INTERVENTIONS

M. Oleksandr DOMBROVSKYI, Président de la commission du secteur de l'Énergie, de la Politique et de la Sûreté nucléaire de la Verkhovna Rada d'Ukraine

Cher Président, Monsieur l'Ambassadeur,

D'abord, en tant que conseiller du Président de l'Ukraine et membre du Parlement ukrainien, je voudrais remercier sincèrement nos amis français d'avoir permis que cette rencontre, qui a une signification particulière pour nous, ait lieu aujourd'hui.

Cela fait trente ans que l'Ukraine, et chaque famille ukrainienne, vit avec Tchernobyl dans son coeur et dans son âme. Trente ans ont passé mais chaque famille ressent cette tragédie. Il y a trente ans, j'avais 23 ans et deux enfants, ma cadette avait 6 mois. Je me souviens de cette pluie du 26 avril quand j'ai dû retirer les affaires des enfants qui séchaient au soleil. Cette pluie froide est restée dans ma mémoire toute ma vie.

Cette catastrophe a eu un impact très important d'un point de vue moral et social. Comme M. l'Ambassadeur, je voudrais remercier nos amis français pour leur soutien au cours de toute cette période.

L'Ukraine reste aujourd'hui une puissance nucléaire, qui utilise l'énergie nucléaire pour son approvisionnement électrique. Dans ce sens, nous ressemblons beaucoup à la France qui est un pays nucléaire et dont l'électricité est produite pour environ 75 % par l'énergie nucléaire. L'Ukraine a quinze réacteurs et à peu près quinze Gigawatts de puissance nucléaire.

L'objectif principal de l'Ukraine est le respect de la sécurité nucléaire. Tchernobyl a montré quelles peuvent être les pertes et que la sûreté est indispensable quel que soit le pays. En 1995, l'Ukraine a signé un mémorandum d'entente avec les pays du G7 et la Commission européenne sur la fermeture de la centrale de Tchernobyl. En 1995, ont débuté les travaux de fermeture de la centrale nucléaire. Le premier réacteur a été arrêté en 1996, le deuxième en 1999, puis en 2000 le troisième a arrêté de produire de l'électricité. Mais le problème de Tchernobyl demeure car nous avons besoin de finir le sarcophage sur le réacteur numéro 4. Il y a là un enjeu de santé publique.

Trente ans, c'est une génération. C'est une génération d'enfants qui ont grandi après Tchernobyl. Je veux remercier la France pour son soutien financier, car il est très important pour nous et de très grande valeur. Les défis auxquels fait face l'Ukraine en matière d'énergie atomique sont très sérieux dans le contexte mondial.

Nous devons faire face à la sécurité de la production nucléaire et à la continuation de l'exploitation des réacteurs. Dans la structure de la production électrique ukrainienne, en 2015, la part de l'énergie nucléaire était de 60 %. Au cours des deux dernières années, nous avons été confrontés à une nouvelle tragédie, la guerre à l'Est avec la Fédération de Russie. De ce fait, nous avons perdu 18 % de nos sources d'énergie nucléaire qui se trouvaient à l'Est de l'Ukraine, sur le territoire du Donbass, des zones de Donestsk et Louhansk.

Il est extraordinairement agréable d'être en France et à Paris pour intervenir au cours de cette rencontre parce que le monde change. Mais le monde a besoin de nouvelles décisions globales. Je voudrais rappeler à tous aujourd'hui que justement Paris est devenu la capitale qui propose une philosophie globale de nouvelle vie sur notre planète, à l'image du Sommet de Paris qui s'est déroulé l'an dernier. L'Accord de Paris, qui a été signé il y a quelques jours à l'ONU à New York, nous indique que le monde a besoin d'une nouvelle politique énergétique avec une série de conséquences en matière de production de charbon, et dans laquelle l'énergie atomique doit trouver une nouvelle place sécurisée.

Tchernobyl nous oblige à regarder l'avenir avec beaucoup d'attention, et pas seulement en Ukraine. Je me permettrai quelques exemples de décisions qui ont été prises par le Gouvernement, le Parlement et le Président ukrainiens au cours des dernières années et qui ont permis d'avancer de façon fondamentale sur des questions de sécurité nucléaire en Ukraine. Je pense plus particulièrement à la diversification des fournitures de gaz, dont le monopole est détenu par la Russie, grâce au soutien de la France, nous avons aussi les moyens d'obtenir du gaz de l'Union européenne. Nous avons également des possibilités d'approvisionnement en carburant nucléaire non seulement de Russie mais aussi d'autres pays. Depuis l'année dernière, il y a un plan de développement d'énergies propres en Ukraine.

Ce qui nous oblige à avancer dans cette direction, c'est le souvenir de la tragédie de Tchernobyl. Nous avons commencé un travail très sérieux, une campagne d'enfouissement des déchets nucléaires. C'est un problème d'actualité que l'Ukraine doit résoudre dans un avenir proche. Trente ans sont passés mais la blessure de Tchernobyl n'est pas guérie. Elle rappelle à l'Ukraine la question de la sécurité énergétique, de l'indépendance énergétique du pays. Nous avons conscience que nous devons être dynamiques et rapides pour avancer dans cette direction.

Je voudrais rappeler aussi que l'Ukraine a ratifié l'accord d'association avec l'Union européenne où toutes les étapes de modernisation de la sphère énergétique de l'Ukraine sont décrites.

Pour conclure, je veux encore une fois vous remercier du soutien et de la compréhension de la France. Sur cette question, nous pouvons toujours nous appuyer sur nos amis français. Je vous remercie pour cette amitié.

M. Benoit BETTINELLI, Chef de la mission de la sûreté nucléaire et de la radioprotection, Ministère de l'Environnement, de l'Énergie et de la Mer

Monsieur l'Ambassadeur,

Monsieur le Président,

Mesdames et Messieurs,

Je représente aujourd'hui Mme Ségolène Royal, ministre de l'Environnement, de l'Énergie et de la Mer, en charge de ce fait de la sûreté nucléaire, qui n'a pas pu être présente.

Trente ans après l'accident survenu à Tchernobyl, je voudrais faire le point sur cet accident, sur les enseignements qu'on en a tirés et aussi sur l'assistance de la France auprès du site ukrainien.

Tout d'abord, j'aimerais au nom de la ministre exprimer toute la solidarité de la France auprès du peuple ukrainien.

À propos de l'accident, dont on a appris petit à petit les éléments déclencheurs, l'analyse critique fait sortir un faisceau de trois causes principales. Le premier est un défaut de construction du réacteur RBMK avec en particulier un problème de stabilité dans le régime dans lequel les tests de sûreté avaient été faits, et puis des soucis dans le système d'arrêt automatique qui était un système à deux enceintes, alors que le modèle français comprend trois enceintes.

Ensuite, concernant la prévention des risques et les conditions de préparation du test, on a retenu qu'aujourd'hui, il faut une recherche systématique des scénarios d'accidents non envisagés à la conception, qui soient préparés à l'avance sur les réacteurs nucléaires afin de définir des parades spécifiques et avoir en tête qu'un accident n'est jamais à exclure, dans aucun pays, même en France. Il faut donc se préparer non seulement à éviter ce genre d'accident mais aussi à y faire face.

Le troisième volet est la culture de sûreté. Tchernobyl a montré qu'il y avait un rôle majeur joué par les hommes à l'origine de l'accident.

C'est la raison pour laquelle on développe beaucoup en France la notion de « culture de sûreté » et que la réglementation se renforce au fil des années. Par exemple, cette année on est en train de réglementer de manière plus forte la sous-traitance en limitant le nombre de niveaux de sous-traitance à trois pour les opérations importantes pour la sûreté, et en étendant le contrôle de la sûreté nucléaire y compris aux sous-traitants sur les opérations d'une centrale.

Parmi les enseignements majeurs retenus en France, vingt ans après la catastrophe, la France a souhaité donner son indépendance à l'Autorité de sûreté nucléaire, par la loi du 13 juin 2006 relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire. On a aujourd'hui un système comportant deux entités : l'Autorité de sûreté nucléaire, d'une part, et l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire, d'autre part. On a également renforcé l'information des citoyens avec les commissions locales d'information et un Haut Comité pour la transparence et l'information sur la sûreté nucléaire.

Enfin, Mme Ségolène Royal a complété ce dispositif par une nouvelle loi : la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, confortant le régime des installations nucléaires de base avec la sous-traitance et prévoyant également une réforme du démantèlement pour aller vers un démantèlement plus rapide et plus immédiat, un contrôle plus proportionné aux enjeux, et une procédure particulière pour autoriser la poursuite de fonctionnement de nos réacteurs nucléaires au-delà de leur 35 e année d'activité.

J'en viens aux relations entre la France et l'Ukraine sur le site de Tchernobyl. Cela a été rappelé, la zone de Tchernobyl est fortement marquée avec une zone d'exclusion de 30 kilomètres autour du réacteur accidenté. La France participe à la restauration sur le long terme de ce site, notamment sur le plan du financement, puisqu'elle est l'un des principaux contributeurs du Tchernobyl Shelter Fund , qui a pour objet la construction de l'arche de confinement dont la durée de vie est évaluée à 100 ans et qui permettra de démanteler et de récupérer les déchets radioactifs de l'ancien sarcophage. Le projet fait intervenir deux industriels français : Vinci Construction et Bouygues Travaux Publics. Fin 2017, cette ambitieuse opération s'achèvera.

Je vous remercie.

M. Jacques REPUSSARD, Président d'honneur, ancien Directeur général de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire

Monsieur l'Ambassadeur,

Mesdames et Messieurs,

Chers collègues,

Je voudrais vous dire que je suis très honoré d'avoir été invité par l'ambassade d'Ukraine à participer à ce colloque.

Je voudrais m'associer aux propos tenus par les précédents orateurs sur le devoir perpétuel d'honorer la mémoire de toutes les victimes de cet accident terrible. Trente ans, c'est déjà long mais ce n'est qu'une génération et malheureusement, les habitants de la région de Tchernobyl, mais également les populations de Biélorussie et de Russie proches souffrent encore des conséquences réelles et virtuelles de cet accident. Nous leur devons également une certaine admiration. Nous avons un devoir d'aide vis-à-vis d'eux.

L'Institut que j'ai eu l'honneur de diriger pendant 13 ans, de 2003, au moment de sa création, jusqu'au mois dernier, est en fait une institution qui est héritée de la catastrophe de Tchernobyl. Avant 2003, il existait un Institut de protection et de sûreté nucléaire, qui faisait partie du Commissariat à l'énergie atomique, et cet institut était spécialisé en matière de recherche en sûreté nucléaire et en radioprotection. Après Tchernobyl, il y a eu une initiative franco-allemande, qui, à la suite de l'effondrement de l'Union soviétique, a apporté des fonds mais aussi des experts pour contribuer au rétablissement de la sûreté nucléaire en Ukraine et pour aider le gouvernement ukrainien à une meilleure prise en compte des conséquences sanitaires et environnementales de l'accident.

Comme vous le savez, au moment de l'accident, il y a eu très peu de transparence de la part des autorités soviétiques, le secret a même été gardé pendant plusieurs jours. Évidemment, le secret ne pouvait pas être gardé très longtemps, mais le fait que les informations n'étaient pas disponibles a rendu la compréhension de l'accident beaucoup plus lente que cela aurait pu l'être, et cela a freiné l'aide aux populations, ce qui a été une des causes aggravantes des conséquences. Les membres de l'Institut ont été missionnés avec leurs homologues allemands pour travailler avec les autorités et l'industrie nucléaire ukrainiennes au rétablissement de tout ce qui pouvait être rétabli. Ceci a eu comme conséquence que les experts de l'Institut sont devenus des experts des réacteurs RBMK, des spécialistes des territoires contaminés et de l'appréciation des conséquences sanitaires sur la population.

Cet accident a eu également des conséquences dans toute l'Europe. En 2003, lorsque j'ai été nommé, le ministre de la santé et le ministre de l'environnement m'ont demandé de finaliser un travail sur la France puisque les conséquences de l'accident de Tchernobyl ont donné lieu à de très grandes polémiques. Certes dans une moindre mesure qu'en Union soviétique, très peu d'informations avaient été données à la population française pendant les semaines qui avaient suivi l'accident. Cela avait généré une très grande méfiance vis-à-vis de la capacité des autorités nationales à gérer une situation similaire si elle venait à se produire en France.

En 2003, le Gouvernement a demandé à l'IRSN de faire la lumière sur ce qui s'était passé en France en 1986 et dans les années qui ont suivi. On a donc mesuré, à nouveau, des échantillons qui avaient été conservés, des dizaines de milliers d'échantillons de nourriture, de terre, de végétaux qui avaient été collectés sur l'ensemble du territoire français à l'époque. Grâce aux propriétés physiques de la radioactivité qui décroît mais qui reste mesurable, on a pu reconstituer la réalité et dresser une carte de la contamination en France qui était pire que ce qu'avaient laissé entendre les autorités à l'époque mais sans être finalement si grave que ça.

Je vous livre cette anecdote : nous étions arrivés à la conclusion suivante que, contrairement à ce qui avait été plus ou moins sous-entendu, le nuage était bien venu en France et, au mois d'avril il y avait eu des averses ; lorsqu'il avait plu, les zones du territoire français qui étaient sous la pluie avaient été, pour certaines, dans la moitié est de la France, relativement contaminées. Mais néanmoins il n'y avait que peu ou pas de conséquences sanitaires au niveau national pour la population, ceci pour une raison qu'il fallait expliquer.

J'ai cependant subi quelques pressions à l'époque, venant du côté des industriels. On m'a dit que je n'arriverais pas à convaincre les médias par exemple si j'affirmais que la France avait été contaminée mais sans subir de dommages sanitaires pour sa population mesurables en termes de santé publique. Pourtant c'est la réalité, la population française n'a pas subi de dommages sanitaires à la suite de l'accident de Tchernobyl pour une raison simple, c'est que la dose absorbée par les Français était principalement liée à l'alimentation.

Or les Français vont dans les supermarchés. Déjà à l'époque, on allait dans les supermarchés chercher le lait, et les différents aliments, et ces supermarchés sont des grands ensembles où on mélange des produits de différentes origines. Les doses étaient donc très faibles. Seuls quelques cas existent, par exemple dans des régions agricoles ou en Corse, où des familles se seraient nourries exclusivement de lait, de salades, etc., produits sur leur champ dans lequel il avait plu pendant les jours qui avaient suivi l'accident. Seulement dans ces cas, on pouvait avoir des doses susceptibles de causer un excès de risques pour les enfants par exemple. Globalement la France a donc été contaminée mais n'a pas subi de dommages sanitaires.

Je reviens au reste de l'Europe et à l'Ukraine. Nous avons réussi à établir le scénario de l'accident et nous avons cherché à reconstituer la trace en Europe du nuage radioactif tel qu'il s'est répandu sur l'ensemble de l'hémisphère Nord. Je voulais projeter un petit film que je vais commenter 2 ( * ) . Il montre une reconstitution à partir des cartes météorologiques et des relevés radiométriques opérés et connus dans les bases de données de la Commission européenne dans plusieurs pays. Nous avons reconstitué avec un rétro-planning l'évolution du nuage. Vous voyez qu'effectivement pendant les premiers jours, le discours rassurant du Gouvernement disant « les vents vont vers l'Est, il n'y a pas de problème pour la France », c'était vrai au début, jusqu'au 30 avril-1 er mai.

Ensuite, les vents ont tourné et, à ce moment-là, la France a été envahie par ce nuage puisque l'incendie continuait. Ce qu'il faut noter, c'est qu'entre la couleur jaune clair que vous voyez et la couleur rouge qui est au centre, il y a un écart entre mille et dix mille au niveau de la concentration, donc finalement ce qui apparaît en jaune clair représente très peu, c'était entre 0,1 et 1 becquerel de césium par mètre cube d'air. C'est relativement peu de chose, sauf quand il pleut et que la pluie « lessive » l'air et fait tomber sur le sol une grande partie de cette radioactivité. Vous le voyez, cette carte est tout à fait impressionnante.

Nous avons fait le même exercice après l'accident de Fukushima, qui était cependant dix fois moins important en terme de radioactivité. À Fukushima, les trois quarts de la radioactivité sont partis vers l'océan pacifique, ce qui veut dire que le sol japonais n'a reçu que l'équivalent de quelques pourcents des retombées de l'accident de Tchernobyl.

Ce film illustre le travail très important qui a été effectué par l'IRSN à la demande du Gouvernement français et qui me permet aujourd'hui de vous livrer quelques-unes de ces conclusions. Les conséquences ont été de plusieurs ordres.

Par ordre décroissant, il y a d'abord les conséquences politiques puisque l'effondrement de l'Union soviétique avait évidemment des causes profondes mais l'accident de Tchernobyl a sans nul doute accéléré la désintégration de ce régime. Le ministre chinois de la sûreté nucléaire m'a confié un jour que l'accident nucléaire était considéré en Chine comme un risque politique inscrit dans le tableau des risques du Gouvernement. Les autorités nationales estimaient qu'un accident majeur en Chine pourrait conduire à des modifications politiques de grande ampleur. Ceci s'explique facilement.

Nous avons mené des recherches sur le coût d'un accident nucléaire pour un pays comme la France. Nos économistes ont évalué que ce coût, selon le scenario et la gravité de l'accident, - mais je parle des accidents très graves, comme celui de Tchernobyl ou de Fukushima, où une grande quantité de radioéléments serait relâchée dans l'environnement -, ce coût peut s'élever à quelques centaines voire à plusieurs centaines de milliards d'euros. Ce sont des chiffres qui représentent plusieurs pourcents du produit intérieur brut. Quand une catastrophe comme celle-ci s'abat sur un pays, cela a des conséquences bien au-delà de l'énergie nucléaire, bien au-delà de la région, ce sont des conséquences d'une ampleur nationale.

Nos études avaient également montré que la moitié de ces coûts étaient des coûts indirects, c'est-à-dire non liés directement à la radioactivité mais à la perception qu'avaient les décideurs des conséquences de l'accident, par exemple avec le boycott des territoires contaminés par l'activité touristique. Quand on discute à Kiev avec les représentants des territoires contaminés, donc au-delà de la zone d'exclusion, leur témoignage est très clair. L'économie de ces régions est fondamentalement impactée. Ceci représente un important manque à gagner pour l'Ukraine, qui doit faire face à beaucoup d'autres problèmes. Ces problèmes durent très longtemps, ils représentent une menace économique et politique.

La deuxième conséquence est d'ordre technologique et dans le domaine de la sûreté nucléaire. M. Benoît Bettinelli y a fait allusion, plusieurs milliards d'euros ont été attribués dans le cadre de l'aide européenne, française et allemande en particulier mais aussi américaine pour modifier les réacteurs existants en Ukraine, pour fermer les réacteurs RBMK et pour améliorer la sûreté des autres. Nous avons aidé à la consolidation et à une plus grande indépendance des autorités de sûreté en Ukraine. D'une manière générale dans le monde, l'accident a fait prendre conscience de la nécessité d'accorder plus de moyens et plus d'indépendance aux autorités de sûreté nucléaire. Une des conséquences de cela en France a été en 2006 l'institution de l'ASN comme autorité administrative indépendante, mais dès 2002-2003 l'IRSN avait été séparé du Commissariat à l'énergie atomique. Face à des conséquences technologiques majeures, depuis trente ans, des progrès considérables ont été fait en matière de sûreté nucléaire, sans pour autant que l'on arrive au risque zéro.

La troisième conséquence est d'ordre sanitaire. La population ukrainienne a beaucoup souffert, en particulier les pompiers et les liquidateurs. Parmi les liquidateurs, il y a des personnes de terrain qui ont effectivement reçu des doses importantes tandis que celles qui étaient en charge de la gestion administrative de la catastrophe ont été moins exposées.

En fait, on ne saura jamais combien il y a eu de victimes, les autorités soviétiques n'ont jamais donné de registres permettant de vraies recherches indépendantes mais nous pouvons penser que des dizaines de milliers de liquidateurs sont décédés de cancers causés par les irradiations. La population a été évacuée mais d'autres populations n'ont jamais été évacuées, en Biélorussie et en Russie, par exemple. Des gens ont continué à vivre dans un environnement relativement contaminé.

L'IRSN a contribué à un certain nombre de recherches sur l'état de santé. Une étude menée au début des années 2000 n'a pas montré d'écart de santé chez des enfants selon qu'ils vivaient sur des territoires contaminés ou non. Ce qui est un élément important, c'est de savoir s'ils vivaient ou pas dans des zones qui étaient sous le régime de territoires réputés contaminés. Par exemple, dans les zones urbaines, les enfants avaient un développement normal. Dans les zones agricoles, les enfants étaient moins développés mais pourtant il n'y avait pas de différence dans la charge radioactive corporelle.

Ce que je veux dire, c'est que les dommages sanitaires à la population sont davantage liés au regard que porte l'ensemble du pays sur ces zones. Ils ont une image d'habitants des territoires contaminés. Cela pèse sur la santé des gens plus que les doses elles-mêmes. On commence à en voir les prémices au Japon également. Autrement dit, c'est le regard du reste de la société et la manière dont on traite ces territoires contaminés et leurs habitants qui génère un déficit sanitaire mesurable. La radioactivité elle-même, tant qu'elle reste limitée, a une part faible dans ce déficit. L'IRSN va publier une étude qui confirme ce que je viens de vous dire, elle a été réalisée sur 40 000 enfants vivant en Russie, dans un district du sud-ouest, dont la moitié vivant dans des zones contaminées et l'autre dans des zones non contaminées. Je ne révèle pas les résultats de cette publication mais elle confirme ce que je viens de vous dire.

Quant aux conséquences sur l'environnement, la zone d'exclusion se porte plutôt bien. Cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas eu de changements profonds dans l'environnement. Certaines espèces végétales et animales en ont remplacé d'autres. En particulier, dans le règne animal, certains animaux qui étaient très sédentaires et qui ont donc consommé de la nourriture locale fortement contaminée ont vite disparu. Ils ont été éliminés par leurs prédateurs. On n'y voit pas « d'animaux à cinq pattes », contrairement aux légendes, car le règne animal, l'évolution naturelle, font que, même en supposant qu'ils aient pu être engendrés par le hasard des mutations, les animaux présentant des anomalies auraient été dévorés par d'autres ou sont morts. Il y a eu, cependant, un réel changement des écosystèmes car des espèces en ont remplacé d'autres. Finalement, la planète évolue et prend en compte des paradigmes qui se trouvent dans la nature, des espèces en remplacent d'autres et les écosystèmes ont l'air en bonne santé mais ce ne sont plus tout à fait les mêmes écosystèmes.

Ensuite, la question de savoir si cela est grave ou pas, si l'homme se sent responsable ou pas, est plutôt d'ordre philosophique.

Il y a des parties de la zone d'exclusion où il convient de continuer à travailler car il y a des tranchées qui comportent les matériels qui ont été enfouis, des camions, des déchets très fortement contaminés contenant notamment du plutonium. Le plutonium est un élément très lourd qui est retombé près de la centrale. Ces morceaux ont été rassemblés dans des tranchées qui sont en train de disparaitre sous la végétation. Il y a un travail de mémoire, d'identification et de traitement de ces déchets. Quant à l'arche de confinement, c'est une mesure nécessaire ; il faut souhaiter que les autorités ukrainiennes puissent achever ce projet et ensuite entreprendre l'enlèvement des ruines du réacteur lui-même.

Trente ans après, des polémiques et des controverses subsistent. Il n'y a pas de bonne réponses quant au nombre de morts par exemple. Les Nations Unies ont dit que 51 personnes sont mortes, c'est absurde. Ce sont les morts radiologiques prouvés. Ils sont identifiés, ils ont un nom, on sait qu'ils sont décédés d'un cancer attribuable à des doses extrêmement fortes. C'est faire injustice aux milliers d'autres qui n'ont pas de nom, mais qui sont décédés, en particulier parmi les liquidateurs et les membres de la population en général qui sont bien morts d'un cancer radio-induit. Leur mémoire est difficile à honorer car ils n'ont pas de noms.

En revanche, des calculs pervers ont également été produits par certaines associations écologistes, des experts auto-désignés qui disent qu'il y a eu des centaines de milliers de morts, ces chiffres-là résultent d'une multiplication qui n'est pas licite en physique ou en médecine.

On part du principe que la radioactivité est nocive, que chaque becquerel ajouté crée un très petit excès de risque de cancer, et si on multiplie par des millions on trouve un résultat. Ce résultat n'a pas de valeur scientifique car la validité de cette proportionnalité entre l'excès de cancers et la dose n'est pas démontrée pour des doses très faibles. Or la plupart de ces centaines de milliers de personnes ont eu des doses extrêmement faibles. Leur attribuer des cancers associés serait une supercherie.

Donc le discours de l'Institut est de dire qu'il y a plusieurs dizaines de milliers de morts, pas des centaines. Quant au devenir des écosystèmes, selon que l'on regarde avec l'oeil de Darwin ou pas, on peut considérer que la nature a finalement corrigé à sa façon les dégâts associés à la radioactivité. La nature est toujours aussi belle, l'homme prédateur en est parti et elle se développe.

Ce qui me fait dire que - c'est ma position personnelle -, quand on me demande ce qu'il faut faire des territoires d'exclusion dans l'avenir : il y a un projet du Gouvernement d'en faire une zone de traitement des déchets nucléaires pour l'ensemble de l'Ukraine, il y a déjà des installations qui ont été créées avec des fonds européens donc c'est une bonne idée mais ça ne suffit pas, ce n'est pas très juste vis-à-vis de cette zone de dire que c'est la poubelle nucléaire de l'Ukraine. Ce projet est pertinent technologiquement mais ne suffit pas à réhabiliter les territoires.

Je pense qu'il y aurait matière à organiser du tourisme mémoriel. Il y a des zones très belles, avec des lacs, des forêts. Dans certaines zones, dans la zone des 30 kilomètres, il n'y a pas plus de radioactivité qu'à Fontainebleau. Il serait possible de proposer de manière sûre au point de vue radiologique du « tourisme organisé », c'est-à-dire la visite de certains sites, avec des itinéraires aménagés. Cela aurait deux effets : changer dans la durée l'image de cette zone dans l'esprit des visiteurs qui repartent avec des photos et une image différente. Pour y être allé - nous y avons un laboratoire à trois kilomètres de la centrale, nous suivons le devenir du strontium qui est enfoui - je peux vous dire que la dose des scientifiques qui travaillent là-bas est faible. Il est tout à fait possible de réhabiliter une partie de cette zone sans obliger les touristes à porter des dosimètres. Cela aurait un effet d'entrainement pour les territoires au-delà de la zone d'exclusion. Les problèmes économiques sont surtout en dehors de la zone d'exclusion. Il y a des territoires où il reste de très nombreuses restrictions à l'autonomie, à l'exploitation des forêts.

Un jour il faudra, et le plus tôt possible à mon avis, adopter un plan pour réhabiliter et permettre aux habitants de ces territoires, qui ne veulent pas partir, de voir leur territoire renaître. Il n'y a aucune raison de pénaliser deux fois ces populations. Le message que je voulais vous livrer, c'est qu'il ne faut pas fermer les yeux sur les conséquences très douloureuses pour ces populations. Il faut les aider à vivre normalement, c'est-à-dire accepter leurs produits, les aider à faire vivre leurs entreprises, à élever leurs familles normalement comme nous le faisons tous chacun dans notre pays.

Dernier point, ne pas fermer les yeux, c'est aussi se préparer à un possible accident. Nous continuons à travailler avec nos collègues ukrainiens, japonais et biélorusses sur la manière de traiter non pas l'accident quand il survient dans l'urgence, mais à partir du moment où des rejets radioactifs ont eu lieu dans l'environnement. La gestion du risque dans des États démocratiques ne peut pas se faire sans la société civile.

C'est un défi considérable mais c'était une de mes tâches, de sensibiliser les ministères, notamment de l'Intérieur, les parlementaires, les industriels au fait qu'une gestion de crise ne peut pas se faire dans la durée sans la société civile. Cette coopération, qui se fonde sur la transparence et la compréhension des phénomènes liés à la radioactivité, doit se construire dès à présent et en permanence : lorsque l'accident se produit, il est difficile de déconstruire les préjugés et de corriger les idées fausses dans l'urgence.

Il ne faut pas fermer les yeux, par devoir de mémoire vis à vis des populations qui ont été victimes mais aussi par compréhension de ce qui se passe dans les pays nucléaires, pour se prémunir contre ce risque d'accident. Ce sont des accidents terribles, la catastrophe de Tchernobyl aura été l'avant dernière grande catastrophe de l'Europe du XX e siècle, la dernière étant la guerre en ex-Yougoslavie. Gardons tout cela en mémoire. Je vous remercie.

M. Igor KADENKO, Directeur du Centre international de la sûreté nucléaire, Chef du Département de physique nucléaire de l'Université nationale de Kiev

Messieurs,

Monsieur l'Ambassadeur,

Je voudrais tirer les conséquences humaines de la catastrophe de Tchernobyl et parler de notre activité maintenant dans ce domaine.

Je vais dire quelques mots sur le facteur humain dans la catastrophe, et expliquer dans quelle mesure la formation des personnels ces 30 dernières années a évolué. L'ère nucléaire a commencé en Ukraine en 1977 quand a été mis en route le premier réacteur dans la centrale de Tchernobyl. Le pays progressait, et tout le monde pensait qu'il pouvait y avoir un futur développement de notre pays dans ce domaine. Cette période n'a pas duré, car nous avons connu cette grande catastrophe. Les premières informations ne présentaient pas la vérité sur ce qui s'était passé dans la centrale. Il existe trois facteurs essentiels qui expliquent la catastrophe.

Il existait d'abord des problèmes de construction pour ce type de réacteur. L'exploitation de la centrale posait également problème. Enfin, la manière dont a été formé le personnel pour l'exploitation - et la tendance à considérer l'énergie atomique comme quelque chose d'absolument sûr - a été le troisième facteur de la crise.

Dans toutes les causes de la catastrophe, on a retrouvé le facteur humain. Si nous résumons ce qu'il s'est passé, on a pu constater qu'il y avait une absence de la « culture de sûreté », ce qui a conduit à de sérieux problèmes.

Quelle était la situation à l'époque ? J'ai terminé l'université deux ans avant la catastrophe, et notre université était l'une de celle où l'on préparait les cadres de l'énergie atomique. C'était un concours de circonstances, mais deux ans avant la catastrophe, pendant un cours de physique des réacteurs, j'ai demandé à mon professeur si un incident sur un réacteur de type RBMK était possible. Sa réponse a été qu'un tel incident était très peu probable. Nous avons appris à l'université que l'énergie nucléaire est et doit être sûre. L'expérience en la matière venait des enseignants et des livres sur le sujet. Nous ne connaissions pas les effets de ce type de réacteurs en matière d'environnement. Il n'y avait pas d'outils informatiques pour déterminer les conséquences de l'utilisation de ce type de réacteur, ni une connaissance des processus qui pouvaient amener à ce type d'accident.

Nous avons complètement repensé le schéma de préparation des professionnels en la matière. Nous enseignons aujourd'hui les conséquences de ce qui se passe dans les réacteurs nucléaires, ainsi que la sûreté nucléaire. Pour comprendre l'impact de ces processus sur l'environnement, nous utilisons un instrument français, le code CATHARE qui nous a été donné par l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN). Nous avons de nouvelles possibilités dans la mesure où nous incluons nos étudiants dans l'exécution de travaux dans le domaine de la recherche nucléaire. Nos étudiants tirent leurs connaissances de projets réels exécutés dans l'industrie nucléaire.

Quels sont aujourd'hui les défis du secteur nucléaire en Ukraine ? On a mis en route les réacteurs il y a 30 ans. Il est probable que personne n'avait réfléchi au fait qu'il faille prolonger leur durée d'exploitation. Or cela représente un travail considérable. De plus, l'Ukraine s'est retrouvée dans une situation de crise économique, et la situation difficile dans laquelle se trouve le pays a amené à devoir effectuer le travail avec uniquement des entreprises ukrainiennes. De fait, l'Ukraine est limitée dans sa possibilité d'inclure l'expérience internationale dans ses projets. Du fait de la situation actuelle, nous ne pouvons pas utiliser l'expérience de la Fédération de Russie. Nous avons quinze réacteurs aujourd'hui, et leur durée d'exploitation arrive à son terme l'un après l'autre.

Dans cette situation, nos entreprises font le maximum pour assurer la sûreté de ces travaux, en particulier en faisant valoir l'importance de l'élévation du niveau de sûreté pour les personnels. Nous avons créé une Académie de formation du personnel. En 2015, nous avons mis en place un programme de développement de la culture de sûreté. L'Autorité de régulation ukrainienne s'est donnée comme priorité d'exiger un haut niveau de sûreté.

Nous constatons que parmi les différentes causes d'incidents, nous avons une prépondérance du facteur humain. Il représente plus d'un tiers des incidents. De ce fait, la culture de sûreté demeure la plus grande priorité dans l'exploitation des réacteurs. La nécessité de prolonger la durée d'exploitation des centrales a révélé les manquements et les défauts des projets d'origine.

Dans ces circonstances, la prolongation de la durée de vie des centrales nécessite des actions supplémentaires par rapport à ce qu'auraient été des travaux normaux. Malgré le faible financement et les délais, nos réacteurs seront équipés de systèmes qui doivent nous permettre de prévenir tout risque d'accident. Nous prenons part au développement de ce type de système, et nous bénéficions de la participation de la compagnie Areva.

Je vous remercie de votre attention.

Mme Galia ACKERMAN, Historienne et essayiste, chercheuse associée à l'Université de Caen, auteur de Tchernobyl, retour sur un désastre (2007) et Traverser Tchernobyl (2016)

J'essaierai de parler du sens symbolique de Tchernobyl. Nous avons connu au cours du 20 e siècle des guerres extrêmement meurtrières, ainsi que des catastrophes naturelles comme le tsunami de 2004 qui a fait 225 000 victimes. Heureusement, cela n'est pas comparable avec Tchernobyl. Alors pourquoi gardons-nous autant Tchernobyl en mémoire ? La réponse se trouve dans la nature inédite de cette catastrophe qui met en branle les stéréotypes que nous avons de la vie sur Terre. Que s'est-il passé?

C'est notre perception du temps qui a été touchée. Huit millions de personnes vivent aujourd'hui dans des territoires qui sont contaminés pour encore 200 ans. Cela dépasse notre horizon humain. Quant aux zones contaminées au plutonium, elles ne seront habitables que dans 24 000 ans. Cela défie complètement l'imagination.

Que s'est-il passé dans ce territoire ukrainien, qui est un joyau de l'Ukraine ? Cette région a été prospère, il y avait des villes historiques, différentes sources d'énergie, une présence militaire, de l'agriculture, etc. Tout cela est aujourd'hui revenu à zéro. La majorité de la population a été évacuée, et les gens qui y vivent, y vivent seulement par intermittence parce qu'ils travaillent dans la zone. Tous les travaux effectués dans la zone ont pour seul objectif de limiter les dégâts. C'est un symbole effroyable de ce que peut devenir n'importe quel bout de notre Terre en cas de catastrophe nucléaire.

Je pense que malgré la multiplication des publications, nous sommes loin d'avoir tiré les enseignements de la catastrophe. Il y a énormément d'ouvrages et d'articles qui paraissent sur la gestion de la catastrophe, sur les décontamineurs, etc. Tout cela est éparpillé, en plusieurs langues, et finalement les mêmes clichés sont répétés mais les vrais enseignements n'ont pas été tirés. L'accident de Tchernobyl a été le deuxième grand accident nucléaire de l'histoire. Le premier a eu lieu il y a 60 ans et est survenu dans une usine fabriquant du plutonium militaire en Russie. Il y a eu une contamination énorme sur un territoire plus limité que Tchernobyl.

Cet accident a été entouré de secret. Ni la population russe, ni la population occidentale n'ont été informées. On a créé, tout de suite après la catastrophe, un institut pour étudier ses conséquences et élaborer des recommandations pour la population sinistrée. Il est possible d'évacuer un certain nombre de personnes, mais il restera toujours des populations dans les zones contaminées. Cet institut a élaboré des recommandations pour ces populations.

Après Tchernobyl, les gens qui ont travaillé sur ces mêmes problématiques n'ont pas eu accès aux recherches de cet institut. Les recommandations n'ont pas circulé. Cela montre que tout ce qui relève du domaine nucléaire doit être dans le domaine public afin que tout le monde puisse y accéder et en bénéficier.

Je pense qu'il ne suffit pas de commémorer tous les cinq ans l'accident de Tchernobyl. Il faut passer à la vitesse supérieure. Nous avons l'obligation morale de créer un mémorial virtuel de Tchernobyl. Je pense qu'il faut aujourd'hui recenser les ouvrages scientifiques consacrés à Tchernobyl. La question des faibles doses de radioactivité fait toujours débat. L'accumulation d'une petite source de radioactivité produit en revanche des pathologies de santé, comme des pathologies cardiaques et oculaires, selon certains chercheurs.

S'il existait un répertoire des travaux effectués, cette question des faibles doses de radioactivité n'aurait pas pu être évacuée. Le monde entier a été touché par Tchernobyl d'une façon ou d'une autre, et cet accident a eu des conséquences dans des régions très éloignées de l'Ukraine. Ce mémorial serait un récit de la catastrophe et de l'exploit du million de personnes qui ont travaillé dans la zone. Cette épopée a besoin d'être remémorée, mais surtout consignée. Dans ce mémorial devra se trouver également un recensement des récits et des souvenirs.

Pour ce qui concerne les Ukrainiens, Tchernobyl représente aussi une perte d'une partie du patrimoine national. La transmission des savoir-faire et des connaissances a été brisée. Je rends hommage aux ethnologues ukrainiens qui ont fait un admirable travail de collecte des artefacts de cette région. C'est surtout l'Ukraine qui pourrait se mobiliser pour contribuer à ce mémorial, car c'est le pays le plus démocratique parmi les trois pays concernés par la catastrophe.

Je vous remercie.


* 2 Ce film peut être consulté à l'adresse suivante : http://www.irsn.fr/FR/popup/Pages/tchernobyl_video_nuage.aspx

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