CHAPITRE V : LA CULTURE FRANÇAISE EN RÉPUBLIQUE TCHÈQUE

Chacun se souvient des liens privilégiés qui unissaient la France et la Tchécoslovaquie au lendemain de la Première guerre mondiale, d'autant que la jeune République devait son existence à la fermeté de Clemenceau en particulier et au soutien français en général. Ces liens furent rompus d'une manière tragique après les Accords de Munich quand les Tchèques, se sentant trahis, se détournèrent de la France pour la plus grande satisfaction de l'occupant allemand (qui, symboliquement, fera déboulonner de la Place de Mala Strana la statue d'Ernest Denis, pionnier de l'entente franco-tchèque).

Cet éloignement que la déception de Munich et la propagande allemande avaient provoqué allait devenir définitif sous le régime communiste qui imposa une collaboration culturelle exclusivement soviétique. Le français cessa alors d'être la première langue étrangère au profit de la langue russe.

Au lendemain de la Révolution de velours tout était donc à faire pour rétablir des relations normales entre nos deux pays. La France et le français gardaient cependant comme avantage de rester associés dans l'esprit des Tchèques à la nostalgie de cet âge d'or qu'avait été la 1ère République. Tous les témoins français de cette époque rapportent que Prague connaissait alors un climat de francophilie absolue et de grande francophonie. Les Tchèques se considéraient redevables de leur liberté et de leur indépendance à la France. Il y avait une sorte de culte français. Ces souvenirs placent très haut la barre pour ceux qui, maintenant, ont la tâche de rétablir ces relations culturelles en diffusant l'enseignement de notre langue tout en offrant la plus haute image de notre culture et tout en dispensant notre coopération scientifique et technique. Pour ce faire, les moyens ne manquent pas : la France possède à Prague un remarquable outil dans l'Institut français et les services culturels disposent d'un budget conséquent d'une quarantaine de millions de francs.

A.- LA COOPÉRATION CULTURELLE, SCIENTIFIQUE ET TECHNIQUE ENTRE LA FRANCE ET LA RÉPUBLIQUE TCHÈQUE

Il est de l'intérêt bien compris de la France de permettre à nos partenaires, à travers notre coopération scientifique et technique, de se familiariser avec nos méthodes de travail et de gestion et d'encourager des contacts entre administrations homologues (collectivités locales, magistrature, police, administration fiscale, santé publique, fonctionnaires parlementaires à l'occasion de la création d'une deuxième Chambre). Cela est d'autant plus vrai dans un pays qui renoue avec la démocratie après cinquante ans de totalitarisme et qui cherche des modèles pratiques facilement adaptables.

Dans le domaine de la recherche appliquée, près d'une cinquantaine d'accords de recherche ont été signés à ce jour dans des domaines « cibles » comme l'environnement (programme « Prague, ville propre », programme d'Ostrava), l'énergie nucléaire (centrale de Temelin), les reconversions industrielles (au premier chef, celle de la région d'Ostrava - mise en place d'une agence régionale de développement), les technologies de pointe (aéronautique, CNES, télécommunications).

La formation aussi bien préalable que permanente est le deuxième axe privilégié et tout particulièrement l'enseignement de la langue française. Cette action linguistique, centrée sur le français des affaires vise les actuels et futurs décideurs de la République tchèque ; elle passe par différents canaux, aussi bien par le traditionnel réseau de coopération linguistique et éducative (CCLE) que par les relais institutionnels tels l'Institut français de Prague (mille étudiants) et les alliances françaises.

Le Centre de coopération linguistique et éducative (CCLE) est chargé de la promotion d'un enseignement de qualité du français dans le système éducatif local. Pour ce faire, il soutient les départements universitaires qui forment des professeurs de français par un conseil sur l'organisation des cursus, des dotations en manuels ou même par un enseignement direct. Il assure aussi la formation continue des enseignants en exercice. Il attribue des bourses de stage en France aux enseignants, interprètes et traducteurs. Il organise des cours de français dans ses centres et dans les entreprises. Il développe les sections bilingues dans les écoles et les lycées.

Depuis 1990, quatre sections bilingues accueillant 700 élèves ont été ouvertes dans des lycées à Prague, Brno, Olomouc et Tabor et deux sections tchèques ont été reconstituées en France à Nîmes et à Dijon.

La réouverture de ces deux sections tchèques marque de manière symbolique la restauration de nos relations privilégiées avec la République tchèque. En effet, la section tchèque du Lycée Carnot de Dijon date de 1920. Elle fut créée à la suite d'une convention franco-tchécoslovaque du 24 octobre 1920 qui prévoyait qu'une trentaine de jeunes Tchèques et Slovaques viendraient suivre leurs études à Dijon pour y préparer le baccalauréat (deux autres lycées recevaient également déjeunes Tchèques : Nîmes et Saint-Germain en Laye).

On ne mesurera jamais exactement ce que cette convention a fait pour l'image et l'influence de la France. Pendant près de cinquante ans, Dijon a formé une partie des élites tchèques et en a fait des francophones et des francophiles. Cette coopération a été brutalement interrompue en 1973 lors de la normalisation sous la pression soviétique qui interdit alors tout développement linguistique culturel et éducatif avec la France.

Il a fallu attendre la rentrée 1990 pour pouvoir accueillir à nouveau une dizaine d'élèves Tchèques. Ils sont aujourd'hui au nombre de trente à Dijon. Outre les disciplines inscrites au programme, les élèves tchèques reçoivent par les soins du lecteur tchèque en poste à l'université de Bourgogne, un enseignement sur la langue et l'histoire de la République tchèque. Tous les frais liés à leur scolarité sont pris en charge à 50 % par l'État (ministère des Affaires étrangères) et à 50 % par les collectivités locales (Conseil régional, Conseil général, Ville de Dijon).

Grâce à tous ces efforts conjugués, le français progresse : 9 % des lycéens tchèques l'apprennent aujourd'hui (contre 4,5 % en 1989).

Il convient aussi de mentionner le succès de l'Institut franco-tchèque de gestion (IFTG) fondé en 1990 qui assure des formations à la gestion des personnels tchèques d'entreprises françaises déjà implantées et d'entreprises locales désireuses de travailler avec la France. Après deux années de fonctionnement, l'IFTG était déjà capable de s'autofinancer.

Enfin il appartient au Service culturel, scientifique et de coopération de veiller à la promotion de l'image de la France. Les médias constituent le premier relais grâce à la fourniture de programmes ou à des coproductions (CT3 diffuse régulièrement une sélections de programmes français). Des canaux francophones se sont développés : La Sept, TV5, MCM. D'autre part, l'Institut français de Prague pratique une riche politique artistique et culturelle et il édite une revue bilingue diffusée à 20.000 exemplaires.

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