II - L'EAU, LA MAÎTRISE D'UNE RESSOURCE RARE

"Le temps est donc venu pour nous de changer radicalement notre perception et notre attitude à l'égard de l'eau, à travers la gestion de la demande de cette ressource et la rationalisation de sa consommation ."

MOHAMMED VI

(Conseil supérieur de l'eau - Mai 2013)

A. L'ÉTAT DES LIEUX

1. La ressource en eau

Le Maroc est un pays en état de " stress hydrique ". L'eau est une ressource rare et répartie inégalement entre le nord et le sud du pays. Les sécheresses des années 1990 et 2000 n'ont fait que renforcer cette rareté de la ressource.

Toute politique de gestion de l'eau (accès, assainissement et gestion de la ressource) doit donc prendre en compte cette réalité d'autant que le développement que connaît le pays depuis 1999 implique une consommation d'eau potable en forte augmentation ainsi que des besoins croissants en matière de traitement.

Actuellement, les ressources en eau du Maroc sont de 22 milliards de m 3 environ par an contre 29 milliards avant les sécheresses de 1990 et 2000.

Sur ce total, 20 milliards de m 3 sont mobilisables dont 16 milliards en eau de surface et 4 milliards en eaux souterraines.

Par comparaison, les 128 barrages existants ont une capacité de stockage de 14 milliards de m 3 , soit moins que la consommation annuelle en eau des Marocains.

LE RÉGIME PLUVIOMÉTRIQUE AU MAROC ET SES CONSÉQUENCES

Les précipitations se produisent généralement en deux périodes pluviales, la première en automne et la seconde en hiver. Le nombre de jours pluvieux varie de l'ordre de 30 au sud du pays à près de 70 au nord.

Cette situation risque de se dégrader sous l'effet des changements climatiques. En effet, en dépit de la pluviométrie favorable de ces deux dernières années, la menace de sécheresse plane toujours sur le pays à l'instar des périodes 1980-1985 et 1990-1995 et 1998-2002.

Le secteur le plus touché en cas de déficit hydrique reste l'agriculture sachant que la répartition de la consommation d'eau montre que le secteur agricole arrive en premier (80 % de la consommation), suivi de l'usage domestique (alimentation en eau potable urbaine et rurale) et de l'industrie.

La plupart des bassins hydrauliques connaissent des déficits hydriques, notamment Moulouya (10 %), Bouregreg (8 %), Souss-Massa (3 %) et la zone sur de l'Atlas (20 %) et il est prévu qu'en 2020, la situation de déficit atteindra six bassins sur huit.

La surexploitation, qui découle de ces périodes de sécheresse se traduit, en autres, par le tarissement des sources, la baisse du niveau des nappes, la régression de l'irrigation traditionnelle dans les oasis et la dégradation des écosystèmes aquati-ques.

Source : Ministère de l'Environnement

PLUVIOMÉTRIE MOYENNE ANNUELLE

2. Les opérateurs du secteur de l'eau
a) La production

Elle est assurée essentiellement par l'Office national de l'eau et de l'électricité (ONEE), créé en 2009 par le regroupement des offices nationaux de l'eau potable (ONEP) et de l'électricité (ONE). L'Office est le premier producteur d'eau potable -80 % de la production- et couvre les besoins de 96 % de la population urbaine.

b) La distribution et l'assainissement de l'eau

Elles relèvent de quatre opérateurs :

- l'ONEP (28 % de la population - petites et moyennes villes) ; il est le premier distributeur   avec 1,2 million d'abonnés sur 500 communes ;

- les opérateurs privés (4) à Casablanca, Rabat, Tanger et Tetouan (38 % de la population) ;

- les régies municipales (12) comme celle de Fès, Meknès, etc... (31 % de la population) ;

- les régies directes (40) (3 % de la population).

La charte communale de 1976 , modifiée en 2002 et 2008, prévoit que les services publics comme l'eau, l'assainissement et l'électricité sont de la compétence des communes. Il y a 1.547 communes au Maroc dont 249 urbaines et 1.298 rurales. Les communes ont le plus souvent délégué la gestion de leur service de l'eau à des concessionnaires ou à l'ONEP. Pour ce qui de l'assainissement, il est géré dans les petites et moyennes communes directement par ces dernières. Au fur et à mesure de l'avancement du plan d'assainissement, l'ONEP en reprend la gestion.

Enfin, il faut souligner en milieu rural, l'action des associations d'usagers qui sont le mode gestion le plus répandu pour les systèmes d'alimentation en eau potable. Il existe plus de 11.000 associations qui assurent le fonctionnement technique des installations sous le contrôle de la population et grâce à un agent d'exploitation embauché par les associations.

c) La gestion de la ressource

Elle est assurée par neuf agences de bassin hydrauliques (ABH). Relèvent de leurs responsabilités la qualité de l'eau, le prélèvement et les rejets dans le milieu naturel ; ses missions sont définies dans le plan direction d'aménagement intégré des ressources en eau (PDAIRE).

Pour le consommateur, les distributeurs revendent l'eau à un prix unique avec des tarifs différenciés selon le volume de consommation. Cette méthode permet d'inciter les consommateurs à une modération en termes de volume. Par ailleurs, le tarif relativement bas de la 1 ère tranche -cinq fois moins élevé que celui de la dernière tranche- vise à concrétiser le " droit à l'eau pour tous ".

Gestion de la ressource en eau et facturation

Tranche

Consommation trimestrielle /m 3

Prix par m 3

1 ère

De 0 à 18 m 3

0,23 €

2 ème

De 19 à 60 m 3

0,71 €

3 ème

De 61 à 120 m 3

1,06 €

4 ème

Plus de120 m 3

1,07 €

Source : ONEE- Branche eau 2013

3. La politique de l'eau 1999-2013

En 1999, à l'avènement du Roi MOHAMMED VI, les défis à relever étaient :

- l'accès à l'eau potable en milieu rural, en particulier concernant l'habitat dispersé ;

- le traitement des eaux usées ;

- la maintenance et la construction de systèmes d'exploitation en milieu urbain. Une attention   particulière devait être portée au raccordement en eau potable dans les « quartiers   informels » des grandes villes.

Pour ce faire, plusieurs grands programmes ont été lancés :

- le programme national d'assainissement (PNA) ;

- le programme d'accès généralisé à l'eau en milieu rural (PAGER) ;

- le programme national d'économie en eau d'irrigation (PNEII).

Ces programmes s'appuient sur la politique de construction des barrages commencée dans les années 1930 et relancée par HASSAN II dans les années 1960 avec l'objectif d'un million d'hectares irrigués , objectif atteint en 1997 . Grâce à cette stratégie qui a permis l'émergence de véritables pôles régionaux d'activités économiques, le Maroc a pu faire face aux besoins grandissants en eau de sa population et de son économie. Elle a contribué de manière décisive à l'approvisionnement en eau des secteurs de l'eau potable, de l'irrigation et de la production énergétique.

La stratégie nationale de l'eau ambitionne la réalisation d'une moyenne de trois grands barrages et plusieurs dizaines de petits ouvrages par an, avec l'objectif de construire d'ici 2030 près de 50 nouveaux barrages.

Une démarche exemplaire : Marchica Med

Entretien avec M. Saïd ZARROU

Directeur général de l'Agence

pour l'Aménagement du site

de la lagune de Marchica à Nador

( 1 er mai 2013 )

Le lieu

Près de Nador, au bord de la Méditerranée. Lagune isolée de la Méditerranée par un cordon lagunaire de 25 km.

Le projet

. Dépollution du site et construction d'équipements de traitement de l'eau et des déchets.

. Création d'une zone écotouristique.

Les moyens

. Une agence publique d'aménagement (2010).

. Création de 7 zones d'aménagements (parcs naturels, villages de pêcheurs, stations balnéaires...) sur 2.000 ha.

. Association de capitaux publics et privés.

Nador : le projet Marchica Med

A ces programmes, s'ajoute le programme " d'Initiative Nationale pour le Développement Humain " (INDH), qui permet, entre autres, de financer dans les grandes villes les branchements " sociaux " d'eau et d'assainissement. Ces projets liés à l'INDH ont fait l'objet de financements particuliers sur la base du principe " aide basée sur les résultats ".

En matière d'accès à l'eau potable , cette politique a largement porté ses fruits. En 2013, près de 100 % de la population urbaine a accès à l'eau potable et 91 % de la population rurale. Dans ce secteur, l'ONEP est le premier producteur avec près de 800 millions de m 3 , soit 80 % de la production nationale.

En matière d'assainissement , le PNA lancé en 2005, eu égard au retard accumulé dans ce secteur, fixaient les objectifs suivants :

- l'extension et la réhabilitation du réseau ;

- le branchement et le renforcement du réseau pluvial ;

- la réalisation de stations d'épuration dans près de 350 centres urbains.

Pour ce qui est du volume des eaux usées traitées au niveau national, il avoisine les 40 % pour un objectif de 50 % en 2016, 80 % en 2020 et 100 % en 2030.

Actuellement, le taux de raccordement au réseau d'assainissement en milieu urbain est de 70 %. L'objectif est d'atteindre 100 % en 2030. En milieu rural, il se situe aux environs de 50 %. Il reste le cas particulier des quartiers périurbains des villes intermédiaires encore sous-équipés.

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