Projet de loi portant approbation de la convention France-Suisse relative au raccord de la Suisse au réseau ferré français

N° 322

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2001-2002

Rattaché pour ordre au procès-verbal de la séance du 21 février 2002

Enregistré à la Présidence du Sénat le 12 juin 2002

PROJET DE LOI

autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse relative au raccordement de la Suisse au réseau ferré français , notamment aux liaisons à grande vitesse (ensemble une annexe),

PRÉSENTÉ

au nom de M. JEAN-PIERRE RAFFARIN,

Premier ministre,

par M. DOMINIQUE DE VILLEPIN,

Ministre des affaires étrangères, de la coopération et de la francophonie.

( Renvoyé à la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement).

Traités et conventions.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Depuis vingt ans, la France mène une politique, ambitieuse mais économiquement réaliste, de raccordement de son réseau ferré à grande vitesse avec ses principaux voisins. A ce titre, des réflexions et des études ont été menées conjointement par la France et par la Suisse, qui ont conduit à la signature le 5 novembre 1999 d'une convention bilatérale destinée à favoriser la liaison ferrée à grande vitesse entre les deux pays.

Cet accord concrétise la volonté des deux gouvernements d'améliorer les conditions de circulation des personnes entre la France et la Suisse en diminuant les temps de parcours entre, d'une part, Paris et le sud de la France et, d'autre part, les principales agglomérations helvétiques.

La convention prévoit d'utiliser les liaisons à grande vitesse existantes ou en projet sur le territoire national français.

L'objectif principal de cette convention est d'insérer les liaisons franco-suisses dans le cadre du TGV est-européen, retenu aux sommets de Corfou et d'Essen parmi les quatorze grands projets européens et déclaré d'utilité publique le 14 mai 1996. La première phase du projet prévoit le raccordement entre Vaires (Seine-et-Marne) et Baudrecourt (Moselle) à l'horizon 2006.

La convention a également pour but d'améliorer les liaisons empruntant déjà certaines sections de la ligne à grande vitesse Paris-Lyon. Dans ce cadre, des études préliminaires achevées en juin 1998, ont montré l'intérêt pour les liaisons entre Paris et Genève d'une réhabilitation de la ligne Bourg-en-Bresse/Bellegarde (Ain), ainsi que des travaux de renforcement de la traction électrique entre Dijon et la frontière suisse pour les trains assurant la desserte des axes Paris-Lausanne et Paris-Neuchâtel-Berne.

L'amélioration de ces liaisons ainsi que la construction des lignes à grande vitesse actuellement en projet sont également prévues au schéma directeur national des liaisons ferroviaires à grande vitesse.

Par ailleurs, cet accord est conforme aux décisions du Conseil fédéral suisse d'affecter une partie des investissements prévus par le programme de construction de lignes ferroviaires à travers les Alpes à l'amélioration du raccordement de la Suisse au réseau européen à grande vitesse. Ce principe, approuvé par les chambres fédérales suisses en avril 1998, a été adopté par référendum du peuple suisse en novembre 1998.

Ainsi, dans le cadre des réflexions déjà conduites, la convention du 5 novembre 1999 précise les conditions d'une amélioration à court et moyen terme du raccordement de la Suisse au réseau ferroviaire français.

Les articles 1 er , 2 , 3 et 5 du texte visent à obtenir une meilleure performance des liaisons ferroviaires par des mesures d'exploitation et des investissements sur le réseau ferroviaire national français. L'accord s'appuie sur la démarche de coopération déjà engagée et privilégie trois axes majeurs de transport :

a) les liaisons Paris-Genève.

Actuellement les trains à grande vitesse assurant cette liaison empruntent l'itinéraire Paris - Bourg-en-Bresse - Culoz (Ain) - Bellegarde - Genève. La réhabilitation de la ligne du Haut-Bugey entre Bourg-en-Bresse et Bellegarde, dont la section La Cluse - Bellegarde est actuellement fermée à tout trafic, permettrait, sur cet axe, une amélioration substantielle des temps de parcours en diminuant le trajet des trains d'environ 47 km. Les perspectives de gain de temps se situent entre une demi-heure et une heure en fonction du niveau des aménagements portés aux infrastructures.

b) les liaisons Paris - Lausanne et Paris - Neuchâtel - Berne.

Les trains à grande vitesse desservant aujourd'hui les villes situées sur ces deux itinéraires quittent la ligne à grande vitesse entre Paris et Lyon à hauteur de Pasilly (Yonne) pour emprunter la ligne du réseau classique passant par Dijon, Dôle et Frasne (Doubs). Les premières études ont notamment montré l'intérêt de renforcer l'alimentation électrique de la ligne qui, combinée avec des aménagements de relèvement de vitesse, peuvent permettre d'envisager des gains de temps compris entre un quart d'heure et une demi-heure entre Paris et les villes suisses de Lausanne, Neuchâtel et Berne.

c) les liaisons Paris - Bâle.

Deux projets de ligne à grande vitesse concourent à améliorer de façon significative les liaisons entre Paris et la Suisse passant par Bâle. Tout d'abord, le projet de TGV Est, déclaré d'utilité public le 14 mai 1996, permettra de ramener le temps de parcours Paris-Bâle à environ 3 h 30 contre 4 h 50 actuellement. Ultérieurement, le projet de TGV Rhin-Rhône diminuera encore ces temps de parcours avec un temps de 2 h 50 entre les deux villes dans le cadre du projet de branche Est du TGV Rhin-Rhône, et un temps d'environ 2 h 30 avec la réalisation complémentaire de la branche Ouest du projet.

L' article 4 prévoit que les Etats français et suisse apportent les contributions financières nécessaires à la réalisation des travaux d'infrastructures. Une répartition de ces contributions sera recherchée en tenant compte des intérêts respectifs des deux Etats.

L' article 6 précise les conditions d'une bonne coordination entre les deux Etats et les entreprises ferroviaires afin de concourir efficacement à la réalisation des objectifs fixés par la convention.

En vue d'atteindre ces objectifs, il est créé un comité de pilotage ( article 7 ) composé de représentants des deux Parties. Les entreprises gestionnaires des infrastructures et les exploitants ferroviaires des deux Etats participent, en tant que de besoin, aux travaux de ce comité de pilotage.

Telles sont les principales observations qu'appelle la convention du 5 novembre 1999 entre le Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse relative au raccordement de la Suisse au réseau ferré français, notamment aux liaisons à grande vitesse qui, engageant les finances de l'Etat, est soumis au Parlement en vertu de l'article 53 de la Constitution.

PROJET DE LOI

Le Premier ministre,

Sur le rapport du ministre des affaires étrangères, de la coopération et de la francophonie,

Vu l'article 39 de la Constitution,

Décrète :

Le présent projet de loi autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse relative au raccordement de la Suisse au réseau ferré français, notamment aux liaisons à grande vitesse (ensemble une annexe), délibéré en Conseil des ministres après avis du Conseil d'Etat, sera présenté au Sénat par le ministre des affaires étrangères, de la coopération et de la francophonie, qui sera chargé d'en exposer les motifs et d'en soutenir la discussion.

Article unique

Est autorisée l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse relative au raccordement de la Suisse au réseau ferré français, notamment aux liaisons à grande vitesse (ensemble une annexe), signée à Genève le 5 novembre 1999, et dont le texte est annexé à la présente loi.

Fait à Paris, le 12 juin 2002

Signé : JEAN-PIERRE RAFFARIN

Par le Premier ministre :

Le ministre des affaires étrangères, de la coopération et de la francophonie,

Signé : DOMINIQUE DE VILLEPIN

C O N V E N T I O N
entre le Gouvernement de la République française
et le Conseil fédéral suisse relative au raccordement de la Suisse
au réseau ferré français, notamment aux liaisons à grande vitesse
(ensemble une annexe)
Préambule

Le Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse,
Vu la Loi française d'orientation des transports intérieurs du 30 décembre 1982 modifiée,
Vu la Loi française d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire du 4 février 1995 modifiée,
Vu la Loi française portant création de l'établissement public « Réseau ferré de France » en vue du renouveau du transport ferroviaire du 13 février 1997,
Vu le Schéma directeur national français des liaisons ferroviaires à grande vitesse adopté le 1 er avril 1992,
Vu l'Arrêté fédéral suisse sur le transit alpin du 4 octobre 1991,
Vu l'Arrêté fédéral suisse relatif à la construction de la ligne ferroviaire à travers les Alpes, Modifications du 20 mars 1998,
Vu l'article 24 des dispositions transitoires de la Constitution fédérale suisse,
Conscients que des infrastructures de transport performantes constituent la base pour le développement et la compétitivité des économies nationales et des régions,
Désireux d'améliorer les liaisons ferroviaires entre la France et la Suisse et créer ainsi les conditions propices à l'accroissement du trafic ferroviaire,
Souhaitant faciliter le transport de voyageurs entre, d'une part, la France et, d'autre part, les grandes agglomérations de la Suisse,
Désireux de développer également le transport ferroviaire international de marchandises, reconnaissant l'importance que revêt la coopération des organismes ferroviaires des deux parties contractantes,
sont convenus de ce qui suit dans le cadre de leurs compétences :

Article 1 er
Objectif

1 o L'objectif de la présente convention est d'assurer un raccordement optimal du réseau ferroviaire suisse au réseau ferroviaire français et, notamment, aux lignes à grande vitesse. A cet effet, il sera tenu compte des moyens financiers disponibles et du meilleur rapport coût-utilité. En conséquence, les parties contractantes sont convenues de mettre en place des mesures coordonnées en matière d'infrastructure ferroviaire, de financement, d'exploitation rationnelle des lignes et, en accord avec les entreprises ferroviaires concernées, d'utilisation du matériel roulant.
2 o L'amélioration des raccordements de la Suisse au réseau français, notamment pour ce qui concerne les liaisons ferroviaires à grande vitesse, s'effectue selon un processus par étapes et en modules qui peut varier en fonction des priorités nationales en matière d'infrastructures ferroviaires. Elle devra, dans la mesure du possible, assurer la cohérence avec les besoins exprimés au niveau régional.
3 o Un comité de pilotage, dont les spécificités sont définies à l'article 7, est chargé de la mise en oeuvre des mesures d'application en fonction des besoins afin d'atteindre les objectifs susmentionnés.

Article 2
Champ d'application

La présente convention porte sur l'amélioration des liaisons ferroviaires franco-suisses, tant en ce qui concerne le trafic marchandises que le trafic voyageurs, particulièrement celles assurées par trains à grande vitesse entre :
En France :
Paris ;
Sud de la France.
En Suisse :
Genève ;
Lausanne et Neuchâtel, Berne via l'Arc jurassien ;
Bâle-Zurich.

Article 3
Mesures envisagées

Pour atteindre l'objectif mentionné à l'article premier, les mesures suivantes sont envisagées sous réserve de l'application des procédures requises par le droit national de chaque partie :
a) Liaison Paris/Lyon  -  Genève.
A court terme :
Réhabilitation de la ligne du Haut-Bugey (Bellegarde  -  La Cluse  -  Bourg-en-Bresse) permettant l'utilisation éventuelle de matériel roulant pendulaire.
Ultérieurement :
Autres constructions et aménagement ponctuels permettant de réduire les temps de parcours entre Genève et Mâcon.
Amélioration du point de vue de l'exploitation et/ou de l'infrastructure des liaisons entre Paris et Genève dans le cadre de la réalisation des branches ouest et sud du TGV Rhin  -  Rhône.
Articulation avec les transports régionaux.
b) Liaison Paris  -  Arc jurassien.
A court terme :
Amélioration de l'alimentation électrique entre Lausanne/Neuchâtel et Mouchard.
Infrastructure permettant l'utilisation éventuelle de matériel roulant pendulaire.
Ultérieurement :
Aménagements ponctuels de la ligne entre Dole et Lausanne/Neuchâtel.
Amélioration du point de vue de l'exploitation et/ou de l'infrastructure des liaisons entre Paris et la Suisse via l'Arc jurassien dans le cadre de la réalisation de la branche ouest du TGV Rhin  -  Rhône.
Articulation avec les transports régionaux.
c) Liaison Paris  -  Bâle.
A court terme :
Examen des conditions d'amélioration des dessertes entre Paris et Bâle  -  Zurich.
Améliorations ponctuelles dans le secteur Saint-Louis  -  Bâle.
Utilisation de la ligne nouvelle du TGV Est européen.
Ultérieurement :
Amélioration du point de vue de l'exploitation et/ou de l'infrastructure des liaisons entre Paris et la Suisse via Bâle dans le cadre de la réalisation du TGV Rhin  -  Rhône.
Articulation avec les transports régionaux.

Article 4
Exécution et financement

1.  Pour la mise en oeuvre de chacune des mesures prévues dans le cadre de la présente convention, un plan de financement spécifique sera établi par le Comité de pilotage mentionné à l'article 7 et approuvé par les ministres des transports des deux Etats en fonction de leurs compétences respectives.
Dans ce cadre, les parties contractantes apporteront des contributions financières aux travaux réalisés. La répartition de ces contributions sera déterminée en tenant compte des intérêts respectifs des deux parties.
2.  Les mesures envisagées à l'article 3 sont mises en oeuvre de façon progressive et concertée entre les parties contractantes.

Article 5
Performances

1.  Grâce aux mesures définies à l'article 3, les parties s'emploient à rendre l'offre de transport par chemin de fer sur les lignes concernées compétitive par rapport à d'autres modes de transport. Les performances envisagées sur chacune des liaisons figurent à l'annexe 1.
2.  Les parties conviennent de prendre et de coordonner, dans le cadre de leurs compétences, les mesures nécessaires au développement et à la promotion des transports par chemin de fer et du transport combiné en tant que moyens permettant de répondre au volume croissant du transport international de marchandises touchant les deux pays.

Article 6
Coordination entre les parties

Les parties contractantes s'engagent à :
a) Renforcer la coordination en vue d'harmoniser les paramètres techniques dans le trafic ferroviaire international entre les deux Etats,
b) Veiller à ce que leurs autorités compétentes se communiquent, dans la mesure du possible, les données nécessaires à la préparation et à la mise en oeuvre des projets détaillés figurant à l'article 3 de la présente convention ;
c) OEuvrer dans le cadre de leurs compétences pour que les gestionnaires de l'infrastructure et les entreprises ferroviaires des deux Etats coordonnant leur action afin d'améliorer le service des transports sur les liaisons ferroviaires mentionnées à l'article 2 ;
d) Faciliter le passage de la frontière pour le trafic ferroviaire direct, dans le cadre des dispositions législatives et réglementaires applicables dans chaque Etat.

Article 7
Comité de pilotage

1 o Un Comité de pilotage est institué pour traiter les questions relatives à l'application de la présente convention.
2 o Il se compose des représentants désignés par les parties contractantes. Les gestionnaires de l'infrastructure et les entreprises ferroviaires concernés participent, en tant que de besoin, aux travaux du Comité de pilotage. Chaque partie contractante assure les relations avec les collectivités territoriales concernées de son ressort.
3 o Le Comité de pilotage se réunit au moins une fois par an. Il assure le suivi de la mise en oeuvre des dispositions de la présente convention. Le Comité de pilotage est compétent pour modifier l'annexe 1 qui fait partie intégrante de la présente convention.
4 o Le Comité de pilotage établit son règlement intérieur.
5 o Chaque partie contractante peut demander la convocation du Comité de pilotage, si des circonstances particulières l'exigent.

Article 8
Entrée en vigueur

1 o La présente convention entre en vigueur dès que les parties contractantes se seront notifié l'accomplissement de leurs procédures internes requises à cet effet.
2 o Elle est valable jusqu'au 31 décembre 2020 et sera prorogée d'année en année, à moins qu'elle ne soit dénoncée par écrit par l'une des parties contractantes au plus tard six mois avant l'expiration de chaque année civile.
Fait à Genève, le 5 novembre 1999, en deux originaux en langue française.

Pour le Gouvernement
de la République française :
Le ministre de l'équipement,
des transports et du logement,
Jean-Claude  Gayssot
Pour le Conseil fédéral suisse :
Le chef du département
fédéral de l'environnement,
des transports, de l'énergie
et de la communication :
Moritz  Leuenberger
A N N E X E    1
Ad article 5
Performances

1.  Les parties contractantes s'emploient à dégager une combinaison optimale des possibilités d'aménagement des liaisons mentionnées à l'article 2 de la convention qui présente un maximum d'avantage en fonction des potentiels de trafic et des temps de parcours.
2.  Dans cette optique d'amélioration de l'attractivité du mode ferroviaire, les performances suivantes pourraient être envisagées :
Liaison Paris - Genève
Comparé à la durée actuelle de 3 h 35 pour relier Paris et Genève, le meilleur temps de parcours sur cette liaison pourrait être ramené à environ 2 h 30.
Liaison Paris - Arc jurassien
Comparé à la durée actuelle de 3 h 45 pour relier Paris et Lausanne, le meilleur temps de parcours sur cette liaison pourrait être ramené à environ 3 h 15.
Pour la liaison Paris - Berne, le temps gagné sur le tronçon commun entre Paris et Frasne se répercuterait sur la relation avec Berne.
Une éventuelle réalisation de la branche Ouest complète du TGV Rhin-Rhône (Dijon - Aisy) diminuerait le temps de parcours entre Paris et Lausanne/Berne de 10 à 15 minutes supplémentaires.
Liaison Paris - Bâle
Comparé à la durée actuelle de 4 h 50 pour relier Paris et Bâle, le meilleur temps de parcours sur cette liaison pourrait,
-  à court terme, être ramené à environ 3 h 30 (avec première phase du TGV Est européen) respectivement environ 2 h 50 (avec la branche Est du TGV Rhin-Rhône),
-  et, ultérieurement, à environ 2 h 30 (avec TGV Rhin-Rhône branches Est et Ouest

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