Loi de finances rectificative pour 2022

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi de finances rectificative (PLFR) pour 2022, adopté par l'Assemblée nationale.

Nominations à une éventuelle CMP

M. le président.  - Des candidatures pour siéger au sein de l'éventuelle commission mixte paritaire sur ce texte ont été publiées.

Elles seront ratifiées si la Présidence n'a pas reçu d'opposition dans le délai d'une heure prévu par notre règlement.

Discussion générale

M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique .  - (Applaudissements sur les travées du RDPI) Je suis très heureux de vous retrouver pour l'examen du deuxième volet de notre paquet « pouvoir d'achat ». Une première étape a été franchie avec l'adoption du projet de loi Pouvoir d'achat. Je vous remercie pour la qualité des débats et souhaite que cette discussion se déroule dans la même atmosphère constructive.

Quel est le contexte ? L'économie française résiste. Au deuxième trimestre, le PIB a crû de 0,5 % : c'est un des meilleurs résultats de la zone euro. Nous atteindrons bien l'objectif de 2,5 % de croissance en 2022. Pour nos compatriotes et nos entreprises, c'est une victoire.

L'inflation continue de progresser. Nous sommes au coeur du pic : elle restera élevée jusqu'à la fin de l'année ; mais nous anticipons une baisse en 2023 grâce à la réorganisation des chaînes de valeur, à la diversification de l'approvisionnement en matières premières et à la politique monétaire. C'est donc un cap difficile à passer, qui justifie les mesures d'accompagnement que je vous présente.

Le premier volet porte sur l'énergie, qui explique la moitié de l'inflation. Nous maintenons le bouclier énergie sur le gaz et l'électricité jusqu'à la fin de l'année : cette mesure de l'automne 2021 a contenu la flambée inflationniste. La France a ainsi le taux d'inflation le plus faible de la zone euro.

Au niveau européen, nous nous battons pour dissocier définitivement le prix de l'électricité de celui du gaz, car c'est écologiquement inacceptable, économiquement contre-productif et socialement coûteux. Nous ne lâcherons rien jusqu'à obtenir gain de cause.

L'Assemblée nationale a voté une aide de 230 millions d'euros pour les trois millions de Français qui se chauffent au fioul. Je lèverai le gage et propose d'associer le Parlement au ciblage des ménages bénéficiaires.

M. François Bonhomme.  - Qu'est-ce qui se passe ?

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Deuxième sujet, le prix du carburant. L'Assemblée nationale a proposé de faire passer la ristourne à 30 centimes en septembre et octobre et à 10 centimes en novembre et décembre. Les sénateurs ont d'autres idées, mais il me semble sage de nous en tenir à la proposition de l'Assemblée nationale, qui couvre tous nos compatriotes, qu'ils travaillent ou non. Avec les remises consenties par les pétroliers et les distributeurs, le prix du carburant serait contenu à environ 1,50 euro du litre.

Faut-il faire plus pour ceux qui travaillent ? D'autres dispositifs sont prévus : doublement du plafond de la prime carburant de 200 à 400 euros ; cumul possible avec la prise en charge de l'abonnement de transport collectif ; revalorisation du barème kilométrique de l'impôt sur le revenu de 10 % en 2022 et, je le confirme, en 2023.

Avec l'ensemble de ces mesures, nous conjuguons réduction du prix à la pompe pour tous les Français et mesures ciblées pour ceux qui travaillent.

Troisième volet, le travail. La meilleure réponse au problème du pouvoir d'achat est la juste rémunération du travail. C'est le fil rouge de notre action politique depuis 2017, jusqu'au plein-emploi. La monétisation des RTT est une mesure juste et efficace.

M. David Assouline.  - Non, ce n'est pas juste !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Le relèvement du plafond d'exonération fiscale des heures supplémentaires de 5 000 et 7 500 euros est opportun.

M. Bruno Retailleau.  - Très bien !

M. Pascal Savoldelli.  - Vous êtes contents !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Le caractère définitif de la mesure garantit sa justice. Cela reste notre philosophie, personne ne me convaincra qu'il vaut mieux inciter les Français à travailler moins pour gagner moins. (Protestations sur les travées des groupes CRCE et SER)

Le groupe Les Républicains a proposé que les entreprises de 20 à 250 salariés voient leurs charges sociales patronales réduites de 50 centimes - elles le sont déjà de 1,50 euro pour les entreprises de moins de 20 salariés. C'est constructif et utile : j'y suis favorable.

M. François Bonhomme.  - C'est le chemin de Damas !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Troisième sujet, les collectivités territoriales, dont vous êtes les représentants.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances.  - Ah, cela ne vous a pas échappé !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Les députés, dans leur sagesse, ont commencé à tenir compte de l'impact de l'inflation sur les collectivités territoriales. Le Gouvernement a accepté de faire davantage.

M. François Bonhomme.  - Quelle souplesse !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - À l'initiative de Mme Pires Beaune, nous avons accepté, preuve d'oecuménisme (marques d'ironie à gauche et à droite), 180 millions d'euros de dispositifs ciblés sur les 6 000 collectivités les plus en difficultés, en particulier outre-mer. Nous avons aussi accepté de compenser la hausse du RSA à hauteur de 120 millions d'euros pour les départements. Le débat, j'en suis sûr, ne s'arrêtera pas là : je suis disposé à faire plus attention aux collectivités territoriales qui ont réellement besoin de ce filet de sécurité.

Mais je sais que vous êtes aussi attachés que moi à la bonne tenue des comptes publics. Pour cela, il faut demander des efforts à tous, y compris aux collectivités territoriales. J'en appelle à votre sens des responsabilités.

Enfin, la taxation des superprofits défraie la chronique depuis plusieurs semaines  Ah ! » à gauche). Le groupe UC a déposé des amendements sur le sujet.

Mme Éliane Assassi.  - Nous aussi !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - J'aurais été déçu du contraire !

Je comprends le raisonnement, dicté par un souci de justice que je soutiens. (Marques de satisfaction moqueuses à gauche) L'État ne doit pas porter seul le fardeau de l'inflation ; il est légitime que les entreprises en prennent leur part.

Rappelons cependant que l'immense majorité des petites entreprises et des indépendants sont victimes de l'inflation qui renchérit leurs intrants ; elles connaissent aussi des difficultés dans les délais d'approvisionnement et les recrutements.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Terrible !

Mme Éliane Assassi.  - On ne vous parle pas de ces entreprises-là !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Beaucoup d'entreprises ont aussi revalorisé les salaires : c'est un meilleur moyen de lutter contre l'inflation que d'être taxé. (Protestations à gauche) J'appelle toutes les entreprises qui le peuvent, à le faire.

M. Vincent Eblé.  - Alors, imposez-le !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Je peux entendre que les entreprises ne s'engagent pas pour 2023, mais il y a aussi l'intéressement, la participation, la prime défiscalisée...

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Ce ne sont pas des salaires !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Il y a aussi des entreprises qui font des bénéfices importants. CMA CGM, Engie, Total restituent l'argent, mais directement aux Français : c'est plus efficace. (Protestations à gauche)

M. Vincent Éblé.  - Mais moins obligatoire !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Je le dis au groupe UC : ne multiplions pas les taxes, ce n'est d'ailleurs pas dans votre ADN politique. (Marques d'ironie à gauche)

M. David Assouline.  - Alors pourquoi d'autres pays européens l'ont-ils fait ?

M. Bruno Le Maire, ministre.  - De plus, une telle taxe frapperait indifféremment toutes les entreprises. La remise à la pompe, elle, va directement dans les poches de nos compatriotes qui préfèrent voir l'essence à 1,50 euro qu'une nouvelle ligne budgétaire.

M. Christian Cambon.  - C'est sûr !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - La baisse des impôts renforce l'attractivité de notre territoire. La Grande-Bretagne, l'Italie ont des entreprises productrices qui extraient du pétrole et leur taux de prélèvements obligatoires est inférieur de dix à quinze points au nôtre. Quand on est le plus taxé des pays européens, on n'ajoute pas une nouvelle taxe ! (Applaudissements sur les travées du RDPI et sur quelques travées du groupe Les Républicains)

M. David Assouline.  - M. Retailleau est content !

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Merci Les Républicains !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - La seule chose qui menace la démocratie, c'est l'ennui. Je suis convaincu qu'il y aura des débats au Sénat, mais dans le respect de chacun.

Enfin, nous proposons la suppression de la contribution sur l'audiovisuel public (CAP), qui rendra 138 euros de pouvoir d'achat aux ménages.

M. David Assouline.  - Ce n'est pas vrai ! (Mme Marie-Pierre de La Gontrie proteste également.)

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Nous la remplaçons par un dispositif de financement durable de l'audiovisuel public.

M. David Assouline.  - Ce n'est pas vrai !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Je vous remercie de votre présence aujourd'hui, un 1er août. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Merci d'être passé, n'hésitez pas à rester ! (Sourires)

M. Gabriel Attal, ministre délégué chargé des comptes publics .  - Depuis deux ans, face aux aléas, aux incertitudes et aux soubresauts, notre réponse n'a pas varié : à grands défis, grands moyens.

Pendant la pandémie, le « quoi qu'il en coûte » a été un instrument inédit pour sauver nos entreprises et préserver les compétences des salariés et le pouvoir d'achat. La France des entrepreneurs a redécouvert l'État-providence.

Nous ne perdons pas notre boussole : préparer l'avenir, par la valorisation du travail et la transition écologique et énergétique.

Nous n'aurions pu le faire si nous n'avions pas remis, dès 2017, de l'ordre dans nos comptes, en repassant en 2018 sous les 3 % de déficit public et en sortant de la procédure pour déficits excessifs, ce qui nous a permis de regagner de la crédibilité auprès de nos partenaires européens et de lancer un plan de relance historique.

Nous continuons à protéger nos concitoyens, à amortir le coût de l'inflation en maintenant le cap fixé en 2017, en poussant davantage les feux de notre stratégie : moins d'impôts, moins de dette, plus de croissance.

Cela passe par la recherche du compromis...

M. David Assouline.  - Avec la droite !

M. Gabriel Attal, ministre délégué.  - ... et la responsabilité. La première est bien connue dans cet hémicycle, je l'ai constaté en travaillant avec les différents groupes. Je suis persuadé qu'il en sera de même dans ce débat.

M. David Assouline.  - Entre la droite et la droite !

M. Gabriel Attal, ministre délégué.  - Tenir nos comptes est un enjeu absolu de crédibilité et de pérennité de nos services publics. C'est pourquoi ce PLFR est un texte de stabilité - de notre politique - et de dignité - nous aidons les Français à vivre quand la vie est trop chère, sans nouvel impôt.

L'effort massif de 44 milliards d'euros se décompose en trois blocs - préserver le pouvoir d'achat, préparer l'avenir, honorer nos engagements financiers - qui traduisent notre ambition, mais aussi le cadre contraint de notre action. Ce texte n'est pas une correction à la marge, mais un puissant réacteur au service de notre économie et de notre cohésion, qui permet de dépenser moins et de gagner plus.

M. Jean-François Husson, rapporteur général.  - Ah oui ! (Sourires)

M. Gabriel Attal, ministre délégué.  - Dépenser moins avec le bouclier tarifaire, avec les aides aux déplacements, avec la suppression de la contribution à l'audiovisuel public.

Gagner plus, avec la revalorisation des prestations, des retraites et du point d'indice, avec la hausse du plafond d'exonération des heures supplémentaires et la monétisation des RTT.

M. Philippe Tabarot.  - Grâce à qui ?

M. Gabriel Attal, ministre délégué.  - Nous serons attentifs à vos propositions.

Nous préparons l'avenir, car un pays qui ne tient pas ses comptes n'est pas un pays libre et fort. (M. Vincent Segouin approuve.) Nous devons aussi renforcer notre souveraineté industrielle et notre transition énergétique ; d'où la prise de contrôle à 100 % d'EDF et la prolongation du bonus écologique pour changement de véhicule. Nous mettons en place la facturation électronique, outil de lutte contre la fraude. La majorité sénatoriale propose la carte Vitale biométrique ; nous y sommes favorables.

L'avenir, c'est l'apprentissage, avec 1,8 milliard d'euros pour France Compétences et 750 millions d'euros pour les primes d'apprentissage, dans le prolongement du succès de notre politique - 700 000 apprentis, contre moins de 300 000 en 2017.

Il y aura des débats, et des questions. Devons-nous priver notre modèle social de ressources indispensables avec des baisses d'impôts massives et non ciblées ? Non. Devons-nous nous priver de toute marge de manoeuvre pour investir ? Non.

La guerre en Ukraine nous a fait changer d'époque. La croissance résiste, mais nos finances publiques sont menacées par la remontée de l'inflation et des taux d'intérêt qui alourdit la charge de la dette de 17 milliards d'euros - deux fois le budget du ministère de la Justice... La parenthèse de l'emprunt gratuit s'est refermée.

Nous préférons les mesures ciblées et temporaires et sommes passés du « quoi qu'il en coûte » au « combien ça coûte ». (M. Pascal Savoldelli ironise.)

Maintenir notre déficit en dessous de 5 % du PIB en 2022 et le ramener à 3 % à la fin du quinquennat : nous assumons de tenir les comptes face aux grands défis devant nous. Laisser filer les comptes et relever les impôts sont des lignes rouges.

Ce texte est capital par son contexte, par les moyens financiers exceptionnels qu'il déploie, par la suppression d'un deuxième impôt en cinq ans, la CAP - le financement de l'audiovisuel public étant assuré par le fléchage d'une fraction de TVA plutôt que par des crédits budgétaires ; de toute façon, son indépendance est garantie.

M. David Assouline.  - Ce n'est pas vrai !

M. Gabriel Attal, ministre délégué.  - Fallait-il consulter davantage ? Nombre de rapports ont déjà été publiés, comme celui de MM. Hugonet et Karoutchi (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; MPascal Savoldelli proteste.)

M. Vincent Éblé.  - Flatteur !

M. Gabriel Attal, ministre délégué.  - Ils montrent bien à quel point la CAP est obsolète, injuste et datée.

M. David Assouline.  - Ça, nous le disons depuis longtemps, mais vous n'avez rien fait pendant cinq ans.

M. Gabriel Attal, ministre délégué.  - Nous devons également trouver un équilibre en matière de soutien aux collectivités territoriales. Le filet de sécurité de l'Assemblée nationale traduit bien notre esprit de dialogue : l'article 4 ter a été amendé par la députée socialiste Pirès Beaune...

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Ça va, ça fait quatre fois que vous le dites !

M. Gabriel Attal, ministre délégué.  - Nous devons aborder le financement des collectivités territoriales, car il y a urgence, mais sans engager de grand débat : attendons le projet de loi de finances pour cela.

De nombreux concitoyens peinent à obtenir un rendez-vous pour renouveler leur carte d'identité. Il est justifié de renforcer le dispositif : l'Assemblée nationale a voté une dotation de 10 millions d'euros et nous soutiendrons l'amendement de M. le rapporteur général.

M. Vincent Éblé.  - Avec quelle contrepartie ?

M. Gabriel Attal, ministre délégué.  - Cessons d'opposer finances locales et finances de l'État : il n'y a qu'un seul contribuable, un seul citoyen, que nous devons servir. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) L'État doit soutenir ceux qui sont confrontés à l'envolée des prix, nos concitoyens comme les entreprises et les collectivités. Tel est l'objet de ce PLFR.

Depuis la crise sanitaire, la France s'est habituée à une réponse permanente des pouvoirs publics. Or il faut trouver le bon équilibre, dans le contexte de dégradation préoccupante de nos finances publiques. Le ministre des comptes publics vient encore de déclarer qu'on serait passé du « quoi qu'il en coûte » au « combien ça coûte ». Combien ? Pas moins cher ; j'en veux pour preuve les 40 milliards d'euros budgétés pour répondre à la crise...

Ce PLFR prend acte de la dégradation de la situation économique, avec une prévision de croissance qui baisse de 4 à 2,5 %. Les bonnes nouvelles viennent de la croissance au deuxième trimestre, meilleure qu'attendue, mais les indicateurs conjoncturels sont au plus bas. Le FMI vient de revoir à la baisse sa prévision de croissance pour 2023. Ce contexte inflationniste dégrade nos perspectives de croissance et pousse les taux d'intérêt à la hausse, notamment sur les obligations souveraines.

Les mesures prises par l'État - bouclier tarifaire, remise à la pompe, indemnité inflation - ont eu des effets positifs sur l'évolution des prix et les revenus des agents, mais elles détériorent les comptes publics.

Certes, ce PLFR prévoit 50 milliards d'euros de recettes supplémentaires pour 2022, mais les dépenses augmentent de 60 milliards d'euros dans le même temps. On s'écarte des objectifs de la loi de programmation et vous laissez filer la dépense ! La charge de la dette représente 18 milliards d'euros supplémentaires, excusez du peu !

Les ouvertures de crédits s'élèvent à 53,8 milliards d'euros en autorisations d'engagement et de 47,6 milliards en crédits de paiement - des montants jamais atteints en collectif budgétaire depuis la LOLF. Les dépenses pilotables sont en hausse de 27 milliards d'euros, dont 18,1 milliards ici : il n'y a plus de pilote pour les dépenses de l'État !

Le texte anticipe un déficit accru - 177 milliards d'euros, 25 milliards d'euros de plus qu'en loi de finances initiale -, mais l'endettement se maintient. Pour autant, c'est avec la dette contractée en 2020 que le déficit est financé, car l'État a conservé une trésorerie surabondante.

Ce PLFR prévoit donc 50 milliards d'euros de dépenses supplémentaires financés par 30 milliards d'euros de ressources fiscales supplémentaires et 20 milliards d'euros de dette émise il y a deux ans.

Pour la troisième année consécutive, les dépenses nouvelles s'accumulent. Or si la crise sanitaire était temporaire, cela n'est pas le cas de la crise énergétique et environnementale. Un monde nouveau s'annonce auquel nous devons nous adapter. Les mesures budgétaires ne sont pas des réponses durables ; le soutien du pouvoir d'achat par la dépense publique a atteint ses limites ; bientôt sonnera l'heure des choix douloureux...

Quelle dépense publique voulons-nous ? Comment la financer, alors que la dette pèsera davantage dans nos comptes ?

Je n'ai pas soumis de dispositifs nouveaux à la commission des finances. Le texte adopté par l'Assemblée nationale comporte des avancées comme l'augmentation du plafond de défiscalisation des heures supplémentaires ou la monétisation des RTT : il faut soutenir les salariés et offrir de la souplesse en ces temps de pénurie de main-d'oeuvre. Merci monsieur le ministre pour votre avis favorable à la pérennisation de la hausse du plafond de défiscalisation des heures supplémentaires. Nous souhaitons soutenir les travailleurs précaires en transformant la prime de rentrée en une majoration exceptionnelle de la prime d'activité. Nous prévoyons une rallonge de la participation de l'État à hauteur de 40 millions d'euros pour les banques alimentaires. Nous nous rallions au bouclier énergie et à son extension au fioul : les 230 millions d'euros votés à l'Assemblée nationale ne seront pas de trop.

Mais nous sommes arrivés au bout de la logique. La transition écologique doit se faire et nous devons recouvrer notre souveraineté énergétique ; or l'état de nos finances publiques ne nous permettra pas d'aller au-delà de cette année. Aussi évitons le saupoudrage, par exemple avec la mesure sur le fioul qui devra être ciblée.

M. Ronan Dantec.  - Très bien !

M. Jean-François Husson, rapporteur général.  - Nous regrettons la perte de 3 milliards d'euros que représentait la contribution à l'audiovisuel public. L'affectation d'une fraction de TVA manquera ailleurs et ne pourra durer au-delà de 2024 en vertu de la LOLF. Les deux prochaines années doivent être consacrées à une véritable réforme de l'audiovisuel public, assortie d'un financement efficace. Les propositions de la mission de Hugonet-Karoutchi sont sur la table : saisissez-les ! (Marques d'approbation sur les travées du groupe Les Républicains)

La commission propose de renforcer le filet de sécurité au bénéfice du bloc communal et de compenser la revalorisation des rémunérations des stagiaires de la formation professionnelle pour les régions.

Nous continuons de refuser les réserves de budgétisation que le Gouvernement se constitue : les reports de crédits massifs du début 2022 - plus de 29 milliards d'euros - montrent que les pratiques se poursuivent. (On s'en désole sur les travées du groupe Les Républicains.) Nous proposons de supprimer 4,5 milliards d'euros de crédits non justifiés.

Nous oeuvrons ainsi en faveur d'une gestion budgétaire rigoureuse, pour offrir à la France un avenir meilleur. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Claude Raynal, président de la commission des finances .  - Le PLFR, présenté comme le deuxième volet du paquet « pouvoir d'achat », ne se résume pas à cela.

Il prend en compte le nouveau contexte macroéconomique - et notamment la baisse de la prévision de croissance - et contient des mesures sans lien avec le pouvoir d'achat comme la suppression de la redevance audiovisuelle, le report d'un an de la suppression de la fiscalité sur le gazole non routier ou la nationalisation d'EDF.

Sur le pouvoir d'achat, sa réponse est très partielle, au regard des 6,1 % d'inflation sur un an. Le choc d'inflation en 2022 est estimé à 66 milliards d'euros, soit 1 000 euros par ménage et 4,3 % de leurs revenus. Quand l'inflation moyenne est de 5 %, elle n'est que de 2,5 % pour les 10 % des ménages les mieux lotis et de 8,5 % pour les 10 % les plus fragiles : nous devons mieux différencier nos réponses.

Le déficit public se creuse, compte tenu de la hausse significative des dépenses de l'État - 44,2 milliards d'euros, dont la moitié seulement pour le soutien du pouvoir d'achat. La charge de la dette augmente de 11,9 milliards d'euros. Je déplore que dans une situation délicate, le Gouvernement poursuive sa politique de désarmement fiscal. La suppression de la redevance - 3,7 milliards d'euros de manque à combler - va fragiliser l'audiovisuel public. La poursuite de la baisse des impôts de production va aussi aggraver la situation.

Rien sur la taxation du patrimoine, aucune taxation des bénéfices exceptionnels de certaines grandes entreprises ! Comment ne pas évoquer les 18,7 milliards de dollars de profits trimestriels de Total ? « Une aubaine de marché supportée par nos concitoyens », comme l'a écrit Valérie Rabault. Monsieur le ministre, vous osez dire que taxer Total serait « une facilité et non une mesure de justice » ? Comment mettre en parallèle vos 500 millions d'euros de mesurettes, bien mal ciblées, avec les 5 milliards que cette taxe pourrait rapporter ?

Nos grandes entreprises arguent d'une activité internationale quand tout va bien et d'un siège social en France lorsque les crises surviennent. De tout cela, les Français ne veulent plus !

Total annonce qu'une partie de ses profits sera consacrée... au développement ? Non. À la transition énergétique ? Non. À l'amélioration des salaires ?

M. Vincent Éblé. -  Non !

M. Claude Raynal, président de la commission.  - Peut-être... Réponse : au rachat d'actions, pour 2 milliards d'euros. Il faut voter cette taxe exceptionnelle ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE, et du GEST ; Mme Esther Benbassa applaudit également.)

M. Éric Bocquet .  - (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE) Au soir de sa victoire, le 24 avril dernier, le Président de la République affirmait : «  Cette ère nouvelle ne sera pas la continuité du quinquennat qui s'achève. La colère et les désaccords doivent aussi trouver une réponse. Il faut enfin considérer toutes les difficultés des vies vécues et les difficultés qui se sont exprimées. » (Une voix à gauche, sur un air bien connu : « Paroles, paroles... »)

Nous débattons d'un PLFR qui aurait dû marquer le début de cette « ère nouvelle ». Mais du discours aux propositions, le gouffre est béant.

De profondes fractures sont apparues dans notre société et la question du pouvoir d'achat est prégnante : 40 % des Français ne partiront pas en vacances cette année et l'augmentation du prix des carburants prive ceux qui partent des petits plaisirs des vacances - la soirée au restaurant ou les crèmes glacées des enfants. (Protestations sur les travées dRDPI et du groupe Les Républicains)

Pendant ce temps, TotalEnergies réalise 17,7 milliards d'euros de bénéfice au premier semestre 2022 et n'a pas payé d'impôt en France en 2020 et 2021...

Une étude de la fédération française des banques alimentaires réalisée auprès de ses bénéficiaires - 2,2 millions de personnes - montre que le budget alimentation a augmenté, affectant davantage les familles avec enfants, et que les produits les moins chers sont privilégiés.

De l'autre côté, les entreprises du CAC 40 ont réalisé 174 milliards d'euros de bénéfices, soit 5 517 euros par seconde ! La question des superprofits arrive donc légitimement dans le débat : 3,7 milliards pour Engie ; 18 milliards pour CMA CGM. L'Italie et le Royaume-Uni ont mis en place une taxe de 25 % sur ces superprofits. Mais à l'évidence, en France, les actionnaires sont cajolés, dorlotés, chouchoutés.

Lors du précédent quinquennat, vous avez baissé la fiscalité du capital : suppression de l'ISF, prélèvement forfaitaire unique pour les dividendes. D'où une concentration accrue des richesses : les 10 % les plus riches détiennent la moitié des actifs qui financent l'économie. Quant aux effets sur l'investissement, ils sont douteux.

Vous demandez aux entreprises qui le peuvent de faire un geste sur le pouvoir d'achat, mais ces gestes sont des signaux bien faibles.

Total a annoncé une remise d'été de 12 centimes sur le litre de carburant - et seulement sur les autoroutes ! -, CMA CGM une ristourne de 500 euros sur ses conteneurs en provenance de l'Asie, alors que la fortune de son PDG a augmenté de plus de 30 milliards d'euros...

C'est le gras pour les uns, et les miettes pour l'immense majorité ! Pour combattre le cancer des inégalités de notre société fracturée, vous prescrivez du paracétamol ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et sur quelques travées du groupe SER)

Mme Sylvie Vermeillet .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC ; M. Alain Marc applaudit également.) Le PLFR 2022 veut contenir la hausse des prix et protéger le pouvoir d'achat des ménages. Le groupe UC y souscrit et proposera plusieurs mesures ciblées.

Comme le disait le ministre, la France a atteint la cote d'alerte sur les finances publiques, car la dette est désormais très chère.

Porter la remise sur les carburants de 18 à 30 centimes ne nous semble pas souhaitable : la baisse n'est pas ciblée et bénéficiera même davantage aux plus aisés ; elle bénéficiera également aux étrangers, touristes et frontaliers ; les producteurs risquent d'en profiter pour augmenter leurs prix ; nous risquons un nouvel épisode des « gilets jaunes » dans quelques mois ; le coût de ce dispositif est inacceptable pour les finances publiques.

À la place de cette mesure dispendieuse, nous proposons un amendement de M. Canévet : en contrepartie d'une réduction de ses cotisations patronales, l'employeur prendrait en charge une partie des frais de déplacement de son salarié. Les 30 centimes de réduction seraient ainsi réservés à ceux qui travaillent.

Nous proposerons une contribution exceptionnelle sur les bénéfices 2021. Je sais que vous refusez, monsieur le ministre, ce que vous qualifiez de « réflexe pavlovien ». Mais gare aux chiens de garde du Parlement qui veillent sur la Nation, dans un esprit de justice fiscale et sociale ! (M. le ministre sourit.) Vous-même déclariez en décembre 2018, alors que vous vous apprêtiez à taxer les GAFA : « Il n'y a pas de succès économique sans justice sociale ». L'État doit jouer son rôle de régulateur en atténuant les effets des crises auprès de tous.

Ce réflexe pavlovien, au demeurant, le Gouvernement ne l'a-t-il pas eu en 2020, avec la taxe de solidarité exceptionnelle sur les complémentaires santé ? (« Très bien » sur les travées du groupe UC)

Mettre en place un prélèvement exceptionnel parce qu'il y avait enrichissement exceptionnel était juste.

M. David Assouline.  - Bravo !

Mme Sylvie Vermeillet.  - Du reste, nos voisins le font : l'Italie, l'Espagne, la Roumanie, la Grèce, le Royaume-Uni, bientôt l'Allemagne. Le Président de la République disait il y a quelques mois : la justice sociale, c'est de prévenir les inégalités. Eh bien, nous y sommes.

Nous proposons, par ailleurs, de reporter d'un an la suppression de la CAP, qui mérite concertation.

M. David Assouline.  - Bravo !

Mme Sylvie Vermeillet.  - Prenons le temps de mettre en place un dispositif satisfaisant le monde de la culture.

M. Laurent Lafon.  - Très bien.

Mme Sylvie Vermeillet.  - Enfin, Françoise Gatel proposera une aide pour les communes qui voient leur facture énergétique s'envoler. Le dispositif voté par l'Assemblée nationale est trop restrictif.

Voici la ligne directrice du groupe UC, particulièrement attentif à l'usage que vous ferez de la dette publique. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur plusieurs travées du groupe SER et du GEST)

M. Jean-Claude Requier .  - Ce PLFR est peut-être le vrai texte sur le pouvoir d'achat qu'attendent nos compatriotes. La situation budgétaire de l'État est difficile, avec le retour de l'inflation consécutif au déconfinement, aux difficultés d'approvisionnement et à l'affaiblissement de l'euro par rapport au dollar, lié aux conséquences économiques de la guerre en Ukraine.

La réélection du Président de la République et le résultat paradoxal des législatives ont créé une situation politique complexe : le spectacle parfois ubuesque de l'examen à l'Assemblée nationale du texte Pouvoir d'achat et du PLFR aura laissé perplexe... Ce n'est pas la ligne que nous suivons au Sénat.

Sur ce texte, notre groupe continuera de chérir sa liberté de vote - d'autant que nous ne sommes pas toujours d'accord. (Rires)

Sur la suppression de la contribution à l'audiovisuel public, par exemple. Nous veillerons à ce que le financement soit à la hauteur d'un audiovisuel de qualité, indépendant et pluraliste, gage de l'attachement des Français à leur audiovisuel public.

Pour le reste, ce texte comporte des mesures techniques. La poursuite des prêts garantis par l'État (PGE) notamment illustre la difficulté à sortir d'un dispositif conçu comme temporaire, mais plébiscité par les acteurs économiques...

Je salue l'article 14, car on connaît les difficultés des collectivités à répondre aux demandes de renouvellement de cartes d'identité et de passeports.

Nous proposerons d'aller plus loin dans la compensation en faveur des collectivités, et de territorialiser davantage certaines aides, notamment pour lutter contre la hausse des prix du carburant.

La renationalisation d'EDF est regrettable, mais nécessaire.

Enfin, nous attendons beaucoup du débat sur la taxation des superprofits de certaines entreprises.

Ce PLFR comporte des mesures nécessaires, mais il faudra rester attentif à la soutenabilité budgétaire...

Le RDSE déterminera son vote en fonction des modifications apportées par le Sénat.

M. Rémi Féraud .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Dans le texte Pouvoir d'achat, le grand absent était la revalorisation des salaires ; dans ce PLFR, c'est la contribution du capital et de ceux qui le détiennent.

Nous entendons bien amplifier les avancées obtenues à l'Assemblée nationale sur les collectivités locales, mais aussi faire un pas vers plus de justice fiscale. Nous ne sommes pas les seuls, à gauche, à plaider pour une participation des grandes entreprises et le Gouvernement est sur la défensive. De l'audace, chers collègues !

Nous prônons un ISF climatique pour financer des mesures solidaires de transition énergétique et augmenter le pouvoir d'achat sans entamer le reste à vivre des plus modestes, ni toucher au temps de travail.

Tout concourt à créer une taxe exceptionnelle sur les superprofits des grandes sociétés de l'énergie et des transports. Elle est si légitime qu'elle s'est invitée au sein même de la majorité.

On ne peut plus se contenter d'en appeler au bon vouloir des entreprises. Regardez les profits records de Total, l'état des services publics, l'explosion des inégalités...

Nos propositions dégagent près de 25 milliards d'euros de recettes. Ajoutons le « combien ça rapporte » au « combien ça coûte ». Regardez nos voisins : l'Allemagne et l'Espagne font un effort sur les transports publics, l'Italie et le Royaume-Uni taxent les superprofits...

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Pas en Allemagne.

M. Rémi Féraud.  - C'est nécessaire, et c'est possible. Ne ratons pas cette occasion.

Manque également un outil de protection de notre démocratie. Fragiliser l'audiovisuel public est une erreur, une faute. Nous proposerons une nouvelle forme de redevance : il y va de la qualité et de la liberté de l'information, et de la création culturelle. Nous proposons un système plus juste et plus progressif. Le vôtre, qui repose sur la TVA, reprend d'une main ce qu'il donne de l'autre...

De nombreuses voix ont qualifié la suppression précipitée de la CAP de fausse bonne idée. Soyons sérieux.

M. David Assouline.  - Oui, un peu de sérieux !

M. Rémi Féraud.  - Au-delà des clivages partisans, prenons nos responsabilités. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et du GEST)

M. Teva Rohfritsch .  - (Applaudissements sur les travées du RDPI) Ce texte a fait l'objet d'importants compromis à l'Assemblée nationale et a été adopté à une très large majorité. C'est une victoire pour la démocratie compte tenu de la nouvelle configuration politique.

Je ne doute pas que le Sénat fera preuve de responsabilité et remplira avec sagesse son rôle de chambre de compromis - alors que le texte Pouvoir d'achat, corollaire de celui-ci, devrait faire l'objet d'un accord en CMP dès ce soir.

Cet esprit de compromis, le Gouvernement l'a manifesté en acceptant un amendement à 230 millions d'euros pour aider nos compatriotes qui se chauffent au fioul.

Dans le même esprit, nous soutiendrons l'amendement du rapporteur général qui pérennise le nouveau plafond d'exonération des heures supplémentaires.

L'esprit de conciliation a été à l'oeuvre pour les collectivités locales. Depuis 2017, leur capacité d'autofinancement a augmenté de 23 %, la trésorerie de 36,4 %, leurs dépenses d'investissement de 15 %, grâce aux mesures de soutien et de compensation et au dynamisme de leurs recettes fiscales.

Reste que certaines de nos communes ont besoin d'un soutien exceptionnel. Je salue donc le compromis trouvé autour de Jean-René Cazeneuve ; nous avons encore des améliorations à faire valoir, mais je ne doute pas que nous saurons protéger les collectivités menacées par la hausse du coût des énergies.

L'enveloppe exceptionnelle d'aide alimentaire est particulièrement bienvenue. Nous proposerons de l'élargir aux collectivités d'outre-mer - c'est un enjeu de solidarité et d'égalité.

La prolongation de l'aide au carburant pour les pêcheurs annoncée vendredi dernier est un soulagement, car le secteur est fortement touché.

Notre pays a l'inflation la plus modérée d'Europe, une croissance plus dynamique que nos voisins, un taux de chômage historiquement bas. C'est le fruit de la politique menée dès le début de la crise. Il ne faut pas changer de cheval au milieu du gué.

C'est vrai aussi de la taxe exceptionnelle que certains réclament. Il y va de la cohérence de notre modèle fiscal. Le Gouvernement a demandé aux entreprises des engagements, il saura sanctionner lorsque le temps sera venu de demander des comptes.

Ce texte rend 20 milliards d'euros à nos concitoyens. C'est sur notre vote qu'il faudra rendre des comptes ! (Applaudissements sur les travées du RDPI)

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Très bien.

Mme Vanina Paoli-Gagin .  - (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP) La navigation est un art d'anticipation : le capitaine du paquebot doit attendre 30 minutes entre son coup de barre et l'effet sur la trajectoire du bateau. Pour redresser les finances publiques, l'inertie est bien plus longue : on compte en décennies.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Eh oui !

Mme Vanina Paoli-Gagin.  - Si ce budget marque la fin du « quoi qu'il en coûte », ses effets ne se feront pas sentir avant des années.

La situation de nos finances publiques est alarmante, notre dette publique est supérieure de plus de 15 points de PIB à celle de 2019. Le contexte des taux négatifs la rendait indolore ; désormais la charge de la dette, qui diminuait, augmente dangereusement.

L'urgence est sociale. Pour les plus modestes, ceux qui vivent dans les territoires ruraux, une inflation moyenne de 5 ou 6 % correspond à une augmentation du coût de la vie de 10 %.

L'hiver arrivera vite. L'inflation française est actuellement en dessous de la moyenne européenne, grâce à la réactivité du Gouvernement et à notre moindre dépendance au gaz russe, mais gare à l'effet retard.

Nous discuterons prochainement des orientations budgétaires. Pour l'heure, j'espère que nous saurons construire des consensus pour protéger le pouvoir d'achat des plus modestes dans les territoires ruraux.

Qui doit supporter le coût des mesures que nous voterons ? La suppression de la contribution à l'audiovisuel public ne fait pas débat : les Français ont porté au second tour deux candidats qui la prévoyaient. Elle n'a plus de sens alors qu'internet a supplanté la télévision. Mais comment garantir le financement de l'audiovisuel public ? La solution de flécher une fraction de TVA ne me semble pas pérenne. Pour ma part, je plaiderai pour faire contribuer davantage les géants du numérique.

Autre question sensible : la taxation des superprofits. C'est très français de répondre à une crise par une taxe !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Tout à fait.

Mme Vanina Paoli-Gagin.  - D'autres pays l'ont fait. Mais la réflexion doit être multisectorielle...

Enfin, nous proposerons des amendements pour améliorer la protection des collectivités territoriales face à l'augmentation du point d'indice. L'effort doit être partagé entre les collectivités territoriales et l'État, mais en matière de finances publiques, c'est toujours le contribuable qui paie in fine. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP)

M. Vincent Segouin .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Ce premier budget du second quinquennat s'inscrit dans un contexte particulier : une inflation sans précédent depuis les années 1980, conséquence d'une crise économique et énergétique ; une configuration politique particulière, avec un Président de la République privé de majorité absolue qui redécouvre la démocratie représentative (sourires). Le Parlement revient au centre du jeu.

Notre groupe n'a cessé de mener une opposition constructive au service de la France. Aujourd'hui, notre responsabilité est de convaincre le Gouvernement du bien-fondé de nos propositions. Le pays ne peut plus se permettre de perdre encore cinq ans.

Il n'y a plus d'argent gratuit. Le retour de l'inflation contraint les banques centrales à réagir. Depuis le début de l'année, la Fed a relevé son taux directeur de 2,25 % ; la BCE, de 0,5 point, une première depuis onze ans. Aux États-Unis, les taux ont dépassé les 3 % ; les OAT à dix ans, négatives en décembre, sont à 2 %. Or un point de taux d'intérêt en plus, c'est 2,5 milliards d'euros de charge de la dette en plus ! À cela s'ajoute l'effet de l'inflation sur laquelle 10 % de notre dette est indexée.

La charge de la dette est passée de 38 à 50 milliards d'euros en un an ; elle est désormais le deuxième poste de dépenses, devant la Défense, et deviendra bientôt le premier. Imaginez ce que nous pourrions faire avec ces 50 milliards d'euros !

Le Gouverneur de la Banque de France alerte : on ne peut pas léguer une telle dette à notre jeunesse. Le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) y voit, lui, un point de vulnérabilité.

Il y a un mois, le ministre a semblé découvrir le problème, alors que quatre mois plus tôt, il fustigeait les Cassandre et assurait que notre économie se portait très bien. Ce n'est pas faute d'avoir mis en garde le Gouvernement contre une remontée des taux.

Comment en sommes-nous arrivés là ? Il fallait relancer l'économie, mais le « quoi qu'il en coûte » a couvert des dépenses non liées à la crise. La promesse de diminution de 50 000 postes dans la fonction publique d'État a été abandonnée. La réforme des retraites, déjà repoussée d'un an, aura-t-elle lieu au cours de ce quinquennat ?

Pas besoin d'une mission parlementaire pour savoir que la carte Vitale biométrique dégagera des économies : nous proposons sa mise en place immédiate.

Les dépenses doivent être financées par des économies, pas par des surcroîts de recettes ; les recettes imprévues doivent aller au désendettement.

Or ce PLFR est financé par des hausses de recettes ; ce n'est pas sain, d'autant que la croissance est, dit le Haut Conseil des finances publiques, surestimée.

Elle pâtit d'une pénurie de main-d'oeuvre ; le taux de chômage en France est de 7,2 % contre 2,8 % en Allemagne et 3,6 % aux États-Unis. Il faut donc aider les entreprises à maintenir leur activité face aux difficultés de recrutement. C'est pourquoi nous proposons la hausse de la défiscalisation et de la désocialisation des heures supplémentaires (M. Bruno LMaire, ministre, approuve), mais aussi la pérennisation du rachat des RTT.

Nous proposerons que la prime de rentrée cible les travailleurs pauvres plutôt que les bénéficiaires de minima sociaux qui ne travaillent pas. Le pouvoir d'achat se gagne d'abord par le travail. Nous nous félicitons de l'adoption à l'Assemblée nationale de mesures portées par les Républicains, comme la défiscalisation des heures supplémentaires, même si, à titre personnel, je serais pour un déplafonnement total.

Nous nous félicitons aussi de l'accord sur la remise à la pompe et du dispositif de soutien aux stations-service des zones rurales, ainsi que du soutien aux ménages qui se chauffent au fioul.

Le filet de sécurité pour les collectivités territoriales peut encore être amélioré ; nous demanderons l'indexation de la DGF dans le projet de loi de finances pour 2023.

Le vote de notre groupe dépendra du sort réservé à nos propositions. Il y va de l'intérêt de notre pays. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Jean-Marie Mizzon applaudit également.)

M. Daniel Breuiller .  - (Applaudissements sur les travées du GEST) Vous décrivez le contexte, monsieur le ministre, avec gravité. Faire le point est indispensable, mais quel est votre cap ?

Si la cote d'alerte est atteinte sur la dette, pourquoi alourdir le déficit de 3 milliards d'euros en supprimant la contribution à l'audiovisuel public ? Taxez les plateformes, bloquez les loyers ! C'est ainsi que vous allégerez le coût de la vie. Dans une société de fake news, l'indépendance de l'information est essentielle, comme le soutien à la création, à l'innovation et à l'éducation, portés par le service public de l'audiovisuel. On ne décrète pas la suppression de la CAP sans débat.

Pour la dette encore, vous refusez de taxer les superprofits. Mais d'autres le font. Total empoche 18 milliards d'euros, et consent un geste à 500 millions ? C'est la charité plutôt que la solidarité.

Comme le disait Henry Morgenthau, « les impôts sont le prix à payer pour une société civilisée ». Nous proposerons donc une taxe sur les superprofits des profiteurs de crise et un ISF climatique, qui fera contribuer ceux dont le bilan carbone est le plus désastreux.

Il n'est pas acceptable de demander des efforts aux plus modestes quand le CAC 40 distribue 57 milliards de dividendes, les 500 Français les plus riches possèdent plus de 1 000 milliards d'euros, que les salaires varient de 1 à 300 entre patrons et salariés. Comme le disait le président Macron, notre pays tient tout entier sur ces hommes et femmes que le pays reconnaît et rémunère si mal. Nous proposons donc le SMIC à 1 500 euros, un fonds de solidarité pour les TPE et PME, une revalorisation de 10 % du point d'indice des fonctionnaires et une indexation complète des retraites et prestations sociales.

Une voix à droite.  - Qui paye ?

M. Daniel Breuiller.  - Nous approuvons les mesures prises concernant la guerre ukrainienne et mesurons les risques d'approvisionnement, prix de notre inaction passée. Mais faut-il remplacer la dépendance au gaz russe par une autre dépendance au gaz de schiste américain ? Non. Nous proposons 10 milliards d'euros pour la rénovation thermique des logements.

Le bouclier tarifaire doit être étendu aux collectivités territoriales, dont certaines sont contraintes de fermer leur piscine. La ristourne uniforme de 30 centimes à la pompe subventionnera les week-ends à Saint-Jean-Cap-Ferrat en SUV. Qui peut le justifier ? Cette aide doit être ciblée.

Quand les forêts brûlent, que l'agriculture souffre de la sécheresse, que la biodiversité s'effondre, il faut un nouveau cap ! Nous ferons des propositions en ce sens. (Applaudissements sur les travées du GEST et sur quelques travées des groupes SER et CRCE)

M. Jean-Marie Mizzon .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Ce budget rectificatif poursuit dans un environnement inflationniste l'objectif de redonner du pouvoir d'achat aux Français. C'est un objectif noble et partagé. Ce qui est moins consensuel c'est le recours, encore et toujours, à la dépense publique. Hérité de la pandémie, le syndrome de l'argent magique a anesthésié la sagesse budgétaire : les dépenses pilotables augmentent de 18 milliards d'euros. Nous avons renoncé à toute réflexion de long terme sur les conditions d'une prospérité retrouvée.

Le pouvoir d'achat naît des gains de productivité, pas de l'action de l'État. Dans son essai Ce qu'on voit et ce qu'on ne voit pas, Frédéric Bastiat distinguait le mauvais économiste, qui s'en tient à l'effet visible, du bon, qui tient compte de l'effet qu'il faut prévoir. Ce dernier poursuit un grand bien à venir au risque d'un petit mal actuel. En laissant filer la dépense publique et donc l'endettement, nous faisons l'inverse.

Quand les comptes sont dans le rouge, il faut dépenser efficacement - comme dit Keynes, commencer par cesser de creuser pour sortir du trou. Alors qu'il faudrait cibler en priorité les communes rurales et les territoires ultramarins, ce PLFR privilégie les mesures générales et indifférenciées.

Le groupe UC fera des propositions associant sobriété budgétaire, efficacité économique et justice sociale. (Applaudissements sur les travées du groupe UC ; M. Sébastien Meurant et Mme Micheline Jacques applaudissent également.)

M. Thierry Cozic .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Une fois n'est pas coutume, ce PLFR est dans la droite ligne... de la droite. On taxe d'irresponsable tout contradicteur qui prône une meilleure répartition de la richesse par la dépense publique.

Monsieur le ministre, loin d'être bon gestionnaire, vous êtes celui qui a le plus dépensé ces dernières années, entre baisse des impôts de production et d'impôt sur les sociétés (IS). La Cour des comptes impute une partie de la dégradation des comptes publics à ces baisses : passage du taux de l'IS de 33,3 à 25 % ; baisse de 10 milliards d'euros pour les impôts de production ; suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) en 2023 pour 8 milliards d'euros. Vous organisez ainsi l'attrition des dépenses publiques.

Les 12 milliards d'euros supplémentaires pour faire face aux intérêts d'emprunts, c'est colossal. Vous ne voulez pas, dites-vous, d'un compromis qui s'achète à coups de milliards. Or les baisses des impôts de production profitent d'abord aux grandes entreprises. Et vous refusez de taxer les superprofits des profiteurs de guerre, preuve que vos compromis profitent toujours aux mêmes...

Ce PLFR s'inscrit dans la continuité de votre politique de l'offre. C'est le corollaire de votre dogme : refuser toute augmentation des salaires. Lors de l'examen du projet de loi Pouvoir d'achat, vous avez balayé d'un revers de la main notre proposition d'un Grenelle des salaires. Résultat, vous voilà contraint au bricolage fiscal afin de poser de petites rustines faites de primes, de petits chèques et de baisses d'impôts. Le triplement du plafond de la prime Macron reflète cette fuite en avant.

Ce texte est dans le prolongement du lacunaire projet de loi Pouvoir d'achat. Faute de changement de cap radical, il reste une loi de finances inégalitaire qui fait toujours peser sur les mêmes l'assainissement des finances publiques.

Vous parlez beaucoup de compromis ; nous espérons que vous en ferez en faveur de la justice fiscale. (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; Mme Esther Benbassa applaudit également.)

M. Jean-Raymond Hugonet .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Il y a quelques semaines, nos commissions de la culture et des finances ont adopté le rapport de Roger Karoutchi et moi-même sur le financement de l'audiovisuel public.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Excellent !

M. Jean-Raymond Hugonet.  - Il dresse trois constats. D'abord, la contribution à l'audiovisuel public, liée à la possession d'un poste de télévision, est insuffisante, injuste et fragile.

M. David Assouline.  - Nous le disons depuis cinq ans.

M. Jean-Raymond Hugonet.  - Les supports se multiplient. De plus, la funeste suppression de la taxe d'habitation rend son recouvrement très coûteux. Il faut donc la remplacer.

Deuxième constat : il faut en parallèle repenser l'organisation et les missions de l'audiovisuel public. Ne pas ouvrir le débat sur la publicité sur le service public traduit une absence de vision et d'ambition. L'échec de la réforme en 2020 nous a fait perdre du temps.

Troisième constat : face à l'émergence de grandes plateformes et de puissants groupes privés, il est urgent de concevoir une stratégie numérique commune qui passe par un regroupement des moyens. L'échec de Salto a mis en évidence la faiblesse de la stratégie des petits pas. En introduisant à la hâte la suppression de la CAP et en bouleversant le dispositif à l'Assemblée nationale, le Gouvernement ne tire pas toutes les conséquences de notre rapport.

M. David Assouline.  - Ça c'est vrai !

M. Jean-Raymond Hugonet.  - Nous avions mis en évidence la nécessité de garanties sérieuses sur le financement de l'audiovisuel public. Il faut définir de véritables perspectives pluriannuelles au service d'une stratégie. Donnons acte au Gouvernement d'avoir respecté la trajectoire budgétaire quadriennale, qui inclut notamment les travaux de la Maison de la Radio et les coûts liés à la crise sanitaire.

La question est maintenant de connaître ses ambitions pour les cinq années à venir. Quelle trajectoire budgétaire ? Est-il vrai que la signature du prochain contrat d'objectifs et de moyens (COM) est repoussée à fin 2023 ?

M. David Assouline.  - Oui !

M. Jean-Raymond Hugonet.  - Pourquoi avoir refusé une commission indépendante sur l'avenir de l'audiovisuel public ? (M. David Assouline renchérit.)

Il en va de même pour les missions et l'organisation de l'audiovisuel public français, éparpillé entre plusieurs acteurs. Le choix d'un financement par une fraction de TVA est une solution provisoire. Nous avons deux ans pour mener à bien ce chantier. Si nous votons la réforme de la CAP telle que modifiée par les députés, nous conditionnerons notre vote, dans le projet de loi de finances 2023, à la présentation d'un calendrier précis pour une réforme globale et à la définition d'une stratégie numérique. Nous voulons un audiovisuel public plus efficace, innovant et moderne. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. David Assouline.  - Vous allez pourtant voter sans ces garanties !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Je vois que toutes les travées de cette assemblée sont préoccupées par la situation des finances publiques. Tant mieux. Cela veut dire qu'il ne faut pas achever cet examen avec un déficit public alourdi. Maintenons-le à 5 %.

Mme Laurence Rossignol.  - D'où notre proposition de taxe !

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - C'est tout l'intérêt de taxer les superprofits !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Je souhaite revenir sur la taxation des superprofits. (« Ah ! » sur les travées du groupe SER) J'entends que cela rapporterait de l'argent. Je suis sceptique. (On se gausse à gauche.) Encore faudrait-il que des superprofits soient réalisés en France ! L'impôt repose sur un établissement stable de l'entreprise. Or les profits des compagnies pétrolières se font à l'étranger... Accepterions-nous que les Allemands ou les Américains viennent récupérer les bénéfices réalisés en France ? L'établissement stable est un principe intangible de la fiscalité internationale. C'est bien ce qui nous a amenés à défendre la taxation des géants du digital, qui n'ont pas d'établissement stable en France, leur activité étant désintermédiée. Par conséquent, les superprofits ne dégageront aucune recette fiscale.

Mme Laurence Rossignol.  - Franchement !

M. Pascal Savoldelli.  - C'est culotté !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Il est faux de prétendre qu'augmenter les impôts rapporterait plus au Trésor et que baisser les impôts ruinerait les comptes publics. Nous avons prouvé le contraire en baissant le taux de l'IS de 33,3 % à 25 %, ce qui a fait passer son produit de 50 à 57 milliards d'euros !

En baissant les impôts, on crée de la prospérité, de l'emploi, donc plus de recettes fiscales pour la Nation.

M. Bruno Retailleau.  - Bien sûr.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Veut-on produire plus de richesses pour mieux les redistribuer, ou bien pour taxer toujours davantage (marques d'agacement sur les travées du groupe CRCE) jusqu'à l'appauvrissement général ? Je propose une autre voie, celle de la prospérité et de la création d'emplois.

Vous citez l'Allemagne, mais elle s'est bien gardée de s'engager dans une taxe sur les superprofits ! La Grande-Bretagne l'a fait, mais c'est bien normal puisqu'elle produit du pétrole sur son territoire.

Je rappelle que la France a toujours, malgré nos efforts louables pour diminuer les impôts, un taux de prélèvements obligatoires de 47,5 % contre  43 % en Italie, 41 % en Allemagne et 33,5 % au Royaume-Uni. Notre pays est accablé de taxes, d'impôts, de prélèvements obligatoires. (Protestations sur les travées du groupe SER) La seule solution, c'est de baisser les impôts, je n'en démordrai pas. (Applaudissements sur les travées du RDPI, du groupe INDEP et sur plusieurs travées du groupe Les Républicains)

Autre argument que vous avancez, la taxation des superprofits serait juste. Je ne le crois pas. Au contraire, elle est inquiétante pour tous ceux qui créent de la richesse dans notre pays. Nos compatriotes savent parfaitement que lorsqu'on commence par taxer les grandes entreprises, on finit toujours par les taxer eux aussi.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Ils l'ont très bien compris !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - « Les impôts sont le prix à payer pour une société civilisée », dites-vous ? À ce compte, la France serait le pays le plus civilisé au monde... Il reste un effort à faire. (Applaudissements sur les travées du RDPI ; M. Claude Malhuret applaudit également.)

La discussion générale est close.

Discussion des articles de la première partie

L'article liminaire est adopté.

AVANT L'ARTICLE PREMIER A

M. le président.  - Amendement n°322, présenté par M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Avant l'article 1er A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Apre?s l'article 209-0 A du code ge?ne?ral des impo?ts, il est inse?re? un article 209-0... ainsi re?dige? :

« Art. 209-0 ....  -  I.  -  Pour les socie?te?s membres d'un groupe mentionne? au II et domicilie? hors de France, les be?ne?fices imposables sont de?termine?s par la part du chiffre d'affaires du groupe re?alise?e en France dans le total du chiffre d'affaires re?alise? en France et hors de France, rapporte?e aux be?ne?fices d'ensemble du groupe.

« II.  -  Le groupe au sens du I comprend les entite?s juridiques et personnes morales e?tablies ou constitue?es en France ou hors de France.

« III.  -  A? son initiative ou par de?signation de l'administration fiscale, une socie?te? membre du groupe mentionne? au II est constitue?e seule redevable de l'impo?t sur les socie?te?s du? par l'ensemble du groupe en France.

« IV.  -  Pour les socie?te?s e?trange?res ayant une activite? en France et dont la socie?te?-me?re est domicilie?e a? l'e?tranger, les be?ne?fices imposables sont de?termine?s selon les me?mes modalite?s.

« V.  -  Pour chaque E?tat ou territoire dans lequel le groupe mentionne? au II est implante? ou dispose d'activite?s, les socie?te?s mentionne?es au I et les socie?te?s e?trange?res mentionne?es au IV transmettent a? l'administration fiscale les informations suivantes :

« 1° Nom des implantations et nature d'activite? ;

« 2° Chiffre d'affaires ;

« 3° Be?ne?fice ou perte avant impo?t.

« VI.  -  En cas de refus de se soumettre a? l'obligation fixe?e au III, les socie?te?s mentionne?es au I et les socie?te?s e?trange?res mentionne?es au IV font l'objet d'une interdiction d'exercer sur le territoire franc?ais.

« VII.  -  Le I s'applique au groupe mentionne? au II dont le chiffre d'affaires total est supe?rieur a? 100 millions d'euros. »

II.  -  Le pre?sent article entre en vigueur à compter de la promulgation de la présente loi.

III.  -  Dans un de?lai de trois mois a? compter de la promulgation de la loi n° du de finances pour 2023, le Gouvernement remet au Parlement un rapport identifiant les conventions fiscales bilate?rales qu'il convient de rene?gocier en vue d'e?viter la double imposition.

M. Pascal Savoldelli.  - L'accord sur l'imposition des multinationales patine et ne devrait pas entrer en vigueur avant 2024 ; il risque d'être revu à la baisse. Un taux de 15 % rapporterait 4 milliards d'euros de recettes. C'est mieux que rien, selon Bercy, mais bien peu au regard des 13 milliards d'euros attendus en Allemagne ou des 12,5 milliards en Irlande.

Pourquoi un montant si faible ? Les deux piliers du dispositif sont mal ciblés. La France devait récupérer en un an les bénéfices réalisés par Total en un trimestre, mais en réalité l'entreprise ne fait que 21 % de ses bénéfices en France.

Monsieur le ministre, la souveraineté doit être populaire, fiscale et de justice sociale.

Nous proposons que l'assiette de l'imposition sur les multinationales soit déterminée à partir de la quote-part des bénéfices mondiaux réalisés en France, dès lors que le chiffre d'affaires de l'entreprise atteint 100 millions d'euros.

M. Jean-François Husson, rapporteur général.  - Avis défavorable. Cet amendement ne répond à aucune logique économique et est contraire aux conventions fiscales que nous avons passées.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Même avis. Le seuil d'entrée dans les piliers 1 et 2 du dispositif est de 750 millions d'euros. Je partage votre ambition, et je reconnais que cet impôt patine. Nous devons contourner l'inacceptable veto hongrois à la taxation minimale à l'impôt sur les sociétés, mais nous ne pourrons le faire que dans le cadre international.

L'amendement n°322 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°319, présenté par M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Avant l'article 1er A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Il est institue? en 2022 une contribution sur les be?ne?fices exceptionnels re?alise?s par les redevables de l'impo?t sur les socie?te?s pre?vue a? l'article 205 du code ge?ne?ral des impo?ts qui re?alisent un chiffre d'affaires supe?rieur a? 100 millions d'euros.

Cette contribution exceptionnelle est e?gale a? :

1° 10 % du re?sultat imposable lorsque le be?ne?fice re?alise? est infe?rieur a? 100 millions d'euros ;

2° 20 % du re?sultat imposable lorsque le be?ne?fice re?alise? est compris entre 100 millions d'euros et 1 milliard d'euros ;

3° 30 % du re?sultat imposable lorsque le be?ne?fice re?alise? est supe?rieur a? 1 milliard d'euros.

II.  -  La contribution pre?vue au I est assise sur la fraction du re?sultat net re?alise? au titre de la moyenne des exercices 2020, 2021 et 2022 qui exce?de la moyenne des re?sultats nets re?alise?s au titre des exercices 2017, 2018 et 2019.

III.  -  A.  -  Pour les redevables qui sont place?s sous le re?gime pre?vu aux articles 223 A ou 223 A bis du code ge?ne?ral des impo?ts, la contribution exceptionnelle est due par la socie?te? me?re. Cette contribution est assise sur la fraction du re?sultat net re?alise? au titre des exercices 2020, 2021 et 2022 qui exce?de le re?sultat d'ensemble et la plus-value nette d'ensemble de?finis aux articles 223 B, 223 B bis et 223 D du me?me code correspondant a? la moyenne des re?sultats des exercices 2017, 2018 et 2019. Ce re?sultat est de?termine? avant imputation des re?ductions et cre?dits d'impo?t et des cre?ances fiscales de toute nature.

B.  -  Le chiffre d'affaires mentionne? au I du pre?sent article s'entend comme le chiffre d'affaires re?alise? par le redevable au cours de l'exercice ou de la pe?riode d'imposition, ramene? a? douze mois le cas e?che?ant et, pour la socie?te? me?re d'un groupe mentionne? aux articles 223 A ou 223 A bis du code ge?ne?ral des impo?ts, de la somme des chiffres d'affaires de chacune des socie?te?s membres de ce groupe.

C.  -  Les re?ductions et cre?dits d'impo?t et les cre?ances fiscales de toute nature ne sont pas imputables sur la contribution exceptionnelle.

D.  -  La contribution exceptionnelle est e?tablie, contro?le?e et recouvre?e comme l'impo?t sur les socie?te?s et sous les me?mes garanties et sanctions. Les re?clamations sont pre?sente?es, instruites et juge?es selon les re?gles applicables a? ce me?me impo?t.

E.  -  La contribution exceptionnelle est paye?e spontane?ment au comptable public compe?tent, au plus tard a? la date pre?vue au 2 de l'article 1668 du me?me code pour le versement du solde de liquidation de l'impo?t sur les socie?te?s.

F.  -  L'inte?re?t de retard pre?vu a? l'article 1727 dudit code et la majoration pre?vue a? l'article 1731 du me?me code est fixe? a? 1 % du chiffre d'affaires mondial de la socie?te? ou de la socie?te? me?re tel que constate? lors de l'exercice comptable ante?rieur.

IV.  -  La contribution exceptionnelle n'est pas admise dans les charges de?ductibles pour l'e?tablissement de l'impo?t sur les socie?te?s.

M. Pascal Savoldelli.  - Monsieur le ministre, il faut sortir de l'ambiguïté. Vendredi dernier, après le conseil des ministres, vous déploriez qu'on accable les entreprises qui affichent de bons résultats. Votre radicalité s'appuie sur des clivages creux et vides de sens.

Loin de repartir, notre économie n'est pas encore revenue à son niveau de 2019. Inflationniste, elle est à deux vitesses : certaines entreprises profitent, d'autres perdent.

Vous dites que les bons résultats des entreprises doivent bénéficier à nos compatriotes, mais préférez les accessoires de rémunération à toute augmentation de salaire : les entreprises ne sont que 18 % à avoir augmenté les rémunérations dans la durée.

Vous affirmez que les entreprises qui font des bénéfices doivent contribuer à l'effort national ? Plutôt que de rendre directement de l'argent à nos compatriotes via des contributions directes, votre taxe remplit les poches de l'État !

M. le président.  - Amendement n°226 rectifié, présenté par MM. Breuiller, Parigi, Benarroche, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mmes de Marco et Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.

Avant l'article 1er A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Les redevables de l'impôt sur les sociétés prévu à l'article 205 du code général des impôts qui réalisent un chiffre d'affaires supérieur à 750 millions d'euros sont assujettis à une contribution sur leurs bénéfices exceptionnels perçus au cours du premier semestre de l'année 2022.

Cette contribution exceptionnelle est égale à 50 % du bénéfice exceptionnel réalisé, déterminé avant imputation des réductions et crédits d'impôt et des créances fiscales de toute nature.

Les réductions et crédits d'impôt et les créances fiscales de toute nature ne sont pas imputables sur la contribution sur les bénéfices exceptionnels. La contribution sur les bénéfices exceptionnels n'est pas admise dans les charges déductibles pour l'établissement de l'impôt sur les sociétés.

II.  -  Le bénéfice exceptionnel auquel il est fait référence aux deux premiers alinéas du I correspond au bénéfice net au sens de l'article 39 du même code, déterminé avant imputation des réductions et crédits d'impôt et des créances fiscales de toute nature, retranché d'un bénéfice normal correspondant à la moyenne des bénéfices imposés au titre de l'impôt sur les sociétés pour les exercices 2017, 2018 et 2019.

Pour les personnes morales n'ayant pas été redevables de l'impôt sur les sociétés pour l'exercice 2017, le bénéfice normal correspond à la moyenne des bénéfices imposés au titre de l'impôt sur les sociétés pour les exercices 2018 et 2019. Pour les sociétés n'ayant pas été redevables pour l'exercice 2018 ou pour l'exercice 2019, le bénéfice normal est calculé à partir d'une valeur de référence correspondant à 8 % du capital social de la société.

III.  -  Pour les redevables qui sont placés sous le régime prévu aux articles 223 A ou 223 A bis dudit code, la contribution sur les bénéfices exceptionnels est due par la société mère. Cette contribution est assise sur l'impôt sur les sociétés afférent au résultat d'ensemble et à la plus-value nette d'ensemble définis aux articles 223 B, 223 B bis et 223 D du même code, déterminé avant imputation des réductions et crédits d'impôt et des créances fiscales de toute nature.

IV.  -  Le chiffre d'affaires mentionné au premier alinéa du I s'entend du chiffre d'affaires réalisé par le redevable au cours de l'exercice ou de la période d'imposition pour la société mère d'un groupe mentionné aux articles 223 A ou 223 A bis du même code, de la somme des chiffres d'affaires de chacune des sociétés membres de ce groupe.

V.  -  Pour les redevables qui sont placés sous le régime prévu aux articles 223 A ou 223 A bis du même code, la contribution sur les bénéfices exceptionnels est due par la société mère. Cette contribution est assise sur l'impôt sur les sociétés afférent au résultat d'ensemble et à la plus-value nette d'ensemble définis aux articles 223 B, 223 B bis et 223 D du même code, déterminé avant imputation des réductions et crédits d'impôt et des créances fiscales de toute nature.

Le chiffre d'affaires mentionné aux I et II du présent article s'entend du chiffre d'affaires réalisé par le redevable au cours de l'exercice ou de la période d'imposition, ramené à douze mois le cas échéant et, pour la société mère d'un groupe mentionné aux articles 223 A ou 223 A bis du même code, de la somme des chiffres d'affaires de chacune des sociétés membres de ce groupe.

VI.  -  La contribution exceptionnelle est établie, contrôlée et recouvrée comme l'impôt sur les sociétés et sous les mêmes garanties et sanctions. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à ce même impôt.

M. Daniel Breuiller.  - Nous créons une contribution de 50 % sur les bénéfices exceptionnels réalisés par les plus grandes entreprises au cours du premier semestre 2022, calculés à partir de la moyenne de ceux réalisés au cours des trois années précédant la crise covid.

Il faut de petits impôts pour les petits revenus, et de gros impôts pour les gros bénéfices.

Selon l'Insee, le taux de marge général des entreprises a augmenté en 2022 à 32,2 %, dépassé seulement deux fois en 2019 et 2021. L'impôt est un outil de justice sociale et d'équité. Les entreprises doivent s'honorer de le payer.

M. le président.  - Amendement n°130 rectifié bis, présenté par Mme Vermeillet, MM. Marseille, Delahaye, Delcros, J.M. Arnaud, Canévet, Capo-Canellas, Maurey et Mizzon, Mme Billon, MM. Bonneau, Bonnecarrère, Cazabonne, Chauvet, Cigolotti et de Belenet, Mme de La Provôté, MM. S. Demilly et Détraigne, Mmes Devésa, Dindar et Doineau, M. Duffourg, Mme Férat, M. Folliot, Mmes Gacquerre, Gatel, N. Goulet et Guidez, MM. Henno et L. Hervé, Mme Herzog, M. Hingray, Mme Jacquemet, MM. Janssens, Kern, Lafon, Laugier et Le Nay, Mme Létard, M. Levi, Mme Loisier, MM. Longeot, Louault, P. Martin et Moga, Mmes Morin-Desailly et Perrot, MM. Poadja et Prince, Mmes Ract-Madoux, Saint-Pé, Sollogoub et Tetuanui, M. Vanlerenberghe, Mme Vérien et M. Menonville.

Avant l'article 1er A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. -  Il est institué, au profit de l'État, une contribution exceptionnelle de solidarité sur le bénéfice net réalisé en 2021 par les sociétés redevables de l'impôt sur les sociétés prévu à l'article 205 du code général des impôts, lorsque celui-ci a dépassé 1 million d'euros et a été supérieur de 20 % ou plus à la moyenne des bénéfices nets réalisés en 2017, 2018 et 2019.

Le montant de la contribution est calculé en appliquant un taux de 20 % à la différence entre, d'une part, le bénéfice net réalisé en 2021 et, d'autre part, la moyenne des bénéfices nets réalisés en 2017, 2018 et 2019.

Lorsque, du fait de la date de création d'une entreprise, la moyenne de ses bénéfices nets ne peut être calculée sur les trois années 2017 à 2019, la moyenne prise en compte pour l'application des deux alinéas précédents est calculée sur la base des derniers exercices clos avant le 1er janvier 2021.   

II. - A. - Pour les redevables qui sont placés sous le régime prévu aux articles 223 A ou 223 A bis du même code, la contribution exceptionnelle de solidarité est due par la société mère. Cette contribution est assise sur l'impôt sur les sociétés afférent au résultat d'ensemble et à la plus-value nette d'ensemble définis aux articles 223 B, 223 B bis et 223 D dudit code, déterminé avant imputation des réductions et crédits d'impôt et des créances fiscales de toute nature.

B. - Le bénéfice net mentionné au I du présent article s'entend du bénéfice net réalisé par le redevable au cours de l'exercice ou de la période d'imposition, ramené à douze mois le cas échéant et, pour la société mère d'un groupe mentionné aux articles 223 A ou 223 A bis du même code, de la somme des bénéfices nets de chacune des sociétés membres de ce groupe.

C. - Les réductions et crédits d'impôt et les créances fiscales de toute nature ne sont pas imputables sur la contribution exceptionnelle de solidarité.

D. - La contribution exceptionnelle de solidarité est établie, contrôlée et recouvrée comme l'impôt sur les sociétés et sous les mêmes garanties et sanctions. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à ce même impôt.

E. - La contribution exceptionnelle de solidarité est payée spontanément au comptable public compétent, au plus tard à la date prévue au 2 de l'article 1668 du code général des impôts pour le versement du solde de liquidation de l'impôt sur les sociétés.

Mme Sylvie Vermeillet.  - Avec cet amendement, les entreprises dont le bénéfice net aurait été en 2021 supérieur de 20 % à la moyenne des trois années précédant la crise covid se verraient appliquer une contribution de 20 % calculée sur la différence entre les deux moments.

En 2020, nous n'avons pas hésité à soumettre les complémentaires santé à une contribution exceptionnelle. Pendant la crise, nous avons voté tous les dispositifs de soutien aux entreprises, notamment un prêt garanti par l'État (PGE) de 1 milliard d'euros à CMA CGM.

Comment s'opposer à une contribution exceptionnelle bornée dans le temps ? D'autant que nos voisins la mettent en place. (Applaudissements sur les travées du groupe SER, du GEST et sur quelques travées du groupe CRCE)

M. le président.  - Amendement n°227 rectifié, présenté par MM. Breuiller, Parigi, Benarroche, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mmes de Marco et Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.

Avant l'article 1er A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Il est institué, au profit de l'État, une contribution exceptionnelle sur le résultat net réalisé lors de l'année 2022, par les sociétés de la branche énergie, eau et déchets ainsi que les sociétés de la branche transports.

Le montant de la contribution est calculé en appliquant un taux de 20 %.

II.  -  A.  -  Le fait générateur de la contribution prévue au I du présent article est constitué par la publication de la présente loi. La contribution est exigible au lendemain de la publication de la présente loi. Elle est déclarée et liquidée par le redevable au plus tard le 31 décembre 2022.

La contribution est contrôlée et recouvrée comme l'impôt sur les sociétés et sous les mêmes garanties et sanctions.

B.  -  Tant que le droit de reprise de l'administration est susceptible de s'exercer, les redevables conservent, à l'appui de leur comptabilité, l'information des sommes encaissées en contrepartie des opérations taxables.

Ces informations sont tenues à la disposition de l'administration fiscale et lui sont communiquées à première demande.

M. Daniel Breuiller.  - Selon l'Insee, les entreprises de l'énergie et du transport ont profité du contexte d'inflation pour augmenter leurs bénéfices d'un quart entre 2020 et 2022, sans que cela résulte forcément de facteurs internationaux.

En taxant les profits de crise, nous pourrons financer des mesures plus ambitieuses en faveur des plus fragiles et nous inciterons les entreprises à modérer leurs marges et ralentir ainsi l'inflation.

D'autres pays européens ont pris cette voie.

M. le président.  - Amendement n°249 rectifié, présenté par M. Féraud et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Avant l'article 1er A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Il est institué en 2022 et 2023 une contribution exceptionnelle sur les bénéfices des sociétés pétrolières et gazières, des sociétés de transport maritime de marchandises et des sociétés concessionnaires des missions du service public autoroutier redevables de l'impôt sur les sociétés prévu à l'article 205 du code général des impôts qui réalisent un chiffre d'affaires supérieur à 1 milliard d'euros.

Cette contribution exceptionnelle est égale à 25 % du résultat imposable.

II. - A. - Pour les redevables qui sont placés sous le régime prévu aux articles 223 A ou 223 A bis du même code, la contribution exceptionnelle est due par la société mère. Cette contribution est assise sur l'impôt sur les sociétés afférent au résultat d'ensemble et à la plus-value nette d'ensemble définis aux articles 223 B, 223 B bis et 223 D dudit code, déterminé avant imputation des réductions et crédits d'impôt et des créances fiscales de toute nature.

B. - Le chiffre d'affaires mentionné au I du présent article s'entend du chiffre d'affaires réalisé par le redevable au cours de l'exercice ou de la période d'imposition, ramené à douze mois le cas échéant et, pour la société mère d'un groupe mentionné aux articles 223 A ou 223 A bis du même code, de la somme des chiffres d'affaires de chacune des sociétés membres de ce groupe.

C. - Les réductions et crédits d'impôt et les créances fiscales de toute nature ne sont pas imputables sur la contribution exceptionnelle.

D. - La contribution exceptionnelle est établie, contrôlée et recouvrée comme l'impôt sur les sociétés et sous les mêmes garanties et sanctions. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à ce même impôt.

E. - La contribution exceptionnelle est payée spontanément au comptable public compétent, au plus tard à la date prévue au 2 de l'article 1668 du même code pour le versement du solde de liquidation de l'impôt sur les sociétés.

F. - L'intérêt de retard prévu à l'article 1727 du même code et la majoration prévue à l'article 1731 dudit code est fixé à 1 % du chiffre d'affaires mondial de la société ou de la société mère tel que constaté lors de l'exercice comptable antérieur.

III. - La contribution exceptionnelle n'est pas admise dans les charges déductibles pour l'établissement de l'impôt sur les sociétés.

M. Rémi Féraud.  - Comme les précédents, cet amendement prévoit une contribution exceptionnelle, à hauteur de 25 % du résultat imposable, pour les entreprises de l'énergie et du transport ainsi que les sociétés autoroutières soumises à l'IS dont le chiffre d'affaires est supérieur à 1 milliard d'euros.

Nous nous satisferions d'une taxe de 20 %, l'important étant de défendre un principe et de fournir une recette à l'État.

Monsieur le ministre, vos arguments sont idéologiques. Nous ne parlons pas du niveau global de la fiscalité. Les multinationales contribuent fort peu et pratiquent l'évasion fiscale ; d'autres entreprises contribuent bien plus à l'IS. Cette taxe rétablirait une certaine équité.

Soit cette taxe est vaine et on peut se la permettre ; soit c'est une spoliation dangereuse pour notre économie. Entre les deux, il faut choisir. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE)

M. le président.  - Amendement identique n°320, présenté par M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

M. Éric Bocquet.  - Dans un discours récent, la Première ministre, tout en reconnaissant que certains profitaient de la crise, souhaitait que ces profits bénéficient à tout le monde et permettent d'alléger les charges. Toutefois, elle nuançait son propos en indiquant que l'on ne pouvait pas forcément faire en France ce que l'on faisait ailleurs.

Parmi les singularités de notre pays, citons les aides sans conditions offertes aux entreprises. En France, on peut aider des entreprises qui licencient, qui ne paient pas d'impôts sur leurs bénéfices ou bien qui versent des dividendes...

M. le président.  - Amendement n°250 rectifié, présenté par M. Féraud et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Avant l'article 1er A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Il est institué en 2022 et 2023 une contribution exceptionnelle sur les bénéfices des sociétés pétrolières et gazières, des sociétés de transport maritime de marchandises et des sociétés concessionnaires des missions du service public autoroutier redevables de l'impôt sur les sociétés prévu à l'article 205 du code général des impôts qui réalisent un chiffre d'affaires supérieur à 1 milliard d'euros et dont le chiffre d'affaires enregistré en 2022 ou 2023 est supérieur d'un tiers à la moyenne constatée sur les cinq exercices précédents. .

Cette contribution exceptionnelle est égale à 25 % du résultat imposable.

II. - A. - Pour les redevables qui sont placés sous le régime prévu aux articles 223 A ou 223 A bis du même code, la contribution exceptionnelle est due par la société mère. Cette contribution est assise sur l'impôt sur les sociétés afférent au résultat d'ensemble et à la plus-value nette d'ensemble définis aux articles 223 B, 223 B bis et 223 D dudit code, déterminé avant imputation des réductions et crédits d'impôt et des créances fiscales de toute nature.

B. - Le chiffre d'affaires mentionné au I du présent article s'entend du chiffre d'affaires réalisé par le redevable au cours de l'exercice ou de la période d'imposition, ramené à douze mois le cas échéant et, pour la société mère d'un groupe mentionné aux articles 223 A ou 223 A bis du même code, de la somme des chiffres d'affaires de chacune des sociétés membres de ce groupe.

C. - Les réductions et crédits d'impôt et les créances fiscales de toute nature ne sont pas imputables sur la contribution exceptionnelle.

D. - La contribution exceptionnelle est établie, contrôlée et recouvrée comme l'impôt sur les sociétés et sous les mêmes garanties et sanctions. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à ce même impôt.

E. - La contribution exceptionnelle est payée spontanément au comptable public compétent, au plus tard à la date prévue au 2 de l'article 1668 du même code pour le versement du solde de liquidation de l'impôt sur les sociétés.

F. - L'intérêt de retard prévu à l'article 1727 du même code et la majoration prévue à l'article 1731 dudit code est fixé à 1 % du chiffre d'affaires mondial de la société ou de la société mère tel que constaté lors de l'exercice comptable antérieur.

III. - La contribution exceptionnelle n'est pas admise dans les charges déductibles pour l'établissement de l'impôt sur les sociétés.

M. Thierry Cozic.  - Une taxe exceptionnelle de 25 % en cas d'augmentation significative du chiffre d'affaires en 2022 rapporterait, pour Total, 4 milliards d'euros.

Preuve que nous sommes ouverts au débat, nous proposons, malgré les chiffres records annoncés par Total, un dispositif moins extensif. Nous sommes même prêts à débattre de sous-amendements.

Mais le Sénat doit voter la taxation sur les superprofits, car c'est un symbole fort de justice fiscale.

M. Jean-François Husson, rapporteur général.  - Avis défavorable à tous ces amendements.

Monsieur Bocquet, vous voulez prendre encore plus, mais les entreprises doivent rester en bonne santé.

Monsieur Breuiller, les dispositions que vous proposez n'envoient pas un bon signal.

Madame Vermeillet, les entreprises ayant réalisé des profits en 2021 n'ont rien à voir avec la guerre en Ukraine et la crise de l'énergie. L'assiette proposée est excessivement large. Cette contribution sanctionnerait les entreprises a posteriori, avec le risque de brider les investissements à venir.

M. Breuiller propose un taux d'imposition à 45 %, je ne pense pas que nous ayons besoin de cela.

Les amendements de MM. Féraud et Bocquet ciblent certains secteurs, qui ne réalisent pas tous leurs profits sur le territoire national.

Quand la situation est difficile, les entreprises doivent mener des politiques offensives pour accompagner les Français. Privilégions l'efficacité et la réactivité plutôt que la taxation.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Avis défavorable. Ce que nous n'avons jamais essayé, dans notre pays, c'est la stabilité fiscale. (Marques d'approbation sur quelques travées du groupe Les Républicains) Elle permet aux entreprises d'investir en leur donnant de la visibilité sur le long terme. C'est elle qui fait de notre pays le plus attractif d'Europe. GlobalFoundries ne viendrait pas investir 6 milliards d'euros en Isère si nous ne lui garantissions pas la stabilité fiscale !

Si nous n'avons pas toujours gagné la bataille des investissements étrangers, ces trente dernières années, c'est à cause de l'instabilité fiscale.

La stabilité fiscale n'a pas de prix. Elle rapporte de l'emploi, de la prospérité et de la richesse. Voilà pourquoi je refuse la taxation que vous proposez.

Selon vous, Total et CMA CGM ont fait des profits considérables. Je suis gêné lorsqu'on pointe du doigt une entreprise qui réussit...

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Vous les avez citées vous-même !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - La remise de 20 centimes par litre consentie par Total dans toutes les stations lui coûte 500 millions d'euros. (Protestations sur les travées du groupe SER) Ce n'est pas rien ! Même chose pour CMA CGM.

D'autres entreprises comme Stellantis, Renault, ou Engie, n'ont rien demandé à personne ! Pourquoi seraient-elles soumises à un impôt supplémentaire alors qu'elles doivent investir dans la transition écologique, et qu'elles ont besoin de marge pour réussir ?

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Quelle honte !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Les invectives ne font pas progresser. La stabilité fiscale n'a pas de prix. (Applaudissements sur les travées du RDPI et sur quelques travées du groupe Les Républicains)

M. Yan Chantrel.  - Votre argumentaire n'est pas convaincant. Vous assénez votre catéchisme libéral alors que le ruissellement promis reste théorique.

Plus grave est le parallélisme avec le projet de loi Pouvoir d'achat. Vous avez refusé d'augmenter les salaires et vous refusez, aujourd'hui, avec des pudeurs de gazelle, de taxer ceux qui profitent de la crise !

Quid des concessionnaires d'autoroutes, dont vous avez soutenu -  alors directeur de cabinet de Dominique de Villepin  - la privatisation. La facture est salée pour les Français, lorsqu'ils peuvent partir en vacances !

L'injustice que vous instaurez est le terreau des révoltes de demain. Agissez, envoyez des signaux positifs pour montrer que la répartition des richesses est possible ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur quelques travées du groupe CRCE)

À droite.  - Cela s'appelle du chantage !

Mme Isabelle Briquet.  - Les amendements émanent de plusieurs travées, ce qui montre l'importance du sujet.

À situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles ! Pourquoi refuser ces recettes exceptionnelles alors que selon vous la cote d'alerte des finances publiques est atteinte ?

Doit-on tirer un trait sur la justice sociale au nom de la stabilité financière ?

M. François Patriat.  - Nous ne voterons pas ces amendements. (Marques d'ironie à gauche) Pour nous, la justice c'est l'efficacité. Chaque Français doit voir son pouvoir d'achat augmenter. Mieux vaut cette remise qu'une taxe.

Ne vous en déplaise, le ruissellement a fonctionné : baisse d'impôts, créations d'emplois, hausses des minima sociaux.

La France n'a pas besoin d'impôts supplémentaires, mais d'investissements.

M. Vincent Éblé.  - Sans taxes ?

M. François Patriat.  - Allez-vous taxer des entreprises étrangères ?

Comparaison n'est pas raison. La France est le pays qui a le taux de prélèvements obligatoires le plus important, mais c'est aussi celui qui redistribue le plus. Comment ont été traités les Espagnols et les Italiens pendant la crise, par rapport aux Français ?

M. David Assouline.  - L'Espagne a augmenté le SMIC !

M. François Patriat.  - À quel niveau est-il aujourd'hui ? Les Espagnols doivent cumuler plusieurs emplois. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

M. David Assouline.  - « Fini le quoi qu'il en coûte, on passe au combien ça coûte », nous disait Gabriel Attal. La question est plutôt de savoir qui doit payer pour aider le pays à traverser la crise.

On aurait pu croire qu'après les résultats électoraux, qui reflètent une campagne marquée par le sujet de l'inflation, le Gouvernement aurait revu sa copie. Je ne vous reproche pas de défendre ce que vous avez toujours défendu, mais désormais, monsieur Le Maire, c'est la droite qui vous fête et vous applaudit, et vous refusez toute proposition de la gauche.

Dans le précédent projet de loi, vous refusiez toute augmentation de salaire. Aujourd'hui, vous refusez de taxer ce qu'on appelait autrefois les « profiteurs de guerre », alors que les centristes du Sénat appellent à le faire. Vous défendez les intérêts de ceux qui ont déjà beaucoup.

M. Pascal Savoldelli.  - Il faut distinguer les différents types d'entreprises qui existent.

Notre collègue député, Gilles Carrez, qu?on ne peut pas accuser d'être de gauche, a fait la démonstration de l'inégalité qui existait entre les PME et les multinationales, les unes étant taxées à 24,4 %, les autres à 17,53 %.

Votre argument n'est donc pas valable.

Vous nous parlez du geste ô combien généreux de Total, mais ces 500 millions d'euros ne représentent que 0,2 % du chiffre d'affaires de l'entreprise.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Pas de leur bénéfice.

M. Pascal Savoldelli.  - Et dire que nous avons passé du temps à débattre pour limiter de 0,5 % la baisse de la revalorisation du RSA ! Il y a deux camps dans cet hémicycle : celui de la droite alliée au Gouvernement qui refuse toute justice sociale et celui de la gauche.

À l'issue de ce débat, il faut que nous parvenions à ce que les entreprises qui font des bénéfices contribuent, ne serait-ce qu'à hauteur d'un euro ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et sur quelques travées du groupe SER et du GEST)

M. Daniel Salmon.  - De nombreuses entreprises ne font pas leurs bénéfices en France, dites-vous ? Total, avec un bénéfice de 10 milliards d'euros en 2019, n'a pas payé un centime d'impôt et le Trésor public lui a remboursé 126 millions d'euros ! Comment est-ce possible ? Il est temps qu'on réprime ces fraudes. (Applaudissements sur les travées du GEST)

M. Pascal Savoldelli.  - Très bien.

Mme Nathalie Goulet.  - Je voterai bien sûr l'amendement de Mme Vermeillet.

Total est en bonne place dans les Panama papers. Nous avions demandé que les entreprises présentes dans les paradis fiscaux voient leurs aides covid réduites ou supprimées ; nous avions ensuite demandé une conditionnalité analogue vis-à-vis des entreprises qui distribuent des dividendes. Le Gouvernement a refusé les deux. LVMH a réalisé 12 milliards d'euros de profits, Biogroup et toute l'industrie pharmaceutique ont multiplié les aides et les profits - c'est normal qu'à des aides exceptionnelles succèdent des contributions exceptionnelles.

M. Michel Canévet.  - En 2020 et 2021, la France a aidé les entreprises à surmonter la pandémie et leur a permis de bien se porter, avec un coût pour les finances publiques. Mais un certain nombre d'entre elles ont des résultats doubles, triples ou quadruples de leur résultat habituel. Ne profiteraient-elles pas de la situation inflationniste que nous connaissons ?

L'amendement de Mme Vermeillet est différent de ceux des autres groupes : c'est une contribution basée sur les bénéfices supérieurs de 20 % à la moyenne de ceux des années 2017, 2018 et 2019.

Cette taxation ne toucherait que les entreprises qui ont réalisé un profit très important en 2021.

M. Olivier Cadic.  - Pour ma part, je suis opposé à ce type de mesures circonstancielles, démagogiques et inefficaces. Il faut des règles fixes et préétablies : c'est une question de sécurité juridique pour les entreprises. S'il y a bien un aspect de la loi fiscale qui gêne les entrepreneurs, c'est sa rétroactivité.

Le respect du droit et des libertés fondamentales suppose le respect de principes supérieurs. Ce comportement déloyal de l'État se retourne toujours contre lui.

Sur le plan européen, la protection de la confiance réciproque oblige la puissance publique à respecter la parole donnée.

La taxe espagnole ne produira ses effets qu'en 2024. Au Royaume-Uni, les recettes fiscales sont données en augmentation par le ministre des finances, mais sa concurrente pour le poste de Premier ministre veut réduire les impôts. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Philippe Dominati.  - Quelle est la définition des superprofits ? J'ai du mal à comprendre.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Moi aussi.

M. Philippe Dominati.  - S'agit-il de ceux que réalise une entreprise qui se rétablit et commence à être bien gérée ?

Appliquons la taxe du groupe UC à la SNCF : 1,3 milliard d'euros de profits en 2017, 141 millions d'euros en 2018, suivis de 811 millions de pertes en 2019, soit une moyenne de superprofits de 223 millions pour une taxe de 133 millions d'euros !

La Poste, maintenant : 798 millions d'euros en 2018, 822 millions en 2019, 2 milliards d'euros à la suite de reprise de provision pour 2021, et voilà La Poste avec 250 millions d'euros de superprofits ! Que dire des agriculteurs qui profitent de la hausse du prix du blé ou des commerçants qui bénéficieront des jeux Olympiques ?

Ou bien serait-ce plutôt une notion démagogique pour taxer tous les profits ? Il n'aurait pas fallu, monsieur le ministre, pointer du doigt les Gafam. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Bruno Retailleau.  - Ces amendements ont le goût sucré des fausses mesures de justice sociale. (Marques d'agacement à gauche)

Elles ne sont pas efficaces : une taxation supplémentaire de Total ne créerait pas de recettes fiscales supplémentaires. (« Pourquoi ? » à gauche)

Allez-vous créer une taxe pour ceux qui, parce qu'il fait chaud, vendent plus de bouteilles d'eau ? (Brouhaha à gauche)

M. Pascal Savoldelli.  - Ce n'est pas un argument !

M. Bruno Retailleau.  - La France a fait le choix de surtaxer les entreprises : elle a 150 milliards d'euros de différence de taxation avec l'Allemagne, et quatre fois plus d'impôts de production et de charges sociales. C'est ce qui a conduit à sa désindustrialisation.

Nous sommes les champions du monde de la fiscalité, avec le Danemark ; je ne suis pas sûr qu'il faille être encore plus « civilisé ».

M. Jean-Claude Tissot.  - M. Saadé l'a admis devant notre commission : il fait bien des superprofits. Pour attribuer les PGE, vous n'avez pas hésité.

Monsieur le ministre, vous considérez que c'est aux entreprises de décider de ce qu'elles donneront. Je croyais que c'était au Parlement de le faire. Vous n'êtes plus le ministre de l'économie, mais celui de la charité. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

M. Thierry Cozic.  - Vous parlez de stabilité fiscale ? Je crois qu'après toutes les aides, il pourrait y avoir un retour de bons procédés.

Demander à Total de baisser le prix du litre d'essence pose un problème de concurrence. Que répondez-vous au président du Conseil national des professionnels de l'automobile (CNPA), qui vous dit que la survie des petits exploitants de stations-service est en jeu ?

L'État doit parfois réguler. Une taxe, même minime, aurait eu du sens.

M. Vincent Segouin.  - Notre balance commerciale est ultra-déficitaire, et se dégrade d'année en année. Nous sommes le pays européen qui taxe le plus. Citoyen, quand vous habitez dans une commune où la taxe foncière est deux fois plus importante que dans la commune d'à côté, vous déménagez ! (« Mais non ! » à gauche)

M. David Assouline.  - La preuve, c'est qu'on reste en France !

M. Vincent Segouin.  - Quand allons-nous arrêter de faire fuir les entreprises ? J'admire les entreprises qui continuent à déclarer leurs impôts en France.

M. le président.  - J'invite les orateurs, qui sont nombreux, à s'écouter les uns les autres.

M. Sébastien Meurant.  - En France, on continue à vouloir pénaliser ceux qui réussissent. Moi, je dis bravo à Total, à tous ceux qui travaillent pour cet héritier de la Compagnie française des pétroles.

Comment se fait-il que Total engrange des profits colossaux, tandis que EDF, cette pépite française, créée par des personnes qui pensaient à l'échelle de générations, réalise autant de pertes ? (Protestations à gauche)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Ce n'est pas le bon exemple !

M. Sébastien Meurant.  - M. Jospin, pour faire plaisir aux Verts, a fermé Superphénix et a cessé d'entretenir les réacteurs. C'est cette idéologie dangereuse qui est à l'origine de l'énergie chère aujourd'hui. (Protestations sur les travées du GEST)

Maintenant les Verts ont mûri, ils ont été touchés par la grâce, comme Brice Lalonde l'avoue ! (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains)

M. Ronan Dantec.  - Ce débat nous permet de vérifier le catéchisme libéral classique (rires) : la stabilité fiscale, les entreprises qui seraient trop taxées, l'attractivité de notre pays compromise... Or tout cela n'a rien à voir.

Les plus grandes fortunes françaises ont crû de 86 %, soit un gain de 236 milliards d'euros.

Mme Éliane Assassi.  - Ils sont surtaxés, les pauvres !

M. Ronan Dantec.  - La réalité, c'est la concentration.

Monsieur le ministre, vous prétendez qu'une augmentation de l'IS ferait fuir les capitaux ; les chiffres prouvent le contraire.

Le capitalisme raisonnable, maintenant, c'est la gauche.

M. Vincent Segouin.  - Oh là là !

M. Ronan Dantec.  - Sans un minimum de justice, il n'y a plus de contrat social possible.

M. Thomas Dossus.  - Je partage avec le Président de la République le constat qu'il y a des profiteurs de guerre, des profiteurs de crise : TotalEnergies, CMA CGM, par exemple - il faut les nommer. Monsieur Le Maire, vous faites confiance à Total pour investir dans la transition énergétique, alors qu'ils sont au courant depuis cinquante ans du caractère criminel de leurs activités d'extraction fossile.

Nous cherchons la justice fiscale et vous êtes le ministre de l'injustice fiscale. (Applaudissements sur les travées du GEST)

M. Victorin Lurel.  - À entendre certains, on croirait que toute augmentation d'impôt serait intrinsèquement mauvaise et s'opposerait à la justice et à l'efficacité. Pour moi, tout ce qui sert la justice est efficace. Le signal que vous envoyez, c'est qu'on peut être un profiteur de crise sans être solidaire. Une taxe exceptionnelle bornée dans le temps ne remet en cause ni la stabilité fiscale, ni l'attractivité. Ne laissez pas prospérer les inégalités. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST)

M. Jean-Pierre Sueur.  - Tout prélèvement serait intrinsèquement pervers : voilà le dogme. On nous dit que tout prélèvement spécifique ouvre la porte à un prélèvement généralisé. M. Retailleau, que j'ai connu plus inspiré, a pris l'exemple des bouteilles d'eau minérale. Quand Total fait un superprofit de 4,7 milliards d'euros en trois mois, est-il scandaleux de prélever une partie de cette somme ?

L'amendement de M. Féraud porte sur les entreprises gérant les autoroutes. Les Français qui paient l'essence assez cher s'entassent aux péages d'autoroute dont les tarifs seraient, nous dit-on, augmentés. Et quand on sait les conditions des concessions... Un prélèvement serait-il scandaleux ? Non, un tel dispositif est bien ajusté, et juste. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST)

M. Hervé Gillé.  - Charité bien ordonnée commence par soi-même. Monsieur le ministre, si les grands groupes versent leur obole, c'est pour éviter une taxation beaucoup plus élevée. Or cette obole ne concerne que les consommateurs qui iront chez Total : c'est inéquitable et inadmissible. Les superprofits sont réalisés à partir de la crise, et bien souvent grâce à la spéculation. C'est cela qu'il faut taxer.

Il n'y aura pas d'effet immédiat, dites-vous. Mais rien n'empêche une compensation versée immédiatement aux Français !

La taxation, c'est la seule solution équitable. (Applaudissements sur quelques travées du groupe SER ; quelques membres du GEST applaudissent également.)

M. Serge Mérillou.  - Monsieur le ministre, votre doctrine fiscale a-t-elle évolué ? On ne peut pas dire que Total est si maltraité fiscalement ; et ses quelques libéralités ont des effets très inégaux sur le territoire - il y a peu de stations Total dans les zones rurales. Imaginons que chacun paie ce qu'il veut à qui il veut comme il veut. Et on le remercierait, car il fait le bien autour de lui ! Comment paierait-on les enseignants ou les forces de l'ordre ?

Votre doctrine fiscale, ce n'est pas ma conception de la justice. Et ce que vous ne faites pas pour la justice fiscale, le peuple ira le chercher dans la rue, même si je ne le souhaite pas. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur quelques travées du GEST et du groupe CRCE)

M. Pierre Laurent.  - Les tirs de barrage contre nos amendements, avant même de les aborder au fond, alors qu'aucun ne mettra à bas notre système fiscal, sont déplorables. Monsieur Dominati, je vais vous payer un abonnement aux Échos : toute la presse en parle, de ces superprofits que vous mettez en doute.

M. Philippe Dominati.  - Personne n'en parle ainsi !

M. Pierre Laurent.  - En 2008, M. Sarkozy a inventé une contribution exceptionnelle sur les hauts revenus et personne n'a jugé l'idée farfelue. Ce n'est pas inédit.

Monsieur Retailleau, qui a construit un système fiscal assis sur la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), cette taxe géante prélevée sur la consommation, qui est la plus injuste de toutes ? Nous proposons de rétablir un peu de justice avec ces amendements. Ayez la décence de les discuter pour ce qu'ils sont au lieu de les caricaturer. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et sur plusieurs travées du groupe SER et du GEST)

M. Rémi Féraud.  - L'amendement du groupe UC taxe tous les profits au-delà de 1 million d'euros, ce qui concerne beaucoup d'entreprises. Nos amendements sont plus ciblés, plus raisonnables. Nous ne créons pas d'impôts par méchanceté, mais par volonté de redistribution. Nous nous adressons à toute notre assemblée : prenons-nous nos responsabilités aujourd'hui ou serons-nous contraints d'y revenir à l'automne dans la discussion budgétaire ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

M. Claude Raynal, président de la commission.  - Dire qu'il y aurait ici des sénateurs pro-entreprises et des sénateurs anti-entreprises est caricatural. (M. Pascal Savoldelli et Mme Sylvie Vermeillet approuvent.) J'ai moi-même été patron d'une PME pendant des années. La baisse de l'IS, je le rappelle, était voulue par François Hollande.

M. Jean-François Husson, rapporteur général.  - Ce n'est pas vraiment lui qui l'a mise en oeuvre !

M. Claude Raynal, président de la commission.  - Qu'une entreprise réussisse, c'est très bien. Mais certaines entreprises qui ont fonctionné de la même manière cette année que les précédentes, avec le même chiffre d'affaires, réalisent des profits mirobolants. C'est une situation très spécifique. Tant mieux pour Total, dont l'histoire, je le rappelle incidemment, est très liée à l'État et à son soutien. Que Total redonne au collectif ce qui a été gagné de manière très inattendue et sur une courte durée, cela me paraît tout à fait légitime. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

M. Olivier Rietmann.  - Nous parlons de redistribution.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Ce n'est pas un gros mot !

M. Olivier Rietmann.  - Monsieur Tissot, Rodolphe Saadé a aussi dit que CMA CGM avait versé 4 500 euros à tous ses salariés qui gagnaient moins de deux fois le SMIC. Total a versé entre 4 000 et 8 000 euros à chacun de ses salariés au titre de la participation et de l'intéressement. C'est mille fois plus efficace qu'un impôt perdu dans les méandres de notre système fiscal, dont une toute petite partie seulement reviendra aux Français ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; quelques protestations sur les travées du groupe SER et du GEST)

M. Jean-Luc Fichet.  - Chacun, ici, a son interprétation personnelle de la justice. Certaines PME et TPE supportent un impôt maximal à 25 %, sont loin d'une station Total, dans des zones rurales éloignées. Si leurs patrons nous écoutent, ils ont sans doute le sentiment d'être laissés pour compte, quand certains d'entre nous craignent de mettre Total à genoux... Faisons un peu de redistribution, pour un développement plus harmonieux. (MM. Jean-Pierre Sueur et Yan Chantrel applaudissent.)

Mme Sylvie Vermeillet.  - On ne parle plus de la dette. Où sont les économies proposées par celles et ceux qui veulent financer le litre d'essence à 1,50 euro ? Nous, nous ne finançons pas les mesures que nous proposons par la dette.

M. Vincent Éblé.  - Ils s'en moquent, ils ne seront plus là quand il faudra rembourser !

M. Daniel Breuiller.  - J'entends dire beaucoup de mal de l'impôt, mais, monsieur Retailleau, notre pays est plus civilisé parce qu'il a des impôts pour nourrir ses services publics, qui bénéficient aussi aux entreprises. Celles-ci s'installent aussi en France parce qu'elles y trouvent des cadres formés et des conditions agréables. Quand j'entends dire que collecter l'impôt, c'est prendre le risque qu'il soit très mal redistribué, je vous avoue que je suis inquiet. Il faut faire attention à bien le distribuer, vers la transition écologique et la justice sociale. (Applaudissements sur les travées du GEST et sur plusieurs travées des groupes SER et CRCE)

Mme Angèle Préville.  - Ce sont les Français qui consomment l'énergie qui ont contribué aux bénéfices exceptionnels. Leur réalité est radicale et dure dans les territoires. Dans mon département du Lot, certaines personnes âgées ne se chauffent pas l'hiver ; l'été, d'autres n'utilisent pas l'eau chaude. Je pose la question du vécu des Français. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe SER et sur quelques travées du GEST)

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Je remercie cette assemblée pour la qualité de ce débat de fond, et particulièrement les sénateurs qui se sont prononcés contre la taxation des superprofits.

Quelques rappels s'imposent. Pour certains, la taxe sur les superprofits est une question de justice. Or nous sommes le pays le plus lourdement taxé de l'OCDE et celui qui redistribue le plus !

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Vous l'avez déjà dit quatre fois !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - On me dit aussi : si vous ne taxez pas les grandes entreprises qui ont fait beaucoup de profits, vous risquez la révolte sociale. Or la seule révolte sociale qui se soit produite ces dernières années avait pour origine une taxation supplémentaire... (Protestations à gauche ; M. Vincent Segouin applaudit.)

M. Jean-François Husson, rapporteur général.  - On l'avait dit !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - En France, toutes les révolutions viennent de la surtaxation. (Nouvelles protestations à gauche)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Si on ne taxe pas, les gens redescendront dans la rue !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Je ne conteste pas la légitimité de l'impôt.

Les entreprises qui ont bénéficié de la situation apportent leur contribution : CMA CGM et Total notamment. Vous pouvez estimer que ce n'est pas suffisant, mais elles ont contribué. Je comprends la question de M. Dominati : pour certains, les superprofits, c'est simplement le profit. (Nouvelles protestations sur les travées du groupe SER)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Lisez les amendements !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Grâce à la baisse des impôts, nous avons enfin recréé des emplois industriels dans notre pays. Je ne voudrais pas que cette reconquête soit abîmée par la taxation de certaines entreprises sous le seul prétexte qu'elles ont, ponctuellement, fait des bénéfices importants, alors qu'elles ont connu des difficultés auparavant et que l'horizon économique est sombre.

Un homme qui, pourtant, a beaucoup augmenté les impôts, a déclaré en 1984 que la baisse des impôts était nécessaire et qu'il diminuerait l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les entreprises, à l'occasion de la plus forte baisse jamais connue depuis la Libération. Il estimait que c'était important et juste. C'était François Mitterrand, en 1984. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Cela n'a pas marché.

L'amendement n°319 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°226 rectifié.

À la demande des groupes UC et Les Républicains, l'amendement n°130 rectifié bis est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°132 :

Nombre de votants34 1
Nombre de suffrages exprimés 332
Pour l'adoption 155
Contre 177

Le Sénat n'a pas adopté.

L'amendement n°227 rectifié n'est pas adopté.

À la demande du groupe Les Républicains, les amendements identiques nos249 rectifié et 320 sont mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°133 :

Nombre de votants 342
Nombre de suffrages exprimés 337
Pour l'adoption 155
Contre 182

Le Sénat n'a pas adopté.

À la demande du groupe Les Républicains, l'amendement n°250 rectifié est soumis à un scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°134 :

Nombre de votants 342
Nombre de suffrages exprimés 282
Pour l'adoption 101
Contre 181

Le Sénat n'a pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°321, présenté par M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Avant l'article 1er A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le I de l'article 219 du code ge?ne?ral des impo?ts est ainsi modifie? :

1° Au deuxie?me aline?a, le taux : « 25 % » est remplacé par le taux : « 33,3 % » ;

2° Apre?s le b, il est inse?re? un alinéa ainsi re?dige? :

« .... Le taux normal de l'impo?t sur les socie?te?s mentionne? au deuxie?me aline?a du pre?sent I est fixe? a? :

«  -  20 % pour la fraction de be?ne?fice imposable par pe?riode de douze mois comprise entre 38 120 € et 76 240 € ;

«  -  25 % pour la fraction de be?ne?fice imposable par pe?riode de douze mois comprise entre 76 241 € et 152 480 € ;

«  -  30 % pour la fraction de be?ne?fice imposable par pe?riode de douze mois comprise entre 152 481 € et 304 960 € ; ».

M. Éric Bocquet.  - M. Patrick Artus, directeur des études de Natixis et membre du conseil d'administration de Total, a analysé de façon cinglante la baisse de la fiscalité du capital, comme étant un échec. Le Gouvernement a voulu baisser ces impôts pour stimuler les investissements, mais cela a augmenté l'inflation des actifs sans créer de richesse.

Le taux d'épargne est passé de 12 % à 17 % du PIB alors que le taux d'investissement net des entreprises reculait de 5 % à 3 %. Hormis quelques effets bénéfiques sur des levées de fonds de start-up, les investissements ont bénéficié à des actifs déjà existants, sans créer de valeur nouvelle, ni soutenir la croissance et l'emploi. Cela vient contredire les arguments du ministre.

M. Jean-François Husson, rapporteur général.  - Avis défavorable. Les faits démontrent qu'avec la baisse du taux de l'IS, son produit augmente.

Le signal envoyé aux acteurs économiques est bon et crée une dynamique. Revenir là-dessus, augmenter les impôts, enverrait contrario un mauvais signe.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°321 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°157 rectifié, présenté par M. Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Avant l'article 1er A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Les articles du code général des impôts modifiés par les articles 8 et 29 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021 sont rétablis dans leur rédaction antérieure à la publication de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.

II.  -  Les articles du code général des collectivités territoriales modifiés par l'article 8 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021 sont rétablis dans leur rédaction antérieure à la publication de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.

III.  -  L'article 46 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006 modifié par l'article 8 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021 est rétabli dans sa rédaction antérieure à la publication de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.

IV.  -  L'article 16 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 modifié par l'article 29 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021 est rétabli dans sa rédaction antérieure à la publication de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.

V.  -  Les IV, V et VI de l'article 8 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021 sont abrogés.

VI.  -  Les III, IV, V et VI de l'article 29 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021 sont abrogés.

M. Pascal Savoldelli.  - Monsieur Le Maire, vous avez expliqué que certains impôts ne rapportaient rien et que les impôts de production étaient stupides. La baisse de l'IS prévue pour 2023 est, pour nous, un non-sens. Les différentes études de l'Essec et de l'OCDE - qui ne sont pas des instances communistes -, montrent l'absence de corrélation entre la fiscalité économique locale et la compétitivité des entreprises. Patrick Martin, vice-président du Medef, estime que la fiscalité ne domine pas le choix d'implantation des sociétés, à l'inverse du site ou des transports, autant d'aménités financées par les collectivités territoriales.

Ces baisses d'impôts profitent avant tout aux grandes entreprises, et non aux TPE. Le gain moyen pour les TPE est de 940 euros, contre 9,1 millions d'euros pour les grandes entreprises. En outre, cela va contre l'autonomie financière des collectivités.

Solennellement, monsieur le ministre, je vous le demande : quel est le solde des emplois industriels créés par l'exonération des impôts de production, qui, demain, vont disparaître ?

M. le président.  - Amendement n°247 rectifié, présenté par M. Féraud et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Avant l'article 1er A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Les articles du code général des impôts modifiés par l'article 8 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021 sont rétablis dans leur rédaction antérieure à la publication de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.

II.  -  Les articles du code général des collectivités territoriales modifiés par l'article 8 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021 sont rétablis dans leur rédaction antérieure à la publication de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.

III.  -  L'article 46 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006 modifié par l'article 8 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021 est rétabli dans sa rédaction antérieure à la publication de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.

IV.  -  Les IV, V et VI de l'article 8 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021 sont abrogés.

Mme Isabelle Briquet.  - Dans la logique d'une hausse des moyens de l'État face à une majorité présidentielle et sénatoriale qui défend leur baisse, nous proposons de revenir sur la diminution des impôts de production.

Notre objectif n'est pas idéologique : dotons les collectivités de moyens !

M. le président.  - Amendement n°369 rectifié, présenté par MM. Breuiller, Parigi, Benarroche, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mmes de Marco et Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.

Avant l'article 1er A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Les articles du code général des impôts, du code général des collectivités territoriales et de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006 modifiés par l'article 8 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021 sont rétablis dans leur rédaction antérieure à la publication de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.

II.  -  Les IV, V et VI de l'article 8 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021 sont abrogés.

III.  -  Les articles du code général des impôts et la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 modifiés par l'article 29 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021 sont rétablis dans leur rédaction antérieure à la publication de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.

M. Daniel Breuiller.  - La baisse des impôts de production profite d'abord aux plus grandes entreprises. Elle limite aussi singulièrement le lien entre les territoires et la fiscalité des entreprises, ce qui devrait nous interpeller ! Les collectivités territoriales perdent un à un leurs leviers fiscaux. La compensation par une fraction de TVA, taxe injuste, est moins dynamique et conduit à des effets d'aubaine.

Il faut rétablir ces impôts qui n'ont pas une influence décisive sur la croissance - c'est l'European Economic Review qui le dit.

M. Jean-François Husson, rapporteur général.  - Avis défavorable. Sans revenir sur l'effet de la baisse des impôts de production, bonne tant pour l'économie que pour financer une partie de la baisse du taux normal d'IS, je voudrais confirmer à M. Féraud que son amendement conduirait à un ressaut de prélèvements obligatoires sur les entreprises de 7 milliards d'euros. Ce n'est pas le bon moment.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Avis très défavorable. Entre 2006 et 2015, la France a perdu 500 000 emplois industriels. Entre 2017 et 2022, pour la première fois depuis vingt ans, le solde des emplois industriels est positif, de 19 000.

La reconquête industrielle est une priorité absolue pour le Gouvernement... et je sais qu'elle l'est pour vous, monsieur Savoldelli. On ne peut la défendre en maintenant des impôts de production quatre fois plus élevés qu'en Allemagne et deux fois plus élevés que la moyenne européenne.

La désindustrialisation, dans laquelle nous portons tous une part de responsabilité, a suscité un désarroi, une angoisse, surtout dans les classes populaires, qui a provoqué la hausse du Rassemblement National. À chaque fois qu'une usine ferme, une permanence du RN ouvre.

Que puis-je répondre à un chef d'entreprise qui me demande si nous avons toujours des impôts de production aussi élevés ?

J'entends les arguments sur la liaison entre les collectivités territoriales et les entreprises. Ils sont parfaitement recevables. Je souhaite que nous ayons ce débat. La baisse des impôts de production est une condition de la croissance, mais il y a une vraie question sur le financement des collectivités territoriales et leur attractivité. Je suis prêt à avoir ce débat, mais il passe d'abord par la réduction des impôts.

M. Pascal Savoldelli.  - Ma question était précise : quel est le solde des emplois industriels créés ?

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Le solde est de 19 000.

M. Pascal Savoldelli.  - Les exonérations ont atteint 10 milliards d'euros en 2021 ; il est envisagé qu'elles atteignent 9 milliards d'euros en 2023. Vingt milliards d'euros pour créer 19 000 emplois ? Cela fait cher l'emploi ! (M. David Assouline sourit.)

Nous ne partageons pas votre doctrine fiscale, qui est que cet argent n'ira ni à l'État ni aux collectivités.

M. Daniel Chasseing.  - L'un des problèmes de la CVAE réside dans ses conséquences sur les recettes des collectivités.

De 1995 à 2015, on a perdu un tiers des entreprises, et la moitié des employés, parce que notre prix horaire moyen était le plus élevé d'Europe. Depuis le CICE et la baisse des impôts de production, on se rapproche du taux allemand et on gagne en compétitivité.

Si l'on a des cotisants, on a des recettes pour réduire la dette.

Il faudra bien sûr trouver des recettes pour les collectivités. Mais s'il y a un peu d'impôts de production en Allemagne, il n'y en a pas du tout ailleurs !

La courbe s'inverse, le nombre d'entreprises augmente. Nous devons poursuivre en ce sens. (M. Claude Malhuret applaudit.)

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Ce débat est fondamental. Monsieur Savoldelli, nous pourrions retourner votre argument : 10 milliards d'euros d'impôts de production non supprimés et 500 000 emplois détruits, cela fait cher l'emploi détruit ! On ne peut pas tenir ce genre de raisonnement.

Nous inversons la tendance de trois décennies de fermetures et de délocalisations d'usines, qui ont créé des problèmes politiques dont nous avons du mal à nous relever.

Notre situation fiscale doit être aussi attractive que celle de nos voisins : nous ne pourrons pas convaincre une entreprise de s'installer en France si les impôts de production sont deux fois, trois fois, sept fois plus importants que de l'autre côté du Rhin, des Alpes ou des Pyrénées !

Il faut ouvrir les yeux et regarder la réalité en face : de même qu'on n'attrape pas des mouches avec du vinaigre, on n'attrape pas des entreprises avec des impôts trop élevés.

L'amendement n°157 rectifié n'est pas adopté, non plus que les amendements nos247 rectifié et 369 rectifié.

M. le président.  - Amendement n°327, présenté par M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Avant l'article 1er A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 1 du I de l'article 223 sexies du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Au début du deuxième alinéa, le taux : « 3 % » est remplacé par le taux : « 8 % » ; 

2° Au début du troisième alinéa, le taux : « 4 % » est remplacé par le taux : « 10 % ».

M. Pierre Laurent.  - À défaut d'avoir accepté nos propositions précédentes, écoutez celle-ci : renforcer la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus. Nicolas Sarkozy avait parlé d'un effort nécessaire.

Une personne célibataire qui déclare 400 000 euros de revenu fiscal de référence paierait environ 4 500 euros. Un couple, pour 500 000 euros de revenu fiscal de référence, paierait 26 000 euros. Il n'y aurait pas de quoi les jeter sur la paille. Ce sont ces mêmes contribuables qui se ruent sur l'épargne.

Il nous semble normal d'augmenter cette contribution que vous avez créée.

M. Jean-François Husson, rapporteur général.  - En passant de 3 % à 8 %, et de 4 % à 10 %, vous triplez presque le montant de cette contribution. Le niveau d'imposition est aujourd'hui raisonnable. Il faut avoir, pour les particuliers, la même logique que pour les entreprises. Le produit de l'impôt continue d'augmenter.

L'avis est défavorable.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Même avis, pour les mêmes raisons. Monsieur Laurent, la taxation dont vous parlez était exceptionnelle. Elle a été votée en 2011, et on assurait, la main sur le coeur, qu'elle ne serait jamais reconduite. En 2022, elle existe encore et nous discutons de sa hausse. En France, en matière de taxation, l'exceptionnel dure. (M. François Patriat approuve.)

M. Pierre Laurent.  - Depuis 2008, la hausse de ces patrimoines n'a jamais cessé. L'exceptionnel dure aussi du côté des fortunes. Augmenter cette contribution relève de la justice.

Vous faites porter l'essentiel de la charge fiscale sur la TVA, c'est-à-dire sur un impôt injuste qui pèse davantage sur les plus modestes.

L'amendement n°327 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°323, présenté par M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Avant l'article 1er A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Les articles du code ge?ne?ral des impo?ts modifie?s par les articles 28 et 29 de la loi n° 2017-1837 du 30 de?cembre 2017 de finances pour 2018 sont re?tablis dans leur re?daction ante?rieure a? la publication de la loi n° 2017-1837 du 30 de?cembre 2017 de finances pour 2018.

II.  -  Les articles du code mone?taire et financier modifie?s par l'article 28 de la loi n° 2017-1837 du 30 de?cembre 2017 de finances pour 2018 sont re?tablis dans leur re?daction ante?rieure a? la publication de la loi n° 2017-1837 du 30 de?cembre 2017 de finances pour 2018.

III.  -  L'article L. 315-4 du code de la construction et de l'habitation modifie? par l'article 28 de la loi n° 2017-1837 du 30 de?cembre 2017 de finances pour 2018 est re?tabli dans sa re?daction ante?rieure a? la publication de la loi n° 2017-1837 du 30 de?cembre 2017 de finances pour 2018.

IV.  -  Les articles du code de la se?curite? sociale modifie?s par l'article 28 de la loi n° 2017-1837 du 30 de?cembre 2017 de finances pour 2018 sont re?tablis dans leur re?daction ante?rieure a? la publication de la loi n° 2017-1837 du 30 de?cembre 2017 de finances pour 2018.

V.  -  L'article L. 16 du livre des proce?dures fiscales modifie? par l'article 28 de la loi n° 2017-1837 du 30 de?cembre 2017 de finances pour 2018 est re?tabli dans sa re?daction ante?rieure a? la publication de la loi n° 2017-1837 du 30 de?cembre 2017 de finances pour 2018.

VI.  -  Les articles 28 et 29 de la loi n° 2017-1837 du 30 de?cembre 2017 de finances pour 2018 sont abroge?s.

VII.  -  Les articles modifie?s par les dispositions de l'article 44 de la loi n° 2018-1317 du 28 de?cembre 2018 de finances pour 2019 sont re?tablis dans leur re?daction en vigueur au 31 de?cembre 2018.

M. Éric Bocquet.  - Le prélèvement forfaitaire unique (PFU) était présenté par vous, monsieur le ministre, en 2017, comme une baisse de l'imposition du capital qu'il fallait mettre en place, sinon les investissements et la modernisation des outils de production n'auraient pas lieu.

Vous avez annoncé une évaluation deux ans plus tard. France Stratégie, dans un rapport de septembre 2021, se demande si la fiscalité des particuliers n'a pas incité les entreprises à augmenter les dividendes de 9 milliards d'euros. Une étude par microsimulation de l'Insee de 2020 montre que le coût pour les finances publiques est de 3,4 milliards d'euros, sans aucun effet sur les comportements.

M. le président.  - Amendement n°224 rectifié, présenté par MM. Breuiller, Parigi, Benarroche, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mmes de Marco et Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.

Avant l'article 1er A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Les articles du code ge?ne?ral des impo?ts modifie?s par les articles 28 et 29 de la loi n° 2017-1837 du 30 de?cembre 2017 de finances pour 2018 sont re?tablis dans leur re?daction ante?rieure a? la publication de la loi n° 2017-1837 du 30 de?cembre 2017 de finances pour 2018.

II.  -  Les articles du code mone?taire et financier modifie?s par l'article 28 de la loi n° 2017-1837 du 30 de?cembre 2017 de finances pour 2018 sont re?tablis dans leur re?daction ante?rieure a? la publication de la loi n° 2017-1837 du 30 de?cembre 2017 de finances pour 2018.

III.  -  L'article L. 315-4 du code de la construction et de l'habitation modifie? par l'article 28 de la loi n° 2017-1837 du 30 de?cembre 2017 de finances pour 2018 est re?tabli dans sa re?daction ante?rieure a? la publication de la loi n° 2017-1837 du 30 de?cembre 2017 de finances pour 2018.

IV.  -  Les articles du code de la se?curite? sociale modifie?s par l'article 28 de la loi n° 2017-1837 du 30 de?cembre 2017 de finances pour 2018 sont re?tablis dans leur re?daction ante?rieure a? la publication de la loi n° 2017-1837 du 30 de?cembre 2017 de finances pour 2018.

V.  -  L'article L. 16 du livre des proce?dures fiscales modifie? par l'article 28 de la loi n° 2017-1837 du 30 de?cembre 2017 de finances pour 2018 est re?tabli dans sa re?daction ante?rieure a? la publication de la loi n° 2017-1837 du 30 de?cembre 2017 de finances pour 2018.

VI.  -  Les articles 28 et 29 de la loi n° 2017-1837 du 30 de?cembre 2017 de finances pour 2018 sont abroge?s.

M. Daniel Breuiller.  - Le versement des dividendes a augmenté sans que l'investissement ne suive véritablement. Le prélèvement forfaitaire unique n'est pas autre chose qu'un cadeau aux plus aisés. Rien ne justifie que le travail soit plus taxé que le capital.

M. le président.  - Amendement identique n°246 rectifié, présenté par M. Féraud et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

M. Thierry Cozic.  - L'objectif initial était de booster les investissements, mais l'enrichissement dû aux hausses de dividendes n'a eu aucune incidence sur l'économie française.

M. Jean-François Husson, rapporteur général.  - Avis défavorable. Des travaux de la commission des finances ont confirmé l'intérêt de la flat tax en termes de souplesse. En outre, elle rapproche notre fiscalité de celle de nos partenaires européens.

Un rapport de la commission des finances de MM. Éblé et de Montgolfier a conclu à une contraction de la base fiscale, et à une baisse des recettes fiscales.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Même avis.

M. Pascal Savoldelli.  - Nous parlons de taxes et d'impôts. Sur les individus, l'impôt sur le revenu, la CSG, la CRDS ont progressé : de 11 % des recettes fiscales en 1990, elles représentent aujourd'hui 21 %.

Qui paie le plus, de manière disproportionnée ? Les individus et les ménages !

L'amendement n°323 n'est pas adopté, non plus que les amendements identiques nos224 rectifié et 246 rectifié.

M. le président.  - Amendement n°431 rectifié bis, présenté par Mme N. Delattre, M. Bilhac, Mme M. Carrère et MM. Guérini, Requier, Roux et Artano.

Avant l'article 1er A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Après l'article 155 B du code général des impôts, il est inséré un article 155 .... ainsi rédigé :

« Art. 155....  -  Pour les revenus imposables dans les catégories des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices agricoles et des bénéfices non commerciaux, il est pratiqué un abattement forfaitaire de 6 000 € pour la détermination du résultat imposable. »

II.  -  La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

III.  -  La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

M. Jean-Claude Requier.  - Mme Delattre propose un abattement forfaitaire de 6 000 euros sur le revenu imposable des artisans, agriculteurs et professions libérales. Fortement touchées par l'inflation et, pour certaines, par des événements climatiques, ces catégories ne bénéficient souvent pas des mesures applicables aux salariés.

M. Jean-François Husson, rapporteur général.  - Cet abattement conduirait dans certains cas à une exonération, ce qui n'est pas souhaitable. En outre, un régime spécifique existe déjà pour les micro-entreprises. Surtout, aucune estimation du coût de la mesure n'est avancée. Avis défavorable.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°431 rectifié bis n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°175 rectifié ter, présenté par MM. J.B. Blanc, Chatillon et Levi, Mme Chauvin, M. Mandelli, Mme Gosselin, M. Hingray, Mme Ventalon, MM. Frassa, Genet et E. Blanc, Mme V. Boyer, MM. C. Vial, D. Laurent, Darnaud, Sautarel et Bascher, Mme Dumont, MM. Anglars, B. Fournier, Burgoa, Cambon, Pellevat et Joyandet, Mmes Deroche et Noël, MM. Courtial et Brisson, Mmes Goy-Chavent, Demas et Lopez, MM. Bouloux, J.P. Vogel et Somon, Mme Joseph, M. Le Gleut, Mme Canayer et M. A. Marc.

Avant l'article 1er A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  L'article 217 bis du code général des impôts est rétabli dans la rédaction suivante :

« Art. 217 bis.  -  Les primes collectées au titre des contrats d'assurance garantissant, à la date de leur perception, les dommages contre les inondations dans les territoires mentionnés à l'article L. 566-5 du code de l'environnement, ne sont pas comprises dans l'assiette de l'impôt sur les sociétés. »

II.  -  La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

M. Jean-Baptiste Blanc.  - La multiplication et l'aggravation des inondations exposent de plus en plus d'EPCI, désormais compétents pour la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations (Gemapi), au refus des compagnies d'assurances de couvrir ce risque. Souvent, ils sont contraints de rester leur propre assureur.

Il est indispensable que la solidarité nationale joue. Cet amendement pose une première pierre en ce sens, en exonérant les primes d'assurance payées par les collectivités territoriales.

M. Jean-François Husson, rapporteur général.  - Avis défavorable. Notre collègue soulève une bonne question, mais la réponse proposée n'est pas adaptée. Les tarifs risqueraient d'exploser.

La question est d'importance, car le risque climatique est devant nous, dans toute l'étendue de ses conséquences. Nous pourrions rencontrer un problème d'assurabilité.

Nous devons envisager une mutualisation, ainsi que le recours au fonds Barnier -  dont l'enveloppe devrait être accrue. Le chantier mérite d'être ouvert.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Oui, le chantier mérite d'être ouvert, mais la bonne réponse n'est pas fiscale. Retrait ?

L'amendement n°175 rectifié ter est retiré.

M. le président.  - Amendement n°330, présenté par M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Avant l'article 1er A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au quatrième alinéa de l'article 1609 tricies du code général des impôts, le taux : «10,6 % » est remplacé par le taux : « 13,6 % ».

M. Éric Bocquet.  - Nous proposons de soutenir l'Agence nationale du sport en augmentant de 10,6 à 13,6 % le taux de la taxe sur les paris sportifs en ligne. Les médecins constatent une aggravation des phénomènes d'addiction, dont les principales victimes sont les jeunes des quartiers populaires. Deux tiers des mises sont le fait de joueurs considérés comme problématiques.

M. Jean-François Husson, rapporteur général.  - Avis défavorable à cette augmentation de l'ordre de 30 %. Lors de l'examen de la loi Pacte, nous nous sommes déjà interrogés sur les risques d'addiction. Mais il faudrait d'abord bien connaître le phénomène.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°330 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°432 rectifié bis, présenté par Mme N. Delattre, MM. Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Gold, Guérini et Guiol, Mme Pantel et MM. Requier, Roux et Artano.

Avant l'article 1er A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Au 1 du I de l'article 244 quater F du code général des impôts, les mots : « de leurs salariés » sont remplacés par les mots : « des personnes travaillant dans l'entreprise ».

II.  -  Le Gouvernement remet au Parlement avant le 1er octobre 2024 un rapport présentant la pertinence de l'extension du crédit d'impôt prévu à l'article 244 quater F du code général des impôts aux indépendants, son incidence économique, l'évolution du coût du crédit d'impôt et du nombre de ses bénéficiaires.

III.  -  Le I ne s'applique qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.

IV.  -  La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

M. Jean-Claude Requier.  - Cet amendement de Nathalie Delattre étend le bénéfice du crédit d'impôt famille, le Cifam, aux professions libérales et aux indépendants, qui ne peuvent pas toujours mettre leurs enfants dans des crèches municipales, notamment du fait d'horaires inadaptés. Ce serait une forte incitation au retour à l'emploi pour une catégorie durement éprouvée par la crise sanitaire.

M. Jean-François Husson, rapporteur général.  - Le Cifam est destiné à soutenir la création de structures d'accueil de la petite enfance par les entreprises. En étendre le bénéfice à des entreprises sans salarié va à rebours de la logique même du dispositif. Le chef d'entreprise bénéficie déjà du chèque emploi service universel (CESU). Retrait ?

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°432 rectifié bis est retiré.

M. le président.  - Amendement n°69 rectifié quinquies, présenté par M. Bazin, Mme Eustache-Brinio, MM. Karoutchi et Bascher, Mme N. Goulet, M. Bonnus, Mme Micouleau, MM. Pellevat et Genet, Mme V. Boyer, MM. Calvet, Sol et Anglars, Mme Noël, M. Daubresse, Mmes M. Mercier et Goy-Chavent, M. Favreau, Mme Demas, MM. Belin, Burgoa et Rapin, Mmes Dumont et Lopez, MM. Cambon et Tabarot, Mmes Belrhiti et Ventalon, M. Sautarel, Mme Garriaud-Maylam, MM. Lefèvre, B. Fournier, D. Laurent et Frassa, Mme Billon, MM. Courtial et Chatillon, Mme Lassarade, M. Paccaud, Mme Gruny, M. Longeot, Mme Petrus, MM. Charon et Mandelli, Mme Procaccia, MM. Piednoir, Rietmann et Pointereau, Mme Férat, M. Gueret, Mme F. Gerbaud, MM. Houpert, Saury, Levi, Somon et P. Martin, Mme de Cidrac, M. Gremillet et Mme Jacquemet.

Avant l'article 1er A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Le I de l'article 27 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021 est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa du 1, l'année : « 2021 » est remplacée par l'année : « 2023 » ;

2° Au premier alinéa du 6, l'année : « 2021 » est remplacée par l'année : « 2023 ».

II. - Le I ne s'applique qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.

III. - La perte de recettes résultant pour l'État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

M. Arnaud Bazin.  - La loi de finances pour 2021 a instauré un crédit d'impôt pour les PME investissant dans leur rénovation énergétique. Ce dispositif a eu du mal à se déployer, principalement du fait de la publication tardive des commentaires administratifs -  le 30 juin 2021, pour une extinction de la mesure au 31 décembre. Je propose de le faire revivre jusqu'au 31 décembre 2023.

M. le président.  - Amendement identique n°232 rectifié, présenté par MM. Dantec, Breuiller, Parigi et Benarroche, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.

M. Ronan Dantec.  - Il s'agit d'une mesure importante et assez consensuelle. La rénovation du bâti est l'un des principaux angles morts des deux textes sur le pouvoir d'achat. Or nous devons accélérer dans ce domaine : il y va de notre autonomie énergétique. Derrière ces investissements, il y aura une baisse des coûts de production, donc un renforcement des entreprises. L'année dernière, les entreprises n'ont eu que six mois pour recourir à ce dispositif.

M. Jean-François Husson, rapporteur général.  - Avis favorable. Nous restons très timorés par rapport à nos engagements en matière de rénovation énergétique. Or la lutte contre le réchauffement climatique passe d'abord par le bâti. Dans ce domaine, il faut une stratégie pour encourager, mais aussi évaluer pour mieux accompagner.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Une fois n'est pas coutume, je ne serai pas de l'avis du rapporteur général...

M. Jean-François Husson, rapporteur général.  - Nous allons gagner ! (Sourires)

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Le vote est souverain...

Je comprends la philosophie des amendements, mais le principe d'une mesure de relance est qu'on la retire une fois le coup d'accélérateur donné, pour éviter les effets d'aubaine. Il y a déjà pléthore de dispositifs puissants -  et coûteux pour les finances publiques  - destinés à encourager la rénovation énergétique.

M. Arnaud Bazin.  - Je ne comprends pas l'argument du ministre, alors qu'on parle tous les jours de sobriété énergétique. Puisque le dispositif n'a presque pas pu fonctionner, la relance n'a pas eu lieu.

M. Ronan Dantec.  - Quels sont les dispositifs coûteux pour les finances publiques qui encouragent la rénovation du bâti des TPE et PME ? Il n'y en a pas !

Il est temps d'envoyer un signal important en la matière, car nous devons réduire à marche forcée notre dépendance aux énergies fossiles. Je le répète, cet amendement est consensuel. Levez le gage et téléphonez à la fondation Total pour avoir 100 millions d'euros en philanthropie... (Rires à gauche)

Mme Nathalie Goulet.  - L'année dernière, nous avons sollicité un document de politique transversale, un « orange » budgétaire, sur les politiques liées aux économiques d'énergie. Ce sera peut-être pour cet automne...

M. Jean-François Husson, rapporteur général.  - On nous avait vanté le budget vert, mais la preuve est faite que les moyens ont manqué.

J'invite le Gouvernement à s'engager avec les grands partenaires privés - énergéticiens, secteur du bâtiment - pour changer de braquet en matière de rénovation des bâtiments publics et privés. Notre pays compte sept millions de passoires thermiques : il y a du boulot !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Je ne conteste pas le raisonnement du rapporteur général. Mais convenez qu'avec la rénovation du bâti des TPE et PME, nous sommes assez loin du débat sur le pouvoir d'achat. Dans ce domaine, je le répète, des mesures existent déjà.

M. Ronan Dantec.  - C'est faux : il n'y en a aucune !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Le guichet Ademe est doté de 35 millions d'euros, et 300 millions d'euros sont prévus dans le cadre du plan de relance.

Commençons par évaluer les dispositifs en place. Je trouve qu'on appuie un peu trop facilement sur le bouton « dépense publique ».

Les amendements identiques nos69 rectifié quinquies et 232 rectifié sont adoptés et deviennent un article additionnel.

M. le président.  - On ne peut pas dire que vous avez fait le plein, monsieur le ministre... (Sourires)

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Je ne me faisais pas beaucoup d'illusions...

L'article premier A est adopté.

APRÈS L'ARTICLE PREMIER A

M. le président.  - Amendement n°316 rectifié ter, présenté par MM. Tissot et Antiste, Mmes Blatrix Contat et Bonnefoy, MM. Bourgi, Cardon et Chantrel, Mme Conconne, MM. Cozic et Devinaz, Mmes Espagnac, G. Jourda et Lubin, M. Mérillou, Mme Monier, M. Pla, Mme Préville, MM. Redon-Sarrazy et Vaugrenard et Mmes Le Houerou, Meunier et Féret.

Après l'article 1er A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  À la première phrase du 19° de l'article 81 du code général des impôts, le montant : « 5,69 € » est remplacé par le montant : « 7,50 € » et les mots  : « un minimum et un maximum fixés par arrêté du ministre chargé du budget » sont remplacés par les mots : « 50 % et 70 % ».

II.  -  La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

III.  -  La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

M. Jean-Claude Tissot.  - Nous proposons d'augmenter à 7,50 euros le plafond d'exonération de la part employeur du titre-restaurant, pour porter la valeur maximale de ce titre à 15 euros, soit le prix moyen d'un déjeuner équilibré au restaurant. En outre, l'amendement élargit le volant de négociation de la part prise en charge par l'employeur. Il s'agit d'une mesure de bon sens et qui peut être mise en place immédiatement.

M. le président.  - Amendement n°1 rectifié ter, présenté par MM. Klinger, Anglars et Bacci, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Bonnus, Bouloux, J.M. Boyer, Brisson et Burgoa, Mmes Canayer et de Cidrac, MM. Charon, Courtial et Darnaud, Mmes Deroche et Drexler, MM. B. Fournier et Frassa, Mme Garriaud-Maylam, M. Genet, Mme F. Gerbaud, MM. Houpert et Joyandet, Mme Lassarade, M. Le Gleut, Mme Lopez et MM. Meignen, Paccaud, Pellevat, Perrin, Piednoir, Rapin, Rietmann, Sautarel, Savary, Tabarot et C. Vial.

Après l'article 1er A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  À la première phrase du 19° de l'article 81 du code général des impôts, le montant : « 5,69 € » est remplacé par le montant : « 7,50 € ».

II.  -  La disposition entre en vigueur le 1er septembre 2022

III.  -  La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

M. Christian Klinger.  - Relevons de 11 à 15 euros le montant des titres restaurant, pour qu'il soit cohérent avec la valeur réelle d'un repas au restaurant. Nous augmenterons ainsi le pouvoir d'achat des 4,8 millions de salariés qui bénéficient de ce dispositif.

Le ticket restaurant est vertueux pour l'État, qui récupère 1,60 euro pour 1 euro dépensé. Il l'est aussi pour les salariés, les entreprises et le secteur de la restauration. C'est quatre fois gagnant !

M. Jean-François Husson, rapporteur général.  - Je mise sur ce quatre fois gagnant... Sagesse sur l'amendement n°1 rectifié ter, dont les auteurs restent attentifs à l'équilibre des finances publiques. Retrait de l'amendement n°316 rectifié ter ?

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Nous avons anticipé la revalorisation. Retrait, sinon avis défavorable. En revanche, nous sommes très ouverts à une augmentation du plafond des tickets-restaurants.

L'amendement n°316 rectifié ter n'est pas adopté.

L'amendement n°1 rectifié ter est adopté et devient un article additionnel.

L'amendement n°225 rectifié n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°370 rectifié, présenté par MM. Breuiller, Parigi, Benarroche, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mmes de Marco et Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.

Après l'article 1er A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 235 ter ZD du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Les I à VI sont ainsi rédigés :

« I.  -  Une taxe s'applique aux opérations suivantes, dès lors qu'au moins une des parties à la transaction est établie sur le territoire français et qu'un établissement financier établi sur le territoire français est partie à la transaction, pour son propre compte ou pour le compte d'un tiers, ou agit au nom d'une partie à la transaction :

« 1° L'achat ou la vente d'un instrument financier, au sens de l'article L. 211-1 du code monétaire et financier, avant compensation ou règlement ;

« 2° Le transfert, entre entités d'un même groupe, du droit de disposer d'un instrument financier en tant que propriétaire, ou toute opération équivalente ayant pour effet le transfert du risque associé à l'instrument financier, dans les cas autres que ceux mentionnés au 1° du présent I ;

« 3° La conclusion de contrats financiers, au sens de l'article L. 211-1 du code monétaire et financier, avant compensation ou règlement ;

« 4° L'échange d'instruments financiers.

« II.  -  La taxe n'est pas applicable :

« 1° Aux opérations d'achat réalisées dans le cadre d'une émission de titres de capital ;

« 2° Aux opérations réalisées par une chambre de compensation, au sens de l'article L. 440-1 du même code, dans le cadre des activités définies à ce même article L. 440-1, ou par un dépositaire central, au sens du 3° du II de l'article L. 621-9 dudit code, dans le cadre des activités définies à ce même article L. 621-9.

« III.  -  La taxe est assise :

« 1° Sur la valeur d'acquisition du titre, pour les transactions autres que celles concernant des contrats dérivés. En cas d'échange, à défaut de valeur d'acquisition exprimée dans un contrat, la valeur d'acquisition correspond à la cotation des titres sur le marché le plus pertinent en termes de liquidité, au sens de l'article 9 du règlement (CE) n° 1287/2006 de la Commission du 10 août 2006 portant mesures d'exécution de la directive 2004/39/CE du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les obligations des entreprises d'investissement en matière d'enregistrement, le compte rendu des transactions, la transparence du marché, l'admission des instruments financiers à la négociation et la définition des termes aux fins de ladite directive, à la clôture de la journée de bourse qui précède celle où l'échange se produit. En cas d'échange entre des titres d'inégale valeur, chaque partie à l'échange est taxée sur la valeur des titres dont elle fait l'acquisition ;

« 2° Sur le montant notionnel du contrat dérivé au moment de la transaction financière, dans le cas des transactions concernant des contrats dérivés. Lorsqu'il existe plus d'un montant notionnel, le montant le plus élevé est pris en considération pour la détermination du montant imposable.

« IV.  -  La taxe devient exigible pour chaque transaction financière :

« 1° Au moment où la taxe devient exigible lorsque la transaction est effectuée par voie électronique ;

« 2° Dans les trois jours ouvrables suivant le moment où la taxe devient exigible dans tous les autres cas. L'annulation ou la rectification ultérieure d'une transaction financière est sans incidence sur l'exigibilité, sauf en cas d'erreur.

« V.  -  Le taux de la taxe est fixé :

« 1° À 0,4 %, pour les transactions autres que celles concernant des contrats dérivés ;

« 2° À 0,01 % en ce qui concerne les transactions financières concernant des contrats dérivés.

« VI.  -  Pour chaque transaction financière, la taxe est due par tout établissement financier qui remplit l'une des conditions suivantes :

« 1° Il est partie à la transaction, qu'il agisse pour son propre compte ou pour le compte d'un tiers ;

« 2° Il agit au nom d'une partie à la transaction ;

« 3° La transaction a été effectuée pour son compte. Lorsqu'un établissement financier agit au nom ou pour le compte d'un autre établissement financier, seul cet autre établissement financier est redevable du paiement de la taxe sur les transactions financières. Lorsque la taxe n'a pas été acquittée dans les délais fixés au IV, toute partie à une transaction, même s'il ne s'agit pas d'un établissement financier, est tenue solidairement responsable du paiement de la taxe due par un établissement financier pour cette transaction. » ;

2° Les VII à XI sont abrogés.

M. Daniel Breuiller.  - Nous proposons de rendre la taxe sur les transactions financières, la taxe Tobin, réellement efficace pour réduire la spéculation. C'est particulièrement important dans la période d'inflation que nous connaissons, alors que la spéculation sur la nourriture bat son plein.

Il s'agit de lutter contre l'évasion fiscale en traçant les mouvements et de pénaliser les acteurs qui multiplient les petites opérations de spéculation. Selon Attac, taxer les transactions sur les actions à 0,1 % et sur certains produits dérivés à 0,01 % rapporterait 36 milliards d'euros par an à l'échelle européenne. Par comparaison, le produit de la taxe actuelle, qui n'est qu'un impôt de bourse, est dérisoire.

M. le président.  - Amendement n°326 rectifié, présenté par M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'article 1er A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  L'article 235 ter ZD du code ge?ne?ral des impo?ts est ainsi modifie? :

1° Le I est ainsi modifie? :

a) Au premier aline?a, les mots : « que son acquisition donne lieu a? un transfert de proprie?te?, au sens de l'article L. 211-17 du me?me code, » sont supprime?s ;

b) Au deuxie?me aline?a, apre?s les mots : « s'entend », sont inse?re?s les mots : « de l'exe?cution d'un ordre d'achat ou, a? de?faut, » ;

2° Au V, le taux : « 0,3 % » est remplace? par le taux : « 0,6 % » ;

3° Au premier aline?a du VII, apre?s la seconde occurrence du mot : « titre, », sont inse?re?s les mots : « ou s'il n'y a pas de livraison du titre, » ;

4° La seconde phrase du VIII est ainsi re?dige?e : « Un de?cret pre?cise que l'acquisition donne lieu ou non a? un transfert de proprie?te? au sens de l'article L. 211-17 du me?me code, la nature de ces informations, qui incluent le montant de la taxe due au titre de la pe?riode d'imposition, les nume?ros d'ordre quand ils existent des ope?rations concerne?es, la date de leur re?alisation, la de?signation, le nombre et la valeur des titres dont l'acquisition est taxable et les ope?rations exone?re?es, re?parties selon les cate?gories d'exone?ration mentionne?es au II du pre?sent article. »

II.  -  Le I s'applique aux acquisitions re?alise?es trois mois à compter de la promulgation de la présente loi.

M. Éric Bocquet.  - Défendu.

M. Jean-François Husson, rapporteur général.  - Ce sujet relève plutôt du PLF. Par ailleurs, notre ligne de conduite est inchangée : il faut y réfléchir au niveau européen.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°370 rectifié n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°326 rectifié.

ARTICLE PREMIER B

M. le président.  - Amendement n°335 rectifié, présenté par M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

.... - A? l'article L. 3261-2 du code du travail, les mots : « dans une proportion et » sont remplace?s par les mots : « inte?gralement et dans ».

M. Éric Bocquet.  - Cet amendement prévoit la prise en charge intégrale par l'employeur du versement transport. Il s'agit d'une mesure concrète de pouvoir d'achat, qui ne coûte pas un euro d'argent public. Dans l'aire de Paris, 44 % des salariés empruntent les transports publics, dont le coût est identique pour un ouvrier et pour un cadre.

Ministre des transports, Mme Borne s'était opposée à cette mesure, la qualifiant de surenchère et prétendant que les salariés ne prendraient pas davantage les transports en commun si leur abonnement était intégralement remboursé...

M. Jean-François Husson, rapporteur général.  - Augmenter de 50 à 100 % la part supportée par les entreprises n'est pas opportun en ce moment. Au reste, la mesure aurait évidemment un coût pour les finances publiques, via les exonérations. Ne multiplions pas les dispositifs ; il faut plutôt les rationaliser et les évaluer.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°335 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°389 rectifié, présenté par MM. Tabarot, Longeot et Mandelli.

I. ' -  Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé : 

...  -  Pour les années 2022 et 2023, la prise en charge par les employeurs du coût des abonnements souscrits par leurs salariés réalisée dans les conditions prévues à l'article L. 3261-2 du code du travail qui excède 50 % du coût de ces abonnements bénéficie des dispositions prévues au a du 19° ter de l'article 81 du code général des impôts et au d du 4 du III de l'article L. 136-1-1 du code de la sécurité sociale.

II.  -  Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :

...  -  La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

...  -  La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

M. Philippe Tabarot.  - Le code du travail prévoit l'obligation pour l'employeur de prendre en charge 50 % de l'abonnement transport souscrit par le salarié pour son trajet domicile-travail. Nous proposons que les entreprises volontaires puissent participer au-delà de cette limite, avec application des mêmes avantages fiscaux et sociaux.

M. le président.  - Amendement identique n°397 rectifié, présenté par M. Rambaud.

M. Didier Rambaud.  - Avec ce dispositif, un salarié pourrait gagner 54 euros par mois sur le trajet Voiron-Grenoble et 79 euros par mois sur le trajet Bourgoin-Jallieu - Lyon.

M. le président.  - Amendement n°398 rectifié, présenté par M. Rambaud.

I.  -  Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé : 

....  -  Pour l'année 2022, la prise en charge par les employeurs du coût des abonnements souscrits par leurs salariés réalisée dans les conditions prévues à l'article L. 3261-2 du code du travail qui excède 50 % du coût de ces abonnements bénéficie des dispositions prévues au a du 19° ter de l'article 81 du code général des impôts et au d du 4 du III de l'article L. 136-1-1 du code de la sécurité sociale.

II.  -  Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :

....  -  La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

....  -  La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

M. Didier Rambaud.  - Amendement de repli, qui limite l'application de la mesure à 2022.

M. Jean-François Husson, rapporteur général.  - Sagesse. Ces amendements n'introduisent pas d'obligation et sont bornés dans le temps.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - C'est comme le geste de Total : c'est si vous voulez bien !

M. Gabriel Attal, ministre délégué.  - Les intentions sont louables, mais nous ne pouvons faire abstraction de notre situation financière. Le coût de cette mesure pourrait atteindre 255 millions d'euros. Dans le cadre financier qui est le nôtre, nous devons choisir les mesures les plus efficaces. D'autres dispositifs encouragent déjà le recours aux transports en commun, comme la possibilité de cumuler versement transport et prime carburant. Avis défavorable.

M. Philippe Tabarot.  - Le chiffrage du ministre me paraît fait au doigt mouillé... Cette mesure est, j'y insiste, facultative. Elle est soutenue par M. Longeot, président de la commission du développement durable, et par Didier Mandelli, le whip de notre groupe au sein de cette commission. Plus largement, le monde du transport y est favorable. (MMJacques Fernique et Thomas Dossus applaudissent.)

M. Gabriel Attal, ministre délégué.  - Le chiffrage réalisé par mon ministère est basé sur des faits : le coût de la mesure pourrait être de 255 millions d'euros, si le taux de recours est important. (Exclamations sur des travées du groupe Les Républicains) Si nous instaurons des dispositifs, c'est, je crois, pour que nos concitoyens y aient recours...

Je suis transparent avec vous sur notre cadre financier. Par ailleurs, d'autres dispositifs pour réduire le coût du trajet domicile-travail ont été adoptés et pourront être renforcés.

Les amendements identiques nos389 rectifié et 397 rectifié sont adoptés.

L'amendement n°398 rectifié n'a plus d'objet.

L'article premier B, modifié, est adopté.

APRÈS L'ARTICLE PREMIER B

M. le président.  - Amendement n°520, présenté par MM. Segouin et J.P. Vogel, Mmes Deroche et Gosselin, M. Reichardt, Mme Belrhiti, MM. Bouchet, Houpert, Sautarel, D. Laurent, Calvet, Darnaud et Pointereau, Mme Ventalon, MM. Rietmann, Paccaud et Savary, Mme Bourrat, MM. Frassa, E. Blanc et Genet, Mme Dumont, MM. Belin, Charon, C. Vial, Cuypers, Chatillon et B. Fournier, Mme Imbert, M. Le Gleut et Mme Gruny.

Après l'article 1er B

Insérer une division additionnelle ainsi rédigée :

Augmentation du barème kilométrique de 20% pour tous les véhicules thermiques. 

M. Vincent Segouin.  - L'inflation subie est de 8,6 % dans les territoires ruraux, contre 5,1 % en moyenne nationale. La différence est due principalement à la nécessité de prendre sa voiture pour aller travailler.

Le barème des véhicules thermiques n'a augmenté que de 10 % en février dernier, contre 20 % pour les véhicules électriques. Depuis lors, le prix du carburant s'est envolé, alors qu'un bouclier tarifaire a été mis en place pour l'électricité. Je propose donc d'augmenter le barème des véhicules thermiques de 20 %.

M. Jean-François Husson, rapporteur général.  - Cette mesure relève du règlement. Au surplus, elle ne serait pas immédiatement opérationnelle. Plusieurs mesures ciblées ont été incluses dans ce texte en faveur du public que vous visez. Retrait ?

M. Gabriel Attal, ministre délégué.  - Retrait, sinon avis défavorable. Nous avons déjà revalorisé le barème kilométrique, et Bruno Le Maire a pris l'engagement d'une nouvelle revalorisation dans la loi de finances pour 2023.

M. Vincent Segouin.  - J'en prends bonne note et je retire l'amendement.

L'amendement n°520 est retiré.

L'article premier C est adopté.

APRÈS L'ARTICLE PREMIER C

M. le président.  - Amendement n°315 rectifié ter, présenté par MM. Tissot et Cardon, Mme Blatrix Contat, M. J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Bourgi, Chantrel, Cozic et Devinaz, Mmes Espagnac, G. Jourda et Lubin, M. Mérillou, Mme Monier, M. Pla, Mme Préville, M. Redon-Sarrazy et Mmes S. Robert, Le Houerou, Meunier et Féret.

Après l'article 1er C

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  L'article L. 3261-3-1 du code du travail est ainsi modifié :

1° Les mots : « peut prendre » sont remplacés par le mot : « prend » ;

2° Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :

« L'obligation de prise en charge issue du premier alinéa entre en vigueur le 1er septembre 2022. Dans les entreprises de moins de cinquante salariés, elle entre en vigueur le 1er janvier 2023. Au sein de la fonction publique territoriale, elle entre en vigueur le 1er janvier 2024. Avant ces dates, l'employeur peut prendre en charge ces frais dans les conditions définies par le présent article.

« Dans les entreprises de moins de onze salariés, la prise en charge prévue par le premier alinéa est facultative. »

II.  -  La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

III.  -  La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

M. Jean-Claude Tissot.  - Pour répondre conjointement à l'urgence sociale et à l'urgence environnementale, nous proposons de rendre obligatoire le forfait mobilités durables (FMD), très apprécié de ceux qui l'utilisent. Ce serait un message fort pour encourager les mobilités durables.

M. le président.  - Amendement identique n°533 rectifié bis, présenté par MM. Fernique, Breuiller, Parigi, Benarroche, Dantec, Dossus, Gontard et Labbé, Mmes de Marco et Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.

M. Jacques Fernique.  - Le moment est venu de déployer à grande échelle le FMD, aujourd'hui limité à la fonction publique d'État. Je me félicite qu'il ait été amélioré, notamment par un double relèvement de son plafond : d'abord sur l'initiative de M. Tabarot, puis par l'Assemblée nationale. Il faut maintenant que ce dispositif atteigne sa vitesse de croisière.

M. Jean-François Husson, rapporteur général.  - Avis défavorable à la création de cette obligation. Le FMD a déjà été amélioré, il faut raison garder.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Même avis, pour les mêmes raisons. Le FMD a été considérablement amélioré. Ne créons pas une charge obligatoire supplémentaire pour les entreprises.

Les amendements identiques nos315 rectifié ter et 533 rectifié bis ne sont pas adoptés.

ARTICLE PREMIER D

M. Daniel Chasseing.  - De 1995 à 2015, nous avons perdu la moitié de nos entreprises et un tiers de nos salariés. La faute au manque de compétitivité et à un temps de travail de 1 500 heures par an en France, contre 1 700 en moyenne dans l'Union européenne. Grâce à la baisse des charges sur les bas salaires et des impôts de production, nous recommençons à créer des emplois.

Le relèvement du plafond de défiscalisation des heures supplémentaires va dans le bon sens. C'est une mesure de soutien au pouvoir d'achat, à la valeur travail et aux entreprises, notamment aux TPE et PME qui ont du mal à recruter.

M. le président.  - Amendement n°281, présenté par M. Féraud et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Supprimer cet article.

M. Rémi Féraud.  - Le Gouvernement a refusé l'augmentation des salaires, alors il tourne autour... Après le triplement de la prime Macron, voici donc la défiscalisation des heures supplémentaires.

La droite sénatoriale a toujours été sur cette ligne. Mais le Gouvernement, lui, cherche à revenir sur les 35 heures sans l'assumer, en catimini. La mesure s'appliquerait à la carte, en fonction du rapport de force dans chaque entreprise.

Pour augmenter le pouvoir d'achat, il faut agir sur les salaires ! Et si le Gouvernement veut s'attaquer aux 35 heures, qu'il le dise clairement.

M. le président.  - Amendement identique n°337, présenté par M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Céline Brulin.  - Cet article est une remise en cause à peine voilée des 35 heures. Pour les salariés, le cadeau est empoisonné, puisqu'on leur subtilise une part de leur salaire socialisé.

La défiscalisation des heures supplémentaires a coûté 2 milliards d'euros en 2021, et on prévoit 1,67 milliard d'euros pour cette année. Avec le rehaussement du plafond, ce sera davantage encore. Dire que, lorsque nous proposons des mesures de bon sens, on nous oppose la cote d'alerte des finances publiques...

M. Jean-François Husson, rapporteur général.  - Avis défavorable, conformément à la position constante de la commission. En période de pénurie de main-d'oeuvre, il faut donner la possibilité aux salariés de travailler plus, s'ils le souhaitent, pour gagner plus. C'est intéressant pour les salariés comme pour les entreprises, c'est intéressant pour la France.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Ça évite surtout d'augmenter les salaires !

M. Jean-François Husson, rapporteur général.  - L'un n'empêche pas l'autre. Les augmentations de salaire se négocient au sein de l'entreprise, et certaines d'entre elles n'ont pas attendu l'État pour agir en ce sens.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Deux visions du travail s'affrontent.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - C'est sûr !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Certains veulent réduire le temps de travail, pensant ainsi assurer la prospérité des Français. Je pense exactement l'inverse : il faut développer le travail et l'emploi. Jamais le chômage n'a autant baissé que depuis que nous défiscalisons les heures supplémentaires... Si l'on préfère rester dans le chômage de masse, gardons votre politique ! (Protestations sur les travées du groupe SER)

Rien n'exclut d'augmenter les salaires. L'un n'est pas lié à l'autre. Beaucoup d'entreprises, notamment dans la restauration et l'hôtellerie, l'ont déjà fait.

M. Pascal Savoldelli.  - Les salariés dont vous parlez, monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, ont sûrement envie de travailler plus, mais ils veulent surtout gagner plus...

Dans la construction, 64 % des salariés font des heures supplémentaires ; c'est 65 % dans l'hôtellerie-restauration et 57 % dans le nettoyage, la manutention et la sécurité. Ces salariés aiment sans doute leur travail, mais c'est surtout qu'ils ne s'en sortent pas avec les salaires qu'ils ont !

Un amendement du groupe Les Républicains prévoit la monétisation individuelle des RTT sans cotisations sociales. Nous sommes face à une véritable régression sociale, une attaque contre le code du travail et les 35 heures !

M. David Assouline.  - Avec la défiscalisation des heures supplémentaires et l'amputation du salaire socialisé, nous sommes dans le libéralisme affirmé. Monsieur Le Maire, vous défendiez déjà ces thèses quand vous étiez avec M. Sarkozy. M. Attal, lui, a un autre itinéraire... Mais qu'on ne nous présente pas cela comme un dépassement de la gauche et de la droite !

Ce qui est fou, c'est de ne pas voir que les secteurs qui ont le plus recours aux heures supplémentaires sont aussi ceux qui ont le plus de mal à recruter. Pourquoi n'attirent-ils pas ? Parce que les salaires sont insuffisants.

Vous campez dans l'idéologie en refusant d'augmenter les salaires au lieu de répondre aux attentes des Français !

Les amendements identiques nos281et 337 ne sont pas adoptés.