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Ministère de la justice et des libertés

PROJET DE LOI ORGANIQUE

RELATIF AU STATUT DE LA MAGISTRATURE

ETUDE D'IMPACT

Juillet 2011

SOMMAIRE

Sommaire 2

Introduction 3

1. Etat des lieux et diagnostic 4

1.1.Le cadre juridique actuel 4

1.1.1. Au niveau national 4

1.1.2. Aux niveaux européen et international 7

1.2. La magistrature aujourd'hui 8

1.2.1 Les effectifs de magistrats 8

1.2.2 La répartition par grade au 1er janvier 2011 9

(étude sur l'ensemble du corps) 9

1.2.3 La pyramide des âges au 1er janvier 2011 9

1.2.4 La moyenne d'âge au 1er janvier 2011 10

1.2.5 La répartition siège - parquet au 1er janvier 2011 10

1.2.6 La répartition par sexe au 1er janvier 2011 10

1.2.7 La répartition par fonctions au 1er janvier 2011 11

Effectifs physiques 11

1.2.8 La répartition par quotité de temps de travail au 1er janvier 2011 11

1.2.9 Les mouvements de magistrats au sein du corps judiciaire en 2010 12

1.3. Les principales difficultés auxquelles la réforme entend remédier 12

1.3.1. Des règles compliquant la bonne gestion du corps judiciaire 12

1.3.2. Des dispositifs statutaires existants inadaptés ou incomplets 22

a) Des dispositifs statutaires existants inadaptés 22

2. Objectifs 37

2.1. Premier objectif : étendre à certains magistrats de l'ordre judiciaire le renforcement des obligations de transparence et la formalisation de certains des mécanismes de prévention des conflits d'intérêts 37

2.2. Second objectif : améliorer certains dispositifs de gestion de la carrière des magistrats. 37

3. Les options envisageables 38

3.1. La nécessité d'une modification de l'ordonnance statutaire 38

3.2 Les principales options envisageables quant au contenu du texte 38

3.2.1 Les options visant à limiter les effets non souhaités de certaines règles applicables aux magistrats placés 38

3.2.2 Les options visant à assouplir la priorité d'affectation des conseillers et des avocats généraux référendaires à la Cour de cassation 39

3.2.3 Les options visant à faciliter les retours de détachement et de congé parental 39

3.2.4. Les options visant à faciliter la mise en oeuvre de la nouvelle obligation de mobilité statutaire 42

3.2.5. Les options visant à renforcer l'apprentissage de la pratique dans la formation au changement de fonction 44

3.2.6 Les options visant à rendre effectif le comité médical national 45

3.2.7 Les options visant à adapter la durée des fonctions de juge de proximité 45

3.2.8. Les options visant à prévenir les conflits d'intérêts 46

4. Les effets attendus de la réforme organique 50

4.1. Impact important sur le corps judiciaire 50

4.2 Impact nul sur la dépense publique 51

5. Consultations et modalités d'application de la loi organique 52

5.1 Consultations menées 52

5.2 Textes d'application et mesures spécifiques d'entrée en vigueur 52

INTRODUCTION

Conformément aux dispositions de la loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009 en application de l'article 39 de la Constitution, la présente étude d'impact accompagne le projet de loi organique relatif au statut de la magistrature.

Ce projet de loi organique modifie l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature.

Dans ce cadre, la présente étude d'impact :

- présente l'état actuel du droit et de la magistrature et les difficultés rencontrées en matière de gestion du corps judiciaire, de mise en oeuvre de certains dispositifs statutaires existants et de prévention des conflits d'intérêts,

- décrit les objectifs poursuivis par le projet de loi organique,

- indique les modalités à mettre en place pour les atteindre,

- évalue les impacts des mesures proposées,

- précise les consultations qui ont été menées et les modalités d'application des dispositions envisagées.

L'objet des mesures envisagées n'appelle pas à l'évidence de développements particuliers sur les conséquences économiques, financières, sociales et environnementales, ni sur les coûts et bénéfices financiers attendus.

De même, il n'y a pas lieu de s'interroger sur l'application outre mer ou sur l'articulation avec le droit communautaire, qui n'a pas vocation à s'appliquer dans le champ de l'organisation constitutionnelle des institutions des Etats membres.

1. ETAT DES LIEUX ET DIAGNOSTIC

1.1.LE CADRE JURIDIQUE ACTUEL

1.1.1. Au niveau national

Un statut particulier relevant de la compétence du législateur organique

Aux termes du troisième alinéa de l'article 64 de la Constitution du 4 octobre 1958, « une loi organique porte statut des magistrats ». Cette loi organique doit respecter les principes statutaires posés expressément par les articles 64 et 65 de la Constitution, qui prévoient le principe d'indépendance de l'autorité judiciaire et son corollaire, le principe d'inamovibilité des magistrats du siège, ainsi que les conditions d'intervention du Conseil supérieur de la magistrature dans le cadre des nominations et de la discipline des magistrats.

Ainsi que le rappelle le Conseil constitutionnel dans un considérant de principe (cf. par ex. : décision n° 2001-445 DC du 19 juin 2001, cons. 3), « En spécifiant que ressortit au domaine d'intervention d'une loi ayant le caractère de loi organique une matière que l'article 34 range par ailleurs au nombre de celles relevant de la compétence du législateur, le Constituant a entendu accroître les garanties d'ordre statutaire accordées aux magistrats ».

Pour assurer l'indépendance de la justice, les magistrats de l'ordre judiciaire sont les seuls agents de l'Etat dont le statut est fixé par une loi organique, ce qui apporte comme garantie essentielle que toute modification de ce statut est nécessairement examinée par le Conseil constitutionnel, en application de l'article 61 de la Constitution.

En conséquence, les règles statutaires intéressant les magistrats sont définies par l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature.

L'exception concernant les règles relatives au maintien en activité des magistrats au delà de la limite d'âge a été supprimée à l'occasion de la réforme des retraites intervenues en 2010. Ces règles étaient prévues par trois lois organiques distinctes, en l'espèce la loi organique n° 84-833 du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge des magistrats hors hiérarchie de la Cour de cassation, la loi organique n° 86-1303 du 23 décembre 1986 pour ce qui concerne les magistrats de la Cour de cassation et la loi organique n° 88-23 du 7 janvier 1988 pour les magistrats des cours d'appel et des tribunaux de grande instance. Dans un souci de clarté et d'intelligibilité du dispositif de maintien en activité en surnombre, la loi organique n° 2010-1341 du 10 novembre 2010 relative à la limite d'âge des magistrats de l'ordre judiciaire a intégré ces dispositions dans l'ordonnance statutaire en introduisant un article 76-1-1.

L'ordonnance du 22 décembre 1958 précitée définit ainsi, notamment :

- l'organisation du corps judiciaire, caractérisée par son unité nonobstant l'appartenance au parquet ou au siège, ainsi que les droits et les devoirs de ses membres (chapitre I) ;

- les conditions de recrutement des magistrats, que ce soit par la voie de l'Ecole nationale de la magistrature ou par l'intégration directe (chapitre II) ;

- les procédures de nomination, qui se caractérisent par l'intervention du Conseil supérieur de la magistrature et par des règles de nature à garantir l'indépendance de l'ensemble des magistrats et l'inamovibilité de ceux du siège (chapitre III pour les magistrats des premier et second grades, chapitre V pour les magistrats hors hiérarchie) ;

- les conditions du recrutement de juges pour une durée limitée et ayant vocation à n'exercer qu'une part limitée des attributions juridictionnelles (chapitre V quater pour les magistrats à titre temporaire et chapitre V quinquies pour les juges de proximité) ;

- les conditions du détachement judiciaire (chapitre V ter) ;

- les règles disciplinaires, caractérisées par un rôle du Conseil supérieur de la magistrature distinct pour les magistrats du siège et ceux du parquet (chapitre VII) ;

- les règles régissant les positions administratives (chapitre VIII) ;

- les règles régissant la cessation de fonctions (chapitre IX).

Ainsi que le précise également le Conseil constitutionnel, « la loi organique portant statut des magistrats doit [...] déterminer elle-même les règles statutaires applicables aux magistrats, sous la seule réserve de la faculté de renvoyer au pouvoir réglementaire la fixation de certaines mesures d'application des règles qu'elle a posées » (Décision n° 2001-445 DC précitée, cons. 3).

En application de ce principe, un certain nombre de dispositions statutaires sont énoncées dans le décret n° 93-21 du 7 janvier 1993 pris pour l'application de l'ordonnance du 22 décembre 1958.

D'autres textes réglementaires posent diverses règles statutaires relatives notamment à la rémunération des magistrats.

L'articulation avec le statut général des fonctionnaires

Aux termes de l'article 68 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 précitée, « les dispositions du statut général des fonctionnaires concernant les positions ci-dessus énumérées s'appliquent aux magistrats dans la mesure où elles ne sont pas contraires aux règles statutaires du corps judiciaire et sous réserve des dérogations ci-après ».

En application de ce principe, certaines règles définies par la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat et par ses décrets d'application concernent les magistrats placés dans les positions suivantes :

- activité : cela concerne principalement les règles régissant les congés de toutes natures ou les mises à disposition ;

- service détaché : cela concerne essentiellement les conditions du retour de détachement, les règles de départ étant en grande partie prévues par l'ordonnance du 22 décembre 1958 précitée ;

- disponibilité : il s'agit notamment de la définition des différentes catégories de disponibilité ;

- sous les drapeaux ;

- en congé parental.

Certaines de ces règles ont été élaborées sans toujours tenir compte des spécificités du corps judiciaire, ce qui peut poser des difficultés d'application aux magistrats (cf. infra 1.3.1. pour les retours de détachement et de congé parental).

• Un statut modifié à plusieurs reprises

L'ordonnance du 22 décembre 1958 précitée a été modifiée à plusieurs reprises depuis son entrée en vigueur, la dernière remontant au 10 novembre 2010 comme il a été dit précédemment. Il sera rappelé ici les principaux apports des dernières modifications.

- La loi organique n° 2001-539 du 25 juin 2001 relative au statut des magistrats et au Conseil supérieur de la magistrature

Cette loi organique a apporté de profondes modifications dans la structure du corps des magistrats comme dans leur carrière, et ce dans le sens d'une accélération sensible de celle-ci :

- augmentation du nombre des emplois classés hors hiérarchie,

- suppression des groupes au sein du premier grade et suppression corrélative des rubriques du tableau d'avancement,

- abaissement à sept ans de l'ancienneté requise pour l'accès au 1 er grade,

- instauration de nouvelles conditions de mobilité pour l'accès au premier grade et à la hors hiérarchie.

Ces mesures ont été complétées, à l'initiative du législateur, par des dispositions limitant la durée d'exercice de certaines fonctions (magistrats spécialisés, chefs de juridiction et chefs de cour d'appel). Pour ce faire a été instauré, sauf pour les procureurs généraux, un mécanisme de double nomination simultanée, garantissant aux magistrats arrivés au terme de la durée maximum d'exercice des fonctions de retrouver une affectation pour laquelle ils ont donné leur accord.

Cette loi ouvre également aux chefs de cour d'appel la possibilité de saisir les formations disciplinaires du Conseil supérieur de la magistrature et crée la sanction d'exclusion temporaire des fonctions.

- La loi organique n° 2003-153 du 27 février 2003 relative aux juges de proximité

Cette loi organique définit les conditions de recrutement et de nomination des juges de proximité (article V quinquies), ainsi que les modalités d'application à leur égard de l'ordonnance du 22 décembre 1958.

- La loi organique n° 2007-287 du 5 mars 2007relative au recrutement, à la formation et à la responsabilité des magistrats

En matière de recrutement, la loi organique du 5 mars 2007 a augmenté la proportion des magistrats issus des modes de recrutement parallèle (recrutements sur titre d'auditeurs de justice et intégrations directes) et a instauré une formation probatoire pour la plupart de ces modes de recrutement.

En matière de formation, elle a rendu obligatoire l'accomplissement d'un stage d'une durée minimale de six mois auprès d'un barreau ou comme collaborateur d'un avocat inscrit au barreau et elle a augmenté les pouvoirs du jury de classement des auditeurs. Une obligation de formation continue a en outre été instituée.

Sur le plan de la carrière, cette loi a modifié les règles relatives à la mobilité des magistrats, notamment en obligeant les magistrats qui souhaitent accéder à la hors hiérarchie à accomplir, après au moins quatre années de services effectifs dans le corps judiciaire, une période dite de mobilité statutaire au cours de laquelle ils ne peuvent exercer de fonctions d'ordre juridictionnel. La durée de cette période de mobilité est d'un an renouvelable une fois.

Par ailleurs, cette loi a apporté des changements significatifs en matière disciplinaire.

Ainsi notamment, ses dispositions instituent une nouvelle sanction disciplinaire, l'interdiction d'être nommé ou désigné dans des fonctions de juge unique pendant une durée maximum de cinq ans ; elles augmentent le nombre de sanctions disciplinaires pouvant être assorties du déplacement d'office et interdisent à un magistrat mis à la retraite d'office de se prévaloir de l'honorariat des fonctions.

La loi du 5 mars 2007 précitée oblige désormais le garde des sceaux, ministre de la justice, à communiquer toute décision définitive d'une juridiction nationale ou internationale condamnant l'Etat pour fonctionnement défectueux du service de la justice à la fois aux chefs de cour d'appel et aux magistrats intéressés.

1.1.2. Aux niveaux européen et international

Le statut de la magistrature s'insère dans un cadre européen et international et nombre de textes de l'ordre international ou européen, supérieurs aux dispositions internes dans la hiérarchie des normes, ont une influence, directe ou indirecte, sur le statut des magistrats.

Le Pacte international des Nations unies relatifs aux droits civils et politiques du 16 décembre 1996, notamment son article 14, et la Déclaration universelle des droits de l'homme adoptée le 10 décembre 1948, en son article 10, proclament le droit à un « tribunal indépendant et impartial ».

Ces principes d'indépendance et d'impartialité sont repris au plan européen par la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, en son article 6. Dans de nombreuses décisions, la Cour européenne est venue en préciser les implications concrètes, en énonçant notamment que l'indépendance du tribunal s'apprécie au regard du mode de désignation et de la durée du mandat des membres (CEDH, 23 juin 1981, série A n° 43, Le Compte, Van Leuven et De Meyere c. Belgique ), en posant le principe d'inamovibilité des juges au cours de leur mandat comme un corollaire de leur indépendance (CEDH, 28 juin 1984, série A n° 80, Campbell et Fell c. Royaume-Uni ) et en veillant à ce que le juge ne reçoive aucune pression ou instruction dans l'exercice de ses fonctions juridictionnelles, qu'elles émanent du pouvoir exécutif (CEDH, 28 juin 1984, série A n° 80, Campbell et Fell c. Royaume-Uni ), du pouvoir législatif (CEDH, 26 août 2003, Filippini c. Saint-Marin) ou des parties (CEDH, 22 juin 1989, série A n° 155, Langborger c. Suède ou CEDH, 23 novembre 1993, série A n° 279, Holm c. Suède ). La Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne adoptée le 18 décembre 2000 a également proclamé ce principe, en son article 47.

Par ailleurs, des principes à valeur non contraignante adoptés à l'échelle européenne et international approfondissent ces principes d'indépendance et d'impartialité des magistrats.

Ainsi, les principes fondamentaux relatifs à l'indépendance de la magistrature, adoptés par le septième congrès des Nations Unies pour la prévention du crime et le traitement des délinquants, approuvés par l'Assemblée générale des Nations Unies en novembre 1985, recommandent de protéger les magistrats de toute intervention, pression ou menace, de prévoir des garanties contre « les nominations abusives », d'inscrire dans une loi « la durée du mandat des juges, leur indépendance, leur sécurité, leur rémunération appropriée, leurs conditions de service, leurs pensions et l'âge de leur retraite » et de s'assurer que l'avancement des magistrats est fondé sur « des facteurs objectifs ». Ils établissent un principe de non-discrimination dans les procédures de recrutement, ainsi qu'un principe d'inamovibilité des juges et prévoient que la distribution des affaires et le dessaisissement relèvent exclusivement de la compétence des magistrats.

Sur le plan européen, la Charte européenne sur le statut des juges, adoptée par les participants de pays européens et les membres de deux associations internationales de juges réunis du 8 au 10 juillet 1998 à Strasbourg reprend ces principes, en les développant. Elle promeut notamment le principe de non discrimination dans le recrutement, garantit le principe d'inamovibilité des juges, leur promotion à l'ancienneté ou par le mérite, leur droit à la formation, leur libre exercice de toute activité extérieure, sous réserve que celle-ci ne porte pas atteinte à leur impartialité, leur indépendance et leur disponibilité, ainsi qu'une rémunération suffisante. La Recommandation CM/Rec (2010)12 du Comité des Ministres aux Etats membres sur les juges : indépendance, efficacité et responsabilités a été adoptée par le Comité des Ministres le 17 novembre 2010 a remplacé la Recommandation du Conseil des ministres du Conseil de l'Europe n° R (94) 12 relative à l'indépendance, l'efficacité et le rôle des juges, dans le souci de renforcer l'indépendance et l'efficacité des juges, tout en veillant à rendre plus effective leur responsabilité. Dans l'exposé des motifs, l'indépendance des juges est conçu comme « un élément inhérent à l'Etat de droit et indispensable à l'impartialité des juges et au fonctionnement du système judiciaire » et il est considéré que la mise en place d'un système juridique efficace et équitable nécessite de garantir la place et les pouvoirs des juges. Le principe d'inamovibilité et l'absence de toute pression ou influence dans la prise de décision sont en particulier mis en avant. Au nom de « l'indépendance externe », il encadre les conditions dans lesquelles les juges peuvent exercer des activités parallèlement à l'exercice de leurs fonctions judiciaires.

1.2. LA MAGISTRATURE AUJOURD'HUI

1.2.1 Les effectifs de magistrats

Evolution des effectifs de magistrat (1 er septembre année N)

2007

2008

2009

2010

Evolution entre 2007 et 2010

Ensemble du corps des magistrats

8340

8464

8597

8619

+3,35%

Etat des effectifs au 1 er janvier 2011 :

8560 magistrats (ensemble du corps) dont

• 8197 1 ( * ) en juridiction (7907) et en administration centrale,

• 247 en détachement (soit 3% du corps)

• 83 en disponibilité (soit 1% du corps) dont

44 en disponibilité exerçant dans le secteur privé et

33 en disponibilité pour convenances personnelles

• 33 autres positions administratives (ex : congé parental)

1.2.2 La répartition par grade au 1 er janvier 2011

(étude sur l'ensemble du corps)

1.2.3 La pyramide des âges au 1 er janvier 2011

1.2.4 La moyenne d'âge au 1 er janvier 2011

Magistrats du
SIEGE

Magistrats du
PARQUET

Magistrats du
SIEGE et du PARQUET

Moyenne d'âge

48,1

44,6

47,2

hors hiérarchie : 59,7

premier grade : 50,6

second grade : 37

1.2.5 La répartition siège - parquet au 1 er janvier 2011

1.2.6 La répartition par sexe au 1 er janvier 2011

Les femmes représentent 58,78% (5032 sur 8560) du corps au 1er janvier 2011.

En juridiction elles occupent :

29,4% (281 sur 957) des postes hors hiérarchie,

57% (2452 sur 4304) des postes du premier grade,

73,7% (1952 sur 2646) des postes du second grade.

1.2.7 La répartition par fonctions au 1 er janvier 2011

Effectifs physiques

2011

Cour de cassation

278

Siège

223

Parquet

55

Cour d'appel (avec placés)

2017

Siège

1510

Parquet

507

Tribunaux de grande instance et TI

5612

Secrétaires généraux

19

Parquet

1400

Non spécialisés

1990

Instruction

535

Application des peines

361

Enfants

429

Instance

878

Total juridictions

7907

1.2.8 La répartition par quotité de temps de travail au 1 er janvier 2011

Temps partiel des magistrats au 01/01/2011 - NATIONAL

Taux à 50%

Taux à 60%

Taux à 70%

Taux à 80%

Taux à 90%

Total temps partiel

Temps plein

Total général
(temps plein+temps partiel)

Nombre et %

NB

%

NB

%

NB

%

NB

%

NB

%

NB

%

NB

Total

64

0,78%

24

0,29%

5

0,06%

267

3,26%

11

0,13%

371

4,53%

7 826

8 197

1.2.9 Les mouvements de magistrats au sein du corps judiciaire en 2010

Nombre de mouvements réalisés en 2010 : 1900

Soit un taux de mobilité 2010 de + de 22% du corps

Il convient de noter que la moyenne 2008 de la mobilité des A+ des trois fonctions publiques est de 4,2%.

ï Hors-hiérarchie : 261 mouvements

ï 1er grade : 1113 mouvements

ï 2nd grade : 526 mouvements

1.3. LES PRINCIPALES DIFFICULTÉS AUXQUELLES LA RÉFORME ENTEND REMÉDIER

1.3.1. Des règles compliquant la bonne gestion du corps judiciaire

a) Les effets non souhaités de certaines règles applicables aux magistrats placés

Le dispositif des magistrats placés a été institué par la loi organique n° 80-844 du 29 octobre 1980 relative au statut de la magistrature, afin de donner aux chefs de cour une plus grande latitude dans la gestion des effectifs de magistrats pour répondre aux besoins du service public de la justice. Il a été étendu par les lois organiques n° 95-64 du 19 janvier 1995 et n° 2001-539 du 25 juin 2001. Ce dispositif a été jugé par le Conseil constitutionnel comme ne portant pas atteinte au principe d'inamovibilité des magistrats du siège ou aux principes d'égalité de traitement des magistrats dans le déroulement de leur carrière et d'indépendance de la justice (décision n° 80-123 DC du 24 octobre 1980, n° 94-355 DC du 10 janvier 1995 et n° 2001-1445 du 19 juin 2001).

Le régime des magistrats placés est défini à l'article 3-1 de l'ordonnance statutaire.

Après avoir énuméré limitativement les hypothèses dans lesquelles il est possible, à l'intérieur du ressort d'une cour d'appel, de recourir aux magistrats placés, cet article énonce que le nombre de ces magistrats ne peut excéder pour chaque cour d'appel le quinzième des emplois de magistrat de la cour d'appel et des tribunaux de première instance du ressort.

En 2011, 382 emplois de magistrats placés ont été localisés, 244 au siège et 138 au parquet. Sur les 7687 emplois de magistrats actuellement localisés dans les juridictions, les magistrats placés représentent 4,9 % des emplois.

Du fait de leur relative désaffection, de nombreux postes de placés sont proposés aux auditeurs de justice : 62 en 2008 (28 au siège et 34 au parquet), 89 en 2009 (49 au siège et 40 au parquet) et 43 en 2010 (19 au siège et 24 au parquet).

Le nombre de magistrats placés faisant l'objet d'un mouvement dans une transparence 2 ( * ) ou au cours d'une période de référence (nommé sur un poste de magistrat placé ou à partir d'un poste de magistrat placé) est relativement conséquent :

1- Etude au cours d'une période de référence (années 2008,2009 et 2010) 3 ( * ) :

Nombre d'arrivées sur un poste de placé

Nombre de départs d'un poste de placé

SIEGE

PARQUET

TOTAL

SIEGE

PARQUET

TOTAL

I

II

TOTAL

I

II

TOTAL

I

II

TOTAL

I

II

TOTAL

2008

27

8

35

3

9

12

47

24

38

62

5

34

39

101

2009

37

17

54

11

10

21

75

30

40

70

9

35

44

114

2010

50

12

62

16

5

21

83

46

40

86

10

34

44

130

2- Etude au niveau d'une transparence (transparence du 24 février 2011) :

Nombre totale de mouvements : 871

Nombre d' arrivées prévues de magistrats placés : 59 (dont 42 au siège et 17 au parquet), soit 6,7% des mouvements

Nombre de départs prévus de magistrats placés : 109 (dont 68 du siège et 41 du parquet), soit 12,5% des mouvements

Le respect de certaines règles prévues par l'article 3-1 de l'ordonnance statutaire soulève des difficultés en termes de gestion des mouvements de magistrats.

Une priorité d'affectation à l'issue d'une période de deux années d'exercice de ces fonctions a en premier lieu été instaurée au bénéfice des magistrats placés.

Le Conseil d'Etat a précisé que cette priorité d'affectation s'étend aux emplois comportant un huitième échelon indiciaire dit « BBIS» (voir, par exemple, CE, 12 décembre 2007, M. Vignard). Dans une décision du 24 juin 2011, la haute juridiction administrative a ajouté que ce "droit de priorité" s'exerce quelles que puissent être "les orientations de la politique de gestion des magistrats ou les qualités professionnelles des candidats à ces fonctions" (CE, 24 juin 2011, Mme Braud ).

Le nombre de magistrats placés faisant jouer la priorité statutaire s'établit comme suit :

1 Etude sur les desiderata 4 ( * ) :

Sur 340 magistrats placés au 26 mai 2011, 197 5 ( * ) ont fait des desiderata, soit près de 58%. Parmi ces 197 magistrats placés, 124 sont actuellement au siège (40 au premier grade et 84 au second grade), soit 63%, et 73 sont actuellement au parquet (13 au premier grade et 60 au second grade), soit 37%.

107 des 197 magistrats placés ayant fait des demandes de mutation ont fait des desiderata « priorité statutaire » :

à 71 magistrats placés au siège (25 au premier grade et 46 au second grade),

à 36 magistrats placés au parquet (5 au premier grade et 31 au second grade).

Parmi les desiderata « priorité statutaire », 18 portent sur des emplois d'encadrement intermédiaire comportant un huitième échelon dit « BBIS » : 15 au siège et 3 au parquet.

Ce nombre de desiderata qui peut apparaître peu élevé au regard du nombre d'emplois d'encadrement intermédiaire « I BBIS » localisés dans les tribunaux de grande instance du siège de la cour d'appel de rattachement et dans les tribunaux de grande instance les plus importants du département où est située ladite cour (16,36%) peut s'expliquer par la récente augmentation de ces emplois. En effet, de nouveaux postes d'encadrement intermédiaire ont été localisés en 2009. En raison de la nécessaire modification de l'article 4 du décret n° 93-21 du 7 janvier 1993 précité, les magistrats n'ont pu candidater qu'à partir de novembre 2010. Les candidatures ont dès lors été traitées dans le cadre de la transparence annuelle. Il est donc prématuré de se prononcer sur cet impact.

De plus, l'application LOLFI ne conservant aucune trace des desiderata antérieurement formulés par un magistrat qui a obtenu satisfaction, toute étude ayant le même objet sera compromise dès lors qu'elle repose sur l'examen des desiderata.

2 Etude sur la transparence de février 2011 :

Parmi les 109 magistrats placés dont le départ est prévu :

à 68 sont actuellement au siège (24 au premier grade et 44 au second grade), soit 62,4%,

à 41 sont actuellement au parquet (7 au premier grade et 34 au second grade), soit 37,6%.

Parmi ces 109 magistrats placés dont le départ est prévu, 51 ont reçu une proposition de nomination sur un poste pour lequel ils bénéficiaient de la « priorité statutaire » :

à 30 siège (11 au premier grade et 19 au second grade)

à 21 parquet (3 au premier grade et 18 au second grade)

Parmi ces 51 propositions de nomination « priorité statutaire », 5 portent sur des emplois d'encadrement intermédiaire comportant un huitième échelon dit « BBIS » :

à 3 sur des postes de premier vice-président et premier vice président adjoint

à 2 sur des postes de procureur de la République adjoint

3 Etude sur les nominations intervenues en 2008, 2009 et 2010 :

5 nominations « priorité statutaire » portent sur des emplois d'encadrement intermédiaire comportant un huitième échelon dit « BBIS » :

à 3 sur des postes de premier vice-président ,

à 2 sur des postes de procureur de la République adjoint

Cette priorité d'affectation sur des emplois comportant un huitième échelon indiciaire correspondant à l'échelle lettre « BBIS » risque de compromettre la nouvelle politique de gestion des ressources humaines de la magistrature, qui vise notamment à valoriser les carrières de magistrats. En effet, la création de ce huitième échelon, qui constitue un échelon fonctionnel réservé aux magistrats occupant les fonctions qui sont limitativement énumérées par un arrêté 6 ( * ) , vise à prendre en compte, par l'instauration d'un débouché indiciaire plus favorable, l'importance des responsabilités qui leur incombent. Ces emplois ont donc vocation à être confiés à des magistrats ayant démontré des capacités particulières en termes de management, d'encadrement et d'animation d'une équipe.

L'article 3-1 de l'ordonnance statutaire limite en second lieu à six années l'exercice des fonctions de magistrats placés.

Dans une décision du 17 février 2010 M. Lombard , le Conseil d'Etat a considéré qu'un magistrat ne peut exercer les fonctions mentionnées à l'article 3-1 précité que dans la limite d'une durée totale de six années au cours de sa carrière.

Or, si la durée moyenne d'exercice des fonctions de placé (durée cumulée sur la carrière) des magistrats en activité au 14 juin 2011 (hors magistrats exerçant ces fonctions à cette date) s'élève à 2 ans et 11 mois, la durée maximale qui a été atteinte avant la décision Lombard précitée a été de 14 ans et 6 mois. Certains magistrats ont donc souhaité pouvoir exercer ces fonctions bien au-delà de la limite des six ans.

Ainsi, des demandes de nomination sur des postes de magistrats placés peuvent ne pas se voir satisfaites du fait de la limitation de l'exercice de ces fonctions à six années sur l'ensemble de la carrière, alors même que ces fonctions - qui se sont révélées être un instrument de gestion indispensable pour les chefs de cour - connaissent un véritable déficit d'attractivité. La durée de six années sur l'ensemble de la carrière apparaît trop restrictive. Des magistrats, qui ont déjà exercé de telles fonctions, peuvent en effet solliciter une nouvelle nomination sur de tels postes, pour favoriser le déroulement de leur carrière afin notamment d'accéder plus rapidement au premier grade, pour obtenir, par exemple à la suite de changements sur le plan personnel, un poste dans une cour d'appel particulièrement demandée ou, tout simplement, par choix, ces fonctions donnant droit, sous certaines conditions, au remboursement des frais engagés et à un taux de prime forfaitaire fixé à 39% et étant considérées comme offrant une plus grande autonomie par rapport aux chefs de juridiction.

b) La priorité d'affectation des conseillers et avocats généraux référendaires à la Cour de cassation : un quota trop contraignant

Le statut des avocats généraux référendaires est identique à celui des conseillers référendaires. Ces fonctions sont exercées par des magistrats du premier grade. Pour y accéder, les magistrats doivent avoir accompli deux années de services effectifs dans les cours d'appel ou les tribunaux de grande instance ou de première instance et être âgés de moins de quarante-sept ans (article 9 du décret du 7 janvier 1993 précité). La durée d'exercice de ces fonctions est limitée à dix années et ils bénéficient de garanties pour leur affectation à l'expiration de cette période (articles 28 et 28-1 de l'ordonnance statutaire).

Ils sont soumis à un régime dérogatoire pour l'accès aux fonctions hors hiérarchie prévu par l'article 39 de l'ordonnance statutaire. En effet :

- ils ne sont pas soumis à l'obligation d'avoir exercé au moins deux fonctions au premier grade et d'avoir satisfait à l'obligation de mobilité statutaire prévue à l'article 76-4,

- il suffit qu'ils occupent un autre emploi du premier grade pour être nommé à un emploi hors hiérarchie de la Cour de cassation, alors que les autres magistrats doivent déjà avoir été affectés à un poste hors hiérarchie.

Par voie d'amendement, la loi organique n° 2007-287 du 5 mars 2007 a introduit à l'article 39 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 une disposition réservant un emploi vacant de conseiller ou d'avocat général à la Cour de cassation sur quatre, à des magistrats du premier grade ayant exercé les fonctions de conseiller référendaire ou d'avocat général référendaire à la Cour de cassation pendant une durée égale ou supérieure pour les conseillers et avocats généraux référendaires.

L'objectif était d'améliorer le déroulement de la carrière des conseillers et avocats généraux référendaires. En effet, le régime dérogatoire institué par la loi organique du 25 juin 2001 en faveur des anciens conseillers référendaires, les dispensant d'avoir déjà exercé des fonctions hors hiérarchie pour accéder aux fonctions hors hiérarchie de la Cour de cassation, n'était pas appliqué.

Par ailleurs, le Conseil supérieur de la magistrature semblait privilégier les présidents de chambre de cour d'appel (déjà placés hors hiérarchie) plutôt que les conseillers de cour d'appel anciens référendaires pour l'accès à ces fonctions.

La réforme tendait donc à remédier à cette situation en permettant de renforcer la présence à la Cour d'anciens référendaires, ayant déjà acquis la technique de la cassation.

Dans sa décision n° 2007-551 DC du 1 er mars 2007, le Conseil constitutionnel n'a émis aucune remarque de constitutionnalité sur cette disposition.

Les dispositions de l'article 39 de l'ordonnance statutaire doivent s'analyser comme instituant un véritable « tour extérieur », ce qui implique de nommer chronologiquement un ancien conseiller ou avocat général référendaire ayant exercé ces fonctions pendant au moins huit ans, après trois nominations de magistrats n'ayant pas cette qualité.

Le risque juridique résultant de la méconnaissance de ces dispositions est important, puisque le Conseil d'Etat examine le respect par les décrets de nomination de l'article 39 du statut, au titre de l'erreur de droit (CE 31 mars 2008 M. Blais ).

Depuis l'entrée en vigueur de la loi organique du 5 mars 2007 (article 39), 68 conseillers ou avocats généraux ont été nommés à la Cour de cassation dont 18 magistrats avaient, au cours leur carrière, exercé pendant au moins 8 ans des fonctions de magistrat référendaire soit 26,5%.

Or, en pratique, cette règle, qui a d'indéniables avantages, se révèle contraignante en ce qu'elle ne permet pas de disposer d'une latitude suffisante dans le choix des conseillers et avocats généraux à la Cour de cassation. Avec le quota actuel de un sur quatre, elle pénalise de brillants candidats aux fonctions de la Cour de cassation, qui n'ont pas été référendaires dans cette juridiction, alors que dans le même temps il peut arriver qu'il ne se trouve pas d'anciens conseillers ou avocats généraux référendaires présentant le profil requis pour une telle nomination.

c) Une application des dispositions du statut général de la fonction publique rendant difficile le retour de détachement des magistrats ou le retour de congé parental

Parmi les positions dans lesquelles les magistrats peuvent être placés, l'article 67 de l'ordonnance statutaire mentionne le détachement 7 ( * ) et le congé parental 8 ( * ) .

Au 1 er janvier 2011, 247 magistrats étaient en position de détachement (soit 3% du corps).

En 2008, il y a eu autant de réintégrations suite à détachements que de départs en détachement (52). En revanche, en 2009 et en 2010, il y a eu davantage de départs que de retours (54 retours de détachement pour 90 départs en 2009 ; 46 retours de détachement pour 67 départs en 2010).

La durée moyenne en détachement avant réintégration des magistrats en activité au 14 juin 2011 est de 4 ans et 1 mois. Mais cette moyenne cache des disparités importantes, puisque la durée maximale constatée à ce jour est de 20 ans et 3 mois et la durée minimale de 3 mois.

Les fonctions exercées par les magistrats placés en position de détachement sont très variées. Le décret n° 99-1073 du 21 décembre 1999 régissant les emplois de l'Ecole nationale de la magistrature prévoit que les magistrats y occupant des emplois de direction ou des emplois permanents d'enseignant sont nommés par la voie du détachement. Il en est de même du secrétaire général du Conseil supérieur de la magistrature en application de l'article de la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994. Les institutions européennes et internationales et les juridictions administratives comptent parmi leurs membres plusieurs magistrats détachés (cf infra 1.3.1 d).

S'agissant des congés parentaux, 14 magistrats étaient placés dans cette position au 1 er janvier 2011.

En 2008, davantage de départs que de retours de congé parental ont été comptabilisés (13 retours pour 22 départs). L'inverse a été constaté en 2009 et 2010 (18 retours pour 15 départs en 2009 et 23 retours pour 17 départs en 2010).

La durée moyenne en congé parental avant réintégration des magistrats en activité au 14 juin 2011 est de 1 an et 1 mois, la durée maximale étant de 5 ans et 6 mois et la durée minimale, 1 mois.

En application de l'article 68 de l'ordonnance statutaire, ces positions sont régies par les dispositions du statut général des fonctionnaires non contraires aux règles statutaires du corps judiciaire.

En ce qui concerne le détachement, hormis les règles particulières posées par l'article 72 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 pour le placement en position de détachement, la réintégration des magistrats à l'issue d'un détachement s'effectue en application des dispositions du statut général de la fonction publique (article 45 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 et articles 22 et suivants du décret n° 85-986 du 16 septembre 1985).

Ces règles du statut général sont les suivantes :

Un délai de trois mois précédant la fin prévue du détachement est imposé aux fonctionnaires pour faire connaître à leur administration d'origine leur choix de demander le renouvellement de leur détachement ou de réintégrer leur corps d'origine ; l'administration ou l'organisme d'accueil doit quant à elle informer deux mois au moins avant l'expiration du détachement le fonctionnaire et son administration d'origine de sa décision de renouveler cette mesure ou d'y mettre un terme.

Si le détachement n'est pas renouvelé pour une cause autre qu'une faute commise dans l'exercice des fonctions, le fonctionnaire est réintégré immédiatement sur un emploi vacant du grade dont il relève, le cas échéant en surnombre. Il a priorité pour être affecté au poste qu'il occupait précédemment. En cas de refus de l'emploi proposé, il est nommé à un autre emploi à la vacance suivante ; il est, dans l'attente, en "instance d'affectation". Si le fonctionnaire n'a pas fait connaître ses intentions dans le délai prévu, il est nommé à un emploi à la première vacance dans son grade d'origine (il est alors, comme précédemment, en instance d'affectation). S'il est mis fin au détachement avant son terme normal à la demande de l'administration ou de l'organisme d'accueil, le fonctionnaire est nommé à un emploi à la première vacance. Si, en revanche, c'est le fonctionnaire qui a mis fin à son détachement avant le terme prévu, il est nommé à un emploi à l'une des trois premières vacances dans son grade ; il est alors placé en position de disponibilité.

Ces dispositions se révèlent en pratique inadaptées aux magistrats. Il n'est en effet pas toujours aisé d'organiser la réintégration dans un emploi de magistrat, compte tenu des délais incompressibles inhérents à la procédure de nomination des magistrats (transparence, saisine du Conseil supérieur de la magistrature, décret de nomination), et ce même lorsque le détachement expire au terme initialement fixé. Ainsi, les magistrats détachés ne formulent pas toujours leurs desiderata en temps utile, en dépit des invitations faites en ce sens par la chancellerie, et les postes demandés ne sont pas toujours vacants ou adaptés au profil du magistrat.

Dans son rapport d'activité au titre de l'année 2000 (pages 30 et suivantes), le Conseil supérieur de la magistrature déplorait, au regard des résultats du questionnaire qui avait été adressé aux magistrats concernés, que « les règles statutaires [constituaient] un frein non négligeable à cette rentabilisation des connaissances acquises par les magistrats placés en position de détachement. » Il relevait que « le caractère parfois inopiné de la fin de certains détachements[était] susceptible de générer de réelles difficultés pour le magistrat revenant de détachement ».

Depuis, fréquemment, à défaut de pouvoir organiser de manière satisfaisante la réintégration du magistrat sur un emploi de son grade, les magistrats sont réintégrés dans le corps judiciaire par arrêté du garde des sceaux mais ne bénéficient provisoirement d'aucune affectation. Pendant cette période d'attente d'affectation, qui peut durer plusieurs mois, les intéressés perçoivent une rémunération inférieure à celle qu'ils percevraient en juridiction, faute de pouvoir se voir attribuer les primes forfaitaire (attribuée à raison de la fonction exercée) et modulable (attribuée en fonction de la contribution du magistrat au bon fonctionnement de l'institution judiciaire), prévues par le décret n° 2003-1284 du 26 décembre 2003 relatif au régime indemnitaire de certains magistrats de l'ordre judiciaire.

Ces difficultés de réintégration du corps judiciaire peuvent conduire certains magistrats à renoncer à un détachement, alors même que la chancellerie encourage cette mobilité externe afin d'ouvrir davantage le corps judiciaire sur l'extérieur.

Ces difficultés peuvent également amener des magistrats à prolonger leur détachement plutôt qu'à réintégrer le corps judiciaire sans disposer d'une affectation à la hauteur de leurs responsabilités. Or, la durée de dix années est considérée tant par la chancellerie que par le Conseil supérieur de la magistrature comme la durée à ne pas dépasser pour que le corps judiciaire puisse également bénéficier de l'expérience acquise par les magistrats à l'occasion de leur mobilité externe et que les organismes d'accueil bénéficient d'une expérience véritable de magistrat.

Les difficultés rencontrées par les magistrats à l'issue de leur congé parental sont proches de celles posées par le retour des magistrats après un détachement.

En l'absence de toute disposition spécifique dans l'ordonnance statutaire, ce sont en effet les dispositions du statut général des fonctionnaires qui régissent les conditions du retour de congé parental pour les magistrats (article 54 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 et articles 52 et suivants du décret n° 85-986 du 16 septembre 1985).

Ces dispositions prévoient notamment que le fonctionnaire en congé parental est placé "hors de son administration" par périodes de six mois renouvelables et qu'à l'expiration du congé, il est réintégré de plein droit, au besoin en surnombre, dans son corps d'origine ; il est réaffecté dans son emploi précédent. Dans le cas où celui-ci ne peut lui être proposé, le fonctionnaire est affecté dans un emploi le plus proche de son dernier lieu de travail. Le fonctionnaire peut, deux mois avant l'expiration de son congé parental, demander une affectation dans l'emploi le plus proche de son domicile. Une nouvelle nomination est en effet indispensable, puisque le congé parental est une position de non activité dans le corps.

Ce mécanisme apparaît en pratique inadapté aux procédures de nomination des magistrats, et la priorité au retour sur la fonction précédemment occupée ou sur la fonction la plus proche de son domicile - notion dont le sens dans le cadre de la magistrature est délicat à saisir - pose des difficultés de gestion très importantes compte tenu de l'occupation de ces postes à la date du retour. Il est en effet inconcevable de laisser de tels postes inoccupés pendant toute la durée du congé parental.

d) Une nouvelle obligation de mobilité statutaire trop restrictive

L'article 27 de la loi organique n° 2007-287 du 5 mars 2007 a introduit un article 76-4 dans l'ordonnance n°58-1270 du 22 décembre 1958. Cet article dispose que « pour accéder aux emplois placés hors hiérarchie, les magistrats doivent accomplir, après au moins quatre années de services effectifs dans le corps judiciaire, une période dite de mobilité statutaire au cours de laquelle ils ne peuvent exercer de fonction d'ordre juridictionnel ».

Ces nouvelles dispositions sont applicables aux magistrats nommés dans leur premier poste à compter du 1 er juin 2007, date d'entrée en vigueur de la loi organique, lesquels pourront accomplir leur période de mobilité à compter de septembre 2011, exceptés ceux justifiant de sept années au moins d'activité professionnelle avant leur entrée dans le corps judiciaire.

Ainsi que le démontrent les éléments ci-après, trois limitations posées par ce texte sont apparues inadaptées aux contraintes et enjeux d'une telle mobilité :

La limitation des fonctions dans lesquelles il est possible d'effectuer la mobilité statutaire :

La mobilité statutaire peut être accomplie :

- auprès d'une administration française ou de tout autre organisme de droit public français,

- auprès d'une entreprise publique ou privée ou d'une personne morale de droit privé assurant des missions d'intérêt général,

- auprès d'une institution ou d'un service de l'union européenne, d'un organisme qui lui est rattaché, d'une organisation internationale ou d'une administration d'un état étranger.

Une grande partie des détachements (ou plus rarement de mises à disposition) de magistrats s'effectuent actuellement :

1°) au sein de juridictions internationales : mission EULEX-KOSOVO, chambres des recours de l'office européen des brevets à Munich, Cour de justice de l'union européenne et Tribunal de l'union européenne, Cour pénale internationale, Tribunal pénal pour l'Ex-Yougoslavie, Tribunal spécial pour le Liban, Tribunal spécial pour le Cambodge. Ces affectations représentent en l'état plus de 20 postes ( auxquels s'ajoutent ceux au sein des juridictions de la Principauté de Monaco, soit 17 postes) ;

2°) au sein des juridictions administratives et financières : Conseil d'Etat, tribunaux administratifs et cours administratives d'appel, cour des comptes et chambres régionales des comptes. Ces affectations représentent environ 50 postes actuellement occupés dans le cadre d'un détachement (29 dans les tribunaux administratifs et cours administratives d'appel, 16 au sein du Conseil d'Etat, 3 à la Cour des comptes, 1 au sein d'une chambre régionale des comptes, 3 à la commission nationale du droit d'asile).

Outre le fait d'exclure de la mobilité statutaire une proportion significative d'emplois occupés hors du corps judiciaire, cette restriction ne correspond pas à la réalité du dépaysement qu'ils représentent pour les magistrats de l'ordre judiciaire, soit par la nature du contentieux traité, soit par l'environnement de travail dans lequel ils s'inscrivent.

Il importe enfin de souligner que ces postes représentent l'essentiel des offres de mobilité en régions, qui sont largement sous-représentées par comparaison avec les possibilités de mobilité existant en Ile de France.

La durée limitée à un an renouvelable une fois

La durée de la période de mobilité statutaire est actuellement d'un an renouvelable une fois. Au terme de cette période, ils sont réintégrés de droit dans le corps judiciaire sur l'emploi qu'ils occupaient à leur départ.

Par l'adaptation qu'elles requièrent, les fonctions occupées en mobilité externe ne peuvent donner lieu à une affectation à un certain niveau de responsabilité que si elles s'inscrivent dans une durée supérieure à un an. Les démarches prospectives entreprises auprès d'organismes susceptibles d'accueillir des magistrats ont confirmé cette nécessité d'étendre la durée de la mobilité statutaire, au regard de l'investissement de l'organisme d'accueil en termes de formation et d'intégration au sein d'un service.

Par ailleurs, cette durée d'un an s'avère peu adaptée à la longueur de la procédure de nomination des magistrats.

Le fait que la mobilité effectuée dans le cadre d'une disponibilité ne soit pas assimilable à des services effectifs dans le corps judiciaire

Lorsqu'elle est accomplie dans le secteur privé, la mobilité statutaire ne peut s'effectuer que sous le régime de la disponibilité. Toutefois, à défaut de toute précision en ce sens, les magistrats placés dans cette position pour convenances personnelles (ce qui serait le cadre juridique applicable à une demande de disponibilité formée aux fins d'occuper un emploi dans le secteur privé) sont privés pendant la durée de cette mesure de leur droit à l'avancement et de tous les avantages s'attachant à la notion de services effectifs (retraite notamment), ce qui constitue un frein important au développement de ce type particulier de mobilité.

Or la mobilité vers le secteur privé, qui concerne actuellement une proportion non négligeable des emplois occupés par des magistrats à l'extérieur de leur corps, est un aspect essentiel de l'ouverture souhaitée par les parlementaires lors de l'adoption de ce texte. Il apparaît donc opportun et conforme à l'esprit de la réforme de 2007 que la mobilité effectuée dans le cadre d'une disponibilité ne pénalise pas le déroulement de carrière.

Ainsi, actuellement, plus de 40 magistrats sont en position de disponibilité pour occuper une fonction autre que juridictionnelle, pour la plupart d'entre eux dans le secteur privé.

Il importe enfin, compte tenu du régime particulier de la réintégration des magistrats effectuant une mobilité statutaire et des droits qu'elle confère à un accès aux emplois classés hors hiérarchie, de préciser dans l'acte de placement dans cette position que celle-ci est régie par les dispositions de l'article 76-4 de l'ordonnance statutaire. Il est souligné s'agissant de la mobilité des corps issus de l'ENA que les propositions de postes diffusés invitent les candidats à préciser s'ils souhaitent occuper l'emploi concerné au titre de la mobilité statutaire, laquelle est donc bien distinguée de la mobilité dite « classique » sans limitation de durée et droit à réintégration.

1.3.2. Des dispositifs statutaires existants inadaptés ou incomplets

a) Des dispositifs statutaires existants inadaptés

• une obligation de formation continue pouvant être davantage orientée vers l'apprentissage de la pratique

L'article 14 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 prévoit que l'Ecole nationale de la magistrature (ci-après ENM) assure la formation professionnelle des auditeurs de justice, la formation continue des magistrats, la formation des futurs magistrats d'Etat étrangers ainsi que l'information et le perfectionnement des magistrats des Etats étrangers. Il renvoie à un décret - il s'agit du décret n° 72-355 du 4 mai 1972 relatif à l'Ecole nationale de la magistrature - le soin de fixer l'organisation et les conditions de fonctionnement de l'Ecole.

En application des dispositions de l'article 1 er -1 de ce texte, dans sa rédaction résultant du décret n° 2008-1551 du 31 décembre 2008, l'Ecole a pour missions « la formation initiale et continue des magistrats de l'ordre judiciaire français », « la formation de personnes n'appartenant pas au corps judiciaire et amenées à exercer, dans l'ordre judiciaire, soit des fonctions juridictionnelles [telles que les juges de proximité, les juges consulaires], soit celles de délégués du procureur de la République, de médiateurs judiciaires ou de conciliateurs judiciaires », « la formation initiale et continue des magistrats et futurs magistrats d'Etats étrangers ». Outre cette mission pédagogique, cet article attribue à l'Ecole des missions de « coopération européenne et internationale, notamment par la diffusion des connaissances juridiques et judiciaires et le développement des systèmes judiciaires étrangers » et de « recherche, notamment dans le domaine des pratiques judiciaires comparées ». Conformément à l'article 51-3 de ce même décret, certaines actions de formation sont ouvertes à d'autres professions qui collaborent à l'activité judiciaire (avocats, policiers, etc.).

L'article 51 ajoute que « le programme annuel des différentes actions nationales de formation continue proposées aux magistrats est arrêté par le conseil d'administration sur proposition du directeur de l'Ecole nationale de la magistrature » et que « des actions de formation continue déconcentrée peuvent être organisées à l'intention des magistrats d'une ou plusieurs juridictions d'un ressort de cour d'appel et des magistrats de la Cour de cassation ». La formation continue se décline donc sous forme d'actions de formation continue nationale et de formation continue déconcentrée au sein des cours d'appel.

L'offre de formation continue nationale comporte 665 actions au catalogue de l'ENM en 2010 (sessions, cycles, stages collectifs et individuels) pour 15 282 places.

Un effort particulier est mené en direction des formations concernant les fonctions d'encadrement. Ainsi sont mis en place au cours de l'année 2011, d'une part, un Cycle supérieur d'administration de la justice (C.S.A.J.) consistant en une formation professionnelle préparatoire à des fonctions d'encadrement, et d'autre part, une formation des chefs de juridiction et de cour obligatoire après nomination. Le CSAJ est une formation associant divers partenaires, dont l'Institut national des hautes études de la sécurité et de la justice (INHESJ) et l'ENA ; il prend la forme d'un cycle annuel de trois jours par mois sur une période de dix mois, combinant les enseignements sous forme de tables rondes, de débats ou de conférences, les visites d'étude et un travail de recherche sur un thème spécifique d'intérêt judiciaire qui sera réalisé au cours de l'année en groupes d'études. Elle concerne une quarantaine de magistrats du premier ou du second grade ayant au moins cinq ans d'ancienneté. Une formation à la technique de l'évaluation est également mise en oeuvre.

Pour remplir sa mission d'accompagnement au changement lié à une réforme, l'ENM a développé à la suite de la réforme introduisant la question prioritaire de constitutionnalité une offre de formation variée et complémentaire, permettant de concerner le plus grand nombre de magistrats : création d'un site intranet de « e-training », élaboration en partenariat avec le Conseil national des barreaux et le Conseil constitutionnel d'un DVD distribué aux juridictions, organisation d'une session nationale et de sessions déconcentrées de formation s'appuyant sur les coordonnateurs régionaux de formation.

En 2010, 6469 magistrats, soit 80% du corps, se sont inscrits pour suivre au moins une action de formation continue, soit un taux d'augmentation de 45% par rapport à 2007.

Le coût total, fonctionnement et personnel compris, de la formation continue en 2010 était de 3 804 498 € contre 2 999 888 euros en 2009.

Cette formation continue - qui ne constituait jusqu'alors qu'un droit - est devenue une obligation pour les magistrats en vertu de l'article 1 er de la loi organique du 5 mars 2007.

L'article 50 du décret du 4 mai 1972 a été modifié en conséquence. Les références au droit à la formation ont été remplacées par la mention d'une obligation de formation, dont la durée minimale est fixée à cinq jours par an. Un troisième alinéa a été ajouté afin de prévoir l'obligation de suivre, dans les deux mois qui suivent un changement de fonction, la formation à la prise de fonctions correspondante, lorsque l'intéressé n'a jamais exercé auparavant les fonctions auxquelles il est nommé.

En complément de ce texte réglementaire, l'article 126 du règlement intérieur de l'Ecole, tel qu'il a été adopté par le conseil d'administration le 25 mars 2010, précise que cette formation au changement de fonction, d'une durée totale de vingt jours, comprend une formation théorique de dix jours dispensée par l'Ecole et un stage pratique de dix jours effectué dans un tribunal de la cour d'affectation, dont la durée peut être porté à quinze jours à la demande du magistrat. Lorsque le magistrat a précédemment exercé, au cours de sa carrière, la fonction sur laquelle il est nommé, il peut bénéficier de la seule formation théorique.

En 2009, deuxième année de la généralisation de la formation continue et première année de mise en oeuvre de l'obligation de suivre une formation à l'occasion d'un changement de fonction, l'activité de formation de l'Ecole a connu une progression significative, l'évolution budgétaire par rapport à 2008 restant toutefois modérée.

En effet, le nombre d'actions proposé a fortement progressé (958 en 2009, 768 en 2008 contre 660 en 2007 9 ( * ) ) ainsi que le nombre de participants (10 149 en 2009, 9 728 en 2008 contre 7 053 en 2007), qui inclut ceux des sessions de formation au changement de fonction (700 en 2010, 588 en 2009 et 453 en 2008), alors que les dépenses ont légèrement progressé (2 999 888 € en 2009 contre 2 456 496 € en 2008).

Le principe d'une formation spécifique pour les magistrats nommés à des fonctions qu'ils n'ont jamais exercées auparavant est unanimement considéré comme utile et nécessaire, tant par les magistrats eux-mêmes que par leur hiérarchie, et l'évaluation de cette formation est largement positive. Ainsi, en 2010, sur les 862 magistrats concernés par une formation au changement de fonction, 587 d'entre eux ont participé à l'une des actions de formation programmées dans ce domaine.

Lors du stage pratique - qui se situe opportunément après les enseignements théoriques -, le magistrat peut uniquement apporter son concours aux travaux préparatoires réalisés par les magistrats dans l'exercice de leurs attributions. En l'état, ils ne peuvent exercer que les missions dévolues aux assistants de justice par le décret n° 2008-1159 du 10 novembre 2008, à savoir apporter leur concours aux travaux préparatoires réalisés pour l'exercice de leurs attributions par les magistrats. Ils ont donc moins de compétence que les auditeurs de justice lors de leurs stages en juridiction (article 19 de l'ordonnance du 22 décembre 1958).

Or, la durée de ce stage a été déterminée de manière à permettre aux intéressés d'appréhender l'ensemble de leurs nouvelles missions juridictionnelles.

Ce stage présenterait davantage d'intérêt si les intéressés pouvaient accomplir des actes juridictionnels, ce que le statut n'autorise pas à l'heure actuelle. Tant les magistrats concernés que les chefs de juridiction et de cour qui les accueillent le souhaitent.

la création du comité médical national et les difficultés de mise en oeuvre

Ainsi que rappelé supra ( cf. 1.1), si les magistrats judiciaires ont un statut spécifique, ce texte ne contient pas l'ensemble des dispositions statutaires qui leur sont applicables et renvoient notamment quant aux positions administratives ou aux congés, aux dispositions du statut général des fonctionnaires qui ne sont pas contraires aux règles statutaires du corps judiciaire (article 68 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 précitée).

Ainsi, s'agissant des congés de maladie et des comportements pathologiques, il convient de se référer à :

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat,

- au décret n° 86-442 du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime des congés de maladie des fonctionnaires,

- au décret n° 87-831 du 5 octobre 1987 relatif à l'organisation des comités médicaux pour les membres du Conseil d'Etat et les magistrats de l'ordre judiciaire.

Hors congés ordinaires, ces dispositions concernaient au 1 er janvier 2011 20 magistrats, 12 étaient placés en congé longue durée et 8 en congé longue maladie.

En 2008, il y a eu 4 retours de congé longue durée pour 10 départs et 12 retours de congé longue maladie pour 14 départs. En 2009, on comptait 9 retours de congé longue durée pour 14 départs et 11 retours de congé longue maladie pour 22 départs. En 2010, il n'y a eu que 3 retours de congé longue durée pour 5 départs et 10 retours de congé longue maladie pour 20 départs. Les départs en congé longue durée ou en congé longue maladie sont donc largement supérieurs aux retour.

La question du traitement des magistrats en congé longue durée ou en congé longue maladie n'est donc pas seulement théorique.

Le dispositif prévu par le statut général des fonctionnaires, applicable aux magistrats, est apparu, dans certains cas, comme insuffisamment adapté à la particularité du corps judiciaire.

En effet, les chefs de cour ne pouvaient pas être entendus par les comités médicaux et appeler leur attention sur les spécificités de l'institution judiciaire.

Par ailleurs, sauf à introduire en parallèle une procédure disciplinaire, les magistrats restaient en fonction, en attente de la décision sur leur état de santé qui pouvait intervenir plusieurs mois après la saisine initiale (la durée d'instruction des dossiers était rarement inférieure à deux mois et pouvait excéder six mois).

Enfin, il n'était pas rare que les solutions préconisées par les comités médicaux, telle que la reprise d'activité, par exemple en mi-temps thérapeutique, voire la réintégration, soient inadaptées par rapport aux responsabilités très spécifiques des magistrats.

Ce sont ces raisons pour lesquelles, lors de l'examen en 2007 du projet de loi organique relatif au recrutement, à la formation et à la responsabilité des magistrats, le législateur organique a souhaité créer, par voie d'amendement parlementaire, un comité médical national propre aux membres du corps judiciaire, qui se substituerait aux comités médicaux départementaux communs aux fonctionnaires et aux magistrats pour les cas, les plus sensibles, où le congé est sollicité par le garde des sceaux. Cette loi organique a également introduit une procédure spécifique permettant la suspension provisoire de l'exercice des fonctions, en raison de la gravité du trouble occasionné par l'état pathologique du magistrat concerné.

La loi organique du 5 mars 2007 précitée a donc rétabli dans l'ordonnance du 22 décembre 1958 un article 69 qui prévoit que lorsque l'état de santé d'un magistrat apparaît incompatible avec l'exercice de ses fonctions, le garde des sceaux, ministre de la justice, saisit le comité médical national en vue de l'octroi d'un congé de maladie.

Dans l'attente de l'avis du comité médical, il peut suspendre l'intéressé, après avis conforme de la formation compétente du Conseil supérieur de la magistrature.

Si, à l'expiration d'un délai de six mois à compter de la suspension, le comité médical ne s'est pas prononcé, cette mesure cesse de produire ses effets.

Il est renvoyé à un décret en Conseil d'Etat le soin de définir l'organisation et le fonctionnement du comité médical national.

Les concertations interministérielles engagées pour l'élaboration du décret d'application de cette disposition ont mis en évidence l'imprécision de cet article s'agissant de la nature des congés de maladie en vue desquels le garde des sceaux peut saisir ce nouveau comité. En effet, l'article 69 n'évoque que le congé de maladie qui, dans l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 précitée et ses dispositions d'application, est distingué du congé de longue maladie et du congé longue durée. Or, le placement d'office en congé en raison de l'inaptitude physique d'un agent concerne avant tout ces deux dernières catégories. Il est donc nécessaire qu'un texte précise que le comité médical national est compétent pour ces deux catégories de congés de maladie. En partant du principe que le terme de congé de maladie employé à l'article 69 pouvait avoir un sens générique et désigner l'ensemble des congés pour raisons de santé dont peuvent bénéficier les fonctionnaires, il a pu être envisagé de préciser la nature des congés de maladie dans le décret d'application. Toutefois, l'ambiguïté de la formulation de l'article 69 fait naître un risque trop important d'annulation de ce décret, de sorte que la modification de cet article apparaît comme une solution plus sûre juridiquement.

Par ailleurs, est également apparue une difficulté liée à l'absence de toute mention d'une procédure d'appel dans l'article 69. Il serait en effet paradoxal que les magistrats qui peuvent actuellement contester, au même titre que les fonctionnaires, l'avis du comité médical en application l'article 9 du décret du 14 mars 1986 précité, ne puissent pas le faire s'agissant de l'avis rendu par le nouveau comité médical national, dont l'instauration visait à offrir plus de garanties aux magistrats en prenant davantage en compte la spécificité de leurs fonctions. Il est donc nécessaire d'instituer la même garantie dans le nouveau dispositif, d'autant plus que cette procédure ad hoc concerne les demandes de placement en congé d'office.

Or, le principe de cette garantie relève de la loi organique (cf. supra 1.1). En effet, dès lors que l'existence d'un comité médical national propre aux magistrats est consacrée par l'ordonnance portant loi organique du 22 décembre 1958, l'existence d'un comité chargé de réformer, le cas échéant, ses avis, doit être prévu par le même niveau de norme, d'autant plus que cette nouvelle instance doit aussi être propre aux magistrats pour conserver l'apport de la réforme de 2007. En tout état de cause, en bornant le rôle du décret d'application de l'article 69 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 à la définition de l'organisation et du fonctionnement du comité médical national, le législateur organique ne permet pas au pouvoir réglementaire de créer, par décret, une procédure d'appel particulière.

Ces raisons conduisent également à écarter la solution qui aurait pu consister à ce que le décret d'application renvoie au comité médical supérieur prévu par l'article 8 du décret n° 86-442 du 14 mars 1986 les contestations relatives aux avis formulés par le comité médical national. Outre que cette solution n'apparaît pas possible juridiquement, elle pose d'autres difficultés liées notamment à la nécessité de modifier ce décret du 14 mars 1986 pour y prévoir expressément la possibilité, pour le comité médical supérieur, de délibérer sur les contestations portant sur les avis rendus par le comité médical national. Surtout, elle reviendrait à soumettre la contestation de l'avis du comité médical national créé par l'article 69, propre aux magistrats, à un comité médical supérieur compétent pour l'ensemble des fonctionnaires, faisant ainsi perdre le principal bénéfice attendu de l'article 69 par le législateur organique, à savoir l'existence d'une instance médicale spécifique aux magistrats, capable de prendre en compte la particularité de leurs fonctions.

Ainsi, une modification sur ce point de l'article 69 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 paraît également nécessaire afin de prévoir la création d'un comité médical national d'appel, qui serait spécifique aux magistrats.

la durée inadaptée des fonctions de juge de proximité

La juridiction de proximité a été créée par la loi d'orientation et de programmation pour la justice du 9 septembre 2002 ; les règles statutaires qui lui sont applicables ont été prévues par la loi organique n° 2003-153 du 27 février 2003 qui a inséré un titre intitulé « Des juges de proximité » dans l'ordonnance statutaire. Dans sa décision n° 2003-466 DC du 20 février 2003, le Conseil constitutionnel a en effet considéré que dans la mesure où les juges de proximité se voient confier des fonctions judiciaires, leur statut ne peut être que de caractère organique, sans que pour autant ils fassent partie du corps judiciaire. Des garanties de nature à satisfaire au principe d'indépendance, qui est indissociable de l'exercice des fonctions judiciaires, doivent être prévues par le législateur. Parmi ces garanties, la durée du mandat de juge de proximité est un élément déterminant dans l'appréciation de la constitutionnalité du dispositif. L'article 41-19 de l'ordonnance statutaire prévoit qu'ils sont nommés pour une durée de sept ans non renouvelable.

A ce jour, 622 juges de proximité sont en fonction.

91 vont arriver au terme de leur mandat d'ici le 31 décembre 2011. Ce sera le cas l'an prochain de 175 juges de proximité. En 2013, environ 89 juges de proximité termineront leurs fonctions.

Pour les remplacer, 175 personnes sont actuellement en stage probatoire 10 ( * ) .

La chancellerie rencontre actuellement de réelles difficultés pour pourvoir les postes de juges de proximité.

En effet, sur 306 juridictions de proximité, 35 ne disposent pas à l'heure actuelle de juge de proximité.

Or, le nombre de candidats utiles diminue sensiblement dans certaines cours ou dans certains tribunaux.

En outre, l'exigence de qualité dans le recrutement a été fortement renforcée ces dernières années, tant dans les avis donnés par les chefs de cour, que dans les propositions de nomination de la chancellerie et du Conseil supérieur de la magistrature.

Par ailleurs, depuis 2003, le Conseil supérieur de la magistrature a officialisé 169 démissions de juges de proximité, dont 39 de la part de juges de proximité qui n'avaient encore pas pris leurs fonctions.

Un allongement de la durée d'exercice des fonctions avant la démission est constaté. Si dans les années 2004, 2005 et 2006, les juges de proximité démissionnaient dans un délai relativement proche par rapport à leur prise de fonctions (moins de 1,4 an en moyenne), ils le font depuis 2007 généralement après plus de quatre années de mandat. Certains juges de proximité cessent même leur activité quelques mois seulement avant la fin de leur mandat, pour des raisons médicales.

Dans la très grande majorité des cas, les juges de proximité qui démissionnent invoquent des raisons personnelles :

- la difficulté à assumer parallèlement à leurs fonctions de juge de proximité une autre activité professionnelle (pour 46,5% d'entre eux),

- l'intégration dans la magistrature, qui est un motif croissant des démissions (lors du prochain CSM, sur 10 demandes de démission, 4 sont motivées par l'intégration dans le corps judiciaire),

- des problèmes de santé.

L'âge moyen des juges de proximité est de 58,4 ans (63 ans pour les hommes, 54 ans pour les femmes).

Ainsi, la durée des fonctions de juge de proximité, actuellement fixée à sept ans non renouvelable, apparaît doublement inadaptée :

- dans certains cas, elle est trop longue, ce qui explique le nombre de démissions intervenant après quatre ans de fonctions,

- dans d'autres cas, elle est trop courte, certains juges exprimant leur souhait, relayé par l'Association nationale des juges de proximité, de continuer à exercer leurs fonctions, au regard notamment des efforts de formation fournis tant en formation initiale qu'en formation continue et de leur engagement professionnel.

Les dispositions relatives à la durée du mandat de juge de proximité doivent donc être modifiées afin de renforcer l'attractivité de ces fonctions, qui sont désormais totalement intégrées dans le paysage judiciaire français et dont l'apport est devenu indispensable dans le fonctionnement des juridictions.

b) Des dispositifs statutaires existants incomplets, dans certains cas, pour prévenir les conflits d'intérêts

Les règles existantes pour garantir les conflits d'intérêts

Afin de garantir l'indépendance, et par là-même l'impartialité des magistrats, un certain nombre de règles d'incompatibilités sont posées par l'ordonnance statutaire. Ces règles visent essentiellement à éviter que les magistrats se trouvent dans des situations de conflits d'intérêts qui risqueraient de compromettre leur liberté de jugement.

* Un régime d'incompatibilités fixé par l'ordonnance statutaire

- L'encadrement de l'exercice concomitant des fonctions de magistrat avec une autre activité

En principe, l'exercice des fonctions de magistrat est incompatible avec l'exercice de toutes fonctions publiques et de toute autre activité professionnelle ou salariée.

Cette règle, prévue à l'article 8 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 précitée, concerne seulement les magistrats de carrière ; elle ne s'applique pas aux magistrats recrutés à titre temporaire et exerçant leurs fonctions à temps partiel.

Des dérogations individuelles peuvent toutefois être accordées, par décision des chefs de cour, pour donner des enseignements ressortissant à leur compétence ou pour exercer des fonctions ou activités qui ne seraient pas de nature à porter atteinte à la dignité du magistrat et à son indépendance, à l'exception des activités d'arbitrage, sous réserve des cas prévus par les dispositions législatives en vigueur.

Les magistrats peuvent en revanche, sans autorisation préalable, se livrer à des travaux scientifiques, littéraires ou artistiques.

Par ailleurs, les magistrats en activité ne peuvent pas exercer dans le même temps un certain nombre de mandats électoraux (mandat parlementaire, mandat de conseiller régional, général, municipal notamment, article 9 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 précitée), ni occuper un emploi au service des collectivités d'outre-mer lorsqu'ils ont exercé leurs fonctions sur le territoire de la collectivité intéressée depuis moins de deux ans (article 9-1-1 de l'ordonnance du 22 décembre 1958, introduit par la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française et étendu par la loi organique du 21 février 2007 aux collectivités d'outre-mer de Saint-Barthélémy, de Saint-Martin, de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon et à leurs établissements publics).

En outre, lorsque le magistrat est marié avec un député ou un sénateur, il ne peut exercer ou rester en fonctions dans une juridiction dans le ressort de laquelle se trouve tout ou partie du département concerné (article 9 de l'ordonnance du 22 décembre 1958).

- La limitation de l'exercice d'activités par un magistrat qui n'exerce pas ou plus ses fonctions (disponibilité ou cessation définitive des fonctions)

L'article 9-2 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 précitée, créé par la loi organique n° 94-101 du 5 février 1994, impose au magistrat en disponibilité ou qui demande à l'être, lorsqu'il se propose d'exercer une activité privée, d'en informer préalablement le garde des sceaux, ministre de la justice. La même obligation s'applique pendant cinq ans au magistrat ayant définitivement cessé ses fonctions. Il est expressément prévu qu'en cas de non respect de ses stipulations, le magistrat peut faire l'objet du retrait de son honorariat et, le cas échéant, de retenues sur pension.

Le garde des sceaux, ministre de la justice, peut s'opposer à l'exercice de cette activité lorsqu'il estime qu'elle est contraire à l'honneur ou à la probité, ou que, par sa nature ou ses conditions d'exercice, cette activité compromettrait le fonctionnement normal de la justice ou porterait le discrédit sur les fonctions de magistrat.

La loi organique n° 2007-287 du 5 mars 2007 précitée a introduit un article 20-1 dans la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature et a complété l'article 72 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 afin d'octroyer au Conseil supérieur de la magistrature un pouvoir d'avis en matière de demande de mise en position de détachement ou de disponibilité « émise par un magistrat pour exercer une activité libérale ou une activité lucrative, salariée ou non, dans une entreprise ou un organisme privé ». Cet avis porte notamment sur « la compatibilité des fonctions envisagées par le magistrat avec les fonctions qu'il a occupées au cours des trois dernières années ».

Par la suite, le décret n° 2008-818 du 21 août 2008 a adapté les dispositions du décret n° 93-21 du 7 janvier 1993 précité afin de tenir compte de ce pouvoir d'avis.

L'article 36 de ce texte a été modifié en conséquence ; il concerne désormais seulement « le magistrat ayant définitivement cessé ses fonctions depuis moins de cinq ans ou le magistrat en disponibilité » ; l'article 36-1, créé à cette occasion, s'applique, lui, au « magistrat qui demande à être placé en position de détachement ou de disponibilité ».

Dans les deux cas, les formalités à respecter sont identiques ; seul le délai dans lequel les pièces doivent être produites diffère (l'article 36 prévoit un délai de deux mois et l'article 36-1, un délai de quatre mois pour tenir compte de l'intervention du Conseil supérieur de la magistrature). Ainsi, les magistrats doivent faire parvenir au garde des sceaux une déclaration qui doit comporter mention du nom de l'employeur éventuel, de la nature de l'activité, des fonctions qui seront exercées ainsi que le lieu de leur exercice et qui doit être accompagnée des pièces justificatives nécessaires.

- Le cas particulier des professions juridiques

Conformément aux dispositions de l'article 9-1 de l'ordonnance statutaire, les magistrats et anciens magistrats ne peuvent exercer la profession d'avocat, d'avoué, de notaire, d'huissier de justice, de greffier de tribunal de commerce, d'administrateur judiciaire ou de mandataire-liquidateur ou travailler au service d'un membre de ces professions dans le ressort d'une juridiction où ils ont exercé leurs fonctions depuis moins de cinq ans, dispositions qui ne s'appliquent pas aux magistrats de la Cour de cassation. L'article 32 ajoute que nul ne peut être nommé dans le ressort d'un tribunal de grande instance ou d'un tribunal de première instance où il aura exercé depuis moins de cinq ans l'une de ces professions.

- Des incompatibilités électorales restrictives

L'article 9, alinéa 4, de l'ordonnance statutaire prévoit un délai de cinq ans pendant lequel un magistrat qui a exercé une fonction publique élective visée à cet article (notamment un mandat au Parlement, au Parlement européen et au Conseil économique et social) ne peut pas être nommé magistrat ni le demeurer dans une juridiction située dans le ressort où cette fonction élective a été exercée. Un délai de trois ans est également prévu lorsque le magistrat a fait acte de candidature à l'un de ces mandats, à l'exception de celui de représentant au Parlement européen.

* Des règles procédurales pour garantir l'impartialité du juge

Le principe est que le juge qui estime ne pas être en mesure de se prononcer en toute impartialité doit s'abstenir (article L111-7 du code de l'organisation judiciaire, articles 339 et 340 du code de procédure civile.

L'impartialité du juge peut également être remise en cause par les parties à un procès, par les procédures de récusation et de renvoi, notamment pour suspicion légitime.

Dans le souci notamment d'éviter que la demande de récusation ne devienne un moyen dilatoire voire un outil de déstabilisation de la juridiction, les causes possibles de récusation sont déterminés limitativement par la loi (article L.111-6 du code de l'organisation judiciaire, articles 342 à 355 du code de procédure civile et articles 668 et 669 du code de procédure pénale). Toutefois, la Cour de cassation a jugé à plusieurs reprises, au visa de l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, que cette liste de cas « n'épuise pas nécessairement l'exigence d'impartialité requise de toute juridiction ».

Les hypothèses de renvoi sont prévues par l'article L111-8 du code de l'organisation judiciaire, tant en matière civile (cas de suspicion légitime, de sûreté publique ou s'il existe des causes de récusation contre plusieurs juges), qu'en matière pénale. Le renvoi pour cause de suspicion légitime, régi par les articles 356 à 364 du code de procédure civile et par l'article 662 du code de procédure pénale, vise la juridiction dans son entier. Les articles 43 (faits mettant en cause, comme auteur ou comme victime, un magistrat, un avocat, un officier public ou ministériel, un militaire de la gendarmerie nationale, un fonctionnaire de la police nationale, des douanes ou de l'administration pénitentiaire ou toute autre personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public qui est habituellement, de par ses fonctions ou sa mission, en relation avec les magistrats ou fonctionnaires de la juridiction) et 665 (renvoi dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice) du code de procédure pénale permettent le « dépaysement » d'un dossier notamment lorsque l'une des parties peut être suspectée de conflits d'intérêts ou d'abus de pouvoirs.

Dans son avis du 11 mars 2004, le Conseil supérieur de la magistrature a relevé une tendance à l'augmentation du nombre de demandes de récusation et de renvoi pour cause de suspicion légitime.

A côté de ces procédures de renvoi et de récusation, des interdictions sont également édictées. Ainsi, l'article L111-9 du code de l'organisation judiciaire interdit au juge qui a connu d'une affaire en premier ressort ou en dernier ressort de faire partie de la formation de jugement du second degré ou de la Cour de cassation.

Les articles L111-10 et L111-11 de ce même code énonce que les conjoints, les partenaires liés pat un pacte civil de solidarité, les parents et alliés jusqu'au troisième degré inclus, ne peuvent, sauf dispense, être simultanément membres d'un même tribunal ou d'une même cour en quelque qualité que ce soit et il leur est en tout état de cause interdit de siéger dans la même cause s'il est fait droit à leur demande de dispense.

Des contrôles et des sanctions rigoureux des situations de conflits d'intérêts

* des contrôles d'une portée variable réalisés par la chancellerie et le Conseil supérieur de la magistrature en matière de demande de mise en position de détachement ou de disponibilité

Ainsi qu'il a été dit précédemment, le contrôle qui peut être réalisé par la Chancellerie s'exerce principalement en matière de demande de mise en position de détachement ou de disponibilité. Le Conseil supérieur de la magistrature contrôle celles qui sont « émises par un magistrat pour exercer une activité libérale ou une activité lucrative, salariée ou non, dans une entreprise ou un organisme privé » au regard de leur compatibilité avec les fonctions occupées au cours des trois dernières années.

La grande majorité des magistrats exerçant une activité sur des fonctions non juridictionnelles le font dans le cadre de la disponibilité pour convenances personnelles, c'est-à-dire sur le fondement de l'article 44b) du décret n° 85-986 du 16 septembre 1985.

Quatre magistrats exercent des fonctions dans le cadre d'un autre fondement juridique qui est le suivi de conjoint (art 47-2 du même décret). 44 magistrats occupent une activité dans le cadre d'une disponibilité sur un total de 84 magistrats en disponibilité (tout fondement juridique confondu).

Des enquêtes peuvent être préalablement diligentées par la chancellerie, en fonction notamment de la nature des activités envisagées et de la notoriété de l'organisme d'accueil.

S'agissant des postes proposés dans des entreprises dont le magistrat aurait pu avoir à connaître la situation dans le cadre de ses fonctions juridictionnelles, le plus souvent le magistrat atteste sur l'honneur ne pas avoir eu à traiter d'affaires ayant trait à l'établissement qui lui propose un contrat de travail. Un courrier du chef de cour peut accompagner cette attestation. Une enquête peut être en sus réalisée par la chancellerie dans certains cas qui peuvent a priori apparaître comme problématiques. A ce jour, aucune des enquêtes diligentées n'a conduit à émettre des réserves sur le principe de mobilité envisagée.

Le Conseil supérieur de la magistrature exerce le droit de regard qui lui est confié par l'ordonnance statutaire. A ce jour, il a émis un avis négatif et a formulé des réserves sur la demande d'une magistrate, alors en disponibilité à l'Autorité des marchés financiers, souhaitant devenir avocate. Ces réserves portaient sur le fait de s'abstenir de traiter de certaines affaires dont elle aurait pu avoir à s'occuper dans le cadre de son détachement.

Dans plusieurs cas, les magistrats placés en disponibilité sollicitent en amont l'avis de la chancellerie sur l'activité qu'ils envisagent d'exercer. Dans ces cas, le contrôle est nécessairement allégé. La portée du contrôle dépend du changement ou non de fondement juridique de la disponibilité.

* des décisions disciplinaires particulièrement strictes

Le Conseil supérieur de la magistrature impose aux magistrats d'observer une « réserve rigoureuse » afin d'éviter que leur impartialité ne puisse être mise en cause en raison de conflit d'intérêts. Les nombreuses décisions et avis rendus par le Conseil en la matière définissent le cadre s'imposant aux magistrats et les sanctions prononcées témoignent de l'importance que revêt l'exigence d'impartialité dans l'exercice des fonctions judiciaires.

- La sanction des situations de conflits d'intérêts sur le fondement du manquement au devoir d'impartialité

Aux termes de l'article 43 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, la faute disciplinaire est définie comme « tout manquement par un magistrat au devoir de son état, à l'honneur, à la délicatesse ou la dignité ».

Le Conseil supérieur de la magistrature fait figurer l'impartialité parmi les devoirs de l'état de magistrat et sanctionne sur ce fondement les agissements des magistrats qui se trouvent pris dans des conflits d'intérêts. Ainsi, le Conseil a-t-il considéré qu'un magistrat, ayant participé " à un réseau d'influence " constitué pour protéger le développement des affaires d'une de ses relations, avait " favorisé aux yeux du public une suspicion de compromission dans l'exercice de la justice, donnant ainsi de l'institution judiciaire une image dégradée de nature à affaiblir la confiance des justiciables dans l'impartialité qu'ils sont en droit d'exiger de leurs juges" (CSM, Siège, 27 juillet 2000).

L'instance disciplinaire se montre particulièrement stricte dans le contrôle du respect de l'obligation d'impartialité des magistrats, dont elle adopte une conception objective, proche de celle définie par la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, en se référant à la notion d'apparence. De plus, le comportement fautif est non seulement apprécié de manière intrinsèque, mais est aussi restitué dans la perspective plus générale de la place de l'institution judiciaire, de sa crédibilité et du respect de son autorité.

Dès lors, au nom du principe d'égalité entre les citoyens et de la confiance légitime que doit inspirer l'institution judiciaire, le magistrat se doit de faire preuve d'une « réserve rigoureuse et éviter tout comportement de nature à entraîner le risque que son impartialité soit mise en doute » (CSM, Siège, 20 juillet 1994). Cette obligation pèse tant sur les magistrats du siège, qui doivent se déporter dès lors qu'ils entretiennent ou ont entretenu des relations suivies avec l'une des parties au litige dont ils sont saisi, que sur les magistrats du parquet qui doivent « s'abstenir de toute intervention dans des procédures lorsque leur action s'analyse en une prise de position subjective, compte tenu de leurs liens avec une partie, ou même lorsque, objectivement, elle ne permet pas d'écarter un doute légitime sur leur attitude, et ne saurait passer pour neutre du point de vue des parties, même si les décisions prises peuvent ne pas être critiquables » (CSM, Parquet, 21 décembre 1994).

Le Conseil supérieur de la magistrature s'est prononcé à plus de vingt reprises en faveur de la sanction de magistrats ayant adopté un comportement incompatible avec le devoir d'impartialité. Il a sanctionné plus de quinze magistrats du siège à l'égard desquels il exerce directement le pouvoir disciplinaire, en application des dispositions de l'article 48 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 précitée. S'agissant des magistrats du parquet, les sanctions ont été prononcées par le garde des sceaux, suivant l'avis du Conseil.

- Les types de comportements sanctionnés

Les comportements que le Conseil supérieur de la magistrature a sanctionnés sur le fondement du manquement au devoir d'impartialité sont très variés.

. L'absence de déport ou l'intervention dans des affaires impliquant des proches ou des relations directes ou indirectes du magistrat

Le Conseil supérieur de la magistrature a statué à plusieurs reprises sur des situations de magistrats ne s'étant pas déportés dans des procédures judiciaires impliquant des proches, voire même de simples relations ( CSM, Siège, 5 mai 2010 ; CSM, Siège, 20 juillet 1994 ; CSM, Parquet, 21 juillet 2009 ) ou étant intervenus ou s'étant saisis d'office de procédures où étaient parties des personnes avec lesquelles ils entretenaient des relations personnelles (CSM, Siège, 2 juillet 1992 ; CSM, Siège 9 juillet 1993). En effet, un magistrat exerçant au sein de la même juridiction depuis plusieurs années doit « veiller avec une rigueur particulière à demeurer étranger à tout ce qui [peut] concerner les intérêts de ses amis ou de ses relations devant ce tribunal » (CSM, Siège, 12 mats 1997). Cette obligation de déport s'impose quelle que soit l'importance des actes juridictionnels à accomplir ( CSM, Siège, 12 mars 1997 ). De même, le Conseil supérieur de la magistrature n'exige pas que l'absence de déport ou l'intervention dans une procédure ait favorisé la situation de la personne ayant motivée l'intervention fautive (CSM, Parquet, 30 mai 1997 ).

. L'intervention dans des procédures judiciaires dans lesquelles le magistrat est personnellement impliqué

Le devoir d'impartialité s'impose également au magistrat vis-à-vis de lui-même et lui interdit d'intervenir dans un litige dans lequel il est partie ou à un intérêt personnel. Ainsi, un magistrat ne peut prendre des actes dans des litiges relatifs à des sociétés commerciales dans lesquelles il a des participations ( CSM, Parquet, 21 décembre 2004 ).

. Les conseils juridiques dispensés ou les démarches effectuées en faveur de relations dans des affaires dont le magistrat est ou est susceptible d'être saisi

Par exemple, le CSM a jugé incompatible avec l'obligation d'impartialité le fait pour un magistrat d'accompagner chez un notaire l'un de ses amis acheteur éventuel d'un terrain, après l'avoir informé de la possibilité de cette transaction alors qu'il était saisi d'une procédure de résiliation de bail rural portant sur cette parcelle et que ne s'étant pas déporté par la suite, il a statué sur cette résiliation (CSM, Siège, 12 mars 1997).

. La désignation par un magistrat dans le cadre des procédures dont il a la charge de proches ou de relations personnelles, en qualité d'expert, de mandataire, de consultant ou d'assesseur

Caractérise ainsi un manquement au devoir d'impartialité le fait de proposer sa compagne comme assesseur de la juridiction correctionnelle que le magistrat préside ( CSM, Siège, 17 février 2010) ou le fait de confier à plusieurs reprises à son épouse le soin d'effectuer les enquêtes sociales dans des affaires dont il était saisi (CSM, Siège, 12 mars 1997) .

- Les sanctions prononcées

Tous les faits dont le Conseil supérieur de la magistrature a considéré qu'ils constituaient un manquement au devoir d'impartialité ont donné lieu à sanction. Les sanctions prononcées sont diverses, s'adaptant à la gravité des manquements constatés et à la personnalité du magistrat. Le CSM a recouru à l'ensemble des sanctions prévues par l'article 45 de l'ordonnance statuaire, qui vont du blâme avec inscription au dossier (cette sanction a remplacé la réprimande avec inscription au dossier à la suite de l'entrée en vigueur de la loi organique n° 2010-830 du 22 juillet 2010 relative à l'application de l'article 65 de la Constitution) à la révocation.

Ainsi, une réprimande avec inscription au dossier a pu être prononcée dans une situation particulière où il n'apparaissait pas que l'intervention du magistrat avait favorisé le sort de la personne de la personne avec laquelle il entretenait des relations personnelles et où il avait cessé ces relations litigieuses à la suite d'une admonestation de son supérieur hiérarchique ( CSM, Parquet, 30 mai 1997 ). Au contraire, lorsque les interventions en faveur de proches sont répétées, ont perduré en dépit des avertissements qui ont pu être donnés par l'autorité hiérarchique ou ont donné lieu à des contreparties, il est mis fin aux fonctions soit par le prononcé d'une mise à la retraite d'office, soit par la révocation (CSM, Parquet, 21 juillet 2009).

* un arsenal répressif particulièrement sévère

Le droit pénal des « conflits d'intérêts » est caractérisé par le délit de prise illégale d'intérêts dans l'exercice des fonctions (article 432-12 du code pénal) et à l'issue des fonctions (article 432-13). S'agissant du délit de prise illégale d'intérêts dans l'exercice des fonctions, sont visées « les personnes dépositaires de l'autorité publique, les personnes chargées d'une mission de service public, et les personnes investies d'un mandat électif public ». Dans certaines hypothèses, les magistrats peuvent donc entrer dans le champ d'application de cette disposition. Même s'il ne s'agit pas d'un juge professionnel, un juge d'un tribunal de commerce qui avait traité un marché pour le compte d'une société en liquidation dont il avait la surveillance comme juge-commissaire et qui avait à cette occasion reçu une commission a ainsi pu être condamné de ce chef sous l'empire de l'ancien code pénal (CA Lyon, 26 juillet 1910). Tel n'est pas le cas de la prise illégale des fonctions à l'issue des fonctions qui concerne les seuls « fonctionnaires ou agents d'une administration publique ».

Les peines prévues par le code pénal sont très lourdes (cinq ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende, sans compter les peines complémentaires d'inéligibilité et d'interdiction d'exercer une fonction publique qui peuvent être prononcées en application de l'article 432-17 du code pénal).

Ainsi, en ce qui concerne les magistrats, à l'instar de l'ensemble de la fonction publique, l'approche des conflits d'intérêts se fait essentiellement sous l'angle des interdictions et des sanctions.

Le rapport Sauvé a démontré le caractère insuffisant d'un tel dispositif et la nécessité que la France se dote d'une politique plus cohérente de prévention contre les conflits d'intérêts. Tels sont l'orientation principale du projet de loi relatif à la déontologie et à la prévention des conflits d'intérêts dans la vie publique et le sens de la disposition que le présent projet de loi organique vise à introduire dans l'ordonnance statutaire.

Avant de recourir à l'arsenal très complet des sanctions pénales et disciplinaires qui encadre l'exercice des fonctions judiciaires, dont la mise en oeuvre peut se révéler pour les intéressés particulièrement contraignante sur le plan personnel, il importe de rappeler explicitement la nécessité de prévenir les conflits d'intérêt et de développer en amont, pour les plus hauts magistrats, un mécanisme de nature à appeler l'attention des intéressés sur les situations dans lesquelles ils sont susceptibles de se trouver en conflits d'intérêts et dont ils ne mesurent pas systématiquement la portée.

L'inscription d'un tel dispositif dans l'ordonnance statutaire apparaît d'autant plus nécessaire que la mobilité statutaire va être mise en oeuvre dans les mois à venir et que la chancellerie mène une politique active de développement des placements en position de détachement et de disponibilité, dans le souci d'ouvrir davantage le corps judiciaire vers l'extérieur.

2. OBJECTIFS

Le projet de loi organique poursuit un double objectif.

2.1. PREMIER OBJECTIF : ÉTENDRE À CERTAINS MAGISTRATS DE L'ORDRE JUDICIAIRE LE RENFORCEMENT DES OBLIGATIONS DE TRANSPARENCE ET LA FORMALISATION DE CERTAINS DES MÉCANISMES DE PRÉVENTION DES CONFLITS D'INTÉRÊTS

Le Gouvernement a présenté au Parlement un projet de loi relatif à la déontologie et à la prévention des conflits d'intérêts de la vie publique, s'inspirant des travaux de la commission de réflexion pour la prévention des conflits d'intérêts dans la vie publique, présidée par M. Jean-Marc Sauvé, Vice-président du Conseil d'Etat, qui a remis son rapport au Président de la République le 26 janvier 2011. Celle-ci préconisait notamment que la France se dote d'une politique plus cohérente de prévention des conflits d'intérêts.

Il est apparu indispensable d'étendre à certains magistrats de l'ordre judiciaire le renforcement des obligations de transparence et la formalisation de certains des mécanismes de prévention des conflits d'intérêts.

Le statut des magistrats relevant, conformément à l'article 64 alinéa 3 de la Constitution, de la loi organique, l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature devait être modifiée.

2.2. SECOND OBJECTIF : AMÉLIORER CERTAINS DISPOSITIFS DE GESTION DE LA CARRIÈRE DES MAGISTRATS.

Les réformes du statut des magistrats, notamment celles intervenues en 2001 et 2007, ont profondément remanié le cadre juridique de la gestion des magistrats et les conditions d'exercice des fonctions judiciaires, afin de renforcer leur indépendance et de préserver la nécessaire confiance des citoyens en l'institution judiciaire.

La mise en oeuvre de certains des mécanismes ainsi créés a toutefois montré la nécessité de les développer et de les affiner ou de réviser certains de leurs aspects qui posent des difficultés d'application.

Le projet de loi organique a pour objet d'apporter ces nécessaires adaptations.

3. LES OPTIONS ENVISAGEABLES

3.1. LA NÉCESSITÉ D'UNE MODIFICATION DE L'ORDONNANCE STATUTAIRE

La nécessité, en l'espèce, d'une intervention du législateur organique est commandée par la Constitution elle-même (cf supra 1.1) et par la nature des dispositions du présent projet de loi organique. Suivant un considérant de principe du Conseil constitutionnel, les règles statutaires applicables aux magistrats doivent se trouver dans la loi organique portant statut des magistrats ; seules les modalités d'application de ces règles peuvent être fixés dans des décrets (voir par exemple DC n° 92-305 DC du 21 février 1992).

De nombreuses dispositions du projet de loi organique modifient des dispositions de l'ordonnance statutaire, que le Conseil constitutionnel n'a pas considéré lors de ses contrôles comme relevant de la loi ordinaire. Il en est ainsi des articles 1 er (modification de l'article 3-1 de l'ordonnance statutaire), 3 (modification de l'article 14), 4 (modification de l'article 39), 5 (modification de l'article 41-19), 6 (modification de l'article 69), 7 (modification de l'article 72) et 9 (modification de l'article 76-4).

Le présent projet de loi organique vise en outre à insérer trois nouveaux articles dans l'ordonnance statutaire : l'article 8-1 relatif à la déclaration d'intérêts et les articles 72-1 et 72-2 relatifs au retour de détachement ou de congé parental. Ces articles ont, de par leur objet, vocation à figurer dans l'ordonnance statutaire aux côtés notamment des articles 8 et 9 qui posent des règles d'incompatibilité et de l'article 72 qui régit le détachement.

3.2 LES PRINCIPALES OPTIONS ENVISAGEABLES QUANT AU CONTENU DU TEXTE

3.2.1 Les options visant à limiter les effets non souhaités de certaines règles applicables aux magistrats placés

Le mécanisme des magistrats placés s'est révélé un instrument de gestion efficace, permettant d'apporter un renfort immédiat aux juridictions qui connaissent des difficultés conjoncturelles, liées à la situation de leurs effectifs ou à un surcroît d'activité. Comme cela a été démontré au 1.3.1 a), ce dispositif devait toutefois être adapté afin de limiter les effets pervers relevés, concernant tant les priorités statutaires sur des emplois d'encadrement que la durée maximum d'exercice de ces fonctions.

Sans élargir les possibilités de recours au mécanisme des magistrats placés, le présent projet de loi organique prévoit en premier lieu que la priorité d'affection ne pourra plus porter sur des emplois de premier vice-président, premier vice-président adjoint, procureur de la République adjoint ou premier vice-procureur de la République. Ces emplois du premier grade sont ceux qui, avec les emplois de chefs de juridiction - lesquels sont déjà exclus de la priorité d'affectation des magistrats placés, comportent un huitième échelon dit « B bis », en vertu de l'arrêté du 12 novembre 2010 pris en application de l'article 12 du décret n°93-21 du 7 janvier 1993. Une telle exclusion est nécessaire afin d'éviter que la chancellerie ne soit contrainte de nommer des magistrats ne présentant pas les qualités pour occuper ces emplois d'encadrement intermédiaire qui requièrent des profils particuliers. La restriction de la priorité ainsi effectuée se limite à des emplois peu nombreux et particuliers et ne remet donc nullement en cause le droit des magistrats placés à quitter les fonctions de placés au bout de deux années minimum.

La durée maximum d'exercice des fonctions de magistrat placé sera en outre augmentée. Afin d'assouplir la limitation à six années de la durée d'exercice de ces fonctions récemment rappelée par le Conseil d'Etat (CE 17 février 2010, M. Lombard ), il paraît opportun de prévoir une double limitation : ces fonctions ne pourraient être exercées plus de six années consécutivement et plus de douze années sur l'ensemble de la carrière. Cette augmentation respecte l'équilibre que pourra apprécier le Conseil constitutionnel, lequel pourrait vérifier, comme il l'a fait dans sa décision n° 80-123 DC du 24 octobre 1980, que cette extension ne porte pas atteinte aux garanties dont doivent bénéficier ces magistrats en raison des conditions particulières de leurs affectations. Il convient d'insister sur le fait que cette allongement ne concernera que les magistrats placés qui le souhaitent, puisqu'il n'est pas touché à la possibilité de quitter ce statut au bout de deux puis de six années.

3.2.2 Les options visant à assouplir la priorité d'affectation des conseillers et des avocats généraux référendaires à la Cour de cassation

Il n'était pas question de supprimer ce mécanisme de quota, qui permet à la Cour de Cassation de bénéficier des compétences de ses anciens référendaires.

L'hypothèse de limiter cette priorité aux seules candidatures utiles a été écartée, car elle revenait à vider ce mécanisme de sa portée.

L'option la plus opportune en vue de cet assouplissement s'est révélée être la diminution de la proportion d'anciens référendaires devant être nommés pour chaque nomination de conseillers à la Cour de cassation. La proportion de un sur six est apparue de nature à concilier à la fois les contraintes de nomination pesant sur la chancellerie et le souci que les postes de conseiller ou d'avocat général à la Cour de cassation soient pourvus par des magistrats ayant acquis la technique de la cassation.

3.2.3 Les options visant à faciliter les retours de détachement et de congé parental

Plusieurs options ont été envisagées pour améliorer les retours de détachement, afin d'éviter que les difficultés actuelles constituent un frein à la mobilité.

Option consistant à nommer un magistrat sur un emploi qu'il a refusé, par analogie avec le retour de disponibilité

L'application de ce mécanisme aux magistrats en retour de détachement ne serait pas opportune, compte tenu des spécificités statutaires en matière de nomination (intervention du CSM notamment). Elle irait en outre à l'encontre d'une incitation à la mobilité des magistrats qui craindraient de voir leur retour en juridiction s'effectuer dans de mauvaises conditions.

Il paraît donc préférable de prévoir, pour résoudre les difficultés exposées en première partie de cette étude, une procédure permettant de réintégrer les magistrats de retour de détachement, dans des conditions plus satisfaisantes.

Option consistant à renvoyer aux dispositions relatives à la position hors cadre prévue pour les fonctionnaires

Il convient de rappeler qu'en application de l'article 68 de l'ordonnance statutaire, les dispositions du statut général des fonctionnaires concernant les positions énumérées à l'article 67 s'appliquent aux magistrats, dans la mesure où elles ne sont pas contraires aux règles statutaires du corps judiciaire et sous réserve des dérogations énoncées aux articles suivants.

Or, parmi les positions énumérées par le statut de la magistrature, ne figure pas la position hors cadre qui est prévue par l'article 49 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984. Un fonctionnaire comptant au moins quinze ans de services effectifs civils et militaires et remplissant les conditions pour être détaché auprès d'une administration ou d'une entreprise publique, dans un emploi ne conduisant pas à pension du régime général de retraite, ou détaché auprès d'organismes internationaux, peut en effet être placé, sur sa demande, pour servir dans cette administration ou entreprise ou dans cet organisme.

Dans cette position, le fonctionnaire cesse de bénéficier de ses droits à l'avancement et à la retraite. Il est soumis au régime statutaire et de retraite régissant la fonction qu'il exerce dans cette position.

La mise hors cadre ne peut excéder cinq années mais peut être renouvelée. A l'expiration de la période et en l'absence de renouvellement, la réintégration du fonctionnaire est obligatoirement prononcée, à la première vacance.

Cette position , qui en l'état ne s'applique pas aux magistrats, n'apparaît donc pas pouvoir résoudre les difficultés de gestion évoquées précédemment concernant les retours de détachement. En effet, il conviendrait, d'une part, que les magistrats concernés puissent être placés dans une position d'attente sans qu'ils l'aient expressément demandé, d'autre part, que leur carrière ne s'en trouve en aucun cas affectée et qu'ils continuent donc à bénéficier d'une rémunération, de leurs droits à l'avancement et à la retraite.

Un autre type de position hors cadre existe, pour les préfets (décret n° 64-805 du 29 juillet 1964 fixant les dispositions réglementaires applicables aux préfets). La nomination d'un préfet implique normalement l'affectation à un poste territorial, mais dans la limite de sept postes, des nominations de sous-préfets ou d'administrateurs civils hors cadre sont possibles, pour occuper des emplois supérieurs comportant une mission de service public relevant du gouvernement.

Il n'est pas sans intérêt de rappeler que le statut de préfet ne prévoit que des garanties très limitées en comparaison des autres corps de la fonction publique. Le déroulement de leur carrière dépend largement de l'exécutif qui peut les muter d'une circonscription à l'autre dans la mesure où ils occupent des emplois à la discrétion du gouvernement, les placer hors cadre, les mettre en position de service détaché ou en disponibilité dans l'intérêt du service, en fonction de simples considérations d'opportunité.

A l'évidence, un système inspiré de celui applicable aux préfets ne peut être envisagé pour les magistrats, compte tenu des principes d'indépendance et - pour les magistrats du siège - d'inamovibilité posés par la Constitution. L'idée même d'utiliser l'expression « hors cadre » pourrait susciter certaines réticences du fait du rapprochement qui ne manquerait pas d'être opéré avec les préfets.

Option consistant à créer une position de « retour de détachement »

Il s'agirait de créer une position administrative d'attente de réintégration, dans des hypothèses précises et pour une période limitée après qu'il ait été mis fin au détachement avant le terme initialement prévu.

A l'article 67 de l'ordonnance, serait ainsi ajouté un 6° rédigé de la manière suivante : « 6° En retour de détachement » et un alinéa serait inséré qui prévoirait que dans cette position, le magistrat perçoit une rémunération qui comprend le traitement et les accessoires, c'est-à-dire les primes, qui pourraient être fixées au montant moyen des indemnités de fonction des magistrats du même grade et affectés en juridiction.

Ce dispositif est toutefois dérogatoire au principe de comptabilité publique de la rémunération pour service fait. Il risquerait au demeurant d'engendrer des demandes reconventionnelles de la part de membres des corps de la fonction publique qui ne bénéficient pas des mêmes avantages à l'issue d'un détachement et pourrait avoir un effet pervers à l'égard des organismes d'accueil, qui seraient par ce biais assurés d'une prise en charge financière intégrale par le ministère de la justice.

Option consistant à prévoir une affectation à l'administration centrale

Il s'agirait d'affecter à l'administration centrale les magistrats dont le détachement prend fin et qui ne peuvent être immédiatement nommés à un emploi du corps judiciaire.

Cette solution est proche de l'option consistant à créer une position de retour de détachement, à ceci près qu'elle correspond à une affectation précise et ne rencontre donc pas la même objection sur le plan budgétaire.

Il reste que pour des raisons de bon fonctionnement du service de la justice, il apparaît préférable de trouver une solution permettant, dans toute la mesure du possible, d'affecter le magistrat à un emploi qu'il a demandé et si possible vacant.

Ainsi, une solution consistant à prévoir une procédure permettant une affectation temporaire des magistrats concernés, dans l'attente de leur nomination sur un emploi du corps judiciaire ou de leur nouveau détachement ne paraît pas la plus adaptée pour résoudre les difficultés précédemment décrites.

L'option retenue : la création d'un nouveau dispositif encadrant les retours de détachement à l'expiration du terme fixé

Il s'agit de créer un dispositif inspiré de celui des conseillers et avocat généraux référendaires, contraignant les magistrats à effectuer, dans un certain délai, des choix d'affectation mais prévoyant la possibilité d'affectations en avancement.

Dans le cas où les desiderata ne pourraient être satisfaits - pour des impératifs de gestion du corps - ou lorsque le magistrat n'aurait pas formulé de demande, le garde des sceaux conserverait la possibilité de nommer le magistrat d'office sur un des trois postes proposés à l'intéressé.

Le principe d'inamovibilité ne paraît pas en effet s'opposer à un tel mécanisme, dès lors qu'il interdit seulement de donner à un magistrat du siège une affectation nouvelle, sans son consentement (article 4 de l'ordonnance statutaire).

Un tel dispositif présenterait les avantages suivants :

- éviter des situations de blocage lorsque le magistrat ne formule aucun desiderata utile,

- maintenir l'attractivité de postes en détachement, en autorisant expressément un retour en avancement - lorsque cet avancement n'a pas déjà été concrétisé durant la période de détachement - ou sur des emplois placés hors hiérarchie, alors même que le statut général ne prévoit que des réintégrations dans un emploi correspondant à son grade.

Compte tenu du caractère particulier des fonctions de directeur, de chef de service, de directeur-adjoint, de sous-directeur à l'administration centrale et de directeur de l'Ecole nationale de la magistrature et de la difficulté pour eux de prévoir le terme de leur détachement, il n'était pas possible de leur rendre applicables ces nouvelles règles.

Un dispositif similaire à celui qui vient d'être exposé a été conçu pour les retours de congé parental, pour lesquels une problématique similaire se présente (cf. 1.3.1. c). Il était donc logique de reprendre la même formule de retour sur un emploi du corps judiciaire, pour les raisons exposées ci-dessus, afin de ne pas pénaliser les personnes ayant choisi cette position.

Le dispositif prévu pour les retours de détachement ne pouvait pas toutefois être repris à l'identique pour les retours de congé parental ; il devait en effet être adapté afin de prendre en considération la situation familiale des intéressés qui avait justifié leur placement dans cette position de congé parental. Ainsi, l'exigence consistant à demander des affectations dans trois juridictions au moins appartenant à des ressorts de cour d'appel différents devait être assouplie et porte seulement sur trois juridictions différentes. Surtout, les magistrats bénéficieront à l'expiration de leur congé parental d'un droit à réintégrer la juridiction dans laquelle ils étaient précédemment nommés. Le mécanisme de retour de congé parental permet ainsi de concilier les impératifs de gestion du corps judiciaire avec la spécificité de cette position.

3.2.4. Les options visant à faciliter la mise en oeuvre de la nouvelle obligation de mobilité statutaire

L'article 76-4, inséré dans l'ordonnance statutaire par la loi organique du 5 mars 2007, n'a pas encore reçu application, mais il apparaît dès à présent que sa mise en oeuvre pourrait être compromise par l'encadrement trop restrictif prévu pour cette nouvelle obligation.

Plusieurs adaptations ont été envisagées afin d'en faciliter la mise en oeuvre, dont une s'est finalement révélée peu opportune.

• L'option envisagée et finalement écartée : la prise en compte pour la mobilité statutaire des fonctions de magistrat du cadre de l'administration centrale du ministère de la justice

Les magistrats à l'administration centrale du ministère de la justice (MACJ) exercent des activités non juridictionnelles et dont l'expérience démontre qu'elles élargissent leur champ d'expérience professionnelle par l'appréhension de nouvelles méthodes de travail et la découverte d'un environnement professionnel différent.

Prendre en compte ces fonctions au titre de la mobilité statutaire présenterait l'avantage d'étendre le nombre de postes susceptibles d'être offerts aux magistrats souhaitant accomplir leur mobilité et, au surplus, de renforcer leur attractivité et ainsi, d'assurer un recrutement plus régulier en administration centrale.

Il ne semble pas qu'il puisse être considéré que de telles fonctions entrent dans la catégorie prévue par le a) de l'article 76-4, à savoir une mobilité accomplie auprès d'une administration française. En effet, l'avant dernier alinéa de l'article 76-4 prévoit qu'au terme de la période de mobilité statutaire, les magistrats « sont réintégrés de droit dans le corps judiciaire ». Or, les magistrats exerçant des fonctions de MACJ ne quittent pas le corps judiciaire, l'article 1 er de l'ordonnance statutaire indiquant expressément qu'ils font partie du corps judiciaire au même titre que les magistrats exerçant en juridiction et le décret n° 93-21 du 7 janvier 1993 les énumérant parmi les fonctions pouvant être exercées par les magistrats de l'ordre judiciaire.

Il conviendrait alors de mentionner expressément les fonctions de MACJ dans l'article 76-4.

Toutefois, cette modification ne semble pas correspondre à l'esprit de la réforme voulue par le législateur organique en 2007, qui souhaitait, par cette nouvelle disposition, ouvrir davantage la magistrature sur l'extérieur en faisant découvrir aux membres du corps judiciaire d'autres activités professionnelles.

• Les options retenues

La mise en oeuvre de la nouvelle obligation de mobilité statutaire sera facilitée par les quatre modifications suivantes, qui reprennent les dispositions prévues pour les fonctionnaires des corps recrutés par la voie de l'Ecole nationale d'administration - qui avaient inspiré le législateur en 2007 et qui ont depuis été modifiées par le décret n° 2008-15 du 4 janvier 2008 relatif à la mobilité et au détachement des fonctionnaires des corps recrutés par la voie de l'Ecole nationale d'administration qui a abrogé le décret n° 2004-708 du 16 juillet 2004.

Il sera en premier lieu prévu que les magistrats puissent effectuer leur mobilité au sein de juridictions administratives, financières ou internationales, afin d'élargir le champ de la mobilité statutaire sans toutefois remettre en cause l'esprit de cette nouvelle obligation. Les fonctions exercées dans de telles juridictions sont en effet de nature à permettre aux magistrats de se confronter à un autre univers professionnel, notamment en découvrant de nouvelles méthodes de travail et en se familiarisant avec des règles juridiques et des procédures différentes.

La durée de cette mobilité sera ensuite portée à deux ans au lieu d'un an renouvelable une fois. La durée de trois ans - qui a pu un temps être envisagée - s'est révélée trop longue dans un contexte de réduction des effectifs, étant susceptible de générer des difficultés dans le fonctionnement des juridictions.

La durée de deux ans - qui est celle fixée pour les fonctionnaires des corps recrutés par la voie de l'Ecole nationale d'administration et qui était préconisée par le rapport sur les professions du droit dit « rapport Darrois » 11 ( * ) - apparaît plus adaptée. Elle permettra de mieux anticiper les retours en juridiction, les demandes de mutation étant présentées en automne de l'année précédente en vue d'une inscription sur la transparence annuelle, et d'éviter les surnombres consécutifs à la mise en oeuvre de la priorité de réaffectation dans la juridiction d'origine, le cas échéant, en surnombre.

Il n'apparaît cependant pas nécessaire de prévoir une possibilité de renouvellement, dès lors que les magistrats auront toujours la faculté de poursuivre la même activité à l'issue de la période de mobilité statutaire sur le fondement des règles de droit commun relatives aux positions.

Une disposition assimilera les services accomplis au titre de la mobilité à des services effectifs dans le corps judiciaire, afin de ne pas désavantager les magistrats dans le cadre du calcul de l'ancienneté pour l'accès au premier grade. En effet, dans cette position, les magistrats cessent normalement de bénéficier de leurs droits à l'avancement et à la retraite.

Des précisions seront enfin apportées pour faire apparaître plus clairement le fait que la mobilité statutaire peut être accomplie dans toute position conforme au statut des magistrats et non pas seulement en position de détachement et de disponibilité.

3.2.5. Les options visant à renforcer l'apprentissage de la pratique dans la formation au changement de fonction

Ainsi qu'il a été indiqué précédemment, la formation obligatoire au changement de fonction comprend une partie théorique à l'Ecole nationale de la magistrature et une partie pratique consistant en un stage dans une juridiction.

Toutefois, l'apprentissage pratique est, en l'état actuel de l'article 14 de l'ordonnance statutaire, 1limité, les magistrats ne pouvant exercer que les missions dévolues aux assistants de justice par le décret n° 2008-1159 du 10 novembre 2008, à savoir apporter son concours aux travaux préparatoires réalisés pour l'exercice de leurs attributions par les magistrats.

Le positionnement de ce stage après les enseignements théoriques ainsi que sa durée permettent d'envisager de laisser les magistrats qui accomplissent un stage en juridiction dans le cadre de leur obligation de formation continue participer à l'activité juridictionnelle, au même titre que les auditeurs de justice. A l'instar de ces derniers, ils pourront ainsi accomplir les actes de nature juridictionnelle énumérés à l'article 19 de l'ordonnance statutaire, qu'il n'était dès lors pas utile de reprendre à l'article 14 de ladite ordonnance, à savoir notamment :

- assister le juge d'instruction dans tous les actes d'information,

- assister les magistrats du ministère public dans l'exercice de l'action publique,

- siéger en surnombre et participer avec voix consultative aux délibérés des juridictions civiles et correctionnelles,

- présenter oralement devant celles-ci des réquisitions ou des conclusions,

- assister aux délibérés des cours d'assises.

Comme pour les auditeurs, il n'est évidemment pas possible de leur permettre de recevoir de délégation de signature, compte tenu de la nature des actes juridictionnels et du fait que ce stage s'inscrit dans une optique de formation.

3.2.6 Les options visant à rendre effectif le comité médical national

La publication du décret visant à mettre en place le comité médical national qui a été créé par la loi organique du 5 mars 2007 précitée est bloquée par les difficultés qui sont apparues au cours des concertations interministérielles résultant de l'imprécision de l'article 69 de l'ordonnance statutaire s'agissant, d'une part, de la nature des congés de maladie en vue desquels le garde des sceaux pouvait saisir ce nouveau comité et, d'autre part, de l'absence de toute mention d'une procédure d'appel dans l'article 69 de l'ordonnance du 22 décembre 1958. Ces difficultés imposent de compléter cet article par les deux précisions suivantes (cf supra 1.3.2 a).

S'agissant de la difficulté tenant à la nature des congés pouvant être octroyés par le comité médical national, le renvoi à l'intégralité des dispositions de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 n'est pas possible, dans la mesure où il s'agit d'une loi ordinaire et où cela reviendrait à rendre le dispositif applicable à des congés autres que ceux octroyés pour raison de santé, notamment les congés maternité ou de formation syndicale. Dans ces conditions, il convient de rajouter dans l'article 69 aux congés de maladie, ceux de longue maladie et de longue durée, qui sont prévus par les 2°, 3° et 4° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984.

La difficulté tenant à l'absence d'appel des décisions du comité médical conduit à prévoir dans l'article 69 une procédure d'appel et l'existence d'un comité médical national d'appel, là encore spécifique aux magistrats. Le choix de l'appellation est calqué sur celle qui avait été retenue par le législateur en 2007 et permet d'éviter toute confusion avec le comité médical supérieur prévu pour les fonctionnaires. La disposition de renvoi à la voie réglementaire devait être modifiée pour indiquer qu'à l'instar du comité médical national, l'organisation et le fonctionnement du comité médical national d'appel ainsi créé devront être précisés par le décret d'application.

3.2.7 Les options visant à adapter la durée des fonctions de juge de proximité

La question de la durée du mandat des juges de proximité est délicate puisqu'elle impose de tenir compte à la fois de données matérielles (nécessité de pourvoir les postes, réalité des démissions de juges de proximité, etc) et des exigences constitutionnelles, en particulier du principe d'indépendance de la justice.

L'augmentation de la durée des fonctions de juges de proximité à dix ans, au lieu de sept en l'état, n'encourerait aucun risque de censure par le Conseil constitutionnel.

Cependant, cette option n'apparaît pas conforme aux orientations qui se dessinent concernant les magistrats de carrière, pour lesquels la mobilité est encouragée, ce qui se traduit notamment par une limitation de la durée d'exercice des fonctions, fixée à sept ans pour les chefs de juridiction et de cour.

En outre, elle n'est pas de nature à renforcer l'attractivité de ces fonctions ou à dissuader des juges de proximité de démissionner, ce qui, étant difficile à anticiper, pose de réelles difficultés en termes de gestion pour la chancellerie.

Une durée de cinq ans renouvelable une fois paraît alors s'imposer, permettant de tenir compte au mieux des souhaits d'engagement, nécessairement différents, de chaque juge de proximité

Il ne ressort pas de la lecture des décisions du Conseil constitutionnel que le non renouvellement du mandat constitue une condition de la constitutionnalité du recrutement des juges de proximité, dès lors que ce renouvellement se fait dans des conditions garantissant leur indépendance.

Ceci implique qu'aucune appréciation ne soit portée par le pouvoir exécutif sur la manière dont ils se sont acquittés de leur mission lors de l'examen de leur demande de renouvellement afin de s'assurer qu'ils puissent exercer leurs fonctions dans l'indépendance nécessaire.

Dans ces conditions, il a été envisagé de prévoir que le Conseil supérieur de la magistrature soit automatiquement saisi de la demande de renouvellement pour ne pas laisser la possibilité au ministère de la justice, donc au pouvoir exécutif, de la bloquer.

Toutefois, ce dispositif n'est pas suffisant par rapport aux exigences d'indépendance. Il ne fait en effet pas obstacle à ce qu'un juge de proximité ne soit pas nommé, même après un avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature, puisqu'aux termes de l'ordonnance statutaire, ils sont nommés dans les formes prévues pour les magistrats du siège, c'est-à-dire par décret du président de la République sur proposition du garde des sceaux, après avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature. Comme pour les autres magistrats, le garde des sceaux peut parfaitement, même après que le Conseil supérieur de la magistrature ait rendu son avis, ne pas proposer la nomination au président de la République. De même, le président de la République est libre de ne pas suivre la proposition du garde des sceaux. La seule obligation imposée par la Constitution et les textes statutaires est de ne pas nommer un juge de proximité en cas d'avis défavorable du Conseil.

Il est dès lors impératif de prévoir expressément que le renouvellement est de droit, sauf opposition de la formation compétente du Conseil supérieur de la magistrature tenant à l'inaptitude de l'intéressé. Ainsi, l'autorité de nomination sera tenue, si le CSM ne s'y oppose pas, de procéder à la nomination. Par ailleurs, il est précisé que ce renouvellement est de droit dans la même juridiction ; le juge de proximité pourra toutefois, bien évidemment, demander une nomination dans un autre ressort.

3.2.8. Les options visant à prévenir les conflits d'intérêts

La nécessité d'introduire dans l'ordonnance statutaire un dispositif de prévention des conflits d'intérêts à côté des règles relatives aux incompatibilités devait à l'évidence s'inspirer du projet de loi relatif à la déontologie et à la prévention des conflits d'intérêts dans la vie publique.

Toutefois, toutes les dispositions de ce projet de loi n'étaient pas pertinentes s'agissant des magistrats. En effet, les obligations déontologiques de ces derniers et leurs implications procédurales sont déjà prévus par de nombreux textes ; leurs manquements sont sanctionnés par l'instance disciplinaire (cf supra 1.3.2 b).

Le projet de loi organique insère donc un article posant, d'une part, une obligation générale de veiller à prévenir et régler immédiatement les éventuels conflits d'intérêts et créant, d'autre part, une obligation de déclaration d'intérêts. Cet article prend place naturellement après celui interdisant aux magistrats l'exercice d'une activité professionnelle, sauf dérogations.

Toutefois, le mécanisme de la déclaration d'intérêts fixé par le projet de loi relatif à la déontologie et à la prévention des conflits d'intérêts dans la vie publique ne pouvait pas être repris tel quel et nécessitait que des aménagements y soient apportés en raison de la spécificité de l'organisation judiciaire et de la nature des fonctions juridictionnelles.

S'agissant du champ d'application de cette nouvelle obligation de déclaration des intérêts, il convient de rappeler que la volonté du gouvernement est que les plus hauts responsables de l'action publique y soient soumis. Il a été immédiatement envisagé d'y inclure les personnes exerçant des fonctions juridictionnelles, eu égard à l'importance et à la sensibilité de leurs fonctions. C'est ainsi que les plus hauts membres des juridictions administratives et des juridictions financières sont visés par le projet de loi relatif à la déontologie à la prévention des conflits d'intérêts dans la vue publique.

Il devait en être de même pour les magistrats de l'ordre judiciaire. L'ensemble des magistrats de la Cour de cassation, qui appartiennent à la juridiction la plus élevée dans l'ordre judiciaire français et qui est unique ainsi que l'énonce l'article L411-1 du code de l'organisation judiciaire 12 ( * ) , sont donc soumis à cette nouvelle obligation de la déclaration d'intérêts. Contrairement aux magistrats exerçant leurs fonctions dans les juridictions des premier et second degré, dont les décisions peuvent être contestées, selon les cas, par la voie de l'appel ou de la cassation, celles rendues par les magistrats de la Cour de cassation ne peuvent plus être annulées, notamment pour un motif tenant à la partialité de la formation de jugement. L'éventuelle saisine de la Cour européenne des droits de l'homme ne peut en effet pas conduire à une modification ou une annulation de la solution jugée, mais seulement, en cas de violation de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou de ses protocoles, à l'éventuel octroi d'une « satisfaction équitable » (article 41 de la Convention), qui implique généralement l'allocation d'une indemnité au requérant. La saisine est d'ailleurs dirigée contre un Etat (articles 33 et 34), et non contre une décision judiciaire.

L'inclusion dans ce dispositif des conseillers et avocats généraux en service extraordinaire à la Cour de cassation, dont le statut est réglé au chapitre V bis de l'ordonnance du 22 décembre 1958, devait être expressément prévue dans le projet de loi.

Cette inclusion est évidente, dès lors qu'aux termes de l'article 40-1 de l'ordonnance précitée, « Les conseillers en service extraordinaire exercent les attributions des conseillers à la Cour de cassation. Les avocats généraux en service extraordinaire exercent les attributions confiées au ministère public près la Cour de cassation ».

Toutefois, ces personnes ne sont pas des magistrats au sens statutaire et elles ne sont donc pas comprises dans la formule « les magistrats nommés à la Cour de cassation ».

En effet, le Conseil constitutionnel a jugé que le 3 ème alinéa de l'article 64 de la Constitution, aux termes duquel « Une loi organique porte statut des magistrats », vise les magistrats de carrière de l'ordre judiciaire. Or les conseillers et avocats généraux à la Cour de cassation en service extraordinaire, qui selon la terminologie du Conseil constitutionnel sont « des personnes autres que des magistrats de carrière qui exercent les fonctions de magistrat de l'ordre judiciaire » ou « les fonctions judiciaires », n'appartiennent pas au corps judiciaire tel que défini par l'article 1 er de l'ordonnance du 22 décembre 1958 précitée. C'est la raison pour laquelle ils ne peuvent pas être membres du Conseil supérieur de la magistrature ou de la commission d'avancement, ni participer à la désignation des membres de ces instances.

La situation des premiers présidents de cour d'appel et des procureurs généraux près ces cours, ainsi que celle du président et du procureur de la République du tribunal de grande instance de Paris, est différente, et leur inclusion dans le dispositif de la déclaration d'intérêts ne nécessitait pas de mention explicite.

En effet, en application du mécanisme dit de la « double nomination » prévu aux articles 37, 38-1 et 38-2 de l'ordonnance statutaire, ces magistrats, dont la durée des fonctions est limitée à sept ans, sont nommés sur un emploi support (magistrat hors hiérarchie du siège de la Cour de cassation pour les premiers présidents et le président du tribunal de Paris et magistrat hors hiérarchie du parquet de la Cour de cassation pour les procureurs généraux et le Procureur de Paris) en vue d'exercer les fonctions qui sont expressément mentionnées dans le décret de nomination. A l'expiration du délai de sept ans, le magistrat est déchargé par décret du président de la République et exerce les fonctions auxquelles il a été initialement nommé. Il en est de même dans les cas où, avant ce terme, il est déchargé de cette fonction sur sa demande ou à la suite d'une décision disciplinaire. Compte tenu de l'importance de leurs responsabilités tant au plan judiciaire qu'administratif et de leur place dans la hiérarchie judiciaire, il n'était pas concevable qu'ils ne remplissent cette déclaration d'intérêts qu'une fois déchargés de ces fonctions de chefs de cour ou de juridiction et installés dans leurs fonctions au sein de la Cour de cassation.

Mais dès lors, comme il a été dit, qu'ils sont nommés à un emploi « support » de magistrat à la Cour de cassation, ils sont inclus dans la formule « les magistrats nommés à la Cour de cassation ».

S'agissant des destinataires de ces déclarations, les magistrats de la Cour de cassation et les conseillers et avocats généraux en service extraordinaire ne pouvaient pas les remettre à une autre autorité que le premier président de la Cour de cassation et le procureur général près cette cour, qui sont respectivement à la tête de la liste de rang des magistrats du siège (article R.421-8 du code de l'organisation judiciaire) et de celle des magistrats du parquet (article R.432-4 du même code).

En ce qui concerne ces autorités, la détermination de l'autorité à laquelle ils doivent remettre leur déclaration est plus délicate. Comme pour les magistrats de la Cour de cassation et comme pour les personnes visées par le projet de loi relatif à la déontologie et à la prévention des conflits d'intérêts dans la vie publique, il devait s'agir d'une autorité.

Une option aurait pu consister à désigner le président de la République qui, aux termes de l'article 64 de la Constitution, est le garant de l'indépendance de la justice et qui est l'autorité de nomination. Toutefois, dans ce cas, le contrôle n'aurait pu être véritablement effectif, ce qui ne correspondait pas à l'esprit du dispositif mis en place. Cette autorité aurait également pu être le garde des sceaux, qui peut saisir l'instance disciplinaire en application des articles 50-1 (pour les magistrats du siège) et 63 (pour les magistrats du parquet) de l'ordonnance statutaire. Toutefois, dans la mesure où c'est lui qui exerce le pouvoir disciplinaire à l'égard des magistrats du parquet aux termes de l'article 48 de l'ordonnance statutaire, cela aurait conduit à entraîner une confusion entre les dispositifs de prévention et de sanction, contrairement aux souhaits du gouvernement.

La désignation d'une personne au sein de la Cour de cassation s'est dès lors imposée. Il aurait pu s'agir du doyen de la Cour de cassation, visé aux articles R.421-6 et R.421-8 du code de l'organisation judiciaire. Toutefois, le doyen de la Cour étant un magistrat du siège (articles R.421-6 et R.421-8 du code de l'organisation judiciaire)  et n'étant situé qu'en 4° dans le rang des magistrats du siège de la Cour, cette option est rapidement apparue inadaptée. Il a alors pu être envisagé de désigner le président de chambre le plus ancien ou le premier avocat général le plus ancien, qui, dans certaines hypothèses, peuvent être amenés à remplacer le premier président de la Cour de cassation ou le procureur général près ladite Cour (s'agissant du président de chambre le plus ancien, il est amené à remplacer le premier président en cas d'empêchement à une chambre mixte - article L421-4 - ou à une assemblée plénière - article L421-5 ; s'agissant du premier avocat général le plus ancien, il remplace le procureur général en cas d'empêchement et si ce dernier n'a pas désigné un premier avocat général). Toutefois, d'autres dispositions du code de l'organisation judiciaire désignent le président de chambre dont le rang est le plus élevé pour remplacer le premier président de la Cour de cassation (l'article R435-1 du COJ prévoit en effet qu'il préside les assemblées générales des magistrats de la Cour en cas d'absence ou d'empêchement du premier président) et le premier avocat général dont le rang est le plus élevé appartient au bureau de la Cour de cassation (article R421-2). Au regard des attributions qui leur confiées et de leur poids au sein de la Cour de cassation, il est apparu plus opportun de désigner ces derniers.

S'agissant enfin des modalités de publicité, il a été prévu, comme pour les personnes visées par le projet de loi relatif à la déontologie et à la prévention des conflits d'intérêts dans la vie publique, à l'exception des membres du gouvernement, que cette déclaration ne serait pas rendu publique. En effet, si l'exigence de prévention des conflits d'intérêts implique que l'autorité qui connaît de l'activité des déclarants soient informés des intérêts déclarés, l'atteinte à la liberté individuelle et au respect de la vie privée que constituerait la publication des déclarations a semblé trop importante au regard du bénéfice qu'apporterait une telle publicité.

En revanche, elles seront communicables aux intéressés.

Par ailleurs, à l'instar des magistrats de l'ordre administratif et des membres des juridictions financières, ces déclarations d'intérêts ne sont pas communicables à la nouvelle Autorité de la déontologie de la vie publique, qui dépend du Premier ministre, en raison du principe constitutionnel d'indépendance de la justice.

4. LES EFFETS ATTENDUS DE LA RÉFORME ORGANIQUE

4.1. IMPACT IMPORTANT SUR LE CORPS JUDICIAIRE

L'optimisation de la gestion des ressources humaines est une attente des magistrats et une nécessité pour l'institution judiciaire. Les différentes modifications statutaires envisagées sont de nature à permettre une gestion plus fine du corps judiciaire en supprimant un certain nombre d'effets qui n'avaient pas été anticipés, en cherchant à valoriser les parcours professionnels et à permettre une meilleure adéquation des profils aux postes à pourvoir.

- Impact de la disposition relative aux magistrats placés

Les modifications qui seront apportées au régime des magistrats placés permettront

• d'éviter la nomination de magistrats n'ayant démontré aucune capacité particulière d'encadrement et d'animation au cours de leur carrière à des postes d'encadrement intermédiaire, dans l'optique d'une gestion dynamique des ressources humaines de la magistrature ;

• de permettre à des magistrats ayant exercé des fonctions de magistrat placé pendant 6 ans au cours de leur carrière de candidater à nouveau sur ces fonctions soit par appétence personnelle, soit pour réaliser leur avancement au premier grade, soit pour obtenir leur mutation dans une cour d'appel particulièrement demandée. Cela permettrait également d'accroître le nombre de candidatures à ces fonctions souffrant d'un déficit d'attractivité.

- Impact des dispositions relatives aux retours de détachement et de congé parental

Les dispositifs spécifiques envisagés pour le retour de détachement et le retour de congé parental permettront

• d'éviter des situations de blocage tenant à l'exigence des magistrats concernés qui formulent des desiderata sur des postes non vacants ou sur lesquels ils ne figurent pas en rang utile (ancienneté, profil). Ces situations de blocage conduisent parfois à proposer leur nomination en surnombre.

• d'éviter des prolongations de détachement non souhaités par l'administration d'accueil et le magistrat concerné ou les réintégrations sans affectation.

Le retour ainsi facilité de détachement devrait contribuer au développement de cette position, et ainsi favoriser l'ouverture du corps judiciaire vers l'extérieur.

- Impact de la disposition relative à la priorité d'affectation des conseillers et avocats généraux référendaires à la Cour de cassation

• l'assouplissement de la règle permettra de disposer d'une latitude plus importante dans le choix des conseillers et avocats généraux référendaires à la Cour de cassation.

- Impact de la disposition relative au stage de formation continue des magistrats

• la possibilité pour les magistrats en stage dans une juridiction dans le cadre de leur obligation de formation continue, et notamment de la formation au changement de fonction, d'accomplir des actes de nature juridictionnelle permettra un meilleur apprentissage pratique des fonctions et renforcera dès lors l'utilité de ce stage, tant pour l'intéressé que pour le magistrat sous l'autorité duquel ce stage se déroule. Cette modification devrait de ce fait contribuer à améliorer la qualité de la formation dispensée.

- Impact de la disposition relative à la mobilité statutaire

• les adaptations apportées au dispositif instauré en 2007 élargiront les possibilités de mobilité statutaire.

• Elles faciliteront également la gestion de ces mobilités par la chancellerie.

Ces mesures contribueront donc à la réussite de cette nouvelle obligation qui vise à renforcer l'ouverture du corps judiciaire sur l'extérieur et de ce fait notamment à améliorer le fonctionnement de l'institution judiciaire, en permettant aux magistrats de découvrir d'autres pratiques qui viendront enrichir leur exercice professionnel.

- Impact de la disposition relative au comité médical national

• l'article 69 de l'ordonnance statutaire ainsi réécrit permettra l'édiction du décret d'application et la mise en place du comité médical national, attendue depuis 2007. Des situations problématiques pourront ainsi être réglées de manière plus appropriée.

- Impact de la disposition relative à la durée des fonctions de juge de proximité

• l'allongement de la durée des fonctions de juge de proximité permettra de faire fructifier l'engagement professionnel de ces magistrats qui ont acquis une compétence certaine en matière juridique dont il est préjudiciable au fonctionnement judiciaire de se priver au bout de seulement 7 ans ;

• des perspectives plus longues de carrière permettront de favoriser les recrutements tout en ne renouvelant pas au bout de 5 ans les mandats des juges de proximité qui ne se sont pas adaptés à cette fonction.

Cette mesure, souhaitée par les juges de proximité et mise en oeuvre par un dispositif répondant aux exigences constitutionnelles, devrait contribuer à renforcer l'attractivité de ces fonctions et permettre ainsi de pourvoir l'intégralité des postes, tout en préservant la qualité des décisions rendues.

- Impact de la disposition relative à la déclaration d'intérêts

• la déclaration d'intérêts, qui sera une formalité légère tant dans sa rédaction que dans son traitement, ne nécessitant aucune investigation supplémentaire, permettra aux magistrats de la Cour de cassation de mieux appréhender les risques de conflit d'intérêts et d'éviter ainsi le recours à des mesures plus contraignantes, portant atteinte à leur image et à celle de l'institution judiciaire.

4.2 IMPACT NUL SUR LA DÉPENSE PUBLIQUE

L'ensemble des mesures envisagées n'a aucune incidence significative pour les finances publiques.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION DE LA LOI ORGANIQUE

5.1 CONSULTATIONS MENÉES

Avant l'élaboration de l'avant-projet de loi organique, une large concertation avec les acteurs de la vie judiciaire a été menée, afin de définir le contenu de la réforme organique à venir.

Par 19 courriers en date du 14 juin 2010, les chefs de la Cour de cassation, les présidents des formations du Conseil supérieur de la magistrature, les présidents des conférences des quatre conférences (premiers présidents de cour d'appel, procureurs généraux, présidents et procureurs), les organisations professionnelles et les associations de magistrats ont été sollicités en vue de recueillir des propositions, à partir d'une première liste de thèmes s'organisant autour de deux grandes lignes directrices : d'une part, la volonté de dynamiser la gestion du corps judiciaire, d'autre part, la nécessité d'adaptation des règles de gestion aux besoins et aux particularités du corps judiciaire.

Seuls le procureur général près la Cour de cassation, l'Association des magistrats issus des concours complémentaires et exceptionnels (AMICCE), le Syndicat de la magistrature et l'Union syndicale des magistrats y ont donné suite.

Des rencontres ont été organisées en octobre 2010 avec chacune des trois organisations syndicales de magistrats et avec les chefs de la Cour de cassation. Ce cadre est apparu de nature à garantir la qualité des échanges. Elles ont permis de recueillir leur avis sur les principaux thèmes qui avaient pu être identifiés par la chancellerie ainsi que leurs idées et propositions en vue d'une modernisation du statut de la magistrature.

Parallèlement à l'élaboration de l'avant-projet de loi organique relative au statut de la magistrature, la commission permanentes d'études (CPE) prévue par l'arrêté du 22 décembre 1977 a été consultée le 7 juillet 2011. Il est en effet apparu nécessaire de réunir cette commission dans le souci de développer le dialogue social et conformément à l'usage qui a consisté à réunir une CPE lorsque des modifications étaient apportées au statut des magistrats.

5.2 TEXTES D'APPLICATION ET MESURES SPÉCIFIQUES D'ENTRÉE EN VIGUEUR

• Textes d'application

Le projet de loi organique modifie le contenu du décret auquel renvoie l'article 69 de l'ordonnance statutaire pour déterminer l'organisation et le fonctionnement du comité médical national. En effet, ce décret devra également comporter des dispositions pour rendre effectif le comité médical national d'appel qui est créé.

Par ailleurs, il devra être procédé à quelques adaptations des dispositions règlementaires relatives aux juges de proximité (article 35-7 et s. du décret n° 93-21 du 7 janvier 1993 pris pour l'application de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature), afin de prévoir certaines modalités pratiques de la procédure de renouvellement du mandat de ces juges (conditions de dépôt et d'instruction des demandes).

Enfin ce projet de loi organique prévoit un seul renvoi à un nouveau décret en Conseil d'Etat pour définir le modèle, le contenu et les conditions de mise à jour et de conservation de la déclaration d'intérêts.

Article de la loi organique

Objet du décret

Direction (s) rédactrice (s)

Article 2

Fixer le modèle, le contenu et les conditions de mise à jour et de conservation de la déclaration d'intérêts

Ministère de la justice et des libertés (direction des services judiciaires).

Article 5

Prévoir certaines modalités pratiques de la procédure de renouvellement du mandat des juges de proximité (condition de dépôt et d'instruction des demandes)

Ministère de la justice et des libertés (direction des services judiciaires).

Article 6

Définir l'organisation et le fonctionnement du comité médical national et du comité médical national d'appel.

Ministère de la justice et des libertés (direction des services judiciaires)

• Mesures spécifiques d'entrée en vigueur

Il est prévu que le dispositif relatif aux déclarations d'intérêts s'applique aux personnes en fonctions à la date d'entrée en vigueur du décret en Conseil d'Etat prévu au II de l'article 2 du présent projet de loi organique.

Une autre disposition spécifique d'entrée en vigueur est prévue concernant la durée du mandat des juges de proximité et son caractère renouvelable. Il est expressément indiqué que ce nouveau régime ne s'appliquera qu'aux juges de proximité nommés à compter de la publication au Journal officiel . Ceux qui ont été nommés antérieurement - donc pour une durée de sept ans - peuvent voir leur mandat renouvelé, mais seulement pour une durée de trois ans, afin que la durée d'exercice de ces fonctions n'excède pas dix ans, quelle que soit leur date de nomination.


* 1 ce chiffre inclut les magistrats mis à disposition (70). En effet, le magistrat mis à disposition demeure dans son corps d'origine, est réputé occuper son emploi (en position d'activité) mais effectue son service dans une autre administration que la sienne. Le magistrat mis à disposition est le plus souvent positionné sur un emploi de 1 er MACJ ou MACJ.

* 2 Il s'agit des projets de nomination des magistrats prévus par l'article 27-1 de l'ordonnance du 22 décembre 1958.

* 3 S'agissant des arrivées sur un poste de placé, les données inscrites dans le tableau ci-dessous concernent exclusivement la mobilité . En conséquence, les auditeurs de justice nommés sur un poste de placé ne sont pas comptabilisés.

* 4 Cette étude ne peut être réalisée qu'à un instant T. En effet, les desiderata des magistrats sont actifs dans l'application de gestion LOLFI jusqu'au moment de la parution du décret de nomination. A la publication du décret, seuls les desiderata des magistrats ne faisant pas l'objet d'une nomination sont maintenus. En l'état, l'étude porte sur les desiderata enregistrés dans LOLFI au 26 mai 2011.

* 5 Sont inclus ceux ayant fait l'objet d'une proposition de nomination dans les transparences en cours.

* 6 Il s'agit de l'arrêté du 12 novembre 2010 fixant la liste des emplois du premier grade de la hiérarchie judiciaire comportant un 8 ème échelon.

* 7 Aux termes de l'article 45, alinéa 1 er de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, le magistrat détaché est placé hors de son administration d'origine, mais continue à bénéficier, dans ce corps, des droits à l'avancement et à la retraite.

* 8 En application de l'article 54 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, le magistrat en congé parental est placé hors de son administration d'origine pour élever son enfant, sans acquérir de droit à la retraite, mais il conserve ses droits à l'avancement d'échelon, réduits de moitié.

* 9 En tenant compte de la formation continue nationale et de la formation continue déconcentrée

* 10 Au CSM de mars 2011 (réunion prévue en septembre 2011) :

- 21 candidats pourraient obtenir un avis conforme du CSM.

- et 65 nouveaux dossiers sont proposés (installation prévue dans 2 ans dans le meilleur des cas).

* 11 Rapport de la Commission de réflexion tendant à réformer la profession d'avocat avec, comme objectif, la création d'une grande profession du droit, remis au Président de la République le 8 avril 2009.

* 12 « Il y a, pour toute la République, une Cour de cassation. »

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