Sécurité de la Coupe du monde de football de 2022 (Procédure accélérée)

Mme le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l'État du Qatar établissant un partenariat relatif à la sécurité de la Coupe du monde de football de 2022.

La procédure accélérée a été engagée sur ce texte.

Discussion générale

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée, chargée de la mémoire et des anciens combattants .  - Je suis heureuse de vous présenter ce projet de loi signé à Doha le 5 mars 2021.

La France et le Qatar ont un partenariat stratégique dans les domaines de la défense, de la sécurité, de l'économie, des investissements, de la culture, de l'éducation et du sport. Il est particulièrement important dans le domaine de la sécurité des grands événements sportifs depuis les Jeux asiatiques de 2006. Il s'est approfondi avec le championnat de handball en 2015, puis de cyclisme en 2016 et d'athlétisme en 2019.

La France s'est donc engagée à accompagner le Qatar dans la préparation et la conduite de la sécurité de la Coupe du monde de football, qui se tiendra à Doha du 21 novembre au 18 décembre 2022. Il sera le premier pays arabe à accueillir un tel événement.

Le ministère de l'Intérieur français apporte une expertise de haut niveau afin d'accompagner les services qataris dans la préparation et la conduite de cette compétition. Une relation historique s'est nouée entre la gendarmerie française et les forces de sécurité intérieure qataries. Elle s'est illustrée par la mobilisation d'experts français lors de la Coupe de football des pays arabes en 2021, ce qui a permis d'évaluer les besoins pour 2022.

Ces échanges croisés ont pour objectif d'accompagner les forces qataries avant et pendant la compétition. C'est aussi une occasion de développer nos savoir-faire dans la perspective de la Coupe du monde de rugby de 2023 et les Jeux olympiques et paralympiques de 2024.

Cet accord offre un cadre juridique protecteur aux experts français. Il rend possible le déploiement d'une assistance technique et opérationnelle. Ce sera le premier outil juridiquement contraignant entre la France et le Qatar dans le domaine de la sécurité intérieure ; les précédentes coopérations, plus techniques, plus modestes, n'avaient pas donné lieu à une telle formalisation.

L'objectif est double : aider le Qatar à assurer dans les meilleures conditions la sécurité de la Coupe du monde - l'offre française porte sur la planification, le contre-terrorisme, la gestion de l'ordre public, le renseignement, la sécurité des installations et des mobilités, la cybersécurité ou encore la sécurité civile - et déployer des experts français au Qatar.

En l'absence d'accord, le personnel français déployé au Qatar aurait été soumis au droit local et exposé à des risques. Des garanties équivalentes au statut des forces en matière de coopération de défense leur sont ainsi offertes.

Rédigé sur la base de la réciprocité, cet accord détermine le statut juridique et les conditions de séjour des personnels français déployés au Qatar et des Qataris déployés en France. Ces experts sont tenus au respect de la législation de la partie d'accueil.

L'essentiel de la dépense liée aux actions de coopération incombe à la partie qui en bénéficie.

La partie d'envoi peut importer et réexporter en franchise de droits et taxes son matériel ou ses véhicules déployés dans la partie d'accueil.

En matière pénale, l'accord prévoit un partage de juridiction. Les infractions commises par un membre de la partie d'envoi dépendent de la compétence des juridictions de la partie d'accueil, qui peut toutefois être dévolue à la partie d'envoi si elles sont commises dans le cadre du service.

En cas de poursuites devant la partie d'accueil, la personne concernée bénéficie du droit à un procès équitable. En cas de condamnation, les demandes visant à purger la peine dans le pays d'envoi seront examinées avec bienveillance. La peine de mort, toujours en vigueur au Qatar, ne pourra être ni requise ni prononcée.

Des réformes ont été engagées par le Qatar, notamment concernant les droits des travailleurs étrangers pour lesquels a été supprimé le système dérogatoire qui leur était imposé, la kafala. Ces progrès doivent être approfondis. Nous maintiendrons le dialogue sur ce point avec les autorités qataries.

Je vous invite à approuver cet accord en adoptant ce projet de loi. (M. Jean-Claude Requier applaudit.)

M. Olivier Cadic, rapporteur de la commission des affaires étrangères .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC ; M. Bruno Sido applaudit également.) Ce projet de loi a été adopté par la commission le 9 février 2022.

Les groupes CRCE et GEST ont souhaité le retour à la procédure normale ; rappelons toutefois qu'un tel projet de loi ne peut être amendé.

Cet accord, signé le 5 mars 2021 à Doha, concrétise l'ambition politique tracée par la déclaration d'intention conclue au nom des deux gouvernements le 28 mars 2019, en lui donnant un cadre juridique robuste.

Le Qatar a été désigné par la FIFA en 2010 pour accueillir la Coupe du monde de 2022. L'événement se tiendra en novembre et décembre 2022 pour tenir compte des contraintes climatiques. Néanmoins, les douze stades seront climatisés. Ce sera le plus grand événement sportif jamais organisé dans le monde arabe.

Le Qatar pourrait accueillir jusqu'à 1,5 million de supporters, un nombre considérable pour un si petit pays. À titre d'illustration, cela correspondrait pour la France à l'accueil de 40 millions de visiteurs.

Le Qatar sera confronté à de nouvelles questions de sécurité : gestion de la menace terroriste, hooliganisme, mouvements de foule, cyberattaques, mais aussi à certaines problématiques que, pour des raisons culturelles, il n'est pas habitué à gérer : contrefaçon, consommation d'alcool, actions d'organisations contestataires...

Pour relever ces défis, le Qatar a cherché à développer, dès 2010, des partenariats avec différents États, dont la France, pays avec lequel il a déjà développé une forte coopération bilatérale en matière de sécurité et de défense. Le Qatar est le deuxième partenaire opérationnel de la France dans le Golfe, après les Émirats arabes unis. Cette coopération a été renforcée par la signature de contrats majeurs, comme le démontre l'achat récent de 36 Rafale.

Le Qatar est également un partenaire stratégique en matière de lutte contre le terrorisme et la radicalisation.

Le Président de la République et l'émir du Qatar ont signé le 7 décembre 2017 une lettre d'intention visant à renforcer la coopération bilatérale en matière de lutte contre le terrorisme et la radicalisation. Un dialogue stratégique a été mis en place en février 2019.

L'émirat joue un rôle actif au sein de la coalition internationale contre Daech, à laquelle il apporte un soutien logistique important en mettant à disposition la base militaire d'Al-Udeid et en fournissant un appui logistique à la force conjointe du G5 Sahel. Enfin, le Qatar et les Nations unies ont récemment convenu de l'ouverture d'un bureau à Doha du programme des Nations unies pour la lutte contre le terrorisme.

Le Qatar a réalisé d'importantes réformes en faveur des conditions de travail des immigrés. Il est le premier État de la région à avoir abrogé en 2016 le système de la kafala, qui oblige l'expatrié à dépendre d'un parrain, et à avoir instauré un salaire minimum pour les travailleurs expatriés non qualifiés. Ces efforts doivent être poursuivis. Le nombre d'accidents du travail reste trop élevé. Une meilleure indemnisation des victimes et de leurs familles doit être recherchée.

La peine de mort est toujours en vigueur au Qatar et continue d'être prononcée, mais le pays applique depuis 2003 un moratoire sur les exécutions, mis à part le cas de l'exécution d'un ressortissant népalais, condamné pour meurtre en 2020.

La coopération bilatérale entre la France et le Qatar en matière de gestion des grands événements sportifs a commencé lors des Jeux asiatiques de 2006. Elle s'est poursuivie lors des championnats du monde de handball en 2015, de cyclisme en 2016, d'athlétisme en 2019 et pour la Coupe arabe des nations de football de 2021.

Pour la Coupe du monde, le partenariat projeté est encore plus ambitieux, et nécessitait une formalisation juridique pour sécuriser le déploiement de nombreux experts sur le terrain. Cet accord peut se définir comme une offre de services de la France, de nature à couvrir l'ensemble du spectre des besoins de sécurité d'un grand événement sportif. Sa mise en oeuvre pourra notamment s'appuyer sur les grandes directions opérationnelles du ministère de l'Intérieur pour des missions de conseil, d'accompagnement et d'appui opérationnel. La partie qatarienne doit formuler plus précisément ses besoins : l'offre de coopération française sera alors ajustée.

L'accord prévoit que les actions de coopération seront essentiellement financées par la partie qatarienne.

Cet accord prévoit également des garanties fortes au bénéfice des agents français du ministère de l'Intérieur qui se rendraient sur le territoire qatarien : droit à un procès équitable, protection contre l'application de la peine capitale ou d'autres traitements inhumains et dégradants.

Ces dispositions offriront une parfaite sécurité juridique aux agents français qui participeront aux activités de coopération, jusqu'au 30 juin 2023, à l'instar de celles offertes aux agents du ministère de la Défense par l'accord bilatéral relatif au statut des forces.

Les retombées de la Coupe du monde sont estimées à 200 milliards de dollars, ce qui offre des opportunités importantes à nos entreprises. C'est aussi l'occasion de nous préparer à l'accueil de la Coupe du monde de rugby en 2023 et des Jeux olympiques en 2024.

Les autorités qatariennes n'ont, à ce jour, pas notifié l'accomplissement des procédures nationales requises pour l'entrée en vigueur de l'accord, qui sera examiné par l'Assemblée nationale à la reprise des travaux parlementaires.

En conséquence, je préconise l'adoption de ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains)

M. François Bonneau .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Les relations franco-qatariennes ont pris leur essor au début des années 1990. La volonté qatarie de diversifier l'économie du pays au-delà du secteur pétrolier a conduit à élargir le spectre de nos coopérations à de nombreux secteurs.

En matière de sécurité et de défense, pilier essentiel de notre coopération, la visite du Président de la République le 7 septembre 2017 a permis la signature d'accords majeurs dans les domaines de la lutte contre le terrorisme et le blanchiment.

Le 11 février 2019, nos gouvernements ont signé une déclaration d'intention pour renforcer notre partenariat dans tous ces domaines.

Cet accord constitue le premier instrument juridiquement contraignant entre nos deux États dans le domaine de la sécurité intérieure.

La France porte l'ambition d'accompagner le Qatar, pays parmi les plus sûrs au monde, donc peu habitué à gérer un événement aussi sensible et complexe.

Les enjeux économiques de la Coupe du monde de football, estimés à 200 milliards de dollars, offrent des opportunités importantes à nos entreprises.

Notre coopération policière peut être dynamisée, de manière à valoriser l'expérience de nos services.

Nous devons en même temps garder conscience de la condition sociale des migrants travaillant sur les chantiers de la Coupe du monde. Le Qatar a adopté des lois en leur faveur, mais elles sont encore peu appliquées. D'autres sujets appellent notre vigilance, notamment les droits des femmes et la liberté d'expression. La France doit user de son influence en la matière.

Nous voterons cet accord, qui offre la sécurité juridique nécessaire à nos agents, favorise la sécurisation de la région et met en valeur le savoir-faire français.

Le Qatar est un partenaire stratégique essentiel de la lutte contre le terrorisme et apporte un solide soutien logistique à la communauté internationale et au G5 Sahel.

Il faut cependant que ce pays améliore les droits des travailleurs étrangers.

Le contexte est plus concurrentiel qu'autrefois. Si les autorités qatariennes continuent à s'appuyer sur des partenariats historiques, elles sont aussi à la recherche d'autres soutiens. Aussi, il nous semble important d'approuver cet accord. (Applaudissements sur les travées du groupe UC ; M. Bruno Sido applaudit également.)

M. Éric Gold .  - (Applaudissements sur les travées du RDSE) Cette convention ne fera finalement pas l'objet d'une procédure simplifiée, ce qui me semble sain compte tenu des enjeux en présence. Elle porte sur la sécurité de la Coupe du monde de foot de 2022. La France mettra notamment à disposition du personnel et du matériel pour une coopération policière.

Le Qatar, l'un des pays les plus sûrs du monde, n'est pas préparé pour faire face à des débordements lors d'un événement d'une telle ampleur.

Ce petit émirat est connu pour son gaz, son pétrole et donc pour son empreinte carbone désastreuse. Les conditions de travail des travailleurs étrangers, soumis à la kafala, ont fait scandale jusqu'à conduire certains à appeler au boycott de l'événement. Cette coupe du monde est une aberration écologique avec des structures pharaoniques promises à une quasi-inactivité une fois la compétition achevée.

Les stades seront dotés de super-climatiseurs, comme en 2019 pour l'athlétisme, mais cela ne suffira pas à offrir des conditions acceptables pour les sportifs. Doit-on pour autant boycotter cet événement ?

Le Qatar a fait de réels efforts en supprimant la kafala et en organisant des élections nationales.

Du reste, les ONG n'appellent pas au boycott - la politique de la chaise vide a ses limites - mais demandent que la situation sociale et écologique s'améliore.

Les grandes organisations sportives internationales ne doivent plus se contenter d'être des chambres d'enregistrement. Ces compétitions doivent répondre à des enjeux éthiques. (Applaudissements sur les travées du RDSE)

M. Pierre Ouzoulias.  - Très bien !

M. Mickaël Vallet .  - Ce projet de loi, certes technique, doit nous conduire à nous interroger plus largement.

Sur le texte et ses effets juridiques, le propos est simple. La France est un partenaire ancien du Qatar. Nous partageons notre expertise en matière de défense et de sécurité.

Les 200 milliards de dollars que va générer la Coupe du monde de football offrent des perspectives à nos entreprises dans cette cité-État qui représente le sixième excédent commercial français.

Cet accord sécurise l'intervention du personnel français. La peine de mort notamment ne pourra pas leur être appliquée. À ce stade, si j'ose dire, tout irait pour le mieux dans le meilleur des mondes.

Malgré tout, la France doit rester crédible dans ses choix de coopération. Certains ont qualifié cet événement de Coupe du monde de la honte. La signification politique de notre engagement interroge. Une information judiciaire est ouverte dans plusieurs pays, dont le nôtre, pour des faits de corruption autour de la Coupe du monde.

On peut également déplorer les conditions de travail des ouvriers étrangers au Qatar malgré la récente suppression de la kafala - qui équivaut à l'établissement d'un salaire minimum - et l'ouverture d'un bureau de l'organisation internationale du travail (OIT). De telles avancées restent néanmoins insuffisantes d'autant que les accidents du travail sont encore nombreux.

Quid en outre des émissions de CO2, dont le Qatar possède le record du monde par habitant ?

On ne peut que s'interroger sur la fin de non-recevoir opposée à nos services de renseignement sur les soupçons de financement par le Qatar de mosquées islamistes sur notre territoire.

Cet événement sportif et sa mise en oeuvre appelaient-ils un tel degré d'implication de la diplomatie française ?

Lors de sa tournée dans le Golfe, le Président de la République n'a pas abordé ces différents sujets.

Notre groupe ne pourra pas voter ce texte. Nous nous abstiendrons uniquement en raison de la sécurité juridique dont bénéficieront nos experts. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

M. Xavier Iacovelli .  - Nous sommes appelés à débattre d'un texte et d'un contexte ; le contexte, c'est celui des détestables soupçons de corruption pesant sur la FIFA.

Pourtant, il ne s'agit pas de voter sur le choix du Qatar pour organiser la Coupe du monde. Il est acquis depuis 2010, et ne relève pas du Parlement. L'évènement se tiendra cette année, dans des conditions météorologiques difficiles, après des préparatifs dont le coût humain a été élevé.

Mais ce chantier a poussé le Qatar à se moderniser, notamment en matière de droit du travail afin de se conformer aux normes internationales. Il reste encore du chemin à parcourir pour atteindre nos standards en matière de droits de l'homme.

Le Qatar a institué un salaire minimum en 2020 pour les expatriés non qualifiés, après avoir abrogé la kafala en 2016, suivi par l'Arabie saoudite et les Émirats arabes unis.

Cet accord de sécurité intérieure témoigne de notre savoir-faire en cette matière. Il fait rayonner notre expertise et apporte d'indispensables garanties juridiques aux agents français déployés au Qatar.

Notre groupe votera ce texte.

M. Joël Guerriau .  - La Coupe du monde de football fait vibrer des millions de personnes tous les quatre ans. Le pays organisateur de la compétition bénéficie de nombreuses retombées. Le Qatar a été choisi en 2010 et a demandé à la France de l'aider pour assurer la sécurité de l'événement.

La France a montré ses capacités en matière de sécurisation des grands évènements, comme en 1998 et en 2016. Elle accueillera prochainement la Coupe du monde de rugby et les Jeux olympiques.

Nos collègues communistes ont souhaité un débat sur ce texte ; je le comprends.

Le choix du Qatar interroge en raison du climat et des conditions de travail des immigrés sur son sol. Diverses sources font état de la mort de dizaines d'entre eux, employés sur les chantiers. La lumière doit être faite sur ces faits.

Le calendrier de la compétition a été adapté pour répondre aux contraintes climatiques.

En 2014, au Brésil, des scandales relatifs aux conditions de travail ont également éclaté. Cela relève de la responsabilité de la FIFA. Aucun jeu ne peut valoir la perte d'une vie humaine.

Le foot a apporté beaucoup à la diplomatie, comme d'autres événements sportifs.

Il n'a pas été question de boycotter les Jeux de Pékin. Ces événements permettent de faire rayonner notre pays et nos valeurs.

Pour autant, il convient de mieux préserver la sécurité des individus. Tel est l'objectif de cet accord. « Un match après l'autre », disait Luis Fernandez. Cela vaut aussi en matière de diplomatie.

Le groupe INDEP souhaite une meilleure protection des travailleurs immigrés au Qatar et votera ce texte.

M. Gilbert Bouchet .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Le retour à la procédure normale pour cette convention nous offre l'occasion de débattre.

Permettez-moi de saluer nos athlètes, qui ont été privés si longtemps de compétitions et qui vont nous apporter joie et espoir. Ils représentent des valeurs universelles sur lesquelles nous ne devons pas céder.

L'organisation de la Coupe du monde de football s'inscrit dans un contexte sécuritaire compliqué.

En décembre 2017, la France et le Qatar ont engagé une coopération en matière de lutte contre le terrorisme et le blanchiment d'argent, essentielle à la sécurité de notre pays.

Nous savons que le Qatar apporte un appui logistique au G5 Sahel. Mais quelles sont les mesures concrètes en matière de lutte contre le radicalisme et le financement du terrorisme ?

La France apportera son concours à la sécurité de la Coupe du monde de football. Le savoir-faire de nos experts est reconnu.

En tant que membre du groupe Sport, je comprends certaines interrogations sur les droits des travailleurs, mais elles ne relèvent pas de ce texte qui concerne la sécurité de la compétition.

Pour cette raison, notre groupe votera majoritairement pour ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Guillaume Gontard .  - (Applaudissements sur les travées du GEST) Des milliers de vies humaines ont été emportées en raison de conditions de travail sans précédent depuis le Moyen-Âge - 6 500 selon le Guardian -, 200 milliards de dollars engloutis dans des stades à usage unique, des dépenses énergétiques considérables pour limiter les températures : tel est l'héritage de l'attribution par la FIFA de la Coupe du monde de la honte au Qatar, grâce au funeste appui de l'ancien président Sarkozy... (Exclamations et protestations à droite)

Triste année 2022 : les valeurs du sport sont devenues le paillasson d'un capitalisme sans vergogne. Les écologistes ne sont pas les ennemis du sport, bien au contraire ! (On en doute sur les mêmes travées.) Nous nous levons contre cette aberration mercantile ! Quel footballeur peut accepter de jouer dans un stade qui sent l'odeur de la mort ? (Nouvelles exclamations à droite) Nous condamnons cette folie meurtrière. Jusqu'où fermerons-nous les yeux pour vendre nos Rafale ?

Ce projet d'accord est moralement inacceptable. Laissons le Qatar organiser un événement qu'il a obtenu contre le sens commun.

La France qui a organisé un championnat d'Europe de foot après les attentats de 2015 n'a nul besoin d'entraînement dans la perspective de la Coupe du monde de rugby ou des Jeux olympiques, contrairement à ce qui est dit dans le rapport. Notre commission nous a habitués à plus d'objectivité.

Merci au groupe CRCE d'avoir souhaité débattre de ce texte. Même si on se place comme vous du côté de la Realpolitik, ce projet d'accord n'est pas opportun.

Le Qatar a longtemps financé le terrorisme et les Frères musulmans sur notre sol. Soyons cohérents et rejetons ce texte. (Applaudissements sur les travées du GEST ; Mme Cathy Apourceau-Poly applaudit également.)

Mme Michelle Gréaume .  - Cette Coupe du monde de football devrait être boycottée pour plusieurs raisons.

Ce mondial sera-t-il celui de la fête ou de la honte ? Les suspicions sur le mode d'attribution de cet évènement sont nombreuses. Les pressions politiques, notamment de l'Élysée, sont connues. Le Qatar avait le dossier le moins bien noté ! Le mode d'attribution des compétitions internationales doit impérativement être revu. Je rejoins la tribune de Marie-George Buffet dans L'Humanité à ce propos.

Ensuite, la préparation de la compétition interroge. Pour construire six des huit stades, des ouvriers immigrés asiatiques ont travaillé dans des conditions inacceptables. Quelque 6 750 d'entre eux ont perdu la vie - et non 37, comme le prétend le pays.

Pendant la compétition, le pire est à craindre. Rappelons que, dans ce pays, l'homosexualité est réprimée, la femme soumise à une tutelle. Si la consommation d'alcool n'est pas formellement interdite, un grand flou l'entoure. Dans un tel contexte, devons-nous vraiment contribuer à la sécurisation de l'événement ?

Cette convention, tout comme celle dont l'examen a été repoussé, doit nous interroger sur nos relations avec le Qatar.

Mme Nathalie Goulet.  - C'est vrai !

Mme Michelle Gréaume.  - Le Royaume a besoin de redorer son blason. Il serait naïf de penser que Doha agit par amour du sport ! C'est bien de sportwashing qu'il s'agit.

Notre partenariat privilégié avec le Qatar a des retombées cultuelles, éducatives et en matière de transports. Mais surtout, nous le savons bien, en matière militaire : le Qatar est notre deuxième acheteur d'armes - après l'Arabie saoudite, cette autre grande démocratie... Et la France se satisfait fort bien d'une relation qui pèse plusieurs dizaines de milliards d'euros dans sa balance commerciale.

Pour notre part, nous n'acceptons pas des discours sur un pays en voie de modernisation. La France ne s'enorgueillit-elle pas d'être le pays des droits de l'homme ? Elle est aussi engagée dans la lutte contre le terrorisme, alors que le Qatar est fortement soupçonné de financer des groupes terroristes.

Le groupe CRCE votera contre ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE ; Mme Nathalie Goulet applaudit également.)

M. Olivier Cadic, rapporteur.  - L'attribution de la Coupe du monde au Qatar suscite des interrogations légitimes, c'est entendu. Reste que, comme l'a fait observer M. Iacovelli, nous ne sommes pas là pour en juger. Il s'agit de savoir si nous souhaitons coopérer avec le Qatar pour que cet événement se tienne dans les meilleures conditions possibles. Pour la commission, la réponse est oui.

Mme Nathalie Goulet.  - Nos relations avec le Qatar sont extrêmement difficiles. Ce pays héberge les Frères musulmans, en particulier le cheikh Youssef al-Qaradawi, qui, de là, propage ad omnes sa mauvaise parole. Par ailleurs, notre convention fiscale avec le Qatar fait de la France un paradis fiscal. Pour ces deux raisons, je voterai contre le texte.

Le projet de loi est adopté.

La séance est suspendue quelques instants.