CHAPITRE VI - LA PERSPECTIVE D'UNE PROCHAINE ADHÉSION EURO-ATLANTIQUE

La République tchèque vient de signer avec son voisin allemand une déclaration qui met fin au contentieux germano-tchèque sur l'expulsion des Sudètes et sur les dommages de l'occupation nationale-socialiste. Elle s'écarte ainsi de l'un des principaux écueils diplomatiques qui pouvaient encore la gêner sur sa route vers l'intégration euro-atlantique. Il lui restera sans doute à apaiser les craintes de l'Autriche dans le domaine de l'environnement (et plus particulièrement dans celui de la pollution nucléaire), mais pour ce faire du temps est nécessaire et chaque partie comprend que la transition vers une plus grande sûreté et une plus grande propreté ne peut être que progressive. Enfin rappelons que les Tchèques n'ont pas de problèmes de minorités et qu'ils avaient été fort irrités par le zèle de notre diplomatie à vouloir les lier au sein du Pacte de Stabilité.

Á bien des titres donc, la République tchèque est un des pays les mieux placés pour intégrer très vite l'Union européenne et l'OTAN. D'ailleurs, à l'heure actuelle, elle appartient déjà au concert européen, grâce à son siège de membre associé à l'UEO (Union de l'Europe Occidentale), à son rôle actif au sein de la CSCE (Conférence sur la Sécurité et la Coopération en Europe), à son entrée au Conseil de l'Europe et à l'OCDE (Organisation de Coopération et de Développement Économiques) et grâce, enfin et surtout, à son accord d'association avec l'Union européenne.

Curieusement pourtant, de tous les pays candidats à l'Union européenne, la République tchèque est celui qui affiche la plus grande patience, voire même une certaine indifférence à l'égard du calendrier. Il est permis de dire que la République tchèque est une candidate discrète à l'Union européenne et légèrement plus pressante à l'OTAN, tant il est clair pour elle que ce retour en Europe n'est que simple justice : il est dans l'ordre des choses. C'est pourquoi la République tchèque se refuse à le demander expressément. Malgré tout, la République tchèque ne manque pas d'amener ses futurs partenaires à rappeler eux-mêmes qu'ils n'oublient pas sa candidature et c'est ainsi que dans la déclaration germano-tchèque, il est fait mention que la République tchèque « est consciente que la République Fédérale Allemande soutient l'entrée de la République tchèque dans l'Union européenne et dans l'OTAN, convaincue qu'elle est que ce sera pour le bien commun ».

Cette placidité qui tranche avec l'empressement non dissimulé des Polonais et des Hongrois et l'ardeur des Roumains n'est cependant pas exempte d'ambiguïtés ni de malentendus.

A.- LES MALENTENDUS DE L'ÉLARGISSEMENT DE L'OTAN

C'est bien entendu l'histoire du XXème siècle et les blessures qu'elle a laissées sur le peuple tchèque qui déterminent en grande partie l'attitude de ses gouvernants face à l'OTAN. Les Tchèques ont le désir bien naturel de se mettre sous le parapluie de l'alliance pour se garantir définitivement de tout dérapage expansionniste de la Russie. De l'autre côté, c'est-à-dire du côté européen, on conçoit l'élargissement comme une européanisation de l'OTAN (qui deviendrait peut-être le pilier militaire de l'Union européenne). Du côté américain, on mesure les enjeux pratiques de cette expansion et plus particulièrement de l'entrée de la République tchèque.

D'autre part, si politiquement la République tchèque fait partie des pays les mieux placés, plusieurs obstacles concrets restent cependant à surmonter. L'armée tchèque compte 70.000 soldats dont 20.000 officiers (parmi lesquels 189 généraux !). Ces chiffres sont trop importants et les soldats du rang étant presque tous des conscrits, on est loin de l'armée de métier souhaitée par l'OTAN.

Le second problème est d'ordre budgétaire. Une armée de métier même réduite coûtera cher et ne saurait être une priorité avant 2010, selon Prague. La modernisation des équipements dans le respect des critères de l'OTAN risque également de dépasser les moyens budgétaires de la République tchèque (le budget de la Défense est actuellement plafonné à 2,5 % du PIB et ne permet pas encore à la République tchèque de remplacer son matériel soviétique par du matériel occidental).

En outre, la République tchèque doit affronter en France un lobby anti-élargissement composé de ceux qui veulent ménager la Russie et feignent de craindre pour elle un isolement trop grand aux conséquences dangereuses, et de ceux hostiles aux États-Unis qui considèrent que les États-Unis se servent de l'OTAN comme d'un outil diplomatique pour maintenir leur influence sur le continent, sans lui offrir vraiment de garanties.

Face à l'ensemble de ces malentendus, notre diplomatie a opté pour une longue réflexion donnant la primauté à la rénovation de l'alliance sur son élargissement toujours évoqué dans son principe, jamais discuté dans ses modalités. 1997 devrait amener la France à se prononcer clairement et définitivement.

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