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ÉTUDE D'IMPACT

LETTRE RECTIFICATIVE AU PROJET DE LOI

PORTANT DIVERSES DISPOSITIONS D'ADAPTATION AU DROIT DE L'UNION EUROPÉENNE EN MATIÈRE ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

NOR : ECOX2013990L/Bleue-1

17 juin 2020

TABLE DES MATIÈRES

TABLE DES MATIÈRES 3

INTRODUCTION GÉNÉRALE 5

TABLEAU SYNOPTIQUE DES CONSULTATIONS 7

TABLEAU SYNOPTIQUE DES MESURES D'APPLICATION 8

CHAPITRE VIII - AUTRES DISPOSITIONS 9

Article 24 - Prorogation des règles applicables à la gestion du FEADER pendant la période de transition avec la prochaine programmation et poursuite, au titre de la programmation suivante, du transfert de l'autorité de gestion du FEADER aux régions 9

CHAPITRE IX - DISPOSITIONS RELATIVES À L'AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE 18

Article 25 - Habilitation pour mettre le droit national en conformité avec les règles européennes de la concurrence et de modifier le livre IV du code de commerce pour simplifier les procédures devant l'Autorité de la concurrence et en accroître l'efficacité 18

INTRODUCTION GÉNÉRALE

La présente étude d'impact accompagne la lettre rectificative au projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière qui vise à transposer plusieurs directives et à mettre en conformité le droit national avec divers textes de l'Union européenne, déjà applicables ou dont la mise en application intervient en 2020 ou 2021, portant sur des dispositions diverses et poursuivant un objectif commun d'amélioration du fonctionnement du marché intérieur.

L'article 24 vise, d'une part, à permettre, pour le FEADER qui pourrait faire l'objet d'une ou plusieurs années de transition sur le format de l'exercice 2014-2020 d'assurer l'application des règles mises en place à compter de 2014 (application des dispositions de l'article 78 de la loi MAPTAM) pendant cette transition, et, d'autre part, à autoriser le Gouvernement à prendre par ordonnance des dispositions relatives à la gestion du FEADER de façon à clarifier la répartition des responsabilités entre l'Etat et les régions dans la gestion de ce fonds et ainsi en améliorer l'usage pour la prochaine programmation.

L'article 25 habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance diverses mesures destinées à mettre le droit français en conformité avec la directive visant à doter les autorités de concurrence des États membres des moyens de mettre en oeuvre plus efficacement les règles de concurrence et à garantir le bon fonctionnement du marché intérieur (dite « directive ECN+ »).

Il vise également à renforcer l'efficacité de l'action de l'Autorité de la concurrence et des agents de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) qui interviennent soit en coordination avec l'Autorité de la concurrence, soit en application du code de la consommation, par des mesures complémentaires, en lien avec la transposition de la directive ECN+.

Enfin, cet article comporte des mesures spécifiques à l'Outre-Mer destinées à assouplir l'exercice par l'Autorité de la concurrence des pouvoirs lui permettant d'agir sur la structure du marché (via des injonctions structurelles) et à stimuler la concurrence dans la distribution des produits lors qu'il existe une situation d'exclusivité d'importation.

TABLEAU SYNOPTIQUE DES CONSULTATIONS

Article

Objet de l'article

Consultations obligatoires

Consultations facultatives

24

Prorogation des règles applicables à la gestion du FEADER pendant la période de transition avec le prochaine programmation et poursuite, au titre de la programmation suivante, du transfert de l'autorité de gestion du FEADER aux régions

25

Habilitation pour mettre le droit national en conformité avec les règles européennes de la concurrence et de modifier le livre IV du code de commerce pour simplifier les procédures devant l'Autorité de la concurrence et en accroître l'efficacité

Conseil supérieur de l'audiovisuel

Autorité de régulation des communications électroniques et des postes

Haute autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur internet

Commission nationale de l'informatique et des libertés

TABLEAU SYNOPTIQUE DES MESURES D'APPLICATION

Article

Objet de l'article

Texte d' d'application

Administration compétente

24

Prorogation des règles applicables à la gestion du FEADER pendant la période de transition avec le prochaine programmation et poursuite, au titre de la programmation suivante, du transfert de l'autorité de gestion du FEADER aux régions

Ordonnance

Décret en Conseil d'Etat

25

Habilitation pour mettre le droit national en conformité avec les règles européennes de la concurrence et de modifier le livre IV du code de commerce pour simplifier les procédures devant l'Autorité de la concurrence et en accroître l'efficacité

Ordonnance

Décret en Conseil d'Etat

CHAPITRE VIII - AUTRES DISPOSITIONS

Article 24 - Prorogation des règles applicables à la gestion du FEADER pendant la période de transition avec la prochaine programmation et poursuite, au titre de la programmation suivante, du transfert de l'autorité de gestion du FEADER aux régions

1. ÉTAT DES LIEUX

Les règlements de l'Union européenne qui définissent les modalités de gestion des fonds européens imposent la désignation par les États membres de trois autorités : une autorité chargée de la gestion de ces fonds, une autorité de certification et une autorité d'audit. Pour le Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER), en ce qui concerne la prochaine programmation, les projets de textes européens prévoient une autorité nationale du Plan stratégique national, la désignation d'autorités régionales restant possible, un organisme payeur et une autorité de certification des comptes de l'organisme payeur. De plus, le FEADER n'est plus dans les propositions législatives de la Commission européenne un Fonds structurel relevant du cadre commun de la politique de cohésion.

À propos de la fonction d'autorité de gestion, les règlements généraux précisent que l'autorité de gestion des fonds structurels doit être au moins d'un niveau géographique dit « NUTS 2 » qui correspond en France au niveau géographique de la région. L'État peut choisir d'être autorité de gestion ou peut proposer une autre entité.

L'architecture de gestion des Fonds Européens Structurels d'Investissement (FESI) s'est profondément transformée sur la période de programmation 2014-2020 avec la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (loi MAPTAM), un important transfert de la gestion s'étant opéré en faveur des régions.

Cette loi a organisé le transfert de tout ou partie de la gestion des programmes européens, en qualité d'autorité de gestion ou par délégation de gestion à son article 78 pour la « période 2014-2020 ».

L'année 2014 a constitué une année de changement de gouvernance des fonds européens structurels et d'investissement (FESI).

En effet, la responsabilité de la gestion des FESI a été transférée aux régions en application d'un accord passé entre l'État et l'association des régions de France. Ce transfert constituait l'un des volets de « l'Acte III » de la décentralisation, dont le cadre a été fixé, en droit interne, par la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles dite MAPTAM. Les conseils régionaux sont devenus autorités de gestion à part entière du FEDER (auparavant géré par l'Etat) et d'une partie du FSE (à hauteur de 35%, l'Etat conservant 65% de l'enveloppe). Il n'y a donc pas eu de prorogation des règles du programme 2007-2013.

La gestion des fonds européens dans le cadre de la programmation 2007-2013 reposait sur les services de l'État qui assuraient la fonction d'autorité de gestion pour l'ensemble des fonds. La circulaire du Premier ministre du 13 avril 2007 relative au dispositif de suivi, de gestion et de contrôle des programmes co-financés par le FEDER, le FSE, le FEP et le FEADER pour la période 2007-2013 précisait notamment les conditions de cette gestion. Le FEADER faisait l'objet d'un programme national de développement (PDRH), décliné ensuite dans des documents régionaux de développement rural (DRDR).

Les règles de la programmation 2007-2013, au titre de laquelle l'Etat était seule autorité de gestion en vertu de la réglementation européenne, se sont appliquées à toutes les conventions attributives d'aides pluriannuelles adoptées sur leur fondement. Ainsi, l'Etat est demeuré gestionnaire du programme de développement rural hexagonal (PDRH), et a payé les aides engagées au cours de la programmation 2007-2013, et ce jusqu'en 2015, voire 2018 pour certaines mesures.

Pour des considérations pratiques, et dès lors que la réglementation européenne en prévoyait la possibilité, certaines aides surfaciques du Feader (les mesures agro-environnementales) octroyées pour une durée de cinq ans au cours de l'ancienne programmation ont été abrogées à la date de l'adoption de la PAC débutant en 2014, et adoptées selon des formes similaires sur le fondement des nouveaux programmes de développement rural régionaux (PDR).

La nouvelle répartition des compétences entre l'Etat et les régions, établie par la loi MAPTAM du 27 janvier 2014, s'est appliquée à compter de 2014, les régions étant désignée autorités de gestion, avec effet rétroactif au 1 er janvier 2014, par des conventions tripartites spécifiques à l'année 2014 conclues entre l'Etat, les régions et l'ASP.

Ainsi, la gestion actuelle du FEADER est organisée de manière différente des autres fonds. La qualité d'autorité de gestion a été transférée aux régions pour la plupart des mesures, y compris pour le programme Leader, dans le respect d'un décret en Conseil d'Etat qui précise les orientations stratégiques et méthodologiques pour la mise en oeuvre des programmes et définit les dispositifs qui doivent être identiques dans toutes les régions. Ainsi, la programmation et le pilotage sont décentralisés aux conseils régionaux.

Toutefois, cette organisation de l'actuelle programmation connaît un croisement important des responsabilités. En effet, le cofinancement reste principalement assuré par l'État (soit dans 70 % des cas du FEADER), certains dispositifs restent définis au niveau national (cadre national) et l'instruction des dossiers est assurée par les directions départementales des territoires et de la mer (DDTM) pour le compte des conseils régionaux. L'État est toutefois resté autorité de gestion de certaines mesures du FEADER, regroupées dans deux programmes, le programme national de gestion des risques et assistance technique (PNGRAT) et le Programme national du réseau rural national (PNRRN).

Le transfert des fonctions d'autorité de gestion de certains fonds de l'Etat aux régions a nécessité des transferts de personnels des services de l'Etat vers les conseils régionaux dont les modalités sont précisées dans les articles 81 à 89 de la loi MAPTAM.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

En l'état actuel de la législation nationale l'Etat a confié aux régions, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État, tout ou partie de la gestion des fonds ou programmes européens soit en qualité d'autorité de gestion, soit par délégation de gestion pour la seule période 2014-2020.

Prolonger la délégation de cette compétence de gestion aux régions pendant la période de transition et clarifier la répartition des responsabilités sur la prochaine période de programmation impose donc à nouveau l'intervention du législateur.

En effet, l'intervention d'une disposition législative est nécessaire puisque c'est par voie législative qu'il était prévu que l'État confiait aux Régions la gestion de certains fonds et programmes pour la période 2014-2020.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

L'objectif poursuivi de la mesure envisagée est donc de garantir la continuité du fonctionnement pendant la période de transition et d'en améliorer la gestion pour la prochaine période de programmation.

Elle vise en outre à clarifier l'exercice des compétences respectives de l'État et des Régions sur le FEADER, qui ne sera plus un FESI.

Elle vise également à assurer la conformité de la législation nationale avec le droit de l'Union européenne relatif à la politique agricole commune.

3. OPRTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

2.1. OPTIONS ENVISAGÉES

S'agissant de la prorogation de la délégation de gestion, l'option privilégiée consiste uniquement à compléter la période de responsabilité.

S'agissant de la gestion du FEADER pendant la prochaine période, parmi les différents scénarios envisageables (décentralisation complète du second pilier, recentralisation, clarification opérationnelle de la gestion...), c'est l'option d'un « décroisement » sur la base de la distinction opérationnelle « surfacique - non surfacique », source principale des problèmes organisationnels rencontrés, qui a été retenue, notamment parce qu'elle est réclamée par les principaux acteurs concernés.

En effet, une décentralisation complète ne semblait pas pertinente car une partie des mesures du FEADER relève de la solidarité nationale. C'est le cas en particulier de l'Indemnité Compensatoire de Handicap Naturel (ICHN) qui permet de compenser les désavantages de certains territoires. Par souci d'équité entre les exploitants, il est préférable que cette politique soit définie au niveau national. C'est le cas également de la gestion des risques et de l'aide à l'assurance récolte. L'assurance repose sur le principe de la mutualisation des risques. Une mutualisation à l'échelle nationale aurait beaucoup plus de sens et serait plus efficace qu'une mutualisation à une échelle territoriale inférieure.

L'option d'une recentralisation aurait consisté à revenir au mode de gestion antérieur à l'actuelle programmation, avec un programme défini et géré par l'Etat. Ce schéma n'aurait pas empêché une forte déclinaison territoriale pour toutes les mesures pour lesquelles cela a du sens (aide aux investissements, LEADER etc). Toutefois, cela aurait marqué un retour en arrière qui ne parait pas acceptable par les collectivités régionales, et pas souhaité par la majorité des parties prenantes.

Enfin, le maintien des dispositions actuelles n'est pas une option privilégiée compte-tenu des dysfonctionnements importants constatés depuis 2015 (rapport IGF-CGAAER de 2017, rapport Cour des comptes). Ces dysfonctionnements sont liés notamment à l'enchevêtrement des responsabilités ainsi qu'au nombre considérable de mesures distinctes déclinées par chaque autorité de gestion, ce qui rend l'ensemble difficilement gérable.

En ce qui concerne l'enchevêtrement des responsabilités, la situation est la suivante :

Aujourd'hui, les Régions sont autorités de gestion du FEADER mais leur action s'inscrit dans un cadre national assez strict. Les Régions assurent donc la programmation au sein de ce cadre et la définition des mesures qu'elles souhaitent ouvrir au bénéfice des agriculteurs et acteurs du monde rural.

C'est en revanche l'Etat, via les directions départementales des Territoires (DDT) et l'Agence de services et de paiement (ASP), qui assure l'instruction et le contrôle d'un grand nombre de mesures. C'est également l'Etat qui assume les coûts de développement informatique des outils (ISIS et OSIRIS) à déployer pour appliquer les mesures choisies par les Régions.

Cette situation a pour résultat que les services déconcentrés de l'Etat travaillent :

- pour les mesures « non surfaciques » - dont le montant des aides ne dépend pas de la surface agricole-, pour le compte et par délégation des Conseils régionaux, pour l'instruction du dossier et la décision individuelle, en particulier les mesures d'investissement du Programme de compétitivité et d'adaptation des exploitations (PCAE) et d'aide à l'installation ;

- pour les mesures surfaciques du 2 ème pilier, en délégation de l'organisme payeur choisi, à savoir l'ASP, lui-même sous la tutelle de l'Etat, pour ce qui concerne l'instruction des dossiers (ICHN, Mesures Agroenvironnementales et Climatiques (MAEC) et les aides à l'agriculture biologique), mais aussi parfois en délégation de la Région pour la décision individuelle;

- pour le premier pilier, en délégation de l'organisme payeur (ASP) avec une définition du cadre juridique par le seul Etat.

Enfin, s'agissant de la Corse, l'organisme payeur des mesures du 2 ème pilier (surfaciques et non surfaciques) est l'Office du Développement Agricole et Rural de Corse (ODARC).

Cette situation n'est pas lisible pour les exploitants et les différents bénéficiaires. Elle ne permet pas non plus d'établir une ligne de partage claire entre l'Etat et les Régions en ce qui concerne la responsabilité juridique et financière en cas de corrections financières dans le cadre de la procédure d'apurement prévue par la règlementation européenne.

En ce qui concerne le nombre important de déclinaisons régionales et territoriales :

Pour les mesures « non surfacique », la somme des PDR a conduit à la conception de 1 550 dispositifs, contre 250 sur la période précédente. Quant aux MAEC et aides à l'agriculture biologique, ce sont 10 400 mesures différentes couvrant 1 800 territoires différents. Sur les seules MAEC, plus de 9 500 mesures sont ouvertes, pour seulement 5400 utilisées.

En outre, en l'état actuel des propositions de règlements UE, le statu quo n'est pas une option, puisque chaque Etat-membre est tenu de prévoir un plan stratégique national unique, avec une seule autorité de gestion. Les propositions de règlements prévoient des autorités régionales qui peuvent être désignées dans le respect des dispositions constitutionnelles de chaque Etat membre, mais pas des autorités de gestion régionales de plein exercice comme c'est le cas aujourd'hui.

C'est pourquoi l'option privilégiée est celle consistant à décentraliser intégralement les aides au développement économique « classiques », non surfaciques. Leur programmation et leur mise en oeuvre relèveraient des Régions, qui assureraient les fonctions d'autorités de gestion. Cette décentralisation s'accompagnera du transfert des effectifs et des crédits nationaux correspondants. L'Etat assurerait pour sa part la gestion et le pilotage de l'ensemble des aides dites « surfaciques » du premier et du deuxième pilier de la PAC.

2.2. DISPOSITIF RETENU

La mesure envisagée vise à proroger les règles applicables à la gestion du FEADER pour la période de transition, dans les mêmes conditions que pour la période 2014-2020.

La mesure envisagée vise également à autoriser le Gouvernement à prendre par ordonnance des dispositions relatives à la gestion du FEADER de façon à clarifier la répartition des responsabilités entre l'Etat et les régions dans la gestion de ce fonds et ainsi en améliorer l'usage pour la prochaine programmation.

Elle prévoirait les conditions dans lesquelles l'État est chargé des aides surfaciques et des aides assimilées du Fonds européen agricole pour le développement rural et les régions ou, dans les régions d'outre-mer, lorsque celles-ci décident d'y renoncer, les départements, peuvent être chargés des aides non-surfaciques, notamment la répartition des compétences, les transferts de services et de moyens en résultant et les modalités d'instruction des demandes et de paiement des aides.

Le partage de compétence et des responsabilités entre l'Etat et les Régions serait clarifié pour la période 2021-2027. La plupart des aides au développement économique « classiques » non surfaciques devraient être intégralement décentralisées. L'Etat assurera pour sa part la gestion et le pilotage de l'ensemble des aides dites « surfaciques » du deuxième pilier de la Politique Agricole Commune.

Les mesures du FEADER de la prochaine programmation ne sont pas encore précisément connues puisque le cadre législatif européen est en cours de définition. Néanmoins, sur la base des mesures de l'actuelle programmation, il est possible de préciser les mesures qui relèveront respectivement de l'État et des Régions pour la prochaine programmation, dont la date de démarrage dépend des décisions européennes sur la transition :

- l'État assurerait la gestion et le pilotage de l'ensemble des aides surfaciques (ICHN, soutien à l'agriculture biologique et mesures agroenvironnementales et climatiques (MAEC) liées à la surface), ainsi que des soutiens assimilés à des aides surfaciques que sont la gestion des risques agricoles (participation aux primes d'assurance concernant les culture, les animaux et les végétaux et au fonds de mutualisation intervenant en cas de maladies animales et végétales et d'incidents environnementaux) et l'aide à l'adaptation de la conduite pastorale des troupeaux soumis au risque de prédation.

- les Régions seraient en charge des autres dispositifs, qui sont des dispositifs non-surfaciques. Il s'agit principalement du soutien aux investissements, des aides à l'installation des jeunes agriculteurs, des aides au développement local - LEADER, et des MAEC non liées à la surface - amélioration du potentiel pollinisateur des abeilles et protection des races menacées. Ces dispositifs qui rentrent dans le champ de la compétence économique des régions, sont entièrement décentralisés aux régions ;

- la Collectivité territoriale de Corse, compte-tenu de son statut spécifique, continuerait à être chargée des aides non surfaciques et surfaciques du deuxième pilier (à l'exception des aides assimilées).

Pour les mesures dont elles auront la responsabilité, les Régions assureraient l'ensemble des actes de gestion des dossiers, à l'exception du paiement du FEADER, tâche que, compte tenu des dispositions législatives européennes, l'organisme payeur ne peut déléguer. Elles bénéficieront dans ce cadre du transfert des effectifs et des crédits nationaux correspondants.

Ce décroisement des responsabilités entre l'Etat et les Régions dans la mise en oeuvre de la future programmation du FEADER, est le gage d'une réussite collective.

L'habilitation vise à traiter spécifiquement le seul cas du FEADER et non de tous les FESI. Les autres fonds ont d'ores et déjà fait l'objet d'un traitement par habilitation dans le projet de loi diverses mesures d'urgence qui vient d'être adopté le 10 juin dernier par le Parlement.

Une attention particulière devra être portée dans la coordination entre les deux ordonnances, l'une, générale, traitant les évolutions du droit de l'UE pour tous les fonds, assurant la prorogation sur l'année ou les années de transition et sur la prochaine programmation, l'autre, traitant le cas du partage des responsabilités Etat-région dans la gestion du FEADER.

La prochaine programmation de la PAC reposera sur deux règlements principaux. Le premier établira des règles régissant les « plans stratégiques », en particulier le plan stratégique national, qui tiendra lieu de document unique de programmation pour l'ensemble des aides de la politique agricole commune (PAC), c'est-à-dire les soutiens prévus au titre des paiements directs (FEAGA), du développement rural (FEADER) et de l'organisation commune des marchés (OCM).

Le second établira les règles relatives au financement, à la gestion et au suivi de la PAC.

Ces deux règlements sont encore débattus par les Etats membres, qui travaillent encore sur la première proposition transmise par la Commission le 1 er juin 2018. Le texte n'est donc pas abouti et n'a pas fait l'objet d'une version traduite présentant des dispositions définitives depuis cette date.

La plupart des dispositions de ces règlements qui impliqueront de manière certaine une mise en conformité du droit national au droit de l'Union ne sont donc pas encore stabilisées.

Par exemple, les dispositions du règlement « plans stratégiques » qui permettent à l'autorité de gestion étatique de confier tout ou partie des fonctions d'autorité de gestion aux régions ont fait l'objet de larges modifications au mois de juin 2020.

En outre, les autorités régionales devront se conformer à certaines exigences du futur cadre européen, qui ne figurent pas dans la réglementation actuelle, parmi lesquelles l'animation de partenariats, l'information large des citoyens sur les opportunités offertes par la PAC, et la mise en place d'un système de suivi et d'évaluation.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

La mesure envisagée a pour objet de sécuriser la période de transition avant la prochaine période d'attribution des fonds européens. Cette disposition ne produit pas de nouvel impact dans la mesure où elle vise à maintenir l'état du droit existant. En effet, il s'agit d'une simple mise en cohérence à caractère transitoire. Les modalités de gestion restent identiques pour les départements et les régions jusqu'à la fin de la programmation. Cela répond à des enjeux de prévisibilité et de sécurité juridique, la nouvelle programmation étant différée. La saisine du CNEN ne semble donc pas obligatoire.

La prorogation des modalités de gestion, pour le FEADER, de l'article 78 de la loi MAPTAM n'implique pas un nouveau transfert de compétence devant faire l'objet d'une compensation financière. En effet, le transfert de l'autorité de gestion des fonds européens aux régions a déjà fait l'objet d'une compensation financière prévue aux articles 80 et suivants de la loi MAPTAM.

Concernant l'habilitation, l'analyse précise des incidences des dispositions envisagées sera effectuée dans la fiche d'impact de l'ordonnance prise dans le cadre de l'habilitation.

Toutefois, il peut d'ores et déjà être fait état que la disposition envisagée devrait permettre de clarifier les responsabilités de l'État et des Régions, en les décroisant. Ainsi, chaque autorité, nationale et régionale, sera responsable de la gestion des mesures pour lesquelles elle est compétente, sur la totalité de la chaîne de gestion.

En ce qui concerne la prochaine programmation du FEADER, la modification des modalités de gestion aura pour conséquence de modifier la répartition des compétences entre l'Etat et les collectivités territoriales.

Sur le plan budgétaire, la nouvelle répartition produira des effets de transferts de services de l'Etat vers les régions et des régions vers l'Etat afin d'accompagner la clarification des compétences opérée. Les transferts résultant de ce dispositif feront l'objet de concertation et seront déterminés précisément lors de leur passage en commission consultative d'évaluation des charges en application du droit de la compensation.

Ainsi, les transferts de compétences résultant de la nouvelle répartition des compétences ouvriront droit à une compensation financière pour les collectivités territoriales concernées, dans les conditions fixées aux articles L. 1614-1 à L. 1614-7 du CGCT

5. MODALITÉS D'APPLICATION ET JUSTIFICATION DU DÉLAI D'HABILITATION

5.1. MODALITÉS D'APPLICATION

5.1.1 Application dans le temps

Ces dispositions entrent en vigueur au lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

5.1.2 Application dans l'espace

La mesure envisagée s'applique en France métropolitaine et en outre-mer.

5.1.3 Textes d'application

Un décret en Conseil d'Etat précisera les modalités de la poursuite du transfert de gestion du FEADER.

5.2. JUSTIFICATION DU DÉLAI D'HABILITATION

Le délai d'habilitation de dix-huit mois prévu au II est nécessaire compte tenu de caractère technique des dispositions qui devront être modifiées ou adaptées afin d'assurer la conformité avec la législation européenne.

Le projet de loi de ratification de l'ordonnance sera déposé devant le Parlement au plus tard trois mois après la publication de l'ordonnance.

CHAPITRE IX - DISPOSITIONS RELATIVES À L'AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

Article 25 - Habilitation pour mettre le droit national en conformité avec les règles européennes de la concurrence et de modifier le livre IV du code de commerce pour simplifier les procédures devant l'Autorité de la concurrence et en accroître l'efficacité

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. LES MOYENS D'ACTION DE L'AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE ET DU MINISTRE CHARGÉ DE L'ÉCONOMIE

1.1.1. Le pouvoir de transaction et d'injonction du Ministre chargé de l'économie

L'article L. 464-9 du code de commerce confie au Ministre de l'économie, et sur délégation à la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), un pouvoir de transaction et d'injonction pour sanctionner les pratiques anticoncurrentielles locales dont l'Autorité de la concurrence (AdlC) ne se saisit pas.

La DGCCRF peut enjoindre aux entreprises concernées de mettre fin à ces pratiques et, le cas échéant, leur proposer une transaction financière si ces pratiques affectent un marché de dimension locale, ne concernent pas des faits relevant des articles 101 et 102 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) et sous réserve que le chiffre d'affaires individuel des entreprises en cause soit inférieur à 50 millions d'euros et que leurs chiffres d'affaires cumulés ne dépassent pas 200 millions d'euros.

L'application de ce dispositif soulève cependant des difficultés. En effet, il est parfois malaisé d'évaluer si une pratique se limite à un marché local tant dans son objet que dans ses effets. Par ailleurs, ce dispositif ne tient pas suffisamment compte des effets du développement du commerce électronique au sein des les PME et des TPE.

1.1.2. Les opérations de visite et saisie

Lorsque les opérations de visites et saisies, se déroulent sur plusieurs zones géographiques, un premier juge délivre une ordonnance principale pour le territoire pour lequel il est compétent, puis d'autres juges, compétents pour d'autres territoires délivrent des ordonnances secondaires.

En outre, il est actuellement nécessaire de recourir à plusieurs officiers de police judiciaire par site visité (c'est-à-dire à autant d'officiers de police judiciaire que d'équipes d'enquêteurs sur le site). Cette contrainte implique la mobilisation de ressources importantes pour les services de police judiciaire sans que les droits et les intérêts de l'entreprise en soient de ce fait mieux garantis.

1.2. LES PROCÉDURES DEVANT L'AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

1.2.1 La collégialité des décisions

Les décisions de l'Autorité de la concurrence sont en principe prises de manière collégiale (les délibérations se font à la majorité des membres présents), conformément à l'article L.463-1 du code de commerce.

Toutefois, le 4 ème alinéa de cet article précise les modalités selon lesquelles une décision de l'Autorité de la concurrence peut être adoptée par le président de l'Autorité ou un vice-président statuant seul :

- les décisions d'irrecevabilité (en raison du défaut d'intérêt ou de qualité à agir de l'auteur, de la prescription des faits ou encore pour défaut de compétence) (L. 462-8 du code de commerce) ;

- les décisions de rejet (pour défaut d'éléments probants, lorsque les pratiques sont locales et peuvent être traitées par le ministre, lorsqu'une autre autorité membre du REC a déjà traité ou est en train de traiter le cas, ou enfin lorsque l'Autorité s'était déjà saisie d'office) (L. 462-8 du code de commerce) ;

- les décisions donnant acte du désistement d'une partie ou bien des dessaisissements effectués par la Commission (L. 462-8 du code de commerce) ;

- les décisions prises après une saisine du ministre (et notamment en cas de refus de transaction concernant une pratique locale ou d'inexécution d'une injonction de mettre fin à une pratique) (L. 464-2 à 6 en application de l'article L. 464-9 du code de commerce) ;

- les décisions de phase 1 en contrôle des concentrations (caractère contrôlable ou non, autorisation avec ou sans engagement, ou décision de passage en phase 2) (L. 430-5 du code de commerce) ;

- certaines décisions de phase 2 en contrôle des concentrations concernant en particulier la révision de décisions de phase 2 antérieures ou de nouvelles décisions nécessaires à la mise en oeuvre de décisions de phase 2 antérieures (L. 430-7 du code de commerce).

D'autres décisions n'entraînant pas de sanctions pourraient relever d'un seul membre du collège, afin d'alléger les procédures et d'en réduire la durée.

1.2.2 L'information préalable de l'Autorité de la concurrence en matière de prix et tarifs réglementés

Le dernier alinéa de l'article L. 462-2-1 du code de commerce impose une formalité d'information préalable de l'Autorité de la concurrence de tout projet de révision des prix ou des tarifs réglementés, au moins deux mois avant la révision du prix ou du tarif en cause. Or cette formalité est dépourvue d'utilité.

En effet, s'agissant du calendrier prévisionnel des révisions tarifaires, l'Autorité a toute latitude pour interroger le gouvernement sur ce point si nécessaire, dans l'optique par exemple de formuler un avis dans le cadre d'une auto-saisine. En tout état de cause, dans la majorité des cas, ce calendrier prévisionnel est connu publiquement à l'avance, les révisions tarifaires étant périodiques, leurs échéances précises étant même parfois fixées par les textes.

1.2.3 La procédure contradictoire

L'article L. 463-2 du code de commerce organise la procédure contradictoire qui doit être suivie pour l'examen d'un dossier contentieux devant l'Autorité de la concurrence, avant transmission du dossier d'instruction au collège de l'Autorité en vue de la séance prévue à l'article L. 463-7 du même code.

Cet article institue un double tour de contradictoire écrit, en réponse d'abord à la notification des griefs, puis au rapport. Conformément aux dispositions de l'article L. 463-7 du code de commerce, les parties peuvent également développer leurs arguments devant le collège lors de la séance, ce qui conduit in fine à trois tours de contradictoire.

Toutefois, en application de l'article L.463-3 du code de commerce, le rapporteur général peut décider que l'affaire sera examinée sans l'établissement préalable d'un rapport (la procédure est dite alors « simplifiée »). Dans cette hypothèse, la sanction pécuniaire que peut prononcer l'Autorité ne peut excéder 750 000 €.

Le double tour de contradictoire écrit conduit à allonger la procédure d'instruction : la rédaction du rapport, les observations des parties et leur traitement par les services d'instruction allongent généralement la durée de la procédure de plusieurs mois.

En outre, cette organisation est quasiment unique en Europe. La plupart des autorités nationales de concurrence de l'Union ne disposent pas d'un triple tour de contradictoire et quand c'est le cas, comme en Espagne, le dernier tour oral, organisé à la demande des parties, n'est que très rarement mis en oeuvre. La Commission européenne, quant à elle, recourt essentiellement à un tour de contradictoire écrit, le tour de contradictoire oral, réalisé, là aussi, à la demande des parties, étant rarement utilisé.

1.2.4 La procédure de « clémence »

Le IV de l'article L. 464-2 du code de commerce prévoit d'exonérer totalement ou partiellement d'une sanction pécuniaire une entreprise partie à une entente contraire à l'article L 420-1 du même code si elle a contribué à établir la réalité de la pratique prohibée et à identifier ses auteurs. La procédure de clémence est initiée par l'entreprise qui demande à l'Autorité ou au ministre chargé de l'économie de bénéficier de cette exonération totale ou partielle.

Une distinction est opérée entre les demandeurs de type 1 qui contribuent à révéler une infraction et qui peuvent prétendre à une immunité d'amende et les demandeurs de type 2 qui apportent une contribution significative à la démonstration de l'infraction poursuivie par l'autorité de concurrence et qui peuvent prétendre à une réduction d'amende.

A la suite de cette demande, le rapporteur général ou le ministre chargé de l'économie saisit le collège afin que ce dernier émette un avis de clémence qui précise l'exonération envisagée et les conditions auxquelles est subordonnée cette exonération. Cet avis est rendu après que le demandeur et le commissaire du Gouvernement ont présenté leurs observations sur un rapport des services d'instruction. L'article L. 464-2 ajoute que cet avis est transmis à l'entreprise concernée et au commissaire du Gouvernement et qu'il n'est pas publié.

Dans le cadre de sa décision de sanction, l'Autorité peut, après avoir entendu l'entreprise concernée et le commissaire du Gouvernement, sans établissement préalable d'un rapport, accorder l'exonération envisagée dans l'avis si les conditions qui y figurent ont été respectées.

Cette procédure d'avis préalable qui intervient très en amont de l'instruction soulève un certain nombre de difficultés.

Tout d'abord, cette procédure d'avis contribue dans les cas d'entente, notamment de cartels, à des retards dans l'instruction. En effet, elle impose aux services d'instruction de produire pour chaque demandeur de clémence un rapport qui apprécie la coopération du demandeur et la valeur ajoutée de cette coopération pour proposer une exonération conditionnelle au collège. Ce rapport fait l'objet d`observations de la part des parties et est présenté en séance devant le collège. Cette procédure d'avis préalable a pour effet de ralentir considérablement le déroulé de l'instruction.

En premier lieu, si l'Autorité recourt à une opération de visite et saisie à la suite d'une demande de clémence, elle doit préalablement adopter un avis de clémence à l'égard du premier demandeur qui a révélé la pratique prohibée et apporter à l'Autorité les éléments matériels nécessaires à la réalisation d'une opération de visite et saisie.

Cette procédure conduit donc à retarder les opérations de visite et saisie, alors que celles-ci doivent être réalisées le plus rapidement possible pour écarter le risque de déperdition des preuves.

En second lieu, lorsque des demandes de clémence de type 2 sont introduites auprès de l'Autorité, notamment après des opérations de visite et saisie, il incombe aux services d'instruction d'évaluer la valeur ajoutée des informations et pièces transmises par le demandeur de clémence. Or cette valeur ajoutée s'apprécie au regard des informations dont l'Autorité dispose déjà, et notamment des éléments que les services d'instruction ont recueillis à l'occasion des opérations de visite et saisie, souvent très nombreux. Cette comparaison de pièces est souvent très longue et retarde d'autant le début de l'instruction à proprement parler.

Les avis de clémence même s'ils constituent des actes préparatoires à la décision, peuvent apparaître comme une forme de « pré-jugement » puisqu'ils identifient des pratiques qui sont susceptibles de tomber sous le coup de l'article L. 420-1. En outre, la procédure d'avis induit un certain nombre de difficultés pratiques au moment de la composition des formations de jugement puisque les membres ayant siégé pour l'avis de clémence ne siègent pas pour la décision au fond.

Certains acteurs économiques font également valoir que la procédure française, avec le recours à un avis de clémence, est lourde et longue et constitue ainsi un facteur dissuasif pour déposer une demande de clémence. La suppression de cet avis aurait également le mérite d'harmoniser davantage la procédure française avec celle appliquée par la Commission européenne et par les autres autorités nationales de concurrence en Europe.

A cet égard, la communication de la Commission du 8 décembre 2006 précise que, pour un demandeur de type 1, la Commission lui accorde par écrit une immunité conditionnelle d'amende quand elle a constaté que certaines conditions d'octroi de cette immunité sont remplies et, pour un demandeur de type 2, la Commission l'informe par écrit au plus tard à la date de la notification de griefs, de son intention de réduire le montant de l'amende dans une fourchette de réduction, quand elle est parvenue à la conclusion provisoire que les éléments communiqués par l'entreprise apportent une valeur ajoutée significative et a constaté qu'un certain nombre de conditions sont remplies.

1.2.5 Les dispositions relatives à l'Outre-Mer

Dans sa rédaction actuelle 1 ( * ) , l'article L. 752-27 du code de commerce permet à l'Autorité de la concurrence (AdlC) d'enjoindre à tout opérateur exploitant un ou plusieurs magasins de commerce de détail de céder certains de ses actifs, dès lors que les conditions suivantes sont remplies :

- une entreprise ou un groupe d'entreprises exploitant un ou plusieurs magasins de commerce de détail détient une position dominante,

- cette concentration excessive porte atteinte à une concurrence effective dans la zone considérée,

- cette atteinte se traduit, dans la même zone, par des pratiques de prix ou de marges élevés en comparaison des moyennes habituellement constatées dans le secteur économique concerné.

Ce dispositif, par lequel l'AdlC peut aussi accepter des engagements proposés par les entreprises, a été instauré par la loi LROM du 20 novembre 2012 2 ( * ) afin de permettre à l'AdlC d'intervenir de manière ciblée dans des zones de chalandise où un degré élevé de concentration économique dans le secteur du commerce de détail, conjugué à l'éloignement et l'insularité des territoires ultramarins, a pour conséquence que le niveau des prix des produits de consommation courante est structurellement élevé.

L'AdlC a souligné dans son avis 19-A-12 3 ( * ) que les conditions auxquelles est soumise la mise en oeuvre des dispositions lui permettant le cas échéant d'agir sur la structure du marché (via l'imposition de cessions d'actifs) sont définies de façon trop strictes, ce qui a eu pour conséquence qu'elle n'a pas été en mesure de les utiliser.

L'interdiction des exclusivités d'importation introduite dans le code de commerce (article L. 420-2-1) par la loi LROM du 20 novembre 2012 4 ( * ) avait pour objet de stimuler la concurrence entre grossistes-importateurs au sein d'un même DROM. L'AdlC, dans son avis 19-A-12 5 ( * ) , a souligné que si cette mesure semble avoir commencé à fluidifier les relations entre grossistes-importateurs et fournisseurs via le développement des procédures de mises en concurrence, son impact demeure limité.

Constatant qu'une part non négligeable des groupes de distribution ultramarins sont, de fait, également présents en tant que grossistes-importateurs sur le marché de la vente en gros, l'AdlC estime que cette intégration verticale est susceptible de soulever des problèmes de concurrence, en particulier en matière d'allocation des budgets de coopération commerciale.

Elle souligne l'impact négatif des pratiques de discrimination mises en oeuvre par les opérateurs intégrés pour la concurrence intra-marque : en l'absence de sources alternatives d'approvisionnement, des distributeurs non-intégrés qui feraient l'objet de pratiques discriminatoires n'ont pas la possibilité de s'adresser à un autre grossiste pour les produits d'une même marque.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Il est nécessaire de transposer, au plus tard le 4 février 2021, la directive (UE) 2019/1 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 visant à doter les autorités de concurrence des États membres des moyens de mettre en oeuvre plus efficacement les règles de concurrence et à garantir le bon fonctionnement du marché intérieur (dite « directive ECN+ »).

Les dispositions de cette directive qui nécessitent encore une transposition en droit national concernent notamment :

- La possibilité pour l'Autorité de la concurrence de prononcer des injonctions structurelles dans le cadre de procédures contentieuses concernant des pratiques anticoncurrentielles ;

- La procédure d'engagements ;

- L'instauration d'un montant maximum d'amende unique fixé à 10 % du chiffre d'affaires mondial de l'entreprise ;

- La consécration du principe de la responsabilité financière des membres de l'association d'entreprises ;

- La codification de la procédure de clémence et de sa mise en oeuvre ;

- La codification de dispositions permettant la coopération entre autorités nationales de concurrence.

La transposition de la directive impose de modifier les dispositions du droit national applicables aux sanctions pécuniaires.

A cette fin, il est fait le choix d'introduire dans la loi une mesure d'habilitation législative permettant au Gouvernement de prendre ces mesures par voie d'ordonnance.

A cette transposition s'ajoutent des réformes tenant à l'activité de l'Autorité de la concurrence, relatives à ses procédures d'enquête, d'instruction et de jugement dont l'adoption exige des mesures de nature législative. Ces mesures font l'objet d'une mesure d'habilitation législative permettant au Gouvernement de les prendre par voie d'ordonnance.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Les mesures envisagées visent à mettre en conformité le droit national avec le droit communautaire de la concurrence (transposition de la directive (UE) 2019/01 du 11 décembre 2019).

Les mesures envisagées visent à améliorer les moyens d'action des autorités chargées de lutter contre les pratiques anticoncurrentielles (élargissement des cas où le ministre chargé de l'économie peut imposer des injonctions ou transiger avec les entreprises).

Elles visent aussi à simplifier les modalités d'intervention des officiers de police judiciaire dans les opérations de visite et de saisie (présence d'un seul officier de police judiciaire par site visité).

Elles visent également à alléger les procédures devant l'Autorité de la concurrence (élargissement du recours aux décisions non collégiales, suppression de l'information préalable de l'Autorité pour toute révision de prix ou tarifs réglementés, élargissement de la procédure simplifiée, clarification des critères de détermination des sanctions par l'Autorité de la concurrence, simplification de la procédure relative à la clémence).

Enfin, les mesures envisagées spécifiques à l'Outre-Mer visent à assouplir l'exercice par l'Autorité de la concurrence des pouvoirs lui permettant d'agir sur la structure du marché (via des injonctions structurelles) et à stimuler la concurrence dans la distribution des produits lors qu'il existe une situation d'exclusivité d'importation. :

3. DISPOSITIF RETENU

Les mesures envisagées autorisent le Gouvernement à prendre par ordonnance toute mesures relevant du domaine de la loi permettant d'accroître l'efficacité des procédures en matière de lutte contre les pratiques anticoncurrentielles et de stimuler la concurrence :

3.1. I - A) RELATIF À LA MISE EN CONFORMITÉ DU DROIT NATIONAL AVEC LE DROIT COMMUNAUTAIRE DE LA CONCURRENCE

L'article habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance diverses mesures destinées à mettre le droit français en conformité avec la directive (UE) 2019/1 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 visant à doter les autorités de concurrence des États membres des moyens de mettre en oeuvre plus efficacement les règles de concurrence et à garantir le bon fonctionnement du marché intérieur (dite « directive ECN+ »).

La directive dite « directive ECN+ » doit être transposée au plus tard le 4 février 2021.

La transposition de la directive, qui impose de modifier les dispositions du droit national applicables aux sanctions pécuniaires, devrait conduire notamment à clarifier les critères de détermination de la sanction par l'Autorité de la concurrence, fixées à l'article L. 464-2 du code de commerce, par référence à la durée et à la gravité de l'infraction, et par la suppression de la référence au « dommage à l'économie ».

Cette clarification serait en ligne avec la pratique et la jurisprudence, et écarte toute confusion avec la notion de dommage privé. L'ambiguïté de vocabulaire liée aux différentes acceptions de la notion de dommage induit en effet souvent des incompréhensions et des débats inutiles devant l'Autorité de la concurrence et les instances d'appel.

3.2. I - B) RELATIF À LA MODIFICATION DU CODE DE COMMERCE

Le 5 ème tiret élargirait les cas où le ministre chargé de l'économie peut imposer des injonctions ou transiger avec les entreprises, en levant la condition tenant à la dimension locale du marché dans l'article L. 464-9 du code de commerce.

Afin de lever toute ambiguïté dans le dispositif actuel, de le simplifier et de le moderniser, il pourrait être proposé de ne plus limiter sa mise en oeuvre au caractère local des marchés affectés par les pratiques anticoncurrentielles. La suppression de ce critère apporterait de la clarté aux entreprises leur assurant une plus grande sécurité juridique.

3.2.1 La simplification et la modernisation des opérations de visite et saisie

Le 1 er tiret viserait à améliorer, à l'article L. 450-4 du code de commerce, le dispositif des visites domiciliaires actuellement en vigueur en France qui permet à l'Autorité de la concurrence et à la DGCCRF de rechercher, après avoir obtenu l'autorisation du juge des libertés et de la détention, des éléments de preuve de l'existence de pratiques anticoncurrentielles.

Cette proposition de modification s'inspire de l'expérience acquise depuis la réforme introduite par l'ordonnance n° 2008-1161 du 13 novembre 2008 portant modernisation de la régulation de la concurrence.

Par exemple, il serait proposé de :

- permettre qu'un seul officier de police judiciaire par site visité assiste aux opérations.

Dans le régime actuel, il est nécessaire de recourir à plusieurs officiers de police judiciaire par site visité (autant d'officiers de police judiciaire que d'équipes d'enquêteurs sur le site). Cette contrainte implique la mobilisation de ressources importantes pour les services de police judiciaire sans que les droits et les intérêts de l'entreprise en soient de ce fait mieux garantis.

En effet, dans l'hypothèse d'un seul officier de police judiciaire par site visité, ces droits et intérêts demeurent préservés : la présence constante de l'occupant des lieux ou de son représentant (et de son conseil le cas échéant) permettra de faire valoir les droits et intérêts de l'entreprise en cas de contentieux ultérieur, l'officier de police judiciaire présent sur les lieux supervisant lesdites opérations (comme le ferait le juge s'il était présent) et pouvant intervenir sur interpellation de l'occupant des lieux ou de son représentant, en cas de contestation sérieuse qui lui serait soumise.

- simplifier les modalités de saisine du juge des libertés et de la détention concernant le déroulement des opérations de visite et saisie.

Les mesures envisagées auraient pour objet de permettre qu'un seul et même juge des libertés et de la détention puisse autoriser et contrôler l'ensemble des opérations de visite et de saisie dès lors qu'au moins l'un des lieux à visiter est situé dans le ressort de son tribunal judiciaire. Lorsque ces opérations ont lieu en dehors du ressort de son tribunal judiciaire, le juge conserverait la possibilité de délivrer une commission rogatoire pour exercer leur contrôle au juge des libertés et de la détention dans le ressort duquel s'effectue la visite.

3.2.2 L'allègement des procédures devant l'Autorité de la concurrence

Le 2ème tiret élargirait le champ des décisions qui peuvent être adoptées par le président ou un vice-président de l'Autorité de la concurrence statuant seul, en application de l'article L. 461-3 du code de commerce.

Il pourrait être proposé d'élargir le « juge unique » aux décisions de saisine d'office réalisées sur proposition du rapporteur général de l'Autorité (III de l'article L. 462-5 du code de commerce).

Ces décisions concernent en effet généralement des situations dans lesquelles le rapporteur général propose au collège de se saisir d'office de pratiques ayant fait l'objet d'un rapport administratif d'enquête des services du ministre chargé de l'économie (DGCCRF). Elles n'ont pas pour objet de sanctionner des pratiques, mais de permettre aux services d'instruction de l'Autorité, à partir de ce rapport, de proposer les suites appropriées (notification de griefs ...). S'agissant de décisions qui ne conduisent pas en elles-mêmes à des sanctions, elles peuvent échapper au principe de la collégialité.

Les affaires plus complexes, en particulier les décisions de sanctions, de non-lieu ou prononçant des mesures conservatoires demeurent en revanche soumises au principe de collégialité.

Il pourrait également être proposé d'élargir le recours au « juge unique » aux décisions de révision des engagements prises en application de l'article L.464-2 du code de commerce.

- Le 3 ème tiret pourrait supprimer l'information préalable de l'Autorité de la concurrence en cas de révision de tarifs et prix réglementés, en abrogeant le dernier alinéa de l'article L. 462-2-1 du code de commerce.

Dans une perspective de simplification, il pourrait être proposé de supprimer cette obligation d'information, dépourvue d'utilité, source de complexification de la régulation tarifaire et d'insécurité juridique.

- Le 4 ème tiret étendrait la faculté pour l'Autorité de la concurrence de recourir à une procédure simplifiée en complétant à cet effet l'article L. 463.3 du code de commerce. et en supprimant l'article L. 464-5 de ce code.

Afin de réduire la durée d'instruction des affaires, d'harmoniser la procédure française avec celle de la plupart des autorités de concurrence en Europe, tout en préservant les droits de la défense, il pourrait être proposé de modifier l'équilibre actuel de la procédure contentieuse antitrust en faisant du principe du contradictoire écrit à un seul tour (envoi d'une notification des griefs sans établissement du rapport) la norme et de l'établissement du rapport l'exception, laquelle serait laissée à l'appréciation du rapporteur général en fonction des circonstances du cas d'espèce. Ainsi serait généralisée la procédure contradictoire à deux tours, à l'instar de ce qui se pratique dans un grand nombre de pays de l'Union, une procédure contradictoire à trois tours demeurant possible dans des cas complexes.

Dans certains cas complexes, l'étape du rapport peut en effet constituer une étape utile pour affiner la compréhension de certains arguments (notamment économiques) et renforcer la robustesse finale des décisions grâce à un débat contradictoire plus approfondi.

La mesure proposée conduirait à ce que le principe du contradictoire se concentre autour de la seule notification des griefs, en laissant à l'appréciation du rapporteur général la faculté de décider l'établissement d'un rapport transmis aux parties en fonction de l'affaire et de sa complexité.

- Le 6 ème tiret aurait pour objet de supprimer l'avis de clémence prévu à l'article L. 464-2 IV du code de commerce, tout en accompagnant cette suppression par des mesures d'information pour les demandeurs de clémence, afin de leur donner une prévisibilité sur la sanction encourue et le déroulement de la procédure.

3.2.3 Les mesures spécifiques à l'Outre -Mer

Il s'agirait de permettre à l'Autorité de la concurrence d'enjoindre à tout distributeur agissant au stade du commerce de détail de céder certains de ses actifs, non plus sous réserve d'avoir démontré une atteinte à la concurrence effective , mais après avoir caractérisé des préoccupations de concurrence résultant des prix, des marges ou des taux de rentabilité élevés pratiqués par l'entreprise. Le champ de l'injonction structurelle est étendu aux grossistes ;

Il pourrait être également introduit une interdiction expresse des pratiques discriminatoires de la part d'une entreprise ou d'un groupe d'entreprises, au détriment de toute autre entreprise avec lequel elle n'a pas de lien de nature capitalistique ; cette interdiction des conditions discriminatoires s'applique aux grossistes-importateurs mais aussi aux distributeurs dès lors qu'il existe une situation d'exclusivité d'importation de fait des produits concernés.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

L'analyse précise des conséquences attendues de la mesure sera effectuée dans la fiche d'impact exposant les dispositions de l'ordonnance prise sur le fondement de la présente habilitation.

Néanmoins, il peut d'ores et déjà être fait état des impacts suivants :

Les mesures envisagées devraient être compatible avec le droit de l'union européenne en matière de concurrence (i.e. directive (UE) 2019/1 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 visant à doter les autorités de concurrence des Etats membres des moyens de mettre en oeuvre plus efficacement les règles de concurrence et à garantir le bon fonctionnement du marché intérieur).

Ces mesures devraient également :

- permettre une économie de moyens pour les services de police judiciaire qui interviennent dans les procédures de visites domiciliaires, tout en préservant les droits de la défense et accélérer la réalisation des opérations de visite et de saisie ;

- contribuer à la diminution des délais de traitement des affaires devant l'Autorité de la concurrence en facilitant l'organisation des séances (extension du recours possible au juge unique, suppression de l'avis de clémence) ;

- réduire la charge administrative pesant sur les services du Gouvernement (suppression de l'information préalable de l'Autorité de la concurrence en cas de révision des tarifs et prix réglementés).

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Ces dispositions sont soumises, à titre facultatif, à l'avis du Conseil supérieur de l'audiovisuel, à l'avis de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, de la Haute autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur internet et de la Commission nationale de l'informatique et des libertés.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

Les dispositions envisagées entreront en vigueur au lendemain de la publication de la loi au Journal Officiel , à l'exception de la réforme relative au dispositif de clémence devant l'Autorité de la concurrence dont les modalités nécessitent l'adoption d'un décret en Conseil d'Etat.

6. JUSTIFICATION DU DÉLAI D'HABILITATION

Le délai d'habilitation de douze mois est nécessaire compte tenu de la technicité des dispositions législatives devant être modifiées, lesquelles devront pouvoir intégrer les mesures des directives européennes dans le code de commerce et permettre des consultations des parties prenantes.

Le projet de loi de ratification de l'ordonnance sera déposé devant le Parlement au plus tard trois mois après la publication de l'ordonnance.


* 1 Cette rédaction résulte d'une modification de l'article L. 752-27 du code de commerce introduite par la loi n°2015-990 du 6 août 2015 relative à la croissance, à l'activité, et à l'égalité des chances économiques , cet article ayant été inséré dans le code de commerce par la loi LROM (cf. infra).

* 2 Loi n°2012-1270 du 20 novembre 2012 relative à la régulation économique outre-mer et portant diverses dispositions relatives aux outre-mer.

* 3 Avis 19-A-12 du 4 juillet 2019 concernant le fonctionnement de la concurrence en Outre-mer, § 237 et suivants.

* 4 Loi n°2012-1270 du 20/11/2012 relative à la régulation économique outre-mer et portant diverses dispositions relatives aux outre-mer.

* 5 Avis 19-A-12 du 4/07/ 2019 concernant le fonctionnement de la concurrence en Outre-mer, § 237 et suivants.

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