ÉCHANGES AVEC LA SALLE

De la salle

Deux questions me viennent à l'esprit. Tout d'abord, quelle est l'utilité de la Chambre de Commerce franco-iranienne ? A-t-elle des représentants en France, et, si oui, peuvent-ils aider les entrepreneurs français ?

Par ailleurs, les droits de douane sont extrêmement élevés en Iran. Quelles mesures le gouvernement est-il prêt, selon vous, à concéder en la matière ? Pour l'heure, les importations favorisent la paupérisation de la population iranienne au profit de quelques bourgeois et commerçants téhéranais et esfahanis.

M. Michel MAKINSKY

La révision des politiques douanières constitue l'un des nombreux chapitres des réformes économiques iraniennes. Toutefois, le plan de résistance économique, publié il y a environ un mois par le Guide, traduit une volonté de préserver les équilibres financiers du pays en limitant les importations et en promouvant les exportations. De ce fait, nous pouvons aisément en déduire qu'une baisse notable et systématisée des droits de douane, hormis pour les biens de première nécessité, ne semble pas à l'ordre du jour.

En ce qui concerne la Chambre de Commerce franco-iranienne, je peux vous assurer de son dynamisme, mais je préfère, sur ce point, me tourner vers M. l'Ambassadeur Ahani.

Son Exc. M. Ali AHANI, ambassadeur de la République islamique d'Iran en France

Je tiens à remercier les initiateurs de ce colloque fort intéressant. Par ailleurs, je ne peux que rejoindre les conclusions formulées par M. Makinsky, relatives à la nécessité pour les entrepreneurs français de renouer rapidement des contacts avec l'Iran afin de ne pas accuser de retard supplémentaire.

En outre, je souhaite simplement préciser que les contrats internationaux signés entre des entités privées ne sont en aucun cas soumis à ratification par le Parlement. Il appartient simplement aux gouvernements des pays concernés de donner leur aval.

M. Michel MAKINSKY

Je partage tout à fait le point de vue de M. l'ambassadeur Ahani, et signale à nos amis iraniens que, s'ils désirent procéder à des allégements bureaucratiques et fiscaux, il est probablement préférable qu'ils ne se réfèrent pas au modèle français en la matière !

De la salle

A l'instar de Sir Richard Dalton, j'estime que les négociations sur le programme nucléaire iranien vont aboutir rapidement à un accord, tant les enjeux géopolitiques sont élevés.

En outre, je rejoins les différents intervenants sur la nécessité pour les entreprises françaises de réinvestir rapidement en Iran. Certes, le circuit financier est difficile à contourner, mais des solutions existent très certainement.

M. Michel MAKINSKY

Votre optimisme est louable, mais la réalité est quelque peu différente. En effet, lorsque les entreprises françaises s'adressent à leurs banques pour investir en Iran, celles-ci les menacent purement et simplement de supprimer les comptes de leur société. De fait, les établissements financiers, et a fortiori les entreprises, sont mis sur liste noire et interdits d'accès au dollar dès qu'il est question d'opérer en Iran. Le risque est réel.

Il nous est souvent rétorqué que les banques allemandes parviennent à mener des opérations en Iran. Toutefois, il faut comprendre que le système bancaire allemand est différent du nôtre. En effet, l'Allemagne dispose de banques régionales qui ne possèdent aucun intérêt ou filiale aux États-Unis, ce qui facilite grandement leurs transactions car elles ne s'exposent pas à des risques de rétorsion.

Cela étant, les grandes banques et les grands groupes allemands rencontrent les mêmes difficultés que leurs homologues français et choisissent bien souvent de ne pas opérer en Iran pour ne pas mettre en jeu leurs intérêts aux États-Unis.

M. Georges MALBRUNOT

Je souhaite simplement préciser que la Banque centrale espagnole vient d'autoriser les opérations en Iran. La frilosité française en la matière ne relève donc pas totalement du fantasme.

De la salle

Préparer le terrain me semble un préalable incontournable au retour de la France en Iran, notamment pour contrecarrer l'influence américaine. En effet, la plupart des cadres dirigeants iraniens ont été formés aux États-Unis et la société entretient des affinités culturelles croissantes avec les membres de la diaspora iranienne implantée en Amérique.

De ce fait, il est essentiel de mettre l'accent sur la formation et la francophonie pour développer les échanges humains entre nos deux pays, sinon le retour de la France en Iran fera long feu.

M. Thierry COVILLE

Je rejoins totalement ces propos et je souligne qu'il existe un véritable problème de volonté politique. L'attentisme des autorités françaises est une source importante de frustration, dans la mesure où les opportunités sont réelles. Indéniablement, les Iraniens ont une appétence pour la France et souhaitent pouvoir échanger avec elle. Cependant, la prudence des autorités, qui rejaillit sur un certain nombre d'institutions françaises, nuit considérablement à la création de liens, notamment universitaires, et favorise les autres pays, au premier rang desquels figurent les États-Unis.

M. Georges MALBRUNOT

Lors de mon séjour à Ispahan, j'ai été stupéfait d'apprendre dans la presse qu'une délégation d'étudiants du séminaire religieux de Qom, l'équivalent chiite du Vatican, était invitée à visiter les universités américaines.

Par ailleurs, fin février, les Présidents de dix grandes universités américaines ont fait le tour des universités iraniennes et ont été reçus par le directeur de cabinet du Guide, Ali Khamenei, pourtant peu réputé pour son penchant pro-américain, ainsi qu'au ministère de la culture et de la guidance islamique, à Téhéran.

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