II. LE SÉNÉGAL : UN PARTENAIRE PRIVILÉGIÉ DE LA FRANCE DANS L'ESPACE OUEST-AFRICAIN

A. LE SÉNÉGAL : UN PAYS CLÉ POUR LA STABILITÉ DE LA RÉGION OUEST-AFRICAINE

1. Le régime politique sénégalais : un modèle de stabilité ?

À la suite d'un référendum organisé par la France le 28 septembre 1958, le Sénégal devient une République adhérant à la Communauté française à partir du 25 novembre 1958 et dont les institutions sont régies par la Constitution du 24 janvier 1959, fortement inspirée de la Constitution française de 1958. Le 4 avril 1959, la République du Sénégal devient partie intégrante de la Fédération du Mali, pour s'en retirer le 20 août 1959 et accéder par la suite à l'indépendance le 20 juin 1960.

Une nouvelle Constitution est adoptée le 26 août 1960, réaffirmant l'option d'un régime parlementaire avec M. Mamadou Dia comme chef du gouvernement en sa qualité de président du conseil et M. Léopold Sédar Senghor comme Président de la République. Toutefois, la crise de décembre 1962 entre les deux hommes aboutit à la Constitution du 7 mars 1963 qui institue un régime présidentiel et supprime le poste de Premier ministre. Elle fait l'objet de plusieurs révisions successives, de 1967 à 1981, visant à passer d'un système de parti dominant à un régime multipartite intégral lors de l'élection à la présidence de la République de M. Abdou Diouf.

À la suite du référendum constitutionnel du 7 janvier 2001, une nouvelle Constitution est adoptée, recueillant 94 % de votes positifs. Elle élargit les prérogatives du Président de la République. Son mandat est de sept ans, renouvelable une fois. Le poste de Premier ministre est rétabli, le Gouvernement demeurant responsable devant le Président de la République et l'Assemblée nationale. Aux termes de l'article 42, le Président de la République « détermine la politique de la nation ».

En 1996, le législateur sénégalais a adopté deux lois portant décentralisation et transfert de compétences de l'État vers les collectivités locales. Désormais, le principe de l'autonomie est reconnu par la Constitution de 2001, au travers des dispositions de son article 102 : « les collectivités locales constituent le cadre institutionnel de la participation des citoyens à la gestion des affaires publiques. Elles s'administrent librement par des assemblées élues ».

L'Assemblée nationale du Sénégal a adopté le 31 janvier 2007 une loi restaurant le Sénat. Mis en place une première fois en janvier 1999 sous le régime du Président Abdou Diouf, le Sénat avait été supprimé, pour des raisons d'économies, à la suite du référendum constitutionnel organisé le 7 janvier 2001. L'article 60-1 de la Constitution de 2001 attribue au Sénat une fonction de représentation spécifique puisqu'il dispose que celui-ci assure la représentation des collectivités locales de la République et des Sénégalais établis hors du Sénégal.

LE SÉNAT SÉNÉGALAIS : UNE INSTITUTION JEUNE, QUI CHERCHE À S'IMPOSER DANS LE PAYSAGE INSTITUTIONNEL DU SÉNÉGAL

I - Composition :

Le Sénat compte 100 membres :

- 35 sont élus au suffrage universel indirect ;

- 65 sont nommés par le Président de la République après avis du Président de l'Assemblée nationale et du Premier Ministre ; parmi ces sénateurs nommés, 4 représentent les Sénégalais établis hors du Sénégal.

La Constitution dispose également que deux cinquièmes des sénateurs sont des femmes.

II - Régime électoral :

35 sénateurs sont élus au suffrage universel indirect, au scrutin majoritaire uninominal à un tour, à raison de un sénateur par département, par un collège constitué des députés, des conseillers régionaux, des conseillers municipaux et des conseillers ruraux du département.

Le mandat sénatorial est de 5 ans. Les sénateurs ont été élus ou nommés pour la première fois en août 2007.

L'âge minimum est de 40 ans.

III - Régime des sessions :

À l'exception de la date d'ouverture de la première session de l'Assemblée nationale ou du Sénat nouvellement élu, qui est fixée par le Président de la République, l'Assemblée nationale fixe, après avoir recueilli l'avis du Président du Sénat, la date d'ouverture et la durée de la session ordinaire unique du Parlement. Celles-ci sont toutefois régies par les règles ci-après.

L'Assemblée nationale et le Sénat se réunissent de plein droit en une session ordinaire unique qui commence dans la première quinzaine du mois d'octobre et qui repend fin dans la seconde quinzaine du mois de juin de l'année suivante. Au cas où la session ordinaire ou une session extraordinaire est close sans que l'Assemblée nationale n'ait fixé la date d'ouverture de sa prochaine session ordinaire, celle-ci est fixée en temps utile par le bureau de l'Assemblée nationale, après avoir recueilli l'avis du Président du Sénat.

Le Parlement est, en outre, réuni en session extraordinaire, sur un ordre du jour déterminé :

- soit sur demande écrite de plus de la moitié des députés, adressée au Président de l'Assemblée nationale ;

- soit sur décision du Président de la République, seul ou sur proposition du Premier Ministre.

Toutefois, la durée de chaque session extraordinaire ne peut dépasser quinze jours. Les sessions extraordinaires sont closes sitôt l'ordre du jour épuisé.

IV - Rapports avec l'autre chambre et le pouvoir exécutif :

A - Pouvoir législatif :

Même si le bicamérisme sénégalais est inégalitaire, puisque lors de l'examen d'un texte le dernier mot revient toujours à la Chambre basse en cas de désaccord, la Constitution n'en confère pas moins au Sénat du Sénégal de véritables compétences législatives.

1/ Initiative législative :

Les sénateurs disposent du droit d'initiative législative, concurremment avec le Président de la République, le Premier Ministre et les députés ; mais les propositions de loi sénatoriales sont examinées en premier lieu par l'Assemblée nationale.

Les propositions parlementaires ne doivent entraîner ni une diminution des ressources publiques, ni la création ou l'aggravation d'une charge publique, sauf si elles sont assorties de propositions de recettes compensatrices.

L'initiative n'est pas ouverte aux sénateurs en matière constitutionnelle.

2/ Droit d'amendement :

Les sénateurs en disposent, concurremment avec le Président de la République et les députés ; mais les amendements parlementaires ne doivent entraîner ni une diminution des ressources publiques, ni la création ou l'aggravation d'une charge publique, sauf s'ils sont assortis de propositions de recettes compensatrices.

3/ Procédure législative ordinaire (article 71 de la Constitution de 2001) :

Le Sénat est saisi en second lieu des projets ou propositions de loi. Ceux-ci, après adoption par Assemblée, sont transmis au Sénat, qui dispose de seulement 20 jours pour se prononcer, 7 si le gouvernement a déclaré l'urgence.

Si Sénat approuve le texte sans amendement, la loi est transmise au Président de la République pour promulgation.

En cas de désaccord entre les deux assemblées ou si le Sénat ne s'est pas prononcé dans les délais, l'Assemblée nationale statue définitivement.

Dans le délai fixé pour la promulgation, soit 8 jours francs après l'expiration des délais de recours (4 jours en cas d'urgence), le Président de la République peut, par un message motivé, demander à l'Assemblée une nouvelle délibération qui ne peut être refusée. La loi ne peut être votée en seconde lecture que si les trois cinquièmes des membres composant l'Assemblée nationale se sont prononcés en sa faveur.

4/ Procédures législatives particulières :

a) Délégation législative à une commission :

L'Assemblée nationale et le Sénat peuvent déléguer à leur Commission des délégations le pouvoir de prendre des mesures qui sont du domaine de la loi.

Cette délégation s'effectue par une résolution de l'assemblée intéressée dont le Président de la République est immédiatement informé.

Dans les limites de temps et de compétence fixées par la résolution prévue ci-dessus, la Commission des délégations prend des délibérations qui sont promulguées comme des lois. Ces délibérations sont déposées sur le bureau de l'Assemblée nationale.

Faute d'avoir été modifiées par le Parlement dans un délai déterminé, elles deviennent définitives.

b) Délégation au Président de la République (ordonnances) :

Le parlement peut habiliter le Président de la République à adopter des mesures relevant du domaine de la loi. Dans les limites de temps et de compétence fixées par la loi d'habilitation, le Président de la République prend des ordonnances qui entrent en vigueur dès leur publication mais deviennent caduques si le projet de loi de ratification n'est pas déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale avant la date fixée par la loi d'habilitation. Le Parlement peut les amender à l'occasion du vote de la loi de ratification.

c) Lois organiques :

Les lois qualifiées d'organiques par la Constitution sont votées selon la procédure ordinaire. Toutefois le texte ne peut être adopté par le Parlement qu'à la majorité de ses membres. En outre, la procédure de législation en commission n'est pas applicable aux lois organiques, non plus que la délégation législative au Président.

d) Vote bloqué :

Si le Gouvernement le demande, l'assemblée saisie se prononce par un seul vote sur tout ou partie du texte en discussion en ne retenant que les amendements proposés ou acceptés par le Gouvernement.

e) Lois de finances :

Le Parlement vote les projets de lois de finances dans les conditions prévues par une loi organique.

Le projet de loi de finances de l'année, qui comprend notamment le budget, est déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale, au plus tard le jour de l'ouverture de la session ordinaire unique.

Le Parlement dispose de soixante jours au plus pour voter les projets de lois de finances. L'Assemblée nationale statue en premier lieu dans un délai de trente cinq jours après le dépôt du projet et le Sénat dispose de quinze jours à compter de la date de réception.

Si le Sénat adopte un texte identique à celui de l'Assemblée nationale, la loi est transmise sans délai au Président de la République pour promulgation. Si le Sénat ne s'est pas prononcé dans le délai de quinze jours ou est en désaccord avec l'Assemblée nationale, le projet est transmis en urgence à l'Assemblée nationale qui statue définitivement.

Si le Parlement ne s'est pas prononcé dans le délai de soixante jours, le projet de loi de finances est mis en vigueur par ordonnance, compte tenu des amendements votés par l'Assemblée nationale ou le Sénat et acceptés par le Président de la République.

Si la loi de finances de l'année n'a pu être promulguée avant le début de l'année financière, le Président de la République est autorisé à prescrire la continuation de la perception des impôts existants et à reconduire par décret les services votés.

L'exercice du droit parlementaire d'amendement est plus réduit dans le domaine des lois de finances, puisque aucun article additionnel ni amendement à un projet de lois de finances ne peuvent être proposés par le Parlement, sauf s'ils tendent à supprimer ou à réduire effectivement une dépense, à créer ou à accroître une recette.

B - Pouvoir de contrôle :

Les députés et les sénateurs peuvent poser au Premier ministre et aux autres membres du Gouvernement qui sont tenus d'y répondre, des questions écrites et des questions orales avec ou sans débat. Les questions ou les réponses qui leur sont faites ne sont pas suivies de vote.

L'Assemblée nationale et le Sénat peuvent désigner, en leur sein, des commissions d'enquête dont les conditions d'organisation et de fonctionnement, ainsi que les pouvoirs, sont déterminés par la loi.

Seule l'Assemblée nationale peut censurer le Gouvernement.

C - Relations avec le Président de la République :

1/ Vacance :

En cas de démission, d'empêchement définitif ou de décès, le Président de la République est suppléé par le président du Sénat. Celui-ci organise les élections dans les délais prévus à l'article 31 (soit 60 à 90 jours après la constatation de la vacance par le Conseil constitutionnel). Au cas où le président du Sénat serait lui-même dans l'impossibilité d'assurer l'intérim, la suppléance est assurée par le président de l'Assemblée nationale.

2/ Mise an accusation du Président de la République :

Le Président de la République n'est responsable des actes accomplis dans l'exercice de ses fonctions qu'en cas de haute trahison. Il ne peut être mis en accusation que par les deux assemblées, statuant par un vote identique au scrutin secret, à la majorité des trois cinquièmes des membres les composant ; il est jugé par la Haute Cour de justice.

V - Dispositions diverses :

A - En matière constitutionnelle :

1/ Révision constitutionnelle :

Les sénateurs ne disposent pas de l'initiative en matière de révision constitutionnelle.

Les textes de révision constitutionnelle sont adoptés par les assemblées suivant la procédure législative ordinaire.

La révision est définitive après avoir été approuvée par référendum. Toutefois, le projet ou la proposition n'est pas présenté au référendum lorsque le Président de la République décide de le soumettre au Parlement convoqué en Congrès. Dans ce cas, le projet ou la proposition n'est approuvé que s'il réunit la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés.

2/ Contrôle de constitutionnalité :

Le Conseil constitutionnel peut être saisi d'un recours visant à faire déclarer une loi inconstitutionnelle :

- par le Président de la République dans les six jours francs qui suivent la transmission à lui faite de la loi définitivement adoptée,

- par un nombre de députés au moins égal au dixième des membres de l'Assemblée nationale, dans les six jours francs qui suivent son adoption définitive,

- par un nombre de sénateurs au moins égal au dixième des membres du Sénat, dans les six jours francs qui suivent son adoption définitive.

B - Circonstances exceptionnelles :

La déclaration de l'état d'urgence, de l'état de siège ou de la guerre est faite exclusivement par l'Assemblée nationale.

C - Nominations :

La Haute Cour de justice est composée de membres élus, en nombre égal, par l'Assemblée nationale et le Sénat après chaque renouvellement de ces assemblées.

Source : Sénat ( http://www.senat.fr/senatsdumonde/senegal.html )

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