Approbation du traité entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord relatif à la mise en oeuvre de contrôles frontaliers dans les ports maritimes de la Manche et de la mer du Nord

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N° 433

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2002-2003

Rattaché pour ordre au procès-verbal de la séance du 24 juillet 2003

Enregistré à la Présidence du Sénat le 10 septembre 2003

PROJET DE LOI

autorisant l'approbation du traité entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d' Irlande du Nord relatif à la mise en oeuvre de contrôles frontaliers dans les ports maritimes de la Manche et de la mer du Nord des deux pays,

PRÉSENTÉ

au nom de M. JEAN-PIERRE RAFFARIN,

Premier ministre,

par M. DOMINIQUE DE VILLEPIN,

Ministre des affaires étrangères.

( Renvoyé à la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement).

Traités et conventions.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le traité signé au Touquet entre la France et le Royaume-Uni le 4 février 2003 procède de la prise en compte, par les deux États, de la montée en puissance de l'immigration irrégulière qu'ils connaissent depuis ces dernières années, et de leur volonté de mettre fin au phénomène.

L'afflux massif d'immigrés de toutes provenances, tentant de bénéficier de la législation britannique plus favorable en matière d'asile et d'accès au marché du travail, a été tout spécialement et principalement observé lors de l'existence du centre de Sangatte, où les demandeurs d'asile et autres candidats à l'immigration trouvaient certes une assistance provisoire, mais étaient exploités par les organisateurs de filières d'immigration clandestine. Cet afflux ne s'est que relativement tari et risque de connaître un « déplacement » dans les ports maritimes assurant la liaison avec la Grande-Bretagne après la fermeture du centre ; en conséquence, la mise en oeuvre de bureaux de contrôles nationaux juxtaposés dans les ports de la Manche et de la mer du Nord des deux États est apparue nécessaire.

Le traité du Touquet constitue donc le fondement juridique sur lequel reposera la mise en place de structures communes de contrôles frontaliers autorisant un meilleur contrôle des personnes, des véhicules et du fret. Ce dispositif a pour objectif de lutter contre l'immigration irrégulière à destination ou en provenance du Royaume-Uni et il illustre l'étroite coopération entre les deux États dans un domaine tout particulièrement sensible.

Le traité permet aux deux Parties de créer des bureaux à contrôles nationaux juxtaposés dans les ports maritimes de la Manche et de la mer du Nord des deux pays, afin de faciliter l'exercice des contrôles frontaliers. Chaque État autorise ainsi ses agents à remplir leur mission sur le territoire de l'autre État.

La désignation des ports maritimes concernés, la création, la modification ou le retrait des bureaux comme des zones de contrôles et des zones restreintes dans ces ports, sont déterminés par les autorités compétentes des deux États. Sauf en cas de besoin opérationnel immédiat, les arrangements pris à cet effet seront confirmés par échange de notes diplomatiques, et entreront en vigueur à l'issue de l'accomplissement des formalités prévues par le droit national de chaque État. Les arrangements temporaires dictés par des besoins opérationnels et visant la modification des zones de contrôles, seront consignés par écrit. Les procureurs de la République territorialement compétents seront associés pour de telles modifications (article 1 er ) .

La définition des expressions retenues dans la description des agents chargés des contrôles frontaliers, comme dans celle des sites, des zones ou situations, fait l'objet de l' article 2 .

L' article 3 stipule que chaque Gouvernement autorise les agents en poste de l'autre État à agir sur son territoire et dans la zone de contrôle circonscrite, conformément aux pouvoirs qu'ils détiennent en matière de contrôles frontaliers. Les agents de l'État d'arrivée peuvent ainsi procéder à des enquêtes en matière d'immigration comme il est mentionné à l'article 2, en vue de déterminer si un refus d'entrée peut être opposé à la personne contrôlée. Les actes d'enquête prévus ne peuvent être que des actes de police administrative. Ce même article précise les compétences des États d'arrivée et de départ, selon la zone de contrôle où les infractions à la réglementation sur les contrôles frontaliers sont commises.

Les contrôles d'immigration effectués par les autorités de l'État de départ et par les autorités de l'État d'arrivée ont pour but de vérifier que la personne remplit les conditions et les obligations fixées en matière de contrôle frontalier pour quitter le territoire de l'un des États et voyager à destination de l'autre (article 4) .

L' article 5 fixe les conditions d'arrestation et de rétention pour interrogatoire des personnes faisant l'objet d'un examen à des fins de contrôles de l'immigration ou de celles soupçonnées d'avoir commis un acte enfreignant la réglementation aux contrôles frontaliers. Les mesures applicables dans des circonstances exceptionnelles sont également précisées dans cet article.

Les procédures des opérations de contrôles frontaliers et les mesures alternatives convenues en cas de situations exceptionnelles font l'objet de l' article 6 .

Lorsqu'une personne se voit refuser le droit d'entrée dans l'État d'arrivée, ou si elle décide de ne pas se soumettre aux contrôles frontaliers de cet État, les autorités de l'État de départ doivent reprendre cette personne sur leur territoire (article 7) .

L' article 8 définit les obligations des deux États en ce qui concerne le fonctionnement des bureaux créés dans le cadre du traité, leur coopération s'exerçant sous réserve de l'application d'autres accords internationaux et en conformité avec leur droit interne. À ce titre, la constatation d'une infraction pénale susceptible de relever de la compétence des juridictions françaises donnera lieu à information des autorités judiciaires.

Le traitement des demandes d'asile ou de protection s'effectue, soit par l'État de départ, soit par l'État d'arrivée, en fonction de l'endroit et du moment (par rapport au contrôle frontalier) où ces demandes sont émises (article 9) .

Les modalités de désignation des agents chargés des contrôles frontaliers, et celles relatives à l'information respective de chaque gouvernement en la matière, font l'objet de l' article 10 , lequel fait également mention des règles de droit pénal applicables à ces agents dans l'exercice de leur mission.

Les articles 11 à 15 du traité fixent le cadre juridique et statutaire dans lequel les agents des deux États exercent leur mission. En particulier, l' article 13 stipule que ces agents sont autorisés à porter leur uniforme national ou un symbole distinctif visible, aussi bien dans l'État de départ que dans l'État d'arrivée. En revanche, le port de leurs armes de service est uniquement autorisé dans la zone de contrôle, et fera l'objet, de même que leur utilisation, d'un accord spécifique entre les deux États.

L'indemnisation des dommages causés par les agents d'une Partie dans le cadre de leurs fonctions officielles relève de la compétence de juridiction de l'État d'origine. Si l'infraction est détachable du service, l'autre Partie peut poursuivre ces agents (article 14) .

Le titre III du traité concerne les bureaux à contrôle nationaux juxtaposés (articles 16 à 21) . Ainsi, les besoins en installations, logements et équipements nécessaires aux agents en charge de la mise en oeuvre des contrôles dans les zones conjointement circonscrites, sont déterminés par accord mutuel. Il en est de même pour l'utilisation des installations, de leur identification et de toutes dispositions intéressant l'activation du dispositif de contrôles, tel qu'indiqué dans les articles 16 à 21.

Les dispositions finales du texte (titre IV) prévoient que le traité peut, si nécessaire, faire l'objet d'arrangements administratifs entre les autorités compétentes des deux États. Les arrangements pourraient, par exemple, préciser certaines des règles posées par les articles 1 er , 2, 5 et 8. Le règlement des différends s'effectue par la voie de la négociation diplomatique (article 22) .

La modification des dispositions concernant la désignation des ports et bureaux concernés s'effectue par échange de lettres. Chaque Partie peut demander l'ouverture de négociations pour réviser les dispositions du traité (article 23) .

L' article 24 du traité précise que chaque Partie se réserve le droit de prendre toute mesure qui serait nécessaire pour garantir sa souveraineté et sa sécurité.

Le traité, de façon classique, entrera en vigueur le premier jour du second mois suivant le dépôt du second instrument d'approbation. Il est conclu pour une durée indéterminée, chaque Partie ayant la faculté de le dénoncer à tout moment, sous réserve d'une notification par la voie diplomatique et d'un préavis de deux ans (article 25) .

Telles sont les principales observations qu'appelle le traité entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord relatif à la mise en oeuvre de contrôles frontaliers dans les ports maritimes de la Manche et de la mer du Nord des deux pays qui, comportant des dispositions de nature législative, est soumis au Parlement en vertu de l'article 53 de la Constitution.

PROJET DE LOI

Le Premier ministre,

Sur le rapport du ministre des affaires étrangères,

Vu l'article 39 de la Constitution,

Décrète :

Le présent projet de loi autorisant l'approbation du traité entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord relatif à la mise en oeuvre de contrôles frontaliers dans les ports maritimes de la Manche et de la mer du Nord des deux pays, délibéré en Conseil des ministres, après avis du Conseil d'État, sera présenté au Sénat par le ministre des affaires étrangères, qui sera chargé d'en exposer les motifs et d'en soutenir la discussion.

Article unique

Est autorisée l'approbation du traité entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord relatif à la mise en oeuvre de contrôles frontaliers dans les ports maritimes de la Manche et de la mer du Nord des deux pays, signé au Touquet le 4 février 2003, et dont le texte est annexé à la présente loi.

Fait à Paris, le 10 septembre 2003

Signé : JEAN-PIERRE RAFFARIN

Par le Premier ministre :

Le ministre des affaires étrangères,

Signé : DOMINIQUE DE VILLEPIN


T R A I T É
entre le Gouvernement de la République française
et le Gouvernement du Royaume-Uni
de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord
relatif à la mise en oeuvre de contrôles
frontaliers dans les ports maritimes de la Manche
et de la mer du Nord des deux pays,
signé au Touquet le 4 février 2003


T R A I T É
entre le Gouvernement de la République française
et le Gouvernement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord
relatif à la mise en oeuvre de contrôles frontaliers dans les ports maritimes
de la Manche et de la mer du Nord des deux pays

Le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord sont convenus des dispositions suivantes :

TITRE  I er
DISPOSITIONS GENERALES
Article 1 er

1.  Les parties contractantes prennent, dans le cadre du présent traité, les mesures nécessaires visant à faciliter l'exercice des contrôles frontaliers dans les ports maritimes de la Manche et de la mer du Nord situés sur le territoire de l'autre partie.
2.  A cette fin, les parties peuvent créer des bureaux à contrôles nationaux juxtaposés dans les zones de contrôles des ports maritimes de la Manche et de la mer du Nord des deux pays. Par conséquent, celles-ci autorisent les agents en poste de chaque Etat à remplir leur mission sur le territoire de l'autre Etat, dans le cadre du présent traité.
3.  La désignation des ports maritimes aux termes du présent traité, et la création, la modification ou le retrait des bureaux, des zones de contrôles et des zones restreintes dans les ports maritimes de chaque Etat sont déterminés par les autorités compétentes des deux pays.
4.  Les arrangements prévus par le paragraphe 3 sont dans un premier temps limités à l'exercice des contrôles frontaliers par les services d'immigration de chaque Etat dans les ports maritimes en question.
5.  Les arrangements prévus par le paragraphe 3, dans la mesure où ils concernent des organismes de contrôles juxtaposés expressément habilités à effectuer des missions de contrôles frontaliers aux termes d'un accord international, seront confirmés par l'échange de notes diplomatiques, sauf en cas de besoin opérationnel immédiat. Ceux-ci entreront en vigueur, selon le cas, à l'issue de l'accomplissement des formalités prévues par le droit national de chaque Etat. Là où existe un besoin opérationnel, les représentants locaux des autorités concernées pourront s'entendre pour mettre en oeuvre temporairement les modifications à la délimitation des zones de contrôles qui s'avèrent nécessaires. Tout arrangement de la sorte, entrera immédiatement en vigueur et sera consigné par écrit.

Article 2

Dans le présent traité, l'expression :
a) « Contrôle frontalier » désigne l'application par les parties signataires, au sein de la zone de contrôle, de l'ensemble des dispositions légales et réglementaires relatives aux contrôles et aux enquêtes en matière d'immigration.
b) « Etat de départ » désigne l'Etat sur le territoire duquel le contrôle de l'autre Etat est effectué.
c) « Etat d'arrivée » désigne l'autre Etat.
d) « Zones de contrôle » désigne la partie du territoire de l'Etat de départ dans laquelle les agents en poste de l'Etat d'arrivée sont habilités à exercer les contrôles.
e) Les « zones restreintes » désignent les espaces portuaires de la Manche et de la mer du Nord de chaque Etat soumis à des mesures de sûreté spéciales.
f) Les « agents en poste » désignent les agents chargés par chaque gouvernement des contrôles frontaliers.
g) « Bureaux » désignent les bureaux à contrôles nationaux juxtaposés y compris les cabines de contrôle et les autres installations servant directement aux missions de contrôles.
h) « Ports maritimes » désignent les ports commerciaux de la Manche et de la mer du Nord des deux pays à partir desquels les personnes voyagent par mer à destination de l'autre Etat.

Article 3

1.  Au sein de la zone de contrôle, chaque gouvernement autorise les agents en poste de l'autre Etat à agir sur son territoire conformément aux pouvoirs qui leur sont conférés en matière de contrôles frontaliers.
2.  La réglementation de l'Etat d'arrivée relative aux contrôles frontaliers est applicable dans la zone de contrôle comme sur son propre territoire. Cette réglementation est appliquée par les agents de l'Etat d'arrivée de la même façon et avec les mêmes conséquences que dans leur propre Etat.
3.  Les infractions à la réglementation relative aux contrôles frontaliers de l'Etat d'arrivée constatés dans la zone de contrôle de l'Etat de départ sont sanctionnées par le droit de l'Etat d'arrivée comme si elles avaient été commises sur ce territoire.
4.  Lorsqu'une infraction d'une autre nature est commise dans la zone de contrôle de l'Etat de départ, cet Etat est compétent.

Article 4

1.  Les contrôles d'immigration effectués par les autorités de l'Etat de départ ont pour but de vérifier que la personne peut quitter le territoire de cet Etat.
2.  Les contrôles d'immigration effectués par les autorités de l'Etat d'arrivée ont pour but de vérifier que les personnes quittant l'Etat de départ remplissent les conditions et les obligations en matière de contrôle frontalier fixées par l'Etat d'arrivée et peuvent être autorisées à voyager à destination de l'Etat d'arrivée.
3.  Les autorités de l'Etat de départ et les autorités de l'Etat d'arrivée effectuent leurs contrôles en application du présent traité, de leurs lois et règlements et des engagements internationaux auxquels elles sont parties.
4.  Les contrôles visés par les précédents paragraphes ne doivent pas gêner les contrôles douaniers et de sûreté effectués par l'Etat de départ.

Article 5

1.  Les agents de l'Etat d'arrivée peuvent arrêter et retenir pour interrogatoire dans la zone de contrôle les personnes qui font l'objet d'un examen à des fins de contrôles de l'immigration ou celles concernant lesquelles il existe des motifs raisonnables de soupçonner qu'elles ont commis un acte enfreignant la réglementation relative aux contrôles frontaliers. Pour ce faire, les agents de l'Etat d'arrivée chargés des contrôles peuvent faire appel à l'assistance d'agents de l'Etat d'arrivée appartenant à des administrations chargées d'enquête. Ceux-ci sont également autorisés à conduire de telles personnes vers le territoire de l'Etat d'arrivée.
2.  Toutefois, sauf dans des circonstances exceptionnelles, nul ne peut être retenu plus de vingt-quatre heures dans les locaux réservés, dans l'Etat de départ, aux contrôles frontaliers de l'Etat d'arrivée. Cette rétention doit avoir lieu dans les conditions et selon les modalités prévues par la législation de l'Etat d'arrivée.
3.  Dans des circonstances exceptionnelles, le délai de vingt-quatre heures pourra être prolongé d'une nouvelle durée de vingt-quatre heures dans les conditions prévues par la législation de l'Etat d'arrivée. Cette extension de la durée de rétention sera notifiée aux autorités de l'Etat de départ.

Article 6

1.  Tous les contrôles frontaliers de l'Etat de départ doivent être effectués avant les contrôles de l'Etat d'arrivée.
2.  Les agents en poste de l'Etat d'arrivée ne sont pas habilités à entamer ces contrôles avant la fin des contrôles de l'Etat de départ. Toute forme de renonciation à de tels contrôles sera considérée comme un contrôle.
3.  Les autorités de l'Etat de départ ne peuvent plus effectuer leur contrôle une fois que les agents en poste de l'Etat d'arrivée ont entamé leurs opérations de contrôle. Exceptionnellement, les opérations relatives au contrôle de sortie peuvent être reprises avec le consentement des agents en poste de l'Etat d'arrivée.
4.  En cas de modification au cours des contrôles de l'ordre prévu par les paragraphes 1 à 3 ci-dessus pour des raisons pratiques, les agents en poste de l'Etat d'arrivée ne peuvent procéder à des arrestations qu'au terme des contrôles de l'Etat de départ. Si les agents de l'Etat d'arrivée souhaitent prendre de telles mesures, ceux-ci doivent présenter les personnes concernées aux agents en poste de l'Etat de départ, afin que ceux-ci effectuent les contrôles de sortie. Ces derniers ont priorité s'ils souhaitent procéder à des arrestations.
5.  Exceptionnellement, les contrôles frontaliers peuvent être effectués par l'Etat d'arrivée dans le port maritime se situant sur son propre territoire lorsque ces contrôles n'ont pas été possibles dans l'Etat de départ.

Article 7

Si des personnes se voient refuser le droit d'entrée par l'Etat d'arrivée ou si des personnes décident de ne pas se soumettre aux contrôles frontaliers de l'Etat d'arrivée, les autorités de l'Etat de départ ne peuvent refuser le retour sur leur territoire de ces personnes. Les autorités de l'Etat de départ peuvent toutefois prendre des mesures à cet égard, conformément à leur droit national et sans imposer d'obligations à l'autre Etat.

Article 8

1.  Sous réserve de l'application d'autres accords internationaux, et conformément au droit national applicable, les autorités des deux Etats doivent dans toute la mesure du possible coopérer, s'entraider et coordonner leurs activités, en s'acquittant de leurs obligations relatives au fonctionnement des bureaux, notamment en ce qui concerne :
a) Les contrôles frontaliers respectifs ;
b) La prévention et le dépistage des infractions aux dispositions légales et réglementaires de chaque Etat relatives aux contrôles frontaliers ;
c) L'échange d'informations pouvant être utiles à l'exécution de leurs obligations ;
d) Les enquêtes sur les infractions relatives à l'immigration.
2.  Sur la demande des agents en poste de l'Etat d'arrivée, les autorités compétentes de l'Etat de départ interrogent témoins et experts, procédent aux investigations et transmettent les résultats des enquêtes. Cette assistance est limitée aux infractions en matière de contrôles frontaliers commises et constituées dans la zone de contrôle et constatées pendant ou immédiatement après leur commission.

Article 9

Lorsqu'une personne émet une demande d'asile ou sollicite toute autre forme de protection prévue par le droit international ou le droit national de l'Etat de départ au cours d'un contrôle effectué dans l'Etat de départ par les agents en poste de l'Etat d'arrivée, la demande est examinée par les autorités de l'Etat de départ conformément à la procédure nationale de cet Etat.
Les mêmes dispositions sont applicables lorsque la demande est faite après l'accomplissement des formalités d'un tel contrôle et avant le départ du navire. Lorsque la demande est faite après le départ du navire, celle-ci est examinée par l'Etat d'arrivée conformément à son droit national.

TITRE  II
AGENTS
Article 10

1.  Chaque gouvernement désigne les agents parmi les autorités ou les personnes qui, sur son territoire, sont chargés de l'exercice des contrôles frontaliers.
2.  Chaque gouvernement informe l'autre de telles désignations et de tout changement les concernant.
3.  Les autorités de l'Etat de départ accordent aux agents en poste de l'Etat d'arrivée la même protection et la même assistance dans l'exercice de leurs fonctions que celles conférées à leurs propres agents.
4.  Les dispositions de droit pénal relatives à la protection des agents durant l'exercice de leur mission en vigueur dans l'Etat de départ sont de la même façon applicables à la sanction des crimes et délits commis à l'encontre des agents en poste de l'Etat d'arrivée durant l'exercice de leur mission.
5.  Les dispositions de droit pénal en vigueur dans l'Etat d'arrivée, relatives à la protection de ses agents en poste et de leurs biens, sont applicables dans la zone de contrôle.

Article 11

Sous réserve des dispositions des paragraphes 2 et 3 de l'article 14, les régimes prévus par la législation de l'Etat de départ en matière de droit civil et pénal s'appliqueront aux agents en poste de l'Etat d'arrivée.

Article 12

1.  Les agents en poste de l'Etat d'arrivée auxquels il est fait appel pour exercer leur mission dans la zone de contrôle en application du présent traité sont habilités à franchir la frontière et à se rendre sur leur lieu de travail en justifiant de leur identité et de leur titre sur présentation de documents officiels.
2.  Les autorités compétentes de l'Etat de départ se réservent le droit de demander aux autorités de l'Etat d'arrivée le rappel de certains agents.

Article 13

Les agents en poste de l'Etat d'arrivée auxquels il est fait appel pour exercer leur mission dans l'Etat de départ en application du présent traité peuvent porter leur uniforme national ou un symbole distinctif visible.
Ils peuvent, dans la zone de contrôle, porter leur arme de service. Le port et l'utilisation de ces armes seront réglementés dans un accord distinct conclu par les parties signataires.

Article 14

1.  Les agents en poste de l'Etat d'arrivée relèvent exclusivement des autorités sous le commandement desquelles ils sont placés en ce qui concerne leurs activités officielles, leurs rapports et la discipline.
2.  Les demandes d'indemnisation de préjudices ou de dommages causés dans l'Etat de départ par ou aux agents de l'Etat d'arrivée dans l'exercice de leurs fonctions sont soumises à la loi et relèvent de la compétence des juridictions de l'Etat d'arrivée, comme si les faits à l'origine de la demande avaient eu lieu dans cet Etat.
3.  Les agents de l'Etat d'arrivée peuvent être poursuivis par les autorités de l'Etat de départ pour toute infraction qui n'est pas commise dans l'exercice de leurs fonctions.
4.  Les infractions commises dans l'exercice de leurs fonctions et dans la zone de contrôle ne peuvent être poursuivies par les autorités de l'Etat de départ.
5.  Les autorités judiciaires ou la police de l'Etat de départ ayant procédé à l'enregistrement de la plainte ou réuni les faits la concernant communiquent toutes les informations et les pièces qu'ils détiennent aux autorités compétentes de l'autre Etat, afin d'introduire éventuellement des poursuites, conformément au droit national en vigueur de cet Etat.

Article 15

Les agents en poste de l'Etat d'arrivée qui, en application du présent traité, exercent leurs fonctions dans l'Etat de départ doivent, au regard des conditions se rapportant à leur domicile, régulariser leur statut auprès des autorités compétentes conformément aux dispositions relatives au séjour des ressortissants étrangers.

TITRE  III
BUREAUX
Article 16

1.  Les autorités compétentes déterminent par accord mutuel les installations, les logements de service et le matériel nécessaires à la mise en oeuvre dans les zones de contrôles de l'exercice des contrôles frontaliers. La responsabilité de la mise en place des installations, des logements de service et du matériel incombe à l'Etat de départ. Les demandes faites par l'Etat d'arrivée concernant les installations sont limitées au strict nécessaire à l'exercice effectif de leurs fonctions.
2.  Les autorités de l'Etat d'arrivée peuvent utiliser dans l'Etat de départ les logements de service, les installations et le matériel nécessaires à l'exécution de leur mission. Les heures de service et l'attribution des bureaux sont déterminées par accord mutuel des deux administrations compétentes.

Article 17

Les locaux à usage de bureaux de l'Etat d'arrivée sont identifiables par les inscriptions et les insignes officiels de cet Etat.

Article 18

Les agents en poste de l'Etat d'arrivée sont chargés du maintien de la discipline dans les locaux alloués à leur usage exclusif et de l'expulsion des personnes à l'origine de graves perturbations. Ils peuvent, le cas échéant, demander l'assistance des agents de l'Etat de départ à cette fin.

Article 19

Sauf dispositions contraires adoptées d'un accord mutuel par les administrations compétentes, les interdictions ou les restrictions aux importations et aux exportations ne s'appliquent pas aux biens nécessaires au bon fonctionnement des bureaux ou aux biens que les agents de l'Etat d'arrivée demandent durant leur service dans l'Etat de départ.
Ceci s'applique également aux véhicules de service privés que les agents en poste utilisent dans l'exercice de leurs fonctions dans l'Etat de départ ou pour leurs déplacements entre leur domicile et leur lieu de travail.

Article 20

1.  L'Etat de départ permet l'installation des téléphones nécessaires au bon fonctionnement des bureaux de l'Etat d'arrivée dans l'Etat de départ, leur connexion aux installations correspondantes de l'Etat d'arrivée ainsi que l'échange de communications directes avec ces bureaux. Ces communications sont réputées être des communications internes à l'Etat d'arrivée.
2.  Les gouvernements des deux Etats acceptent d'accorder, pour les mêmes fins et dans la mesure du possible, toute installation se rapportant à l'utilisation d'autres moyens de communication.
3.  En outre, les réglementations des deux Etats relatives à la construction et à l'utilisation d'installations de communication s'appliquent.
4.  L'Etat de départ permet également l'installation et l'utilisation de ces installations et l'utilisation des installations informatiques nécessaires au bon fonctionnement des bureaux de l'Etat d'arrivée au sein de l'Etat de départ, leur liaison aux installations informatiques correspondantes de l'Etat d'arrivée ainsi que l'échange de communications directes entre les installations exclusivement réservées au service. Les communications électroniques sont réputées être des communications internes à l'Etat d'arrivée.
5.  L'Etat d'arrivée est enfin autorisé à utiliser des dispositifs et des logiciels de codage électronique dans l'Etat de départ afin de garantir le bon fonctionnement des installations de l'Etat d'arrivée qui y sont utilisées et leur communication avec les installations précitées de l'Etat d'arrivée.

Article 21

Les lettres et les paquets de service ainsi que les biens entrant et sortant des bureaux de l'Etat d'arrivée peuvent être transportés par les agents en poste de cet Etat sans être confiés aux services postaux. Ces colis doivent être envoyés sous le sceau officiel du service concerné.

TITRE  IV
DISPOSITIONS FINALES
Article 22

1.  Les procédures de mise en oeuvre du présent traité peuvent, dans la mesure du nécessaire, faire l'objet d'accords techniques ou administratifs entre les autorités compétentes des deux Etats.
2.  Tout différend relatif à l'interprétation ou l'application du présent traité sera réglé par la négociation entre les deux gouvernements.

Article 23

1.  Chaque partie signataire peut mettre un terme aux arrangements prévus par l'article 1 er (paragraphe 3) dans les délais et aux conditions faisant l'objet d'un accord entre les autorités compétentes par échange de lettres.
2.  Les parties signataires peuvent, par échange de notes, faire les modifications au présent traité qu'elles jugent nécessaires. Toutefois, les dispositions du présent paragraphe ne s'appliquent pas aux clauses du présent traité qui, en vertu des dispositions constitutionnelles des Etats, nécessitent, pour leur mise en oeuvre, l'approbation des autorités législatives.
3.  Chaque gouvernement peut à tout moment demander l'ouverture de consultations dans le but de réviser, au regard de nouvelles circonstances ou de nouveaux besoins, les dispositions du présent traité.

Article 24

Chacune des parties contractantes se réserve le droit de prendre toute mesure nécessaire à la sauvegarde de sa souveraineté ou de sa sécurité.

Article 25

1.  Chaque partie informera l'autre de l'accomplissement des procédures internes requises pour l'entrée en vigueur du présent traité, qui entrera en vigueur le premier jour du second mois suivant la réception de la dernière notification.
2.  Le présent traité est conclu pour une durée illimitée et chaque partie peut y mettre un terme à tout moment en en informant l'autre par écrit par la voie diplomatique, lequel prendra effet deux ans après la date de ladite notification.
En foi de quoi les soussignés, dûment habilités à cet effet par leur gouvernement respectif, ont signé le présent traité.
Fait au Touquet, le 4 février 2003, en deux exemplaires, en langues française et anglaise, les deux textes faisant également foi.

Pour le Gouvernement
de la République française :
Nicolas  Sarkozy
Ministre de l'intérieur,
de la sécurité intérieure
et des libertés locales
Pour le Gouvernement
du Royaume-Uni
de Grande-Bretagne
et d'Irlande du Nord :
David  Blunkett
Secrétaire au Home Office


(cf. note 1)

NOTE (S) :

(1) TCA . - Imprimerie des Journaux officiels, Paris

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