B/ La dégradation économique et sociale

Alors que dans les années 1970, le Cameroun était considéré, du fait de ses nombreuses potentialités, comme l'un des pays les plus prometteurs de la région, ses résultats se sont considérablement dégradés depuis une dizaine d'années.

Ainsi le PNB, estimé à 11,2 milliards de dollars en 1994, a-t-il décru d'environ 25 % depuis 1985.

Cette situation est largement due à la dégradation des recettes d'exportation, qui se répartissent entre deux grands secteurs : l'agriculture (cacao, café, coton et bois), dont les cours mondiaux ont fortement chuté entre 1988 et 1993, et le pétrole, dont la production est en repli depuis 1986 (7 millions de tonnes en 1992, 6 en 1993).

C'est dans ce contexte morose que s'est inscrite la dévaluation du franc CFA, en janvier 1994. Si cette modification de parité incite à la substitution des produits importés par des produits locaux, et stimule ainsi la production locale de biens courants et alimentaires, elle a eu des effets nocifs dans deux secteurs essentiels pour l'avenir : la santé et la scolarisation. Le coût des médicaments importés est ainsi devenu hors de portée de la plupart des camerounais, concourant à une véritable déroute des infrastructures sanitaires.

La visite effectuée par la délégation à l'hôpital d'Ayos, fondé dans les années 30 par un médecin français, le Dr Jamot, en a fourni une illustration concrète : bâtiments dégradés, personnel dépourvu de tout matériel, hébergement des malades dans des conditions plus que précaires.

De même la scolarisation est-elle affectée par la croissance du coût des fournitures scolaires, et l'utilisation des enfants à de petites tâches faiblement rémunérées.

Aussi la tendance est-elle à n'envoyer désormais à l'école qu'un seul enfant par famille, en général, l'aîné des garçons.

En revanche, certaines activités d'exportation pourraient bénéficier de la dévaluation, d'après la note prospective établie par notre conseiller économique et commercial à Yaoundé, en mai 1994 :

« Certes, le Cameroun n'est pas un pays qui de par sa position d'exportateur sur le marché international des produits de base serait en mesure d'imposer les prix de ces produits hormis peut-être dans le domaine du coton et de la banane.

Néanmoins, plusieurs secteurs d'activité bénéficient d'ores et déjà de la dévaluation qui renforce leur capacité exportatrice. C'est notamment le cas du cacao, du coton, du café pour lesquels l'augmentation réalisée ou imminente des quantités exportées couplées avec celle des cours constitue un surplus non négligeable de rémunération pour les opérateurs de filières.

Les exportations de banane devraient enregistrer une augmentation considérable du fait de la compétitivité des prix camerounais. Les exportations se sont élevées à 120 000 tonnes en 1992 et atteindront plus de 150 000 tonnes en 1994. Toutefois, il y a lieu de noter qu'avec l'avènement du Marché Unique Européen, un quota est imposé aux exportateurs camerounais pour les produits destinés au marché français.

Le Cameroun est un important producteur de cacao (cinquième rang mondial) . - la production en 1993 s'est élevée à 95 000 tonnes, les exportations, à 86 000 tonnes.

Suivant les simulations réalisées par les experts du Cameroun, la production du café Robusta augmentera de 10 000 tonnes par an pour atteindre 110 000 tonnes en l'an 2000 ; celle de l'Arabica passant de 8 000 tonnes actuellement pour atteindre 12 000 tonnes en l'an 2000. Les exportations devraient revenir dans les prochaines années au début des années 1980.

Quant aux exportations de pétrole, elles ont représenté 39,4 % des exportations totales tous produits du Cameroun au cours de la période 1992-1993. En 1993 la production s'est élevée à 7 millions de tonnes, les exportations à 6,3 millions de tonnes. Pour les quatre prochaines années une chute sensible des embarquements de pétrole est attendue.

Le secteur du bois devrait connaître également un développement à l'exportation du fait de la compétitivité des prix camerounais. Il faudra cependant tenir compte du coût de la rénovation des équipements, ainsi que de l'application de la nouvelle loi sur les forêts qui pourrait réduire les possibilités d'exportation ».

Ces perspectives positives tardent cependant à se concrétiser. Aussi le Président Biya a-t-il, fin mai 1995, annoncé lui-même, fait notable, de prochaines privatisations de services publics, dont la distribution de l'eau et de l'électricité, mais ni leur fiabilité, ni, a fortiori, leur rentabilité, ne sont assurées aujourd'hui.

Sans doute est-ce là un gage donné au Fonds Monétaire International, avec lequel les autorités camerounaises conduisent de très laborieuses négociations.

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