Colloque Moyen-Orient



Questions

Agnès LEVALLOIS

Vous venez d'évoquer l'instabilité de cette région. Monsieur Arthuis, cette instabilité a-t-elle fait l'objet de discussions avec vos interlocuteurs au Moyen-Orient ? Comment la perçoivent-ils ?

Jean ARTHUIS

Nos interlocuteurs ont conscience de cette instabilité. La situation en Irak notamment suscite des interrogations quant au rôle des Etats-Unis. Nous avons néanmoins été impressionnés par leur volonté de donner de la consistance à leur potentiel économique, en mobilisant les capitaux et en s'efforçant de créer de la valeur. Pour ce faire, ils essaient de tirer au maximum parti du contexte de la mondialisation, en n'hésitant pas par exemple à faire venir des travailleurs indiens pour participer au fantastique développement de l'immobilier à Dubaï, et ce aux tarifs pratiqués en Inde. Par ailleurs, le partenariat avec la Sorbonne et le Louvres atteste de leur souci de renforcer leur image culturelle.

Claude LOREAU, Président d'honneur de la Commission Proche et Moyen-Orient

En tant que vétéran de cette zone, je suis frappé par l'écart qui existe entre la qualité de l'analyse française de la situation du Moyen-Orient et notre frilosité sur le terrain. Comment expliquez-vous ce phénomène ?

Jean ARTHUIS

Je rappellerai tout d'abord qu'il s'agit d'une zone anglophone. Par ailleurs, il convient de nous interroger sur notre stratégie en matière de politique étrangère et de développement économique. Aujourd'hui, nous sommes surtout présents sur de grands marchés de concession en matière d'eau, d'assainissement, d'armement, etc. Les responsables de la zone ayant complètement intégré les enjeux de la mondialisation, nous devrions désormais tenter de réviser notre modèle afin d'être beaucoup plus présents sur cette région.

Agnès LEVALLOIS

Pendant longtemps, nous avons considéré le Moyen-Orient comme une zone sous influence anglo-saxonne, nos recherches étant davantage concentrées sur le Proche-Orient. En France, la recherche en science politique sur le Golfe est en effet très récente. Elle doit permettre de combler notre déficit de connaissance scientifique sur cette région.

Jean ARTHUIS

Cette zone est d'autant plus intéressante que ses responsables n'ont pas besoin de procéder à la reconversion de leur tissu industriel. Celui-ci étant vierge, ils sont en mesure de faire appel aux équipements les plus sophistiqués ainsi qu'aux talents du monde entier. Il en est de même sur le plan financier. Ainsi les efforts mis en avant à Dubaï pour répliquer la City de Londres sont-ils impressionnants.

Jean-Jacques VAN DER SLIKKE, CNCCEF

Cette zone représente, pour les Etats-Unis et la Grande-Bretagne, le même type d'enjeux que l'Algérie pour la France. Ainsi, l'industrie américaine bénéficie-t-elle du fait que les responsables de ces pays aient été formés aux Etats-Unis. Les initiatives menées par Sciences Po dans ce sens sont donc particulièrement intéressantes, d'autant plus que nous devons faire face à la concurrence de la Chine dont les critères économiques sont beaucoup plus favorables que les nôtres.

Jean ARTHUIS

Alors que les Britanniques travaillent depuis plus de dix ans avec la banque islamique, les grands établissements français ne font qu'accomplir les premiers pas. J'ai quant à moi découvert son importance considérable au cours de ma dernière mission.