N° 424 SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998

Annexe au procès-verbal de la séance du 6 mai 1998

PROJET DE LOI

autorisant la ratification de la convention sur l'interdiction de l'emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction,

PRÉSENTÉ

au nom de M. LIONEL JOSPIN,

Premier ministre,

par M. HUBERT VÉDRINE,

Ministre des affaires étrangères.

(Renvoyé à la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)

Traités et conventions. - Mines

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La convention sur l'interdiction de l'emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction a été signée à Ottawa le 3 décembre 1997.

I. - Le contexte de la négociation

L'adoption, le 3 mai 1996, du Protocole II modifié annexé à la Convention de 1980 sur l'interdiction ou la limitation de l'emploi de certaines armes classiques avait marqué, suite à une initiative française, un premier progrès significatif sur la voie de l'interdiction des mines antipersonnel. Ce texte autorisait encore cependant, dans des conditions strictement réglementées, l'utilisation des mines antipersonnel.

C'est pour tenir compte de cette limite qu'à l'initiative du Canada, l'élaboration d'un accord international d'interdiction totale des mines antipersonnel a été envisagée pour la première fois en octobre 1996. Après la Conférence de Bruxelles, qui s'est tenue du 23 au 27 juin 1997, une seconde conférence organisée à Oslo en septembre 1997 a permis d'achever l'élaboration du texte de cette convention. A l'issue de cette conférence, 98 Etats ont approuvé le texte définitif de la convention d'interdiction totale des mines antipersonnel. La France a, tout au long de ces négociations, participé activement à l'élaboration de ce texte et fait valoir son attachement à l'adoption d'une norme d'interdiction totale, sans exceptions ni ambiguïté.

Réunis à Ottawa les 3 et 4 décembre 1997, 121 pays ont finalement signé cet accord, à l'exception notable des Etats-Unis, de la Russie, de la Chine et de l'Inde.

II - Les principales dispositions de la Convention d'Ottawa

La Convention signée à Ottawa pose désormais à rencontre des mines antipersonnel une norme d'interdiction totale. L'article 1 er de la Convention interdit l'emploi, la mise au point, la production, le stockage et le transfert des mines antipersonnel. Il interdit également d'assister, d'encourager ou d'inciter, de quelque manière, quiconque à s'engager dans toute activité interdite à un Etat partie en vertu de la Convention. Seules deux exceptions sont prévues en matière de stockage et de transfert à des fins d'entraînement aux techniques de détection et de déminage et en matière de transfert à des fins de destruction.

La Convention impose aux Etats Parties une obligation de destruction de la totalité des mines antipersonnel stockées ou déjà mises en place sur leur territoire. Les délais retenus sont de quatre ans pour la destruction des stocks et de dix ans pour le déminage des zones minées.

Le respect de ces obligations est assuré par la mise en place d'un régime de transparence fondé sur des déclarations annuelles et d'un mécanisme de vérification des dispositions de la Convention. Ce dispositif autorise, en cas d'allégation de violation de la Convention, l'envoi sur le terrain de missions d'experts chargées d'enquêter sur le respect par l'Etat incriminé des dispositions du traité d'Ottawa.

Le principe de mesures nationales, notamment pénales, en cas de violation des dispositions de la Convention est également retenu.

La Convention d'Ottawa contient, par ailleurs, des dispositions visant à renforcer substantiellement la coopération et l'assistance internationale dans le domaine du déminage humanitaire. Aux termes de la Convention d'Ottawa, chaque Etat « en mesure de le faire », fournira une assistance pour les soins aux victimes des mines ainsi qu'une assistance au déminage et pour la destruction des stocks de mines antipersonnel.

Un mécanisme de consultation régulière des Etats Parties à la Convention est établi sous la forme d'assemblées annuelles et de conférences d'examen organisées sur une base quinquennale.

III. - Intérêt de la Convention d'Ottawa pour la France

La signature de la Convention d'Ottawa par plus de 120 pays fait désormais de cet instrument la norme humanitaire de référence s'agissant de l'interdiction des mines antipersonnel. A ce titre, elle doit être considérée comme un indéniable succès par un pays qui, comme la France, est engagé depuis de nombreuses années dans la lutte contre ce type d'armes.

Les principales dispositions de la Convention d'Ottawa sont d'ores et déjà compatibles avec les positions adoptées par la France dans le domaine des mines antipersonnel. La France a, en effet, renoncé, en 1993, à exporter des mines antipersonnel. Ce moratoire a été étendu, en 1995, à la production de ces armes. S'agissant de l'emploi, le Gouvernement français a annoncé, le 23 juin 1997, son intention de renoncer sans exception à l'emploi des mines antipersonnel dès l'entrée en vigueur d'un traité d'interdiction efficace et, au plus tard, à la fin de l'année 1999.

Enfin, la France a d'ores et déjà commencé les opérations de destruction de son stock de mines antipersonnel. Le Gouvernement français s'est engagé à ce que ces opérations soient achevées dans le courant de l'année 2000.

La France prendra, au plan national et notamment dans le domaine pénal, les dispositions nécessaires pour que la Convention d'Ottawa soit pleinement applicable dans notre ordre juridique interne dès son entrée en vigueur.

La France poursuivra également ses efforts, notamment à la Conférence du désarmement, pour assurer l'universalité de l'application des dispositions de la Convention d'Ottawa.

Telles sont les principales observations qu'appelle la Convention sur l'interdiction de l'emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction qui est soumise au Parlement en vertu de l'article 53 de la Constitution.

PROJET DE LOI

Le Premier ministre,

Sur le rapport du ministre des affaires étrangères,

Vu l'article 39 de la Constitution,

Décrète:

Le présent projet de loi autorisant la ratification de la convention sur l'interdiction de l'emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction, délibéré en Conseil des ministres après avis du Conseil d'Etat, sera présenté au Sénat par le ministre des affaires étrangères, qui sera chargé d'en exposer les motifs et d'en soutenir la discussion.

Article unique

Est autorisée la ratification de la convention sur l'interdiction de l'emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction, signée à Ottawa le 3 décembre 1997, et dont le texte est annexé à la présente loi.

Fait à Paris, le 6 mai 1998.

Signé : LIONEL JOSPIN

par le Premier ministre :

Le ministre des affaires étrangères,

Signé: HUBERT VÉDRINE

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page