EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La gestion de la crise sanitaire n'a pas été seulement marquée par de multiples défauts d'efficacité dans la chaine d'actions et de décisions publiques, elle a également été abimée par un grave défaut d'humanité.

En effet, pendant de longs mois, dans les EHPAD, les foyers pour personnes handicapées ou au sein des établissements hospitaliers, des malades en fin de vie, des personnes âgées, des concitoyens fragiles ont été privés de tout contact, les visites ayant été supprimées. Derrière les portes closes, beaucoup de nos compatriotes sont décédés seuls, sans la présence et le soutien de leurs proches suscitant la souffrance et parfois la colère. Ainsi, de nombreux témoignages mettent enfin des mots et des visages sur ces drames passés sous silence pendant de longs mois.

Il est juste et nécessaire que non seulement ces drames soient pleinement reconnus mais surtout que le législateur pose des garanties d'humanité afin qu'ils ne se reproduisent plus.

Nous le devons aux victimes, à leurs proches mais également aux soignants qui ont tout fait, parfois malgré les directives prises, pour que des visites subsistent. Ils ont montré pendant cette période de crise leur inlassable dévouement et leur grande humanité.

Nous le devons, aussi, à notre société, afin qu'elle ne renonce pas aux principes de civilisation qui la fondent.

De ces drames, nous devons tirer un enseignement : si nous voulons de bonne foi protéger la vie, nous ne pouvons pour autant réduire celle-ci à sa seule dimension biologique. Couper les liens affectifs des personnes fragiles, c'est aussi, pour beaucoup d'entre elles, les couper de leurs raisons de vivre.

Aussi, cette proposition de loi vise-t-elle à instaurer dans notre législation un droit de visite pour garantir dans les faits que les résidents en EHPAD, en foyers pour personnes handicapées ou soignées dans les établissements de santé ne soient pas abandonnés à l'isolement, coupés de tout lien avec leurs proches.

L'article 1 pose le principe d'un droit de visite pour les patients des établissements de santé ou les résidents des EHPAD ou des foyers pour handicapés. Le droit est journalier. Le refus est encadré par la loi et doit demeurer l'exception sous le contrôle du juge.

L'article 2 concerne l'application de ce droit dans les établissements de santé. Ce droit ne peut être refusé par l'établissement que s'il y a menace à l'ordre public et par le médecin chef de service si les raisons invoquées sont liées à la santé des patients, des visiteurs ou des personnels. Seul le médecin chef de service peut invoquer des raisons de santé. Les règles doivent demeurer différentes selon les types de service. Dans les établissements de santé, le médecin chef de service peut définir une règle restrictive qui s'applique à tous. Il peut y déroger à sa guise en fonction des circonstances.

L'article 3 concerne l'application de ce droit dans les EHPAD et les foyers pour personnes handicapées. Dans ces établissements, le refus doit être motivé au cas par cas, individuellement en fonction des circonstances de fait. Si le refus est lié à la protection de la santé, l'accord d'un médecin est toujours nécessaire. Le refus pour être fondé doit démontrer que la visite est absolument impossible. Et que ni les gestes barrières, ni le port d'équipement, ni de lieu spécifique dans l'établissement ne permettent à un résident de recevoir des visiteurs.

L'article 4 prévoit que, concernant les personnes en fin de vie, les établissements de santé, les EHPAD et les foyers d'handicapés sont tenus d'assurer les visites et de mettre en place les conditions qui permettent ces visites (lieu dédié par exemple).

L'article 5 prévoit que les dispositions liées à l'état d'urgence ne sauraient permettre au Premier ministre de déroger aux règles fixées par le présent texte.

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