus modestes.

M. Daniel Gremillet, rapporteur.  - Monsieur Dantec, vous faites référence à un scénario de 2015 ; je me réfère pour ma part aux scénarios les plus récents.

L'article 3 de la loi du 17 août 2015 prévoit déjà un objectif de 500 000 logements rénovés depuis 2017 : atteignons-le plutôt que d'en fixer un nouveau. Le rendez-vous fixé dans cinq ans permettra au législateur d'adapter l'objectif en tant que de besoin. Retrait ?

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État.  - Nous devons en effet accélérer le rythme de rénovation des logements. Le Gouvernement partage l'idée de cibler les aides sur les ménages modestes. Mais la rédaction de 2015 est la bonne ; l'expression « en priorité » est ambiguë et pourrait générer un droit non maîtrisé.

Le nombre de logements rénovés est un levier qui permettra d'atteindre l'objectif. Je travaille à la simplification des dispositifs avec Julien Denormandie pour atteindre le palier de 500 000. Avis défavorable.

L'amendement n°28 rectifié est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°249, présenté par M. Canevet.

Après l'alinéa 24

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° Le 7° est complété par les mots : « et en favorisant les solutions passives d'efficacité énergétique de l'ensemble des bâtiments » ;

M. Michel Canevet.  - La meilleure énergie est celle que l'on ne consomme pas. En Bretagne, certaines sociétés parviennent à réduire la consommation d'énergie par le recours à certains revêtements innovants.

M. Daniel Gremillet, rapporteur.  - C'est satisfait et, ainsi rédigé, d'ordre réglementaire. Retrait ?

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État.  - Même avis.

L'amendement n°249 est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°261, présenté par M. Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéa 25

Rétablir le 4° dans la rédaction suivante

4° Après le 7°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...° De disposer d'un réseau ferroviaire permettant le report modal de la route vers le rail ; »

Mme Cécile Cukierman.  - Il est indispensable que l'État prenne ses responsabilités et organise le rééquilibrage modal dans le transport de marchandise pour favoriser les modes de transports les moins polluants et les moins émetteurs de gaz à effet de serre.

Je ne reviendrai pas sur la ligne Perpignan-Rungis. Nous apprenons à l'instant que Mme Borne, qui a démantelé le service public ferroviaire, remplacera M. de Rugy.

Le trafic routier représente 30 % des émissions et, selon l'OMS, l'ozone et les particules causent 45 000 décès par an en France dans les grandes villes, mais aussi dans certaines vallées montagnardes.

Il y a urgence à fixer dans les objectifs prioritaires la réduction de la part du transport routier.

M. Daniel Gremillet, rapporteur.  - Les enjeux énergétiques des transports pourront être abordés dans la PPE ou dans la LOM. Avis défavorable.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État.  - Cette proposition relève en effet plus de la LOM, qui inscrit pour la première fois dans la loi l'objectif de la neutralité carbone des transports en 2040.

Les trois quarts des investissements de l'État y seront ainsi consacrés. Retrait ?

Mme Cécile Cukierman.  - Je veux bien être naïve, mais il y a des limites ! Désengorger les vallées alpines par le Lyon-Turin, renforcer le fret ferroviaire et fluvial nécessiteront de l'énergie. Il y a un lien évident entre ce texte, le réchauffement climatique, les problèmes énergétiques et les transports. Réfléchissons de manière globale !

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Pour le moins ! La réduction des émissions de gaz à effet de serre passe en effet par les transports, comme par la rénovation des bâtiments, dont on parle depuis des années. Seulement, cela coûte une ruine ! Il y faudrait de l'argent public, de l'argent privé et de la planification. Pour le fret, ce serait plus facile de le faire. Il faut impérativement de l'investissement public pour lutter contre l'effet de serre.

M. Fabien Gay.  - On touche là aux limites de ce projet de loi. On ne peut annoncer une grande loi sur le climat et l'énergie sans aborder les transports, le logement et l'industrie, surtout si les autres lois sectorielles n'abordent pas les questions énergétiques.

Le volume de marchandises échangées devrait être multiplié par trois dans les vingt prochaines années. Or depuis l'ouverture à la concurrence du fret ferroviaire, sa part est passée de 16 % à 10 % ! Les investissements que vous annoncez, sur le terrain, personne ne les voit. Les lignes, les gares - il n'y en a pas de petites - ferment les unes après les autres, comme nous ne cessons de le constater. Vous avez même organisé la mort du Perpignan-Rungis en refusant d'investir. Depuis deux ans, vous ne menez pas une politique de développement du fret, telle est la réalité !

L'amendement n°261 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°325 rectifié bis, présenté par MM. Antiste, Jacquin, Duran et Roger, Mme Lepage, MM. Todeschini, Tissot, Kerrouche et Tourenne, Mmes Tocqueville et Jasmin, MM. Montaugé et Daudigny et Mme Monier.

Après l'alinéa 25

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° Au 8°, les mots : « a? l'horizon 2030 » sont remplacés par les mots : « en 2030 » ;

M. Maurice Antiste.  - Le 8° de l'article L. 100-4 du code de l'environnement dispose que la politique nationale de l'énergie a pour objectif de « parvenir a? l'autonomie énergétique dans les départements d'outre-mer a? l'horizon 2030, avec, comme objectif intermédiaire, 50 % d'énergies renouvelables a? l'horizon 2020 ».

L'Ademe a mené en Martinique, Guadeloupe et à La Réunion des études de faisabilité de l'autonomie énergétique à l'horizon 2030 : la production annuelle d'électricité à partir d'énergies renouvelables variables représenterait entre 35 % et 53 % de la production totale en 2030 pour la Guadeloupe et La Réunion. En Martinique, les gisements renouvelables pilotables étant moins importants, elle serait comprise entre 58 % et 73 % en 2030.

Bref, l'atteinte de l'autonomie énergétique est impossible, sauf à fournir un effort supplémentaire de maîtrise de la demande d'énergie couplé à une accélération du déploiement des énergies renouvelables.

Aussi, cet amendement fixe-t-il la date de l'objectif de l'autonomie énergétique dans les départements d'outre-mer à 2030 et non plus à « l'horizon 2030 ». En effet, la définition de l'horizon semble être une ligne imaginaire qui recule au fur et a? mesure que l'on avance (Sourires), comme le montre le report de l'objectif de 50 % du nucléaire a? 2035 au lieu de « l'horizon 2025 », ce qui est contraire aux engagements du candidat Macron...

Mme Marie-Noëlle Lienemann et M. Martial Bourquin.  - Très bien !

M. Daniel Gremillet, rapporteur.  - La mise en oeuvre concrète de l'objectif achoppant sur certaines difficultés, il vaut mieux retenir une date souple. D'autres objectifs sont ainsi formulés en référence à un horizon. Avis défavorable.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État.  - Sagesse, car nous partageons l'objectif.

M. Maurice Antiste.  - Le mot de sagesse me plaît. Au football, les prolongations n'excluent pas que le match prenne fin au terme des 120 minutes... C'est pareil ici.

M. Daniel Gremillet, rapporteur.  - Sagesse, à titre personnel.

M. Fabien Gay.  - Très bien !

L'amendement n°325 rectifié bis est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°250, présenté par M. Canevet.

Après l'alinéa 25

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° Le 8° est complété par les mots : « et obligation d'atteinte d'un indice de réflectance solaire de 100 pour 80 % des toitures et bâtiments » ;

M. Michel Canevet.  - Dans les départements d'outre-mer, il faut se fixer des objectifs ambitieux car le patrimoine bâti ne l'a pas toujours été dans les meilleures conditions.

L'augmentation de l'indice de réflectance solaire des toitures est préconisée par le GIEC et utilisée par de multiples États tiers, car elle est un moyen simple, efficace et abordable de renvoyer le rayonnement solaire et donc d'améliorer non seulement le confort des habitants - en particulier les plus précaires - mais aussi d'économiser les usages de climatisation ou de production de froid, émetteur de gaz à effet de serre.

M. Daniel Gremillet, rapporteur.  - C'est largement réglementaire. Un indice aussi précis figerait le droit dans un domaine qui évolue vite. De plus, l'hydroélectricité, la géothermie ou la biomasse sont également utilisées dans les départements d'outre-mer. Avis défavorable.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État.  - Même avis.

L'amendement n°250 est retiré.

Mme la présidente. - Nous avons examiné 43 amendements. Il en reste 354.

Prochaine séance aujourd'hui, mercredi 17 juillet, à 14 h 30.

La séance est levée à minuit et demi.

Jean-Luc Blouet

Direction des comptes rendus

Annexes

Ordre du jour du mercredi 17 juillet 2019

Séance publique

À 14 h 30 et le soir

Présidence : M. Vincent Delahaye, vice-président Mme Catherine Troendlé, vice-présidente

Secrétaires : MM. Dominique de Legge et Joël Guerriau

- Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à l'énergie et au climat (texte de la commission, n°658, 2018-2019)

Analyse des scrutins publics

Scrutin n°165 sur le texte élaboré par la commission mixte paritaire sur le projet de loi organique modifiant la loi organique n°2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution

Résultat du scrutin

Nombre de votants :342

Suffrages exprimés :337

Pour :337

Contre :0

Le Sénat a adopté

Analyse par groupes politiques

Groupe Les Républicains (145)

Pour : 144

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat

Groupe SOCR (72)

Pour : 72

Groupe UC (50)

Pour : 47

Abstentions : 3 - Mmes Anne-Catherine Loisier, Évelyne Perrot, Nadia Sollogoub

Groupe RDSE (23)

Pour : 21

Abstention : 1 - M. Jean-Yves Roux

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Jean-Marc Gabouty, Président de séance

Groupe LaREM (23)

Pour : 23

Groupe CRCE (16)

Pour : 16

Groupe Les Indépendants (13)

Pour : 13

Sénateurs non inscrits (6)

Pour : 1 - M. Philippe Adnot

Abstention : 1 - Mme Christine Herzog

N'ont pas pris part au vote : 4 - Mmes Sylvie Goy-Chavent, Claudine Kauffmann, MM. Jean Louis Masson, Stéphane Ravier

Scrutin n°166 sur l'amendement n°254, présenté par M. Fabien Gay et les membres du groupe CRCE, tendant à insérer un article additionnel avant l'article 1er du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à l'énergie et au climat

Résultat du scrutin

Nombre de votants :341

Suffrages exprimés :339

Pour :98

Contre :241

Le Sénat n'a pas adopté

Analyse par groupes politiques

Groupe Les Républicains (145)

Contre : 144

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat

Groupe SOCR (72)

Pour : 72

Groupe UC (50)

Pour : 6 - Mmes Annick Billon, Sophie Joissains, Anne-Catherine Loisier, MM. Jean-François Longeot, Jean-Pierre Moga, Mme Nadia Sollogoub

Contre : 43

Abstention : 1 - M. Gérard Poadja

Groupe RDSE (23)

Pour : 4 - M. Ronan Dantec, Mme Nathalie Delattre, MM. Joël Labbé, Olivier Léonhardt

Contre : 17

Abstention : 1 - M. Yvon Collin

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Jean-Marc Gabouty, Président de séance

Groupe LaREM (23)

Contre : 23

Groupe CRCE (16)

Pour : 16

Groupe Les Indépendants (13)

Contre : 13

Sénateurs non inscrits (6)

Contre : 1

N'ont pas pris part au vote : 5 - Mmes Sylvie Goy-Chavent, Christine Herzog, Claudine Kauffmann, MM. Jean Louis Masson, Stéphane Ravier