Colloque SENAT-CFCE sur l'Egypte


Table des matières





Groupe interparlementaire

France-Egypte





France-Egypte 2003

Dans le sillage de la modernisation de l'économie égyptienne,
l'élan nouveau des relations économiques bilatérales

Actes du colloque

du 22 mai 2003

Sous le haut patronage de :

Christian PONCELET , Président du Sénat,
Agnès GABORIT, Directeur Evénements et Prospective Marchés, CFCE,



sous l'égide de :
Nicolas ABOUT , Président de la Commission des Affaires sociales du Sénat, Président du groupe interparlementaire France-Egypte

en présence de :


Mokhtar KHATTAB , ministre égyptien du Secteur public des Affaires,
S. Exc. Hatem SEIF EL NASR , Ambassadeur de la République Arabe d'Egypte en France,
S. Exc. Jean-Claude COUSSERAN , Ambassadeur de France en Egypte,

autour de


Hervé PIQUET , Chef de la mission économique du Caire,
Claude LOREAU , Président de la Commission « Proche et Moyen-orient » du Comité national des Conseillers du Commerce extérieur de la France.

et de nombreux représentants de la communauté d'affaires française en Egypte et d'opérateurs français dans le pays.

- SERVICE DES RELATIONS INTERNATIONALES DU SÉNAT -

France - Egypte 2003
Dans le sillage de la modernisation
de l'économie égyptienne, l'élan nouveau des relations économiques bilatérales
Ouverture

Christian PONCELET
Président du Sénat

Messieurs les Présidents, Monsieur le Ministre, Messieurs les Ambassadeurs, chers collègues, Mesdames et Messieurs, le Sénat est particulièrement heureux d'accueillir aujourd'hui ce colloque économique sur l'Egypte, organisé sous l'égide du groupe interparlementaire France-Egypte, en partenariat avec nos amis du Centre français du Commerce extérieur.

Comme vous le devinez aisément, cette rencontre doit beaucoup à Monsieur Nicolas About, Président de la commission des Affaires sociales du Sénat qui, parallèlement, préside le groupe interparlementaire France-Egypte. Je constate avec joie tout le dynamisme qu'il insuffle à ce groupe très actif.

Je tiens également à saluer le nouvel Ambassadeur d'Egypte en France, fin connaisseur de notre pays pour y avoir déjà été en poste. Le groupe interparlementaire France-Egypte est assuré de trouver en lui un interlocuteur de qualité et un ami fidèle.

Mais je tiens aussi - et surtout - à redire l'excellente coopération qui s'est établie entre le Sénat et le Centre français du Commerce extérieur, notamment avec son directeur général, Monsieur Jean-Pierre Trotignon, et ses collaborateurs.

Le CFCE remplit une mission essentielle, qui prolonge et valorise les efforts patients de nos postes d'expansion économique, pièces maîtresses du rayonnement économique de la France à l'étranger. Le fait est que, trop souvent, les entrepreneurs et les investisseurs français n'ont pas une connaissance suffisante des opportunités d'affaires à l'étranger ou même, plus prosaïquement, des « moeurs commerciales » qu'ils vont rencontrer dans les pays où ils envisagent d'étendre leur activité. C'est très regrettable, me semble-t-il, car cela ne facilite pas l'ouverture - notamment des PME - vers des Etats qui, comme l'Egypte, peuvent pourtant se révéler des partenaires économiques de premier plan.

Cela étant, l'Egypte n'est pas, pour la France, qu'un marché commercial, loin s'en faut. Nos deux pays ont su nouer depuis de très nombreuses années des relations denses et fécondes. Leur dialogue politique est riche et constant.

Sur bien des points, nous nous retrouvons sur des « horizons partagés », en particulier dans notre volonté commune de parvenir à une paix juste et durable au Proche-Orient : dossier majeur dans lequel - comme tant d'autres, il faut le souligner - l'Egypte joue depuis longtemps un rôle actif et modérateur.

Encore tout récemment, lors de la crise irakienne, l'Egypte aura jusqu'au dernier moment tenté de trouver une solution diplomatique.

Comme toujours, le politique rejoint l'économique, tant il est vrai que les troubles et les incertitudes géopolitiques affectent les relations commerciales et les marchés. De fait, force est de constater que les économies des pays de la région proche et moyen-orientale sont en ce moment durement touchées. L'économie égyptienne n'échappe pas à ces contraintes.

Bien entendu, l'Egypte s'est déjà tournée vers ses bailleurs de fonds traditionnels, la Banque Mondiale, la Banque Africaine de Développement et, évidemment, les Etats-Unis d'Amérique. Mais sur ce plan, l'Egypte a également - et plus que jamais - besoin d'une relation forte et confiante avec l'Union européenne, qui se pose déjà, loin devant les autres pays, comme son premier partenaire économique.

Je souhaite, à cet égard, que la relation privilégiée nouée par la France et l'Egypte soit marquée par des actes concrets de solidarité et de confiance dans l'avenir. Cette confiance, j'ai voulu que le Sénat la traduise dès à présent à travers ce colloque ; il mettra en valeur toutes les opportunités que présente l'Egypte, non seulement via les grands contrats traditionnels mais aussi pour les PME et les PMI.

Avec les conseils éclairés du CFCE, je suis convaincu que le savoir-faire de nos entreprises - grandes ou petites - peut facilement trouver à s'employer dans ce grand pays qu'est l'Egypte : un pays ami qui représente, pour tous les secteurs, un marché à fortes potentialités.

Je souhaite à tous un excellent, studieux et fructueux colloque, en espérant que vous garderez de votre passage au Sénat un bon souvenir, qui vous incitera à y revenir.

Introduction

Nicolas ABOUT
Président de la Commission des affaires sociales du Sénat,
Président du groupe interparlementaire France-Egypte

Monsieur le Président, vous avez excellemment décrit le contexte politique dans lequel s'inscrivent les relations franco-égyptiennes. J'ai en vérité peu de choses à ajouter.

Juste, peut-être, un mot pour prolonger votre réflexion sur les liens politiques et culturels qui lient nos deux pays, et pour dire que la place de la France dans les échanges commerciaux de l'Egypte est loin d'être à la hauteur des liens historiques, politiques et culturels qui lient les deux pays. On pourrait dire que les performances de nos entreprises sont loin d'égaler, dans leur domaine, l'influence des Champollion, des Mariette ou des Denon.

La France n'est que le quatrième exportateur en Egypte derrière les Etats-Unis bien sûr, mais également derrière l'Italie et l'Allemagne. Comme on dit dans ces cas-là, notre marge de progression est forte. C'est la raison d'être de ce colloque.

Or les opportunités sont là. Les pouvoirs publics égyptiens, les autorités locales, les grandes entreprises égyptiennes ont la volonté de diversifier leurs fournisseurs. Il y a des marchés à saisir.

La situation économique égyptienne est stabilisée. L'Egypte est sortie par le haut de son programme d'ajustement avec le FMI. La situation actuelle est donc très différente de celle des années 80, où le pays était au bord de l'asphyxie financière. Certes, l'Egypte doit faire face aujourd'hui au défi de la réforme de l'Etat. La libéralisation du système financier, une plus grande ouverture de l'économie à la concurrence, la réforme fiscale, l'amélioration des services publics, la réduction des dépenses publiques, sont bien les enjeux majeurs de l'économie égyptienne. Ce sont des défis que nous connaissons bien et qui ne sont pas étrangers, loin s'en faut, à nos préoccupations en France.

Il reste que l'économie égyptienne est un marché porteur pour nombre de nos entreprises. C'est vrai dans les secteurs des télécoms et des technologies de l'information. C'est vrai dans les secteurs des produits d'équipement agricole. Mais c'est également vrai dans un grand nombre de secteurs très spécialisés, dans lesquels non seulement les grandes entreprises, mais également les PME françaises, peuvent trouver des opportunités de partenariat.

L'Egypte ne doit pas seulement être le marché des grands contrats. On ne peut que se féliciter que de grands investisseurs français choisissent ce pays pour y investir. Nombre d'entre eux ont commencé d'apercevoir toutes les opportunités que représente l'Egypte, non seulement comme marché, mais également comme plate-forme de réexportation à meilleur coût vers les zones arabes et africaines. Il existe également, du Caire à Alexandrie, de Suez à Port Saïd, de Damiette à Ismaïlia, de nombreuses opportunités pour les petites entreprises françaises.

J'ai dit que la place de la France dans les échanges commerciaux avec l'Egypte est loin d'être à la hauteur des liens culturels qui relient les deux pays. Pour autant, renforcer notre partenariat économique nécessite également de maintenir l'effort en faveur de la francophonie.

Il y a une francophonie égyptienne. Nous avons tous à l'esprit tous ces savants, tous ces artistes français et égyptiens qui ont, au cours de notre histoire commune, oeuvré ensemble et échangé leur savoir et leur expérience.

Cette francophonie ne doit cependant pas se conjuguer au passé. Elle est encore vivante. J'en veux pour illustration le nombre d'Egyptiens qui participaient dernièrement, au Sénat, au congrès international de l'Institut de droit et d'expression français, l'IDEF, dont le Président est d'ailleurs égyptien. Elle n'en demeure pas moins menacée. C'est pourquoi il faut conforter l'effort des pouvoirs publics pour favoriser les écoles et les pôles universitaires francophones en Egypte. L'influence de la France, la reconnaissance du savoir faire des entreprises françaises dépendent aussi de la possibilité qu'auront ou non les nouvelles générations d'étudiants égyptiens à apprendre le français.

Les membres du club d'affaires franco-égyptien, que je veux saluer ici, savent combien un passage dans une école ou un stage de l'ACTIM ont pu parfois influencer le choix des décideurs économiques pour une entreprise française. C'est pourquoi je suis particulièrement heureux de les accueillir aujourd'hui.

Je vous salue tous et vous souhaite une excellente journée de travail - et surtout des résultats fructueux.

France-Egype : une relation politique d'exception

Son Excellence Hatem SEIF EL NASR
Ambassadeur de la République Arable d'Egypte en France

Monsieur le Président, messieurs les Ministres, messieurs les Sénateurs, messieurs les Ambassadeurs, chers collègues, mesdames et messieurs, c'est pour un moi véritable plaisir de vous dire quelques mots de mon pays dans le cadre de ce colloque.

Il y a exactement deux ans, le CFCE organisait un colloque similaire, intitulé « L'Egypte en 2001 : un nouveau souffle » . Depuis cette date, l'échiquier international, tant politique que financier, a profondément changé : la guerre en Irak, l'explosion de la bulle financière, pour ne citer que ces exemples, ont totalement changé la donne. Dans ce contexte, le Tigre du Nil continue son combat face au ralentissement de l'économie internationale. La guerre en Irak est venue renforcer l'impact des évènements du 11 septembre 2001 sur notre économie. Cela s'est ressenti tant au niveau du prix du pétrole que sur les chiffres du tourisme qui ont chuté, depuis 2001, de plus de 22 %. Malgré tout, l'Egypte a, depuis quelque temps, jeté les fondements de sa croissance. Elle a entrepris durant ces dernières années une série de réformes importantes, voire drastiques, en vue de modifier la structure de son économie et ainsi de favoriser la croissance. L'un des axes clefs de ces réformes consiste à éliminer les multiples strates de complications procédurières séparant, depuis des siècles, les autorités publiques des acteurs économiques.

Par ailleurs, les réformes engagées ont permis une relance de la croissance, en approfondissant le programme de modernisation :

· modernisation des infrastructures ;

· modernisation de l'industrie ;

· promotion de l'investissement ;

· promotion des exportations et flottement de la livre égyptienne ;

· promotion de la coopération régionale et internationale - à ce sujet, je rappelle que l'Egypte est membre de la COMECA, marché de plus de 300 millions de consommateurs. Par ailleurs, le Premier Ministre a ratifié, il y a peu, un accord avec l'Union européenne, qui entérine le partenariat économique, financier et social qui s'est tissé entre notre pays et l'Union ;

· promotion des grands chantiers pour accroître la superficie agricole du pays - la création d'un nouveau delta, la construction d'un nouveau canal dans la région du Sinaï, la création de sept nouvelles cités, la mise en oeuvre d'un métro à Alexandrie ou le lancement du satellite Nile Sat en sont quelques exemples.
Vous l'aurez compris, la politique d'intégration de notre pays est une condition sine qua non de la relance de la croissance dans notre pays. Pour ce faire, nous devrons approfondir et intensifier nos relations politiques et économiques avec l'Union européenne, en particulier avec la France, partenaire de longue date de notre pays.

En effet, depuis toujours, la France et l'Egypte oeuvrent à faire de la Méditerranée une zone de paix juste et permanente. Comme vous le savez, le Moyen-Orient est le théâtre de deux conflits d'importance : le conflit israélo-palestinien et le conflit irakien. Sous la houlette de notre Président Monsieur Moubarak, nous souhaitons nous poser en garants de la paix. Nous travaillons ainsi avec acharnement pour mettre fin à l'occupation militaire d'Israël en Palestine. De même, dès les prémices de la crise irakienne, l'Egypte s'est efforcée d'empêcher l'avènement du conflit, pour éviter aux Irakiens et à toute la zone moyen-orientale un nouveau désastre. Aujourd'hui, le gouvernement de Saddam Hussein est tombé et nous devons faire preuve de réalisme.

Dans ce contexte, deux impératifs se font jour : prévenir la survenance d'une crise humanitaire et reconstruire l'Irak. S'agissant de ce dernier point, sachez que nous avons déjà pris des contacts avec des représentants irakiens. Il importe que ce pays puisse bientôt être libéré de l'occupation militaire des troupes étrangères sur son sol et ainsi se choisir un gouvernement politique indépendant.

A l'aube du XXI siècle, l'Egypte a - vous en conviendrez - jeté les fondements de sa croissance. Toutefois, celle-ci ne saurait être atteinte sans votre appui. Vive l'amitié entre la France et l'Egypte. Je vous remercie pour votre attention.

Son Excellence Jean-Claude COUSSERAN
Ambassadeur de France en Egypte

Monsieur le Président, monsieur le ministre, messieurs les ambassadeurs, mes chers collègues, mesdames et messieurs, je suis très heureux d'intervenir devant vous aujourd'hui. Je suis convaincu que ces rencontres organisées par le Sénat et le CFCE servent grandement nos deux pays.

Sans revenir plus avant sur ce que mes prédécesseurs à cette tribune ont évoqué, je tiens à rappeler brièvement les fondements de la relation forte qui existe entre la France et l'Egypte : un héritage historique et un partenariat en construction.

Un héritage historique

Pour évoquer ce lien historique, je citerai les ouvrages de Braudel retraçant la relation économique qui s'est tissée de longue date entre nos deux pays. Au cours de l'histoire, deux noms prestigieux se dégagent : celui de Napoléon, dont la campagne en Egypte a été contestée, et celui de Mohammed Ali. C'est à cette date que les Saint-Simoniens ont multiplié les contacts avec les Egyptiens, servant ainsi le projet de modernisation de l'Egypte initié par Mohammed Ali.

Dans le coeur de la société égyptienne, s'est fait jour, à cette date, un souci fort d'échange avec l'Europe. Certes, cet échange était inégal et marqué par l'impérialisme, mais il marque le début d'une volonté de coopération. J'attire en outre votre attention sur le fait qu'à cette époque, les Français présents en Egypte étaient bien plus nombreux qu'ils ne le sont aujourd'hui.

La présence britannique après 1880 ne brise pas - comme nous aurions pu le penser - l'influence française en Egypte. Il faudra attendre les années 1956, avec la crise de Suez notamment, pour que les relations entre nos deux pays se distendent de manière dramatique. C'est en 1963, sous l'égide du Général de Gaulle que les liens entre l'Egypte et la France connaîtront une nouvelle ère.

Un partenariat en formation

Au-delà de cet héritage historique, nous assistons à la création d'un partenariat fort, tant au plan politique qu'économique ou financier. Au plan politique, nos pays bénéficient incontestablement des liens d'amitié qui unissent nos Présidents respectifs. A cela s'ajoute l'existence d'une concertation régulière entre les autorités politiques de nos deux pays. Ce dialogue va - il convient de le souligner - bien au-delà des simples relations diplomatiques.

En ce qui concerne l'Irak, la France et l'Egypte ont adopté des positions parallèles. Aujourd'hui encore, nos deux pays manifestent le désir de prévenir toute crise humanitaire. Il y a quelques années, le Président Moubarak avait émis l'idée de faire de la zone moyen-orientale un espace non-nucléaire. La France a largement soutenu cette position.

Ainsi que l'a souligné Son Excellence Hatem Seif El Nasr, la France et l'Egypte sont deux pays méditerranéens. Cette mer ne doit aujourd'hui plus se dresser comme une barrière entre l'Europe et le monde arabe.

En ce qui concerne les relations économiques, je crois fermement en la qualité du travail fourni par les Chambres de Commerce et le CAFE. Pour l'heure, ces relations sont déséquilibrées, il est vrai, mais la tendance devrait s'inverser d'ici peu, grâce à la signature d'importants contrats dans le domaine du gaz et de la génération d'électricité notamment, avec Onyx et EDF pour ne citer que cet exemple. Ce sont là indubitablement des contrats d'avenir qui - je l'espère - inciteront d'autres entrepreneurs à investir en Egypte.

Dans ce contexte, les relations franco-égyptiennes doivent faire preuve d'une très grande cohérence. C'est dans cet esprit que nous plaidons en faveur d'un enseignement primaire et secondaire francophone de qualité et d'un enseignement universitaire diversifié, afin de promouvoir une offre française tournée vers le marché égyptien, notamment dans le cadre de l'Université française d'Egypte qui fonctionne en grande partie avec le soutien des entreprises.

Nous sortons d'une période de crise importante, marquée par la crise irakienne. L'Egypte, tout au long de cette période, a réaffirmé son attachement à la liberté et à la paix. C'est pour nous tous, Etats et entreprises, une invitation.

La politique de modernisation de l'économie égyptienne

Mokhtar KHATTAB
Ministre égyptien du Secteur public des Affaires

Monsieur le Président, Monsieur le Président du groupe interparlementaire, Mesdames et Messieurs les Sénateurs, Mesdames et Messieurs, je suis particulièrement heureux d'intervenir au cours de ce colloque pour vous présenter les grandes lignes de la politique de modernisation de l'Egypte.

I. Rappel historique

Depuis le début du 19 ème siècle, l'Egypte enregistre des progrès culturels et sociaux continus. Pour autant, elle n'a jamais, au cours de cette période et jusqu'à l'avènement au pouvoir de Mohammed Ali, connu de croissance durable. Mohammed Ali s'est posé comme le grand précurseur du développement économique de notre pays en créant des industries et en intensifiant la politique agricole, pour ne citer que ces exemples. Cependant, ses déboires militaires ont réduit à néant les espoirs de modernisation.

Plus tard, Talab Rhab, en coopération avec la banque MIS, a mis sur pied un grand groupe économique diversifié qui subsiste encore aujourd'hui.

La troisième vague de modernisation trouve sa place dans les années 50 et 60, sous la houlette de Nasser, qui a nationalisé une grande part de l'économie de notre pays. Ces années se sont également traduites par une meilleure formation de nos cadres, une optimisation de notre politique agricole et une densification du tissu économique et industriel de notre pays. Il nous a ensuite fallu compter avec les différentes crises politiques qui ont agité la zone. Celles-ci se sont accompagnées d'une dégradation des performances de l'Egypte : la chute du taux de croissance économique en est la meilleure preuve.

II. Grands principes des réformes

Pour faire face à cette situation, il a fallu, au début des années 80, initier une vague de réformes en vue de moderniser notre pays. Notre actuel Président, Monsieur Moubarak, en est l'instigateur. Il a favorisé l'avènement d'une économie s'appuyant plus largement sur le secteur privé. C'est pourquoi il lui a fallu lutter contre l'inflation et le déficit budgétaire croissant. Force est de constater que les résultats enregistrés de 1991 à 1995 ont permis de créer un environnement économique favorable à la restructuration de l'économie. Celle-ci s'est traduite par la privatisation des entreprises égyptiennes et la baisse des tarifs douaniers sur les importations, notamment. 38 entreprises ont à ce jour changé de mains dans le cadre de la Bourse égyptienne et 34 autres ont été cédées aux associations de travailleurs : au total, 192 entreprises, soit 36 % des firmes nationales, ont été privatisées durant cette période.

Parallèlement, nous nous sommes efforcés de favoriser les investissements étrangers, notamment en décidant de laisser flotter le cours de la livre égyptienne, en janvier 2003. D'autres projets de réformes, portant entre autres sur les tarifs douaniers, sont aujourd'hui dans le pipeline.

III. Ratification de l'accord d'association avec l'Union européenne

Cet accord, ratifié il y a peu, implique l'élimination progressive des taxes douanières sur les importations égyptiennes. Le véritable défi réside dans la capacité de l'économie et de la société égyptiennes de se mettre à niveau pour faire face à la concurrence internationale.

IV. Modernisation de l'économie égyptienne

Pour répondre à ce nécessaire objectif de modernisation, il nous faut mettre l'accent sur le capital humain et le software . Dans cette optique, nous porterons une attention particulière à la modernisation de notre système éducatif, notamment au travers de l'introduction massive de l'informatique dans nos écoles et universités. Par ailleurs, nous devrons nous attacher à moderniser notre politique de santé publique. Il s'agira, entre autres, de mettre en place un nouveau planning familial, pour juguler la croissance démographique.

Bien évidemment, le secteur économique ne sera pas en reste. Il conviendra notamment que nous modernisions la législation relative aux douanes ainsi que les outils de production, et que nous mettions l'accent sur la politique de recherches innovantes.

Parallèlement, l'Etat devra s'attacher à privatiser les entreprises qui se trouvent encore dans le giron de l'Etat. Pour ce faire, nous avons initié un programme de privatisations sur sept années.

L'évaluation des machines et des équipements à leur valeur comptable, la possibilité de location des terrains à taux réduit, la possibilité de profiter d'un dégrèvement fiscal durant cinq ans, sont quelques exemples des incitations sur lesquelles nous souhaitons insister.

Dans ce contexte, j'espère que les relations franco-égyptiennes continueront à s'intensifier, notamment au travers de l'arrivée de nouveaux investisseurs.

Les enjeux de la modernisation
de l'économie égyptienne

Cette table ronde est animée par Hervé PIQUET, Chef de la Mission économique du Caire.

Hervé PIQUET


Le thème de cette table ronde porte sur les enjeux de la modernisation de l'économie égyptienne, tant économiques que culturels, sans oublier la nécessaire intégration de l'Egypte dans l'espace euro-méditerranéen.

Analyse du risque égyptien

François de RICOLFIS, directeur, Direction Moyen Orient, COFACE

Gérard LACAZE, secrétaire général de la BHFM, Société Générale

Thierry DURAND, directeur, HSBC-CCF

I. Introduction

Hervé PIQUET

L'Egypte, comme vous le savez, a connu une période récente délicate. En effet, après les effets néfastes de la crise du 11 septembre 2001, il lui a fallu compter avec la guerre en Irak. Aujourd'hui, le pays est donc confronté à une situation difficile caractérisée par une inflation galopante, un creusement du déficit budgétaire, la dévalorisation des rentes, etc.

II. Les points faibles de l'Egypte

Gérard LACAZE

En Egypte, nous devons faire face à un manque de devises étrangères. A moyen terme, nous nous inquiétons de la montée importante de la dette égyptienne. Un autre point faible, à mon sens, est la lenteur des réformes amorcées dans le pays. A plus long terme, la progression démographique importante, et ses conséquences en matière de paupérisation notamment, retiennent notre attention.

Thierry DURAND

Pour ma part, j'insisterai sur le poids d'une administration tatillonne, ce qui n'est d'ailleurs pas une spécificité de l'Egypte.

En outre, force est de constater qu'à ce jour, l'Egypte est avant tout dirigée par une économie de rente. Les pouvoirs publics comptent largement sur les revenus des travailleurs et les financements de l'aide internationale pour moderniser leur pays.

III. Les enjeux

François de RICOLFIS

Aujourd'hui, la France est le quatrième fournisseur de l'Egypte. La Coface, pour sa part, a garanti en 2002 30 % des exportations françaises vers ce pays. J'attire votre attention sur le fait que la Coface est au premier rang des assureurs-crédits membres de l'Union de Berne à garantir les grands contrats que Mokhtar KHATTAB a évoqués.

Mes prédécesseurs ont insisté sur les points faibles de l'Egypte. Je tiens, pour ma part, à vous dire quelques mots de ses points forts :

· les ressources en devises sont diversifiées ; elles proviennent notamment du Canal de Suez, du tourisme, des transferts privés. A terme, soulignons que le gaz pourrait prendre la relève du pétrole en déclin ;

· l'endettement extérieur demeure modéré ;

· son rôle de médiateur régional fait du pays un interlocuteur privilégié, ce qui lui assure le soutien politique et financier des pays occidentaux ;

· un programme de réformes structurelles, en vue de créer un environnement favorable au développement de l'économie, a été mis en oeuvre à partir de 1991.
Toutefois, quelques points dits faibles subsistent :
· le tourisme, dont les recettes sont fondamentales pour la balance courante du pays, est fragilisé par les incertitudes régionales ;

· le problème de pénurie de devises freine la croissance ;

· le secteur public reste prédominant dans l'économie et les réformes progressent lentement ;

· le taux d'investissement reste faible au regard du besoin de développement du pays ;

· le niveau de la dette interne constitue un élément de rigidité pour une économie à fort besoin en infrastructures.
Dans ce contexte, la croissance apparaît très vulnérable à la conjoncture. C'est pourquoi nous invitons les entreprises à rester vigilantes, la situation pouvant se décanter plus rapidement que nous le pensons. A plus long terme, la solidité de la croissance dépendra de la poursuite du programme de réformes présenté par Mokhtar Khattab.

Toutefois, force est de constater que le pays a déjà apporté la preuve de sa capacité à évoluer. J'en veux pour preuves les récentes expériences que nous avons garanties au niveau des télécoms égyptiens.
IV. Les points forts de l'économie égyptienne

Hervé PIQUET

Monsieur Durand, quels sont, à votre sens, les points forts de l'économie égyptienne ? Quelle est votre perception du risque égyptien aujourd'hui ?

Thierry DURAND

L'un des premiers atouts de l'Egypte est son emplacement stratégique au plan géographique, qui lui a toujours valu l'appui des grands bailleurs de fonds.

Deuxième atout, les fondamentaux économiques restent sains, notamment les réserves de la banque Centrale.

Par ailleurs, l'environnement égyptien est francophile, ce qui représente un atout non négligeable. L'Egypte pourrait tirer parti de sa position à propos de l'Irak, pour associer peut-être des entreprises françaises dans la reconstruction de ce pays.

Fort de ces atouts, qu'a fait HSCBC ? Notre société était présente en Egypte de longue date. Mais récemment, la participation autrefois minoritaire est passée à 95  %. Les fonds propres ont été augmentés de 30 millions de dollars l'année dernière. Notre présence locale se développe donc. Elle est tournée vers les crédits, notamment aux particuliers, à travers un réseau de 15 agences. Par ailleurs, nous avons été très soutenus par la Coface, qui nous a permis d'être associés à un crédit pour les télécoms égyptiens.

HSCBC participe aussi au projet portant sur le gaz liquéfié. Cette opération, pour un montant de dette d'environ 1 milliard de dollars, a reçu un accueil très positif sur le marché.

Gérard LACAZE

Je ne reviendrai pas plus avant sur les points forts de l'Egypte mais il est bien évident que notre présence dans ce pays n'est pas innocente : l'Egypte est un pays attractif et dynamique, notamment en termes de ressources humaines. Vous n'êtes pas sans savoir, en effet, que pour assurer notre croissance dans un pays, nous devons pouvoir nous appuyer sur un réservoir de compétences. En la matière, l'Egypte est un pays émergent à fort potentiel attractif. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle, dans le cadre de notre filiale commune avec une banque égyptienne, nous avons développé un projet de réseau bancaire à l'échelle du territoire. A terme, nous pensons compter plus de 120 000 clients.

V. Conclusion

Hervé PIQUET

L'Egypte est un pays de taille moyenne dont l'endettement extérieur est modéré.

Elle dispose, en outre, d'un amortisseur de crise important : son économie informelle, sorte de laboratoire vivant de la modernisation. En définitive, l'Egypte n'est pas l'Argentine ni la Turquie : elle ne présente aucun risque systémique en tant que tel.

Si l'Egypte réussit son intégration dans l'espace euro-méditerranéen, il ne fait aucun doute qu'elle se positionnera en pays attractif pour les investisseurs étrangers.

VI. Discussion

De la salle

Vous avez évoqué la pénurie de devises existant en Egypte. Que pouvez-vous nous en dire ?

Thierry DURAND

Il s'agit effectivement d'une difficulté conjoncturelle. Pour autant, un certain nombre de grands exportateurs ont signé récemment des contrats en livres égyptiennes et s'en sont accommodés. Quoi qu'il en soit, je suis convaincu que les réformes engagées par les autorités égyptiennes porteront leurs fruits à moyen terme.

La société égyptienne aujourd'hui :
entre tradition et modernité

Robert SOLE, Le Monde

Mireille DUTEIL, Le Point

Ahmed YOUSSEF, correspondant d'Al Ahram à Paris

I. Introduction

Hervé PIQUET

Cette table ronde constitue une innovation dans ce type de colloque en ce qu'elle porte sur les aspects culturels. En effet, la modernisation ne se limite pas au seul champ économique ; ses effets se ressentent jusqu'au coeur de la société. L'Egypte est une société complexe, bâtie sur une tradition millénaire et une identité forte dont elle est légitimement fière. Pour autant, elle souffre encore d'un certain nombre d'inégalités entre villes et campagnes et entre la Haute-Egypte, plus développée, et la Basse-Egypte, moins développée. Quels sont les signes les plus évidents, Mireille DUTEIL, de la modernité en Egypte ?

II. Les signes forts de la modernité

Mireille DUTEIL

Il y a quelques mois, je me trouvais à Siwa, aux confins de la Libye, à 700 kilomètres du Caire. Dans cette oasis où les carrioles tirées par les ânes sont un moyen de locomotion fort usité, il existe un café Internet, et les téléphones portables fonctionnent sans problème. C'est aussi cela, l'Egypte.

Quels sont les signes de la modernité ?, me demandiez-vous à l'instant. Pour ma part, j'insisterai particulièrement sur le rôle croissant des femmes à des postes clefs. Elles sont, selon moi, l'élément moteur qui fera avancer le pays. Par ailleurs, j'attire votre attention sur le fait que de plus en plus d'universités privées, étrangères et nationales, voient le jour en Egypte. Nombre d'entre elles sont axées sur la formation au management et au marketing. Cela témoigne indubitablement d'une forte modernisation. En revanche, on peut déplorer que la scolarisation des petites filles pose encore tant de problèmes. Cependant, force est de reconnaître que les autorités publiques s'efforcent de lutter contre l'illettrisme en développant, par exemple, les bibliothèques ambulantes.

Par ailleurs, je me dois d'insister sur l'incroyable diversité qui caractérise l'Egypte. Il en découle une atmosphère particulière permettant à un expatrié de ne pas se sentir isolé en terre étrangère.

Robert SOLE

Les aspects de la modernisation sont multiples ; certains sont même anecdotiques. Ainsi, il y a encore 20 ans, l'eau minérale n'était pas monnaie courante en Egypte, alors qu'aujourd'hui on en trouve dans toutes les boutiques. En ce qui me concerne, je distingue deux signes particuliers de modernisation.

· la communication
Avant toute chose, il convient de rappeler que l'électrification de l'ensemble du pays a permis un accès massif à la télévision. Par ailleurs, le téléphone portable s'est peu à peu généralisé, au point d'être aujourd'hui accessible dans les endroits les plus reculés du pays. Cette communication accrue ne se limite pas au champ des nouvelles technologies. J'en veux pour preuve l'intensification des modes de transport, comme les minibus, qui favorisent la communication entre le monde des villes et celui des campagnes, désenclavant ainsi l'espace rural.
· l'instruction
L'Egypte - devons-nous le rappeler ? - est le premier pays arabe à s'être doté d'un système scolaire généralisé sous l'égide de Mohammed Ali. Ainsi, à ce jour, la quasi-totalité des enfants égyptiens peuvent s'asseoir sur les bancs d'une école. Bien évidemment, cette scolarisation n'est pas toujours idyllique : surpeuplement des classes, qualité parfois médiocre de l'enseignement, subsistance des inégalités sont autant d'aspects négatifs que l'on peut déplorer. J'attire toutefois votre attention sur le fait que le taux d'analphabétisme des jeunes de 20 ans est tombé à 10 % pour les hommes et 20 % pour les femmes, ce qui constitue une avancée considérable depuis les vingt dernières années.

Ahmed YOUSSEF

Je ne souhaite pas aujourd'hui vous parler des coutumes les plus connues de notre pays. J'aimerais plutôt insister sur une tradition, somme toute récente, à savoir l'engouement de la jeunesse pour la cause palestinienne. Dans les années 60, ce conflit restait l'apanage des adultes. Aujourd'hui, et ce depuis la première guerre du Golfe, les jeunes Egyptiens se sont pleinement investis dans la défense de cette cause. Cette passion de la jeunesse pour la cause palestinienne - qui m'étonne moi-même, je dois le dire - a favorisé l'émergence d'un tissu associatif riche et divers.
III. La tradition égyptienne

Hervé PIQUET

Que pouvez-vous nous dire de la permanence de la tradition en Egypte ?

Mireille DUTEIL

Il me semble que, depuis toujours, l'Egypte a su phagocyter les apports extérieurs. A mon sens, cela explique en partie sa stabilité. Au titre des rémanences traditionnelles, citons la célébration du printemps, coutume pharaonique, ou encore le port des vêtements traditionnels, en particulier le voile pour les femmes.

D'aucuns s'inquiètent de l'islamisation de la société égyptienne. A mon sens, ce phénomène n'est pas nécessairement contradictoire avec la modernisation. Certes, il existe des fondamentalistes qui défendent une vision archaïque de la société, notamment du statut des femmes. Toutefois, nombre d'islamistes, bien qu'opposés à la philosophie occidentale, entendent intégrer dans leur société les avancées technologiques et sociologiques. Il convient que nous autres, Occidentaux, en tenions compte et cessions de nous crisper face à la montée de l'Islam.

Hervé PIQUET

Pensez-vous que la société égyptienne a trouvé un équilibre entre tradition et modernité ? Cet équilibre vous paraît-il durable ?

Robert SOLE

Emil Ludwig, dans son merveilleux ouvrage Le Nil , définit le peuple égyptien comme un peuple pieux, sociable et conservateur. Bien évidemment, ces caractéristiques se manifestent de diverses manières dans la société égyptienne. En témoigne l'emploi fréquent de l'expression « Inch Allah ».

Je ne reviens pas plus avant sur le port du voile, bien que celui-ci se généralise, puisque Mireille Duteil en a déjà dit quelques mots.

L'un des piliers fondamentaux de la société égyptienne s'incarne dans la famille. En Egypte, il n'y a pas d'exclus, les personnes les plus pauvres étant prises en charge par leur famille.

Il convient toutefois de signaler que cette cellule familiale est aujourd'hui encore très pesante : il s'agit d'une famille patriarcale, défendant encore bien souvent ce qu'en France nous considérons comme un crime, l'excision des jeunes filles.

Quel est l'équilibre entre tradition et modernité, me demandiez-vous ? Il est très difficile de répondre à cette question. L'Egypte, contrairement à d'autres pays arabes au nombre desquels l'Algérie, apparaît fort homogène. Cette unité est en grande partie véhiculée par la langue. La culture égyptienne apparaît également très souple. J'en veux pour preuve l' anecdota ou l'importance du malech , expression visant à minimaliser certains épisodes difficiles : sorte de flegme, voire de fatalisme, mais aussi élément de finesse des rapports sociaux.

Mireille DUTEIL

Pour ma part, je suis toujours particulièrement frappée de la capacité des Egyptiens à passer fréquemment de tradition à modernité : femmes voilées occupant des postes importants ou surfant sur Internet, hommes d'affaires respectant les fêtes religieuses les plus anciennes, etc. Et force est de constater que ces deux pans de la société se respectent pleinement.

Ahmed YOUSSEF

Robert Solé a rappelé l'importance du Nil dans notre société. Pour ma part, je ne suis pas de ceux qui pensent que le Nil est un cadeau de Dieu à l'Egypte. L'Egypte est avant tout un cadeau des Egyptiens. Par ailleurs, je souhaite attirer votre attention sur l'incroyable capacité des Egyptiens à marier une chose et son contraire ; j'en veux pour preuve ces jeunes filles voilées mais maquillées qui n'ont aucune honte, aucune crainte à prendre la main de leur fiancé en déambulant dans les rues d'Alexandrie, ou ces hommes aux costumes très modernes qui « portent leur barbe dans la tête », c'est-à-dire qui font preuve, dans leur raisonnement, d'un archaïsme incroyable. Quoi qu'il en soit, cette confrontation perpétuelle entre tradition et modernité illustre le dynamisme de notre pays.

L'Egypte dans l'espace économique euro-méditerranéen

Aristide SUN, chargé des Affaires méditerranéennes, Minefi DREE

Henry MARTY-GAUQUIE, Director of Communications, European Investment Bank

I. Le rôle de la BEI en Egypte

Henry MARTY-GAUQUIE

Comme vous le savez, l'Europe a, le 10 octobre 2002, conclu un nouvel accord avec l'Egypte. D'une certaine manière, la ratification de ce texte confirme le fait que l'accord de Barcelone n'a pas porté tous les fruits escomptés.

Depuis 2000, le BEI a investi quelque 12,6 milliards d'euros dans l'espace euro-méditerranéen. A ce titre, il s'inquiète particulièrement de la lenteur des réformes initiées dans la zone et de la faiblesse de l'intégration entre les pays méditerranéens.

Les problèmes sociétaux, la concentration de tensions sociétales, la permanence d'un chômage élevé sont autant de points négatifs qui retiennent notre attention. Face à ce constat, l'on peut craindre que l'union douanière que nous appelons de nos voeux ne se fasse pas à horizon 2010.

C'est pourquoi nous tenons à multiplier les contacts entre les partenaires de la zone. Ainsi, en avril 2003, les 27 ministres des finances d'Europe et des pays de la zone euro-méditerranéenne se sont réunis dans le cadre d'un colloque. Ils se sont fixé pour objectifs de transformer les structures sociétales favorisant le développement social et économique. Ainsi, nous avons dernièrement entamé un projet de rénovation de 18 hôpitaux en Syrie. Il nous semble aussi important d'inciter à l'intensification de la coopération Sud/Sud et d'accroître le sens de la réappropriation, par les pays de la zone euro-méditerranéenne, de l'aide qui leur est versée par l'Union européenne.

Pour réaliser ces objectifs, nous comptons, à horizon 2010, augmenter l'aide allouée à cette zone de 1,5 à 2 milliards d'euros - dont nous espérons consacrer 40 % au secteur privé -, favoriser l'émergence de nouveaux intermédiaires bancaires et dispenser des aides non remboursables à l'origination de projets. Par ailleurs, nous avons mis sur pied une instance de dialogue réunissant régulièrement les ministres des finances et les ministres du développement des différents pays concernés.

Pour conclure, je souhaite vous dire quelques mots de nos priorités en Egypte.

· Le secteur privé
Nous avons approuvé pour 2 milliards d'euros de projets, dont plus de 30 % relèvent du secteur privé. A titre d'exemple, citons le nouveau terminal de liquéfaction de gaz de la région d'Alexandrie.
· La coopération Sud-Sud
Au titre de la coopération Sud-Sud, je tiens à citer en exemple la création d'une cimenterie privée en Algérie. Elle est portée par un grand groupe égyptien, Eurascom.
· Le secteur bancaire
En matière de capital-risque, sachez que nous avons validé la constitution d'un fonds de capital-risque de 30 millions d'euros, qui devrait à terme générer quelque 300 millions d'euros.
II. Le processus de Barcelone

Aristide SUN

L'Egypte se trouve aux confluents des mondes arabe, africain et méditerranéen ; c'est donc une pièce majeure du puzzle que constitue le partenariat euro-méditerranéen.

Le processus de Barcelone a été lancé en 1995, sachant toutefois que le premier accord de coopération entre l'Egypte et l'Union européenne a été signé en 1977. Entre ces deux dates, l'Union européenne a alloué quelque 1,5 milliard d'euros à l'Egypte.

Ce processus comporte un volet politique, un volet économique et financier, ainsi qu'un volet social, culturel et humain. Dans le cadre du partenariat, l'Union européenne apporte à la zone euro-méditerranéenne, une aide financière sous forme de dons (MEDA) et de prêts. Il convient de souligner que MEDA constitue le principal outil financier de ce partenariat euro-méditerranéen, l'Egypte ayant, pour sa part, bénéficié de quelque 680 millions d'euros. Les dons MEDA concernent divers secteurs : environnement, ajustement structurel, etc. En Egypte, les dons MEDA ont contribué à financer :

· le programme d'appui à l'éducation de base, pour 100 millions d'euros ;

· le programme de réforme de la santé, pour 110 millions d'euros ;

· le programme de modernisation industrielle, pour 250 millions d'euros.
Au final, le pari du partenariat euro-méditerranéen est d'enclencher une dynamique vertueuse comparable à celle observée dans les PECO les plus avancés. Pour autant, des risques se font jour. En effet, la création d'une zone de libre-échange n'engendrera un surplus de croissance que si elle s'accompagne d'une aide publique au développement et que si l'on renforce l'attractivité du pays, afin d'inciter les investissements directs étrangers.

Présentation des activités du Bureau d'information
sur les Techniques Françaises (BITF)

Hassan BEHNAM, Directeur, Bureau de presse d'UBIFRANCE - Moyen-Orient

Monsieur le ministre, messieurs les sénateurs et ambassadeurs, mesdames et messieurs, je suis très honoré de vous présenter les activités du BITF. Celui-ci est composé de 11 réseaux de presse. Il a pour objectif principal la promotion des nouvelles technologiques en Egypte et au Liban notamment. Nos prestations sont nombreuses et comprennent notamment la traduction et la diffusion des articles de presse des différents pays membres. Par ailleurs, nous organisons chaque année un voyage en France afin de partager, avec des entreprises de presse locale, nos expériences.

En Egypte, nous comptons quelque 40 publications écrites avec un tirage global de 10 millions d'exemplaires pour une population estimée à 70 millions d'individus. Je tiens ici à dire que nous entretenons avec les représentants de la presse égyptienne des rapports cordiaux basés sur la confiance partagée.

Il convient par ailleurs de signaler que le réflexe Internet - si je puis me permettre cette réflexion - tend à se généraliser. J'en veux pour preuve le fait que le chiffre d'affaires réalisé sur la Toile atteint, en Egypte, quelque 60 millions d'euros. Depuis peu, le BITF propose aux Internautes une page d'accueil leur permettant d'accéder à plus de quarante publications.

Aujourd'hui, force est de constater que le BITF joue le rôle d'une véritable agence de presse. Au travers de ces actions multiples auprès des mass médias , il entend promouvoir la modernisation de la communication en Egypte.

Je souhaite conclure mon propos en remerciant Hervé PIQUET pour son appui et son dynamisme, qui nous permettent, à notre niveau, de promouvoir l'image de la France en Egypte.

Le nouvel élan des relations économiques franco-égyptiennes

Cette table ronde est animée par Claude LOREAU, Président de la Commission « Proche et Moyen-Orient », Comité National du Commerce Extérieur de la France (CNCCEF)

Claude LOREAU

En vous écoutant ce matin, je suis arrivé à la déduction qu'il était difficile pour les personnes étrangères de progresser dans ce pays, sans comprendre la culture égyptienne. Dans ce contexte, je suis convaincu que le partenariat public-privé a un rôle essentiel à jouer. La France, en la matière, dispose d'une expérience incontestable. Je veux croire notamment que ce type de partenariat, en matière de formation, est un moyen efficace de retenir les jeunes cadres égyptiens.

Les échanges économiques et commerciaux franco-égyptiens et présentation des secteurs porteurs

Hervé PIQUET, Chef de la Mission Economique du Caire

Hervé PIQUET

Avant toute chose, il convient de rappeler que les relations anciennes entre la France et l'Egypte sont aussi anciennes que conséquentes. Ce sont également des relations confiantes qui à ce jour sont - il faut le constater - orientées à notre avantage.

Attardons-nous un instant sur la notion de confiance. Dans les relations d'Etat à Etat entre nos deux pays, il n'existe aucun contentieux juridique, ni au plan fiscal, ni au plan commercial. Cet échange est déséquilibré - je l'indiquais à l'instant - en ce que la balance commerciale s'établit en notre faveur. Pour ma part, j'estime que pareil déséquilibre est malsain. C'est pourquoi nous attendons beaucoup du contrat qu'Alcaltel a récemment passé en Egypte.

L'analyse sectorielle pour 2002 confirme que les exportations égyptiennes vers la France ont augmenté significativement. Toutefois, l'excédent commercial de la France reste élevé, à 759 millions d'euros. C'est dire si l'Egypte « rapporte gros » à la France, si vous me permettez cet écart de langage.

Malgré tout, il convient d'examiner avec précaution la performance française en Egypte. En effet, les céréales constituent de loin le premier poste de nos exportations dans ce pays. C'est ce que j'ai coutume d'appeler la facture alimentaire de l'Egypte.

Cette performance, d'autant plus remarquable que depuis peu les Français ont damé le pion aux Américains sur ce marché céréalier, est donc à nuancer. J'attire toutefois votre attention sur le bon maintien des exportations égyptiennes de pétrole vers notre territoire.

Pour autant, nous avons des raisons de faire preuve d'optimisme car les échanges franco-égyptiens sont sous-tendus par un flux d'investissements soutenus, la France se plaçant au second rang des investisseurs européens en Egypte. De plus, il convient de souligner que les exportations françaises sont très importantes dans tous les secteurs économiques d'avenir. Pour ma part, j'en distingue huit principaux :

· les infrastructures : compte tenu de son potentiel de développement, l'Egypte sera toujours un pays fort consommateur d'infrastructures ;


· la chaîne pétro-gazière : il s'agit incontestablement de la locomotive du développement de l'Egypte ;


· les équipements électriques : nous entendrons tout à l'heure des représentants d'EDF et de Gaz de France sur ce sujet ;


· biens d'équipements liés au secteur touristique : aujourd'hui, l'Egypte accueille chaque année 5 millions de touristes, contre 70 millions pour la France et 12 millions pour Notre-Dame ! C'est dire le potentiel touristique du pays : il conviendra toutefois de passer d'un tourisme de rente à l'industrie touristique. Et en la matière, la France dispose d'une expérience incontestable ;


· le secteur agroalimentaire : il convient notamment de mettre l'accent sur la chaîne du froid. Je suis convaincu que certains produits égyptiens, dès lors que le packaging et le marketing feront l'objet d'une amélioration, trouveront aisément des débouchés sur le marché égyptien ;


· le secteur médical : le secteur privé de la santé est appelé à connaître un boom extraordinaire. J'invite donc les professionnels hospitaliers français à rester attentifs aux projets pouvant se faire jour, en particulier en matière de tourisme sanitaire ;


· les technologies de la communication :
on l'a dit, l'Egypte s'est mise très aisément à l'ère du mobile.
Vous l'aurez compris, nous ne saurions nous satisfaire aujourd'hui de la part de marché que nous détenons en Egypte, celle-ci n'excédant pas à ce jour 4 %. Certes, il n'est nullement question d'espérer concurrencer les Etats-Unis avec leurs 18 % de part de marché, mais je suis convaincu que nous pouvons aisément devenir le premier partenaire européen de l'Egypte, d'autant que nous bénéficions d'une « cote d'amour » dans ce pays. Il importe toutefois que les industries françaises, tout en capitalisant sur cette cote, s'adaptent aux réalités du marché égyptien, lequel apparaît fort difficile.

En outre, je ne saurais trop vous conseiller d'intensifier les communications publicitaires en particulier auprès de la jeunesse égyptienne, dont nous avons salué le dynamisme et la modernité, lors des débats de la matinée. En tout état de cause, investir l'économie égyptienne ne saurait se faire sans privilégier un mode partenarial. Il serait notamment souhaitable d'intensifier le commerce triangulaire entre Europe, Egypte et Afrique. Une chose m'apparaît certaine : l'Egypte a besoin de la France pour réussir son intégration dans la zone euro-méditerranéenne. En définitive, dans le contexte de déflation internationale que nous connaissons, j'appelle les entreprises françaises à faire preuve de calme et de confiance.

Partenariat public-privé
et grands projets d'infrastructures en Egypte

Jean-Dominique MALLET, Directeur des Affaires Internationales, CGEA Onyx

Patrick-Yann DARTOUT, Directeur du développement international, Sogreah

I. Le projet de Tochka

Patrick-Yann DARTOUT

En 1996, nous avons pris connaissance du pharaonique projet de Tochka, initié en 1990. Il s'agit d'alimenter une ancienne vallée du Nil afin d'en assurer a minima l'autosuffisance alimentaire et au mieux, de procéder à des exportations. A mon sens, ce projet revêt un grand intérêt. J'invite donc les industriels français, en particulier du domaine agroalimentaire, à s'intéresser de plus près à ce magnifique projet.

Pour notre part, nous intervenons, en qualité de conseil, sur des financements égyptiens - il importe de le préciser. Je me dois également de souligner l'importance qu'occupe la formation dans notre projet. Je regrette toutefois que les grands bailleurs internationaux répugnent à s'investir dans ce projet d'envergure essentiellement financé par de gros investisseurs privés.

II. Le projet Onyx : l'industrie du nettoyage et la propreté

Jean-Dominique MALLET

Le projet de filière globale auquel nous contribuons a été lancé fin 2000. L'initiation de ce projet correspond à une véritable volonté politique du gouvernement égyptien, dans le cadre de sa politique de développement durable. Pour information, je rappelle qu'Onyx est une filiale de Vivendi Environnement. Sachant que l'appel d'offres a été monté en 1999 et le contrat signé en septembre 2000, je dois dire que, de mémoire, c'est la concrétisation de projet la plus rapide que j'aie jamais connue. Si nous avons rencontré quelques difficultés lors du lancement du projet, nous pouvons nous féliciter de ce que nous enregistrions aujourd'hui des résultats pour le moins satisfaisants.

A ce jour, nous avons investi près de 40 millions d'euros. Pour l'heure, nous disposons d'un contrat de quinze ans ; c'est dire si nous souhaitons nous inscrire dans une perspective de longue durée.

Le partenariat stratégique franco-égyptien
dans le secteur de l'énergie

Pierre VERGERIO, Directeur Général des filiales en Egypte, EDF

Philippe CASSAGNE, Directeur de la région Méditerranée Orientale et Moyen-Orient, Gaz de France

I. Electricité de France

Pierre VERGERIO

En lançant sa seconde centrale en Egypte, EDF se positionne en tant que premier fournisseur indépendant d'électricité en Egypte. Avec un coût du kilowattheure de 2,70 centimes d'euro, nous avons en effet proposé le coût de production le plus bas du marché. Pour monter notre projet, qui a mobilisé 500 millions de dollars, nous avons travaillé en partenariat avec 17 banques d'affaires et un investisseur institutionnel.

Bien sûr, le parcours qui a été le nôtre, avant de voir notre action couronnée de succès, n'a pas été des plus évidents. Nous avons notamment rencontré quelques difficultés avec notre client, la firme égyptienne d'électricité (Egyptian Electricity Holding Company). Par ailleurs, il nous a fallu découvrir progressivement le contexte réglementaire égyptien et nous y adapter au fur et à mesure.

Alors que nous approchons de la date de mise en service de la deuxième centrale, je souhaite faire le constat suivant : en dépit des difficultés, notre planning prévisionnel a été respecté. Ce succès n'aurait pu être sans le soutien constant de Egyptian Electricity Holding Company. Une seule ombre au tableau est à déplorer : la politique douanière.

II. Gaz de France

Philippe CASSAGNE

La filière du gaz est, aujourd'hui, en pleine expansion en Egypte. Cette volonté politique a permis à l'Egypte d'accroître considérablement ses réserves, au point que le pays peut désormais exporter du gaz naturel liquéfié (GNL) vers l'Europe et la Jordanie. L'Egypte se positionne donc peu à peu comme un acteur de poids. Ces récents développements ne pouvaient laisser Gaz de France indifférent. L'Egypte, fort attractive s'agissant de l'exploration production, a donc retenu notre attention.

En 2001, un « accord d'alliance stratégique » a été signé entre les deux sociétés pétrogazières nationales EGPC et EGAS, et Gaz de France. Cet accord a pour objectif principal la production conjointe de gaz en vue de son exportation sous forme de GNL.

En 2002, concrétisant cette alliance, Gaz de France a signé avec BG, Edison, EGPC et EGAS, des accords définitifs comportant trois volets :

· l'achat par Gaz de France, à partir de 2005, de toute la production du premier train d'une usine de liquéfaction construite à Idku ;

· la participation de Gaz de France, à hauteur de 5 %, dans les sociétés propriétaires de l'usine de liquéfaction ;

· un droit à liquéfier, dans les extensions futures de cette usine, le gaz produit par Gaz de France.
Le financement de ce projet d'usine de liquéfaction est en cours de bouclage et je dois dire qu'il a suscité l'intérêt de la communauté bancaire, laquelle nous accorde un ratio dettes / fonds propres de 85/15.

J'ajoute que les accords que nous avons conclus permettront à Gaz de France de mener des recherches en matière d'exploration-production en Egypte. Pour l'heure, cette ambition n'en est qu'au stade embryonnaire. C'est pourquoi Gaz de France compte particulièrement sur le soutien du Gouvernement égyptien pour asseoir sa position.

Le partenariat stratégique franco-égyptien
dans le secteur des TIC

Patrick BOURRIER, Directeur des Affaires Internationales et des relations avec les régulateurs, ALCATEL

Osman SULTAN, Président Directeur Général de Mobinil (Orange), Directeur Pays France Télécom en Egypte

I. L'exemple d'Alcatel

Patrick BOURRIER

Depuis 25 ans, Alcaltel a développé ses activités en Egypte, en se basant sur :

· la situation géopolitique de l'Egypte et ses plans de développement ;

· son rôle régional ;

· la politique d'ouverture du gouvernement égyptien et la politique de dérégulation du marché des télécoms ;

· la main d'oeuvre qui, même qualifiée, reste disponible à un coût raisonnable.
En 1998, nous avons créé, au Caire, une société regroupant toutes les activités d'Alcatel en Egypte afin de mieux servir notre clientèle. L'année suivante, le Caire est d'ailleurs devenu le siège de la Direction Moyen-Orient du Groupe. Depuis cette base égyptienne, nous exportons essentiellement du software .

Nous sommes présents historiquement dans les réseaux de voix. Nous avons renforcé cette présence en passant deux accords-cadres fondamentaux :
· le Nile Vision (1997-2002), qui avait trait à la fourniture et à l'installation de plus d'un million de lignes clé en main ;

· le Nile Vision Plus (2002-2007), qui prévoit l'extension et la mise à niveau du réseau voix afin de permettre la connexion de 1,5 million de lignes supplémentaires dans la région du Delta et d'Alexandrie.
Citons aussi la création de MobiNil, issu de l'ouverture à la concurrence du réseau GSM et à la privatisation du réseau mobile de TE en 1998. Deux licences ont été attribuées à deux consortiums, le premier dirigé par Vodafone et l'autre par France Télécom et Orascom Telecom, MobiNil, qui a repris le réseau de TE.

En dépit d'une grande concurrence lors de la privatisation du réseau et du lancement d'un nouvel appel d'offres international en 2000, Alcatel a pu conserver et renforcer sa position de partenaire industriel stratégique de MobiNil. En capitalisant sur son expérience domestique, Alcatel a développé une relation privilégiée avec l'opérateur mobile régional Orascom Telecom.

Dans le domaine de la connectivité internationale, Alcatel a installé les parties sous-marines et terrestres pour les Câbles Fo sous-marins entre l'Asie du Sud-Est et l'Europe occidentale à travers le Moyen-Orient et l'Egypte. Alcatel a aussi fourni les charges utiles pour les Nile Sat 101 et 102, les premiers satellites de diffusion télévisée possédés et opérés par un pays arabe. Tous les satellites Arabsat ont été fournis clés en main par Alcatel.

Je conclurai en soulignant qu'Alcatel en Egypte, ce sont 800 personnes sur place et à l'international, mais aussi une filiale au capital de 5 millions d'euros, dont les activités sont certifiées ISO 9001. En 2004, Alcatel Egypt s'installera dans les nouveaux locaux du Smart Village, un pôle technologique conçu et développé par le MOCIT (Ministère des Communications et des Technologies de l'Information).
II. France Télécom

Osman SULTAN

Avant toute chose, nous devons admettre que la qualité des télécommunications et des infrastructures qui s'y rapportent n'est pas sans impact sur d'autres secteurs économiques, à commencer par l'industrie touristique.

L'aventure MobiNil a commencé voilà cinq ans et nous comptabilisons aujourd'hui 2,5 millions de clients. Certes, cela peut paraître faible de prime abord, mais ramenons ce chiffre à la réalité économique du pays. L'investissement initial s'établissait à 650 millions de dollars, ce qui, à l'époque, constituait une somme faramineuse. Depuis cette date, plus d'un demi milliard de dollars supplémentaires ont été injectés dans le projet. Aujourd'hui, MobiNil est composée de 1 800 personnes, issues des filières de pointe (marketing, service client, technologie) des universités égyptiennes. De plus, nous estimons à plus de 25 000 les emplois induits tout au long de la chaîne de valeur de notre secteur.

MobiNil est donc une entreprise égyptienne qui a su se positionner comme un acteur stratégique majeur dans le pays. Ce succès n'aurait toutefois pas été au rendez-vous si un certain nombre de conditions préalables n'avaient pas été réunies :

· la volonté politique de libéraliser le secteur des télécommunications : Monsieur le Ministre en a dit quelques mots ce matin ;


· un environnement économique à même de capitaliser la dynamique amorcée : chacun sait qu'un environnement économique sain est une condition sine qua non de la croissance. La situation de saine concurrence qui découle de ces deux facteurs débouche sur une équation que je qualifierai de win, win, win . En effet, cette équation est profitable tant pour les clients que pour le secteur privé et les entreprises qui le composent ;


· une libéralisation de la réglementation : là encore, cette thématique a été abordée au cours des débats de la matinée, je n'y reviendrai donc pas plus avant.
Quels ont été, dans le cadre de ce projet, les défis auxquels nous avons été confrontés ? Nous avons tout d'abord eu à relever le défi de la qualité. Par ailleurs, MobiNil ayant été rapidement cotée en bourse, nous avons dû faire face à un défi économique de taille. Enfin, il nous appartenait de relever un défi social, en ce que nous devions former nos cadres. En d'autres termes, MobiNil devait défendre son image d'entreprise citoyenne.

Pour conclure, je souhaite réitérer notre ambition de contribuer au mieux à tous les phénomènes d'évolution que connaît actuellement l'Egypte.

De la salle

A quand la troisième licence GSM en Egypte ?

Mokhtar KHATTAB, Ministre Egyptien du Secteur public des Affaires

Nous étudions actuellement la question mais n'avons, à ce jour, arrêté aucune décision.

Le cadre général des affaires en Egypte

Présentation du CAFE et de ses activités

Mahmoud EL KAISSY et Michel VIALLANEIX, Coprésidents du CAFE

Michel VIALLANEIX

Le CAFE a été créé en novembre 1992 par Ismaïl Sabry, Amin Fakhri Abdel Nour, Ashraf Oma et Franck Thiébaut qui ont souhaité promouvoir les échanges entre la France et l'Egypte. En cela, ils répondaient également aux attentes des pouvoirs publics des deux pays.

Très rapidement, nous avons développé des relations avec les Chambres de Commerce et d'Industrie et d'autres associations d'hommes d'affaires. Le CAFE entend promouvoir et développer les échanges franco-égyptiens en apportant une aide pratique aux entreprises, en les accompagnant dans leurs recherches de débouchés et en animant la communauté d'affaires franco-égyptienne.

Mahmoud EL KAISSY

Notre organisation est dirigée par un Conseil d'Administration composé de 13 personnes tant françaises qu'égyptiennes. Elle comporte par ailleurs un bureau permanent, basé au Caire, et un relais à Alexandrie.

Michel VIALLANEIX

Notre principe de base est celui de l'autonomie financière. Notre budget annuel s'établit à 1,5 million de livres égyptiennes, provenant essentiellement des cotisations de nos membres, des opérations de marketing, des services délivrés aux entreprises, etc.

Nos membres sont majoritairement des hommes d'affaires égyptiens, issus principalement de petites entreprises, employant moins de 100 personnes. Je précise toutefois que nous regroupons des personnes évoluant dans des secteurs aussi divers allant de la finance et du commerce aux transports et à la construction.

Mahmoud EL KAISSY

Nous délivrons différents types de services aux entreprises :

· informations économiques et sectorielles ;

· identification de partenaires potentiels ;

· conseils sur l'approche des marchés ;

· missions de prospection ;

· assistance de participation à des salons ;

· support marketing, etc.
Nous publions régulièrement deux revues, L'annuaire des membres et L'Antenne.

Pour répondre aux attentes de nos membres, nous avons mis en place de nombreuses commissions spécialisées dans un domaine particulier : agroalimentaire, commerce, finances, grands projets, etc. Ainsi que nous l'avons déjà signalé, nous nous efforçons d'animer la communauté d'affaires franco-égyptiennes en organisant des déjeuners débats, des séminaires ou encore des conférences.

A l'appui de son propos, Mahmoud EL KAISSY présente à l'assemblée une série de photographies illustrant quelques moments forts de l'activité du CAFE.

Michel VIALLANEIX

Dans le cadre de nos travaux, nous nous appuyons sur un réseau de partenaires :
· les pouvoirs publics français et égyptiens ;

· les services de l'Ambassade de France ;

· la délégation de l'Union européenne ;

· les associations d'hommes et de femmes d'affaires ;

· le MEDEF international ;

· le CCI ;

· l'Université française d'Egypte ;

· les filières francophones des universités du Caire et de Ain Shams ;

· les CCEF, section Egypte.
Au titre de nos ambitions, il convient de mentionner :
· l'élargissement de notre terrain d'action car plus nous serons nombreux, plus nous serons puissants ;

· le développement de nos services aux membres ;

· le renforcement de notre position d'interlocuteur privilégié dans le cadre des relations économiques franco-égyptiennes ;

· le renforcement de notre rôle auprès des entreprises dans le processus d'intégration de l'Egypte dans l'espace euro-méditerranéen - c'est un point auquel nous sommes particulièrement attachés.
Exporter et investir aujourd'hui en Egypte :
Témoignages d'entreprises

Cette table ronde était animée par Pierre DELCROIX, Président de la Section Egypte des CCEF.

Ont participé :

Ali MOUSSA, Président, UPC (United Paints and Chemicals)

Farouk NASSER, Président, IDC (International Development Consultants)

Claude DELANNOY, Directeur Général, Groupe Pyramide Egypte

Pierre DELCROIX, Directeur Général, Rhodia Egypte

Patrick-Yann DARTOUT, Directeur du Développement international, Sogreah

Jean-Pierre COUREL, Directeur du Département Transports, Spie Rail France

Guy DUFRAISSE, Directeur zone Afrique, Schneider Electric

I. Introduction

Pierre DELCROIX

Nous sommes tous, à cette tribune, des hommes de terrain vivant en Egypte. A ce titre, nous nous efforcerons de vous faire part d'exemples aussi concrets que possible. Avant de céder la parole à nos invités, je voudrais réagir brièvement sur les propos tenus ce matin. Une des conséquences bénéfiques de la chute de livre égyptienne est l'attractivité qu'elle induit pour les investisseurs. J'en veux pour preuve l'arrivée récente sur le marché égyptien d'acteurs de poids comme Danone.

II. L'exemple d'UPC

Ali MOUSSA

SCIB est une société, à l'origine familiale, fondée en 1970. En 1979, face aux évolutions du marché, j'ai pris la décision de la transformer en société par actions dont 20 % sont entre les mains du management. Plus tard, en 1997, nous avons mis en place une joint-venture entre SCIB et Orascom, créant ainsi UCP. Nous souhaitions, à l'époque, créer un conglomérat d'industries de peinture décorative par acquisition ou exploitation conjointe. Néanmoins, après étude du marché et ayant constaté d'une part que le marché comportait trop d'acteurs mal organisés, d'autre part que les grandes sociétés internationales n'étaient pas intéressées, nous avons renoncé - provisoirement - à ce projet.

Nous avons donc changé de stratégie et nous sommes efforcés de constituer un conglomérat de matériel de construction. Nous nous sommes ainsi adjoint les services d'OCI, l'une des premières entreprises de construction en Egypte. Pour faire face aux difficultés auxquelles nous avons été confrontés, notamment en termes d'expertise, nous avons pris la décision de nous associer à de grands groupes internationaux (DryMix, DEN Braven, etc) formant ainsi SCIB Chemical SAE. Nous sommes ainsi parvenus à la constitution d'un partenariat à 50 % / 50 % entre UCP et BPB Placoplâtre. Je suis heureux de constater que ce partenariat s'est soldé par un véritable succès.

En effet, la croissance des ventes s'est établie à plus de 32 %, la rentabilité de notre société a crû de 50 %, les salaires des employés ont augmenté de 10 %. Enfin, j'insiste sur le fait que, grâce à ce partenariat, nous avons considérablement renforcé la sécurité dans l'entreprise.

III. La place des PME

Claude DELANNOY

Je suis convaincu qu'il existe en Egypte une place à prendre pour les PME. Toutefois, le challenge reste considérable. Avec l'aide de Schneider et de Carier, avec lesquelles nous avons signé un contrat de cinq ans, nous avons fait ce choix. Pour autant, la situation n'est pas des plus évidentes ; j'en veux pour preuve le chiffre d'affaires que nous avons enregistré en 2002 : celui-ci n'excédait pas 18 millions d'euros.

Schneider et Carier ayant décidé d'externaliser leur production de tôlerie, nous avons effectué les premières démarches auprès de Total notamment. Dans le cadre de notre projet, nous avons recherché l'appui des banques et je suis au regret de constater que les établissements financiers sont encore réticents à aider les PME.

IV. Les exportations égyptiennes

Pierre DELCROIX

Nous avons souvent évoqué les exportations égyptiennes vers l'Afrique, l'Europe et le monde arabe. En la matière, l'expérience de Schneider Electric est considérable.

Guy DUFRAISSE

Notre Groupe est présent en Egypte depuis 1980. Dès le début, nous nous sommes efforcés de nous adapter aux lois du marché égyptien. Nous avons investi dans une première usine de fabrication de produits électriques. Grâce à la compétence et à la qualification de nos cadres égyptiens, nous occupons désormais une place de leader sur le marché.

Nous n'envisagions pas, dans un premier temps, d'utiliser l'Egypte comme base d'exportation vers d'autres pays. Cependant, compte tenu des normes de qualité exigées par ce marché, nous avons peu à peu investi sur un équipement de pointe. Nous avons également mis en place un bureau d'études sur les conseils duquel nous avons lancé nos premières exportations vers des pays de la zone euro-méditerranéenne. Au vu des premiers résultats enregistrés, nous avons décidé de poursuivre dans cette voie. Je tiens toutefois à apporter une précision : nous n'avons pas fait le choix de l'Egypte comme base d'exportation en raison du moindre coût de la main d'oeuvre égyptienne mais bien en raison de sa qualité et de sa compétence.

V. Les relations avec les partenaires locaux

Jean-Pierre COUREL

Spie est une société d'ingénierie et de services qui couvre tout le cycle de vie des infrastructures de nos clients dans de nombreux domaines, Spie Rail étant - ainsi que son nom l'indique - orientée vers l'industrie ferroviaire.

En ce qui nous concerne, nous ne pouvons que nous féliciter de la bonne harmonie qui préside à nos relations avec l'administration égyptienne. Je souhaite également dire quelques mots de notre adaptation grandissante aux modes de travail égyptiens. Il s'agit, à mon sens, d'une avancée considérable que nous n'observons que depuis quelques années. Pendant longtemps, les entreprises françaises se sont contentées d'importer le matériel en provenance d'Europe, en raison de leur suspicion à l'égard de la qualité des produits fabriqués sur place. Là encore, nous assistons à une révolution, y compris dans le secteur du transport dont on sait pourtant le caractère fort conservateur. Ainsi, en ce qui nous concerne, nous avons approvisionné une part non négligeable du marché égyptien.

Par ailleurs, je note que, de plus en plus fréquemment, nous collaborons avec des entreprises égyptiennes auxquelles nous avions coutume, par le passé, de sous-traiter certains aspects de notre activité.

Enfin, sachez que Spie exporte du matériel produit en Egypte vers des pays de la zone moyen-orientale. Ainsi, l'an passé, nos exportations vers l'Algérie ont représenté quelque 5 millions d'euros. Le choix de l'Egypte comme base d'exportation n'est pas dû au hasard. En effet, contrairement à ce que nous avons pu vivre dans d'autres pays, nos partenaires égyptiens ont toujours tenu parole. Bien évidemment, la compétence de la main d'oeuvre et la qualité des relations humaines ne sont pas non plus étrangères à ce choix.

VI. Conclusion

Hervé PIQUET

J
e remercie tous les participants pour leur présence. Une fois encore, je souhaite vous réaffirmer ma croyance profonde dans le bien-fondé de pareils colloques, en ce qu'ils consacrent la modernité comme nécessité inéluctable. En effet, seules des sociétés optant pour le chemin de la modernité, s'éloignant ainsi du spectre du repli sur soi, pourront s'intégrer au mieux à la scène internationale. Pour autant, ce colloque n'est pas une finalité en soi : il importe que les régions prennent le relais car le développement de l'Egypte est un développement global.

Synthèse réalisée en temps réel par Ubiqus Reporting
01 44 14 15 00, www.ubiqus-reporting.com

Le Groupe interparlementaire France-Egypte

Depuis sa création, le groupe interparlementaire France-Égypte (aujourd'hui composé de 45 membres) n'a pas cessé de marquer sa volonté de tisser des liens, toujours plus étroits, avec un pays qui a toujours su et voulu entretenir des relations d'amitié avec notre pays.

C'est ainsi qu'au cours des quinze derniers mois, un certain nombre de rencontres ont été organisées venant ainsi confirmer cette volonté mutuelle. En effet :


- le 13 février 2002 , un petit-déjeuner débat était organisé en l'honneur de M. Aly Maher El Sayed, Ambassadeur de la République Arabe d'Égypte en France ;

- le 11 décembre 2002 , un petit-déjeuner débat, destiné à accueillir le nouvel Ambassadeur d'Égypte en France, M. Hatem Seif El Nasr nommé en septembre 2002, avait également permis de faire le point sur la situation économique et politique égyptienne ainsi que sur les perspectives de paix au Moyen-Orient ;

- le 23 janvier 2003 , le groupe d'amitié a convié une délégation du Conseil égyptien des Affaires étrangères en visite à Paris et M. l'Ambassadeur d'Égypte en France à un petit déjeuner où il a été discuté avec beaucoup d'intérêt de la situation de ce pays dans le contexte international très tendu que nous commencions à connaître ;

- le 7 mars 2003 , ayant appris la présence au Sénat du Président de l'Assemblée du peuple égyptien, M. Ahmed Fathy Sorour, pour le congrès de l'Institut international de droit d'expression et d'inspiration françaises (IDEF) dont il est également le Président, il avait paru opportun de le rencontrer au cours d'un déjeuner en présence de M. l'Ambassadeur d'Égypte en France.

Son bureau est ainsi constitué :


Président :

M. Nicolas ABOUT, Sénateur des Yvelines.
Groupe U.M.P.

Vice-présidents :

Mme Danielle BIDARD-REYDET, Sénateur de Seine-Saint-Denis,
Groupe Communiste Républicain et Citoyen

 

Mme Paulette BRISEPIERRE, Sénateur représentant les Français établis hors de France,
Groupe U.M.P.

 

M. BERNARD JOLY, Sénateur de Haute-Saône,
Groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen

 

Mme Danièle POURTAUD, Sénateur de Paris,
Groupe Socialiste

 

M. François Trucy , Sénateur du Var,
Groupe U.M.P.

 

M. Xavier de Villepin, Sénateur représentant les Français établis hors de France.
Groupe U.M.P.

Secrétaires :

M. Robert BRET , Sénateur des Bouches-du-Rhône,
Groupe Communiste Républicain et Citoyen

 

M. André FERRAND, Sénateur représentant les Français établis hors de France,
Groupe U.M.P.

 

M. Daniel GOULET, Sénateur de l'Orne,
Groupe U.M.P.

 

M. Patrick LASSOURD, Sénateur de l'Ille et Vilaine,
Groupe U.M.P.

 

M. Georges MOULY, Sénateur de la Corrèze,
Groupe U.M.P.

 

M. Jean-Marie POIRIER, Sénateur du Val-de-Marne,
Groupe U.M.P.

 

M. André ROUVIÈRE, Sénateur du Gard.
Groupe Socialiste.

Secrétaire exécutif :

M. Sébastien MOSNERON-DUPIN

Tél. : 01 42 34 20 26

Fax : 01 42 34 31 25

Courrier électronique : s.mosneron-dupin@senat.fr

Colloque organisé sous l'égide du groupe interparlementaire France-Egypte,
par la Direction des Relations internationales du Sénat
et la Direction « Evénements et Prospective Marchés » du CFCE
Pour toute information sur les colloques Sénat-CFCE, vous pouvez contacter
le Service des Relations internationales du Sénat :
M. Michel LAFLANDRE, Conseiller
Tél : 01.42.34.20.47 - Fax : 01.42.34.27.99 -
Courrier électronique : m.laflandre@senat.fr
ou consulter le site internet du Sénat : www.senat.fr/international


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