Création de l'autorité de contrôle technique de l'environnement sonore aéroportuaire

N° 8

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999

Rattaché pour ordre au procès-verbal de la séance du 7 octobre 1998

Enregistré à la Présidence du Sénat le 8 octobre 1998

PROJET DE LOI

portant création de l' autorité de contrôle technique de l' environnement sonore aéroportuaire,

PRÉSENTÉ

au nom de M. LIONEL JOSPIN

Premier ministre,

par M. JEAN-CLAUDE GAYSSOT

ministre de l'équipement, des transports et du logement.

(Renvoyé à la commission des Affaires économiques et du Plan, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement).

Environnement. - Aérodrome - Bruit - Transport aérien - Code de l'aviation civile - Code de l'urbanisme.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La concertation menée à l'occasion du projet d'extension de l'aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle a montré que le développement des infrastructures, nécessaire à la croissance du transport aérien, ne pouvait être mis en oeuvre que dans le cadre d'une politique de transparence et de concertation avec les riverains notamment sur le dispositif de lutte contre les nuisances sonores.

A cet effet, le ministre de l'équipement, des transports et du logement s'est engagé à ce qu'une autorité indépendante, créée par la loi, soit mise en place pour intervenir dans la mesure et le contrôle de ces nuisances. Cette autorité aura une compétence générale pour émettre des recommandations sur toute question relative à la mesure du bruit, à la maîtrise des nuisances sonores du transport aérien et à la limitation de leur impact sur l'environnement.

Le dispositif poursuit deux objectifs principaux :

Le premier est de mettre en place une véritable haute autorité en matière de nuisances sonores aéroportuaires, dont l'indépendance et l'impartialité seraient incontestables.

La nouvelle " Autorité de contrôle technique de l'environnement sonore aéroportuaire " est composée de membres désignés par le président de l'Assemblée nationale et par le président du Sénat, et d'experts en matière de bruit ou d'aéronautique. L'indépendance des membres de cette institution serait garantie par une durée de mandat de 6 ans et la mise à disposition d'un budget. Elle serait renforcée par des clauses de non renouvellement, d'absence de possibilité de révocation et d'incompatibilité du mandat avec certaines fonctions.

Le second est de doter cette autorité d'un pouvoir d'élaboration de prescriptions techniques et parallèlement, d'un devoir d'information des riverains, pour les principaux sites aéroportuaires, qui sont visés par la loi du
31 décembre 1992 relative à la lutte contre le bruit c'est-à-dire Paris-Charles-de-Gaulle, Paris-Orly, Nice, Marseille, Toulouse, Lyon-Satolas, Mulhouse, Bordeaux, Strasbourg.

Il lui appartiendrait notamment de définir ces prescriptions et d'homologuer les réseaux de mesures. Le devoir d'information sera mis en oeuvre par la diffusion très large des mesures de bruit enregistrées, la mise en oeuvre d'un plan de communication et la publication d'un rapport annuel. L'autorité aurait également une mission de conseil et d'avis, notamment lors de l'établissement des plans de gêne sonore et des plans d'exposition au bruit.

De plus, l'exercice de sa mission de contrôle serait conforté par un pouvoir d'investigation qui lui permettrait d'avoir accès aux stations de mesure et à tous les documents qui sont en relation avec les nuisances sonores, tels que les résultats des mesures, les modes d'exploitation des compagnies, les procédures de navigation aérienne.

En outre, il convient d'affirmer et de renforcer le rôle des commissions consultatives de l'environnement notamment en les dotant d'une instance permanente de travail, le comité permanent, et de moyens de fonctionnement correspondants.

Enfin, pour les principaux sites aéroportuaires, il est proposé de rendre de droit la création de cette commission et de lui confier un pouvoir de saisine de l'autorité indépendante pour contrôler le respect des engagements pris par les différentes parties intéressées à l'exploitation de l'aérodrome en vue d'assurer la maîtrise des nuisances sonores.

Les dispositions qui précèdent nécessitent la modification de trois textes législatifs :

- la loi n° 85-696 du 11 juillet 1985 relative à l'urbanisme au voisinage des aérodromes dont l'article 2 serait complété pour conforter le rôle des commissions consultatives de l'environnement ;

- la loi n° 92-1444 du 31 décembre 1992 relative à la lutte contre le bruit, dont le premier alinéa de l'article 7 doit être modifié pour préciser la notion de vols touristiques circulaires ;

- l'article L. 147-3 du code de l'urbanisme, pour conférer à l'autorité indépendante une compétence pour avis sur les projets de plan d'exposition au bruit pour les aérodromes visés à l'article 16 de la loi du 31 décembre 1992 relative à la lutte contre le bruit.

PROJET DE LOI

Le Premier ministre,

Sur le rapport du ministre de l'équipement, des transports et du logement,

Vu l'article 39 de la Constitution,

Décrète :

Le présent projet de loi, portant création de l'autorité de contrôle technique de l'environnement sonore aéroportuaire, délibéré en Conseil des ministres après avis du Conseil d'Etat, sera présenté au Sénat par le ministre de l'équipement, des transports et du logement, qui sera chargé d'en exposer les motifs et d'en soutenir la discussion.

Article 1er

Il est ajouté dans le titre II, du livre II du code de l'aviation civile (première partie : législative), un chapitre VII " Environnement des aérodromes " ainsi rédigé :

" CHAPITRE VII

" Environnement des aérodromes

" Art. L. 227-1. - Il est institué une autorité administrative indépendante, dénommée Autorité de contrôle technique de l'environnement sonore aéroportuaire, composée de sept membres :

" 1° Un président nommé par décret pris en Conseil des ministres ;

" 2° Deux membres respectivement désignés par le président de l'Assemblée nationale et par le président du Sénat ;

" 3° Deux personnes compétentes en matière d'acoustique et de gêne sonore ;

" 4° Deux personnes compétentes en matière d'aéronautique et de navigation aérienne.

" Les membres autres que le président sont nommés par décret du Premier ministre.

" Le mandat des membres de l'autorité est de six ans. Il n'est pas révocable.

" Les membres autres que le président sont renouvelés par moitié tous les trois ans.

" Si l'un des membres de l'autorité ne peut exercer son mandat jusqu'à son terme, le membre nommé pour le remplacer exerce ses fonctions pour la durée du mandat restant à courir.

" Le mandat des membres de l'autorité n'est pas renouvelable. Toutefois, cette règle n'est pas applicable aux membres dont le mandat, en application de l'alinéa ci-dessus, n'a pas excédé deux ans.

" Pour la constitution initiale de l'autorité, le mandat de l'un des deux membres dont le mode de nomination est prévu aux 2°, 3° et 4° est fixé à trois ans. La détermination des sièges correspondants se fait par tirage au sort postérieurement à la désignation de leurs titulaires.

" Art. L. 227-2. - La qualité de membre de l'autorité est incompatible avec l'exercice de tout mandat électif, de toute activité professionnelle publique ou privée et de toute responsabilité associative, donnant à son titulaire un intérêt direct ou indirect à l'activité des aéroports.

" Art. L. 227-3. - L'Autorité de contrôle technique de l'environnement sonore aéroportuaire émet, à son initiative ou sur saisine du ministre chargé de l'aviation civile ou du ministre chargé de l'environnement, des recommandations sur toute question relative à la mesure du bruit, à la maîtrise des nuisances sonores du transport aérien et à la limitation de leur impact sur l'environnement.

" Elle est habilitée à saisir l'autorité administrative compétente de tout manquement aux règles fixées pour la protection de l'environnement des aérodromes, passible d'une sanction administrative.

" Art. L. 227-4. - Pour les aérodromes visés à l'article 16 de la loi
n° 92-1444 du 31 décembre 1992 relative à la lutte contre le bruit, l'Autorité de contrôle technique de l'environnement sonore aéroportuaire :

" 1° Définit :

"  - les prescriptions techniques applicables, en conformité avec les normes internationales, aux stations de mesure de bruit ;

" - les prescriptions concernant le nombre et l'emplacement de ces stations pour chacun de ces aérodromes ;

" - les prescriptions d'exploitation du réseau de stations.

" Ces prescriptions sont, après homologation par arrêté des ministres chargés de l'environnement et de l'aviation civile, publiées au Journal officiel de la République Française. La mise en place, l'entretien et le renouvellement de ces stations sont assurés par l'exploitant d'aérodrome ;

" 2° S'assure du respect de ces prescriptions par l'exploitant de l'aérodrome. L'autorité peut mettre l'exploitant de l'aérodrome en demeure de respecter les obligations qui lui sont imposées en vertu du 1° du présent article dans un délai qu'elle fixe. Si à l'expiration de ce délai, elle constate que l'exploitant ne s'est pas conformé à la mise en demeure qui lui a été adressée, elle peut faire procéder elle même aux travaux et réalisations nécessaires. Ces travaux sont effectués aux frais, risques et périls de l'exploitant ;

" 3° Etablit un programme de diffusion auprès du public, ou de toute personne physique ou morale qui en fait la demande, des informations sur le bruit dû au transport aérien, et en particulier des enregistrements qui proviennent des réseaux de mesure de bruit et veille à la mise en oeuvre de ce programme ;

" 4° S'assure, le cas échéant, de la fiabilité des conditions dans lesquelles ces informations ont été recueillies auprès des exploitants d'aérodromes et des transporteurs aériens ;

" 5° Est consultée sur le projet de plan de gêne sonore visé à
l'article 19-II de la loi précitée et sur le projet de plan d'exposition au bruit ;

" 6° Est consultée sur les projets de textes réglementaires fixant pour les aérodromes concernés les mesures visant à assurer la protection de leur environnement sonore et sur les projets d'élaboration ou de modification des procédures de départ, d'attente et d'approche aux instruments des mêmes aérodromes ;

" 7° Contrôle, à son initiative ou sur saisine de la commission consultative de l'environnement mentionnée à l'article 2 de la loi n° 85-696 du
11 juillet 1985 relative à l'urbanisme au voisinage des aérodromes, le respect des engagements pris par les différentes parties intéressées à l'exploitation de l'aérodrome en vue d'assurer la maîtrise des nuisances sonores liées à cette exploitation.

" Art. L. 227-5. - Pour l'exercice de ses missions visées aux articles
L. 227-3 et L. 227-4, l'Autorité de contrôle technique de l'environnement sonore aéroportuaire peut charger un ou plusieurs de ses membres ou de ses agents, ou des experts qu'elle aura mandatés, de procéder à des vérifications sur place ou de se faire communiquer tous renseignements et documents utiles à ses missions.

" Les autorités publiques, les agents publics, les exploitants d'aérodromes et les transporteurs aériens ne peuvent s'opposer à l'action de l'autorité pour quelque motif que ce soit et doivent prendre toutes mesures utiles pour la faciliter.

" Art. L. 227-6. - L'Autorité de contrôle technique de l'environnement sonore aéroportuaire établit chaque année un rapport rendant compte de son activité. Ce rapport est remis au Gouvernement et au Parlement. Il est rendu public.

" Art. L. 227-7. - Les crédits nécessaires au fonctionnement de l'Autorité de contrôle technique de l'environnement sonore aéroportuaire sont inscrits au budget général de l'Etat sur proposition du ministre chargé de l'aviation civile.

" Les dispositions de la loi du 10 août 1922 relative à l'organisation du contrôle des dépenses engagées ne sont pas applicables à leur gestion.

" Le président de l'autorité est ordonnateur des dépenses. Il présente les comptes de l'autorité au contrôle de la Cour des comptes.

" Art. L. 227-8 . - L'Autorité de contrôle technique de l'environnement sonore aéroportuaire dispose de services qui sont placés sous l'autorité de son président.

" L'autorité établit son règlement intérieur. "

Article 2

I. L'article 2 de la loi du 11 juillet 1985 précitée est modifié ainsi qu'il suit :

- l'alinéa premier est complété par la phrase suivante :

" La création est de droit, également, pour les aérodromes mentionnés à l'article 16 de la loi n° 92-1444 du 31 décembre 1992 relative à la lutte contre le bruit."

- le deuxième alinéa est complété par la phrase suivante :

" Elle peut également, de sa propre initiative, émettre des recommandations sur ces questions. "

- il est inséré après le deuxième alinéa, trois alinéas nouveaux ainsi rédigés :

" Les moyens de fonctionnement de la commission sont mis à sa disposition par l'exploitant de l'aérodrome dans les conditions prévues par le décret mentionné ci-après.

" La commission peut créer en son sein un comité permanent qui exerce les compétences prévues à l'alinéa 2 du présent article.

" La commission mentionnée à l'article 19 - II de la loi du 31 décembre 1992 précitée est constituée au sein de la commission consultative de l'environnement. "

II. Le troisième alinéa de l'article 19 - II de la loi du
31 décembre 1992 précitée est remplacé par les dispositions suivantes : " La composition et les règles de fonctionnement de cette commission sont définies par décret en Conseil d'Etat. "

Article 3

Le premier alinéa de l'article 7 de la loi du 31 décembre 1992 précitée est remplacé par les dispositions suivantes :

" En vue de limiter les nuisances résultant du trafic d'hélicoptères dans les zones à forte densité de population, il est interdit d'effectuer des vols d'entraînement au départ ou à destination d'aérodromes situés dans ces zones ainsi que, au départ des mêmes aérodromes, des vols touristiques circulaires sans escale ou avec escale de moins d'une heure. "

Article 4

Le premier alinéa de l'article L. 147-3 du code de l'urbanisme est ainsi rédigé :

" Pour l'application des prescriptions édictées par le présent chapitre, un plan d'exposition au bruit est établi pour chacun des aérodromes mentionnés à l'article L. 147-2. Ce plan est établi par l'autorité administrative, après consultation :

" - des communes intéressées ;

" - de la commission consultative de l'environnement concernée lorsqu'elle existe ;

" - de l'Autorité de contrôle technique de l'environnement sonore aéroportuaire pour les aérodromes visés à l'article 16 de la loi n° 92-1444 du
31 décembre 1992 relative à la lutte contre le bruit. "

Fait à Paris, le 7 octobre 1998

Signé : LIONEL JOSPIN

Par le Premier ministre :

Le ministre de l'équipement, des transports et du logement,

Signé : JEAN-CLAUDE GAYSSOT

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