3. LES DIFFICULTÉS D'APPLICATION DE LA CHARTE

La nomination de personnalités consensuelles et charismatiques, soutiens des accords de Belgrade, à la Présidence de l'Etat Commun, au Ministère des Affaires Etrangères ou à la Présidence de l'Assemblée, ne saurait occulter l'absence de consistance de l'Etat commun. Volontaires ou non, les violations de la Charte constitutionnelle sont nombreuses et peu sanctionnées. On citera notamment l'absence de drapeau et d'armoiries communs, la non conformité des Constitutions républicaines à la Charte, l'absence de loi sur la propriété de la communauté étatique, la nomination de deux serbes aux ministères des Affaires Etrangères et de la Défense ou la localisation de la Cour de Justice à Belgrade et non à Podgorica comme prévu par le texte constitutionnel, ces deux derniers écarts ayant été sciemment acceptés par les monténégrins, favorables à un pourrissement de la situation. En l'absence de pouvoir de contrainte accordé à l'Etat Commun ou de calendrier clairement établi, la Charte constitutionnelle est vouée à rester lettre morte sur les domaines clés de l'harmonisation des législations et l'ouverture d'un véritable marché commun. Seule l'action militaire et diplomatique tendent à échapper à cette léthargie, réserve faite des structures parallèles décelées au sein des Républiques.

Prenant acte du maintien d'obstacles à la réalisation d'un marché commun, matérialisés par un régime douanier distinct (à la différence des Serbes, les Monténégrins se placent dans une perspective totalement libre-échangiste) et une monnaie différente (les Monténégrins utilisent l'euro, les Serbes le dinar yougoslave), l'Union Européenne a finalement modifié son approche quant à l'ouverture des négociations en vue d'un Accord de Stabilisation et d'Association. Après avoir initialement repoussé le résultat de l'étude de faisabilité d'un ASA à la fin de 2003, faute d'un fonctionnement satisfaisant de l'Etat commun, notamment sur le plan de l'harmonisation économique, la Commission change d'optique en juillet 2004 pour adopter une approche différenciée selon les Républiques ( twin track ) et aboutir à un avis favorable le 12 avril 2005. Ce constat d'échec implicite légitime pour partie les aspirations indépendantistes présentes au sein des deux parties et plus particulièrement au Monténégro.

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